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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2908/2022

ATA/739/2024 du 18.06.2024 sur JTAPI/858/2023 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : CONSTRUCTION ET INSTALLATION;AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS;PERMIS DE CONSTRUIRE;AUTORISATION DÉROGATOIRE(EN GÉNÉRAL);5E ZONE;IMMEUBLE D'HABITATION;IMPLANTATION DE LA CONSTRUCTION;CIRCULATION ROUTIÈRE(TRAFIC ROUTIER);INTÉGRATION DANS LE PAYSAGE;PRINCIPE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE;PLAN DIRECTEUR;SURFACE;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;POUVOIR D'APPRÉCIATION;PRINCIPE DE LA BONNE FOI;PRATIQUE JUDICIAIRE ET ADMINISTRATIVE;CHANGEMENT DE PRATIQUE;APPLICATION RATIONE TEMPORIS
Normes : Cst.5.al3; Cst.8; Cst.9; Cst.29.al2; LAT.19.al1; LAT.22; LPA.18; LPA.20.al1; LPA.37.letc; LCI.1.al1; LCI.59.al4; LCI.59.al4bis; LCI.59.al7; LCI.59.al8; LCI.59.al9; LCI.156.al5; LaLAT.10.al1; LaLAT.10.al2; LaLAT.10.al8; RCI.13; RCI.3.al3
Résumé : Confirmation d'une autorisation de construire un habitat groupé HPE (44%) en zone villas. Confirmation de la jurisprudence de la chambre de céans selon laquelle quand bien même il n'est pas textuellement repris à l'art. 156 al. 5 LCI, le nouvel art. 59 al. 4bis LCI, entré en vigueur le 28 novembre 2020, est applicable seulement pour les demandes d'autorisation déposées après le 28 novembre 2020, qu'elles aient été déposées avant le gel décrété le 28 novembre 2019 ou pendant celui-ci (mais jusqu'au 28 novembre 2020, la fin du gel ayant été prononcée le 18 janvier 2021). La rampe de parking ne constitue pas une CDPI et sa partie située au dessous du surplomb du premier étage n'a pas non plus à être comptabilisée à titre de CDPI, ledit surplomb n'étant en l'occurrence soutenu ni par un poteau ni par un mur. Une rampe de parking ne peut pas être comptabilisée dans la surface brute de plancher d'un projet, à défaut de présenter un caractère habitable, que ce soit au sens large ou au sens strict. Rejet du recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2908/2022-LCI ATA/739/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 18 juin 2024

3ème section

 

dans la cause

A______ et B______

et

C______, D______ et E______

représentés par Me Anthony WALTER, avocat recourants

contre

F______

représenté par Me Mark MULLER, avocat

et

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

et

G______

représentée par Me Nicolas WISARD, avocat

et

H______ et I______
représentés par Me Raphaël CRISTIANO, avocat intimés

et

J______

représentée par Me Mark MULLER, avocat appelée en cause

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 août 2023 (JTAPI/858/2023)


EN FAIT

A. a. J______ (ci-après : J______), dont le siège se trouve à Genève, a notamment pour buts l'achat, la mise en valeur, la vente, la location et l'exploitation de tous immeubles ainsi que la promotion immobilière en Suisse et à l'étranger.

b. F______ était propriétaire de la parcelle n° 6'821 de la G______ (ci-après : la commune) jusqu'au 29 novembre 2023, date à laquelle J______ l'a acquise.

Cette parcelle, d'une surface de 5'507 m2, est sise en cinquième zone de construction, au 9, chemin K______. Elle se situait, selon l'ancien plan directeur communal (ci-après : PDCom) 2014 de la commune, adopté le 24 juin 2014, dans le périmètre « L______ ».

c. C______, d'une part, ainsi que D______ et E______, d'autre part, sont respectivement domiciliés aux 23 et 19 chemin K______. L'habitation de la première se situe à environ 100 m de la parcelle n° 6'821. Celle des seconds se trouve à environ 50 m de cette parcelle.

d. A______ et B______ sont domiciliés au 15, chemin K______, dans une maison sise sur une parcelle adjacente à la parcelle n° 6'821.

B. a. Le 17 novembre 2020, F______ a déposé auprès du département du territoire (ci-après : le département) une demande d’autorisation de construire définitive (ci-après : DD), sur la parcelle n° 6'821, deux habitats groupés à haute performance énergétique (ci‑après : HPE) de deux étages et d’un attique partiel comprenant douze logements, d’une surface brute de plancher (ci-après : SBP) de 2'423 m2, et un garage souterrain. Il était également prévu d’abattre des arbres.

Plusieurs plans et documents ont été joints à la demande.

b. La requête a été enregistrée sous la référence DD 1______ le 9 décembre 2020 et a fait l’objet d’une publication dans la feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 16 décembre 2020.

c. Au cours de l'instruction de la demande, le projet a fait l'objet de plusieurs préavis, recueillis du 24 novembre 2020 au 10 mars 2022, et de demandes de modifications.

d. Se sont prononcés favorablement, sous conditions, la direction de l’information du territoire le 27 novembre 2020, le service de géologie, sols et déchets le 5 janvier 2021, le service de l’air, du bruit et des rayonnements non ionisants le 13 janvier 2021, l’office cantonal de l’énergie les 22 décembre 2020 et 6 septembre 2021, l’office cantonal de l’eau le 28 septembre 2021 après avoir requis la production de pièces complémentaires le 15 décembre 2020, l’office cantonal de l’agriculture et de la nature (ci-après : OCAN) le 30 août 2021 après avoir requis la production de pièces complémentaires et la modification du projet le 15 décembre 2020, le service de la protection civile et des affaires militaires le 3 novembre 2021 ainsi que la police du feu les 4 janvier et 9 août 2021. L'OCAN a également émis un préavis liant pour les arbres hors forêt favorable sous conditions et avec souhaits le 6 octobre 2021.

e. Le 24 novembre 2020, la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) a émis un premier préavis favorable avec dérogation à l’art. 59 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) et requis la production de pièces complémentaires en lien avec la buanderie. Le taux d’occupation hors-sol de la construction était de 44% et celui du sous-sol, parking inclus, était de 22%, la surface du sous-sol, parking compris, étant de 1'200 m2.

Dans un second préavis du 30 juillet 2021, la DAC a, à nouveau, requis la production de pièces complémentaires en lien avec les couleurs utilisées sur les plans figurant dans le dossier. Les rapports de surface demeuraient inchangés et la rubrique « construction de peu d’importance respectée » était laissée vierge.

f. La commune a émis un premier préavis, défavorable, le 24 février 2021. D'une part, l'art. 156 al. 5 LCI n'était pas applicable à l'art. 59 al. 4bis LCI, si bien qu'un préavis favorable de sa part était obligatoire pour un projet dérogeant à l'IUS ordinaire, tel que celui déposé, et qu'en l'absence d'un tel préavis, l'autorisation de construire sollicitée ne pouvait pas être octroyée. D'autre part, la parcelle n° 6'821 ne figurait pas dans les noyaux de densification ou dans leur extension potentielle tels qu’illustrés sur le plan de synthèse de son projet de PDCom, ni dans le périmètre de densification accrue indiqué sur le nouveau plan y relatif, qui serait soumis prochainement aux instances cantonales. Ainsi, la parcelle visée ne se prêtait pas à la réalisation du projet, incompatible avec la vision souhaitée de la densification de la zone 5.

Dans un second préavis du 25 août 2021, la commune a confirmé sa position, reprenant sa précédente motivation.

g. Dans un premier préavis du 22 décembre 2020, la commission d’architecture (ci‑après : CA) a requis la modification du projet et laissé l’application de l’art. 59 al. 4 LCI en suspens. En effet, les salles de bain pouvaient être éclairées par la lumière naturelle ; la longueur du cheminement pour rejoindre l’habitat nord devait être raccourcie et la façade sud ne correspondait pas aux plans. Néanmoins, le projet s’implantait de manière à favoriser des orientations intéressantes grâce à un jeu de volumes, préservait une surface végétale en suffisance avec la possibilité de se promener sur la parcelle, limitant ainsi les voies carrossables par l’intégration judicieuse de la rampe au bâtiment.

Dans un second préavis du 17 août 2021, la CA s’est prononcée favorablement, sous conditions en lien avec les teintes et matériaux à utiliser, sur une dérogation selon l’art. 59 al. 4 LCI, le projet modifié répondant aux remarques formulées dans son précédent préavis.

h. L’office de l’urbanisme (ci-après : OU) a rendu un préavis favorable sans observations le 25 mars 2021. La parcelle concernée était sise dans un secteur identifié dans la fiche A04 du plan directeur cantonal (ci-après : PDCn) 2030, à teneur de laquelle le canton avait mandat de planification pour veiller à une application cohérente des critères permettant de déroger à la densité ordinaire. Le PDCom de la commune ne formulait pas de vision sur l’opportunité de la densification dans le secteur concerné. Une mise à jour était en cours mais pas encore en force. Le parti pris proposé par le projet (gabarit R + 2 + attique pour douze logements distribués en deux allées) permettait de libérer un espace important en pleine terre et maintenir un certain nombre d’arbres existants ainsi que des espaces aménagés pour les jeux d’enfants. L’accès aux stationnements en sous‑sol limitait l’imperméabilisation, et l’élargissement de la voie le long de la parcelle permettrait de gérer le transport individuel motorisé sur ce tronçon de la voie uniquement.

Il s’en remettait à la CA pour l’analyse qualitative à l’échelle du quartier et à l’office cantonal des transports (ci-après : OCT) pour la desserte.

Dans un second préavis favorable sans observations du 25 octobre 2021, l'OU a confirmé le contenu de son précédent préavis.

i. L’OCT a émis un premier préavis favorable sous conditions le 4 janvier 2021. Afin de pérenniser l’élargissement du chemin K______ le long de la parcelle concernée, il convenait de prévoir la constitution d’une servitude de passage pour les piétons et les véhicules sur une partie de la parcelle afin de permettre un accroissement du gabarit du chemin K______.

Dans un deuxième préavis du 18 août 2021, l'OCT s’est à nouveau positionné favorablement sous conditions, reprenant la condition en lien avec la constitution de la servitude de passage et demandant que la sortie des véhicules sur le chemin K______ depuis le parking souterrain et les trois places de stationnement visiteurs extérieures s’effectuent côté nord, en direction du chemin N______.

Enfin, le 10 mars 2022, l'OCT a rendu un préavis favorable liant. Sur ce préavis figurait un arrêté de règlementation de la circulation au chemin K______ 7-9, rendu par le département des infrastructures, selon lequel était mise en place, sur le chemin K______ 7-9, à la sortie du parking souterrain, une signalisation « stop » avec marquage correspondant et une « signalisation d’obliquer à droite », des signaux « stop » et « obliquer à droite » indiquant ces prescriptions.

j. F______ a présenté de nouvelles versions du projet les 1er juillet et 4 novembre 2021 ainsi que plusieurs documents, notamment un plan B03 « rapport de surface », faisant état de SBP de 820.1 m2 pour le rez-de-chaussée, 802.3 m2 pour le premier étage, 644.6 m2 pour le deuxième étage et 156 m2 pour l’attique, soit une SBP totale de 2'423 m2. La surface totale des constructions de peu d’importance (ci-après : CDPI), composées de huit loggias situées au rez-de-chaussée, était de 98.6 m2.

Il a également produit un plan 2______ « sous-sol » ainsi qu'un plan 3______ « rez‑de‑chaussée » représentant deux « pergolas ouvertes » de 13.5 m2 chacune aux entrées de l'immeuble. Pour le surplus, le contenu de ce dernier plan sera repris et discuté dans la parties en droit du présent arrêt.

k. C______, D______ et E______ ainsi que A______ et B______ ont informé le département qu'ils s'opposaient au projet.

l. Par décision du 12 juillet 2022, le département, se référant notamment aux préavis liants de l’OCAN du 6 octobre 2021 et de l’OCT du 10 mars 2022, a délivré l’autorisation DD 1______, qui a été publiée dans la FAO du même jour.

C. a. C______ ainsi que D______ et E______, A______ et B______, H______ et I______, de même que la commune, ont séparément interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI) contre la décision du 12 juillet 2022, ce qui a donné lieu à l'ouverture de quatre procédures.

À l'exception de la commune, les recourants ont sollicité la tenue d'un transport sur place. Ont notamment été invoqués la violation des art. 59 al. 4bis LCI et 156 al. 5 LCI ainsi que du principe de la bonne foi, le dépassement des rapports de surface autorisés, l'incompatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier et l'équipement insuffisant de la parcelle n° 6'821.

b. Le TAPI a ordonné la jonction des procédures sous le n° de cause A/2908/2022.

c. Le département a conclu au rejet des recours et a notamment indiqué que la surface du sous‑sol, parking compris, s'élevait à 1'200 m2. Le sous-sol était particulièrement compact. De plus, l'autorité pouvait admettre une surface de sous‑sol non comprise dans le calcul du rapport des surfaces, si la construction de garages au sous-sol permettait de renoncer à l’édification de CDPI à destination de garages en surface. Tel était le cas en l'espèce, les trois places visiteurs en surface n'étant pas couvertes et ne constituant pas des CDPI, mais des aménagements extérieurs.

d. F______ a également conclu au rejet des recours. Dans sa duplique, il a conclu subsidiairement – dans l’hypothèse où le TAPI retiendrait que les deux « pergolas ouvertes » des entrées devaient être prises en compte dans le calcul des CDPI – à ce qu’il lui soit donné acte de son engagement à supprimer ces deux constructions, conformément au nouveau plan produit (pièce n° 13), et à la réforme de la DD 1______, ces « pergolas » devant être supprimées.

e. Le département a considéré que le plan produit sous pièce n° 13 n’entraînait pas de modifications essentielles du projet, de sorte qu’il n’était pas nécessaire de le soumettre aux instances de préavis.

f. A______ et B______ ont relevé que la pièce n° 13 – non validée par le département – et les conclusions y relatives étaient irrecevables, si bien que la limite de 100 m2 de CDPI, qui incluait les deux « pergolas ouvertes », était dépassée.

g. Par jugement du 17 août 2023, le TAPI a partiellement admis les recours.

Le dossier contenait tous les éléments nécessaires à la résolution du litige, si bien qu'un transport sur place n'était pas utile.

La date pertinente pour déterminer le droit applicable à la demande d’autorisation de construire querellée était la date de réception de cette dernière par le département, soit le 17 novembre 2020. De jurisprudence constante, l’art. 59 al. 4bis LCI n’était applicable qu’aux demandes d’autorisation de construire déposées après son entrée en vigueur le 28 novembre 2020. Le dépôt d’une demande d’autorisation de construire durant le gel des dérogations n'était pas susceptible de modifier la situation. Par conséquent, la demande ayant été déposée avant le 28 novembre 2020, un préavis communal favorable n'était pas nécessaire. En outre, la commune ne pouvait s’attendre à ce que son accord soit nécessaire pour une demande déposée avant l’entrée en vigueur de l’art. 59 al. 4bis LCI dans sa nouvelle teneur.

La CA n'avait émis aucune réserve sur les qualités architecturales du projet. La DAC et l'OU s’étaient également prononcés favorablement sur une dérogation de densité, le second relevant les qualités du projet.

La SBP totale du projet était de 2'423 m2, soit légèrement inférieure à la SBP autorisée. Les huit loggias, d'une surface totale de 95 m2, devaient être prises en compte au titre de CDPI. En revanche, la rampe d’accès du garage souterrain, qui se trouvait partiellement dans l’emprise du bâtiment, n'était pas couverte et ne devait donc pas être prise en compte au titre de CDPI.

Les « pergolas ouvertes », constituées de deux murs pleins et dont l’implantation était prévue devant les entrées de l’immeuble, ne s’apparentaient pas à des pergolas. Elles ne constituaient donc pas des constructions de très peu d’importance et devaient être prises en compte en tant que CDPI, avec pour conséquence que la surface totale de celles-ci dépassait les 100 m2 autorisés. Toutefois, le requérant avait conclu subsidiairement à ce qu’il lui soit donné acte de ce qu’il s’engageait, si nécessaire, à supprimer ces deux constructions de 13.5 m2 chacune. La modification apportée aux plans, qui consistait en la suppression de ces deux ouvrages, était mineure et purement technique et n'entamait pas la substance du projet. Il était donc donné acte au requérant de son engagement à faire valider le plan produit sous pièce n° 13 auprès du département dans le cadre de l'établissement, à la fin des travaux, de l'attestation globale de conformité.

L'accès à la parcelle était suffisant, eu égard notamment à la condition posée par l'OCT consistant en la constitution d'une servitude de passage pour les piétons et les véhicules sur la partie de la parcelle n° 6'821 contiguë au chemin K______ afin de permettre un accroissement du gabarit de ce dernier.

D. a. Par acte remis au guichet du greffe le 15 septembre 2023, C______ ainsi que D______ et E______ ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation ainsi qu'à celle de la DD 1______.

Un préavis communal favorable était nécessaire mais faisait défaut en l'espèce. Le changement de pratique du département, consistant à mettre fin au gel des dérogations concernant la densité, était illégal. Enfin, la rampe d'accès au parking devait être prise en compte à titre de CDPI pour une surface de 56.16 m2, si bien que la surface autorisée des CDPI était dépassée.

b. Par acte remis au guichet du greffe le 15 septembre 2023 également, A______ et B______ ont interjeté recours auprès de la chambre administrative contre le jugement du TAPI, concluant à son annulation ainsi qu'à celle de la DD 1______. Ils ont conclu préalablement à la tenue d'un transport sur place.

Leur droit d'être entendus avait été violé, le TAPI ayant refusé d'ordonner un transport sur place. Les pièces du dossier ne suffisaient pas à l'examen de la cause.

La date déterminante pour le droit applicable était la date d'enregistrement de la demande, et non la date de son dépôt auprès du département. Elle avait été déposée pendant le gel des dérogations, si bien que le nouveau droit, en l'occurrence l'art. 59 al. 4bis LCI, était applicable. Un préavis communal favorable était donc nécessaire. Or, il faisait défaut.

Le projet contrevenait à l'harmonie, au caractère et à l'aménagement du quartier. Le département avait écarté sans raison le préavis défavorable de la commune.

Ce n'était qu'au stade de la réplique que le requérant avait modifié sa requête par le dépôt de nouveaux plans, ce qui n'était pas admissible. En outre, les « pergolas ouvertes » étaient des CDPI qui nécessitaient une autorisation de construire. Par conséquent, les instances de préavis auraient dû être consultées sur leur suppression, laquelle constituait une modification essentielle du projet.

c. La commune a indiqué s'en rapporter à justice sur la recevabilité des recours.

d. F______ et le département ont conclu au rejet des recours.

e. Dans leur réplique, C______ ainsi que D______ et E______ ont relevé que le législateur avait volontairement renoncé à mentionner l'art. 59 al. 4bis LCI à l'art. 156 al. 5 LCI. En outre, les conditions d'un changement de pratique n'étaient pas réunies et ne permettaient pas au département de revenir à la situation antérieure à la pratique du gel des densifications accrues. Enfin, la rampe d'accès couverte du parking, en raison de son caractère hors-sol prépondérant, devait être intégrée dans les CDPI ou à tout le moins dans les SBP.

f. Dans leur réplique, A______ et B______ ont relevé que la demande litigieuse avait été déposée durant le gel des dérogations. La jurisprudence de la chambre administrative n'était pas applicable puisque, pour les cas que celle-ci avait tranchés, les demandes avaient été déposées avant ce gel. Le prétendu accès du chemin K______ par le chemin M______ n'était pas réalisable puisque ce tronçon était encore plus étroit que le tronçon venant du chemin N______ et n'était pas goudronné.

g. Par courrier du 12 décembre 2023, F______ a informé la chambre administrative de la vente de la parcelle n° 6'821 à la société J______. Une copie de la réquisition du 29 novembre 2023 adressée au registre foncier était jointe. Il a conclu à ce que J______ prenne sa place dans le cadre de la procédure, par substitution de parties, dans la mesure où il lui avait transféré ses droits sur l'autorisation de construire.

h. La commune et le département s'en sont rapportés à justice sur la question de la substitution de parties.

i. C______ ainsi que D______ et E______, de même que A______ et B______, se sont opposés à la substitution de parties. Il était contraire au principe d'application temporelle du droit que, par le biais de la substitution de parties, les propriétaires puissent indéfiniment opposer leur autorisation à un changement de règlementation.

j. Dans une écriture spontanée, F______ a, à titre subsidiaire, sollicité l'appel en cause d'J______.

k. Par décision du 24 avril 2024, la chambre de céans a appelé J______ en cause.

l. Celle-ci s'est ralliée à la position de F______ et aux conclusions formulées par ce dernier.

m. Les recourants n'ayant pas formulé de requêtes ou d'observations complémentaires dans le délai imparti à cet effet, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

 

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 149 LCI).

Il sera précisé que le TAPI a admis à juste titre la qualité pour recourir des recourants, ceux-ci étant des voisins – immédiats pour certains et proches pour d'autres (50 à 100 m) – de la construction projetée et se prévalant notamment de l'augmentation du trafic sur le chemin où ils habitent, ce qui pourrait, le cas échéant, constituer une gêne pour eux (voir ATA/1346/2023 du 12 décembre 2023 consid. 4.2 ss et les arrêts cités pour un développement sur la qualité pour recourir des voisins).

2.             Dans un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner avant les griefs au fond, les recourants se plaignent de la violation de leur droit d'être entendus, le TAPI n'ayant pas donné suite à leur demande de transport sur place, qu'ils réitèrent devant la chambre de céans. Ils exposent que les pièces du dossier ne suffiraient pas à l'examen du caractère inadapté du chemin K______ pour desservir le bâtiment projeté. Elles ne permettraient en particulier pas d'appréhender l'étroitesse et les problèmes de croisement du chemin.

2.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour la personne intéressée d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Il n'empêche toutefois pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_359/2022 du 20 avril 2023 consid. 3.1 et les références citées).

2.2 En droit genevois, la procédure administrative est en principe écrite ; toutefois, si le règlement et la nature de l'affaire le requièrent, l'autorité peut procéder oralement (art. 18 LPA). Elle réunit les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuve des parties (art. 20 al. 1 LPA). S’il y a lieu, elle peut notamment, afin de constater un fait par elle-même, ordonner le transport sur place (art. 37 let. c LPA).

2.3 En l'espèce, le TAPI a estimé que le dossier contenait les éléments nécessaires et suffisants à l’examen des griefs et arguments des parties, de sorte que la tenue d'un transport sur place n'apparaissait pas utile.

Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique. En effet, les recourants se sont vu offrir la possibilité de faire valoir leurs arguments par écrit devant l'autorité intimée et le TAPI – et ensuite devant la chambre de céans –, et se sont exprimés de manière circonstanciée sur l'objet du litige. Les parties ont notamment produit de nombreux plans et photos qui permettent de trancher les questions litigieuses, en particulier celle concernant l'accès – suffisant ou non – à la parcelle. Le dossier est par ailleurs complété par les préavis des instances spécialisées consultées et les données disponibles sur le système d’information du territoire à Genève (ci-après : SITG), qui permettent également de visualiser les caractéristiques essentielles du quartier où la construction litigieuse est projetée, notamment les dimensions des chemins d'accès. Le TAPI n'a donc pas violé le droit d'être entendu des recourants en refusant de procéder à un transport sur place.

Le grief sera en conséquence écarté. De plus, dans la mesure où il ne se justifie pas d'ordonner un transport sur place, vu ce qui précède, il ne sera pas donné suite à la requête des recourants.

3.             Les recourants se plaignent de la violation des art. 59 al. 4bis LCI et 156 al. 5 LCI. Ils soutiennent également que la date d'enregistrement d'une demande d'autorisation de construire, et non celle de son dépôt, serait déterminante pour le droit applicable. Dès lors, dans la mesure où la requête en autorisation de construire litigieuse avait été enregistrée par le département le 9 décembre 2020, soit après l'entrée en vigueur de l'art. 59 al. 4bis LCI, ce dernier serait applicable au présent cas.

3.1 Sur tout le territoire du canton, nul ne peut, sans y avoir été autorisé, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail (art. 1 al. 1 LCI).

