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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3506/2022

ATA/342/2024 du 05.03.2024 sur JTAPI/1083/2023 ( LCI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3506/2022-LCI ATA/342/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 5 mars 2024

3ème section

 

dans la cause

 

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC recourant

contre

A______ intimée
représentée par Me Jean-Marc SIEGRIST, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 octobre 2023 (JTAPI/1083/2023)


EN FAIT

A. a. A______ (ci-après : la SI) est propriétaire de la parcelle n° 1'542 de la commune de B______, sise chemin C______ .

b. En 2017, D______ est devenu propriétaire de la parcelle n° 2'131 de cette même commune, située au bord du lac, en zone 5, à l’adresse __, route E______.

À teneur du registre foncier (ci-après : RF), la parcelle de 4'603 m2 abrite une habitation à un logement de 394 m2, un garage de 85 m2 et deux autres bâtiments de 67 m2 et 9 m2.

La version du RF figurant à la procédure, datant de 29 septembre 2021, comprenait également une véranda de 11 m2.

c. Les parcelles n° 1'542 et n° 2'131 sont voisines.

d. Le 21 décembre 2017, D______, par le biais de son mandataire professionnellement qualifié (ci-après : MPQ), F______, a déposé auprès du département du territoire (ci-après : le département) une demande d'autorisation de construire portant sur la « rénovation - transformation d'une habitation – piscine – création d'un pool house » sur la parcelle précitée (DD 1______). Selon les plans, le projet portait notamment sur le réaménagement de l’intérieur de la demeure et la création d’une terrasse au premier étage de la façade côté lac.

La surface brute de plancher (ci-après : SBP) indiquée sur le formulaire de requête d’autorisation, ainsi que sur les plans produits – par la suite visés ne
varietur
–, était de 920 m2 pour une densité de 0.2.

e. L'autorisation DD 1______ a été délivrée le 10 octobre 2018 et n'a fait l'objet d'aucun recours.

B. a. Le 18 décembre 2019, D______, par le biais de son nouveau MPQ, G______, a déposé une demande d'autorisation complémentaire portant sur la « modification des avant-toits, de la piscine et de murs intérieurs » (DD 1______/2).

b. La SBP indiquée sur le formulaire de requête d’autorisation était de 920 m2.

c. L'autorisation DD 1______/2 a été délivrée le 18 décembre 2019 et n'a fait l'objet d'aucun recours.

C. a. Le 14 juillet 2020, la SI a dénoncé au département des travaux en cours sur la parcelle n° 2'131 non conformes aux autorisation délivrées.

b. Par courriel du 3 septembre 2020 adressé au mandataire responsable du chantier, le chef du service de l'inspection de la construction et des chantiers du département, faisant suite à une visite sur place effectuée le jour même, a relevé différents « points d’infractions » en lien avec les travaux en cours. Une autorisation de construire validant les constructions telles que réalisées devait donc être fournie, ainsi que les plans d’exécution du pool-house et de ses aménagements prévus.

Compte tenu des constatations faites sur le couvert existant et le couvert à bateau, la surface cumulée des constructions de peu d’importance (ci-après : CDPI) existantes était d’environ 85 m2. Le solde de CDPI de la parcelle ne permettait pas de construire le pool-house projeté. Ses murs porteurs avaient déjà été coulés et leur la taille ne correspondait pas à celle autorisée.

Les transformations de la villa ne soulevaient aucune remarque particulière, sous réserve de la validité de l’autorisation de construire compte tenu des indications erronées ou manquantes dans le cadre de son instruction.

c. Une procédure d’infraction avait été ouverte (I/2______) et la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) serait invitée à se prononcer formellement sur une reconsidération de l’autorisation de construire tenant compte des différents « points d’infractions » relevés.

L’arrêt partiel de chantier prononcé sur place, comprenant une interdiction de travailler sur et autour du pool house projeté, de la piscine et du mur existant le long de la limite de propriété, était confirmé. Aucune restriction n’était en revanche prononcée en ce qui concernait les travaux de la maison.

D. a.  Le 13 janvier 2021, D______ a déposé une demande d'autorisation de construire complémentaire portant sur la régularisation de l’infraction I/2______ et consistant en diverses modifications du projet initial (DD 1______/3).

La SBP indiquée sur le formulaire de requête d’autorisation de construire était de 1'203 m2.

