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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/17095/2020

ACJC/1410/2023 du 23.10.2023 sur JTBL/734/2022 ( OBL ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 23.11.2023, 4A_568/2023
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/17095/2020 ACJC/1410/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 23 OCTOBRE 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 7 octobre 2022, représenté par Me Maud VOLPER, avocate, boulevard Georges-Facon 14, 1204 Genève,

et

Madame B______, domiciliée ______, intimée, représentée par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, Genève 6.

 

 


EN FAIT

A.           a. Par jugement JTBL/734/2022 du 7 octobre 2022, notifié le 13 octobre 2022 à A______, le Tribunal des baux et loyers (ci-après : le Tribunal) a annulé le congé notifié à B______ le 27 juillet 2020 pour le 31 mai 2021, s'agissant de l'appartement de quatre pièces situé au rez et au 1er étage de l'immeuble sis [n°], rue 1______ à Genève (chiffre 1 du dispositif), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 2) et dit que la procédure était gratuite (ch. 3).

b. Le Tribunal a tenu compte d'une part du fait que A______ avait tardé à communiquer le motif de congé. D'autre part, et même si C______ avait confirmé le motif de congé, il n'existait aucun besoin concret de disposer exclusivement de l'appartement litigieux. D'autres logements comparables s'étaient en effet libérés dans l'immeuble – ou allaient se libérer – qui auraient pu être occupés par C______.

Compte tenu de ces éléments, le Tribunal a considéré que le motif de congé n'était pas digne de protection et a annulé en conséquence le congé litigieux en application de l'art. 271 al. 1 CO.

B.            a. Par acte expédié à la Cour de justice le 11 novembre 2022, A______ (ci-après : l'appelant ou le bailleur) a formé appel du jugement précité. Il a conclu principalement à ce qu'il soit annulé, à ce que la résiliation notifiée à B______ le 27 juillet 2020 soit déclarée valable et à ce qu'une unique prolongation de bail de 18 mois au maximum soit accordée à B______.

b. En substance, il a reproché au Tribunal d'avoir, d'une part, constaté les faits de manière inexacte et, d'autre part, d'avoir violé le droit.

b.a S'agissant de la constatation inexacte des faits, A______ considère que le Tribunal aurait qualifié le logement de duplex, alors qu'il s'agirait en réalité d'un triplex. Cette erreur aurait été commise alors que le Tribunal disposait des plans de l'appartement.

Le Tribunal aurait également omis de tenir compte du fait que C______ souhaitait emménager dans l'appartement litigieux tout particulièrement afin d'habiter à proximité de sa tante et de sa grand-mère qui vivent dans le même immeuble, ou à tout le moins à proximité. Le Tribunal n'aurait ainsi pas tenu compte de cette volonté de se rapprocher des membres de sa famille.

Finalement, le Tribunal a erré en considérant que les logements qui s'étaient libérés et qui allaient l'être étaient comparables à l'appartement litigieux, tant géographiquement qu'au vu du nombre de pièces. En réalité, douze appartements au total se seraient libérés, dont sept présentaient un nombre inférieur de pièces et un seul constituait un duplex.

b.b A______ soutient ensuite que le Tribunal aurait violé le droit en retenant que le motif du congé contreviendrait aux règles de la bonne foi.

Tout d'abord, le Tribunal ne pouvait valablement considérer que le motif qui a fondé le congé avait été communiqué tardivement. En effet, ce dernier aurait été indiqué dans l'écriture de réponse à la requête formée par B______.

Ensuite, bien que quatre éléments aient constitué le motif de congé – soit la proximité de l'immeuble avec l'université, avec les logements de la tante et de la grand-mère de C______ ainsi que la configuration du logement en triplex – seul le premier d'entre eux avait fondé le raisonnement du Tribunal.

Puis, le Tribunal aurait arbitrairement retenu une disproportion manifeste des intérêts en présence, alors qu'aucun motif de santé ou financier ne permettait d'arriver à cette conclusion.

Enfin, s'agissant d'une éventuelle prolongation de bail, A______ soutient que, compte tenu des circonstances, et notamment du préavis de congé de 10 mois qui a été observé et de la durée de la procédure, seule une prolongation de 18 mois devrait être accordée.

c. Par réponse du 15 décembre 2022, B______ (ci-après : l'intimée ou la locataire) a préalablement conclu à ce que soit ordonnée la déposition de A______ et à ce qu'il soit procédé à une nouvelle audition des témoins C______ et D______. Elle a principalement conclu à ce que le jugement entrepris soit confirmé. Subsidiairement, à ce que la cause soit renvoyée au Tribunal pour qu'il soit procédé aux mesures d'instructions sollicitées. Plus subsidiairement, à ce que la cause soit renvoyée au Tribunal afin qu'il statue sur les conclusions subsidiaires prises par elle. Encore plus subsidiairement, elle a conclu à ce qu'une prolongation de bail de quatre ans lui soit octroyée, à ce qu'elle soit autorisée à restituer le logement en tout temps avant cette date moyennant un préavis de 15 jours pour le 15 ou la fin de chaque mois et à ce que le loyer soit diminué de 17.36% dès le début de la prolongation du bail, soit dès le 1er juin 2021, et fixé en conséquence à 10'992 fr. par année, charges non comprises.

d.a B______ allègue un fait nouveau et avoir appris que sa voisine de palier – qui occupe un logement comportant deux chambres à coucher, une cuisine ouverte sur le salon et une salle de jeu en sous-sol – avait résilié son contrat de bail au mois d'août 2022 pour le 30 novembre 2022.

d.b Elle produit également une pièce nouvelle.

d.c Elle soutient que le motif invoqué par A______ fondant la résiliation notifiée ne constituerait qu'un prétexte. Les mesures d'instruction accomplies par les premiers juges ainsi que les pièces produites auraient permis de démontrer que d'autres logements correspondant aux prétendus critères allégués par A______ s'étaient libérés durant la même période.

Elle persiste finalement à solliciter une prolongation de quatre ans compte tenu de la durée du bail.

e.a A______ a répliqué le 31 janvier 2023 et allégué que le logement de la voisine de palier de B______ ne correspondait pas aux critères recherchés par C______, dans la mesure où le nombre de pièces était différent.

e.b Il produit également un chargé de pièces nouvelles.

f. Par courriers successifs des 6 mars 2023 et 8 mars 2023, B______ a dupliqué.

g. Les parties ont été informées par plis séparés de ce que la cause avait été gardée à juger en date du 14 avril 2023.

C. Les faits pertinents de la cause sont les suivants :

a. Par contrat du 1er avril 2000, B______ a pris à bail un appartement de 4 pièces en duplex situé au rez et au 1er étage de l'immeuble sis [n°], rue 1______, à Genève, dont A______ est propriétaire.

Le contrat a été conclu pour une durée initiale de six ans, soit du 1er juin 2000 au 31 mai 2006, renouvelable ensuite tacitement d'année en année, sous réserve d'une résiliation avec un préavis de trois mois.

Le loyer annuel, charges non comprises, a été fixé à 16'440 fr. jusqu'au 31 mai 2005 et à 19'728 fr. dès le 1e juin 2005.

b. Suite à une requête de la locataire devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, un procès-verbal de conciliation a été signé entre les parties le 2 décembre 2009. La prochaine échéance du contrat de bail a été fixée au 31 mai 2019, celui-ci se renouvelant par la suite d'année en année. Une baisse de loyer a été accordée à la locataire et le bailleur s'est engagé à faire procéder à l'exécution de travaux.

c. Par avis officiel du 27 juillet 2020, A______ a résilié le bail pour le 31 mai 2021.

d. Sur demande de la locataire, la régie lui a répondu, par courrier du 12 août 2020, que le bailleur ne souhaitait pas lui communiquer le motif du congé.

e. Par requête du 25 août 2020, déclarée non conciliée à l'audience de conciliation du 17 novembre 2020 et portée devant le Tribunal des baux et loyers le 16 décembre 2020, B______ a conclu à l'annulation du congé, subsidiairement à l'octroi d'une prolongation de bail de quatre ans, avec autorisation de restituer le logement en tout temps moyennant un préavis de 15 jours pour le 15 ou la fin d'un mois et avec fixation du loyer annuel, charges non comprises, à 10'992 fr. pendant le temps de la prolongation du bail.

f. Par réponse du 3 mars 2021, le bailleur a conclu au rejet de la requête. Il a exposé qu'il souhaitait que sa fille puisse s'installer avec son ami dans l'appartement litigieux, plus proche de l'université dans laquelle elle avait entrepris des études. Il avait pensé que ce motif serait transmis à la locataire de manière informelle par l'intermédiaire de son épouse, qui était la sœur de la locataire.

Lors de l'audience du 28 mai 2021, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

Le conseil de la locataire a sollicité la production des états locatifs des immeubles de A______ situés proche de [l'établissement] E______, lors de la notification des congés et au jour de l'audience. Il a relevé que deux logements s'étaient libérés au mois de mai 2021 dans l'immeuble où se trouve l'appartement litigieux. L'un des deux avait été très vite reloué et le second se libérait à la fin du mois de mai.

B______ a exposé qu'elle vivait seule dans l'appartement. Elle avait entrepris des recherches en s'inscrivant sur des listes d'attente mais elle était tombée malade en été 2020, ce qui n'avait pas facilité ses recherches.

A______ a confirmé avoir résilié le bail pour les besoins de sa fille âgée de vingt ans qui habitait actuellement seule à F______ [GE] et souhaitait se rapprocher de l'université, de ses amis et de sa famille et gagner du temps dans ses déplacements. Il avait résilié exclusivement ce bail car il s'agissait du seul appartement adapté aux besoins de sa fille, en raison de sa configuration qui permet à deux personnes de l'occuper correctement et de disposer d'une pièce séparée comme bureau. Sa fille envisageait en effet d'emménager avec un tiers. Il avait effectivement appris par la régie que deux appartements s'étaient libérés dans l'immeuble mais il s'agissait de résiliations hors délai pour lesquels les locataires sortants avaient présenté des candidats de remplacement, de sorte qu'ils avaient été reloués très rapidement. Il tenait à préciser qu'il n'avait pas été informé de la libération de ces deux appartements. Tout s'était fait entre la régie, le locataire sortant et le locataire de remplacement. Il ignorait la raison pour laquelle la régie n'avait pas proposé ces deux appartements à la locataire. En tout état, la configuration de ces deux appartements n'était pas adaptée aux besoins de sa fille. En effet, l'appartement occupé par B______ était un triplex, constitué d'un bureau à l'entresol, d'une cuisine et d'un séjour au rez supérieur et de deux chambres au premier étage, ce qui permettrait à sa fille de vivre avec un colocataire. Dans les autres appartements de 4 pièces, il manquait une pièce pour y mettre un bureau. Il y avait par ailleurs très peu de tournus dans ses immeubles. Il s'engageait toutefois à proposer à la locataire la mise à disposition d'éventuels appartements qui pourraient se libérer à l'avenir et à donner instruction en ce sens à la régie.

g. Par ordonnance du 1er juillet 2021, le Tribunal a fixé au bailleur un délai pour produire les états locatifs, de la période courant du 27 juillet 2020 au 1er juillet 2021, avec indication et mise en évidence des dates d'entrée et de sortie, les noms des locataires pouvant être caviardés, pour les immeubles sis rue 1______ [n°] et [n°], rue 2______ no. ______, rue 3______ no. ______, rue 4______ no. ______ et rue 5______ no. ______ et a ordonné 1'audition de témoins.

h. Sous chargé du 22 septembre 2021, le bailleur a produit les états locatifs des immeubles lui appartenant.

i. Lors de l'audience du 2 novembre 2021, le bailleur a répété qu'un seul et unique appartement correspondait aux besoins de sa fille, à savoir celui faisant l'objet de la présente procédure. Les très rares appartements qui s'étaient libérés avaient tous été proposés à la locataire, qui les avait systématiquement refusés. Les appartements en question ne correspondaient pas aux besoins de sa fille. De toute manière, tout ce qui était en lien avec ses autres immeubles était irrelevant, car la notification du congé n'avait rien à voir avec ses autres immeubles. Il ne souhaitait pas répondre à la question de savoir s'il avait discuté avec sa fille de son audition. Il n'avait pas discuté avec sa belle-sœur, G______, de son audition, elle l'avait contacté pour savoir de quoi il en retournait.

C______, fille du bailleur et nièce de B______, a déclaré qu'elle habitait actuellement seule à F______, dans la maison où elle avait grandi. Elle étudiait à E______ et souhaitait se rapprocher de l'université, de sa famille et de ses amis, qui habitaient tous à H______ [GE]. Elle connaissait l'appartement de sa tante. Elle souhaitait emménager car l'appartement répondait à ses besoins et à ceux d'un futur colocataire. Il y avait deux chambres et un espace au sous-sol qui pouvait être aménagé comme bureau. Elle souhaitait emménager avec un colocataire, soit sans doute un collègue de l'université. Elle refusait de donner le nom de son futur colocataire vu que l'affaire n'était pas conclue. Elle avait une idée de la personne qui viendrait habiter avec elle et elle lui en avait déjà parlé. Elle refusait toutefois de donner son nom car elle estimait que cela ne servait à rien, en dépit de l'injonction du Tribunal. Elle ne s'était jamais rendue dans l'appartement mais avait vu des plans. De tous les appartements de son père, celui de sa tante correspondait le mieux à ses besoins. Elle n'avait pas été préparée par son père pour son audition. L'appartement était proche de l'université. Par ailleurs, une autre de ses tantes, G______, habitait dans le même immeuble et sa grand-mère logeait à proximité, soit à I______ [GE]. C______ ignorait que des appartements s'étaient récemment libérés dans les immeubles sis [n°] et [n°], rue 1______. Elle avait décidé d'emménager en ville fin 2019-début 2020. C'est à cette époque qu'elle avait convenu avec son père de choisir cet appartement. Elle avait communiqué ses critères de recherche à son père et cet appartement était le seul qui correspondait à ses besoins. A défaut de pouvoir disposer de ce logement, elle resterait à F______.

G______, sœur de l'épouse du bailleur et de la locataire, a déclaré vivre dans le même immeuble que cette dernière. Elle savait que son beau-frère avait résilié le bail de sa sœur au motif que leur nièce, C______, souhaitait emménager dans l'immeuble avec un colocataire. C______ venait régulièrement chez elle. Elle ignorait que des appartements s'étaient libérés dans l'immeuble. Elle connaissait depuis environ six mois le souhait de sa nièce d'emménager dans l'appartement litigieux, mais n'avait appris que le bail de sa sœur avait été résilié que lorsqu'elle avait demandé à A______ quelle était la raison de sa convocation par le tribunal.

j. A l'audience du 5 avril 2022, A______ a admis la véracité des dates de libération des appartements ressortant des états locatifs. Il a répété qu'en tout état de cause, seul l'appartement occupé par B______ l'intéressait en raison de sa configuration particulière.

D______, gestionnaire en charge de l'immeuble concerné et de l'immeuble situé [n°], rue 1______, auprès de J______ SA, a déclaré qu'il ignorait la raison pour laquelle le motif du congé n'avait pas été communiqué dans le courrier de la régie du 12 août 2020. Lui-même savait qu'il s'agissait de loger la fille de A______ dans l'appartement en question, dont la configuration était parfaite et permettait une colocation. Dès le début, A______ lui demandait avec insistance de trouver un autre appartement pour B______. Il était fort probable que d'autres appartements se soient libérés dans l'immeuble après la notification du congé. Les résiliations anticipées passaient nécessairement "chez" lui. Il avait eu connaissance d'appartements qui s'étaient libérés dans le même immeuble après le congé querellé; ils ne convenaient pas à une personne seule, de sorte qu'ils n'avaient pas été proposés à la locataire. Il s'agissait en effet de deux appartements de 4 pièces, mais il estimait que la surface était trop grande pour accueillir une personne seule. Ces deux appartements n'avaient pas non plus été proposés à la fille du bailleur, dans la mesure où leur configuration n'était pas la même que celle de l'appartement de B______ qui permettait de disposer d'une pièce pour étudier à l'entresol. De manière générale, le propriétaire était informé des résiliations de bail. Il avait donc été informé de ces deux résiliations. La régie avait proposé à B______ de nombreux appartements depuis fin septembre 2020, sans obtenir de réponse de sa part. Il est vrai que seul cinq ou six des logements proposés appartenaient au bailleur ou à l'une de ses sociétés. Les autres étaient gérés pas des confrères.

k. Par ordonnance du 23 juin 2022, le Tribunal, estimant que l'affaire était en état d'être jugée, a clôturé la phase d'administration des preuves et fixé aux parties un délai pour le dépôt de leurs plaidoiries finales écrites.

l. Dans ses plaidoiries finales du 29 juillet 2022, B______, persistant dans ses conclusions, a relevé qu'il résultait des états locatifs produits par le bailleur que de nombreux logements lui appartenant s'étaient récemment libérés. Elle en a cité six de quatre pièces et plus, pouvant donc accueillir deux personnes et étant au moins aussi proches de l'université que l'appartement litigieux, de sorte que le bailleur aurait pu les proposer à sa fille. A défaut de l'avoir fait, le motif du congé qu'il invoquait ne pouvait pas être considéré comme correspondant à la réalité.

m. Par écriture du 2 septembre 2022, le bailleur a lui aussi persisté dans ses précédentes conclusions. Il a ajouté que ses relations avec la locataire étaient tendues depuis de nombreuses années en raison de problèmes familiaux. Il a réitéré le motif de congé, à savoir que l'appartement litigieux, en raison de sa configuration en duplex, convenait parfaitement au souhait de sa fille d'habiter en ville et en colocation. Tel n'était pas le cas des autres appartements qui s'étaient libérés, de surcroît postérieurement à la notification du congé.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

La valeur litigieuse est déterminée par les dernières conclusions de première instance (art. 91 al. 1 CPC; Jeandin in Commentaire Romand, Code de procédure civile, 2e éd., 2019, N 13 ad art. 308 CPC ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_594/2012 du 28 février 2013).

Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné ou l'a effectivement été. Lorsque le bail bénéficie de la protection contre les congés des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, de prendre en considération la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; 136 III 196 consid. 1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

1.2 En l'espèce, le loyer annuel pour l'appartement de 4 pièces, charges non comprises, a été fixé en dernier lieu à 19'728 fr. par an.

Ainsi, la valeur litigieuse est manifestement supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.3 Interjeté dans le délai prescrit et selon la forme requise par la loi, l'appel est recevable (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC).

1.4 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1); en particulier, le juge d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

2. L'intimée allègue un fait nouveau et, tant l'appelant que l'intimée, produisent des pièces nouvelles.

Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

Les deux conditions sont cumulatives (Jeandin, op. cit., , N 6 ad art. 317 CPC).

En l'espèce, l'intimée allègue avoir appris en août 2022, que sa voisine de palier avait résilié son contrat de bail et produit une pièce nouvelle à cet égard. Ces éléments sont recevables, dans la mesure où ils sont postérieurs à la date à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger, soit le 5 avril 2022.

Dans la mesure où ce fait et la pièce produite à cet effet ne sont pas pertinents pour la solution du présent litige, la question peut demeurer ouverte s'agissant des deux pièces produites par l'appelant à l'appui de sa réplique du 31 janvier 2023.

3. L'intimée a sollicité l'audition de témoins, et celle de l'intimé.

3.1 Toute partie a droit à ce que le Tribunal administre les moyens de preuve adéquats proposés régulièrement et en temps utile aux fins d'établir les faits pertinents et contestés (art. 150 al. 1 et 152 al. 1 CPC). Par moyens de preuve adéquats, il faut comprendre ceux qui sont aptes à forger la conviction du juge sur la réalité d'un fait pertinent, autrement dit dont la démonstration peut avoir une incidence sur l'issue du litige. A cette adéquation objective s'ajoute une adéquation subjective, qui consisterait dans le fait qu'une preuve ne doit être administrée que si le juge n'est pas fondé à penser qu'elle est inutile, par exemple parce qu'il est déjà convaincu de l'existence ou de l'inexistence du fait à prouver. Un tel refus repose sur une appréciation anticipée de la preuve, qui est permise par la jurisprudence dans certaines limites et se rattache au thème plus général de la libre appréciation (Schweizer, Code de procédure civile commenté, 2011, N 8-10 ad art. 152 CPC). Ce principe vaut même lorsque la maxime inquisitoire s'applique (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2; 136 I 229 consid. 5.3 et 130 III 734 consid. 2.2.3; ACJC/1227/2017 du 2 octobre 2017 consid. 3.1.1).

A teneur de l'art. 316 al. 1 CPC, l'instance d'appel peut ordonner des débats ou statuer sur pièces. Conformément à l'alinéa 3, l'instance d'appel peut librement décider d'administrer des preuves : elle peut ainsi ordonner que des preuves administrées en première instance le soient à nouveau devant elle, faire administrer des preuves écartées par le Tribunal de première instance ou encore décider l'administration de toutes autres preuves. Cette disposition ne confère toutefois pas à l'appelant un droit à la réouverture de la procédure probatoire et à l'administration de preuves. L'autorité d'appel peut rejeter la requête de réouverture de la procédure probatoire et d'administration d'un moyen de preuve déterminé présentée par l'appelant si celui-ci n'a pas suffisamment motivé sa critique de la constatation de fait retenue par la décision attaquée, si la preuve n'a pas été régulièrement offerte, dans les formes et les délais prévus par le droit de procédure, ou si elle ne porte pas sur un fait pertinent pour l'appréciation juridique de la cause (ATF 133 III 189 consid. 5.2.2; 129 III 18 consid. 2.6 et les références); elle peut également refuser une mesure probatoire en procédant à une appréciation anticipée des preuves, lorsqu'elle estime que le moyen de preuve requis ne pourrait pas fournir la preuve attendue ou ne pourrait en aucun cas prévaloir sur les autres moyens de preuve déjà administrés par le Tribunal de première instance, à savoir lorsqu'il ne serait pas de nature à modifier le résultat de l'appréciation des preuves qu'elle tient pour acquis (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 et les arrêts cités).

L'autorité jouit d'un large pouvoir d'appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 5A_11/2014 du 3 juillet 2014 consid. 2.2; 4A_229/2012 du 19 juillet 2012 consid. 4).

Lorsque l'affaire est en état d'être tranchée sur la base du dossier constitué et qu'aucune mesure d'instruction supplémentaire n'est nécessaire, l'instance d'appel peut alors « statuer sur pièces », l'affaire étant gardée à juger (Jeandin, op. cit., N 3 ad art. 316 CPC).

3.2 En l'espèce, l'intimée, à l'appui de ses requêtes d'audition, ne fait valoir aucune raison pour laquelle ces auditions seraient utiles, ni sur quels faits pertinents.

Par conséquent, cette requête sera rejetée dans la mesure où l'affaire est en état d'être jugée.

4. Dans un premier grief, l'appelant se plaint d'une constatation inexacte des faits.

4.1 La « constatation inexacte des faits » mentionnée à l'art. 310 let. b habilite l'instance supérieure à revoir les faits sans restriction, ce qui découle de la nature ordinaire de la voie de l'appel, en vertu de laquelle le litige se continue pour ainsi dire devant l'instance supérieure (Jeandin, op. cit., N 6 ad art. 310).

4.2 S'agissant tout d'abord de la constatation par le Tribunal que le logement est un « duplex », l'appelant estime que l'autorité précédente a erré, alors qu'elle disposait des plans de l'appartement et était dès lors en mesure de constater qu'il s'agissait en réalité d'un triplex. Il s'agit toutefois d'un détail irrelevant pour l'issue du litige, dans la mesure où la composition de l'appartement – sur deux ou trois étages – n'a jamais été invoquée par l'appelant. Par ailleurs, ce dernier se réfère également à l'appartement litigieux en employant le terme « duplex » dans ses écritures.

L'appelant soutient ensuite que le Tribunal n'aurait pas tenu compte de la proximité géographique du logement litigieux avec ceux de la grand-mère et de la tante de C______. Ce point a été mentionné dans le jugement querellé. Par ailleurs, dans son évaluation de la « situation géographique » des appartements qui s'étaient libérés ou qui allaient l'être, le Tribunal a estimé que ceux-ci étaient au moins équivalents à l'appartement litigieux.

Finalement, concernant les logements qui allaient se libérer, l'appelant allègue que sept d'entre eux présentaient un nombre de pièces inférieur à celui de l'intimée. Il n'en demeure pas moins que cinq logements disposaient d'un nombre de pièces suffisant dans l'esprit de l'appelant, et que l'un d'entre eux était construit en duplex. La motivation de l'appelant mène à une conclusion tout à fait différente que celle à laquelle il parvient, puisqu'il existait ainsi des logements comparables également quant au nombre de pièces qui auraient pu convenir à C______.

Par ailleurs, il sera fait référence à l'audition de D______ qui a relevé que deux logements de 4 pièces s'étaient libérés après le congé litigieux dans le même immeuble.

Compte tenu de ce qui précède, le grief est infondé.

5. Dans un second grief, l'appelant reproche au Tribunal d'avoir violé le droit, en tant que ce dernier a annulé le congé notifié le 27 juillet 2020 au motif qu'il serait contraire aux règles de la bonne foi. Selon le Tribunal, l'intérêt légitime invoqué a été affaibli car l'appelant avait tardé à communiquer le motif fondant le congé et aucun besoin concret de disposer de l'appartement litigieux – et pas d'un autre – n'avait été établi.

5.1.1 Lorsque le bail est de durée indéterminée, chaque partie est en principe libre de résilier le contrat pour la prochaine échéance convenue en respectant le délai de congé prévu (cf. art. 266a al. 1 CO; ATF 140 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1). La résiliation ordinaire du bail ne suppose donc pas l'existence d'un motif de résiliation particulier (art. 266a al. 1 CO), et ce même si elle entraîne des conséquences pénibles pour le locataire (ATF 141 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1).

La seule limite à la liberté contractuelle des parties découle des règles de la bonne foi : lorsque le bail porte sur une habitation ou un local commercial, le congé est annulable lorsqu'il contrevient aux règles de la bonne foi (art. 271 al. 1 CO; cf. également art. 271a CO; ATF 140 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1).

Le congé ordinaire donné par le bailleur pour pouvoir occuper lui-même l'habitation ou les locaux commerciaux n'est donc annulable que s'il se révèle incompatible avec les règles de la bonne foi au sens des art. 271 s. CO (arrêts du Tribunal fédéral 4A_198/2016 du 7 octobre 2016 consid. 4.3 et 4A_18/2016 du 26 août 2016 consid. 3.3).

5.1.2 La protection accordée par l'art. 271 al. 1 CO procède à la fois du principe de la bonne foi (art. 2 al. 1 CC) et de l'interdiction de l'abus de droit (art. 2
al. 2 CC), tant il est vrai qu'une distinction rigoureuse ne se justifie pas en cette matière (ATF 120 II 31; arrêt du Tribunal fédéral 4C.170/2004 du 27 août 2004). Les cas typiques d'abus de droit (absence d'intérêt à l'exercice d'un droit, utilisation d'une institution juridique contrairement à son but, disproportion grossière des intérêts en présence, exercice d'un droit sans ménagement, attitude contradictoire) justifient l'annulation du congé; à cet égard, il n'est toutefois pas nécessaire que l'attitude de l'auteur du congé puisse être qualifiée d'abus de droit "manifeste" au sens de l'art. 2 al. 2 CC (ATF 120 II 105; arrêt du Tribunal fédéral 4C.170/2004 précité).

Le but de la réglementation des art. 271 et 271a CO est uniquement de protéger le locataire contre des résiliations abusives et n'exclut pas un congé même si l'intérêt du locataire au maintien du bail paraît plus important que celui du bailleur à ce qu'il prenne fin; seule une disproportion manifeste des intérêts en jeu, due au défaut d'intérêt digne de protection du bailleur, peut rendre une résiliation abusive (ATF 136 III 190 consid. 2; 132 III 737 consid. 3.4.2; arrêts du Tribunal fédéral 4A_414/2009 du 9 décembre 2009 consid. 3.1 et 4A_322/2007 du 12 novembre 2007 consid. 6; ACJC/1292/2008 du 3 novembre 2008; Lachat, in Commentaire Romand du code des obligations I, N 6 ad art. 271).

Le congé doit être considéré comme abusif s'il ne répond à aucun intérêt objectif, sérieux et digne de protection. Est abusif le congé purement chicanier dont le motif n'est manifestement qu'un prétexte (ATF 135 III 112 consid. 4.1; 120 II 31 consid. 4a; arrêts du Tribunal fédéral 4A_735/2011 du 16 janvier 2012 consid. 2.2 et 4C_411/2006).

La résiliation motivée par le souhait du propriétaire d'occuper personnellement les locaux qu'il vient d'acquérir ne saurait être constitutif d'abus de droit. Qui plus est, le bailleur n'a pas besoin de se prévaloir d'un besoin particulier de disposer de la chose louée étant considéré qu'il peut n'avoir pour objectif que de remettre les locaux à un autre locataire de son choix, au même loyer ou à un loyer supérieur mais non abusif. Le besoin concret du bailleur n'entre en considération que pour accorder une prolongation de bail ou pour permettre certains types de résiliation (ACJC/256/2006 du 06.03.2006 K. c/ P.).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, la résiliation motivée par le besoin des proches parents du bailleur d'occuper eux-mêmes l'appartement loué n'est pas contraire aux règles de la bonne foi (arrêts du Tribunal fédéral 4A_538/2008 consid. 4.1; 4C.411/2006 consid. 2.1; 4C.333/1997 consid. 3b et les références citées).

Le besoin à prendre en considération est celui du bailleur pour lui-même ou pour ses proches parents ou allié. Ces derniers sont le conjoint, le partenaire enregistré, le concubin, les enfants et autres descendants, les frères et sœurs, ainsi que leur conjoint (Higi, Commentaire zurichois, N 200-203 ad art. 271a CO).

Le besoin invoqué doit être sérieux, concret et actuel. Un besoin futur et hypothétique n'est pas suffisant (ATF 118 II 50 consid. 3C et les références aux travaux parlementaires; MP 1989 p. 77).

Un congé ne saurait être annulé du seul fait que le motif invoqué constituerait un prétexte. Pour se prononcer sur la base des art. 271 et 271a CO, il convient de ne pas tenir compte de la justification avancée par l'auteur de la résiliation, mais de ses mobiles réels, qui devront être déterminés à la lumière des indices révélés par l'instruction de la cause (ACJC/1005/2009 du 07.09.2009 L. c/ S. consid. 2.2; ACJC/237/1992 du 18.09.1992 B. c/ SI X. et ACJC/287/1992 du 20 novembre 1992 T. c/ SI X). Ainsi, une résiliation intervenue en vue de l'exécution de travaux de rénovation puis d'une relocation à un loyer plus élevé, ou en vue de la vente de l'immeuble et compte tenu du fait que des travaux de rénovation étaient nécessaires, n'a pas été jugée contraire aux règles de la bonne foi (ACJC/216/2001 du 12 mars 2001 P. c/ S. et F.).

5.1.3 La motivation du congé ne constitue pas une condition de sa validité; l'absence de motivation véridique ou complète peut toutefois constituer un indice que le motif réel du congé est contraire à la bonne foi (ATF 125 III 231 consid. 4b; Barbey, Protection contre les congés concernant les baux d'habitation et de locaux commerciaux, thèse Genève 1991, N 290 et 319; Commentaire USPI, N 26 ad art. 271 CO). S'il est par contre admis que le motif réel de résiliation - qui seul entre en considération - était légitime, le congé ne peut être annulé, puisque seul le mensonge qui masque un dessein abusif justifie l'application de l'art. 271 al. 1 CO (arrêt du Tribunal fédéral 4C.85/2006 du 24 juillet 2006 consid. 2.1.2).

Le caractère abusif ou non de la résiliation s'apprécie au moment où l'auteur du congé manifeste sa volonté de mettre un terme au contrat. Le motif avancé pour résilier le bail ne peut ainsi pas devenir contraire aux règles de la bonne foi parce qu'il cesserait d'exister par la suite (arrêt du Tribunal fédéral non publié 4C.176/2004 consid. 2.1 avec les références citées¸ DB 2006 p. 42; Lachat, op. cit., N 12 ad art. 271 CO).

Lorsqu'il doit déterminer le motif réel d'un congé, le juge doit procéder à une appréciation de toutes les preuves qui lui sont apportées. Des faits postérieurs au congé peuvent éclairer la volonté du bailleur au moment où il a résilié le bail. Il n'existe aucun principe juridique qui interdirait de prendre en compte des faits postérieurs en vue de reconstituer ce que devait être la volonté réelle au moment déterminant (arrêts du Tribunal fédéral 4A_241/2010 du 10 août 2010 consid. 2.1.6 et 4A_518/2010 du 16 décembre 2010 consid. 2.4.1; ATF 133 III 61 consid. 2.2.1 et les arrêts cités).

5.1.4 La partie qui demande l'annulation du congé doit rendre à tout le moins vraisemblable la mauvaise foi de la partie adverse. Il n'appartient pas au bailleur de démontrer sa bonne foi car cela reviendrait à renverser le fardeau de la preuve (ATF 135 III 112 consid. 4.1; 120 II 105 consid. 3c; ACJC/334/2002 du 18.03.2002 M. c/ R.).

Le devoir de motiver le congé prévu à l'art. 271 al. 2 CO n'a de sens que dans la mesure où la réalité du motif invoqué peut être vérifiée. Pour pouvoir constater un abus de droit, il faut connaître les motifs pour lesquels le droit a été exercé. De là découle que le Tribunal a l'obligation de vérifier le contenu de la motivation du congé (MP/93 p. 28 et ACJC/1470/1995 du 20.11.1995 M. c/ SI X).

La motivation doit être donnée dans le respect des règles de la bonne foi. En particulier – cela va de soi – les motifs doivent être vrais (ATF non publié du 18.03.1992 in MP 1993 p. 28 consid. 4).

La doctrine et la jurisprudence admettent ainsi que si le bailleur fournit un faux motif à l'appui de la résiliation alors qu'il n'est pas possible d'en établir le motif réel, il faut en déduire que le congé ne repose sur aucun motif sérieux ou en tout cas aucun motif légitime et avouable, ce qui justifie son annulation
(ATF 125 III 231 consid. 4b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_64/2010 du 29 avril 2010 consid. 2.3; Higi, op. cit., N 115 ad art. 271 CO; Weber, Commentaire bâlois, Obligationentrecht I, 4e éd. 2007, N 33 ad art. 271/271a CO; Lachat, op. cit., N 11 ad art. 271; Corboz, Les congés affectés d'un vice, in 9ème Séminaire sur le droit du bail, 1996, page 22; Roncoroni, Le nouveau droit du bail à loyer, in 6ème Séminaire sur le droit du bail, 1990, pages 9 ss).

5.2.1 Dans le cas d'espèce, le congé adressé à l'intimée le 27 juillet 2020, pour le 31 mai 2021, ne donnait pas le motif fondant la résiliation du bail.

Suite à la demande de motivation de congé adressée par l'intimée par courrier du 5 août 2020, l'appelant a refusé de communiquer ce motif.

A ce sujet, il a prétendu qu'il souhaitait communiquer le motif du congé de manière informelle, par l'intermédiaire de son épouse, soit la sœur de l'intimée. Il a par ailleurs relevé dans son écriture du 2 septembre 2022 que les relations familiales étaient tendues.

Compte tenu de ce qui précède, le motif de congé a été communiqué à l'intimée de manière tardive, soit dans le corps de l'écriture de réponse à la demande de l'appelant, en date du 4 mars 2021, c'est-à-dire huit mois après la notification du congé litigieux, réduisant d'autant l'intensité de l'intérêt légitime du motif invoqué.

5.2.2 S'agissant du motif de congé en lui-même et comme rappelé ci-avant, il incombe à l'intimée de démontrer que la résiliation contrevient aux règles de la bonne foi, l'appelant devant, pour sa part, contribuer loyalement à la manifestation de la vérité.

Ce dernier a invoqué le souhait d'installer sa fille dans le logement de l'intimée, raison pour laquelle le bail avait été résilié pour son échéance. A cet égard, s'il est vrai que le motif du congé n'a pas varié, le besoin de C______ de pouvoir emménager exclusivement dans le logement litigieux n'emporte pas la conviction de la Cour.

En effet, l'appelant a tout d'abord évoqué le souhait de sa fille d'emménager avec son ami, ce qui est devenu de plus en plus vague durant la procédure. L'appelant, tout comme sa fille, se sont toujours référés à cette possibilité comme une simple éventualité.

Même si la communication de l'identité d'un colocataire ne peut être déterminante, le principe même d'une colocation paraît en l'espèce hypothétique.

Concernant le besoin de C______ d'emménager dans le logement litigieux, il est apparu que des logements comparables à l'appartement litigieux s'étaient libérés ou allaient l'être dans un avenir proche.

En effet, le témoin D______ a déclaré lors de son audition que deux logements s'étaient libérés dans le même immeuble après la notification du congé litigieux. Ces logements de quatre pièces n'avaient pas été proposés à l'intimée, au motif que leur surface ne convenait pas à une personne seule. Il a par ailleurs été précisé que ces appartements convenaient davantage à deux personnes.

Ces logements n'avaient pas non plus été proposés à C______ au motif que leur configuration ne correspondait pas aux souhaits de cette dernière. Cependant, le critère de la configuration de l'appartement a uniquement été évoqué par l'appelant à l'audience du 28 mai 2021. La configuration de l'appartement – soit un triplex – n'est dès lors pas déterminante.

De plus, la configuration prétendument souhaitée, était en lien avec la présence de l'ami de C______ ou d'un colocataire, dont il a été retenu qu'elle n'était pas établie.

Vu ce qui précède, l'argument de l'appelant invoqué lors de l'audience précitée – faisant suite à l'audition du témoin D______ – et consistant à soutenir qu'il s'agissait de deux résiliations hors délai pour lesquelles les locataires sortants ont été présentés, constitue un prétexte.

Ainsi, l'intérêt légitime de l'appelant de mettre le logement litigieux à disposition de sa fille n'a pas été démontré.

En effet, deux logements de 4 pièces se sont libérés dans le même immeuble. Ceux-ci correspondaient aux critères de recherche de C______, soit la proximité de E______ et de sa famille.

Si le projet de colocation était par hypothèse réel, les deux appartements précités auraient pu être proposés à C______.

Partant, il n'a pas été démontré l'existence d'un besoin objectif, sérieux et digne de protection de l'appelant de disposer exclusivement de l'appartement litigieux afin d'y loger sa fille. Par ailleurs, compte tenu de la durée de la procédure, il ne peut pas non plus être considéré que le besoin de C______ d'emménager dans l'appartement litigieux serait urgent et actuel.

5.2.3 Ainsi, l'intérêt invoqué par l'appelant n'est dès lors pas digne de protection et consacre une disproportion grossière des intérêts en présence.

Il n'est partant pas légitime.

Par conséquent, le congé est contraire aux règles de la bonne foi et c'est à bon droit que le Tribunal l'a annulé.

Le jugement entrepris sera ainsi confirmé.

6. En application de l'art. 22 al. 1 LaCC, il ne sera pas perçu de frais judiciaires et il ne sera pas alloué de dépens.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,

La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 11 novembre 2022 par A______ contre le jugement JTBL/734/2022 du 7 octobre 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/17095/2020.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Madame Pauline ERARD et Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Zoé SEILER et Monsieur Serge PATEK, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Sylvie DROIN

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

Indication des voies de recours : 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.