Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des prud'hommes

1 resultats
C/22420/2019

CAPH/27/2022 du 10.02.2022 sur JTPH/319/2020 ( OS ) , REFORME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/22420/2019-1 CAPH/27/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU JEUDI 10 FEVRIER 2022

 

Entre

A______ SÀRL, sise ______[GE], appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 2 octobre 2020 (JTPH/319/2020), comparant par Me Andreas DEKANY, avocat, rue du Conseil-Général 4, case postale 412, 1211 Genève 4, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Madame B______, domiciliée ______[F], intimée, comparant en personne.


EN FAIT

A. a. A______ SARL (ci-après également : la société ou l'employeuse) est une société à responsabilité limitée ayant son siège à C______ (Genève), dont le but est la rénovation et tous travaux dans le domaine du bâtiment ainsi que tous travaux liés à la menuiserie et à l’ébénisterie.

D______ en est l’associé gérant, avec signature individuelle.

b. Par contrat signé le 1er mai 2017, B______ (ci-après également : la collaboratrice ou la travailleuse) a été engagée par A______ SA à partir du 1er mai 2017, pour une durée indéterminée, en qualité de comptable travaillant sur appel, mais au minimum 20 heures par semaine. Le salaire horaire convenu était de 22 fr. 90 bruts, auquel étaient ajoutés une indemnité de vacances de 10.64%, un treizième salaire pro rata temporis de 8.33% et une indemnité pour jours fériés de 3.60%. L’employée avait droit à cinq semaines de vacances par année. Le délai de congé était de deux mois pour la fin d’un mois dès la troisième année de service.

c. Aux termes de l'art. 23 par. 1 du contrat, les parties sont convenues de la pleine application de la Convention collective de travail du second-œuvre romand, laquelle primait le contrat.

d. B______ se rendait concrètement deux jours par semaine dans les locaux de la société, situés au domicile privé de D______, pour établir la comptabilité.

Elle a exposé avoir eu pour tâche de reprendre la comptabilité et les déclarations fiscales de la société, qui n'étaient plus établies depuis 2015, en collaboration avec la fiduciaire E______. Auparavant, la comptabilité avait été tenue par l'ex-épouse de D______.

e. De janvier à juin 2019, B______ a perçu une rémunération mensuelle calculée comme suit : salaire de base mensuel brut 1'820 fr. + treizième salaire pro rata temporis 151 fr. 80 (8.33%) + part vacances 193 fr. 65 (10.64%) + jours fériés 65 fr. 50 (3.60%) = 2'230 fr. 75 bruts, soit 2'002 fr. 70 nets. Elle a également touché mensuellement 700 fr. d'allocations familiales.

f. B______ s'est présentée une dernière fois sur son lieu de travail le 21 août 2019 et n'y est plus retournée par la suite.

g.a. B______ et A______ SARL s'opposent sur les circonstances ayant entouré la fin des rapports de travail.

g.b. Selon A______ SARL, D______ avait eu un entretien avec B______ lorsqu'elle était venue travailler le 21 août 2019, au cours duquel il lui avait annoncé que la société avait du retard dans le paiement des salaires de juillet car un client ne l'avait pas encore payée. En outre, la situation financière de la société nécessitait une réduction des coûts impliquant qu'il reprenne la tenue de la comptabilité. Il avait donc demandé à la collaboratrice de lui montrer comment introduire dans le système informatique les mouvements comptables et de laisser l'ordinateur portable qu'elle utilisait dans les bureaux de la société. B______ ne s’était plus présentée à son poste de travail dès le 23 août 2019 et n’avait plus répondu aux appels téléphoniques de D______. Ils s'étaient néanmoins rencontrés chez E______ le 28 août 2019, rencontre au cours de laquelle elle lui avait confirmé ne plus vouloir revenir travailler pour la société qu'elle détenait encore. Il lui avait alors demandé de restituer les affaires appartenant à la société, ce qu'elle avait refusé. D______ avait dû trouver en urgence une fiduciaire pour remplacer B______.

g.c. Selon B______, A______ SARL a fait l'objet d'un contrôle du fisc et de l'AVS le 13 août 2019, ce qui avait impliqué qu'elle travaille intensément pour le préparer, y compris le samedi et le dimanche. D______ lui avait téléphoné le 14 août 2019 pour lui dire qu’il n’avait plus les moyens de la rémunérer et lui avait donné rendez-vous le 21 août 2019. Elle avait continué à travailler jusqu’à cette date et s’était rendue ce jour-là dans l’appartement de D______, avec son ordinateur et ses classeurs de travail. Il lui avait demandé de laisser tout ce matériel sur place et de lui rendre les clés du local de l'entreprise. Il lui avait également demandé de lui montrer comment établir lui-même la comptabilité. Elle lui avait indiqué avoir droit à deux mois de préavis, mais D______ lui avait répondu qu’il était trop tard et qu’il avait déjà confié son travail à une fiduciaire.

g.e. En date du 23 août 2019, D______ (D______) et B______ (B______) ont échangé des SMS à la teneur suivante :

D______ : "??? Bonjour B______, Pourquoi tu me répondes pas ? Je ne comprends pas ".

B______ : "Je pense que j étais honnête avec toi tu m a menti et tu dis à tout le monde que je l ai viré alors merci nous n avons plus rien à se dire“.

D______ : "C'est pas vrai. Dommage. Je peux pas dire autre chose. Merci beaucoup quand même pour tout les aides que tu à faites pour moi. Tu peux envoyer mes clés et la carte de l'essence par poste stp".

B______ : "J attends mes papiers et déclarations salaires et décompte si non moi j irais au tribunal contrairement aux autres".

D______ : "C'est pas grave si tu veux pas m'aider mai tout ce que je disent c'était la vérité. Je ne suis jamais menti pour toi. Je ne veux pas que tu partes comme ça. Vraiment dommages. Je ne sais pas pourquoi tu parles comme ça mais je vais faire les ".

h. Par courrier du 29 août 2019, A______ SARL a résilié avec effet immédiat le contrat de B______ en raison du fait que celle-ci ne s'était plus présentée à son poste de travail suite à son licenciement oral du 21 août 2019, qu'elle ne répondait plus à ses nombreux appels et qu'elle divulguait des informations confidentielles aux autres collaborateurs et anciens employés de la société. A______ SARL confirmait dans le même courrier le contenu d'un entretien du 28 août 2019, ayant eu lieu au domicile de E______, chez qui B______ effectuait des heures de ménage, et au cours duquel celle-ci avait affirmé à D______ ne plus avoir voulu travailler pour lui au-delà de l'annonce de la fin des rapports de travail le 21 août 2019 et ne pas vouloir lui restituer les clés du local de l'entreprise ainsi que lui restituer tout document qu'elle détiendrait encore.

i. B______ a adressé à A______ SARL une réponse audit courrier datée du 9 septembre 2019 dans laquelle elle soulignait être impayée depuis deux mois et avoir néanmoins déployé une importante activité pour reprendre la comptabilité depuis 2015 dans la perspective du contrôle de l'AVS et du fisc du 13 août 2019. Or, le 21 août 2019, D______ lui avait dit que la société n'était plus en mesure de lui régler son salaire, ce qui était faux au vu de la comptabilité de la société. Elle contestait pour le surplus avoir eu des contacts avec d'autres employés de l'entreprise qui ne parlaient d'ailleurs pas le français. Elle accusait son employeur d'avoir prémédité son licenciement avec effet immédiat dès le jour où elle avait restitué l'ordinateur, l'agenda, la liste des contacts, les mots de passe, les clés ainsi que divers documents et qu'elle avait expliqué à D______ comment établir la comptabilité. Finalement, elle contestait avoir conservé quoi que ce soit appartenant à son employeur, si ce n'était une carte G______ qui était en tout état bloquée et qu'elle était prête à remettre dès que A______ SARL lui aurait versé ses salaires des mois de juillet et août 2019, le salaire dû pendant le délai de congé et les documents usuels de fin de rapports de travail, notamment ceux destinés à son inscription au chômage.

j. B______ a adressé un nouveau courrier à A______ SARL daté du 30 septembre 2019 par lequel elle refusait son licenciement et le contestait.

k. Par courrier recommandé du 10 octobre 2019, A______ SARL a accusé réception du courrier du 9 septembre 2019, reçu le 17 septembre, et rappelé à B______ son abandon de poste le lendemain de la discussion du 21 août 2019 avec D______. Elle a contesté ne pas avoir versé le salaire de juillet 2019, ce qui avait été fait le 29 août 2019. Pour le surplus, elle faisait parvenir à l'employée le décompte final suivant : salaire du mois d'août en 1'282 fr. 40 (56 h. x 22 fr. 90 du 1er au 21 août), plus indemnité de vacances (8.33%), treizième salaire (10.64%) et jours fériés (3.60%), soit au total 1'571 fr. 80 bruts, sous déduction de 161 fr. 40 à titre de charges sociales, de 557 fr. 70 à titre d'indemnité pour abandon de poste (1/4 du salaire mensuel de 2'230 fr. 75) et de 2'201 fr. 20 à titre de part salariale des cotisations de prévoyance professionnelle pour 2018 (1'207 fr. 20 sur 12 mois) et 2019 (994 fr. sur 8 mois) – qu'elle accusait l'employée de ne pas avoir déduites de ses salaires alors qu'elle était en charge de la comptabilité –, soit un solde négatif en faveur de l'employeur de 790 fr. 80. Finalement, A______ SARL exigeait la restitution des clés de l'entreprise, de la carte G______ et de tout autre document qu'elle détiendrait encore.

l. B______ a requis la poursuite de A______ SARL le 3 octobre 2019 pour un montant non précisé. L'Office cantonal des poursuites à notifié à la débitrice un commandement de payer, poursuite n° 1______, le 18 novembre 2019, auquel elle a fait opposition à réception.

L'Office a facturé des avances de frais de poursuite de 138 fr. 05 à B______.

B.            a. Par requête déposée au greffe de l'autorité de conciliation des prud’hommes le 14 octobre 2019, déclarée non conciliée à l'audience du 9 janvier 2020, et par demande simplifiée non motivée introduite auprès du Tribunal des prud’hommes (ci-après : le Tribunal) le 3 février 2020 B______ a assigné A______ SARL en paiement de la somme de 14'014 fr., montant qu'elle a amplifié à 16'253 fr. 75 par écritures déposées le 4 mars 2020, puis finalement réduit à 13'453 fr. 75 à l'audience du 15 juin 2020, se décomposant comme suit :

·    2'230 fr. 75 bruts, à titre de salaire pour le mois de juillet 2019;

·    2'230 fr. 75 bruts, à titre de salaire pour le mois d’août 2019;

·    700 fr. nets, à titre d’allocations familiales pour le mois d’août 2019;

·    1'450 fr. bruts, à titre d’indemnité pour jours de vacances non pris en nature;

·    4'461 fr. 50 bruts, à titre de salaire durant le délai de congé;

·    150 fr. nets, à titre de remboursement de frais de poursuites;

·    2'230 fr. 75 bruts, à titre d’indemnité pour licenciement abusif.

b. Le Tribunal a convoqué une audience le 15 juin 2020.

b.a A______ SARL a déposé le jour même de l'audience un mémoire de réponse motivé. Sur demande principale, elle a conclu au déboutement de B______ de l’entier de ses conclusions et, sur demande reconventionnelle, elle a conclu, avec suite de frais, à la condamnation de celle-ci au versement de 1'348 fr. 50, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 23 août 2019, à titre d'indemnité pour abandon de poste et à titre de cotisations de prévoyance professionnelle non prélevées en 2018 et 2019, ainsi qu’à la restitution des clés de l’entreprise, de la carte G______ et de tout document et matériel appartenant à la société encore en possession de B______.

Le Tribunal a remis le mémoire de réponse et de demande reconventionnelle à B______ à l'ouverture de l'audience.

b.b Il a procédé dans une première phase de l'audience à une "audition des parties".

Selon le procès-verbal, les parties ont alors déposé des pièces complémentaires et fourni des explications relatives au versement du salaire du mois de juillet 2019 de B______.

A______ SARL a produit une confirmation d’un virement bancaire de 2'000 fr. exécuté le 29 août 2019 en faveur de B______ comportant la mention "salaire juillet" ainsi qu'un relevé de son compte courant faisant apparaître trois versements en faveur de B______ de 2'000 fr. chacun, exécutés les 3 juin, 11 juillet et 29 août 2019.

B______ a déposé des extraits de son compte bancaire pour l’année 2019 dont il ressort qu’elle avait reçu son salaire du mois de décembre 2018 le 3 janvier 2019, celui de janvier 2019 le 7 février 2019, celui de février 2019 le 7 mars 2019, celui de mars 2019 le 2 mai 2019, celui d’avril 2019 le 3 juin 2019, celui de mai 2019 le 5 juillet 2019. Le dernier salaire versé par A______ SARL le 29 août 2019, était donc celui du mois de juin 2019.

Les parties ont ensuite exposé leurs dernières conclusions.

c. Le Tribunal a procédé, dans une seconde phase de l'audience, intitulée "administration des preuves", à l'interrogatoire des parties. Leurs propos ont déjà été largement reportés ci-dessus; elles ont ajouté les éléments suivants :

B______ a prétendu n’avoir jamais pris de vacances durant les rapports de travail, alors que A______ SARL a déclaré ignorer si tel était le cas car sa collaboratrice organisait ses deux demi-journées de travail hebdomadaires à sa guise.

Après avoir déclaré qu'elle ne comprenait pas la demande reconventionnelle de A______ SARL, B______ a reconnu devoir la part salariale des cotisations de prévoyance professionnelle en 1'207 fr. 20 pour 2018 et fr. 994 fr. pour 2019 qui n'avaient pas été prélevées sur son salaire. Elle savait qu'elle avait été déclarée à la caisse de prévoyance de A______ SARL, la Fondation collective F_______, et que des cotisations étaient versées en sa faveur par A______ SARL, mais ne s'était toutefois pas rendue compte que les déductions n'étaient pas effectuées sur son salaire car elle pensait que le logiciel qui établissait les fiches de paie les opérait automatiquement.

B______ a finalement expliqué avoir voulu s’inscrire au chômage, mais que A______ SARL ne lui avait pas remis les documents nécessaires, de sorte qu’elle n’avait pu entreprendre les démarches qu’au mois de février 2020. Elle n’avait pas touché d’indemnités de l’assurance-chômage et n’avait pas pu effectuer de recherches d’emploi en 2019.

d. A l’issue de l’interrogatoire des parties, le Tribunal a ordonné les plaidoiries finales et gardé la cause à juger.

e. Par jugement JTPH/319/2020 du 2 octobre 2020, le Tribunal, statuant par voie de procédure simplifiée, a, sur le fond, condamné A______ SARL à verser à B______ la somme brute de 10'301 fr. 10 (2'462 fr. 50 bruts à titre de salaire pour le mois de juillet 2019, 7'387 fr. 50 bruts d'indemnisation du délai de congé de deux mois pour la fin d'un mois en raison d'un licenciement immédiat injustifié, 451 fr. 10 bruts d'indemnité de vacances), sous déduction de la somme nette de 2'201 fr. 20 à titre de part salariale des cotisations de prévoyance professionnelle non déduite du salaire en 2018 et 2019 (chiffre 4 du dispositif), invité la partie qui en avait la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 5), condamné A______ SARL à verser à B______ la somme nette de 2'230 fr. 75 à titre d'indemnité pour licenciement immédiat injustifié (ch. 6), condamné B______ à restituer à A______ SARL les clés de l'entreprise, la carte G______ et tout document et matériel appartenant à celle-ci et qui étaient encore en sa possession (ch. 7), dit que la procédure était gratuite et qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 8) et débouté les parties de toute autre conclusion.

Le Tribunal a admis, sur la base des pièces produites par les parties, que le dernier salaire versé par A______ SARL à B______ était celui du mois de juin et non pas celui du mois de juillet 2019. Ce dernier était par conséquent encore dû, à concurrence de 2'462 fr. 50 bruts, vacances, treizième salaire et jours fériés inclus, selon le calcul suivant : salaire horaire contractuel de 22 fr. 90 x 20 heures hebdomadaires x 4.33 semaines par mois, soit 1'983 fr. 14 bruts mensuels; montant majoré des jours fériés payés en 71 fr. 40 (1'983 fr. 14 x 3.60 %), de l'indemnité vacances en 218 fr. 60 ([1'983 fr. + 71 fr. 40] x 10.64%) et du treizième salaire en 189 fr. 35 ([1'983 fr. 14 + 71 fr. 40 + 218 fr. 60] x 8.33%).

En ce qui a trait au paiement de l'indemnité pour vacances non prises en nature de 1'450 fr. bruts, le Tribunal a alloué à B______ un montant de 451 fr. 10 bruts, représentant la différence entre le calcul de l'indemnité de vacances calculée sur la base du salaire mensuel tel que versé par l'employeuse pour toute la durée des rapports de travail et le montant de la même indemnité calculée sur la base du salaire contractuel tel qu'établi au paragraphe précédent ([211 fr. – 193 fr. 65] x 26 mois du 1er mai 2017 au 30 juin 2019).

S'agissant de la fin des rapports de travail, les premiers juges ont retenu, au consid. 5.b de leur jugement, qu'"il résultait du dossier" que D______ avait donné son congé ordinaire à la travailleuse au cours d'un entretien 21 août 2019, justifié par une réduction des coûts et la reprise par lui-même de l'activité qu'elle avait déployée. En outre, ils ont admis, sur la base des "déclarations de la demanderesse qui emport[ai]ent la conviction" que D______ avait demandé à l'intimée de restituer son matériel, de lui rendre les clés et de lui montrer comment établir la comptabilité, tout en lui annonçant qu'il avait déjà confié à une fiduciaire sa tenue. Finalement, les premiers juges ont "considéré" que dans une telle situation l'intimée avait pu comprendre que l'intention de l'appelante était de la libérer de son obligation de travailler dès le 21 août 2019. Le licenciement avec effet immédiat signifié à la travailleuse le 29 août 2019 pour abandon d'emploi était ainsi injustifié, car l'employeuse ne pouvait le motiver sans avoir mis la travailleuse en demeure de reprendre son poste suite aux termes imprécis et ambigus du congé ordinaire signifié le 21 août 2019. Elle avait en effet laissé planer un certain flou en notifiant sa décision oralement, en demandant à la collaboratrice de restituer ses outils de travail et en lui indiquant qu'elle avait confié le travail de comptabilité à une fiduciaire, ce qui pouvait être compris comme une libération de l'obligation de travailler pendant le délai de congé. Il lui appartenait d'assumer les conséquences de l'absence de clarté dans sa communication. En conséquence, B______ avait droit à sa rémunération jusqu'à la date à laquelle les rapports de travail auraient pris normalement fin en application de l'art. 337c al. 3 CO, soit, jusqu'à fin octobre 2019, compte tenu d'un délai de congé de deux mois pour la fin d'un mois pendant la troisième année des rapports de travail, soit 7'387 fr. 50 bruts (2'462 fr. 50 x 3 mois – août, septembre, octobre). De ce montant, le Tribunal a déduit la somme que la travailleuse reconnaissait devoir à son employeuse au titre de part salariale des cotisations de prévoyance professionnelle non prélevées en 2018 et 2019, soit 2'201 fr. 20 nets. En outre, une indemnité équivalente à un mois de salaire environ était allouée à la travailleuse en application de l'art. 337c al. 3 CO, soit 2'230 fr. 75 nets conformément à ses dernières conclusions, montant justifié par le fait que l'employeuse n'avait remis que tardivement les documents nécessaires à son ancienne collaboratrice pour permettre son inscription auprès de la Caisse de chômage, la laissant sans ressource de juillet 2019 à avril 2020.

Corollairement, le Tribunal a rejeté la demande reconventionnelle en paiement de A______ SARL d'une indemnité de 557 fr. 70 pour abandon d'emploi.

C. a. Par acte déposé le 4 novembre 2020 au greffe de la Chambre d'appel des prud'hommes de la Cour de justice (ci-après : la Chambre), A______ SARL a fait appel dudit jugement, reçu le 5 octobre 2020, et conclu, avec suite de frais, à l'annulation des chiffres 4 à 6 de son dispositif, cela fait, statuant à nouveau sur demande principale, au déboutement de B______ de toutes ses conclusions et, statuant à nouveau sur demande reconventionnelle, à la condamnation de B______ à lui verser un montant de 557 fr. 70 plus intérêt à 5% l'an dès le 23 août 2019.

L'appelante faisait grief au Tribunal d'avoir violé les règles sur la preuve en retenant la version des faits alléguées par B______ s'agissant de la fin des rapports de travail, sans explication et sans disposer de la moindre preuve pour la soutenir, si ce n'est son intime conviction de la véracité des propos de l'intimée, alors que les pièces produites permettaient de prouver la version des faits alléguées par A______ SARL. Elle persistait ainsi à soutenir qu'il y avait eu abandon de poste par la collaboratrice et non pas licenciement ordinaire avec libération de l'obligation de travailler de sa part. Ainsi, contrairement à ce qu'avait retenu le Tribunal, il n'y avait jamais eu libération de la collaboratrice de son obligation de travailler et l'employeuse lui avait demandé de revenir travailler après le 21 août 2019, ce qui ressortait de l'échange de SMS du 23 août 2019. L'appelante reprochait aux premiers juges d'avoir ignoré ses allégués incontestés selon lesquels l'intimée avait confirmé sa volonté de ne plus travailler lorsque D______ lui avait demandé par SMS de revenir sur sa décision de ne plus travailler pour elle et lors de la rencontre du 28 août 2019 chez une connaissance commune. Elle faisait également grief au Tribunal de ne pas avoir tenu compte du contenu de ses courriers des 29 août et 10 octobre 2019. L'administration et l'appréciation des preuves ne pouvant conduire qu'à la constatation d'un abandon d'emploi, l'intimée devait être déboutée de sa demande en indemnisation consécutive à un licenciement avec effet immédiat injustifié et l'appelante devait se voir allouer une indemnité pour abandon d'emploi au sens de l'art. 337d al. 1 CO.

L'appelante a également reproché au Tribunal d'avoir retenu de manière incompréhensible une rémunération mensuelle de la travailleuse de 2'462 fr. 50, alors que le salaire mensuel brut convenu de la travailleuse était de 2'230 fr. 75.

Elle a enfin fait grief au Tribunal d'avoir admis une indemnisation des vacances non prises en nature, alors que l'intimée gérait seule la prises de ses vacances et en avait certainement bénéficié.

b. Par ordonnance d'instruction du 5 novembre 2020, reçue le 19 novembre 2020 par B______, la Chambre a fixé un délai de trente jours dès réception de l'ordonnance pour déposer sa réponse à l'appel.

c. Dans la réponse déposée le 16 décembre 2020 au greffe de la Chambre, l'intimée a tout d'abord déclaré que le jugement du Tribunal lui convenait, tout en formulant des conclusions en appel joint dans les paragraphes suivants. Elle concluait ainsi à ce que l'intégralité de ses conclusions formulées à l'audience du Tribunal le 15 juin 2020 lui soient allouées et à ce que la demande de A______ SARL en remboursement du montant de 2'201 fr. 20 à titre de part salariale des cotisations de prévoyance professionnelle soit rejetée. Elle prenait enfin des conclusions nouvelles visant à l'allocation d'une indemnité de 4'000 fr. pour quatre mois sans salaire ni possibilité de rechercher du travail de septembre à décembre, car son employeuse refusait de lui délivrer l'attestation destinée à la caisse de chômage, et à l'octroi d'une réparation du préjudice moral de 2'000 fr. en raison de la perte de temps occasionnée par la présente procédure et les intérêts de retard.

Elle exposait qu'elle n'avait pas préparé tous les justificatifs pour l'audience du 15 juin 2020 et n'avait pas allégué tous les faits pertinents. Elle a ainsi précisé que D______ avait en réalité prémédité depuis juin 2019 déjà de la licencier, ce qui ressortait du fait qu'il lui avait demandé en juillet 2019 de transmettre une série de documents dans le but de remettre la tenue de la comptabilité à un tiers et du fait que son mot de passe pour accéder au logiciel de comptabilité avait été désactivé. En outre, D______ lui avait demandé le 14 août 2019 par téléphone de rendre l'ordinateur et les dossiers en sa possession au motif que la société n'était plus en mesure de la rémunérer. Elle produisait deux captures d'écran de messages SMS à l'appui de ces allégués.

Elle contestait avoir eu l'intention d'abandonner son poste, car elle s'entendait bien avec la fiduciaire E______ qui lui permettait de progresser professionnellement.

En outre, elle alléguait avoir également déployé une activité ménagère un jour par semaine au domicile de D______, comprise dans la rémunération de 2'000 fr. nets versée mensuellement, ce dont les enfants du précité pouvaient témoigner.

Par ailleurs, elle contestait avoir réellement compris l'enjeu de ce qu'elle disait lorsqu'elle avait reconnu devoir des cotisations de prévoyance professionnelle devant le Tribunal et se rétractait. En effet, elle savait que D______ avait demandé à l'informaticien de programmer le logiciel de tenue des fiches de paie afin que la part salariale des cotisations de prévoyance professionnelle ne soit pas prélevée sur les salaires des employés, car il voulait que la société les assume intégralement, par générosité.

d. Dans sa réponse à l'appel joint, déposée le 29 janvier 2021, A______ SARL a contesté les allégués nouveaux de B______, conclu à l'irrecevabilité des pièces nouvelles déposées et des conclusions nouvelles formulées par l'appelante jointe, au rejet de l'appel joint et confirmé ses conclusions antérieures.

En substance, l'appelante principale constatait l'absence de griefs formulés par l'appelante jointe contre le jugement. Elle soulignait la mauvaise foi de cette dernière qui revenait sur sa reconnaissance de dette s'agissant du prélèvement des cotisations de prévoyance professionnelle : comptable de formation, elle avait parfaitement compris de quoi il s'agissait lors de l'audience du Tribunal.

e. Dans un courrier déposé le 17 février 2021 au greffe universel du Pouvoir judiciaire, B______ a persisté dans ses dernières conclusions.

f. Le greffe de la Chambre a informé les parties que la cause était gardée à juger par courrier du 23 mars 2021.

EN DROIT

1.             1.1 Interjeté contre une décision finale de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC), auprès de l'autorité compétente (art. 124 let. a LOJ), dans une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 91 al. 1, 92 al. 1, 308 al. 2 CPC), dans le délai utile de trente jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1, 142 al. 1, art. 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

1.2 Formé dans la réponse à l'appel, laquelle a été déposée dans le délai de trente jours fixé à cette fin et dans le respect des formes énoncées ci-dessus (art. 312 al. 2 et 313 al. 1 CPC), l'appel joint est également recevable.

1.3 Les deux appels seront traités dans le même arrêt. Par souci de simplification et pour respecter le rôle initial des parties en appel, A______ SARL sera ci-après désigné en qualité d'appelant et B______ en qualité d'intimée.

1.4 La Chambre revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC) dans la limite des griefs qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêts du Tribunal fédéral 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 5; 5A_89/2014 du 15 avril 2014 consid. 5.3.2).

1.5 La valeur litigieuse en première instance étant inférieure à 30'000 fr., la procédure simplifiée s'applique et le procès est régi par la maxime des inquisitoire sociale, qui prévoit que le juge recherche d'office les faits (art. 55, 243 et art. 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC).

2.             L'appelante invoque l'irrecevabilité des conclusions nouvelles de l'appel joint, ainsi que les faits nouveaux allégués et les pièces nouvelles produites à son appui.

2.1.1 A teneur de l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b). Les deux conditions sont cumulatives (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_436/2020 du 5 février 2021 consid. 4.3).

L'art. 317 al. 1 CPC est applicable même lorsque la cause est soumise à la maxime inquisitoriale sociale (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

2.1.2 Aux termes de l'art. 317 al. 2 CPC, la demande ne peut être modifiée en appel que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 CPC sont remplies (let. a) et si la modification repose sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux (let. b). L'art. 227 al. 1 CPC autorise la modification de la demande si la prétention nouvelle ou modifiée relève de la même procédure et présente un lien de connexité avec la dernière prétention ou, à défaut d'un tel lien, si la partie adverse consent à la modification de la demande.

2.2 En l'espèce, les conclusions nouvelles formulées par l'intimée dans son appel joint sont irrecevables puisqu'elles ne sont pas fondées sur des faits nouveaux et auraient pu être articulées en première instance déjà.

Quant aux faits nouveaux et pièces nouvelles, ils sont en principe irrecevables puisqu'ils étaient déjà connus au cours de la procédure de première instance et auraient pu être invoqués devant le Tribunal. Toutefois, cette irrecevabilité en appel restera sans incidence sur l'issue du litige puisque ce dernier sera à nouveau soumis aux premiers juges pour les motifs qui suivent et les faits pourront être plus complètement allégués ainsi que des preuves produites à cette occasion.

3.             L'appelante invoque des griefs tenants au fait que le Tribunal a retenu dans sa décision des éléments incompréhensibles, non prouvés, sans motivation ou suite à une appréciation erronée des preuves. L'intimée ne développe pas particulièrement de griefs, mais, en reprenant ses conclusions de première instance, conduit la Chambre à constater d'emblée que le Tribunal a statué sur ses conclusions en s'écartant de ce qui était demandé.

La Chambre traitera en bloc l'ensemble de ces griefs car ils relèvent d'un même reproche global adressé aux premiers juges de ne pas avoir instruit et jugé cette affaire conformément à la procédure simplifiée et au droit d'être entendues.

3.1.1 La procédure simplifiée se déroule selon les art. 244 et ss CPC et, par analogie, les art. 221 et ss CPC (art. 219 CPC).

En application de l'art. 245 CPC, si la demande simplifiée n'est pas motivée, le tribunal la notifie au défendeur et cite les partis aux débats (art. 245 al. 1 CPC). Si la demande simplifiée est motivée, un délai est fixé au défendeur pour se prononcer par écrit (art. 245 al. 2 CPC). Le tribunal décide des mesures à prendre pour que la cause puisse être liquidée autant que possible lors de la première audience (art. 246 al. 1 CPC). Si les circonstances l'exigent, il peut ordonner un échange d'écritures et tenir des audiences d'instruction (art. 246 al. 2 CPC). Le Tribunal amène les parties, par des questions appropriées, à compléter les allégations insuffisantes et à désigner les moyens de preuve (art. 247 al. 1 CPC). Les allégués des parties qui ne se trouvent pas dans leurs actes écrits sont consignés dans leur substance au procès-verbal d'audience (art. 235 al. 2 CPC cum art. 219 CPC).

Bien qu'écourtée, la procédure simplifiée reste soumise aux règles ordinaires, notamment en matière de droit à s'exprimer deux fois dans la phase de l'allégation des faits (art. 229 al. 2 CPC), de débats d'instruction (art. 226 CPC), de débats principaux (art. 228 et ss CPC) et d'administration des preuves (art. 150 et ss CPC), notamment d'ordonnances de preuve (ATF 144 III 117 consid. 2.2; arrêts du Tribunal fédéral 4A_395/2017 du 11 octobre 2018 consid. 4.4.2; 4A_108/2017 du 30 mai 2017 consid. 3.1).

3.1.2 Le tribunal établit les faits d'office dans les litiges de droit du travail soumis à la procédure simplifiée dont la valeur litigieuse ne dépasse pas 30'000 fr. (art. 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC).

L’art. 247 al. 2 CPC prescrit la maxime inquisitoire simple ou maxime inquisitoire sociale et non la maxime inquisitoire illimitée. Elle a pour but de protéger la partie faible au contrat, de garantir l'égalité entre les parties au procès et d'accélérer la procédure. Le tribunal n'est soumis qu'à une obligation d'interpellation accrue. Comme sous l'empire de la maxime des débats, les parties doivent recueillir elles-mêmes les éléments du procès. Ainsi, elles doivent renseigner le juge sur les faits de la cause et lui indiquer les moyens de preuve propres à établir ceux-ci. De son côté, le juge doit les informer de leur devoir de coopérer à la constatation des faits et à l'administration des preuves. Il ne leur vient en aide que par des questions adéquates afin que les allégations nécessaires et les moyens de preuve correspondants soient précisément énumérés. Il doit ainsi les interroger pour s'assurer que leurs allégués de fait et leurs offres de preuves sont complets s'il a des motifs objectifs d'éprouver des doutes sur ce point. Son rôle ne va toutefois pas au-delà; il ne se livre à aucune investigation de sa propre initiative. Le juge n'est pas lié par l'offre de preuve d'une partie et peut l'inviter à compléter ses moyens. Il peut rechercher lui-même des preuves s'il a des motifs objectifs de soupçonner que ses allégués et offres de preuves sont lacunaires et qu'il a connaissance, sur la base des déclarations des parties et/ou du dossier, de moyens de preuve pertinents (ATF 141 III 569 consid. 2.3; 139 III 13 consid. 3.2).

3.1.3 En application des art. 29 al. 2 Cst. et 53 CPC, les parties à la procédure ont le droit d'être entendues, ainsi que le droit de consulter le dossier.

La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu, tel que garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1; 135 I 279 consid. 2.3), celui de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui d'avoir accès au dossier, celui de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos. Singulièrement, le droit d'être entendu comprend le droit pour l'intéressé d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuve pertinentes, présentées en temps utile et dans les formes prescrites (ATF 132 V 368 consid. 3.1; 131 I 153 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_265/2015 du 22 septembre 2015 consid. 2.2.1).

Le droit de s'exprimer sur tous les points importants avant qu'une décision ne soit prise s'applique sans restriction pour les questions de fait. Pour ce qui est de la qualification juridique des faits, ce droit ne vaut que lorsqu'une partie change inopinément son point de vue juridique ou lorsque l'autorité a l'intention de s'appuyer sur des arguments juridiques inconnus des parties et dont celles-ci ne pouvaient prévoir l'adoption; il faut qu'il s'agisse d'un motif juridique non évoqué, dont aucune des parties ne pouvait supputer la pertinence (ATF 131 V 9 consid. 5.4.1; 126 I 19 consid. 2c/aa et 2d/bb; 124 I 49 consid. 3c; arrêts du Tribunal fédéral 4A_428/2016 du 15 février 2017 consid. 3.1.1; 4A_268/2016 du 14 décembre 2016 consid. 3.1 et les arrêts cités).

Le droit d'être entendu implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3; arrêt du Tribunal fédéral 1C_361/2020 du 18 janvier 2021 consid. 3.1). Pour satisfaire à cette exigence, il suffit que l'autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 145 IV 99 consid. 3.1; 143 III 65 consid. 5.2).

Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de nature formelle, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond. Ce droit n'est cependant pas une fin en soi. Ainsi, lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation du droit d'être entendu a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée (ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1; 141 V 495 consid. 2.2; 127 V 431 consid. 3d/aa; arrêt du Tribunal fédéral 1C_229/2020 du 27 août 2020 consid. 2.1).

Par ailleurs, une violation du droit d'être entendu en instance inférieure est réparée, pour autant qu'elle ne soit pas d'une gravité particulière, lorsque l'intéressé a eu la faculté de se faire entendre en instance supérieure par une autorité disposant d'un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (ATF 130 II 530 consid. 7.3; 127 V 431 consid. 3d/aa; 126 V 130 consid. 2b).

3.1.4.1 Chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit (art. 8 CC).

3.1.4.2 Le juge d'appel dispose d'un pouvoir de cognition complet (cf. supra 1.4) et contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3).

3.1.4.3 Le tribunal établit sa conviction par une libre appréciation des preuves administrées (art. 157 CPC). Autrement dit, le juge apprécie librement la force probante de ces preuves en fonction des circonstances concrètes qui lui sont soumises, sans être lié par des règles légales et sans être obligé de suivre un schéma précis. Il n'y a pas de hiérarchie légale entre les moyens de preuves autorisés (arrêts du Tribunal fédéral 5A_113/2015 du 3 juillet 2015 consid. 3.2 et 5A_250/2012 du 18 mai 2012 consid. 7.4.1).

L'appréciation des preuves par le juge consiste à soupeser le résultat des différents moyens de preuves administrés et à décider s'il est intimement convaincu que le fait s'est produit, et partant, s'il peut le retenir comme prouvé. Lorsque la preuve d'un fait est particulièrement difficile à établir, les exigences relatives à sa démonstration sont moins élevées; elles doivent en revanche être plus sévères lorsqu'il s'agit d'établir un fait qui peut être facilement établi (arrêt du Tribunal fédéral 5A_812/2015 du 6 septembre 2015 consid. 5.2).

De simples allégations de parties, fussent-elles même plausibles, ne suffisent pas à prouver un fait, à moins qu'elles ne soient corroborées par des pièces qui accréditent la thèse soutenue (ATF 141 III 433; arrêts du Tribunal fédéral 5A_795/2013 du 27 février 2014 consid. 5.2; 5A_414/2012 du 19 octobre 2012 consid. 7.3; 5A_225/2010 du 2 novembre 2010 consid. 3.2).

L’interrogatoire et la déposition d’une partie sont des moyens de preuve objectivement adéquats prévus par la loi (art. 168 al. 1 lit. f CPC) et ils doivent être appréciés librement à l'instar des autres moyens de preuve, sans pouvoir être d'emblée exclus en raison de leur faible valeur probante. Il n’est dès lors pas admissible de dénier à ces moyens de preuve d’emblée toute capacité à prouver un fait. Ce n'est qu'une fois administrés et appréciés dans le cas d'espèce qu'il pourra être retenu une valeur probante faible (ATF 143 III 297 consid. 9.3.2).

3.1.5 En vertu de la maxime de disposition, le tribunal ne peut accorder à une partie ni plus ni autre chose que ce qui est demandé, ni moins que ce qui est reconnu par la partie adverse (art. 58 CPC).

3.2.1 En l'espèce, il ressort du dossier de première instance qu'une demande simplifiée, non motivée, a été déposée par l'intimée, accompagnée de quelques pièces. Conformément à l'art. 245 al. 1 CPC, le Tribunal a convoqué les parties à une audience. Ayant reçu une réponse écrite à la demande, contenant une demande reconventionnelle, le jour même de l'audience, le Tribunal a admis cet acte à la procédure et l'a remis à l'intimée au début de l'audience du 15 juin 2020. Il n'est pas indiqué si l'intimée a disposé de temps pour en prendre connaissance. L'audience a suivi son cours avec une courte phase intitulée "audition des parties" pendant laquelle les parties se sont exprimées sur le paiement du salaire de juillet 2019 et ont déposé des pièces sur cet objet, puis ont conclu. Il faut donc assimiler cette phase à des débats d'instruction au sens de l'art. 226 CPC et à des premières plaidoiries au sens de l'art. 228 CPC, au cours de laquelle le Tribunal n'a protocolé aucun allégué des parties sur d'autres objets que le salaire de juillet 2019. A l'ouverture des débats principaux et de l'administration des preuves, il ne disposait donc que des allégués contenus dans la réponse et demande reconventionnelle écrite de l'appelante et des pièces produites par les parties. Une telle manière de procéder est non seulement contraire à la séquence procédurale prévue par les art. 244 et ss et 220 et ss CPC, applicables par renvoi de l'art. 219 CPC, mais elle est également incompatible avec le respect du droit d'être entendu tel que décrit ci-dessus. L'intimée n'a pas été interpellée en vue de procéder à des allégués, afin que ceux-ci puissent être protocolés. Elle a à peine pu prendre connaissance de la demande reconventionnelle et n'a pas pu se déterminer à son égard ni y répondre. Ce n'est finalement que dans la phase de l'audience intitulée "administration des preuves", qui a consisté dans l'interrogatoire des parties, soit au cours des débats principaux, que l'intimée a pu exposer des faits, ce qui relève d'une conduite du procès qui méconnaît la partition entre la phase de l'allégation et la phase de l'administration des preuves, soit entre l'instruction préalable écrite et les débats d'instruction, d'une part, et les débats principaux, d'autre part. On voit mal comment des preuves peuvent être administrées alors que les faits n'ont pas été allégués, que chacune des parties n'a pas pu se déterminer sur les faits allégués par l'autre, que les faits contestés n'ont pas pu être identifiés et que la pertinence des allégués à prouver n'a pas été évaluée (art. 150 al. 1 et 152 al. 1 CPC).

Plus précisément l'intimée n'a pas été interpellée pour procéder à des allégués ou se déterminer sur les allégués de la partie adverse à propos des circonstances que la procédure permet de considérer comme pertinentes. Il s'agit notamment de sa formation professionnelle (comptable ?), des circonstances antérieures à l'entretien du 21 août 2019 et les pièces qu'elles a produites à cet égard, des circonstances de cet entretien, de son contenu, du matériel exact qu'elle a laissé dans les locaux de la société et de l'incidence de cette restitution sur la possibilité de continuer à travailler suite à cet entretien, de la signification à donner aux SMS produits par l'appelante, du contenu de la discussion du 28 août 2019 chez E______ et des reproches de divulgation d'informations confidentielles.

L'appelante n'a pas été interpellée non plus sur certains faits pertinents, soit pour procéder à ses propres allégués, soit pour se déterminer sur les "allégués" de la partie adverse. Il s'agit notamment des circonstances antérieures à l'entretien du 21 août 2019 évoquées par l'intimée, à propos desquelles elle ne s'est jamais prononcée, la manière dont elle a signifié le congé ordinaire à l'intimée et son échéance (en réalité il semble qu'elle n'ait jamais clairement allégué avoir donné un tel congé), le contenu précis de l'entretien du 21 août 2019, les objets dont elle a demandé et/ou obtenu la restitution à cette occasion et le contenu précis de la discussion du 28 août 2019.

Les parties auraient également dû être invitées à proposer des preuves de leurs allégués et le Tribunal aurait dû à tout le moins les interpeller à propos de l'audition de E______.

En ne permettant pas aux parties de s'exprimer conformément aux normes de procédure rappelées ci-dessus, notamment d'alléguer les faits pertinents et de requérir l'administration de preuves, au moment adéquat, cas échéant suite à une interpellation du Tribunal, les premiers juges ont violé leur droit d'être entendues et leur droit à la preuve de telle manière qu'il convient qu'ils reprennent ab initio le traitement de la procédure, la Chambre d'appel ne pouvant le faire à leur place, les lacunes dans le traitement du dossier s'étant manifestées dès le tout début de la procédure de première instance.

3.2.2 L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir admis la version des faits exposée par l'intimée, sans aucune motivation pour retenir que le licenciement avec effet immédiat pour abandon d'emploi était injustifié.

Le Tribunal a retenu, au cons. 5.b de son jugement, qu'"il résultait du dossier" que D______ avait donné son congé ordinaire à la travailleuse au cours d'un entretien 21 août 2019, justifié par une réduction des coûts et la reprise par lui-même de l'activité qu'elle avait déployée. En outre, le Tribunal a retenu, sur la base des "déclarations de la demanderesse qui emport[ai]ent la conviction" que D______ avait demandé à l'intimée de restituer son matériel, de lui rendre les clés et de lui montrer comment établir la comptabilité, tout en lui annonçant qu'il avait déjà confié à une fiduciaire sa tenue. Finalement, le Tribunal a "considéré" que dans une telle situation l'intimée pouvait comprendre que l'intention de la demanderesse était de la libérer de son obligation de travailler dès le 21 août 2019.

Ces affirmations du Tribunal sont en effet fondées essentiellement sur les déclarations de l'intimée, certes émises sous la forme de l'interrogatoire qui en font un moyen de preuve valable, mais qui entrent en contradiction avec les déclarations de l'intimée, également recueillies en interrogatoire et donc tout aussi probantes. L'appelante conteste en effet avoir libéré la travailleuse de son obligation de travailler en produisant un échange de SMS et en alléguant avoir rencontré l'intimée le 28 août 2021 chez E______, soit deux occasions lors desquelles elle l'aurait invitée à revenir travailler et aurait essuyé des refus de son employée. Pour soutenir que les déclarations de l'intimée emportaient la conviction par rapport à celles de l'appelante, le Tribunal aurait donc dû argumenter et les confronter à d'autres éléments à la procédure, ce qui n'est pas le cas puisqu'il s'est limité à dire que les déclarations de l'intimée l'avaient plus convaincu que celles de l'appelante, sans autre explication.

Il en découle que le Tribunal n'a pas procédé à une appréciation correcte des preuves dont il disposait avec pour conséquence l'établissement d'un état de fait hasardeux.

Les griefs de l'appelante à cet égard sont en conséquence fondés.

3.2.3 L'appelante reproche également au Tribunal d'avoir procédé à un calcul incompréhensible du salaire mensuel de l'employée que ce soit pour l'allocation du salaire du mois de juillet 2016 ou de l'indemnisation du licenciement avec effet immédiat injustifié.

Il ressort du jugement entrepris que le Tribunal a calculé le salaire mensuel sur la base du contrat de travail signé entre les parties en partant du salaire horaire et de l'horaire convenu, ce qu'il a expliqué de manière compréhensible et aucun reproche de motivation ne peut lui être adressé à cet égard.

En revanche, le Tribunal a violé l'art. 58 al. 1 CPC et le droit d'être entendu en calculant le salaire de la sorte car, à teneur du dossier, aucune des parties – notamment l'intimée qui y aurait eu intérêt – n'a procédé à un tel calcul ni demandé que le Tribunal le fasse. Elles se sont toutes deux référées au salaire régulièrement versé depuis plusieurs mois, lequel correspond ainsi vraisemblablement à leur accord. L'intimée a d'ailleurs repris, dans ses conclusions d'appel, un montant de salaire mensuel correspondant à celui pratiqué entre les parties de 1'820 fr. et non pas celui de 1'983 fr. 14 calculé par le Tribunal. Dans ces circonstances, ce dernier s'est prononcé sur une question qui ne lui avait pas été soumise et vraisemblablement exorbitante à l'objet du litige. Les parties ne se sont en tous les cas pas prononcées sur cette question avant le jugement à teneur du dossier, alors qu'elles n'avaient pas à s'attendre à ce que le juge la traite, ce qui entraîne également une violation du droit d'être entendu (cf. supra 3.1.3), emportant la nullité du jugement. Le Tribunal devra par conséquent également réexaminer cette question avec les parties après avoir déterminé si elle appartient bien à l'objet du litige.

3.2.4 L'appelante reproche finalement aux premiers juges d'avoir admis, à tout le moins partiellement, les conclusions de l'intimée concernant l'indemnisation des vacances non prises en nature, estimant que la travailleuse avait pris des vacances vu la liberté dont elle jouissait dans l'organisation de son travail.

Sur cet objet, la travailleuse a repris en appel ses conclusions de première instance visant à une indemnisation complète des vacances qu'elle n'avait prises en nature durant les rapports de travail. Elle n'a toutefois développé aucun grief contre le jugement du Tribunal à cet égard.

Sur cet objet, les premiers juges ont à nouveau statué sur autre chose que ce qui leur était demandé : ils ont alloué à l'intimée la différence entre le montant qu'elle avait déjà touché au titre de la part des vacances du salaire, calculé sur la base d'un salaire mensuel brut de 1'820 fr., et le montant qu'elle aurait dû toucher sur la base d'un salaire brut de 1'983 fr. 14, calculé selon le raisonnement exposé au considérant précédent. Ils ne se sont en revanche pas du tout penchés sur ce que l'intimée demandait, à savoir son droit à une indemnisation des vacances qu'elle aurait pas prises en nature durant les rapports de travail, en sus du paiement d'une part de salaire consacrée aux vacances, du fait qu'elle n'aurait pas pris de vacances en nature durant les rapports de travail.

Sur ce point également, le jugement doit donc être annulé et retourné au Tribunal pour instruction et nouvelle décision, celui-ci ayant statué en violation de l'art. 58 al. 1 CPC et du droit d'être entendues des parties.

3.3 Les diverses violations des règles de procédure et du droit d'être entendu constatées ci-dessus conduisent à annuler le jugement entrepris et à renvoyer la procédure aux premiers juges, car elles ne permettent pas à la Chambre de confirmer ou de réformer la décision, cas échéant après un complément d'instruction. Trop d'étapes dans la séquence procédurale, dès le stade des allégués, ont été omises pour permettre une réparation en instance d'appel.

Le jugement entrepris sera par conséquent annulé et la cause retournée au Tribunal pour instruction et nouveau jugement.

4.             Compte tenu de la valeur litigieuse inférieure à 50'000 fr., il n'est pas perçu de frais judiciaires d'appel (art. 71 RTFMC).

Il n'est pas alloué de dépens devant le Chambre d'appel des prud'hommes (art. 22 al. 2 LACC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 1 :

A la forme :

Déclare recevables l'appel de A______ SARL et l'appel joint de B______ des 4 novembre et 16 décembre 2020 contre le jugement JTPH/319/2020 du 2 octobre 2020 dans la cause C/22420/2019-1.

Au fond :

Annule ledit jugement.

Retourne la cause au Tribunal pour nouvelle instruction et jugement dans le sens des considérants.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Monsieur Pierre-Alain L'HÔTE, juge employeur; Monsieur Yves DUPRE, juge salarié; Madame Chloé RAMAT, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119
al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 15'000 fr.