Le descriptif du projet de régularisation indiquait que les objets concernés par l’infraction étaient les CDPI, à savoir : le couvert à bateau, le couvert existant et le pool-house. Les SBP n’étaient pas concernées par le constat d’infraction mais le projet contenait quelques modifications complémentaires qui étaient en cours d’élaboration lors du constat. À cet égard, l’architecte précisait que : « La régularisation de ce dossier a été l’occasion de recalculer toutes les SBP sur la parcelle 2'131. Il s’avère que les surfaces brutes hors sol s’élèvent à 1'203,7 m2, bien au-dessus des surfaces autorisées pour la superficie de la parcelle ».

b. Le 3 septembre 2021, le département a délivré l'autorisation de construire complémentaire DD 1______/3.

c. La SI et un autre voisin ont recouru contre cette autorisation auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), faisant valoir notamment une violation des dispositions légales relatives aux SBP et aux CDPI.

d. Par jugement du 16 juin 2022, le TAPI a annulé l’autorisation DD 1______/3, au motif que la surface maximale des CDPI était déjà atteinte et même dépassée dans le cadre des autorisations antérieures et qu’il n’existait plus aucune possibilité d’extensions supplémentaires pour le pool-house.

e. D______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement le 18 août 2022.

f. Par arrêt ATA/129/2023 du 7 février 2023, la chambre administrative a annulé le jugement du TAPI du 16 juin 2022 et lui a renvoyé la cause pour éventuel complément d’instruction et nouvelle décision, considérant que la piscine existante ne constituait pas une CDPI et n’avait donc pas à être prise en compte à ce titre dans l’examen du total des CDPI. La procédure est en cours d’instruction au TAPI (cause A/3378/2021).

E. a. Par courrier du 29 juillet 2022, la SI a demandé la reconsidération et l’annulation des autorisations DD 1______/1 et DD 1______/2 au motif qu’elles avaient été délivrées sur la base de plans viciés s’agissant des valeurs des SBP annoncées et constitutifs d’une infraction de faux dans les titres, commise par l’ancien mandataire de D______.

b. Le 7 septembre 2022, la SI a déposé une plainte pénale à l’encontre d’F______ et contre inconnu pour ces faits. La procédure pénale est actuellement en cours d’instruction auprès du Ministère public (P/3______/2022).

c. Par décision du 23 septembre 2022, le département a refusé d’entrer en matière sur la demande de reconsidération, estimant qu’aucun des motifs de révision prévus par les art. 48, respectivement 80 let. a et b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10) n’était réalisé.

F. a. Par acte du 21 octobre 2022, la SI, a recouru auprès du TAPI contre la décision précitée, concluant, préalablement, à ce qu’il ordonne un transport sur place, principalement, à l’annulation et à la réformation de la décision du 23 septembre 2022 en ce sens que le département entre en matière sur la demande de reconsidération, subsidiairement, à son annulation et au renvoi de la cause au département pour nouvelle décision, le tout sous suite de frais et dépens.

Les plans produits dans le cadre de la DD 1______/1 étaient trompeurs, puisqu’ils cachaient le dépassement de près de 300 m2 des SBP légalement autorisées. La force probante accrue accordée aux plans et documents produits par un architecte découlait notamment du fait que l’OAC se basait sur les valeurs indiquées sur les plans pour examiner si les dispositions légales étaient respectées, sans vérification sur place. En l’occurrence, l’OAC avait renoncé à exiger le calcul détaillé des rapports de surface précisément parce qu’F______ lui avait assuré – faussement – que les SBP seraient diminuées.

Ce dernier avait agi à dessein, dès lors qu’il savait pertinemment que les valeurs annoncées au titre de SBP étaient inexactes, étant relevé qu’un dépassement de près de 300 m2 ne saurait être considéré comme une simple erreur. En produisant des documents viciés, l’architecte s’était ainsi rendu coupable de faux dans les titres, soit une infraction entrant dans la catégorie des crimes. La commission de cette infraction avait directement influencé l’octroi des autorisations de construire
DD 1______/1 et DD 1______/2, lesquelles n’auraient jamais été délivrées si l’OAC avait eu connaissance des fausses indications données, puisqu’elles violaient de nombreuses dispositions légales applicables (CDPI, rapport de surfaces, zone inconstructible notamment). En les obtenant, D______ s’était vu accorder un avantage auquel il n’avait pas droit, alors qu’elle-même était impactée défavorablement par les constructions illicites. Il existait donc un motif de reconsidération obligatoire au sens de l’art. 80 let. a LPA, de sorte que le département aurait dû entrer en matière sur sa demande de reconsidération.

L’intérêt à une correcte application du droit objectif devait l’emporter sur l’intérêt de la sécurité du droit, puisque les travaux autorisés étaient loin d’être achevés (pool-house et piscine), respectivement n’avaient pas encore débuté (terrasse suspendue). De plus, les constructions prévues devaient prendre place dans une zone inconstructible et alors même que celles érigées jusqu’alors étaient parfaitement illicites. Il existait un intérêt public prépondérant à la préservation des rives du lac, qui empêchait l’OAC de favoriser un particulier.

b. Le département a conclu au rejet du recours.

La recourante n’alléguait pas, à juste titre, la survenance des conditions d’une reconsidération obligatoire en lien avec la présence de faits nouveau « anciens » ou de faits nouveaux « nouveaux » au sens des art. 80 let. b et 48 al. 1 let. b LPA. La question de savoir si les conditions d’une infraction de faux dans les titres étaient remplies pouvait souffrir de demeurer indécise. En effet, et selon une jurisprudence récente de la chambre administrative, même à considérer la commission d’une infraction, un motif de révision au sens de l’art. 80 let. a LPA ne pourrait être établi par la juridiction administrative, dès lors qu’une procédure pénale était toujours pendante et que la recourante n’amenait pas de preuve, hormis le dépôt d’une plainte pénale, qu’une infraction avait été commise et avait influencé les autorisations de construire en vigueur. Par ailleurs, les travaux concernés avaient déjà commencé et aucun intérêt public particulièrement important ne permettait de révoquer les autorisations en cause. Le service des monuments et des sites (ci-après : SMS), qui avait été amené à se prononcer sur les projets, d’une part, dans la mesure où le bâtiment principal dont la rénovation était prévue était classé à l’inventaire et, d’autre part, au vu de la situation de la parcelle dans la zone de protection des rives du lac, avait préavisé favorablement ceux-ci, estimant que l’intérêt à la protection des rives du lac n’était pas atteint. Partant, le principe de la sécurité du droit devait ici l’emporter sur celui d’une correcte application du droit, non établi à ce stade.

c. La SI a répliqué le 23 février 2023, persistant dans ses conclusions et concluant, à titre subsidiaire, à la suspension de la présente procédure jusqu’à droit connu sur l’issue de la procédure pénale.

Le raisonnement de la chambre administrative dans l’arrêt ATA/129/2023 précité au sujet de la qualification ou non d’une piscine en tant que CDPI était « absurde » et justifiait d’autant plus la reconsidération des deux autorisations de construire litigieuses.

Le département ne pouvait se soustraire à l’examen préjudiciel du caractère pénal de l’infraction de faux dans les titres alléguée dans la mesure où l’art. 80 let. a LPA précisait qu’en l’absence de jugement pénal, le crime ou le délit pouvait être établi « d’une autre manière ».

Le principe de la sécurité du droit et la pesée des intérêts n’étaient pas pertinents par rapport à l’obligation d’entrer en matière, mais uniquement sur la modification de la décision au fond. L’affirmation selon laquelle D______ avait déjà utilisé le droit octroyé par les décisions litigieuses se basait sur des faits inexacts puisqu’en particulier les travaux de la terrasse suspendue n’avaient pas encore commencé. Elle peinait ainsi à saisir ce qui justifierait de tenir compte de l’intérêt privé d’un propriétaire ayant obtenu des autorisations de construire, partiellement non encore mises en œuvre, et sur la base d’indications fallacieuses, plutôt que de l’intérêt public à la correcte application du droit sur un bâtiment classé et situé dans le périmètre de protection des rives du lac.

Enfin, la présence de faits nouveaux « anciens » au sens de l’art. 80 let. b LPA, soit les indications largement erronées des SBP existantes figurant dans les demandes d’autorisations de construire – non vérifiables par des tiers –, faits qui ne lui étaient pas connus au moment de la délivrance des autorisations de construire litigieuses, justifiait également d’entrer en matière sur sa demande de reconsidération.

d. Le département a dupliqué le 10 mars 2023, persistant intégralement dans ses conclusions.

Les développements de la recourante relatifs à l’arrêt ATA/129/2023 étaient dénués de pertinence et exorbitants au présent litige.

Dès lors que les conditions d’une reconsidération n’étaient pas remplies, le propriétaire ayant déjà fait usage des droits conférés par les autorisations litigieuses et aucun autre intérêt public ne s’y opposant, c’était à juste titre qu’il n’était pas entré en matière sur la demande de reconsidération. À plus forte raison, il n’y avait aucun besoin de procéder à une analyse concrète des conditions de réalisation d’une infraction pénale, étant donné que celle-ci n’aurait aucune conséquence matérielle et n’aurait pas pu aboutir à la révocation des décisions litigieuses. Pour ce même motif, il n’y avait pas lieu de suspendre la procédure jusqu’à droit jugé dans la procédure pénale. L’argument selon lequel D______ n’aurait fait que partiellement usage du droit qui lui avait été octroyé par les autorisations de construire en force et ne saurait bénéficier du principe de la sécurité du droit ne saurait être suivi. Dès lors que les deux autorisations étaient entrées en force et étaient valables au sens de l’art. 4 al. 5 LCI, et les travaux ayant été entrepris dans les deux ans, il fallait considérer que le propriétaire avait effectivement fait usage du droit conféré par ces autorisations de manière complète, de sorte que le principe de la sécurité du droit l’emportait.

S’agissant de la prétendue existence de faits nouveaux « anciens », même en considérant qu’il existait un problème au niveau des SBP retenues, le principe de la sécurité du droit l’emportait, de sorte qu’une révocation des autorisations en cause n’était pas possible. De plus, la SI avait agi tardivement, en violation du principe de la bonne foi, dès lors qu’elle était au courant de la problématique des SBP depuis octobre 2021 et avait soulevé ce grief dans la procédure A/3378/2021. De surcroît, l’indication des SBP pouvait être vérifiée par des tiers, puisque les dossiers étaient consultables dès leur dépôt. Admettre le recours impliquerait ainsi que l’on puisse en tout temps utiliser l’instrument de la reconsidération pour contourner les délais de recours.

e. Par jugement du 5 octobre 2023, le TAPI a admis le recours.

Il appartenait à la procédure pénale de déterminer si une infraction de faux dans les titres avait été commise par l’architecte et avait ainsi influencé l’octroi des autorisations de construire litigieuses. Le principe de la présomption d’innocence, valant jusqu’à la fin de la procédure, ne permettait pas de retenir un motif de révision au sens de l’art. 80 let. a LPA.

Il était admis que les rapports de surface indiqués ne correspondaient pas à la réalité, puisque les SBP s’élevaient à 1'203.70 m2 (26.15 %) au lieu des 920 m2 annoncés. Compte tenu de la surface de la parcelle (4'602 m2), la SBP construite dépassait de 278.70 m2 celle autorisée et excédait de 6.15 % la limite de 20 % applicable dans le périmètre de protection générale des rives du lac, ce qui n’était pas négligeable. Il s’agissait manifestement d’un fait nouveau « ancien », puisque la problématique des SBP n’avait été connue qu’à la suite de l’ouverture de la procédure d’infraction I/2______, au stade du dépôt de la requête d’autorisation de construire DD 1______/3. Conformément au principe de la bonne foi, les tiers devaient pouvoir se fier à l’exactitude des données fournies par les requérants d’autorisations de construire et leurs mandataires. Cet élément était de nature à modifier l’état de fait à la base des décisions dont la reconsidération était requise, puisque l’OAC ne les aurait pas délivrées en ayant connaissance de l’importance du dépassement de la SBP admissible.

Il y avait dès lors lieu d’admettre l’existence d’un motif de révision au sens de
l’art. 80 let. b LPA, qui aurait dû conduire le département à entrer en matière.

Le fait que les décisions en cause ne seraient pas « révocables » selon le département n’était pas pertinent par rapport à son obligation d’entrer en matière sur une demande de reconsidération obligatoire. Ce n’était en effet que dans une seconde étape que le département aurait dû examiner, après une pesée des intérêts, si le motif retenu devait conduire à une modification, voire à la révocation de la décision en cause. La doctrine retenait de manière large la possibilité a priori de révoquer une décision entrée en force. Il ne fallait pas confondre la possibilité matérielle d’obtenir, par la révocation, un retour complet ou partiel à l’état antérieur et l’opportunité de prononcer cette révocation sous l’angle de la sécurité du droit et du principe de la proportionnalité. Dans cette mesure, l’autorisation de construire pouvait certes avoir été entièrement exécutée et avoir ainsi déployé tous ses effets, mais pour autant, contrairement à d’autres types de décisions, ses effets matériels pouvaient concrètement être annulés par un ordre de remise en état, dépendant des circonstances de l’espèce.

La SI n’avait pas agi tardivement, puisque la demande de reconsidération n’était soumise à aucun délai et qu’elle avait été déposée à la suite de l’annulation de l’autorisation DD 1______/3. Elle avait donc attendu l’issue de la procédure avant d’agir, ce qui ne constituait pas une violation du principe de la bonne foi.

Il était en revanche incompréhensible que l’OAC n’ait pas ouvert de procédure d’infraction sur la problématique des SBP lors du dépôt de la requête
DD 1______/3, les indications erronées ayant été relevées par l’inspecteur du département en septembre 2020 déjà et évoquant une possible révocation de cette dernière.

G. a. Par acte du 10 novembre 2023, le département a formé recours contre ce jugement auprès de la chambre administrative et a conclu à son annulation.

Le TAPI avait erré en retenant que la problématique des SBP devait être qualifiée de faits nouveaux « anciens ». En effet, il ne ressortait pas du dossier ou de l’état de fait que la SI avait consulté le dossier au moment de la délivrance des autorisations litigieuses durant le délai de recours. Elle n’avait ainsi pas fait preuve de la diligence nécessaire. Retenir le contraire reviendrait à retenir que les autorités devaient systématiquement entrer en matière sur toutes les demandes de reconsidération ou révision. La question pouvait cependant rester indécise.

La « révocabilité » des décisions était pertinente. La chambre administrative avait en effet retenu dans un arrêt (ATA/1298/2020 du 15 décembre 2020) portant sur une demande de reconsidération basée sur un acte notarié vicié, à la suite duquel la vente d’appartements selon la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20) avait été autorisée, que la question de savoir s’il existait un motif de reconsidération obligatoire pouvait demeurer indécise, au vu du fait que les conditions d’une révocation au fond de la décision n’étaient pas remplies. L’intérêt à la correcte application du droit devait céder le pas à celui de la sécurité du droit et à la protection de la confiance. La chambre administrative avait ainsi validé la décision de non entrée en matière litigieuse et ce, même dans l’hypothèse où des motifs prévus à l’art. 48 al. 1 LPA s’avéreraient réalisés, puisque les autorités administratives et juridictionnelles avaient été induites en erreur par l’acte notarié vicié.

Cette jurisprudence était transposable au cas d’espèce. Il ressortait du dossier qu’au moment où le problème des SBP avait été constaté, les murs du pool-house prévus par l’autorisation DD 1______/1 avaient déjà été coulés et donc les droits octroyés par cette autorisation, utilisés. Celle-ci n’était dès lors plus révocable au vu du principe de la sécurité du droit qui devait primer face aux autres intérêts publics en présence.

Les effets matériels ne pouvaient pas être concrètement annulés au moyen d’un ordre de remise en état. En effet, il ne serait pas valable au vu du fait que les autorisations avaient été valablement accordés. Même si le MPQ avait trompé les recourants et le département, cela ne permettait pas de révoquer les autorisations au vu de la jurisprudence précitée.

Le TAPI avait dès lors excédé son pouvoir d’appréciation.

b. La SI a conclu au rejet du recours.

Concernant l’existence de faits nouveaux « anciens », le département, pour nier leur existence, s’était fondé sur une jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêt 9C_674/2022 du 12 avril 2023) pour en tirer la conclusion qu’un recourant ayant effectué des démarches pour contester une décision postérieurement à son entrée en force n’était pas considéré comme ayant fait preuve de la diligence nécessaire. Or, cet arrêt avait pour objet une demande de révision fondée sur l’art. 51 de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14) et non pas sur l’art. 80 let. b LPA. La demande de révision dans ce cas d’espèce avait de plus été formée par le destinataire de la décision.

L’art. 80 let. b LPA n’exigeait pas que celui qui demandait la révision apporte la preuve qu’il ait consulté le dossier correctement. Il s’agissait uniquement de déterminer si ce dernier pouvait connaître les motifs invoqués pour fonder sa demande. Le contraire relèverait d’un formalisme excessif. Or, au moment de la délivrance des autorisations litigieuses, elle n’avait pas la possibilité de déceler la problématique des SBP. En outre, le département, qui avait instruit la demande d’autorisation avec toute la diligence requise, n’avait lui-même pas relevé que les SBP indiquées étaient inexactes. On ne pouvait dès lors lui reprocher d’avoir manqué de diligence alors que l’autorité chargée de ces vérifications s’était fiée aux indications erronées.

L’arrêt de la chambre administrative ATA/1298/2020 du 15 décembre 2020 n’était pas transposable au cas d’espèce. En effet, la chambre administrative avait retenu que, bien qu’en présence d’un intérêt public important à garantir l’application de la LDTR, la sécurité du droit primait, en raison de l’usage de plus de dix ans du droit octroyé et des répercussions de la demande de reconsidération sur trois anciens propriétaires des appartements en cause après une si longue période. La demande de reconsidération avait été déposée en l’occurrence moins de trois ans après la délivrance des autorisations litigieuses. Les travaux autorisés étaient loin d’être achevés et faisaient l’objet d’une demande complémentaire non entrée en force (DD 1______/3). Ceux déjà effectués n’étaient de plus pas confirmes aux plans. En outre, les effets matériels des autorisations de construire pouvaient être concrètement annulés par un ordre de remise en état.

c. Le 16 janvier 2024, le département s’en est rapporté à justice quant à l’appel en cause de D______.

d. La SI a quant à elle estimé qu’il était prématuré d’appeler en cause D______.

e. Les parties ont ainsi été informées le 19 janvier 2024 que la chambre administrative renonçait à son appel en cause.

f. Sur ce, la cause a été gardée à juger le 30 janvier 2024.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours, les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. En d'autres termes, l'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; ATA/123/2019 du 5 février 2019 consid. 5).

2.1 En l'espèce, la procédure a pour seul objet la conformité au droit de la décision du département de refus d’entrée en matière sur la demande de reconsidération.

3.             Le recourant reproche au TAPI d’avoir à tort retenu qu’il existait des faits nouveaux « anciens ».

3.1 L'autorité administrative qui a pris une décision entrée en force n'est obligée de la reconsidérer que si les conditions de l'art. 48 al. 1 LPA sont réalisées.

3.2 Une telle obligation existe lorsque la décision dont la reconsidération est demandée a été prise sous l'influence d'un crime ou d'un délit (art. 80 let. a LPA) ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (art. 80 let. b LPA ; faits nouveaux « anciens » ; ATA/539/2020 du 29 mai 2020 consid. 5b).

Une telle obligation existe également lorsque la situation du destinataire de la décision s'est notablement modifiée depuis la première décision (art. 48 al. 1 let. b LPA). Il faut entendre par là des faits nouveaux « nouveaux », c'est-à-dire survenus après la prise de la décision litigieuse, qui modifient de manière importante l'état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l'autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause (ATA/1620/2019 du 5 novembre 2019 consid. 3a ; ATA/159/2018 du 20 février 2018 consid. 3a). Pour qu'une telle condition soit réalisée, il faut que survienne une modification importante de l'état de fait ou des bases juridiques, ayant pour conséquence, malgré l'autorité de la chose jugée rattachée à la décision en force, que cette dernière doit être remise en question (ATA/539/2020 précité consid. 4b ; ATA/1244/2019 du 13 août 2019 consid. 5 ; ATA/830/2016 du 4 octobre 2016 consid. 2a).

Un changement de législation peut fonder le réexamen d'une décision, à condition que l'état de fait déterminant se soit essentiellement modifié après le changement législatif (ATF 136 II 177 consid. 2.2.1).

L'existence d'une modification notable des circonstances au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA doit être suffisamment motivée, en ce sens que l'intéressé ne peut pas se contenter d'alléguer l'existence d'un changement notable de circonstances, mais doit expliquer en quoi les faits dont il se prévaut représenteraient un changement notable des circonstances depuis la décision entrée en force ; à défaut, l'autorité de première instance n'entre pas en matière et déclare la demande irrecevable (ATA/573/2013 du 28 août 2013 consid. 4). La charge de la preuve relative à l'existence d'une situation de réexamen obligatoire d'une décision en force incombe à celui qui en fait la demande, ce qui implique qu'il produise d'emblée devant l'autorité qu'il saisit les moyens de preuve destinés à établir les faits qu'il allègue (ATA/291/2017 du 14 mars 2017 consid. 4).

3.3 Une demande de reconsidération ne doit pas permettre de remettre continuellement en cause des décisions entrées en force et d'éluder les dispositions légales sur les délais de recours (ATF 136 II 177 consid. 2.1 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, n. 1417). C'est pourquoi, en principe, l'administré n'a aucun droit à ce que l'autorité entre en matière sur sa demande de reconsidération, sauf si une telle obligation de l'autorité est prévue par la loi ou si les conditions particulières posées par la jurisprudence sont réalisées (ATF 120 Ib 42 consid. 2b). La procédure de reconsidération ne constitue pas un moyen de réparer une erreur de droit ou une omission dans une précédente procédure (ATF 111 Ib 211).

3.4 Saisie d'une demande de réexamen, l'autorité doit procéder en deux étapes : elle examine d'abord la pertinence du fait nouveau invoqué, sans ouvrir d'instruction sur le fond du litige, et décide ou non d'entrer en matière. Un recours contre cette décision est ouvert, le contentieux étant limité uniquement à la question de savoir si le fait nouveau allégué doit contraindre l'autorité à réexaminer la situation (ATF 117 V 8 consid. 2a ; 109 Ib 246 consid. 4a ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_172/2013 du 21 juin 2013 consid. 1.4 ; 2C_504/2013 du 5 juin 2013 consid. 3). Ainsi, dans la mesure où la décision attaquée ne porte que sur la question de la recevabilité de la demande de réexamen, le recourant ne peut que contester le refus d'entrer en matière que l'autorité intimée lui a opposé, mais non invoquer le fond, des conclusions prises à cet égard n'étant pas recevables (ATF 126 II 377 consid. 8d ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_115/2016 du 31 mars 2016 consid. 5 ; 2C_172/2013 du 21 juin 2013 consid. 1.4 ; 2C_504/2013 du 5 juin 2013 consid. 3). Si la juridiction de recours retient la survenance d'une modification des circonstances, elle doit renvoyer le dossier à l'autorité intimée, afin que celle-ci le reconsidère (Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, n. 2148), ce qui n'impliquera pas nécessairement que la décision d'origine sera modifiée (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif 2édition, 2018, n. 1429 p. 493).

3.5 Le fait d’entrer en matière sur une demande de reconsidération n’implique pas nécessairement que la décision d’origine sera modifiée (Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1429).

3.6 Il n’existe pas de délai pour déposer une demande de reconsidération (Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, ad. art. 48, n. 599). En particulier, une telle requête n’est pas soumise aux délais applicables aux demandes de révision au sens strict (Thierry TANQUEREL, op. sit. n° 1416).

3.7  Aux termes de l'art. 2 LCI, les demandes d'autorisation sont adressées au département (al. 1). Le règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI – L 5 05.01) détermine les pièces qui doivent être déposées par le demandeur et les indications que celui-ci doit fournir concernant les objets destinés à occuper le sous-sol de façon permanente (al. 2). Les plans et autres documents joints à toute demande d'autorisation publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève doivent être établis et signés par une personne inscrite au tableau des MPQ dans la catégorie correspondant à la nature de l'ouvrage, au sens de la loi sur l'exercice des professions d'architecte et d'ingénieur du 17 décembre 1982 (LPAI - L 5 40 ; al. 3).

Les pièces devant être jointes à une demande définitive sont énumérées à l'art. 9
al. 2 RCI. Il y a notamment lieu de joindre le calcul détaillé des rapports de surface et schémas explicatifs, pour les constructions et installations en zone 5 (let. cc).

Les exigences formelles imposées par l’art. 9 al. 2 RCI ne sont pas seulement destinées à permettre au département d’instruire les demandes et de contrôler leur conformité à la loi, ou encore de faciliter le travail du juge. Elles permettent aussi de garantir l’exercice du droit de chacun de consulter - et de comprendre - les projets de construction qui sont déposés, et celui des personnes disposant d’un intérêt digne de protection de recourir, cas échéant, en connaissance de cause (art. 3 al. 2 et 145 LCI, 18 RCI et 60 LPA ; ATA/1829/2019 du 17 décembre 2019).

La précision des plans a également pour fonction de déterminer avec exactitude les détails de l'ouvrage et d'en fixer les contours une fois pour toutes, rendant un contrôle possible au stade de l'exécution. Cette exigence protège, de ce point de vue, tant le bénéficiaire de l'autorisation qui, une fois celle-ci entrée en force, peut se prévaloir d'un droit clairement défini, que les éventuels opposants ou l'autorité compétente, qui peuvent s'assurer que les travaux, une fois exécutés, sont conformes à l'autorisation délivrée (ATA/1829/2019 précité).

3.8 Dans le but de protéger les rives du lac et les zones sensibles voisines, la loi sur la protection générale des rives du lac du 4 décembre 1992 (LPRLac - L 4 10) instaure un certain nombre de restrictions aux constructions qui peuvent être érigées dans le périmètre à protéger.

Ainsi, notamment, à l’intérieur du territoire à protéger, la surface des constructions exprimée en m2 de plancher ne doit pas excéder 20 % de la surface des terrains situés en 5ème zone (art. 3 al. 1 LPRLac).

3.9 La notion de surface de constructions exprimée en m2 de plancher visée à
l’art. 3 al. 1 LPRLac correspond à celle de l’art. 59 al. 2 LCI, lequel prévoit que, par surface de plancher prise en considération dans le calcul du rapport des surfaces, il faut entendre la SBP de la totalité de la construction hors-sol.

4.             En l’espèce, les autorisations de construire DD 1______/1 et DD 1______/2 ont été octroyées sur la base des informations fournies par le MPQ de l’époque, à savoir que les SBP totales étaient de 920 m2. Cette surface constituait le maximum de SBP qui pouvait être érigée sur la parcelle.

Lors de la demande d’autorisation de construire DD 1______/3, à la suite d’une dénonciation de la SI, d’une visite sur place d’un inspecteur du département et de l’ouverture d’une procédure d’infraction, le calcul des SBP a été réévalué et le nouveau MPQ a indiqué qu’il était en réalité de 1'203,7 m2, soit supérieur de près de 300 m2 à ce qui avait été déclaré dans le cadre des premières autorisations. Compte tenu de la surface de la parcelle (4'602 m2), la SBP construite excédait également de 6.15 % la limite de 20 % applicable dans le périmètre de protection générale des rives du lac.

Une procédure pénale a été introduite contre l’ancien MPQ et inconnu pour faux dans les titres, au motif que les deux premières autorisations auraient été délivrées sur la base de plans viciés s’agissant des valeurs des SBP. Cette procédure pénale est en cours. Or, jusqu’à son terme, l’accusé bénéfice de la présomption d’innocence (Yves DONZALLAZ, Loi sur le Tribunal fédéral, Commentaire, 2008, n. 4694 ad art. 123 LTF), de sorte qu’à ce stade, l’existence d’un motif de révision au sens de l’art. 80 let. a LPA ne peut pas encore être établie.

Le TAPI a cependant retenu, à juste titre, que la modification des SBP constituait un nouveau fait « ancien ».

En effet, il ne peut valablement être reproché à l’intimée, propriétaire d’une parcelle voisine, de ne pas avoir consulté les dossiers ayant donné lieu à la délivrance des autorisations DD 1______/1 et DD 1______/2 durant le délai de recours et ainsi avoir manqué à son devoir de diligence. L’absence de consultation ne ressort au demeurant pas de la procédure. Dans tous les cas, à l’occasion d’une telle consultation, elle n’aurait pu, en particulier sur la base des plans produits, que constater que les SBP annoncées étaient conformes à ce qui pouvait être construit sur la parcelle. Elle n’aurait donc pas eu de raison d’user de son droit de recourir. Ce n’est qu’en juillet 2020 qu’elle a eu un doute sur la conformité des travaux aux deux autorisations de construire délivrées, ce qu’elle a dénoncé au département qui a ouvert une procédure d’infraction (I/2______) après un constat sur place. C’est dans le cadre de cette procédure sur dénonciation qu’elle a su que les SBP étaient en réalité très supérieures à ce qui avait été annoncé dans les deux demandes d’autorisations de construire litigieuses, à la suite des révélations du nouveau MPQ le 13 janvier 2021, au moment du dépôt d’une (troisième) demande d'autorisation de construire complémentaire portant sur la régularisation de l’infraction I/2______. La SI a d’ailleurs formé un recours le 1er octobre 2021 contre la plus récente autorisation de construire (DD 1______/3), dont la procédure est toujours pendante, et, en parallèle, a demandé la reconsidération des décisions antérieures, objet du présent recours.

Le dépassement du seuil admissible des SBP, que le département ne remet pas en cause, est à l’évidence de nature à modifier l’état de fait de base à l’origine des deux autorisations de construire querellées qui a priori n’auraient pas dû être délivrées telles quelles.

Le fait que la SI et le département aient appris après coup que la surface des SBP après les travaux projetés telle qu’apparaissant sur les plans n’était pas la SBP réelle constitue bien un fait nouveau « ancien », soit un motif obligatoire d’entrée en matière sur une demande de reconsidération. Le raisonnement du TAPI doit donc être confirmé.

Le recours doit dès lors être rejeté sur ce point.

5.             Se fondant sur l’arrêt de la chambre administrative ATA/1298/2020 du 15 décembre 2020, le recourant fait valoir que, même si une des conditions de
l’art. 48 al. 1 LPA devait être réalisée, les décisions en cause ne seraient pas « révocables ».

5.1 Lorsque les conditions dans lesquelles une décision entrée en force peut être modifiée ne sont pas fixées par la loi, alors la jurisprudence admet qu'en règle générale des décisions entrées en force, mais matériellement irrégulières, peuvent, dans certaines conditions, être révoquées (ATF 143 II 1 consid. 4.1 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 940, 944 ss et 966 ss).

5.2 Au moment de rendre sa décision, l'autorité détermine la situation de fait et lui applique les dispositions légales en vigueur. Lorsque, par la suite, cette décision, qui est entrée en force, se révèle affectée d'une irrégularité initiale ou subséquente à son prononcé, que cette irrégularité soit de fait ou de droit, l'autorité a la possibilité de révoquer sa décision, dans la mesure où l'intérêt à une correcte application du droit objectif l'emporte sur l'intérêt de la sécurité du droit, respectivement à la protection de la confiance. Dans le cas contraire, il n'est en principe pas possible de révoquer la décision en cause. Cela est par exemple le cas lorsque la décision administrative fonde un droit subjectif, que la procédure qui a mené à son prononcé a déjà mis en balance les intérêts précités ou que le justiciable a déjà fait usage du droit que lui a conféré la décision. Cette règle n'est toutefois pas absolue et une révocation est également possible dans ces cas, lorsqu'un intérêt public particulièrement important l'impose (ATF 143 II 1 consid. 5.1 et les références citées). Cet arrêt rappelle les principes généraux relatifs à la révocation des actes administratifs.

5.3 En l’espèce, le chantier a été arrêté peu après avoir commencé. Seuls les murs du pool-house ont été coulés. L’autorisation de construire n’a ainsi pas déployé tous ses effets et, dans tous les cas, ses effets matériels pourraient être annulés par un ordre de remise en état. L’on ne saurait dès lors privilégier que le pripriétaire de la parcelle en cause poursuive ses constructions, sur la base d’informations erronées fournies par son MPQ, au détriment du respect des art. 2 LCI, 9 RCI et 3 al. 1 LPRLac.

Dès lors, aucun motif ne s’oppose à ce que la situation fasse l’objet d’une reconsidération. Le département avait l’obligation d’entrer en matière sur celle-ci.

Il lui appartiendra, dans un second temps, d’effectuer une pesée des intérêts présents et d’examiner si le motif de révocation doit effectivement conduire à une reconsidération des autorisations de construire et le cas échéant à un ordre de remise en état.

Pour les raisons qui précèdent, le recours sera rejeté.

6.             Malgré cette issue, aucun émolument ne sera mis à la charge du département 
(art. 87 al. 1, 2e phr., LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à la A______ (art. 87 al. 2 LPA), à la du départemeent.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 novembre 2023 par le département du territoire-OAC contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 octobre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue à la A______ une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à charge du département du territoire-OAC;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt au département du territoire-OAC, à Me Jean-Marc SIEGRIST, avocat de A______, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Valérie LAUBER, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :