Aller au contenu principal

Décisions | Tribunal administratif de première instance

1 resultats
A/334/2024

JTAPI/100/2024 du 07.02.2024 ( MC ) , ADMIS

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION;PROLONGATION
Normes : LEI.79.al1; Cst..36; Cst..5.al2; LEI.80; LEI.96; LEI.76.al4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/334/2024 MC

JTAPI/100/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 7 février 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Sophie BOBILLIER, avocate

 

contre

 

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1994 et originaire d'Algérie, fait l’objet d’une décision de renvoi de Suisse, prise par le secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM) suite au rejet de sa demande d’asile déposée le 29 mai 2015. Cette décision est entrée en force le 24 juillet 2017. La prise en charge et l'exécution de son renvoi ont été confiées au canton de Genève.

2.             Depuis son arrivée en Suisse en 2015, A______ a été condamné :

- le 8 octobre 2015, par ordonnance pénale du Ministère public du canton de Genève (ci-après : MP), à une peine pécuniaire de trente jours-amende avec sursis pendant trois ans pour violation de domicile (art. 186 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937- CP - RS 311.0) ;

- le 5 juin 2016, par ordonnance pénale du MP, à une peine pécuniaire de quarante jours-amende pour violation de domicile (art. 186 CP), vol (art. 139 al. 1 CP), et infractions d'importance mineure (appropriation illégitime, 172ter CP) ;

- le 14 juillet 2016, par ordonnance pénale du MP, à une peine privative de liberté de quarante-cinq jours pour tentative de vol (art. 139 al. 1CP) et dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP) ;

- le 29 novembre 2016 par ordonnance pénale du MP, à une peine pécuniaire de quarante jours-amende pour vol (art. 139 al. 1 CP) ;

- le 1er juin 2018 par ordonnance pénale du MP, à une peine privative pécuniaire de soixante jours-amende pour séjour illégal (art. 115 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr) ;

- le 13 janvier 2020 par le Ministère public du canton du Valais à une peine pécuniaire de trente jours-amende pour séjour illégal et entrée illégale ;

- le 2 février 2021, par ordonnance pénale du MP à une peine privative de liberté de nonante jours ainsi qu'à une amende de CHF 400.- pour recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP), séjour illégal contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) et non-respect des mesures prescrites par l'ordonnance 2 COVID-19 ;

- le 27 novembre 2022, par ordonnance pénale du MP à une peine pécuniaire de nonante jours-amende pour séjour illégal.

3.             Le 4 septembre 2016, M. A______ s'est vu notifier par le commissaire de police une interdiction de pénétrer dans le Centre-Ville de Genève pour une durée de douze mois.

4.             Le 31 mai 2018, M. A______ a refusé d'embarquer à bord d'un vol de ligne à destination de l'Algérie.

5.             En date du 1er juin 2018, il s'est vu notifier une interdiction d'entrée en Suisse valable du 6 février 2018 au 5 février 2021.

6.             Le 13 novembre 2018, M. A______ a été incarcéré de purger une peine privative de liberté.

7.             À sa sortie de prison le 27 décembre 2018, il a été remis aux services de police et s'est vu notifier une interdiction de quitter le territoire de la commune de B______ pour une durée de douze mois.

M. A______ ne s'est pas présenté régulièrement à l'OCPM conformément aux instructions qui lui avaient été données lors de la notification de son assignation.

8.             Par ordre du 29 avril 2019, M. A______ a été placé en détention administrative par le commissaire de police pour une durée de trois mois.

9.             Par jugement du 30 avril 2019 (JTAPI/1______), le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) a confirmé l'ordre de mise en détention mais pour une durée d'un mois.

10.         Le 6 mai 2019, M. A______ a refusé d'embarquer à bord du vol de ligne qui lui avait été réservé.

11.         Le 16 mai 2019, l'OCPM a prononcé sa mise en liberté, considérant que les conditions de renvoi à destination de son pays d'origine dans un délai prévisible n'étaient plus remplies.

12.         En date du 8 juin 2020, M. A______ a disparu dans la clandestinité.

13.         Le 17 novembre 2021, l'OCPM a mandaté les services de police afin d'exécuter le renvoi de l'intéressé.

14.         Le 25 février 2022, il a, à nouveau, disparu dans la clandestinité après qu'un nouveau vol DEPA eut été réservé en sa faveur pour le 28 février 2022.

15.         Écroué le 1er février 2023 en raison de la conversion d'une peine de travail d'intérêt général en peine privative de liberté suite à une condamnation du 2 février 2021, notamment pour recel, M. A______ a été libéré le 26 avril 2023 et remis entre les mains des services de police.

16.         Le 26 avril 2023, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de trois mois, en application des art. 76 al. 1 let. b ch. 1 renvoyant à l'art. 75 al. 1 let. h LEI et 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI.

Une place sur un vol à destination de l'Algérie avait été réservée pour le 26 mai 2023.

17.         Par jugement du 28 avril 2023 (JTAPI/2______), le Tribunal a confirmé l’ordre de mise en détention administrative pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 25 juillet 2023 inclus.

18.         Par arrêt du 16 mai 2023 (ATA/3______), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a rejeté le recours formé par M. A______ à l'encontre de ce jugement.

19.         Par requête motivée du 13 juillet 2023, l'OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois. Le vol avec escorte policière prévu le 26 mai 2023 avait été annulé car, pour des raisons médicales, les autorités suisses n'avaient pas obtenu de laissez-passer pour l'intéressé.

20.         Par jugement du 19 juillet 2023 (JTAPI/4______), le tribunal a prolongé la détention administrative de M. A______ pour une durée de dix semaines, soit jusqu’au 2 octobre 2023.

21.         Le 18 septembre 2023, le SEM a adressé une relance auprès des autorités algériennes afin d’obtenir un laissez-passer pour M. A______.

22.         Par requête motivée du 20 septembre 2023, l'OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois, soit jusqu’au 3 janvier 2024.

23.         Par jugement du 28 septembre 2023 (JTAPI/5______), le tribunal a prolongé la détention administrative de M. A______ pour une durée de dix semaines, soit jusqu’au 11 décembre 2023.

24.         Le 12 octobre 2023, au vu du fait que le laissez-passer de M. A______ était toujours bloqué par le Consulat général d'Algérie, le SEM priait l'OPCM de ne pas poursuivre/d'annuler la réservation de vol jusqu'à nouvel avis. Il restait en contact régulier avec les autorités algériennes concernant ce cas et ne manquerait pas de contacter l'OCPM dès que le laissez-passer serait débloqué.

25.         Par arrêt du 20 octobre 2023 (ATA/6______), la chambre administrative a rejeté le recours formé par M. A______ à l'encontre de ce jugement.

L’intéressé se trouvait en détention administrative depuis le 26 avril 2023. Les autorités helvétiques avaient entrepris les démarches nécessaires à l’octroi d’un laissez‑passer en sa faveur. Dans un récent arrêt, concernant aussi une personne de nationalité algérienne, le Tribunal fédéral avait confirmé que le principe de la célérité de l’art. 76 al. 4 LEI avait été respecté, les autorités suisses ne supportant aucune responsabilité dans le fait que le renvoi du recourant n’avait pas encore été exécuté, le retard pris dans l’exécution de ce renvoi résultant en réalité du fait que l’intéressé n’entendait pas collaborer en requérant lui-même la délivrance d’un laissez-passer auprès des autorités algériennes et que celles-ci prenaient le temps d’examiner le dossier de l’intéressé avant de délivrer un tel document sur demande des autorités suisses (arrêt du Tribunal fédéral 2C_370/2023 du 27 juillet 2023 consid. 4.1.3). Cette même conclusion s’imposait dans le présent cas où l'intéressé refusait depuis de nombreuses années de quitter le territoire suisse, réaffirmant cette volonté à chaque audience devant le tribunal. La dernière difficulté dans la délivrance d’un laissez‑passer résultait d’ailleurs du contact pris par l'intéressé avec les autorités algériennes pour les informer qu’il avait un rendez-vous médical prévu aux HUG. Le laissez-passer avait alors été refusé et le vol prévu annulé. Dans ces conditions, le retard pris dans la délivrance du document n’était pas imputable aux autorités suisses.

De surcroît, c’était à tort que l'intéressé reprochait à l’autorité intimée son inactivité pendant plusieurs mois. D’une part, le vol réservé le 26 mai 2023 avait été annulé pour raisons médicales suite à l’intervention du recourant auprès des autorités algériennes et au refus de ces dernières de délivrer le laissez‑passer. Toute démarche immédiate des autorités suisses auprès de leurs homologues algériennes était en conséquence vaine au vu des rendez-vous agendés aux HUG par l'intéressé, le dernier le 5 octobre 2023. D’autre part, le SEM avait affirmé qu’il existait un délai de deux ou trois mois avant de pouvoir relancer les autorités algériennes. Les autorités suisses étant à nouveau intervenues le 18 septembre 2023, le principe de diligence et de célérité avait été respecté.

Le fait que le laissez-passer n’ait pas encore été établi ne constituait par ailleurs nullement une circonstance permettant de considérer que l’exécution du renvoi serait impossible. En effet, si l'intéressé entreprenait lui-même les démarches auprès du Consulat d’Algérie, le laissez-passer serait rapidement établi et son renvoi pourrait être exécuté, de sorte que sa détention prendrait fin. Cette approche avait été confirmée par le Tribunal fédéral dans le cas susmentionné. L'intéressé invoquait son état de santé. Le dernier document médical produit faisait état d’une convocation en allergologie le 5 octobre 2023. Il n’avait pas mentionné dans sa réplique du 9 octobre 2023 que le traitement serait prolongé, ni n’avait produit de pièces attestant de la gravité de l’atteinte à sa santé. Les autres affections évoquées dans le rapport médical « dans le domaine du retour » du 19 juillet 2023, suite à un examen par le Dr C______ le 16 juin 2023, ne revêtaient pas de caractère grave exigé par la jurisprudence de nature à empêcher le renvoi à l’instar d’un problème de luxation récidivante à l’épaule gauche, de « crises » avec palpitations, prurit, dyspnée, gonflement du visage et possible anaphylaxie à l’effort. La procédure pénale contre D______ datait de 2011. Rien n’indiquait que les récents développements qu’elle avait connus auraient entrainé un défaut de coopération des autorités algériennes en matière de rapatriement de ses ressortissants. Ainsi, en l’état, il n’existait aucune impossibilité à l’exécution du renvoi au sens de l’art. 80 al. 6 let. a LEI.

26.         Par requête motivée du 27 novembre 2023, l'OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois, soit jusqu’au 11 février 2024. A ce jour, et pour des raisons médicales, il n'était toujours pas possible d'obtenir un laissez-passer pour l'intéressé. Afin d'appuyer une nouvelle demande auprès des autorités algériennes, le SEM avait invité l'OCPM à lui fournir des informations plus récentes concernant l'était de santé de l'intéressé.

27.         A cet égard, l'OCPM a produit un courrier du SEM du 23 novembre 2023, informant que le laissez-passer était toujours bloqué pour des raisons médicales. Malgré leurs efforts et les discussions en cours avec le Consulat Général d'Algérie, il s'attendait à ce que ces démarches prennent encore un certain temps. Afin d'appuyer leurs démarches, il serait utile d'avoir des informations récentes concernant l'état de santé de l'intéressé. Le SEM estimait que toutes les démarches nécessaires avaient été entreprises en vue d'obtenir un laissez-passer et le fait qu'à ce jour un tel document n'était toujours pas disponible, était également à mettre en relation avec le fait que l'intéressé refusait de respecter son obligation de quitter la Suisse car en cas de retour volontaire, un laissez-passer serait établis sans délai par le Consulat Général d'Algérie et partant, la détention prendrait fin.

28.         Lors de l'audience du 5 décembre 2023, le représentant de l'OCPM a produit un courriel du 29 novembre 2023 qu'il avait adressé au SEM transmettant un nouveau rapport médical dans le domaine du retour du service médical de E______ de la même date (rédigé par le Dr C______) faisant état, au titre de problèmes de santé, d'une luxation à l'épaule gauche et une possible anaphylaxie à l'effort et qu'un contrôle en allergologie était prévu le 12 décembre 2023. Au titre de "douleurs et troubles annoncés", il était mentionné : problème de luxation récidivante à l’épaule gauche, de crises ou malaises avec palpitations, prurit, dyspnée, gonflement du visage actuellement résolus ; ainsi qu'une déclaration de M. A______, toujours de la même date, déclarant ne pas vouloir collaborer pour organiser son retour en Algérie et qu'il prenait l'engagement de quitter seul le territoire suisse. Le représentant de l'OCPM a exposé à cet égard que le SEM allait soumettre ce rapport médical au consulat d'Algérie afin de renégocier la délivrance d'un laissez-passer.

M. A______ a exposé que depuis le 5 octobre 2023, il n'avait pas eu de rendez-vous aux HUG. Le prochain aurait lieu le 12 décembre 2023 au service d'allergologie comme cela ressortait d'ailleurs du rapport médical précité. Il n'y avait rien de nouveau au niveau médical et ça allait s'il ne faisait pas d'effort.

29.         Par jugement du 7 décembre 2023 (JTAPI/7______), le tribunal a prolongé la détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois, soit jusqu’au 11 février 2024 inclus.

30.         Le 29 janvier 2024, le SEM a informé l’OCPM que l'émission du laissez-passer de M. A______ restait bloqué à ce jour. Toutefois, une rencontre avec les autorités algériennes aurait lieu durant le mois de mars prochain et le cas de l'intéressé y serait présenté dans le but de débloquer la situation.

31.         Par requête motivée du 31 janvier 2024, l'OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois, soit jusqu’au 11 avril 2024.

32.         Lors de l'audience du 6 février 2024, M. A______ a réaffirmé ne pas être d'accord de retourner en Algérie. Il avait rendez-vous dans les prochains jours avec un cardiologue mais il ne savait pas quand. Par ailleurs, il ne voulait pas faire le service militaire en Algérie. Il n'était pas d'accord d'entamer personnellement des démarches auprès du consulat algérien afin d'obtenir des documents d'identité en vue de son renvoi en Algérie. Depuis sa dernière audience devant le tribunal, le 5 décembre 2023, il souffrait toujours. Sa situation médicale n'avait toutefois pas changé. Ses dernières crises remontaient à une semaine mais ce n'était pas grave. Il verrait un médecin le lendemain.

La représentante de l'OCPM a confirmé que le SEM allait présenter le cas de M. A______ au consulat d'Algérie lors d'une rencontre en mars 2024. Elle a indiqué avoir relancé le SEM le 29 janvier 2024. Le rapport médical de l'intéressé avait été transmis au SEM le 29 novembre 2023. La prochaine réunion entre le SEM et le consulat algérien porterait justement sur ce sujet. Si la situation se débloquait l'OCPM obtiendrait un laissez-passer en faveur de l'intéressé. Elle a produit un courriel de l'établissement de E______ du 26 janvier 2024 indiquant que le rendez-vous avec l'allergologue avait été annulé et que le prochain rendez-vous aurait lieu le 14 mai 2024. Elle a conclu à la confirmation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois.

Me F______ a conclu à la mise en liberté immédiate de son client, avec l'octroi d'un délai de départ d'un jour, à ce que l'illicéité de sa détention depuis le 12 octobre 2023 soit constatée et à ce que l'Etat de Genève soit condamné à lui verser une indemnité de CHF 1'000.- par jour et à tous les frais de procédure.

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour prolonger la détention administrative en vue de renvoi ou d'expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. e de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             S'il entend demander la prolongation de la détention en vue du renvoi, l'OCPM doit saisir le tribunal d'une requête écrite et motivée dans ce sens au plus tard huit jours ouvrables avant l’expiration de la détention (art. 7 al. 1 let. d et 8 al. 4 LaLEtr).

3.             En l'occurrence, le 27 novembre 2023, le tribunal a été valablement saisi, dans le délai légal précité, d'une requête de l'OCPM tendant à la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois.

Statuant ce jour, le tribunal respecte le délai fixé par l'art. 9 al. 4 LaLEtr, qui stipule qu'il lui incombe de statuer dans les huit jours ouvrables qui suivent sa saisine, étant précisé que, le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l’étranger.

4.             La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.1 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.1).

5.             Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l'autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l'obtention des documents nécessaires au départ auprès d'un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI). Concrètement, dans ces deux circonstances, la détention administrative peut donc atteindre dix-huit mois (cf. not. ATA/848/2014 du 31 octobre 2014 ; ATA/3/2013 du 3 janvier 2013 ; ATA/40/2012 du 19 janvier 2012 ; ATA/518/2011 du 23 août 2011).

6.             Comme toute mesure étatique, la détention administrative en matière de droit des étrangers doit respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst. et art. 80 et 96 LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Elle doit non seulement apparaître proportionnée dans sa durée, envisagée dans son ensemble mais il convient également d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si elle constitue une mesure appropriée et nécessaire en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi ou d'une expulsion (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 143 I 147 consid. 3.1; 142 I 135 consid. 4.1 ; 134 I 92 consid. 2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_672/2019 du 22 août 2019 consid. 5.4 ; 2C_263/2019 du 27 juin 2019 consid. 4.1) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi ou de l'expulsion de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2).

7.             Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEI ; « principe de célérité ou de diligence »). Il s'agit d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/88/2010 du 9 février 2010 ; ATA/644/2009 du 8 décembre 2009 et les références citées).

Pour l'exécution du renvoi, le SEM assiste l'autorité cantonale d'exécution (art. 71 LEI ; art. 1 de la Directive sur le retour et 15f de l'ordonnance sur l'exécution du renvoi et de l'expulsion d'étrangers du 11 août 1999 - OERE - RS 142.281). C'est lui qui se charge d'obtenir des documents de voyage pour les étrangers frappés d'une décision de renvoi ou d'expulsion (art. 71 let. a LEI ; art. 2 al. 1 OERE). C'est lui qui est l'interlocuteur des autorités des pays d'origine, en particulier des représentations diplomatiques ou consulaires des États d'origine ou de provenance des étrangers frappés d'une décision de renvoi ou d'expulsion, pour autant que d'autres dispositions n'aient pas été prises dans le cadre d'un accord de réadmission ou après entente avec les cantons (art. 2 al. 2 OERE).

8.             Selon l'art. 80 al. 4 LEI, l'autorité judiciaire qui examine la décision de détention de maintien ou de levée tient compte de la situation familiale de la personne détenue et des conditions d'exécution de la détention.

Celle-ci doit en particulier être levée lorsque son motif n'existe plus ou si, selon l'art. 80 al. 6 let. a LEI, l'exécution du renvoi s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles ou qu'elle ne peut être raisonnablement exigée, cette dernière disposition légale renvoyant à l'art. 83 al. 1 à 4 LEI.

Selon ces dispositions, l'exécution n'est pas possible lorsque l'étranger ne peut pas quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans l'un de ces États (al. 2), n'est pas licite lorsque le renvoi de l'étranger dans son État d'origine, dans son État de provenance ou dans un État tiers est contraire aux engagements de la Suisse relevant du droit international (al. 3) et ne peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (al. 4).

9.             S'agissant spécifiquement des personnes en traitement médical en Suisse, l'exécution du renvoi ne devient inexigible que dans la mesure où elles pourraient ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence une fois de retour dans leur pays d'origine ou de provenance. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral D-6799/2017 du 8 octobre 2020 ; E-3320/2016 du 6 juin 2016 et les références citées ; ATA/61/2022 du 25 janvier 2022 consid. 4c). L'art. 83 al. 4 LEI ne confère pas un droit général d'accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d'origine n'atteignent pas le standard élevé prévalant en Suisse. Ainsi, si les soins essentiels nécessaires peuvent être assurés dans le pays d'origine ou de provenance, l'exécution du renvoi sera raisonnablement exigible. Elle ne le sera plus, en raison de l'absence de possibilités de traitement adéquat, si l'état de santé de l'intéressé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable et notablement plus grave de son intégrité physique (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral E-2693/2016 du 30 mai 2016 consid. 4.1 et les références citées ; ATA/61/2022 du 25 janvier 2022 consid. 4c ; ATA/1455/2017 du 31 octobre 2017 consid. 10d). L'accès à des soins essentiels est assuré dans le pays de destination s'il existe des soins alternatifs à ceux prodigués en Suisse, qui - tout en correspondant aux standards du pays d'origine - sont adéquats à l'état de santé de l'intéressé, fussent-ils d'un niveau de qualité, d'une efficacité de terrain (ou clinique) et d'une utilité (pour la qualité de vie) moindres que ceux disponibles en Suisse. En particulier, des traitements médicamenteux (par exemple constitués de génériques) d'une génération plus ancienne et moins efficaces, peuvent, selon les circonstances, être considérés comme adéquats (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral E-6559/2018 du 3 octobre 2019 consid. 3.6 et les références citées ; ATA/61/2022 du 25 janvier 2022 consid. 4c).

10.         En l'espèce, il n'y a pas lieu d'examiner à nouveau le motif sur lequel repose la détention administrative, la légalité de cette dernière ayant déjà été examinée et admise par le tribunal puis la chambre administrative, sans qu'un changement quelconque des circonstances pertinentes ne soit intervenu depuis. L'assurance du départ effectif de M. A______ répond toujours à un intérêt public certain et vu son refus maintes fois allégué et démontré de retourner en Algérie, aucune autre mesure moins incisive ne peut être envisagée pour garantir sa présence jusqu'à l'exécution de son refoulement. Enfin, son renvoi n'apparaît ni improbable ni impossible, son cas devant être soumis en mars prochain aux autorités algériennes en vue de l'obtention d'un laisser-passer. Pour mémoire, celui-ci a été bloqué pour des raisons médicales suite à l'intervention de M. A______ auprès des autorités algériennes. La détention en cause respecte par conséquent le principe de la proportionnalité.

Il sera par ailleurs rappelé que si l'intéressé entreprenait lui-même les démarches auprès du Consulat d’Algérie, le laissez-passer serait rapidement établi et son renvoi pourrait être exécuté, de sorte que sa détention prendrait fin.

S'agissant de son état de santé, la chambre administrative a déjà eu l'occasion de juger que ses affections ne revêtaient pas le caractère grave exigé par la jurisprudence pour empêcher son renvoi (ATA/6______ consid. 5.3). Sa situation médicale étant inchangée depuis le prononcé de cet arrêt du 20 octobre, le tribunal retiendra qu'il n’existe aucune impossibilité à l’exécution du renvoi au sens de l’art. 80 al. 6 let. a LEI.

11.         Enfin, la durée de deux mois ordonnée par l'OCPM appert comme proportionnée, au vu du temps qu'il faudra aux autorités compétentes de discuter avec les autorités algériennes et d'obtenir de leur part un laissez-passer.

12.         Au vu de ce qui précède, la demande de prolongation de la détention administrative de M. A______, sera admise pour une durée de deux mois, soit jusqu'au 11 avril 2024 inclus.

13.         Au vu de l'issue de la procédure, il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure.

14.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à Monsieur A______, à son avocat et à l’OCPM. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


 

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable la demande de prolongation de la détention administrative de Monsieur A______ formée le 31 janvier 2024 par l’office cantonal de la population et des migrations ;

2.             prolonge la détention administrative de Monsieur A______ pour une durée de deux mois, soit jusqu'au 11 avril 2024 inclus;

3.             dit qu’il n'est pas alloué d’indemnité de procédure ;

4.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les dix jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.


Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, à l’office cantonal de la population et des migrations et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

Le greffier