3.2 L'art. 59 LCI règle les rapports des surfaces en zone villas (5e zone).

Dans sa teneur en vigueur depuis le 26 janvier 2013 et jusqu'au 27 novembre 2020, l'art. 59 al. 4 LCI prévoyait que lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, le département peut autoriser, après consultation de la commune et de la CA, un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d'habitat groupé dont la surface de plancher habitable n'excède pas 40% de la surface du terrain, 44% lorsque la construction est conforme à un standard de HPE, 48% lorsque la construction est conforme à un standard de très haute performance énergétique (ci‑après : THPE), reconnue comme telle par le service compétent.

Depuis l'entrée en vigueur, le 28 novembre 2020, d'une modification législative du 1er octobre 2020, l'art. 59 al. 4 let. a LCI dispose que dans les périmètres de densification accrue définis par un PDCom approuvé par le Conseil d’État et lorsque cette mesure est compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, le département peut autoriser, après la consultation de la commune et de la CA, un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d’habitat groupé dont la surface de plancher habitable n’excède pas 44% de la surface du terrain, 48% lorsque la construction est conforme à un standard de THPE, reconnue comme telle par le service compétent.

Depuis cette même date, le nouvel art. 59 al. 4bis LCI prévoit que dans les communes qui n’ont pas défini de périmètres de densification accrue dans leur PDCom, lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, le département peut accorder des dérogations conformes aux pourcentages et aux conditions de l'art. 59 al. 4 let. a et b LCI. Pour toutes les demandes d’autorisation de construire déposées avant le 1er janvier 2023, un préavis communal favorable est nécessaire.

L'art. 156 al. 5 LCI précise que l'art. 59 al. 3bis, 4 et 5, dans « leur » teneur du 1er octobre 2020, s'appliquent aux demandes d'autorisation déposées après leur entrée en vigueur, soit le 28 novembre 2020.

3.3 Depuis un arrêt du 20 avril 2021, la chambre de céans retient que le nouvel art. 59 al. 4bis LCI, entré en vigueur le 28 novembre 2020, est applicable seulement pour les demandes d'autorisation déposées après le 28 novembre 2020, compte tenu de l’intention du législateur exprimée dans les travaux préparatoires, et ce quand bien même il n'est pas textuellement repris à l'art. 156 al. 5 LCI (ATA/1102/2022 du 1er novembre 2022 consid. 5e confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_642/2022 du 7 novembre 2023 ; ATA/752/2021 du 13 juillet 2021 consid. 8d ; ATA/628/2021 du 15 juin 2021 consid. 3d ; ATA/439/2021 du 20 avril 2021 consid. 5e).

Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a statué sur le recours interjeté contre l'ATA/1102/2022 précité. Selon cet arrêt, il ressort des travaux préparatoires relatifs à l'art. 59 LCI (PL 12'566) que le département a proposé une disposition légale, en l'occurrence l'art. 156 al. 4 LCI (qui deviendra l'art. 156 al. 5 précité), prévoyant que « les nouvelles dispositions s'appliquent aux demandes d'autorisation déposées après l'entrée en vigueur de la loi » : « il y aurait ainsi une succession immédiate de l'application des nouvelles dispositions sans délai » (pp. 16 et 36). Il est mentionné « les nouvelles dispositions » (et non pas uniquement les al. 3bis, 4 et 5 de l'art. 59 LCI), ce qui rend soutenable la non-application de l'art. 59 al. 4bis LCI pour un projet déposé avant le 28 novembre 2020 (arrêt du Tribunal fédéral 1C_642/2022 précité consid. 4.2.3).

3.4 Le 28 novembre 2019, le département a annoncé ne plus accorder, dès cette date, de dérogation pour les projets de densification en zone villas au sens de l'art. 59 al. 4 LCI dans l'attente de l'établissement de conditions-cadre pour plus de durabilité au développement de la 5e zone (communiqué de presse du département du 28 novembre 2019, zone villas : gel des dérogations concernant la densité, disponible à l'adresse https://www.ge.ch/document/zone-villas-gel-derogations-concernant-densite, page consultée le 31 mai 2024).

Dans un communiqué de presse du 19 janvier 2021, le département a annoncé la fin du gel des dérogations, avec effet immédiat (communiqué de presse du département du 19 janvier 2021, fin du gel en zone villa, disponible à l'adresse https://www.ge.ch/document/fin-du-gel-zone-villa-nouvelles-exigences-preserver-qualite-zone-villa, page consultée le 31 mai 2024).

3.5 À teneur de l'art. 13 du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01), les demandes ne sont valablement déposées et, partant, l’autorité saisie, que si les prescriptions concernant les documents et pièces à joindre ont été respectées et si l’émolument d’enregistrement a été acquitté. Les dossiers incomplets sont retournés pour complément. Ils ne sont pas enregistrés (al. 1). Lorsqu’une demande est recevable au sens de l’al. 1, le département adresse au requérant un accusé de réception précisant le numéro d’enregistrement de la demande et rappelant le délai d’examen (al. 2). Les délais d’examen ne courent que du jour de l’enregistrement (al. 3).

La chambre administrative a déjà eu l'occasion de préciser que la date d'enregistrement d'une autorisation de construire déterminait le jour à partir duquel l'instruction de la demande débutait ainsi que les délais à respecter, en particulier par le département (ATA/685/2022 du 28 juin 2022 consid. 5b confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_469/2022 du 27 juillet 2023).

3.6 La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (interprétation systématique). Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme ; il ne se fonde sur la compréhension littérale du texte que s'il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (ATF 144 V 313 consid. 6.1 ; 137 IV 180 consid. 3.4). La chambre de céans suit la même approche (ATA/1279/2023 du 28 novembre 2023 consid. 4.8 et l'arrêt cité).

3.7 Conformément aux principes généraux du droit intertemporel, lorsqu'un changement de droit intervient au cours d'une procédure administrative contentieuse ou non contentieuse, la question de savoir si le cas doit être tranché sous l'angle du nouveau ou de l'ancien droit se pose. En l'absence de dispositions transitoires, s'il s'agit de tirer les conséquences juridiques d'un événement passé constituant le fondement de la naissance d'un droit ou d'une obligation, le droit applicable est celui en vigueur au moment dudit événement (ATA/1277/2023 du 28 novembre 2023 consid. 2.1.1 et l'arrêt cité ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, n. 403 ss). Pour les autorisations faisant suite à une requête, le droit applicable est en principe celui qui est en vigueur au moment où la décision est prise (ATF 139 II 243 consid. 11 ; 139 II 263 consid. 6 ; ATA/1200/2023 du 7 novembre 2023 consid. 4.1 et l'arrêt cité).

La légalité d'un acte administratif, y compris une autorisation de construire, doit en principe être examinée en fonction de l'état de droit prévalant au moment de son prononcé, sous réserve de l'existence de dispositions transitoires ; en conséquence, l'autorité de recours applique en principe le droit en vigueur au jour où l'autorité administrative a statué (ATF 144 II 326 consid. 2.1.1).

3.8 Un changement de jurisprudence ne se justifie en principe que lorsque la nouvelle solution procède d'une meilleure compréhension de la ratio legis de la norme à appliquer, repose sur des circonstances de fait modifiées ou répond à l'évolution des conceptions juridiques ; sinon, la pratique en cours doit être maintenue. Un revirement de jurisprudence doit par conséquent reposer sur des motifs sérieux et objectifs qui, dans l'intérêt de la sécurité du droit, doivent être d'autant plus importants que la pratique considérée comme erronée, ou désormais inadaptée aux circonstances, est ancienne (ATF 145 III 303 consid. 4.1.2 ; 145 I 227 consid. 4).

4.             En l'espèce, l'intimé a déposé une demande d'autorisation de construire deux habitats groupés présentant un indice d'utilisation du sol (ci-après : IUS) total de 44%. Il a sollicité une dérogation aux rapports de surface ordinaires (art. 59 al. 1 LCI) au sens de l'art. 59 al. 4 LCI.

Vu la chronologie des faits, soit en particulier le fait que la demande a été déposée avant l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions issues du PL 12'566 et que l'autorisation a été octroyée après leur entrée en vigueur, il convient de déterminer le droit applicable, les parties ayant des opinions divergentes sur la question. Sont susceptibles de trouver application l'art. 59 al. 4 LCI dans sa teneur jusqu'au 27 novembre 2020 et l'art. 59 al. 4bis LCI dans sa teneur dès le 28 novembre 2020, l'application de l'un excluant celle de l'autre.

Les griefs soulevés par les parties commandent de procéder à un raisonnement en deux étapes.

4.1 La première d'entre elles consiste à déterminer la date à laquelle est réputée avoir été déposée la demande d'autorisation litigieuse au sens de la LCI.

Comme l'a retenu la chambre de céans dans l'ATA/685/2022 précité, la date d'enregistrement au sens de l'art. 13 RCI détermine le jour à partir duquel l'instruction de la demande débute ainsi que les délais à respecter, en particulier par le département. Contrairement à ce que prétendent les recourants, il ne ressort pas de cet arrêt, ni même de la loi, que la date du dépôt d'une demande d'autorisation de construire devrait se confondre avec la date de l'enregistrement au sens de l'art. 13 RCI. Il n'y a dès lors pas lieu de considérer que la date de dépôt déterminante d'une demande au sens des art. 59 al. 4bis et 156 al. 5 LCI serait celle de la date d'enregistrement de la requête. Seule est pertinente, au regard de ces dispositions, la date à laquelle la demande est réceptionnée par le département. Cette solution s'impose d'autant plus que la durée d'enregistrement des demandes ne dépend que du département et que, dans les circonstances particulières du cas d'espèce en tout cas, la question de savoir à quel régime juridique la demande doit être soumise ne peut pas, pour des questions de sécurité juridique et d'égalité de traitement entre les requérants notamment, dépendre de cette seule démarche.

Il sera donc retenu que la date pertinente pour déterminer le droit applicable à l'autorisation querellée est celle du dépôt de la demande par le requérant auprès du département (compris comme la date de réception par le département), soit le 17 novembre 2020, et non celle de son enregistrement le 9 décembre 2020.

4.2 La seconde étape consiste à déterminer si l'art. 59 al. 4bis LCI, dans sa teneur depuis le 28 novembre 2020, est applicable aux demandes déposées avant son entrée en vigueur et encore en cours d'examen après son entrée en vigueur, ce que les recourants soutiennent.

La chambre administrative a déjà tranché cette question en y répondant par la négative et a confirmé sa position à plusieurs reprises. De plus, le Tribunal fédéral a considéré que celle-ci n'était pas arbitraire (arrêt du Tribunal fédéral 1C_642/2022 précité consid. 4.2.3). Les recourants demandent néanmoins à la chambre de céans, implicitement à tout le moins, de procéder à un revirement de cette jurisprudence. Dans la mesure où la chambre de céans n'est pas limitée à l'examen de l'arbitraire (art. 61 al. 1 let. a LPA) et eu égard au respect du droit d'être entendu des recourants, il convient d'examiner les griefs soulevés par ces derniers à l'encontre de ladite jurisprudence.

4.2.1 Dans une argumentation détaillée, les recourants reprochent à la jurisprudence de s'écarter du texte clair de l'art. 156 al. 5 LCI. Il ressortait des travaux préparatoires relatifs à l'art. 59 LCI que son al. 4bis n'avait volontairement pas été listé à l'art. 156 al. 5 LCI, si bien qu'il s'appliquait dès son entrée en vigueur et indépendamment de la date de dépôt de la requête en autorisation de construire. En outre, le fait que l'art. 156 al. 5 LCI s'applique au nouvel art. 59 al. 4 LCI mais pas à l'art. 59 al. 4bis LCI procédait d'une certaine logique. En effet, lors de l'entrée en vigueur de modifications de la LCI, les communes venaient de commencer leur long processus de révision de leur PDCom, de sorte que le nouvel art. 59 al. 4 LCI n'était pas effectif avant une période conséquente. En revanche, l'art. 59 al. 4bis LCI pouvait s'appliquer immédiatement, puisqu'il était applicable aux communes n'ayant pas défini de périmètres de densification accrue, ce qui était le cas de l'ensemble d'entre elles. En outre, l'application du droit de veto communal sur les projets densifiés immédiatement après la levée du gel des dérogations le 19 janvier 2021 était cohérente. En effet, les communes disposaient d'un délai au 1er janvier 2023 pour définir dans leur PDCom les zones de densification accrue. Dans l'intervalle, et afin de protéger le statu quo, l'art. 59 al. 4bis LCI, qui était une sorte de disposition transitoire permettant de laisser aux communes le temps de poursuivre la mise à jour de leur PDCom pendant le moratoire, conférait un droit de veto aux communes sur les projets à densification accrue, ce qui leur permettait de refuser les projets qui allaient à l'encontre de leur PDCom, en cours de révision. Ce droit de veto ne pouvait être efficace que s'il était valable à l'égard des projets déposés avant le 28 novembre 2020. Enfin, la situation de l'espèce était différente des affaires déjà tranchées par la chambre administrative, où la demande d'autorisation de construire avait été déposée avant le gel des dérogations. Celui-ci impliquait que toute demande déposée après le 28 novembre 2019 et sollicitant une dérogation de densification ne serait plus instruite. En revanche, les demandes déposées antérieurement à cette date l'étaient encore.

4.2.2 Vu la proposition du département que toutes les nouvelles dispositions issues du PL 12'566 s'appliquent aux demandes d'autorisation de construire déposées après leur entrée en vigueur (PL 12'566-A, p. 16) mais dans la mesure où l'art. 59 al. 4bis LCI, qui fait partie de ces dispositions, n'est pas repris à l'art. 156 al. 5 LCI, celui‑ci ne peut être considéré comme pouvant être interprété de manière univoque, en ce sens qu'il ne s'appliquerait pas à l'art. 59 al. 4bis LCI. Ainsi, la chambre de céans a, à juste titre, recherché la véritable portée de cette norme en la dégageant en particulier des travaux préparatoires relatifs au PL 12'566.

Il ressort de ces derniers que l'objectif initial du PL 12'566 était de rendre aux communes la compétence de décider souverainement, au cas par cas, lors de l’autorisation de construire, si la construction d’habitats groupés en zone villas était opportune (PL 12'566-A, p. 3). Il leur fallait un certain temps pour inscrire dans leur PDCom les lignes directrices qu’elles souhaitaient pour la zone villas. Aussi, il était initialement prévu qu’elles aient jusqu’au 1er juillet 2022 pour faire les adaptations nécessaires (PL 12'566-A p. 14).

Au vu de ce qui précède, il faut concéder aux recourants qu'il n'apparaît pas d'emblée dénué de pertinence que l'art. 156 al. 5 LCI puisse s'appliquer au nouvel art. 59 al. 4 LCI mais pas à l'art. 59 al. 4bis LCI. Comme le soulèvent ces derniers, lors de l'entrée en vigueur des modifications de l'art. 59 LCI, les communes venaient de commencer leur processus de révision de leur PDCom, de sorte que le nouvel art. 59 al. 4 LCI ne pouvait pas immédiatement trouver de cas d'application. En revanche, l'art. 59 al. 4bis LCI pouvait s'appliquer immédiatement, puisqu'il était applicable aux communes n'ayant pas défini de périmètres de densification accrue, ce qui était le cas de la majorité à tout le moins d'entre elles au moment de l'entrée en vigueur des modifications de l'art. 59 LCI. En ce sens, l'art. 59 al. 4bis in fine LCI pourrait constituer une disposition transitoire s'insérant dans le prolongement du gel des dérogations et permettant d'impliquer immédiatement les communes dans la stratégie de densification de leur zone villas en leur octroyant, pendant la mise à jour de leur PDCom, un droit de veto sur les projets en cours d'examen, quelle que soit la date de leur dépôt, et qui iraient a priori à l'encontre de leur PDCom en cours de révision.

Ce raisonnement ne trouve toutefois pas d'assise suffisante dans les travaux préparatoires. En particulier, il ne ressort pas de ces derniers qu'un ou plusieurs membres du Grand Conseil auraient affiché une volonté que l'art. 59 al. 4bis LCI s'applique immédiatement dès son entrée en vigueur, quelle que soit la date du dépôt de la demande d'autorisation de construire. En particulier, l'intervention du député Cyril AELLEN, lors du troisième débat (PL 12'566-A, p. 25), laquelle a conduit à l'ajout, dans le texte de l'art. 156 al. 5 LCI, de l'art. 59 al. 3bis LCI, ne permet pas de retenir, même dans un raisonnement a contrario, que l'art. 59 al. 4bis LCI n'aurait volontairement pas été mentionné à l'art. 156 al. 5 LCI, puisque cette intervention ne portait que sur l'art. 59 al. 3bis LCI, celui n'ayant pas été repris, dans un premier temps et en raison d'un oubli, à l'art. 156 al. 5 LCI.

La volonté du département que toutes les nouvelles dispositions issues du PL 12'566 s'appliquent aux demandes d'autorisation de construire déposées après leur entrée en vigueur (PL 12'566-A, p. 16) n'a pas fait l'objet de remarques ni d'oppositions de la part des membres du Grand Conseil. Ce souhait a d'ailleurs été reporté dans un tableau figurant dans l'annexe 2 au PL 12'566-A. Sous la rubrique « commentaires » de ce tableau, il est indiqué que les modifications apportées s'appliqueront aux demandes d'autorisation de construire déposées après l'entrée en vigueur de la loi (PL 12'566-A, p. 36). L'art. 59 al. 4bis LCI, dans sa teneur dès le 28 novembre 2020, faisant intégralement partie de ces modifications, il apparaît conforme à la volonté du législateur que cette disposition s'applique aux demandes d'autorisation de construire déposées après son entrée en vigueur, quand bien même cette volonté est issue d'une proposition du département. L'absence de mention de l'art. 59 al. 4bis LCI à l'art. 156 al. 5 LCI ne procède ainsi que d'une inadvertance.

En outre, l'objectif d'impliquer sans délai les communes dans le processus d'octroi des autorisations dérogatoires au sens de l'art. 59 al. 4 LCI a été atteint à travers l'adoption de l'art. 59 al. 4 et 4bis LCI, puisque dès l'entrée en vigueur des modifications de la LCI, les communes n'ayant pas (encore) défini de périmètres de densifications accrue dans leur PDCom ont disposé, jusqu'au 31 décembre 2022, d'un droit de veto pour les demandes déposées après l'entrée en vigueur desdites modifications (art. 59 al. 4bis LCI). Pour celles ayant défini de tels périmètres, les autorisations dérogatoires n'étaient et ne sont plus permises hors de ces derniers (art. 59 al. 4 LCI).

Enfin, il est sans importance que la situation de l'espèce soit différente des affaires déjà tranchées par la chambre administrative, où les demandes d'autorisation de construire ont été déposées avant le gel des dérogations. En effet, les recourants partent de la prémisse erronée que le moratoire impliquait que seules les demandes déposées après son prononcé et sollicitant une dérogation de densification n'étaient plus instruites. Outre le fait qu'une telle pratique n'aurait reposé sur aucune base légale et n'aurait ainsi pas pu être prise en considération, la demande litigieuse, déposée pendant le moratoire le 17 novembre 2020, a été instruite avant la fin de ce dernier le 19 janvier 2021, neuf préavis ayant été émis entre ces deux dates. De plus, le moratoire a entraîné la suspension de l'octroi des dérogations non seulement pour toutes les demandes déposées avant ledit moratoire et qui étaient en cours d'instruction au moment de son prononcé, mais également pour les demandes déposées pendant sa durée, à tout le moins pour celle litigieuse. Il n'y a donc pas lieu de traiter différemment ces deux situations.

Au vu de ce qui précède, l'interprétation donnée de l'art. 156 al. 5 LCI par les recourants ne l'emporte pas sur celle donnée par la chambre de céans. Aucune nouvelle solution ne permet ainsi une meilleure compréhension de cette disposition, si bien qu'un revirement de jurisprudence ne se justifie pas. La chambre de céans confirmera donc que quand bien même il n'est pas textuellement repris à l'art. 156 al. 5 LCI, le nouvel art. 59 al. 4bis LCI, entré en vigueur le 28 novembre 2020, est applicable seulement pour les demandes d'autorisation déposées après le 28 novembre 2020, qu'elles aient été déposées avant le gel décrété le 28 novembre 2019 ou pendant celui-ci (mais jusqu'au 28 novembre 2020, la fin du gel ayant été prononcée le 18 janvier 2021).

L'art. 156 al. 5 LCI, en tant que disposition transitoire, fait échec à l'application de l'art. 59 al. 4bis LCI aux demandes d'autorisation de construire déposées, comme en l'espèce, avant le 27 novembre 2020, y compris dans le cadre d'une procédure de recours. C'est en conséquence l'art. 59 al. 4 LCI, dans sa teneur jusqu'au 27 novembre 2020, qui est applicable à la demande litigieuse. Il s'ensuit qu'un préavis favorable de la commune n'était pas nécessaire pour la délivrance de l'autorisation. La décision querellée ne consacre dès lors aucune violation des art. 59 al. 4bis et 156 al. 5 LCI.

Le grief sera donc écarté.

5.             Les recourants allèguent une violation du principe de la bonne foi. Le TAPI avait dénué la pratique administrative du moratoire de la densification accrue de toute portée juridique. Aucune dérogation au sens de l'art. 59 al. 4 LCI n'était accordée avant l'adoption de la stratégie de densification communale. Les justiciables ne pouvaient que comprendre qu'une autorisation en densification accrue serait accordée uniquement dans les zones à densification accrue définies par les communes dans leur PDCom. Le département avait instruit et délivré une autorisation pendant le moratoire, en contradiction totale avec sa pratique largement publiée.

5.1 Valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., exige que l'administration s'abstienne de toute attitude propre à tromper l'administré. Elle ne peut tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; 129 I 161 consid. 4).

5.2 La notion de pratique administrative désigne la répétition constante et régulière de l'application d'une norme par les autorités administratives. De cette répétition peuvent apparaître, comme en ce qui concerne la jurisprudence, des règles sur la manière d'interpréter la loi ou de faire usage d'une liberté d'appréciation. Cette pratique ne peut être source de droit et ne lie donc pas le juge, mais peut néanmoins avoir indirectement un effet juridique par le biais du principe de l'égalité de traitement (ATA/1199/2023 du 7 novembre 2023 consid. 2.5 et les arrêts cités).

Constitue un excès négatif du pouvoir d'appréciation le fait que l'autorité se considère comme liée, alors que la loi l’autorise à statuer selon son appréciation, qu'elle renonce d'emblée en tout ou partie à exercer son pouvoir d'appréciation (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_144/2021 du 30 août 2022 consid. 2.1), ou qu’elle applique des solutions trop schématiques, ne tenant pas compte des particularités du cas d’espèce (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; ATA/1276/2023 du 28 novembre 2023 consid. 4.6 et les arrêts citées).

5.3 Pour être compatible avec les art. 8 et 9 Cst., un changement de pratique administrative doit reposer sur des motifs sérieux et objectifs, c'est-à-dire rétablir une pratique conforme au droit ou remédier à celle qui aurait conduit à des abus répétés (ATF 126 V 36 consid. 5a et les arrêts cités), mieux tenir compte des divers intérêts en présence ou d'une connaissance plus approfondie des intentions du législateur, d'un changement de circonstances extérieures, de l'évolution des conceptions juridiques ou des mœurs. Les motifs doivent être d'autant plus sérieux que la pratique suivie jusqu'ici est ancienne. À défaut, elle doit être maintenue (ATF 142 V 112 consid. 4.4 ; 135 I 79 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_44/2021 du 8 août 2021 consid. 6.1). Lorsque ces motifs sont donnés et pour autant que la nouvelle pratique s’applique de façon générale à tous les cas non encore traités au moment de son adoption, un changement de pratique ne contrevient ni à la sécurité du droit, ni à l’égalité de traitement et ce, bien qu’il en résulte inévitablement une différence de traitement entre les cas anciens et les cas nouveaux (ATF 125 II 152 consid. 4c/aa = RDAF 2000 I p. 575, 577 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_283/2010 du 17 décembre 2010 consid. 4.2).

5.4 Les autorités disposent d'un pouvoir d'appréciation important pour déterminer le moment de l'application d'une nouvelle pratique ou pour instaurer un régime transitoire. Elles devraient en faire usage de manière à atténuer les effets du changement de pratique lorsque cela est possible. Lorsque la nouvelle pratique est moins favorable que l'ancienne pour l'administré, lorsque le changement n'était pas prévisible et qu'il n'y a pas d'intérêt public prépondérant à une application immédiate de la nouvelle pratique, l'autorité est obligée d'assortir le changement de mesures permettant d'adoucir, pour les administrés, les effets négatifs du changement qui ne seraient pas absolument nécessaires (ATA/1199/2023 du 7 novembre 2023 consid. 2.5 et les références citées).

5.5 En l'espèce, les dérogations pour les projets de densification en zone villas au sens de l'art. 59 al. 4 LCI ont été bloquées par le département du 28 novembre 2019 au 19 janvier 2021, selon communiqués de presse des mêmes jours.

Le grief des recourants repose sur le fait que la demande a été instruite pendant le moratoire et sur la prémisse que l'autorisation de construire litigieuse aurait été délivrée également pendant cette période. Or, d'une part, le prononcé du moratoire ne visait pas l'instruction des requêtes sollicitant une dérogation, mais uniquement la délivrance des autorisations. D'autre part, l'autorisation litigieuse a été délivrée le 12 juillet 2022, soit plus d'un an après la fin de ce dernier, contrairement à ce que prétendent les recourants. On comprend dès lors mal en quoi l'intimé aurait violé le principe de la bonne foi en délivrant l'autorisation litigieuse.

Par surabondance, il sera relevé ce qui suit. L'art. 59 al. 4 LCI, qui n'a pas été abrogé à la suite du prononcé du moratoire, permettait au département, sous réserve de la réalisation de certaines conditions, d'accorder des dérogations pour les projets de densification en zone villas. Partant, le département disposait à ce titre d'un pouvoir d'appréciation. En instaurant le moratoire, il a renoncé d'emblée à en faire usage, ce qui constitue un excès négatif de son pouvoir d'appréciation, quand bien même le moratoire a été décrété dans l'urgence et répondait à certaines préoccupations (voir PL 12'566-A, pp. 4 et 13 notamment).

En prononçant la fin du moratoire, le département s'est donné la possibilité de faire usage à nouveau de son pouvoir d'appréciation. Ce changement repose donc sur un motif sérieux et objectif et ne contrevient ni au principe de la bonne foi, ni à la sécurité du droit, ni à l’égalité de traitement. Vu l'adoption des nouvelles dispositions légales entrées en vigueur avant la fin du moratoire, une suppression avec effet immédiat de ce dernier se justifiait.

Les arguments des recourants ne sont pas de nature à remettre en cause ce qui précède. En effet, comme l'a retenu à juste titre le TAPI, les justiciables n’étaient pas en mesure de savoir, à la lecture du communiqué de presse du 18 novembre 2019, quel serait le traitement réservé aux demandes d’autorisation de construire déposées durant le moratoire, ledit communiqué se contenant de préciser que celui‑là serait levé lorsque la stratégie de densification des périmètres de densification accrue serait achevée (communiqué de presse du département du 28 novembre 2019, zone villas : gel des dérogations concernant la densité, disponible à l'adresse https://www.ge.ch/document/zone-villas-gel-derogations-concernant-densite, page consultée le xx mai 2024). En particulier, ils n'ont pas reçu l'assurance, ni même l'information, que les autorisations dérogatoires ne seraient accordées que dans ces périmètres, définis par les communes dans leur PDCom. Aucune mauvaise foi ne peut dès lors être reprochée au département.

Le grief sera dès lors écarté.

6.             Les recourants estiment que le projet litigieux serait incompatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier. La parcelle concernée n'était pas située dans un périmètre de densification accrue prévu par le PDCom mis en consultation publique le 15 novembre 2021. Le département n'avait pas tenu compte du préavis de la commune, qui était défavorable, et s'était limité à se baser celui de la CA. Celle-ci n'avait pas analysé la conformité du projet, en particulier ses gigantesques dimensions, au caractère du quartier, soit un quartier résidentiel composé exclusivement de maisons de maître individuelles entourées de grands espaces verts.

6.1 L’art. 59 al. 4 let. a LCI, dans sa teneur jusqu'au 27 novembre 2020 rappelée ci‑avant (consid. 3.2), applicable au présent litige, est entré en vigueur le 26 janvier 2013. Il est issu d’une modification législative qui visait à promouvoir une utilisation plus intensive du sol en zone villas pour répondre à la crise du logement sévissant à Genève (exposé des motifs du projet de loi 10'891 modifiant la LCI du 15 novembre 2011 [ci-après : PL 10'891], Mémorial des séances du Grand Conseil de la République et canton de Genève [ci-après : MGC] 2011-2012 II A p. 1335). Il ressort de l'exposé des motifs que ce projet de loi visait également à fournir une alternative aux déclassements de la zone villas, laquelle était essentielle à l'équilibre sociologique du canton et à son attractivité (exposé des motifs du PL 10'891, MGC 2011-2012 II A pp. 1335-1336 ; ATA/1364/2023 du 19 décembre 2023 consid. 9.1).

6.2 Le législateur a eu conscience de l'évolution du visage des quartiers de villas et a souhaité encourager la réalisation de ces nouvelles formes d'habitat (groupé ou en ordre contigu), lorsqu'il a augmenté les IUS dérogatoires susceptibles d'être appliqués dans cette zone (intervention de Christophe AUMEUNIER, rapporteur de majorité, lors du premier débat consacré au PL 10'891, MGC 2012/II/A p. 1432 ss). Il a considéré cette évolution comme une réponse utile et nécessaire aux problèmes de l'exiguïté du territoire et à la pénurie de logements (ATA/1364/2023 précité consid. 9.1 et l'arrêt cité).

6.3 Le caractère justifié des circonstances au sens de l'art. 59 al. 4 let. a LCI ne relève pas de l'opportunité mais de l'exercice d'un pouvoir d'appréciation dont la chambre de céans est habilitée, selon l'art. 61 al. 1 let. a LPA, à sanctionner l'excès ou l'abus (arrêt du Tribunal fédéral 1C_204/2021 du 28 octobre 2021 consid. 5.3 et l'arrêt cité).

6.4 La compatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, exigée par l'art. 59 al. 4 let. a LCI, est une clause d'esthétique. Une telle clause fait appel à des notions juridiques indéterminées, dont le contenu varie selon les conceptions subjectives de celui qui les interprète et selon les circonstances de chaque cas d'espèce ; ces notions laissent à l'autorité une certaine latitude de jugement. Lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est mieux à même d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l'autorité de recours s'impose une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel, par exemple, à des connaissances spécialisées ou particulières en matière d'utilisation du sol, notamment en ce qui concerne l'esthétique des constructions (ATA/1364/2023 précité consid. 9.2 et l'arrêt cité).

L'art. 59 al. 4 let. a LCI, dans sa teneur jusqu'au 27 novembre 2020, exige entre autres la consultation de la commune, mais le département ne peut omettre d'éventuels autres intérêts publics, comme la nécessité de répondre aux besoins de logements, ni l'intérêt privé du propriétaire souhaitant construire conformément à l'affectation de la zone et aux règles de densité prévues à l'art. 59 al. 4 let. a LCI eu égard à la garantie de la propriété. L'octroi d'une autorisation fondée sur cette norme contraint le département à mettre en balance différents intérêts lorsqu'il fait usage de sa liberté d'appréciation (ATA/1301/2019 du 27 août 2019 consid. 9).

6.5 Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités et n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur. Selon une jurisprudence constante, chaque fois que l'autorité administrative suit les préavis des instances consultatives, l'autorité de recours observe une certaine retenue, fonction de son aptitude à trancher le litige. Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/1364/2023 précité consid. 6.6 et les arrêts cités).

Lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser. Dans le système prévu par l'art. 59 al. 4 let. a LCI, tant le préavis de la commune que celui de la CA ont cette caractéristique. Lorsque la consultation de la CA est imposée par la loi, le préavis de cette commission a un poids certain dans l'appréciation qu'est amenée à effectuer l'autorité de recours. Il n'en demeure pas moins que la délivrance de telles autorisations de construire demeure de la compétence exclusive du département, à qui il appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence (ATA/1364/2023 précité consid. 9.2 et les arrêts cités).

6.6 La fiche A04 du PDCn, intitulée « favoriser une utilisation diversifiée de la zone 5 », a pour objectif la poursuite de la densification sans modification de zone de la zone villas en favorisant l'habitat individuel groupé. Elle vise une accentuation de la densification de la zone villas aux abords de l'agglomération, alors que les secteurs relevant de la protection du patrimoine et des sites devraient conserver une urbanisation plus légère. Cette fiche donne mandat aux communes de proposer, dans leurs PDCom, des stratégies communales pour leur zone villas en identifiant les secteurs à densifier, les éléments remarquables à protéger, le maillage arborisé à maintenir ou à créer, les espaces verts et publics à créer (ATA/1364/2023 précité consid. 9.4).

6.7 Le PDCom fixe les orientations futures de l'aménagement de tout ou partie du territoire d'une ou plusieurs communes. Il est compatible avec les exigences de l'aménagement du territoire du canton, contenues notamment dans le PDCn (art. 10 al. 1 et al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30). Le plan directeur localisé adopté par une commune et approuvé par le Conseil d'État a force obligatoire pour ces autorités. Il ne produit aucun effet juridique à l’égard des particuliers. Pour autant que cela soit compatible avec les exigences de l'aménagement cantonal, les autorités cantonales, lors de l'adoption des plans d'affectation du sol relevant de leur compétence, veillent à ne pas s'écarter sans motifs des orientations retenues par le plan directeur localisé (art. 10 al. 8 LaLAT).

Un projet de construction conforme au droit cantonal ne peut être refusé au seul motif qu'il contreviendrait à un PDCom (arrêt du Tribunal fédéral 1C_257/2013 du 13 janvier 2014 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1A.154/2002 du 22 janvier 2003). Par « conforme au droit cantonal », il faut entendre conforme au plan d'affectation. En effet, le refus d'une autorisation au seul motif que le projet de construction contreviendrait au PDCom reviendrait à donner à ce plan directeur un effet anticipé inadmissible et à aboutir à une modification du plan d'affectation en vigueur (arrêt du Tribunal fédéral 1A.154/2002 précité consid. 4.1). Toutefois, il ne faut pas tirer de cette argumentation la conclusion que le plan directeur ne serait d'aucune importance dans le cadre d'une autorisation de construire. L'effet obligatoire d'un tel plan se déploie là où l'ordre juridique confère un pouvoir d'appréciation ou introduit des concepts juridiques indéterminés ménageant de la sorte une marge de manœuvre. Si le droit applicable exige une pesée globale des intérêts, alors le contenu du plan directeur doit être considéré, dans la pesée des intérêts, comme le résultat obligatoire du processus de coordination spatiale. Reste réservée la pesée des intérêts qui doit être faite dans un cas particulier en prenant aussi en compte les intérêts publics qui ne relèvent pas de l'aménagement du territoire ainsi que les intérêts privés. Le plan directeur s'impose aux seules autorités chargées des tâches dont l'accomplissement a des effets sur l'organisation du territoire, et non aux autorités judiciaires qui ont pour fonction d'examiner la légalité des actes étatiques. Dans le cadre d'un recours interjeté par une personne privée, il y a lieu de vérifier si le refus de l'autorisation sollicitée dans cette affaire repose sur une pesée globale de tous les intérêts publics et privés déterminants, qui ne soit pas entachée d'un vice lié à l'exercice du pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 1A.154/2002 précité consid. 4.2 ; ATA/1364/2023 précité consid. 9.4 et l'arrêt cité).

Un PDCom en voie d'élaboration ne peut pas être pris en considération pour mettre à néant une autorisation de construire (ATA/285/2020 du 10 mars 2020 consid. 4).

6.8 En l'espèce, le projet de construction querellé a été mis au bénéfice de la dérogation de l'art. 59 al. 4 LCI. Il a notamment été préavisé par la CA et la commune, dont les consultations sont obligatoires dans ce cadre, ainsi que par l'OU et l'OCT.

6.8.1 La CA a examiné à plusieurs reprises le projet. Dans son premier préavis, même si elle a requis des modifications, elle a relevé qu'il s’implantait de manière à favoriser des orientations intéressantes grâce à un jeu de volumes, préservait une surface végétale en suffisance avec la possibilité de se promener sur la parcelle autour du bâtiment, limitant ainsi les voies carrossables par l’intégration judicieuse de la rampe au bâtiment. Elle a délivré un second préavis, cette fois-ci favorable, le projet modifié répondant aux remarques formulées dans son premier préavis. Au vu de ce qui précède, il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir analysé la conformité du projet au caractère du quartier, étant précisé qu'elle n'a émis aucune réserve à ce sujet.

L'OU a également émis un préavis favorable. Il a relevé que le parti pris proposé par le projet permettait de libérer un espace important en pleine terre et de maintenir un certain nombre d’arbres existants et des espaces aménagés pour les jeux d’enfants. L’accès aux stationnements en sous-sol limitait l’imperméabilisation, et l’élargissement de la voie le long de la parcelle permettrait de gérer le transport individuel motorisé, sur ce tronçon de la voie uniquement. Il n'a pas non plus formulé de réserve sur la compatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier.

L’OCT a également émis un préavis favorable sous conditions. Il a requis la constitution d’une servitude de passage pour les piétons et les véhicules sur une partie de la parcelle afin de permettre un accroissement du gabarit du chemin K______, mais n'a pas non plus émis de réserve sur la compatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier.

Il ressort donc de ce qui précède qu'aucune des instances de préavis précitées, dont la consultation est soit obligatoire, soit nécessaire dans le cadre d'une éventuelle application de la dérogation prévue par l'art. 59 al. 4 LCI, ne s'est opposée à une telle dérogation. Toutes ont d'ailleurs motivé leur préavis.

6.8.2 La commune a émis un préavis défavorable, la parcelle destinée à accueillir le projet litigieux ne figurant pas dans les noyaux de densification ou dans leur extension potentielle tels qu’illustrés sur le plan de synthèse de son projet de PDCom présenté à l’enquête technique en avril 2019, ni dans le périmètre de densification accrue indiqué sur le nouveau plan y relatif, qui serait soumis prochainement aux instances cantonales pour approbation. Il apparaît effectivement que, selon le PDCom de la commune adopté le 27 juin 2023 par le conseil municipal et approuvé par le Conseil d'État le 8 novembre 2023 (https://ge.ch/geodata/SIAMEN/PDL/PDCom_Collonge‑Bellerive/PDCom_Collonge-Bellerive_2e_ACE.pdf), la parcelle en cause ne fait pas partie des périmètres de densification accrue définis par la commune, si bien que le projet litigieux ne saurait être considéré comme en tous points compatible avec la vision de la densification de la zone 5 telle que souhaitée par la commune, dont le préavis négatif n'apparaît ainsi pas incohérent. Cependant, ledit PDCom n'avait pas encore été approuvé au moment de la délivrance de l'autorisation litigieuse et n'avait donc pas à être pris en compte. De plus, outre le fait que le préavis de la commune n'était pas contraignant (cf. supra consid. 4.2.2), le poids de ce dernier doit être relativisé face aux préavis favorables de toutes les autres instances consultées, auxquels il doit céder le pas. Il ne saurait enfin être fait abstraction de l'intérêt privé du propriétaire souhaitant construire conformément à l'affectation de la zone et aux règles de densité prévues à l'art. 59 al. 4 let. a LCI, eu égard à la garantie de la propriété.

En outre, comme la chambre de céans a déjà eu l'occasion de le relever, le PDCom en vigueur au moment de la délivrance de l'autorisation querellée, adopté le 24 juin 2014, ne comportait pas de limitation de la densité à 0.25 comme voulue par la commune, le conseil d'État n'ayant pas validé cette limitation (ATA/1038/2019 du 18 juin 2019 consid. 7). Partant, l'autorisation querellée ne contrevient pas audit PDCom.

6.8.3 Il sera encore précisé que l'affirmation des recourants selon laquelle les dimensions du projet seraient gigantesques n'est pas pertinente. D'abord, elle ne relève que de leur propre appréciation. Ensuite, elle est contredite par les préavis favorables des instances spécialisées, qui ont analysé le projet à plusieurs reprises sans émettre de réserve sur les dimensions du projet. Enfin, l'IUS de ce dernier, soit 44%, est conforme aux rapports de surface autorisés par l'art. 59 al. 4 LCI. Il est même inférieur à celui qui aurait pu être autorisé si les bâtiments projetés avaient répondu à un standard de THPE (48%).

En outre, la construction, comme en l'espèce, de deux habitats groupés dans un quartier composé de maisons individuelles n'est pas incompatible avec les exigences de l'art. 59 al. 4 LCI. En effet, la modification de l'aménagement de tels quartiers a d'ores et déjà été entamée dans de nombreuses communes afin de pallier les problématiques d'aménagement du territoire, conformément à la volonté du législateur (ATA/1102/2022 du 1er novembre 2022 consid. 7). Le reproche des recourants n'apparaît donc pas fondé.

Enfin, le bâtiment projeté accueillera douze logements. Il permettra de contribuer à offrir une réponse à la pénurie notoire de logements qui sévit à Genève (voir à ce propos l'intervention du conseiller d'État en charge du département du territoire dans le cadre des travaux préparatoires relatifs au PL 12'566, PL 12'566-A, p. 11) tout en contribuant à donner une solution aux problèmes de l'exiguïté du territoire. Il s’inscrit dans ce contexte pleinement dans l’objectif d’une densification sans modification de zone de la zone 5 prévu par la fiche A04 du PDCn, en favorisant l’habitat contigu ou groupé.

Il s'ensuit que rien ne permet de retenir que l'autorité intimée, qui a notamment suivi les préavis motivés de la CA, de l'OU et de l'OCT, soit des préavis qui ont un certain poids, aurait abusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que le projet était compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier et que les circonstances justifiaient l'octroi d'une dérogation. Les recourants ne parviennent du reste pas à l'établir.

Le grief sera par conséquent écarté.

7.             Les recourants estiment que les plans modifiés en cours d'instance de recours l'ont été tardivement et auraient dû être déclarés irrecevables, au même titre que la conclusion subsidiaire de l'intimé tendant à ce qu’il lui soit donné acte de son engagement de supprimer les deux « pergolas ouvertes » si celles-ci devaient être considérées comme des CDPI. De plus, elles nécessitaient une autorisation de construire, de sorte que leur suppression impliquait de consulter les instances de préavis. Les modifications engendrées par celle-ci touchaient la substance du projet puisqu'elles modifiaient la volumétrie et donc son aspect extérieur.

7.1 L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours, les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. Il correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 précité consid. 1.5 ; ATA/29/2023 du 17 janvier 2023 consid. 4b et l'arrêt cité). N'est donc pas nouveau un chef de conclusions n'allant pas, dans son résultat, au-delà de ce qui a été sollicité auparavant ou ne demandant pas autre chose (arrêts du Tribunal fédéral 2C_77/2013 du 6 mai 2013 consid. 1.3 ; 8C_811/2012 du 4 mars 2013 consid. 4).

En procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l'autorité administrative compétente s'est prononcée préalablement, d'une manière qui la lie sous la forme d'une décision (ATF 134 V 418 consid. 5.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_197/2016 du 9 décembre 2016 consid. 3.1).

L'objet d'une procédure administrative ne peut pas s'étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés (ATA/355/2024 du 12 mars 2024 consid. 1.4 et l'arrêt cité).

7.2 Un formalisme excessif, prohibé par l’art. 29 al. 1 Cst., est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la mise en œuvre du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 135 I 6 consid. 2.1).

7.3 Si un projet de construction subit des modifications essentielles en cours d'instruction, après avoir été porté à la connaissance de l'autorité de préavis, il appartient à l'autorité de décision de requérir à nouveau le préavis de cette dernière. Un projet subit une modification essentielle, lorsque pris dans leur ensemble, tant l'implantation que la volumétrie des bâtiments ont été modifiées, notamment par une augmentation de l'emprise au sol de la construction réduisant les distances aux limites de propriété ou par un déplacement d'un bâtiment et une augmentation du nombre d'étages prévus. Il en est de même lorsque les modifications intervenues changent le régime juridique d'un projet le faisant passer notamment des règles ordinaires en matière de gabarit de hauteur à celles régissant les surélévations d'immeubles (ATA/927/2021 du 7 septembre 2021 consid. 6d et les arrêts cités).

7.4 Dans un arrêt de 2021, la chambre de céans a considéré qu'une modification portant sur un aspect limité d'un projet, rendue nécessaire à la suite d'une erreur du département, n'ayant d’impact ni sur le volume ni sur l’implantation du bâtiment, n’affectant pas le régime juridique de l’autorisation sollicitée et n'ayant qu’un faible effet sur la circulation du secteur et sur la surface végétale de la parcelle ne constituait pas une modification essentielle – exigeant la reprise d’une instruction complète par le département – du projet. Vu son caractère technique, elle devait néanmoins être, sur la base d’un plan modifié en bonne et due forme, réexaminée par l’OCT, autorité spécialisée en la matière (ATA/927/2021 du 7 septembre 2021 consid. 6g).

7.5 Dans un autre arrêt de 2021, portant sur le déplacement de 2 m de deux poteaux situés aux deux extrémités des villas contiguës et soutenant les terrasses/balcons prévus au-dessus des places de stationnement, la chambre de céans a relevé que ce déplacement des poteaux modifiait les surfaces à prendre en compte au titre de CDPI, lesquelles atteignent ainsi un total de 94 m2 pour l’ensemble du projet et 4.52 % de la surface de la parcelle. Ce total des surfaces de CDPI permettait le respect de l’exigence d’un maximum de 100 m2 et de 8% de la surface de la parcelle, telle que prévue à l’art. 3 al. 3 RCI. La modification du projet ne pouvait qu’être qualifié de mineure. Rien ne permettait de retenir que cette modification aurait des incidences négatives sur la circulation, la sécurité ou l’esthétique du projet. La modification ayant été approuvée par le département et vu son peu d’importance, elle n’avait pas être soumise aux instances de préavis. Finalement, le jugement litigieux donnait acte aux parties que l’autorisation de construire telle que modifiée serait soumise à validation dans le cadre de l’attestation globale de conformité prévue par l’art. 7 LCI, avant l’entrée en occupation (ATA/896/2021 du 31 août 2021 consid. 7).

7.6 En l'espèce, dans sa duplique devant le TAPI, le requérant a conclu subsidiairement, dans l’hypothèse où le TAPI retiendrait que les deux « pergolas ouvertes » des entrées prévues par le projet devaient être prises en compte dans le calcul des CDPI, à ce qu’il lui soit donné acte de son engagement à supprimer ces deux constructions, conformément aux plans produits en pièce 13.

Dans la mesure où les parties ont eu la possibilité de s'exprimer sur la modification du projet avant le prononcé du jugement, le TAPI a considéré qu'il était possible de donner acte au requérant de son engagement et de renoncer à solliciter de nouveaux préavis, dès lors que la modification apportée aux plans, qui consistait en la seule suppression de deux ouvrages de 13.5 m2 chacun situés au-dessus des deux entrées du bâtiment projeté, purement technique et mineure, ne touchait pas la substance du projet, comme relevé par le département.

7.6.1 Il convient de préciser que le fait de proposer, en procédure de recours, la modification d'un projet autorisé par le département n'est en principe pas autorisé. Toutefois, contrairement à ce que semblent prétendre les recourants, ce principe n'est pas absolu, comme l'a déjà admis la chambre de céans dans les deux cas biens particuliers mentionnés ci‑avant. De plus, l'interdiction du formalisme excessif et des motifs d'économie de procédure commandent en effet qu'une modification peu importante d'un projet de construction, comme en l'espèce (cf. infra), puisse être, si des circonstances particulières le justifient, proposée dans le cadre d'une procédure de recours, pour autant que toutes les parties puissent s'exprimer à leur sujet, ce qui a été le cas en l'occurrence. Cela se justifie d'autant plus dans le domaine de la construction, où les projets déposés sont susceptibles d'être modifiés en cours d'instruction, les demandes de modification ayant pour but de rendre un projet conforme au droit, avec pour finalité la délivrance de l'autorisation.

Par ailleurs, dans la mesure où la modification proposée a pour objet de réduire l'emprise au sol du bâtiment projeté, il ne saurait être reproché au requérant d'avoir amplifié l'ampleur du projet ou proposé une modification allant au-delà de ce que le département avait examiné dans le cadre de la procédure en autorisation de construire.

Le TAPI a donc à juste titre déclaré recevables les plans déposés et les modifications proposées au stade de la duplique par le requérant.

7.6.2 Il ressort du plan n° 13 produit par le requérant devant le TAPI que les deux « pergolas ouvertes », d'une surface de 13.5 m2 chacune, situées devant les deux entrées de l'immeuble au rez-de-chaussée, seront supprimées. Ces deux « pergolas » faisaient partie du bâtiment principal. L'une était rattachée au mur de la chambre 02, et l'autre au mur de la chambre 03. La pièce n° 14 produite par le requérant montre que les « pergolas » étaient chacune constituées, du côté non rattaché aux murs des chambres, d'un mur de 4.5 m de long et d'approximativement 3 m de hauteur. Des planches espacées entre elles, reliées au mur des chambres, servaient de toit aux « pergolas ouvertes ».

Au vu de la description qui précède, la suppression de ces « pergolas » consiste uniquement en la suppression, d'une part, de deux murs (un pour chaque « pergola », les murs des chambres 02 et 03 étant conservés) et, d'autre part, de quelques planches. Cette suppression engendre une diminution de la surface des CDPI, dont le maximum est ainsi respecté (cf. infra consid. 8.5), et ne modifie ni l'implantation ni la volumétrie ni la substance du bâtiment. Les modifications intervenues, qui ont été validées par le département devant le TAPI, ne changent pas non plus le régime juridique du projet, ce qui n'est pas contesté. Pour ces raisons, la modification litigieuse doit être qualifiée de mineure, étant rappelé que le projet est destiné à prendre place sur une grande parcelle de plus 5'000 m2. Dès lors, et dans la mesure où la modification a été approuvée par le département dans le cadre de la procédure de recours devant le TAPI, il n'était pas nécessaire de la soumettre aux instances de préavis. Cette solution s'impose d'autant que l'emprise au sol du projet se voit réduite par la suppression des deux « pergolas ».

Les arguments des recourants ne sont pas de nature à remettre en cause ce qui précède. Leur affirmation selon laquelle les « pergolas », en tant que CDPI, nécessiteraient une autorisation de construire, avec pour conséquence que les instances de préavis auraient dû être consultées, ne trouve aucun ancrage dans la loi ni dans la jurisprudence. De plus, c'est le projet litigieux dans sa globalité qui fait l'objet de l'autorisation de construire, et non pas seulement les « pergolas ». Il est dès lors sans importance que ces dernières nécessiteraient une autorisation de construire pour elles-mêmes si elles faisaient seules l'objet d'un projet de construction. Ce cas n'est pas visé en l'espèce.

Enfin, le TAPI a donné acte aux parties que l’autorisation de construire telle que modifiée serait soumise à validation dans le cadre de l’attestation globale de conformité prévue par l’art. 7 LCI, avant l’entrée en occupation.

Le grief sera donc écarté.

8.             Les recourants considèrent que la surface autorisée de CDPI est dépassée, la rampe d'accès au garage devant être considérée comme une CDPI. Elle était couverte au niveau du rez-de-chaussée par la dalle du premier étage sur une longueur de 10.8 m et une largeur de 5.20 m, l'entrée étant située au niveau du terrain naturel, ce qui rendait impossible une couverture en sous-sol par la dalle du rez-de-chaussée. Il ressortait de l'ATA/93/2021 qu'une rampe d'accès au garage se situant hors-sol et couverte par la dalle du premier étage devait être comptabilisé dans les CDPI. Une surface de 56.16 m2 devait donc s'ajouter aux 98.6 m2 correspondant aux huit loggias, soit un total de 154.76 m2 excédant le maximum autorisé (100 m2). En outre, le fait que le plancher de la rampe d'accès couverte du parking soit situé en dessous du sol naturel de quelques centimètres ne pouvait éluder le fait que la majorité du volume de la rampe d'accès couvert était située hors sol (ATA/97/2019 du 29 janvier 2019). La rampe d'accès couverte du parking, en raison de son caractère hors-sol prépondérant, devait donc être réintégrée dans les CDPI ou à tout le moins dans les SBP.

8.1 En zone villas, les CDPI ne sont pas prises en considération pour le calcul du rapport des surfaces (art. 59 al. 7 LCI). Selon l'art. 3 al. 3 RCI, sont des CDPI, à la condition qu'elles ne servent ni à l'habitation, ni à l'exercice d'une activité commerciale, industrielle ou artisanale, celles dont la surface n'excède pas 50 m2 et qui s'inscrivent dans un gabarit limité que l’article réglementaire définit (phr. 1). Dans le cadre d'un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d'habitat groupé, et afin d'améliorer l'insertion dans le site et pour autant qu'il n'en résulte pas de gêne pour le voisinage, le département peut autoriser, après consultation de la CA, des CDPI groupées d'une surface de plus de 50 m2 au total (phr. 2). Dans tous les cas, la surface totale des CDPI ne doit pas excéder 8% de la surface de la parcelle et au maximum 100 m2 (phr. 3).

8.2 Les CDPI font l’objet d’une directive du département du 3 février 2014, modifiée le 9 mars 2021 sous le numéro 024-v7 (ci-après : la directive CDPI). Il en ressort que les types de constructions pouvant être considérés comme des CDPI sont les « garages, ateliers non professionnels, couverts à voitures, couverts de plaisance, couverts à bois, abris ou cabanes de jardin, pool house » (ATA/896/2023 du 22 août 2023 consid. 2.1). De plus, le chapitre « prise en compte des éléments en saillies du bâtiment principal » de la directive prévoit ce qui suit : « surplomb de l'étage = 0% CDPI » ; « surplomb de l'étage avec poteau ou mur = 100% CDPI selon situation (par ex. +50% de côtés fermés).

Dans un arrêt de 2021, la chambre de céans a retenu qu’une rampe d'accès à un garage souterrain, à ciel ouvert, avec un muret de soutènement, était un aménagement extérieur qui ne répondait pas à la définition de CDPI et ne correspondait à aucun des schémas de la directive CDPI (ATA/93/2021 du 26 janvier 2021 consid. 10).

8.3 La surface des constructions en sous-sol, exprimée en m2 de plancher brut, ne doit pas excéder la surface de plancher hors sol qui peut être autorisée en application de l'art. 59 al. 1 LCI (art. 59 al. 8 LCI). Dans tous les cas, la surface du sous-sol, y compris celle du sous-sol des constructions de peu d’importance, ne peut excéder le 22% de la surface de la parcelle lorsque la construction est conforme à un standard de HPE (art. 59 al. 9 LCI).

8.4 Afin d'assurer l'application uniforme de certaines dispositions légales, l'administration peut expliquer l'interprétation qu'elle leur donne dans des directives. Celles-ci n'ont pas force de loi et ne lient ni les administrés, ni les tribunaux, ni même l'administration. Par ailleurs, elles ne peuvent sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu'elles sont censées concrétiser. En d'autres termes, à défaut de lacune, elles ne peuvent prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATF 141 II 338 consid. 6.1 ; 140 V 343 consid. 5.2).

8.5 En l'espèce, il n'est pas contesté que la surface des CDPI, hors surface de la rampe d'accès au parking, s'élève à 95 m2.

L'accès au garage souterrain se fera par une rampe en partie couverte par la dalle du rez-de-chaussée (plan 2______ visé ne varietur). Sur une surface de 56.16 m2, cette rampe sera surplombée par la dalle du premier étage (plans 3______ et 4______ visés ne varietur).

Comme l'a déjà retenu la chambre de céans, une rampe de parking ne répond pas à la définition de CDPI et ne correspond à aucun des schémas de la directive CDPI. Il n'y a donc pas lieu de comptabiliser sa surface dans les CDPI, que la rampe soit couverte ou non par une dalle ou qu'elle se situe hors‑sol ou en sous-sol, contrairement à ce que prétendent les recourants. À cet égard, ils ne peuvent rien tirer de l'ATA/97/2019 précité puisque cet arrêt concernait une autre problématique, celle de déterminer si, dans le cas d'une maison construite sur un terrain en pente, un rez-inférieur se situant 31 cm en-dessous de la pente du terrain naturel sur l'un de ses côtés (côté lac) pouvait être qualifié de surface en-dessous du sol.

En outre, il ressort de l'examen des plans 4______ et 2______ visés ne varietur que le surplomb d'étage, pour sa partie située au-dessus de la rampe d'accès au parking, n'est soutenu ni par un poteau ni par un mur, ce qui apparaît d'ailleurs logique, les voitures devant pouvoir sortir du parking et y entrer sans entrave. Dès lors, et conformément à la directive CDPI, la partie couverte de la rampe d'accès au parking par le premier étage (surplomb) n'a pas à être prise en compte à titre de CDPI.

Enfin, l'ATA/93/2021 précité traite certes d'une rampe d'accès au parking à ciel ouvert, mais la solution qu'il retient ne signifie pas qu'une rampe d'accès se situant hors‑sol et couverte par la dalle du premier étage devrait a contrario être comptabilisée à titre de CDPI, d'autant plus au vu des développements qui précèdent.

La surface des CDPI, de 95 m2, est donc conforme à l'art. 3 al. 3 RCI.

8.5.1 Les recourants soutiennent encore que la rampe de parking devrait être prise en compte dans la SBP. Ils ne peuvent toutefois être suivis, pour les motifs qui suivent.

L'art. 59 al. 2 LCI prévoit certes que par surface de plancher prise en considération dans le calcul du rapport des surfaces, il faut entendre la surface brute de plancher de la totalité de la construction hors sol. Or, selon un arrêt de la chambre de céans de 2023, il ressort des interprétations historique, systématique et téléologique de l'art. 59 al. 1, 2 et 4 LCI que la notion de SBP à prendre en compte dans le calcul des rapports de surface doit être envisagée en tenant compte du caractère habitable des surfaces en question, ledit caractère devant cependant être compris au sens large (ATA/1168/2023 du 31 octobre 2023 consid. 4.7 et 4.9.).

Or, la rampe de parking prévue dans le projet autorisé ne revêt aucun caractère habitable, que ce soit au sens large ou au sens strict. Elle ne peut par conséquent pas être prise en compte comme SBP dans le calcul des surfaces hors-sol.

8.5.2 Enfin, il ressort du plan 3______ que la rampe d'accès, pour sa partie couverte par la dalle du rez-de-chaussée, a été comptabilisée dans la surface du sous‑sol. Cette solution doit s'imposer, puisque la partie en question se confond avec la surface du parking sous-terrain. En revanche, la partie non‑couverte – par la dalle du rez-de-chaussée – de la rampe ne fait plus partie du parking sous-terrain et doit donc être considérée, vu les développements qui précédent, comme un aménagement extérieur exclu du calcul des rapports de surface hors-sol.

Il s'ensuit que la surface de la rampe de parking a été correctement comptabilisée.

Le grief sera par conséquent écarté.

9.             Dans un ultime grief, les recourants se prévalent d'un accès insuffisant à la parcelle destinée à accueillir le projet litigieux. L'accès se faisait par le chemin K______, soit un chemin vicinal d'une largeur de 3 m rendant tout croisement impossible. La constitution d'une servitude de passage n'y changeait rien, puisque l'étroitesse du chemin ne s'en trouverait pas modifiée sur les 80 m séparant la parcelle n°6'821 et le chemin N______, que tous les riverains devraient emprunter. En outre, seule la partie du chemin K______ venant du chemin N______ constituait l'accès pour les riverains. La partie du chemin K______ venant du chemin M______ était impraticable compte tenu de son étroitesse et n'était pas goudronnée. Le trafic supplémentaire induit par le projet représenterait une augmentation de plus du double du trafic. Le chemin était régulièrement encombré de containers au niveau du croisement avec le chemin N______, et de nombreux enfants jouaient sur le chemin K______.

9.1 Selon l'art. 22 de loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700), aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente (al. 1). L'autorisation est notamment délivrée si le terrain est équipé (al. 2 let. b).

L'art. 19 al. 1 LAT prévoit qu'un terrain est réputé équipé lorsqu'il est desservi d'une manière adaptée à l'utilisation prévue par des voies d'accès. Cette disposition comporte des notions indéterminées. Les autorités communales et cantonales disposent en ce domaine d'un important pouvoir d'appréciation (ATF 121 I 65 consid. 3a).

9.2 Une voie d'accès est adaptée à l'utilisation prévue lorsqu'elle est suffisante d'un point de vue technique et juridique pour accueillir tout le trafic de la zone qu'elle dessert (ATF 121 I 65 consid. 3a). Cela suppose simplement que de telles installations existent sous une forme ou une autre. Il faut aussi que la sécurité des usagers soit garantie sur toute sa longueur, que la visibilité et les possibilités de croisement soient suffisantes et que l'accès des services de secours et de voirie soit assuré. Un bien-fonds ne peut pas être considéré comme équipé si, une fois construit, son utilisation entraîne un accroissement du trafic qui ne peut être absorbé par le réseau routier et s'il provoque des atteintes nuisibles ou incommodantes dans le voisinage (ATF 129 II 238 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_430/2015 du 15 avril 2016 consid. 3.1). La loi n'impose pas des voies d'accès idéales ; il faut et il suffit que, par sa construction et son aménagement, une voie de desserte soit praticable pour le trafic lié à l'utilisation du bien-fonds et n'expose pas ses usagers ni ceux des voies publiques auxquelles elle se raccorderait à des dangers excessifs (arrêts du Tribunal fédéral 1C_216/2021 du 21 avril 2022 consid. 4.1 et les références citées ; 1C_341/2020 du 18 février 2022 consid. 3.1 et l'arrêt cité).

9.3 Dans certaines circonstances, un long chemin étroit (moins de 3 m) présentant à certains endroits une largeur de 2.2 m est suffisant, notamment s’il ne sert qu’aux riverains (voie sans issue) et s’il existe, aux endroits présentant peu de visibilité, des possibilités d’évitement, au besoin sur des parcelles de riverains qui y consentent. L’aptitude d’une voie d’accès à assurer la desserte d’une parcelle n’exige cependant pas que soient garanties des possibilités de croisement sur toute sa longueur, notamment lorsque la visibilité permet à un conducteur attentif et respectueux des règles usuelles de circulation de constater la présence d’un autre véhicule suffisamment tôt pour s’arrêter à l’entrée du tronçon et le laisser passer, ce même s’il devait apparaître finalement nécessaire de procéder à des marches arrière malcommodes compte tenu de la longueur du chemin (ATA/372/2024 du 12 mars 2024 consid. 3 ; Eloi JEANNERAT, Commentaire pratique LAT : Planifier l’affectation, 2016, n° 28 ad art. 19 LAT et les références citées).

9.4 L'accès est en principe considéré comme suffisant lorsqu'il présente des conditions de commodité et de sécurité (pente, visibilité, trafic) tenant compte des besoins des constructions projetées et cela même si, en raison de l'accroissement prévisible du trafic, la circulation devient moins aisée et exige des usagers une prudence accrue. Pour apprécier si un accès est suffisant, la jurisprudence se réfère en général aux normes VSS (arrêt du Tribunal fédéral 1C_243/2013 du 27 septembre 2013 consid. 5.1), étant précisé qu'elles ne sont pas contraignantes et doivent être appliquées en fonction des circonstances concrètes et en accord avec les principes généraux du droit dont celui de la proportionnalité (arrêts du Tribunal fédéral 1C_88/2019 du 23 septembre 2019 consid. 3.2 ; 1C_225/2017 du 16 janvier 2018 consid. 4.1 et 5.3.3).

9.5 Le Tribunal fédéral a déjà estimé qu'une situation insatisfaisante préexistante à un projet de construction ne saurait justifier le refus d'un permis de construire lorsque l'augmentation du trafic est modeste (arrêt du Tribunal fédéral 1C_225/2017 précité consid. 5.3.3).

9.6 La réalisation de la voie d'accès est juridiquement garantie lorsque le terrain peut être raccordé à une route du domaine public ou à une route privée que les utilisateurs du bâtiment ont le droit d'emprunter (arrêt du Tribunal fédéral 1C_387/2014 du 20 juin 2016 consid. 7.1).

9.7 Dans un arrêt du 9 octobre 2020, le Tribunal fédéral a confirmé un arrêt du Tribunal cantonal vaudois considérant un chemin d’une largeur de 3 m à 3.5 m, avec des murets de part et d’autre, comme suffisant. Le projet de construction portait sur un immeuble de 23 appartements, comprenant notamment la création d’un parking souterrain de 17 places pour voitures auxquelles s’ajoutaient cinq autres places. Sur le trajet jusqu’à l’accès au parking souterrain, soit une distance de 100 m, il existait, grâce aux surlargeurs prévues par le projet, trois possibilités de croisement pour deux voitures de tourisme, soit tous les 30 m environ (arrêt du Tribunal fédéral 1C_597/2019 du 9 octobre 2020, consid. 6).

Dans un arrêt du 24 août 2022, le Tribunal fédéral a confirmé qu’un accès imposant des croisements « probablement malcommodes » et pouvant « parfois impliquer de relativement longues manœuvres en marche arrière », soit sur 60 m, pouvait rester conforme aux exigences minimales du droit fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 1C_322/2021 du 24 août 2022 consid. 3.2.2).

9.8 La chambre de céans a confirmé que le département n’avait ni excédé, ni abusé de son pouvoir d’appréciation en suivant le préavis positif de l'OCT pour un projet de réalisation de 18 appartements en zone 5, lorsque le projet se situait proche de l’extrémité du chemin concerné qui présentait une largeur variable inférieure à 4.8 m sur la majorité, voire même de 3.4 m par endroits et qu’aucun accident n’avait été répertorié sur le tronçon (ATA/155/2021 du 9 février 2021).

9.9 En l'espèce, le chemin K______, d'une longueur de 150 m environ de son début jusqu'à l'extrémité de la parcelle destinée à accueillir le projet litigieux, constitue un chemin privé que les utilisateurs du bâtiment projeté auront le droit d'emprunter. L'accès à la parcelle litigieuse est donc juridiquement garanti.

Le chemin K______ dessert déjà une dizaine d'habitations. Il ressort du « plan de situation et état des lieux » produit par le requérant que la largeur du chemin varie entre 3.18 m et 5 m. Les normes VSS SN 640 201 reprises dans la fiche info 06/2017 de la Mobilité piétonne suisse intitulée « Cas de croisements et largeur de chaussée en cas de croisements en localité » préconisent, pour le croisement de deux voitures roulant à 30 km/h, une largeur minimale de 4.4 m et une largeur libre de 4.8 m. Il apparaît donc que le chemin d'accès ne répond pas aux normes exigées par les normes VSS SN 640 201 sur toute sa longueur. Il apparaît dès lors douteux que deux voitures empruntant simultanément le chemin dans une direction opposée puissent se croiser sur toute la longueur dudit chemin.

Toutefois, une telle situation ne saurait conduire à elle seule au refus de l'autorisation querellée. En premier lieu, il s'agit d'une situation préexistante insuffisante et les dimensions du chemin restent acceptables selon la jurisprudence précitée, étant rappelé que les normes VSS ne sont pas contraignantes. Il ne ressort par ailleurs pas du dossier que les dimensions du chemin poseraient des problèmes de mobilité ou seraient la cause d'accidents, étant précisé que, selon les données du SITG, aucun accident n'a été répertorié sur le chemin K______ depuis 2020.

En deuxième lieu, l'OCT a conditionné son préavis favorable à la constitution d’une servitude de passage pour les piétons et les véhicules sur une partie de la parcelle afin de permettre un accroissement du gabarit du chemin K______, ce qui permettra aux véhicules, sur certaines parties du chemin attenantes à la parcelle, de croiser, le chemin étant élargi à 5 m. Les possibilités de croisement, bien que non idéales, apparaissent ainsi suffisantes, contrairement à ce que prétendent les recourants. Pour le reste, une distance de 70 m sépare le début de la parcelle litigieuse et le chemin N______. S'il est vrai que ce tronçon est relativement étroit, la distance mentionnée est relativement courte et le chemin est en ligne droite, ce qui permettra aux automobilistes arrivant du chemin N______ et apercevant un véhicule engagé dans le chemin K______ d'attendre – un court instant – que celui-ci en sorte pour s'y engager, rien n'indiquant que la visibilité ne serait pas suffisante sur le chemin K______. En outre, le chemin, qui ne sert qu'aux riverains, présente un élargissement à hauteur de la parcelle n° 7'062, voisine de la parcelle n° 6'821, ce qui permet un croisement à cet endroit.

En troisième lieu, le département des infrastructures a imposé la mise en place, sur le chemin K______ 7-9, à la sortie du parking souterrain projeté, d'une signalisation « stop » avec marquage correspondant et une « signalisation d’obliquer à droite ». Cette mesure permettra d'éviter que les voitures ne sortent en direction du chemin M______, la partie du chemin K______ menant à celui M______ ne permettant pas à deux véhicules de se croiser. En revanche, contrairement à ce que prétendent les recourants, il ressort des photos qu'ils ont produites que cette partie est praticable et peut être empruntée par un véhicule, quand bien même elle n'est pas goudronnée. Les automobilistes disposent ainsi de deux voies d'accès à la parcelle litigieuse, ce qui permet de limiter les risques de conflits et la nécessité pour eux de devoir, le cas échéant, manœuvrer en marche arrière, étant rappelé que de telles manœuvres peuvent être imposées.

En quatrième lieu, la hausse de circulation engendrée par la construction des nouveaux logements semble inévitable. Or, outre le fait que l'accroissement du trafic routier, s'il est raisonnable, ne crée pas une gêne durable pour la circulation (ATA/1364/2023 précité consid. 7.1 et l'arrêt cité) et que les voisins n'ont ainsi pas un droit au statu quo dans ce domaine, rien ne permet de considérer que le chemin ne pourra pas absorber la hausse de circulation, eu égard notamment à l'existence de deux voies d'accès à la parcelle litigieuse. De plus, douze logements seront créés, ce qui reste raisonnable. Il est peu probable que les nouveaux véhicules sortent et entrent sur le chemin simultanément, étant relevé que l'OCT, qui a délivré un préavis favorable sous conditions, n'a pas formulé de réserves sur ce point.

En cinquième lieu, quand bien même des containers se trouveraient à hauteur du croisement entre le chemin K______ et celui N______ et encombreraient le chemin d'accès, il s'agirait d'une situation non-conforme au droit que les personnes concernées devraient rétablir, par mesure de sécurité notamment, et qui ne saurait ainsi justifier l'annulation de l'autorisation litigieuse. Par surabondance, les recourants ne démontrent pas que la présence régulière de ces containers constituerait une entrave à la circulation sur ce chemin. Au contraire, les photos qu'ils ont produites montrent que ces objets sont placés à côté de l'entrée du chemin K______ et qu'ils n'en gênent ainsi pas l'accès.

Enfin, le chemin K______ est une voie de circulation destinée au passage des véhicules et non aux activités des enfants. Dès lors, quand bien même certains d'entre eux y joueraient, une telle situation ne saurait justifier l'annulation de l'autorisation litigieuse.

La voie d'accès est par conséquent adaptée à l'utilisation prévue, si bien que le terrain doit être considéré comme équipé au sens de la LAT.

Le grief sera donc écarté.

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

10.         Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 2'500.-, comprenant la décision sur appel en cause, sera mis à la charge solidaire de C______ ainsi que D______ et E______, de même qu'un autre du même montant à la charge solidaire de A______ et B______ (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 3'000.- sera allouée à J______ et F______, pris solidairement, à la charge solidaire pour CHF 1'500.- de C______ ainsi que D______ et E______, ainsi qu'à la charge solidaire de A______ et B______ pour CHF 1'500.- (art. 87 al. 2 LPA).

Aucun émolument ne sera mis à la charge d'H______ et I______, ni de la commune, et aucune indemnité ne leur sera allouée, dans la mesure où ils n'ont pas pris de conclusions dans le cadre de la procédure devant la chambre de céans.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevables les recours interjetés le 15 septembre 2023 par C______ ainsi que D______ et E______, d'une part, et par A______ et B______, d'autre part, contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 août 2023 ;

au fond :

les rejette ;

confirme le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 août 2023 ;

met un émolument de CHF 2’500.- à la charge solidaire de C______ ainsi que D______ et E______ ;

met un émolument de CHF 2’500.- à la charge solidaire de A______ et B______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 3'000.- à J______ et F______, pris solidairement, à la charge pour CHF 1'500.- de C______ ainsi que D______ et E______, pris solidairement, et pour CHF 1'500.- à celle de A______ et B______, pris solidairement ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Anthony WALTER, avocat de C______ ainsi que D______ et E______, à A______ et B______, à Me Raphaël CRISTIANO, avocat d'H______ et I______, à Me Nicolas WISARD, avocat de la commune, à Me Mark MULLER, avocat d'J______ et F______, au département du territoire-OAC ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Patrick CHENAUX, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. PASTEUR

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :