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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1417/2022

JTAPI/371/2023 du 30.03.2023 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : AUTORISATION DÉROGATOIRE(EN GÉNÉRAL);DIMENSIONS DE LA CONSTRUCTION;HAUTEUR DE LA CONSTRUCTION;ESTHÉTIQUE
Normes : LCI.11.al4; LCI.27.al4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1417/2022 LCI

JTAPI/371/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 30 mars 2023

 

dans la cause

 

A______ - DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DES CONSTRUCTIONS ET DE LA MOBILITÉ

 

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

Madame B______, Monsieur C______, D______ SA, E______ SA représentés par Me Julien PACOT, avocat, avec élection de domicile


EN FAIT

1.             Madame B______ et Monsieur C______ sont copropriétaires de la parcelle n° 1______ de la commune de F______.

2.             D______ SA est propriétaire des parcelles n° 2______ et 3______ de la même commune.

3.             La parcelle n° 4______ et une dépendance des trois parcelles principales précitées.

4.             Ensemble, ces quatre parcelles sont situées à l'adresse 34 – 36, Rue G______ et 7, rue des H______, en troisième zone de construction. Un bâtiment d'habitation R+6+ attique y est érigé.

5.             Le 1er décembre 2020, Madame B______, Monsieur C______ et D______ SA (ci-après : les propriétaires), agissant par l'intermédiaire de leurs architectes (ci-après : les mandataires), ont saisi le département du territoire (ci-après : DT ou le département) d'une demande d'autorisation de construire en vue de la surélévation d'un étage de cet immeuble, avec la création de 11 appartements supplémentaires. Cette demande a été enregistrée sous n° DD 5______/1.

6.             Le 10 février 2021, la A______ a préavisé négativement le projet, considérant que « la surélévation proposée ne s'intègre pas aux bâtiments voisins. Il y a un effet de rupture avec les bâtiments des numéros 28 à 32 de la rue G______ (avec 4 étages sur rez-de-chaussée) et de l'ensemble qu'ils constituent avec les bâtiments qui leur font face (numéros 31 à 39 de la rue G______). L'augmentation de la densité bâtie, pour un gain de 11 logements seulement, dans un secteur d'ores et déjà dense, est discutable, notamment au travers de l'absence d'harmonie urbaine ».

7.             De leur côté, l'office de l'urbanisme et la direction des autorisations de construire ont préavisé favorablement la surélévation, respectivement les 9 décembre 2020 et 12 avril 2021.

8.             Quant à la commission d'architecture (ci-après : CA) elle a tout d'abord demandé, le 21 janvier 2021, des pièces complémentaires, à savoir le profil de la rue (Sky Line) « conformément au guide » afin de pouvoir vérifier l'opportunité d'une surélévation ; la remise d'une maquette pourrait être la bienvenue afin d'analyser les aspects volumétriques et le détail des raccords. La CA a noté à cet égard que « la surélévation concerne un immeuble de tête, qui fait partie intégrante d'un grand îlot rectangulaire, ouvert sur la rue des H______, avec une cour assez large, dévolue en partie à du parking, s'inscrivant dans la même logique volumétrique et architecturale que l'autre îlot situé sur la même rue, l'ensemble étant constitué de bâtiments assez hauts ».

9.             Sur la base des documents fournis par les mandataires, la CA a ensuite rendu un préavis négatif le 30 avril 2021. Rappelant que « la surélévation concerne un ensemble de trois immeubles, dont un de tête, qui fait partie d'un grand îlot rectangulaire, ouvert sur la rue des H______, avec une large cour, dévolue en partie à du parking. L'îlot est constitué de deux catégories d'immeubles, soit un ensemble d'immeubles bas (R+4) du début du XXème siècle et d'un autre qui se compose de bâtiments assez hauts (R+6) des années 70. L'îlot situé en face de la rue G______ s'inscrit dans la même logique volumétrique et architecturale, avec une nette dominance de bâtiments en R+4 comme du côté de la rue G______. Sur la base de la maquette et de vues 3D sur « Street View », la commission relève que l'ensemble concerné par la surélévation constitue une exception sur la rue de la [sic] G______, puisque son gabarit conséquent et son implantation viennent rompre la régularité volumétrique qui caractérise toute la longueur de cette rue, marquant de surcroît à un angle, un pignon imposant. Dès lors, et bien que le respect des distances permettrait d'envisager une surélévation, celle-ci est fortement contrainte par l'échelle volumétrique particulière de la rue, qui présente une qualité urbaine intéressante, et de plus, qui est marquée par des alignements de corniche précis et cohérents, et ceci malgré l'exception relevée. Ainsi, et pour les raisons explicitées ci-dessus, la commission est défavorable au projet qui accentuerait davantage les différences péjorant durablement l'harmonie de la rue ».

10.         À la suite de ce préavis, une séance s'est tenue le 7 juin 2021 entre les mandataires et une délégation de la CA afin de discuter de nouvelles modifications du projet.

11.         Sous la plume du répondant de la CA, celle-ci a émis, le 6 juillet 2021, un « avis de consultation » favorable sous conditions au projet, vu la présentation du 7 juin 2021 accompagnée d'une maquette. La commission avait à nouveau analysé le projet sur la base des nouveaux plans et constatait et réitérait que la rue ainsi que l'espace côté cour étaient assez larges pour envisager une surélévation. Elle a ajouté, en ce qui concernait l'immeuble, que « celui-ci est situé à l'angle des rues G______ et des H______, mitoyen à un bâtiment plus bas sur la rue G______, qui forme un ensemble au sens de la loi Blondel avec des immeubles de même gabarit qui longent cette rue, alors que l'épannelage des bâtiments devient plus élevé du côté de la place de l'I______. Dès lors, et au vu de son emplacement qui s'inscrit dans un tissu urbain varié, la commission valide la possibilité de surélever, demandant de réduire au maximum la hauteur de l'intervention (vide d'étages et complexe de dalles), de réduire la profondeur sur les deux rues en privilégiant la version avec retrait des coursives et de prévoir un langage en façades qui recherche, tant par les teintes des éléments, que par leur matérialité et leur modénature, une intégration subtile dans le contexte bâti. À ce stade, la commission réserve son avis sur les typologies ».

12.         Le 12 août 2021, les mandataires ont présenté de nouvelles modifications du projet qui avaient trait à la profondeur des balcons, à l'apparition d'un quatrième pan de toiture, à la création d'un retrait d'angle et d'un bas-relief sur le pignon et à l'adaptation de la colorimétrie des avant-toits.

13.         Par préavis du 10 septembre 2021, la CA a considéré que le projet tenait compte des remarques de son préavis de consultation, de sorte que le gabarit était validé. Pour le surplus, une modification du projet était requise au niveau des typologies.

14.         La A______ a réitéré son préavis négatif le 6 décembre 2021, considérant que « La démonstration faite par les mandataires reprenant la méthode ABCD n'est pas convaincante. La rupture d'harmonie est même constatée par les mandataires, un ajout supplémentaire en surélévation ne fait que renforcer cette rupture et non « à réparer l'anomalie » comme suggéré ».

15.         Finalement, le 28 janvier 2022, la CA a délivré un préavis favorable au projet, sous conditions concernant certains détails d'exécution.

16.         Par décision du 16 mars 2022, publiée le même jour dans la Feuille d'avis officielle, le département a délivré l'autorisation DD 5______/1 en la soumettant à différentes conditions, dont celles figurant dans le préavis de la CA du 28 janvier 2022.

17.         Par acte du 2 mai 2022, la A______ (ci-après : la A______) a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) en concluant à son annulation.

Les immeubles situés de part et d'autre de la rue G______, entre la rue J______ et la rue des H______, avaient fait l'objet d'une publication de la Fédération des architectes suisses (FAS), qui rappelait que cet îlot avait été réalisé en trois étapes, à savoir la construction des immeubles 34 à 36 en 1898, celle des immeubles 6, 8, 28, 30 et 32 en 1921 et enfin celles des immeubles 31 à 39 en 1933. Ces constructions répondaient à la volonté de réaliser du logement social, à la fois hygiénique, économique et salubre. Les premiers immeubles réalisés sur la parcelle 34 à 36 rue G______, désignés dans la publication FAS comme étant la matrice, avaient été démolis et reconstruits à la fin des années 1970, quelques années avant l'entrée en vigueur de la loi sur la protection des ensembles des XIX et début du XXème siècles. Selon l'inventaire ISOS, ces immeubles étaient désignés comme « des locatifs perturbant le tissu d'origine par leur traitement ». Quant aux immeubles de la rue G______ situés en prolongement de ceux objets de l'autorisation de construire litigieuse (6, 8, 28, 30 et 32) et aux immeubles situés en face, à l'exception de l'immeuble 41 (rue G______ 31 à 39), ils faisaient partie d'un ensemble protégé au sens de la loi Blondel.

L'autorisation litigieuse constituait à la fois une violation des dispositions légales réglementant les surélévations et de celles relatives aux dérogations concernant le dépassement des gabarits légaux.

18.         Le détail de l'argumentation de la A______ sera examiné ci-après dans la partie en droit.

19.         Par écritures du 11 juillet 2022, le département a conclu au rejet du recours.

20.         Par écritures du 11 juillet 2022, les propriétaires ont également conclu au rejet du recours. Ils ont notamment exposé qu'en marge de ses préavis, la CA avait demandé aux mandataires de montrer des vues d'intégration urbaine avec plus de recul le long de la rue G______, de clarifier l'expression architecturale, en particulier en ce qui concernait l'effet double chapeau de la toiture et enfin de proposer une gestion de l'important pignon du bâtiment. De la sorte, plusieurs prises de vue « avant » et « après » avaient été exposées lors de la séance du 7 juin 2021. Les mandataires avaient à cette occasion justifié l'assiette critiquée de la surélévation projetée, à savoir celle qui donnait l'impression de deux niveaux de surélévation (effet double chapeau). Ils avaient en outre suggéré pour le pignon une alternative de gestion cumulant plusieurs mesures, à savoir le changement de la colorimétrie du dessous de toit afin de lier la surélévation avec le bâtiment existant, une réduction de la profondeur des balcons côté rue G______ de 32 cm, la pose d'un quatrième pan de toiture plutôt qu'une coupure de type pignon, un travail de l'angle et du bas-relief plutôt qu'un pignon ou un épannelage et enfin une clarification des ordres par une colorimétrie plus claire et unificatrice. Le 22 juin 2021, la délégation de la CA avait elle-même présenté le dossier modifié à la CA en séance plénière, suite à quoi cette instance avait rendu l'avis de consultation du 6 juillet 2021. Par courrier du 12 août 2021, les mandataires avaient résumé la substance de la présentation du 7 juin 2021 et exposé les modifications convenues, à savoir une réduction de la profondeur des balcons, l'apparition d'un quatrième pan de toiture, le retrait de l'angle avec bas-relief et l'adaptation de la colorimétrie des avant-toits.

21.         L'argumentation des propriétaires sera examinée ci-après en droit en tant que de besoin.

22.         La A______ a répliqué par écritures du 15 septembre 2022, reprenant et complétant son argumentation précédente en des termes qui seront exposés ci-après en droit.

23.         Les propriétaires ont dupliqué par écritures du 29 septembre 2022 et le département par écritures du 11 octobre 2022.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             La recourante allègue tout d'abord une violation de l'art. 27 al. 3 LCI. Selon elle, contrairement à ce qu'a retenu l'autorité intimée en s'appuyant sur le préavis de la CA, le projet litigieux compromettrait l'harmonie urbanistique de la rue. En effet, les mandataires du projet avaient eux-mêmes relevés que l'immeuble dans sa situation actuelle constituait une rupture d'échelle et de style avec le tissu bâti, ce que confirmait également l'inventaire ISOS. Les mandataires du projet avaient également relevé que les constructions attenantes formaient un très bel ensemble bâti protégé. Compte tenu de ceci, l'appréciation des mandataires selon laquelle la surélévation permettrait de réparer la rupture d'harmonie due au toit plat de l'immeuble existant était pour le moins critiquable, puisqu'au contraire l'augmentation du gabarit ne ferait qu'accroître la rupture, comme le démontraient d'ailleurs la photographie de la maquette dans laquelle avait été intégré le projet de surélévation. Selon les mandataires, la surélévation tendrait à autonomiser l'immeuble, mais la disposition légale susmentionnée visait à éviter de compromettre l'harmonie urbanistique de la rue, et non pas d'autonomiser ou de mettre en évidence une surélévation. Cette appréciation entrait d'ailleurs en contradiction avec l'autre affirmation des mandataires du projet, selon laquelle celui-ci s'intégrait naturellement dans son contexte. Il résultait de ces différents éléments que la méthode d'évaluation ABCD aurait dû permettre de constater l'inadmissibilité du projet.

À tout ceci s'ajoutait le fait que la CA s'était déclarée à deux reprises défavorable au projet et au principe même de la surélévation, le deuxième préavis se fondant sur la maquette et les vues 3D « Street View » et retenant qu'une surélévation était fortement contrainte par l'échelle volumétrique particulière de la rue et que le projet accentuerait davantage des différences péjorant durablement l'harmonie de la rue. Certes, la CA avait validé le projet dans son troisième préavis en retenant qu'il avait été modifié en tenant compte de ses remarques, mais il apparaissait en réalité qu'il n'y avait aucune différence de gabarit entre les plans préavisés défavorablement et ceux qui l'avaient finalement été favorablement. La CA s'abstenait d'ailleurs de donner des explications au sujet de son revirement, se contentant de mentionner que le « nouveau » projet soumis répondait à son préavis, ce qui en réalité n'était pas le cas.

Il fallait enfin relever que la surélévation ne permettrait la réalisation que d'un nombre limité de logements et qu'il s'agissait d'un motif supplémentaire qui aurait dû conduire l'autorité intimée à refuser le projet, compte tenu de l'aggravation considérable de la rupture volumétrique de la rue.

4.             En 3ème zone, la LCI limite le gabarit (art. 26) dont la hauteur ne peut, à front ou en retrait des voies publiques ou privées, dépasser de plus de 3 m les trois quarts de la distance fixée entre les alignements (art. 27 al. 1). Par rapport aux limites de propriétés privées, la hauteur est calculée conformément à l'art. 29 al.1 (art. 27 al. 2).

Afin de permettre la construction de logements supplémentaires, le département peut autoriser une augmentation de la hauteur du gabarit, à condition que celle-ci ne compromette pas l'harmonie urbanistique de la rue ; il est notamment tenu compte du gabarit des immeubles voisins (art. 27 al. 3). Pour les quartiers de Sécheron-est, Grand-Pré/Servette/Prairie, Saint-Jean/Les Délices, La Jonction, Arve/Acacias, Carouge-est, Malagnou, Les Vollandes et avenue de la Roseraie/avenue de Champel, le département établit, après consultation de la commune et de la commission des monuments, de la nature et des sites, des cartes indicatives des immeubles susceptibles d'être surélevés. La délivrance d'une autorisation en application de l'alinéa 3 est subordonnée à l'adoption par le Conseil d'Etat de la carte applicable à l'immeuble concerné (art. 27 al. 4). À front ou en retrait des voies publiques ou privées, la hauteur du gabarit ne peut toutefois pas dépasser de plus de 6 m les trois quarts de la distance fixée entre alignements. La hauteur du gabarit est calculée, par rapport aux limites de propriétés privées, conformément aux dispositions de l'art. 29 al. 2 (art. 27 al. 5). La hauteur de la ligne verticale du gabarit ne peut dépasser nulle part 21 m. Afin de permettre la construction de logements supplémentaires au sens des al. 3 à 5, la hauteur de la ligne verticale du gabarit ne peut dépasser nulle part 27 m (art. 27 al. 6).

5.             S'agissant des cartes indicatives des immeubles susceptibles de faire l'objet d'une surélévation, la jurisprudence a retenu, sur la base des travaux préparatoires de la disposition légale qui les institue (art. 27 al. 4 susmentionné), qu'elles n'empêchent pas de surélever les immeubles qui ne sont pas mentionnés sur ces cartes, pas plus qu'elles n'impliquent nécessairement la possibilité de surélever des immeubles lorsqu'au contraire ils sont mentionnés, mais qu'il s'avère que les conditions légales d'une surélévation ne sont pas réunies. En outre, quand bien même ces cartes n'ont qu'une valeur indicative, aucune surélévation ne pourra être réalisée avant que le Conseil d'Etat n'ait adopté la carte applicable à l'immeuble concerné (ATA/824/2013 du 17 décembre 2013 consid. 3b).

6.             La méthode dite « ABCD » proposée dans les directives intitulées « Surélévation d'immeubles de logements » (ci-après : directives surélévation), éditées par le département le 26 septembre 2016 et validées par le Canton et la Ville de Genève, s'adresse aux services et commissions concernés, afin qu'ils puissent évaluer les projets dans le cadre d'une approche commune, raisonnée et documentée, en tenant compte des différents enjeux inhérents à toute surélévation d'un immeuble (urbanistique, patrimoniaux, légaux, etc.), de façon à argumenter les préavis de manière plus circonstanciée. Elle s'adresse également aux requérants et à leurs mandataires, pour lesquels elle constitue un utile manuel d'analyse, lequel sera susceptible de les guider efficacement lors de l'élaboration de leur projet. Par ailleurs, elle leur permettra d'avoir une connaissance préalable précise de la manière dont leurs requêtes seront examinées par les différentes instances chargées de les préaviser (directives surélévation, p. 2 ; ATA/514/2018 du 29 mai 2018 consid. 7).

Les directives surélévation prévoient qu'à partir de mi-2016, les commissions concernées (CA et commission et des monuments, de la nature et des sites), ainsi que les services de l'administration cantonale et communale appliquent la méthode ABCD lors de l'instruction des requêtes en autorisation de construire portant sur des surélévations d'immeubles de logements.

Cette méthode [A (= le quartier), B (= les groupes d'immeubles - le plein), C (= l'espace public / privé - le vide), D (= l'immeuble)] vise à réintégrer une dimension urbaine dans l'évaluation de projets de surélévation, à travers une trame de critères invoqués selon des échelles progressives d'approche :

A. En premier lieu, il s'agit de reconnaître l'appartenance à un quartier et d'identifier les conditions morphologiques propres au tissu urbain. L'analyse réalisée à l'échelle du quartier vise à évaluer les caractères favorables et défavorables des conditions du tissu urbain et à définir le caractère générique ou spécifique de l'objet dans son environnement, définissant d'ores et déjà une posture préalable (directives surélévation, p. 4) ;

B. Le point de vue des « groupes d'immeubles » vise à identifier une entité urbaine restreinte à laquelle l'objet considéré est rattaché. Il recouvre plusieurs formes d'agencement spatial par lequel un bâtiment s'associe à d'autres, la manifestation la plus immédiate et courante étant l'îlot traditionnel. Cette étape consiste d'abord à définir si la surélévation de l'immeuble concerné prétérite la cohérence de l'îlot ou du groupe d'immeubles. Le cas échéant, une réflexion plus large devrait être préconisée pour en déduire le bien-fondé de l'intervention. Cette échelle implique d'identifier les caractéristiques du construit participant à la solidarité de ses parties constitutives, par exemple une unité de langage architectural, un type régulier de couronnement, un alignement des niveaux d'étages et un règne des corniches (directives surélévation, p. 5) ;

C. L'espace public est l'espace perceptif réel de la ville et comporte une dimension scénique qu'une surélévation modifie. Les changements d'alignement induisent par effet direct une augmentation du potentiel de construction en hauteur telle que le décrochement en plan entraîne une fragmentation en élévation. Il s'agit alors de questionner la pertinence d'une construction à atteindre son gabarit légal, si cette opération compromet l'ordre de la rue. Il s'agit d'observer, d'une part, la physionomie de la rue, qualifiée par l'homogénéité ou l'hétérogénéité des constructions qui la bordent et, d'autre part, la géométrie des cours. Ces constats devraient suggérer une attitude à adopter quant à la volumétrie et aux conditions d'ensoleillement de l'espace public / privé (directives surélévation, p. 6).

D. L'échelle de l'immeuble invoque quant à elle la question de la composition, de l'expression architecturale et de l'habitabilité des typologies mises en œuvre. Les attitudes sont diverses et souvent hybrides entre deux positions extrêmes (en mimétisme, par la poursuite à l'identique des caractères en place, ou en rupture, par l'intervention d'un tout autre langage). S'il est illusoire de prédéfinir des règles de composition, chaque cas devrait néanmoins poser la question du degré de continuité nécessaire de la nouvelle construction avec l'existant, pour éviter des réponses caricaturales. Les caractères ordinaires ou singuliers de la situation dans un quartier, l'appartenance à un ensemble et l'identification des caractères symptomatiques de cette appartenance, ainsi que le statut de la surélévation par rapport à l'espace public référent auront permis de relever des traits déterminants qui dessinent les grandes lignes de la syntaxe architecturale. Il s'agit ainsi d'évaluer la justesse d'un parti pris par rapport à une posture que la progression des critères aura permis de préciser (directives surélévation, p. 7).

Ces critères ne constituent toutefois pas une méthode unilatérale, au sens où elle produirait mécaniquement un résultat, mais proposent un questionnement selon une appréhension de la ville à plusieurs échelles, qui relève les aspects à observer, de façon à assurer l'adéquation d'une surélévation à un contexte global et local (directive surélévation p. 3 ; cf. ATA/514/2018 du 29 mai 2018 consid. 7). En tant que directives d'application, ces critères systématisent l'application des dispositions concernées et précisent notamment les documents à fournir, telles des maquettes d'études, pour que l'examen par les commissions de préavis et services soit facilité (directives surélévation, p. 8 ; cf. ATA/514/2018 du 29 mai 2018 consid. 7).

7.             Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l'autorité reste ainsi libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (cf. not. ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3b ; ATA/498/2020 du 19 mai 2020 consid. 4b).

La CA, composée essentiellement de spécialistes, est particulièrement apte à prendre position sur des questions qui font appel aux connaissances de ces derniers et est à même d'évaluer un projet de façon utile et objective (cf. not. ATA/1186/2017 du 22 août 2017 consid. 6c ; ATA/521/2017 du 9 mai 2017 consid. 5e et les références citées ; ATA/442/2015 du 12 mai 2015 consid. 5c ; ATA/634/2014 du 19 août 2014 consid. 6 ; ATA/720/2012 du 30 octobre 2012 consid. 10, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_635/2012 du 5 décembre 2013 ; ATA/385/2011 du 21 juin 2011 consid. 4b, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_362/2011 du 14 février 2012).

Même lorsque le département doit recueillir obligatoirement les appréciations de la CA, il n'en demeure pas moins que la délivrance des autorisations de construire demeure de sa compétence exclusive, même s'il lui appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence (cf. not. ATA/45/2019 du 15 janvier 2019 consid. 5b ; ATA/1304/2018 du 4 décembre 2018 consid. 6b ; ATA/1273/2017 du 12 septembre 2017 consid. 11c et les arrêts cités, en lien avec l'art. 59 al. 4 LCI).

8.             Lorsque la loi autorise l'autorité administrative à déroger à l'une de ses dispositions, notamment en ce qui concerne les constructions admises dans une zone, elle confère à cette dernière un pouvoir d'appréciation qui n'est limité que par l'excès ou l'abus, les juridictions de recours n'ayant pas compétence pour apprécier l'opportunité des décisions prises (art. 61 al. 2 LPA ; ATA/45/2019 du 15 janvier 2019 consid. 5c ; ATA/1273/2017 du 12 septembre 2017 consid. 11b ; ATA/659/2017 du 13 juin 2017 consid. 4b ; ATA/318/2017 du 21 mars 2017 consid. 7b ; ATA/284/2016 du 5 avril 2016 consid. 7b).

L'autorité administrative jouit d'un large pouvoir d'appréciation dans l'octroi de dérogations. Cependant, celles-ci ne peuvent être accordées ni refusées d'une manière arbitraire. Tel est le cas lorsque la décision repose sur une appréciation insoutenable des circonstances et inconciliable avec les règles du droit et de l'équité et se fonde sur des éléments dépourvus de pertinence ou néglige des facteurs décisifs. Quant aux autorités de recours, elles doivent examiner avec retenue les décisions par lesquelles l'administration accorde ou refuse une dérogation. L'intervention des autorités de recours n'est admissible que dans les cas où le département s'est laissé guider par des considérations non fondées objectivement, étrangères au but prévu par la loi ou en contradiction avec elle. Les autorités de recours sont toutefois tenues de contrôler si une situation exceptionnelle justifie l'octroi de ladite dérogation, notamment si celle-ci répond aux buts généraux poursuivis par la loi, qu'elle est commandée par l'intérêt public ou d'autres intérêts privés prépondérants ou encore lorsqu'elle est exigée par le principe de l'égalité de traitement, sans être contraire à un intérêt public (ATA/639/2020 du 30 juin 2020 consid. 4d ; ATA/1600/2019 du 29 octobre 2019 consid 6a ; ATA/1529/2019 du 15 octobre 2019 consid. 5f ; ATA/45/2019 du 15 janvier 2019 consid. 5d ; ATA/875/2018 du 28 août 2018 consid. 6b).

Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l'autorité inférieure suit les préavis requis, la juridiction de recours doit s'imposer une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des entités ayant formulé un préavis dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation, pour autant que l'autorité inférieure ait suivi l'avis de celles-ci. Elle se limite à examiner si le département ne s'est pas écarté sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3e ; ATA/639/2020 du 30 juin 2020 consid. 4d ; ATA/875/2018 du 28 août 2018 consid. 5b; ATA/1274/2017 du 12 septembre 2017 consid. 5).

9.             En l'espèce, aux critiques formulées par la recourante, les parties intimées répondent notamment que l'immeuble en cause figure sur la carte indicative des bâtiments susceptibles d'être surélevés, au sens de l'art. 27 al. 4 LCI. Cet argument n'est cependant pas déterminant, puisque selon la jurisprudence rappelée plus haut, une telle mention n'empêche pas de procéder à un examen circonstancié de chaque projet au regard des exigences de la loi, et notamment du respect de l'harmonie urbanistique de la rue (art. 27 al. 3 LCI).

10.         Le tribunal peut en revanche suivre les développements des parties intimées au sujet des raisons qui ont poussé la CA à revenir dans son troisième préavis sur l'opinion défavorable qu'elle avait émise dans le deuxième.

Il faut rappeler à cet égard que la CA a tout d'abord demandé, le 21 janvier 2021, que lui soit fourni le profil de la rue, en suggérant également la remise d'une maquette, de manière à disposer d'éléments supplémentaires pour vérifier l'opportunité de la surélévation. Sur la base du schéma d'élévation des bâtiments de la rue G______ 28-44, de la maquette et des vues 3D fournis par les mandataires du projet, la CA a relevé le 30 avril 2021 que l'ensemble concerné par la surélévation constituait une exception sur la rue G______, puisque son gabarit conséquent et son implantation venaient rompre la régularité volumétrique qui caractérisait toute la longueur de cette rue, en marquant en outre à un angle un pignon imposant. Par conséquent, bien que le respect des distances permettait d'envisager une surélévation, celle-ci était fortement contrainte par l'échelle volumétrique particulière de la rue, qui présentait une qualité urbaine intéressante et qui était de plus marquée par des alignements en corniche précis et cohérents, malgré l'exception relevée. Par conséquent, le projet accentuerait davantage les différences, péjorant durablement l'harmonie du quartier.

Suite à ce deuxième préavis, les mandataires du projet ont revu ce dernier et obtenu la possibilité de le présenter à une délégation de la CA le 7 juin 2021. Les documents déposés à cette occasion par les mandataires du projet, parmi lesquels figurent de nombreuses photographies et images de synthèse, font partie du dossier remis au tribunal par l'autorité intimée. Les promoteurs du projet ont expliqué dans la présente procédure, sans être contredits par la recourante, que la rencontre avec la CA le 7 juin 2021 avait eu pour but, d'une part, de justifier l'effet « double chapeau » dont pouvait résulter l'impression de deux niveaux de surélévation et de réduire l'emprise des balcons plutôt que de les supprimer concrètement et, d'autre part, d'expliquer que la problématique du pignon pouvait être gérée, plutôt que par un épannelage qui risquait de rendre les terrasses inexploitables, par plusieurs mesures cumulatives, à savoir : un changement de la colorimétrie du dessous de toit afin de lier la surélévation avec le bâtiment existant ; une réduction de la profondeur des balcons côté rue G______ de 32 cm ; la pose d'un quatrième pan de toiture plutôt qu'une coupure de type pignon ; le travail de l'angle et du bas-relief plutôt qu'un pignon ou un épannelage ; la clarification des ordres par une colorimétrie plus claire et unificatrice.

Il est résulté de la présentation du 7 juin 2021 un avis de consultation émis par la CA le 6 juillet 2021, dans lequel cette dernière demandait de réduire au maximum la hauteur de l'intervention (vide d'étage est complexe de dalles), de réduire la profondeur sur les deux rues en privilégiant la version avec retrait des coursives et de prévoir un langage en façade qui rechercherait, tant par les teintes des éléments que par leur matérialité et leur modénature, une intégration subtile dans le contexte bâti.

Les mandataires du projet en ont alors présenté une nouvelle version qui a obtenu, le 10 septembre 2021, l'aval de la CA sur le gabarit. Enfin, par préavis du 28 janvier 2022, la CA a validé la dérogation à l'art. 11 al. 4 et 5 LCI.

11.         Compte tenu de tout ceci, il serait faux de retenir, comme le soutient la recourante, que le changement de position exprimé par la CA entre son deuxième et son troisième préavis ne se fonderait sur aucun élément objectif et que cette instance aurait fait volte-face sans raison claire. Certes, le gabarit de la surélévation projetée n'a pas connu de changement dans l'intervalle et c'est bien sur cet aspect du projet que la CA avait tout d'abord exprimé ses réticences. Cependant, il faut observer que le préavis négatif du 30 avril 2021 était formulé de manière spécifique et nuancée, manifestement après un examen du projet conforme à la méthode ABCD, c'est-à-dire tenant compte de l'insertion du projet dans le tissu bâti, à l'échelle des bâtiments adjacents et à celle du quartier. Mais c'est également sous l'angle des modifications du projet propres à améliorer son insertion que la CA a revu son point de vue, suite à la séance de présentation du 7 juin 2021.

À partir de là, les critiques adressées par la recourante sur la manière dont la CA a apprécié le projet en y donnant finalement son accord, ne font que substituer son point de vue à celui de cette instance. Il en va spécifiquement de la question de savoir si, malgré le gabarit de la surélévation, son style et ses aménagements de détail permettent de préserver l'harmonie urbanistique de la rue, ou du moins de ne pas l'aggraver dans une mesure telle que l'intérêt public à la préservation de la situation actuelle l'emporterait sur les intérêts privés des propriétaires et sur l'intérêt public à la construction de nouveaux logements, Ce désaccord, conformément à la jurisprudence susmentionnée, ne saurait être arbitré librement, puisque l'autorité intimée a suivi le préavis de l'instance spécialisée, de sorte que le tribunal de céans doit s'imposer une certaine retenue et éviter d'imposer sa propre appréciation subjective sur ces questions. Cela étant, on peut observer que si la rupture d'échelle actuelle entre l'immeuble concerné et le tissu bâti ne peut qu'être accentuée par la surélévation, il est beaucoup moins évident que cette dernière accentuerait également la rupture de style. Le fait de retravailler le dernier étage de l'immeuble, même s'il s'agit d'un étage supplémentaire, peut au contraire être l'occasion d'atténuer la rupture créée à l'origine par la construction de l'immeuble dans les années 1970. C'est du moins ce que semble avoir retenu la CA, d'une manière qui, au vu du projet, n'apparaît pas d'emblée dénuée de pertinence. Le tribunal relèvera également que les simulations versées au dossier lors de la séance du 7 juin 2021 montrent que depuis les rues adjacentes, et même dans la rue G______ à une certaine distance, la surélévation apparaîtra très peu perceptible. Il est par ailleurs vain de critiquer le projet en reprochant à ses mandataires le langage promotionnel qu'ils ont utilisé en parlant notamment d'autonomisation de l'immeuble, seuls les éléments se rapportant concrètement à la réalisation de la surélévation devant être pris en considération sous l'angle de de l'art. 27 al. 3 LCI.

12.         Au vu de ce qui précède, le grief de violation de cette disposition légale apparaît insuffisamment fondé et devra être écarté.

13.         La recourante soulève ensuite le grief de violation de l'art. 11 al. 4 LCI dont l'autorité intimée aurait fait application à rebours des exigences posées par cette disposition légale, en particulier celles qui prévoient que le dépassement du gabarit légal, d'une part, ne doit pas nuire à l'harmonie de la silhouette de l'agglomération, ni à la perception de sa topographie et, d'autre part, doit se justifier par son aspect esthétique et sa destination, et être compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier. Au contraire de ces exigences, le projet litigieux se démarquerait du gabarit de l'agglomération et sa hauteur créerait un accident majeur dans la silhouette du secteur. Il ne se justifierait pas non plus par son aspect esthétique et sa destination et ne serait pas compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier. Par ailleurs, les immeubles voisins, dont plusieurs sont soumis à un régime de protection, ne pourraient pas être surélevés. L'augmentation de la densité bâtie, pour un gain de 11 logements seulement, dans un secteur d'ores et déjà dense, serait discutable, vu notamment l'absence d'harmonie urbaine.

14.         Selon l'art. 11 al. 4 LCI, le département peut, après consultation de la commission d’architecture, autoriser un dépassement du gabarit prescrit par la loi lorsque les constructions prévues :

a) sont édifiées sur des terrains dont la surface libre est suffisante pour préserver les voisins des inconvénients que pourrait impliquer le supplément de hauteur ;

b) n'excèdent pas l’indice d’utilisation du sol qui résulterait de la stricte application de la loi ;

c) ne nuisent pas à l’harmonie de la silhouette de l’agglomération ni à la perception de sa topographie ;

d) se justifient par leur aspect esthétique et leur destination et sont compatibles avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier.

15.         En l'espèce, dans son dernier préavis favorable du 28 janvier 2022, la CA s'est déclarée d'accord avec l'octroi d'une dérogation au sens de l'art. 11 al. 4 et 5 LCI. Elle a par conséquent examiné les critères d'après lesquels une telle dérogation pouvait être octroyée, notamment sous l'angle des let. c et d de cette disposition légale. Dans cette mesure, la recourante ne fait à nouveau que substituer sa propre appréciation à celle de la CA. Soutenir que le projet litigieux nuirait à l'harmonie de la silhouette de l'agglomération semble présupposer, du point de vue de la recourante, qu'une augmentation de la hauteur de l'immeuble, en créant une différence plus sensible de gabarit avec les bâtiments voisins, serait par elle-même péjorative. Un tel point de vue ferait cependant abstraction d'une prise en considération plus globale de la situation, qui doit mettre en balance l'état existant (dans lequel chacun s'accorde en l'espèce à dire que l'immeuble en cause constitue une rupture urbanistique) et l'état futur, sachant que l'ensemble des éléments qui caractérisent la surélévation, à savoir non seulement le gabarit, mais également les caractéristiques architecturales de cette surélévation, sont susceptibles, comme déjà dit, d'apporter une amélioration de l'état actuel. Cette mise en balance relève d'une appréciation complexe et subtile qui appartient en premier lieu à l'instance spécialisée et que la juridiction de céans doit s'abstenir de remettre en cause, à moins qu'elle n'apparaisse d'emblée incompréhensible – ce qui n'est pas le cas en l'occurrence.

16.         Au vu de ce qui précède, le grief de violation de l'art. 11 al. 4 LCI devra lui aussi être écarté.

17.         Intégralement non fondé, le recours sera ainsi rejeté.

18.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 1'100.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais de CHF 900.- versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

19.         Vu l'issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 1'500.-, à la charge de la A______, sera allouée aux intimés pris ensemble, hormis le département (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 2 mai 2022 par la A______ contre l'autorisation DD 5______/1 délivrée par le département du territoire le 16 mars 2022 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 1'100.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais ;

4.             condamne la A______ à verser à Madame B______, Monsieur C______, D______ SA et E______ SA ET CONSORTS, pris ensemble, une indemnité de procédure de CHF 1'500.- ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Olivier BINDSCHEDLER TORNARE, président, Diane SCHASCA et Carmelo STENDARDO, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière