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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4233/2024

ATA/1225/2025 du 04.11.2025 ( ENERG ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : EAU;APPROVISIONNEMENT EN ÉNERGIE;CONDUITE(TUYAU);SERVITUDE DE CONDUITE;RADIATION(EFFACEMENT);CONDITION DE RECEVABILITÉ;DÉCISION;QUALITÉ POUR AGIR ET RECOURIR;DROIT DE RECOURS DES ASSOCIATIONS;DÉLAI DE RECOURS
Normes : LPA.11.al1; LPA.11.al2; LOJ.132; LPA.57.leta; LPA.4.al1; LPA.5.lete; Cst-GE.168; LSIG.1; RO.1.al1; RO.2; RO.3; RO.12; RO.14; RO.21; RO.9; RO.26; RO.16
Résumé : En tant qu’il manifeste la volonté unilatérale des SIG de mettre fin à leur prise en charge des conduites sur domaine privé, sans avoir consulté préalablement les propriétaires concernés, ce qui a néanmoins pour effet de leur créer des obligations, le courrier litigieux constitue une décision susceptible de recours. La recourante remplit les conditions de la qualité pour recourir des associations. Alors qu’elle était représentée par un conseil, elle a tardé à recourir en attendant un délai de 10 mois pour le faire. Quand bien même la décision n'était pas intitulée comme telle, un tel délai ne saurait être considéré comme raisonnable au sens de la jurisprudence y relative. La recourante n’invoque aucune circonstance le justifiant. Recours irrecevable.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4233/2024-ENERG ATA/1225/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 4 novembre 2025

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me G______, avocate

contre

SERVICES INDUSTRIELS DE GENÈVE intimés



EN FAIT

A. a. Le 22 septembre 2000 a été constituée A______ (ci‑après : l’association) à but non lucratif, ayant son siège au domicile de sa présidente, soit actuellement B______, mariée à C______ et domiciliée chemin D______ 5 à E______.

Les buts principaux de l’association sont « défendre les intérêts communs de ses membres, favoriser les rencontres et la communication entre eux, promouvoir toute activité sportive, culturelle ou de détente, sauvegarder l’harmonie et la tranquillité du lieu, commander de l’huile de chauffage, au meilleur prix, gérer les parcelles en copropriété : 4'290 chemin D______ et 4'291 terrain adjacent à la « patte d’oie » antenne collective de télévision lumière du chemin » (art. 2 des statuts). « Peut être membre de l’association tout propriétaire de villa qui est également copropriétaire des parcelles n° 4'290 et 4'291 et qui adhère aux statuts » (art. 4 des statuts).

b. Le chemin D______, constituant la parcelle n°4'290 de la commune de E______, est la propriété de douze parcelles qu’il dessert, comprenant des logements d’habitation, à savoir les parcelles suivantes, avec indication de leurs propriétaires selon le registre foncier (ci-après : RF) : nos 4'283 (F______ et G______), 4'284 (H______), 4'285 (C______), 4'286 (I______), 4'287 (J______, K______, L______, M______), 4'292 (N______ et O______), 4'293 (P______et Q______), 4'294 (R______), 4'295 (S______ et T______), 4'296 (U______ et V______), 4'297 (W______ et X______) et 4'298 (Y______ et Z______) de la commune de E______ (ci‑après : les propriétaires). Il conduit également à la parcelle n° 4'288 (AA______).

c. Le 14 mai 1976, la servitude de passage n° 1______ sur la parcelle n° 4'290 de la commune de E______ (ci-après : la servitude) a été inscrite au RF en faveur des Services industriels de Genève (ci-après : SIG) pour des canalisations souterraines pour l’électricité et l’eau, en particulier « pour la pose, l’accès, le maintien et l’adaptation à des exigences nouvelles de canalisations souterraines pour l’électricité et l’eau » (art. 1 de l’annexe du RS 1______). « Les copropriétaires s’engage[aient] à ne pas faire ou laisser faire sur l’emplacement des canalisations des constructions, enfoncement de pieux, plantations d’arbres ou autres travaux de terrassement pouvant compromettre leur sécurité » (art. 2 de l’annexe du RS 1______).

Dite servitude est désormais radiée.

B. a. Par courrier du 2 juin 2022, adressé à tous les propriétaires alors inscrits au RF, les SIG les ont informés de leur intention de déposer une demande de radiation de la servitude.

Dite radiation n’aurait aucun impact concernant l’électricité, dans la mesure où ils continueraient d’assurer l’entretien des câbles électriques jusqu’au coupe surintensité général, même si ce point se situait sur le domaine privé. En revanche, ils ne prenaient désormais plus en charge l’entretien des conduites privées qui ne faisaient pas partie du réseau principal d’eau potable. Il ne s’agissait pas d’une modification du règlement pour la fourniture de l’eau, adopté par le conseil d’administration des SIG le 9 septembre 2014 et approuvé par le Conseil d’État le 26 novembre 2014 (ci-après : RO), mais de son application : ils intervenaient uniquement sur les conduites privées qui reliaient deux conduites du réseau principal des SIG, ce qui n’était pas le cas en l’occurrence. En tant que propriétaires, il leur reviendrait dès lors de veiller au bon état de leur conduite privée d’eau potable et d’entretenir leurs installations, afin de prévenir toute fuite. Il leur appartenait de vérifier leurs couvertures d’assurances afin de s’assurer qu’ils étaient couverts en cas de fuite d’eau. En cas de raccordement de plusieurs propriétaires sur une conduite d’eau privée, ils leur recommandaient de mandater un représentant dans leur chemin pour la gestion de cette conduite, afin qu’ils puissent, si nécessaire, prendre des décisions rapides concernant la prise en charge et l’organisation des travaux.

Selon le plan joint des clients raccordés à la conduite en question, le branchement commun aux propriétaires « alimenta[it] plusieurs clients situés sur un domaine privé. Dans ce cas, il [était] nécessaire de définir une organisation entre les propriétaires et un représentant afin de simplifier l’exploitation de la conduite (maintenance, fuite, etc). Les branchements situés sur le domaine privé et alimentant chaque maison rest[aient] à la charge de chaque propriétaire ».

b. Lors de l’assemblée générale du 16 février 2023, durant laquelle étaient présents « Q______, Mme AB______, Mme AC______, Mme U______ et M. V______, M. Z______, Mme G______et M. F______, M. S______, M. O______, Mme et M. H______, Mme B______et M. C______ », à l’exception de « Mme AD______, Mme K______ », excusées, l’association a décidé, à l’unanimité, d’élever réclamation auprès des SIG contre la radiation de la servitude. « La famille AA______ étant concernée par la radiation de la servitude, il leur sera[it] demandé à AA______[] (propriétaire) d’apposer sa signature sur le recours adressé aux SIG ».

c. Par courrier du 27 avril 2023, l’association, par l’intermédiaire de son conseil, Me G______, a élevé réclamation auprès des SIG contre « la décision de radiation des servitudes concernant des conduites d’eau potable et d’électricité grevant les parcelles du chemin D______ », en demandant le constat de la nullité de la décision, que toute démarche nécessaire au rétablissement de la servitude soit entreprise sans délai et l’indemnisation de leurs frais.

Le courrier du 2 juin 2022 devait être qualifié de décision dès lors qu’il s’agissait d’une mesure unilatérale de la part des SIG, établissement public autonome, affectant les droits réels et les obligations des propriétaires individuellement et concrètement, fondée sur du droit public cantonal, soit le règlement. Les SIG n’avaient pas laissé le choix aux propriétaires, sans garantir leur droit d’être entendu.

Ladite décision était nulle, étant entachée de vices formels et matériels. Aucune base légale n’autorisait les SIG à exiger la radiation unilatérale d’une servitude. Ils n’avaient donc pas compétence de rendre cette décision. Celle-ci ne respectait pas non plus les exigences de forme, faute d’indiquer les voies de recours et de comporter une motivation. Les SIG invoquaient leur règlement, sans préciser la base légale leur permettant de radier unilatéralement une servitude, celle-ci n’existant pas. Compte tenu de la gravité des vices affectant la décision, celle-ci était nulle.

Elle représentait l’ensemble des propriétaires touchés dans leurs droits par la décision querellée, de sorte qu’elle disposait de la qualité pour recourir. La nullité invoquée impliquait l’absence de délai de recours.

Au fond, elle faisait valoir une violation arbitraire du principe de la légalité, la nullité de la décision entreprise et la violation des droits acquis et de la protection de la bonne foi. Vu les bases légales applicables, en particulier le règlement, les SIG n’avaient pas le droit de radier unilatéralement une servitude ni celui de se décharger des obligations d’entretien en découlant. Ils ne pouvaient pas modifier à leur guise l’étendue de leur service qu’ils avaient volontairement accepté en procédant à l’inscription d’une servitude auprès du RF. Le règlement n’était en tout état pas applicable en matière de servitude vu les art. 740 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) a contrario et 122 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101). Outre le déni de justice et la violation des droits de procédure qu’elle consacrait, la décision attaquée violait le droit fédéral. Les propriétaires du fonds servant bénéficiant d’une obligation réelle accessoire à la servitude en faveur des SIG devaient donner leur consentement à la radiation. Les propriétaires bénéficiaient également d’un droit acquis. La radiation unilatérale emportant comme conséquence un abandon de la part des SIG de l’entretien des canalisations en l’état alors que celui-ci leur incombait depuis 1976 constituait une atteinte à la garantie de la propriété, sans en remplir les conditions. Par ailleurs, les conduites d’eau faisaient partie du patrimoine administratif des SIG sous forme de patrimoine distinct leur étant directement et entièrement attribué. Avoir accès à l’eau potable constituait un usage ordinaire, conformément à l’art. 168 al. 1 Cst. Plusieurs années après l’adoption de leur règlement, les SIG daignaient en faire l’application. Il n’était pas exigible de la part des propriétaires qu’ils aient pu se rendre compte d’une éventuelle inexactitude, tandis qu’ils s’étaient fondés sur la servitude convenue avec les SIG. En radiant unilatéralement la servitude, les SIG en avaient décidé ainsi sans raison valable et de façon imprévisible dans le but de se soustraire à leurs obligations au préjudice des propriétaires. Si par impossible, les SIG pouvaient valablement radier unilatéralement la servitude, ils devraient en indemniser chacun des propriétaires.

Était jointe une procuration de l’association en faveur de Me G______, signée le 24 avril 2023 par B______.

d. Dans leur réponse du 27 juin 2023, les SIG ont invité l’association à adresser ses questions concernant la radiation de la servitude au RF.

Ils avaient entrepris d’harmoniser leurs pratiques sur l’ensemble des conduites d’eau potable du canton dans la mesure où seule une application conforme des règlements en vigueur permettait d’assurer un traitement équitable de l’ensemble de leurs clients. Ils procédaient ainsi à la radiation des servitudes initialement mises en place pour les conduites qui ne faisaient pas, ou plus, partie du réseau principal et/ou qui n’étaient pas ou plus nécessaires pour garantir la fiabilité du réseau (art. 26 al. 2 RO).

Les conduites sur le chemin D______ relevaient du domaine privé, raison pour laquelle des servitudes avaient été initialement accordées « pour [leur] permettre d’être propriétaire et d’effectuer l’entretien et les réparations usuelles ». Ces conduites situées sur domaine privé ne servant plus à la liaison du réseau principal, leur entretien ne relevait plus de leur responsabilité. « Le droit de propriété qui [leur] avait été conféré par le biais de la servitude n’avait plus de raison d’être », raison pour laquelle celle-ci avait été radiée.

La constitution et la radiation de servitudes par les SIG n’intervenaient pas dans le cadre de leur mission en tant qu’autorité. Aucun consentement du propriétaire grevé n’était nécessaire avant de procéder à la radiation, y compris dans les cas où le propriétaire grevé utilisait des installations que le titulaire de la servitude avait l’obligation d’entretenir. Leur courrier du 2 juin 2022 n’était pas fondé sur le droit public et n’avait pas pour objet la modification de droits ou d’obligations mais uniquement d’informer les propriétaires des démarches qu’ils avaient entreprises auprès du RF, conformément au CC.

e. Par courriers des 30 octobre 2023 et 18 janvier 2024, l’association a sollicité un entretien de la part des SIG afin de discuter de la situation des propriétaires.

f. Par pli du 18 juillet 2024, les SIG lui ont demandé de lui communiquer des dates pour en convenir.

L’association y a donné suite le 8 août 2024.

g. Par courrier du 27 août 2024, les SIG en ont accusé réception en indiquant qu’ils lui reviendraient à ce sujet « de nouveaux éléments [étant] en cours d’étude auprès de la Direction générale des SIG ». Ils prendraient contact avec elle ultérieurement, « une fois ces analyses terminées ».

C. a. Par acte déposé au greffe le 20 décembre 2024, l’association a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la « décision » du 2 juin 2022, en concluant, principalement, au constat de sa nullité - subsidiairement, à son annulation -, à ce qu’il soit ordonné au RF de procéder à la réinscription de la servitude au profit des SIG dès l’entrée en force du jugement, ainsi qu’à la condamnation de ceux-ci à lui verser le montant de CHF 5'965.80 à titre d’indemnisation des frais engagés à cause de leur intervention illégale.

La « décision » attaquée n’ordonnant pas son exécution nonobstant recours, le recours était assorti ex lege de l’effet suspensif.

Au surplus, reprenant le contenu de ses précédentes écritures, elle précisait que, dès lors qu’elle avait élevé réclamation le 27 avril 2023 contre la décision querellée, les voies de droits inférieures avaient été épuisées, de sorte que la chambre de céans était compétente.

Ses statuts exprimaient clairement sa volonté d’être organisée corporativement. Ne poursuivant pas d’intérêt économique, elle disposait de la personnalité juridique. Elle représentait l’entier des propriétaires du chemin D______, dont elle visait la défense. Elle avait également pour but statutaire la protection de ses membres, dont la majorité était atteinte par la décision, étant donné qu’ils étaient titulaires du rapport d’usage expressément désigné. En tant qu’ils étaient touchés directement dans leurs droits réels, les propriétaires avaient tous la qualité pour recourir. Lors de l’assemblée générale extraordinaire du 16 février 2023, ses membres avaient décidé, à l’unanimité, de recourir contre la décision querellée. Elle avait donc la qualité pour agir.

b. Dans leurs écritures responsives, les SIG ont conclu, principalement, à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement, au rejet de celui-ci. Ils demandaient également le rejet de la requête d’octroi de l’effet suspensif.

Leur courrier du 2 juin 2022 ne constituant pas une décision, la requête d’octroi de l’effet suspensif devait être rejetée.

Leur courrier du 2 juin 2022 ne faisait qu’informer la recourante de leurs intentions sur leur organisation concernant les conduites sous domaine privé et sous servitude au bénéfice des SIG, et des conséquences pratiques à venir, de telle sorte que ledit courrier ne créait, modifiait ou n’annulait pas des droits ou obligations de la recourante, ni ne constatait l’existence ou l’extension de tels droits, ce qui le classait parmi les communications et conseils sans valeur décisionnelle.

Le courrier du 2 juin 2022 ne constituant pas une décision, sa nullité ne pouvait être examinée. Si la chambre de céans devait néanmoins retenir le contraire, le délai de 30 jours pour contester ledit courrier était largement échu lorsque la recourante l’avait contesté le 27 juin 2023, sans faire état d’aucun cas de force majeure pour justifier ce retard et alors qu’elle était assistée d’une avocate depuis le 24 avril 2023. Cela étant, la recourante se limitait à évoquer un vice qu’elle jugeait particulièrement grave et manifeste, sans en fournir la démonstration ni en préciser la nature ou la gravité. La radiation de la servitude n’avait un impact direct que sur leurs propres droits et obligations étant donné qu’ils en étaient les véritables destinataires. La recourante n’était donc touchée qu’indirectement car elle n’était pas la destinataire de la radiation de la servitude.

En outre, la procuration fournie concernait l’association et non pas V______, destinataire du courrier du 2 juin 2022. Les SIG ignoraient si la recourante agissait dans l’intérêt de tous ses membres ou uniquement pour V______. Si l’intérêt de tous les membres était privilégié par la recourante, le procès-verbal de l’assemblée générale du 16 févier 2023 ne prouvait pas qu’ils avaient bien validé la procuration car certaines personnes étaient absentes et ledit procès-verbal ne prévoyait rien quant aux voix concernant ces personnes. Les pièces fournies par la recourante étaient donc insuffisantes pour démontrer le respect des conditions pour la qualité pour agir/recourir.

c. La recourante a répliqué en persistant dans ses conclusions et précédents développements.

Les SIG n’étaient intervenus que peu de fois pour assurer l’entretien des conduites d’eau desservant les propriétaires. Les canalisations étaient désormais complètement rouillées. Ils avaient ainsi fait défaut à leur obligation d’entretien des canalisations.

Son identité et la procuration attestant des pouvoirs de son conseil, signée par sa présidente, étaient claires. Cette dernière était d’ailleurs l’épouse d’un des propriétaires. V______ n’était qu’un des propriétaires, également touché par la décision querellée. Tous les propriétaires avaient reçu le courrier du 2 juin 2022, à l’exception des nouveaux et récents propriétaires. Les membres de l’association avaient accepté à l’unanimité de recourir contre la décision du 2 juin 2022.

Les SIG n’avaient pas donné suite à ses demandes d’entretien. En dépit de leur courrier du 27 août 2024, elle demeurait sans nouvelles de leur part. Elle souhaitait d’ailleurs qu’ils se déterminent sur les « nouveaux éléments » invoqués dans ledit courrier.

Était notamment joint un courriel de A______ du 19 janvier 2023, indiquant qu’un des propriétaires « voulant faire des travaux, avait ouvert la conduite d’eau du chemin qui s’avér[ait] totalement rouillée ». Elle avait annexé un document des SIG qui n’était pas produit.

d. Sur quoi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Le recours est interjeté contre le courrier des SIG du 2 juin 2022.

1.1 La chambre administrative examine d’office sa compétence, qui est déterminée par la loi et ne peut être créée par accord entre les parties (art. 11 al. 1 et 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) ; ATA/480/2024 du 16 avril 2024 consid. 2 et l'arrêt cité). La question de la recevabilité doit être tranchée en premier lieu, les griefs de la recourante ne pouvant être traités que si le recours est recevable (ATA/265/2021 du 2 mars 2021 consid. 2).

2.             Les parties divergent sur l’existence d’une décision susceptible de recours, soit sur le caractère de décision du courrier du 2 juin 2022.

2.1 La chambre administrative est l’autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). Le recours est ouvert contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 3, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e, et 57 LPA, sauf exceptions prévues par la loi (art. 132 al. 2 LOJ) ou lorsque le droit fédéral ou une loi cantonale prévoit une autre voie de recours (art. 132 al. 8 LOJ), ou encore lorsque la saisine est prévue dans des lois particulières (art. 132 al. 6 LOJ).

2.1.1 Les décisions finales sont susceptibles de recours (art. 57 let. a LPA).

Sont considérées comme des décisions au sens de l’art. 4 al. 1 LPA les mesures individuelles et concrètes prises par l’autorité dans les cas d’espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal ou communal et ayant pour objet de créer, de modifier ou d’annuler des droits et des obligations (let. a), de constater l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits, d’obligations ou de faits (let. b), de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou des obligations (let. c).

Pour qu’un acte administratif puisse être qualifié de décision, il doit revêtir un caractère obligatoire pour les administrés en créant ou constatant un rapport juridique concret de manière contraignante. Ce n’est pas la forme de l’acte qui est déterminante, mais son contenu et ses effets (ATA/327/2023 du 28 mars 2023 consid. 2.1 et les arrêts cités).

En droit genevois, la notion de décision est calquée sur le droit fédéral (ATA/649/2023 du 20 juin 2023 consid. 1.3 ; ATA/141/2020 du 11 février 2020 consid. 1b et les arrêts cités). Toute décision administrative au sens de l’art. 4 LPA doit avoir un fondement de droit public. Il ne peut en effet y avoir décision que s’il y a application, au travers de celle-ci, de normes de droit public (Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, p. 314 n. 857 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3e éd., 2011, p. 194 n. 2.1.1.1). De nature unilatérale, une décision se réfère à la loi dont elle reproduit le contenu normatif de la règle (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, p. 285 n. 798 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, op. cit., p. 174 n. 2.1.1.1). Une décision tend à modifier une situation juridique préexistante. Il ne suffit pas que l’acte visé ait des effets juridiques, encore faut-il que celui-ci vise des effets juridiques. Sa caractéristique en tant qu’acte juridique unilatéral tend à modifier la situation juridique de l’administré par la volonté de l’autorité, mais sur la base et conformément à la loi (ATA/29/2023 du 17 janvier 2023 consid. 3b et l’arrêt cité ; Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, op. cit., p. 320 n. 876).

Un acte matériel est défini comme un acte qui n'a pas pour objet de produire un effet juridique, même s'il peut en pratique en produire, notamment s'il met en jeu la responsabilité de l'État (ATA/649/2023 du 20 juin 2023 consid. 1.4 et les arrêts cités ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. 1, 3e éd. 2012, p. 12 s ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 52 ; Mémorial du Grand Conseil [ci-après : MGC] 2007-2008/XI 1 A p. 10926). Les mesures internes, qui organisent l'activité concrète de l'administration, sont assimilables aux actes matériels de celle‑ci. Il en résulte qu'elles ne peuvent être attaquées en tant que telles par des recours, qui ne sont en principe ouverts que contre des décisions, voire contre des normes (ATA/649/2023 20 juin 2023 consid. 1.3 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 666).

2.1.2 Ont notamment été considérées comme une décision au sens de l’art. 4 LPA :

-          dans certaines circonstances, une inscription au RF, en particulier la décision par laquelle le département fait porter au RF une mention visant à interdire la vente d’une parcelle à toute personne qui n’aurait pas la qualité d’agriculteur (ATA du 9 janvier 1985 consid. 3 et 4 in SJ 1985 401 ; cf. aussi ATA/374/2016 du 3 mai 2016 consid. 6) ;

-          l’admission par le RF d’une réquisition d’inscription, contrairement à la publication dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève d’une telle réquisition (ATA/947/2014 du 2 décembre 2014 consid. 15).

Nonobstant ce que pourrait laisser penser la jurisprudence genevoise à ce sujet, il n’est pas si rare de se retrouver face à une décision générale, laquelle peut faire l’objet d’un contrôle concret immédiatement. Contrairement à ce qui a pu être retenu (ATA/685/2010 du 5 octobre 2010 consid. 2), la décision générale n’est pas un acte normatif, ni une ordonnance administrative (ATA/589/2014 du 29 juillet 2014 consid. 3c). Plus récemment la qualification de décision générale a été retenue pour la décision des Transports publics genevois de mettre fin dès le 1er janvier 2015 aux avantages de ses retraités qui leur étaient jusqu’alors reconnus (ATA/910/2015 du 8 septembre 2015 consid. 3, s’écartant de l’ATA/817/2014 du 28 octobre 2014 consid. 19), reconnaissant ainsi, à juste titre, qu’en droit genevois aussi la décision générale est assimilée à la décision pour ce qui est du contentieux (Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, Berne 2017, n. 75 ad art. 4 LPA).

Un déni de justice ne pourra être examiné que lorsque toutes les démarches nécessaires préalables au prononcé de la décision auront été effectuées par l’administré (ATA/199/2010 du 23 mars 2010 consid. 4). Lorsque l’administration répond par un simple courrier, qui n’est pas qualifié de décision, il faut analyser le fond du courrier pour déterminer s’il s’agit d’un refus de rendre une décision ou déjà d’une décision négative (ATA/922/2014 du 25 novembre 2014 consid. 5), le flou cas échéant entretenu par l’autorité intimée ne devant pas être reporté sur l’administré, lequel doit néanmoins agir conformément au principe de la bonne foi (Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, op. cit, n. 83 ad art. 4 LPA).

2.2 Les établissements de droit public sont considérés comme des autorités administratives au sens de l’art. 5 let. e LPA.

2.2.1 Les SIG, établissement de droit public genevois fondé sur l'art. 168 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-Ge – A 2 00), ont notamment pour but de fournir dans le canton de Genève l'eau, le gaz, l'électricité, de l'énergie thermique, ainsi que de traiter des déchets (art. 1 al. 1 LSIG).

Les SIG fournissent l’eau potable aux conditions fixées par le RO et ses prescriptions d’exécution ainsi que sur la base des tarifs arrêtés par les autorités compétentes (art. 1 al. 1 RO). Les rapports juridiques entre les SIG et leurs usagers sont régis par le droit administratif et résultent d’un acte administratif (art. 1 al. 2 RO).

2.2.2 A la qualité d’usager, le titulaire du rapport d’usage expressément désigné comme tel par une décision arrêtée par les SIG (art. 2 al. 1 RO). À défaut, peut également être considéré comme usager celui qui utilise de fait l’eau fournie par les SIG (art. 2 al. 2 RO).

2.2.3 Les SIG définissent les caractéristiques générales de l’eau fournie aux usagers, les dispositions des droits fédéral et cantonal étant réservées (art. 3 RO).

Le propriétaire et l’usager sont responsables envers les SIG des dommages résultant de l’établissement, de l’existence ou du fonctionnement de leurs installations et appareils (art. 12 al. 1 RO). Il leur incombe de prendre toutes dispositions utiles pour garantir l’intégrité des conduites et autres installations placées chez eux, notamment celles appartenant aux SIG (art. 12 al. 3 RO).

2.2.4 Le réseau de distribution d’eau des SIG est constitué par l’ensemble des conduites, des organes hydrauliques ainsi que des ouvrages nécessaires à l’alimentation en eau des usagers. Il comprend aussi les branchements tels que définis à l’art. 16 RO (art. 14 al. 1 RO). Ce réseau est propriété des SIG, qui en assurent la construction, le développement, l’entretien, l’exploitation et la suppression éventuelle (art. 14 al. 2 RO).

Le propriétaire est tenu d’accorder ou de procurer aux SIG les servitudes nécessaires à l’extension de leur réseau de distribution ou à l’établissement de conduites desservant d’autres usagers (art. 21 al. 1 RO). Les droits susvisés peuvent être constitués en servitude personnelles et être inscrits au RF (art. 21 al. 2 RO).

Concernant en particulier l’accès aux installations, l’art. 9 RO prévoit que les agents des SIG doivent pouvoir accéder, avec leur matériel et leur véhicule d'intervention, à toutes les parties des réseaux et des installations situées sur le domaine public ou privé. Ces accès doivent pouvoir se faire en tout temps, quelle que soit l'heure, sans entrave d'aucune sorte. Les usagers se conformeront à cet égard aux instructions données par le service compétent (al. 1). Les SIG ont le droit de vérifier en tout temps l'état des canalisations et installations sur domaine privé (al. 2). Tous les travaux nécessaires au rétablissement d'un accès sur domaine privé, qui aurait été restreint ou supprimé par une modification de l'état des lieux, sont à la charge du propriétaire des canalisations et installations (al. 3).

Selon l’art. 26 RO, constituent des installations privées toutes les conduites et installations situées en aval du branchement (art. 16 RO). Lorsque le réseau est établi sous le domaine privé, l’installation privée est constituée de toutes les conduites et installations situées en aval du dispositif de prise, y compris le dispositif lui-même (al. 1). Les installations privées et leur entretien sont à la charge exclusive de leur propriétaire. Sont réservées les installations privées nécessaires à garantir la fiabilité du réseau de distribution des SIG, notamment celles qui constituent un maillage entre différentes conduites du réseau. Dans ce cas, elles sont établies et entretenues par les SIG (al. 2). En cas d’établissement, de déplacement, de correction ou d’élargissement de routes ou d’autres ouvrages du domaine public nécessitant un transfert de propriété du réseau de distribution ou de l’installation privée, l’usager ou le propriétaire est tenu d’adapter son installation à ses frais (al. 3).

2.3 En l’espèce, dans leur courrier du 2 juin 2022, les intimés ont informé les propriétaires de leur intention de déposer une demande de radiation de la servitude. Dite information était fondée sur le RO dont il était désormais fait application en matière de conduites sur le domaine privée. En d’autres termes, le courrier du 2 juin 2022 comporte deux aspects, à savoir, d’une part, la radiation de la servitude et, d’autre part, la mise en œuvre de l’art. 26 RO, étant précisé que c’est la seconde qui induit la première et non pas l’inverse. En effet, c’est en raison de la volonté des intimés d’appliquer l’art. 26 RO au chemin D______ que la servitude n’a dès lors, selon eux, plus de justification.

Il s’ensuit que, sur la base du RO, norme de droit public approuvée par le Conseil d’État et fondée sur du droit cantonal, les intimés, en leur qualité d’établissement public autonome, ont fait savoir aux propriétaires qu’ils n’entendaient plus assumer l’entretien des conduites privées qui ne faisaient pas partie du réseau principal d’eau potable. En partant de ce postulat, les intimés ont imposé, de manière unilatérale, aux propriétaires de prendre eux-mêmes en charge les coûts des conduites se trouvant sur la parcelle n° 4'290, sans les consulter et en application de l’art. 26 RO. La décision ainsi prise affecte les obligations des propriétaires par rapport à l’entretien des conduites, tandis que la radiation de la servitude retire aux intimés leurs droits sur la parcelle n° 4'290 sans porter sur ceux des propriétaires, étant relevé qu’en toute hypothèse, les intimés disposent, de par l’art. 9 al. 1 RO, d’un droit d’accès à toutes les parties des réseaux et des installations situées sur le domaine public ou privé.

Compte tenu des principes et de la jurisprudence susrappelée, il y a lieu de retenir que le courrier des intimés du 2 juin 2022 constitue une décision au sens de l’art. 4 LPA, dès lors que celui-ci manifeste la volonté unilatérale des SIG de mettre fin à leur prise en charge des conduites sur domaine privé, en application de l’art. 26 RO, sans avoir consulté préalablement les propriétaires concernés, ce qui a néanmoins pour effet de leur créer des obligations. La radiation de la servitude en tant que telle n’est que la conséquence de cette décision.

Le recours dont est objet a donc bel et bien été interjeté à l’encontre d’une décision.

3.             Est également litigieuse la question de la qualité pour recourir de la recourante.

3.1 Aux termes de l’art. 60 al. 1 let. a et b LPA, ont qualité pour recourir les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée, qui sont touchées par une loi constitutionnelle, une loi, un règlement du Conseil d’État ou une décision et qui ont un intérêt personnel digne de protection à ce que l’acte soit annulé ou modifié.

3.2 Le recourant doit être touché de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés, et l’intérêt invoqué, qui n’est pas nécessairement un intérêt juridiquement protégé, mais qui peut être un intérêt de fait, doit se trouver, avec l’objet de la contestation, dans un rapport étroit, spécial et digne d’être pris en considération (ATF 143 II 506 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2019 du 19 août 2020 consid. 1.2). En application de ces principes, le recours d’un particulier ou d'une association, formé dans l’intérêt général ou d’un tiers, est irrecevable (ATF 137 II 40 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_229/2025 du 14 mai 2025 consid. 3.2 ; ATA/1252/2024 du 29 octobre 2024 consid. 2.3). Ces exigences ont été posées de manière à empêcher l’action populaire proscrite en droit suisse (arrêt du Tribunal fédéral 1C_307/2024 du 15 janvier 2025 consid. 4.2). Il faut donc que le recourant ait un intérêt pratique à l’admission du recours, soit que cette admission soit propre à lui procurer un avantage de nature économique, matérielle ou idéale (ATF 124 II 499 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_278/2023 du 10 janvier 2024 consid. 7.3 ; ATA/810/2025 du 24 juillet 2025 consid. 2.3). Un intérêt purement théorique à la solution d'un problème est de même insuffisant (ATF 144 I 43 consid. 2.1).

3.3 Une association jouissant de la personnalité juridique est autorisée à former un recours en son nom propre lorsqu'elle est touchée dans ses intérêts dignes de protection (ATA/398/2025 du 8 avril 2025 consid. 2.3). Elle peut faire valoir les intérêts de ses membres lorsqu’il s’agit d’intérêts qu’elle doit statutairement protéger, qui sont communs à la majorité ou à un grand nombre de ses membres et que chacun a qualité pour s’en prévaloir à titre individuel. Ce recours est aussi nommé corporatif (ATF 145 V 128 consid. 2.2 ; 137 II 40 consid. 2.6.4 ; 131 I 198 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_52/2009 du 13 janvier 2010 consid 1.2.2 non publié in ATF 136 I 1). Ces conditions doivent être remplies cumulativement ; elles doivent exclure tout recours populaire. Celui qui ne fait pas valoir ses intérêts propres, mais uniquement l’intérêt général ou l’intérêt public, n’est pas autorisé à recourir. L’association ne peut prendre fait et cause pour l'un de ses membres ou pour une minorité d'entre eux (ATF 145 V 128 consid. 2.2 ; 142 II 80 consid. 1.4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_749/2021 du 16 mars 2022 consid. 1.2.1 ; ATA/1064/2022 du 18 octobre 2022 consid. 5b).

3.4 En l’occurrence, les intimés ont confirmé que le courrier du 2 juin 2022 avait été adressé à l’ensemble des propriétaires. La décision querellée a donc visé l’ensemble des propriétaires du chemin D______ alors inscrits au RF.

Il n’est pas contesté que les propriétaires actuels sont membres de la recourante, laquelle a notamment pour but de défendre leurs intérêts communs et de gérer la parcelle n° 4'290. À cela s’ajoute que, lors de son assemblée générale du 16 février 2023, les propriétaires présents en grand majorité ont accepté à l’unanimité d’« élever réclamation auprès des SIG contre la radiation de la servitude ». Certes, seul un extrait du procès-verbal de ladite assemblée a été versé au dossier. Toutefois, aucun élément ne permet d’en contredire la véracité, dès lors que tant la présidente que le conseil de l’association font elles-mêmes parties des propriétaires concernés. Dans la mesure où l’association fait valoir les intérêts de ses membres, propriétaires de la parcelle sur laquelle les intimés bénéficiaient d’une servitude pour les conduites d’eau, en conformité avec ses statuts et la décision prise lors de son assemblée générale, il faut conclure qu’elle dispose de la qualité pour recourir contre la décision du 2 juin 2022.

D’ailleurs, dans le cadre de celle-ci, les intimés recommandaient eux-mêmes aux propriétaires de déterminer un représentant afin de faciliter les échanges et l’entretien des conduites en question.

La qualité pour recourir de l’association doit dès lors être admise.

4.             Reste à examiner le délai dans lequel la recourante a interjeté recours contre la décision querellée du 2 juin 2022.

4.1 Les décisions doivent être désignées comme telles, motivées et signées, et indiquer les voies et délais de recours (art. 46 al. 1 LPA). Une notification irrégulière ne peut entraîner aucun préjudice pour les parties (art. 47 LPA).

4.2 D’après un principe général du droit, déduit de l’art. 9 Cst. protégeant la bonne foi du citoyen et concrétisé en droit genevois par l’art. 47 LPA, le défaut d’indication ou l’indication incomplète ou inexacte des voies de droit ne doit en principe entraîner aucun préjudice pour les parties (ATF 138 I 49 consid. 8.3.2 ; 117 Ia 297 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_471/2019 du 11 février 2020 consid. 3.1). Demeure toutefois réservée l’obligation, pour l’administré, d’agir de manière conforme aux règles de la bonne foi (ATF 138 I 49 consid. 8.3.2). Ainsi, lorsque l’indication des voies de droit fait défaut, il est attendu du justiciable qu’il fasse preuve de diligence en recherchant lui-même les informations nécessaires. Il s'ensuit que le plaideur dépourvu de connaissances juridiques peut se fier à une indication inexacte du délai de recours, s'il n'est pas assisté d'un avocat et qu'il ne jouit d'aucune expérience particulière résultant, par exemple, de procédures antérieures (ATF 135 III 374 consid. 1.2.2). En revanche, le plaideur expérimenté ou assisté d'un avocat ne peut pas se prévaloir de l'indication erronée lorsqu'il aurait dû se rendre compte de l'inexactitude en agissant avec l'attention commandée par les circonstances (ATF 141 III 270 consid. 3.3 ; 138 I 49 consid. 8.3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_471/2019 du 11 février 2020 consid. 3.1 ; 4A_475/2018 du 12 septembre 2019 consid. 5.1).

4.3 In casu, la recourante ne conteste pas que les intimés ont informé les propriétaires de leur intention de ne plus prendre en charge l’entretien des conduites privées ne faisant pas partie du réseau principal d’eau potable et, par conséquent, de procéder à la radiation de la servitude, par courrier du 2 juin 2022.

Ce n’est toutefois que lors de son assemblée générale du 16 février 2023, soit près de huit mois après la notification de la décision attaquée que les propriétaires ont décidé d’agir à son encontre. Certes, le courrier du 2 juin 2022 n’était pas identifié en tant que décision au sens de l’art. 4 LPA, ne contenant aucune des indications légales prescrites à cette fin, en particulier les voies de recours.

Cependant, si un délai pouvait être nécessaire à la recourante pour s’organiser et se déterminer à ce sujet, rien n’explique qu’elle ait attendu si longtemps afin de faire valoir ses droits auprès des intimés, d’autant plus qu’elle compte parmi ses membres une avocate qui la représente depuis, à tout le moins, le 27 avril 2023, date à laquelle la recourante, par son intermédiaire, a effectivement élevé réclamation auprès des intimés contre le courrier du 2 juin 2022.

Vu les circonstances qui précèdent, rien n’explique que la recourante ait autant tardé à agir, aucun élément extérieur ne le justifiant.

Partant, le recours doit être déclaré irrecevable.

5.             Le présent arrêt rend la requête de restitution de l’effet suspensif sans objet.

6.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 20 décembre 2024 par l’A______ contre la décision des Services industriels de Genève du 2 juin 2022 ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de l’A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me G______, avocate de la recourante, ainsi qu'aux Services industriels de Genève.

Siégeant : Patrick CHENAUX, président, Eleanor McGREGOR, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. RAMADOO

 

 

le président siégeant :

 

 

P. CHENAUX

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :