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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2584/2022

ATA/1057/2023 du 26.09.2023 sur JTAPI/286/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2584/2022-PE ATA/1057/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 26 septembre 2023

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Patricia MICHELLOD, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


 

Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 14 mars 2023 (JTAPI/286/2023)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1982, son épouse B______, née le ______ 1990, et leurs deux enfants C______ et D______, nés respectivement le ______ 2015 à E______ (F______) et le ______ 2017 à Genève, sont ressortissants du F______.

b. Le 5 octobre 2004, A______ a déposé une demande d’asile en Haute‑Savoie, en H______, indiquant être de nationalité I______.

c. Le 25 décembre 2005, il a été interpellé par la gendarmerie genevoise.

Lors de son audition, il a déclaré avoir été refoulé le 6 avril 2005 au poste frontière de J______ au motif qu’il n’avait pas de pièce d’identité, être venu à Genève la veille pour voir comment s’y passait la fête de Noël et avoir vu sa demande d’asile en H______ être refusée.

Confronté au fait qu’il était porteur d’une carte des Transports Publics Genevois (ci-après : TPG) et d’abonnements mensuels (de septembre à décembre 2005), A______ est revenu sur ses déclarations et a indiqué avoir travaillé sans permis dans le canton de Genève depuis l’été jusqu’à fin novembre 2005 et être à la recherche d’un emploi. Toute sa famille vivait au F______, soit sa mère ainsi que ses deux frères et six sœurs. Après sa scolarité obligatoire, il avait effectué un apprentissage d’électricien, mais avait échoué à l’examen.

d. Le 3 mars 2006, il a fait l’objet d’une interdiction d’entrée en Suisse (ci-après : IES), valable jusqu’au 2 mars 2009.

e. Le 18 novembre 2009, il a été interpellé par la police genevoise après que les services de douane suisses eurent intercepté un envoi postal contenant un faux passeport K______ à son nom.

Lors de son audition, il a notamment déclaré se reconnaître sur la photographie figurant dans le passeport falsifié et constater que les données personnelles de ce dernier lui correspondaient. Il ne comprenait pas pourquoi ce passeport était adressé à son domicile. Il n’avait jamais commandé de fausse pièce d’identité. Il s’agissait d’un passeport K______, qui ne lui aurait été d’aucune utilité. Il ne connaissait pas l’expéditeur de cet envoi, certainement quelqu’un voulant lui créer des problèmes.

Le 17 mars 2010, le Ministère public genevois a informé l’office cantonal de la population (devenu depuis lors l’office cantonal de la population et des migrations ; ci-après : OCPM) qu’il avait classé la procédure pénale ouverte suite à l’arrestation de A______ du 18 novembre 2009.

f. Le 3 juin 2010, A______ a fait l’objet d’une seconde IES, valable jusqu’au 2 juin 2013.

g. Le 14 mars 2018, il a formé une demande de régularisation de ses conditions de séjour auprès de l’OCPM, tant sous l’angle du cas de rigueur que sous celui de l’opération « Papyrus ».

Il était venu en Suisse en 2005 et exerçait une activité lucrative honnête depuis plus de dix ans à Genève, où il vivait de manière ininterrompue. Il avait toujours été indépendant financièrement, s’exprimait parfaitement en français et s’était pleinement adapté aux divers milieux socio-culturels genevois. Respectueux des principes de la démocratie et des valeurs fondamentales de la Suisse, son comportement avait été irréprochable et son casier judiciaire toujours vierge. Il avait construit toute sa vie à Genève, son fils y était né et il y avait transféré le centre de ses intérêts. Plus rien ne le liait à son pays d’origine.

Il produisait diverses pièces, dont un document indiquant que la demande de régularisation concernait également son épouse et leurs enfants, son certificat de mariage – celui-ci avait eu lieu le 9 novembre 2010 à L______, au F______ –, un extrait de son compte individuel AVS – il en résultait qu’il avait cotisé de janvier 2008 à décembre 2009 –, une attestation du 16 février 2018 relative à son niveau de français (A2), deux contrats pour une carte Sunrise Prepaid SIM – selon lesquels son identité avait été contrôlée les 16 janvier 2016 et 27 avril 2017 – ainsi qu’un courrier des TPG du 9 février 2018 indiquant que selon leur base de données informatique, une carte de base avait été établie le 4 janvier 2005 à son nom, mais qu’aucun abonnement n’avait été délivré par ses services.

h. En avril 2018, il a remis à l’OCPM un formulaire M dont il résulte qu’il avait été engagé par une entreprise genevoise, du 1er mars au 31 mai 2018, en tant que peintre, moyennant un salaire mensuel brut de CHF 5’696.-.

i. En août 2018, il a remis à l’OCPM un formulaire M selon lequel il avait été engagé par un restaurant genevois du 3 août au 30 septembre 2018 en tant que plongeur, moyennant un salaire horaire brut de CHF 21,31. Cet emploi avait été prolongé, aux mêmes conditions, jusqu’au 7 octobre 2018.

j. Le 10 novembre 2018, il a transmis à l’OCPM son nouveau contrat de bail à loyer.

k. Le 17 décembre 2018, il a requis la délivrance d’un visa de retour, pour une durée d’un mois, afin de se rendre au F______ pour des raisons familiales.

l. En janvier 2019, il a remis à l’OCPM un formulaire M dont il résultait qu’il avait été engagé par une entreprise genevoise du 21 janvier au 31 juillet 2019 en tant que manœuvre, moyennant un salaire mensuel brut de CHF 2’411,55 pour un emploi à mi-temps.

Le 21 juin 2019, l’entreprise a informé l’OCPM avoir engagé A______ à plein temps pour une durée indéterminée, moyennant un salaire mensuel brut de CHF 4’401,55.

m. Le 28 juin 2019, A______ a transmis divers documents à l’OCPM, dont une attestation de l’Hospice général (ci-après : l’hospice) du 18 juin 2019 certifiant qu’il n’était pas aidé financièrement, un extrait de l’office des poursuites du 18 juin 2019 attestant qu’il ne faisait l’objet d’aucune poursuite ni acte de défaut de biens et un document daté du 21 juin 2019 et signé de sa main par lequel il attestait n’avoir pas déposé et/ou ne pas posséder de demande d’autorisation de séjour dans un pays de l’UE/AELE.

n. Le 29 juillet 2019, il a demandé la délivrance d’un visa de retour, pour une durée de deux mois, afin de se rendre au F______ pour des raisons familiales.

o. Le 30 juillet 2019, il a indiqué à l’OCPM que son épouse et sa fille C______ étaient arrivées à Genève le 22 avril 2017, que sa fille commencerait l’école le 26 août 2019 et que les autorités françaises l’avaient informé n’avoir « rien sur [lui] et que [son] dossier [était] fermé depuis longtemps ».

p. Le 14 août 2019, l’OCPM lui a demandé de produire des justificatifs de résidence pour les années 2010 à 2017.

q. Le 16 septembre 2019, l’OCPM l’a informé de son intention de refuser d’accéder à sa demande de régularisation.

r. Le 24 septembre 2019, répondant à sa demande du 19 septembre 2019, l’OCPM lui a indiqué que les preuves d’achats de carte SIM n’étaient pas signées, ne figuraient pas dans la « liste Papyrus » et ne concernaient que les années 2016 et 2017.

s. Le 4 octobre 2019, A______ a réitéré qu’il était domicilié en Suisse de manière ininterrompue depuis environ quinze ans. Il transmettait quinze attestations certifiant qu’il avait travaillé comme manœuvre pour M______ Sàrl, moyennant un salaire brut de CHF 5’100.-, pour une période allant de janvier 2010 à décembre 2014.

t. Le 2 juin 2020, à la lecture de ces attestations, l’OCPM l’a dénoncé auprès du Ministère public.

u. Le 26 décembre 2020, A______ a demandé la délivrance d’un visa de retour, pour une durée de 30 jours, afin de se rendre au F______ pour pouvoir rendre visite à sa famille.

v. Le 31 janvier 2021, il a été interpellé par la police genevoise et prévenu notamment d’avoir voulu tromper l’OCPM en fournissant de faux documents.

Lors de son audition, qui s’est déroulée à l’aide d’un interprète en albanais, il a déclaré ne pas avoir donné de faux documents dans le cadre de sa demande « Papyrus ». Après avoir soutenu être venu en Suisse en 2004 et y être demeuré sans interruption, il a indiqué être venu en Suisse pour la première fois en 2004, puis avoir habité en H______, où il avait déposé une demande d’asile, être revenu à Genève à fin 2005 suite au rejet de sa demande d’asile et y être resté jusqu’en 2009 environ. Il était ensuite retourné au F______ et y avait refait sa vie, avant de revenir en Suisse en 2016 ou en 2017. Entre 2010 et son retour en Suisse, il avait travaillé « à gauche et à droite » au F______ et avait vécu avec sa famille. Il était revenu en Suisse peu de temps après la naissance de sa fille, pour subvenir aux besoins familiaux. Il voulait trouver un travail et avoir une meilleure vie.

Ayant entendu parler de l’opération « Papyrus », il avait recueilli des justificatifs et était allé voir N______, dont il avait entendu dire qu’il était avocat, afin qu’il vérifie son dossier. Il ne savait en effet ni lire ni écrire le français. N______ lui avait remis son dossier qu’il avait posté sans même le consulter.

Confronté à la demande de régularisation du 14 mars 2018, il a affirmé ne l’avoir jamais vue auparavant, ni a fortiori rédigée. Ce n’était d’ailleurs pas sa signature qui y figurait. N______, qui avait dû la rédiger, ne lui avait pas dit avoir ajouté des documents à son dossier. Il ne voulait pas détruire sa vie pour des faux documents. Il n’avait pas non plus vu la lettre du 4 octobre 2019 et les attestations de travail pour les années 2010 à 2014. En revanche, le formulaire attestant qu’il n’avait pas déposé de demande d’autorisation de séjour dans un pays de l’UE/AELE avait été rempli de sa main.

Ni son épouse ni lui-même n’avaient souscrit une assurance-maladie obligatoire, faute de moyens ; par contre, leurs enfants étaient assurés. Ses deux parents et deux de ses sœurs habitaient au F______ ; une autre de ses sœurs habitait en O______ et la dernière en P______. Il n’avait pas de membre de sa famille en Suisse, hormis son épouse et ses enfants.

A______ s’est également déterminé sur le contenu de son téléphone portable (pornographie).

w. Par jugement du 8 février 2022, le Tribunal de police a déclaré A______ coupable de pornographie s’agissant des faits visés sous ch. 1.1.2 et 1.1.3 de l’acte d’accusation, d’entrée illégale (période du 1er janvier au 1er décembre 2017) ainsi que de séjour illégal et d’exercice d’une activité lucrative sans autorisation (période du 1er décembre 2017 au 31 mai 2018). Il l’a en revanche acquitté de pornographie s’agissant des faits visés sous ch. 1.1.1 de l’acte d’accusation, de séjour illégal et d’exercice d’une activité lucrative sans autorisation (période du 1er juin 2018 au 30 janvier 2021), de faux dans les titres et de tentative d’infraction à la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). Il l’a condamné à une peine pécuniaire de 120 jours-amende, avec un sursis de trois ans.

x. Le 13 mai 2022, A______ s’est déterminé sur le courrier du 22 avril 2022 par lequel l’OCPM l’informait de son intention de refuser d’accéder à sa demande de régularisation.

y. Par décision du 15 juillet 2022, l’OCPM a refusé de soumettre son dossier avec un préavis favorable au secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM), a prononcé son renvoi de Suisse et lui a imparti un délai au 15 octobre 2022 pour quitter le pays et l’ensemble de l’espace Schengen.

À teneur des pièces produites, il n’avait pas été en mesure de justifier un séjour antérieur au 1er septembre 2017, jour de la naissance de son fils à Genève. En effet, vu ses déclarations à la police du 30 janvier 2021, il ne comptabilisait pas plus d’une année de séjour en Suisse au moment du dépôt de sa demande et moins de cinq ans depuis lors. Sa situation ne répondait donc pas aux critères de l’opération « Papyrus » ni aux critères relatifs à un cas individuel d’extrême gravité, notamment un séjour prouvé et continu de dix ans minimum à Genève pour une personne sans enfants scolarisés. De plus, le temps écoulé entre le dépôt de la demande de régularisation et la décision devait être relativisé, étant le résultat de la dénonciation pénale pour suspicion de faux document ayant mené à l’enquête de police. Il n’avait pas démontré une intégration socio-culturelle remarquable, ayant fait l’objet de deux IES et d’une condamnation pénale, ni qu’une réintégration au F______ aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle. Il y avait vécu toute son enfance et son adolescence, y avait refait sa vie, tout du moins entre 2010 et 2017, et ses parents ainsi que deux de ses sœurs y résidaient toujours.

Sa fille, âgée de 7 ans, était arrivée en Suisse en 2017 et son fils, âgé de 4 ans, était né à Genève. Bien que scolarisée, sa fille n’était pas encore adolescente et son fils n’avait pas encore entamé de cursus scolaire, de sorte que leur intégration en Suisse n’était pas encore déterminante. Leur réintégration au F______ ne devrait pas leur poser des problèmes insurmontables. S’agissant de l’état de santé de sa fille, elle présentait de nombreuses caries et un retard global du développement nécessitant un soutien scolaire en classe et un suivi en psychomotricité, lequel consistait en une séance hebdomadaire de 45 minutes. Son état de santé ne requérait pas de séjour à l’hôpital, d’utilisation d’appareils médicaux sophistiqués ni d’intervention chirurgicale. Il n’avait pas été démontré qu’elle ne pouvait être soignée qu’en Suisse.

B. a. Par acte du 15 août 2022, A______ a recouru contre cette décision devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

Il était arrivé en Suisse depuis le F______ à tout le moins le 4 janvier 2005, date à laquelle avait été établie sa carte auprès des TPG. Il s’était également rendu auprès des Hôpitaux Universitaires de Genève (ci-après : HUG) le 8 novembre 2006. En 2008 et 2009, il avait été engagé en tant que plongeur par un restaurant genevois, où il avait encore œuvré du 1er août au 30 septembre 2018, avant de travailler, dès le 21 janvier 2019, comme manœuvre à l’entière satisfaction de son employeur. En un peu plus de trois ans et demi, son évolution salariale y avait été non négligeable du fait de sa remarquable progression professionnelle. En outre, bien qu’il ne sache ni lire ni écrire dans sa langue maternelle, il avait acquis un niveau de langue A2 en français. Quant à son épouse, elle travaillait depuis le 1er mai 2021, à temps partiel, en qualité de nettoyeuse.

L’OCPM avait constaté les faits pertinents de manière inexacte et incomplète, ne retenant pas ou insuffisamment les éléments de fait relatifs à l’état de santé de sa fille.

Celle-ci avait commencé l’école en août 2019 et une demande pour une classe spécialisée avait été déposée pour la rentrée scolaire 2021. Elle souffrait d’hypotonie, soit d’une diminution de la force de contraction d’un muscle, bavait et devenait hyperactive lorsqu’elle ne parvenait pas à effectuer une activité. Elle peinait à marcher sur une ligne, à se tenir debout les pieds serrés, à évoluer dans l’espace et avait d’importants problèmes de concentration. Des séances de psychomotricité ambulatoire avaient été mises en place. Depuis janvier 2020, elle était aussi suivie par une pédopsychiatre, laquelle avait mis en évidence un retard global du développement et un trouble spécifique du développement moteur. Son retard cognitif associé à d’autres traits physiques atypiques pouvant être d’origine génétique, une investigation était en cours auprès de Medigenome.

Sa famille avait pu s’intégrer aisément en Suisse et se faire apprécier notamment de ses voisins et amis, dont certains avaient rédigé des lettres de soutien. Elle participait avec enthousiasme aux divers événements organisés par leur commune. Ils s’étaient notamment inscrits auprès de la bibliothèque municipale et aimaient prendre part à des animations, entourés de leurs nombreux amis.

b. Le 17 octobre 2022, l’OCPM a conclu au rejet du recours. Il n’était pas établi que l’enfant C______ ne pourrait intégrer une classe spécialisée et bénéficier de contrôles périodiques en psychomotricité au F______.

c. Le 25 octobre 2022, en réponse à une demande de l’OCPM du 11 octobre 2022 voulant savoir si un enfant de 7 ans souffrant d’un retard de développement et cognitif lui ayant valu d’être placée en classe spécialisée et de bénéficier d’un suivi tant psychologique que psychomoteur pourrait bénéficier de tels soins et suivi au F______, l’Ambassade suisse dans ce pays a répondu qu’une prise en charge des enfants souffrant d’un retard de développement et cognitif existait au F______, mais seulement sous forme d’un forfait mensuel de EUR 100.- versé par l’État. Un suivi psychologique gratuit était possible auprès de l’hôpital public, mais il était difficile d’obtenir un rendez-vous et les traitements y étaient de mauvaise qualité. De meilleurs traitements seraient possibles auprès de plusieurs cliniques privées : les tarifs étaient d’environ EUR 30.- à 40.- par séance (il fallait compter normalement 2-3 traitements par semaine). Au F______, il n’y avait pas d’écoles pour enfants souffrant de retard du développement et de retard cognitif, mais il existait cinq « centres de ressources » distribués dans le pays s’occupant bien d’enfants avec ce genre de diagnostic. La fréquentation de ces centres coûtait EUR 100.- à 110.- par mois.

d. Le 14 décembre 2022, A______ a persisté dans ses conclusions.

Durant l’année scolaire 2021-2022, malgré le soutien spécialisé dont elle avait bénéficié, sa fille n’arrivait pas toujours à respecter les règles de vie de l’école, ne tenant pas en place plus de quelques minutes. Son comportement s’était détérioré en raison de l’augmentation du niveau scolaire et de l’écart avec ses camarades. Elle fournissait souvent un travail ne correspondant pas à la consigne, même lorsqu’elle bénéficiait d’une reformulation individuelle, se rendait compte de ses difficultés et exprimait que le travail demandé était trop dur, demandant autre chose à faire, peinait à entrer dans les tâches, était constamment perturbée par ce qui l’entourait et pouvait dans ces moments déranger ses camarades, abandonnait rapidement lorsqu’elle commençait un travail ou un jeu, partageait spontanément les choses qui lui passaient par la tête sans tenir compte du contexte, posait des questions récurrentes sans prendre en compte les réponses données et avait besoin de fournir beaucoup d’efforts dans l’apprentissage de l’écriture. Cela étant, elle parlait très bien français et le comprenait également.

Ayant besoin d’une structure adaptée à son fonctionnement et à ses capacités, elle poursuivait sa scolarité en enseignement spécialisé depuis la rentrée 2022. Elle était en sus prise en charge à la Consultation de l’office médico‑pédagogique (ci-après : OMP) de Q______ depuis janvier 2020. L’évaluation clinique effectuée avait mis en évidence un niveau de développement global au‑dessous de la norme prévue pour son âge : faciès particulier (épicanthus, hypotonie faciale), hypotonie globale, motricité globale et fine lentes et imprécises, dissociation des mouvements difficiles, jeu fonctionnel et symbolique peu structuré et nécessitant l’étayage de l’adulte, verbalisations possibles en français, mais parfois de contenus peu cohérents, bonne attitude relationnelle, tendance à l’agitation et à l’évitement face à la difficulté et à la frustration. L’évaluation psychométrique avait établi qu’elle présentait un profil homogène très faible, qu’elle présentait un retard mental léger et que son score du quotient intellectuel total était de 56, rang percentile 0,2. Le rapport d’évaluation de psychomotricité établi en juin 2020 concluait à un retard global du développement moteur. Ces difficultés fragilisaient tous les domaines au niveau de la représentation (des limites de son corps, de l’espace de la feuille ou de l’espace environnant) et la mettaient en difficulté dans son quotidien et, plus scolairement, pour l’entrée dans les activités graphomotrices.

Bien qu’elle eût fait des progrès, la psychomotricienne qui la suivait avait indiqué notamment, dans un courrier du 21 septembre 2022, qu’il lui était difficile de maintenir une posture stable sans rencontrer le besoin de bouger assez vite, qu’elle avait de la peine à inhiber les élans qui la traversaient, qu’elle avait besoin de l’étayage de l’adulte dans de nombreuses situations, n’ayant que peu de moyens et de ressources pour affronter ses difficultés, qu’elle avait besoin de manipuler, de jouer avec les objets pour organiser son rapport à l’espace ou au temps, à comprendre des règles ou construire des représentations, et qu’elle salivait toujours beaucoup, surtout dans les moments où l’émotion devenait envahissante ou que l’exercice demandé était difficile pour elle. Dès lors, un soin thérapeutique et un suivi de groupe devaient être maintenus. Selon la responsable de la Consultation OMP de Q______, elle avait, pour pouvoir investir et épanouir ses capacités, besoin d’un contexte stable et soutenant et d’un projet thérapeutique à long terme qui puisse l’accompagner et faciliter le meilleur développement possible et une bonne intégration scolaire et sociale.

Or, le F______ ne disposait d’aucune école pour enfants souffrant de retard de développement et cognitif. Quant aux « centres », il n’était nullement établi qu’ils prodigueraient des soins thérapeutiques adéquats et nécessaires correspondant et convenant aux besoins ainsi qu’à son bon développement, comme cela était le cas en Suisse, ni que des places y seraient vacantes.

Il produisait des pièces complémentaires, soit un courrier du 3 novembre 2022 de la directrice d’établissements spécialisées et de l’intégration, un rapport d’évaluation du 21 septembre 2022 de l’OMP de Q______, des rapports concernant le bilan cognitif du 13 mai 2020 et la psychomotricité du 3 juin 2020, ainsi qu’un courrier du 21 septembre 2022, également de l’OMP de Q______.

e. Le 26 juillet 2022, l’OCPM a indiqué avoir apprécié l’état de santé de l’enfant C______ sous l’angle du cas de rigueur et estimé que cette circonstance n’était pas encore suffisante, à elle seule, pour reconsidérer sa position, laquelle s’appuyait sur une appréciation d’ensemble de tous les éléments présents au dossier et eu égard à chaque membre de la famille du recourant. Aussi, le suivi médical de l’enfant au F______ semblait possible auprès de l’hôpital public et de cliniques privées et cet État disposait, selon l’Ambassade, de centres spécialisés pour les enfants présentant un retard cognitif.

f. Par jugement du 14 mars 2023, le TAPI a rejeté le recours.

L’OCPM n’avait pas mésusé de son pouvoir d’appréciation. Il n’était pas établi que A______ avait séjourné en Suisse depuis 2004 sans interruption. Son intégration professionnelle et celle de son épouse ne pouvaient être qualifiées d’exceptionnelles. Leurs relations avec la Suisse n’apparaissaient pas si étroites qu’il ne pût être exigé de leur part qu’ils retournent vivre au F______. A______ avait fait l’objet d’une condamnation pénale le 8 février 2022 pour des faits qui ne relevaient pas du droit des étrangers (pornographie) ainsi que de deux IES. Le retour au F______ de la famille était possible et la réinsertion professionnelle de A______ et de son épouse n’était pas compromise.

C______ souffrait d’un retard mental léger et d’un retard global du développement moteur. Elle nécessitait un accompagnement et un suivi qui existaient au F______ et rien ne permettait d’affirmer qu’ils n’avaient pas la qualité de ceux dispensés à Genève. Le coût mensuel d’un « centre » correspondait peu ou prou au montant forfaitaire alloué par les autorités F______. Le seul fait d’obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d’origine ne suffisait pas pour justifier une exception aux mesures de limitation du nombre des étrangers. L’intérêt supérieur des enfants était de pouvoir vivre durablement auprès de leurs parents, quel que soit l’endroit où ils séjourneraient. Il ne résultait pas des éléments et pièces au dossier, et plus particulièrement des informations médicales concernant C______, que celle-ci courait le risque que son état de santé se dégrade très rapidement au point de conduire d’une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique. On était en droit d’attendre de A______ et de son épouse qu’ils prennent domicile, à terme, dans une localité proche d’un établissement d’enseignement spécialisé ou d’une autre structure adaptée, dans l’intérêt bien compris de leur fille. En tout état de cause, et sans minimiser les problèmes de santé affectant C______, un déplacement de cette enfant au F______, avec ses parents, ne paraissait pas susceptible d’entraîner de graves conséquences pour sa santé et son développement qui s’opposeraient à son renvoi. Même en admettant qu’elle ne bénéficierait plus d’un suivi comme celui dont elle disposait, l’exécution de son renvoi ne mettrait pas de manière imminente sa vie ou son intégrité psychique concrètement en danger, de sorte que ce seul élément ne saurait, en soi, justifier l’octroi d’un titre de séjour pour cas de rigueur.

C. a. Par acte remis à la poste le17 avril 2023, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à ce qu’il soit ordonné à l’OCPM de lui délivrer une autorisation de séjour. Subsidiairement, le dossier devait être renvoyé à l’OCPM ou au TAPI pour nouvelle décision.

B______ était inscrite au centre d’accueil et d’intégration pour femmes migrantes et leurs enfants d’âge préscolaire habitant Q______ (ci-après : CEFAM) et y participait depuis le mois de septembre 2022 à un groupe de discussion avancé en français à raison d’une demi-journée par semaine.

La société R______ Sàrl avait établi un certificat le 28 mars 2023 attestant que A______ était un collaborateur ponctuel, avait une personnalité plaisante et sympathique et qu’on pouvait compter sur lui.

Un courrier de la psychologue du 5 avril 2023 indiquait que C______ avait intégré un groupe thérapeutique depuis le mois de novembre 2022. Elle avait été intégrée dès la rentrée 2022 dans la classe intégrée de l’école de Bellavista.

Le 6 avril 2023, le directeur municipal de l’école de L______ au F______ avait indiqué qu’il n’y avait pas au sein de la municipalité d’école s’occupant du traitement des enfants ayant des troubles du développement moteur mental, faute de personnel qualifié.

Le TAPI avait constaté les faits de manière inexacte. Le courriel adressé le 25 octobre 2022 par l’Ambassade suisse au F______ à l’OCPM indiquait qu’un suivi psychologique était officiellement possible auprès de l’hôpital public, qu’il était gratuit, mais qu’il était très difficile d’y obtenir un rendez-vous, que la présence du médecin à un rendez-vous n’était pas garantie et que les traitements y étaient en outre de mauvaise qualité. Le F______ ne disposait d’aucune école pour enfants souffrant de retards du développement et cognitif, à tout le moins de centres de ressources qui s’occuperaient de ces enfants. Le suivi médical semblait possible auprès de l’hôpital public et de cliniques privées. Ce nonobstant, le TAPI avait conclu de manière arbitraire que le suivi médical de C______ serait possible au F______. Alors qu’il avait soulevé cette question dans sa réplique, il n’avait pas été précisé dans quelle mesure les centres de ressources prendraient en charge un enfant compte tenu de la disponibilité des places.

Il ressortait par ailleurs du courrier de l’Ambassade de Suisse au F______ que des traitements étaient possibles auprès de plusieurs cliniques privées pour des montants de EUR 30.- à 40.- par séance, étant précisé qu’il convenait en temps normal de compter entre deux et trois séances par semaine. Les coûts pouvaient ainsi atteindre EUR 320.- à 480.- par mois selon le nombre et le coût des séances. Ces frais ne pouvaient être couverts par l’allocation mensuelle de CHF 100.- versée par le ministère des affaires sociales. Le couple pourrait quant à lui gagner EUR 500.- par mois au F______, ce qui ne permettrait pas de financer le suivi de C______.

C’était donc de manière arbitraire que le TAPI avait retenu une simple différence de qualité des soins entre la Suisse et le F______. De même était-ce de manière arbitraire qu’il avait exclu de graves conséquences sur la santé de C______ en cas de renvoi. Le rapport d’évaluation du 21 septembre 2022 de l’OMP de Q______ indiquait qu’elle avait besoin d’une structure adaptée à son fonctionnement et à ses capacités, de la présence constante d’un adulte et d’un contexte qui respecte ses rythmes et besoins. Le besoin de soins restait au premier plan pour le développement des compétences motrices, sociales et relationnelles. Il était ainsi incontestable que le déplacement de C______ au F______ entraînerait de graves conséquences pour sa santé et son développement. Il ne pouvait en aucune manière être mis fin au suivi thérapeutique entrepris en Suisse et encore moins au cursus en enseignement spécialisé auprès de la classe d’intégration.

La décision au sujet de C______ consacrait également une violation des art. 30 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et 31 al. 1 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201).

b. Le 17 mai 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

Il se référait aux rapports analysant la prise en charge d’enfants en situation de handicap au F______ repris par le TAPI.

c. Le 4 août 2023, soit dans le délai prolongé par deux fois à sa demande, A______ a persisté dans ses conclusions. Il n’y avait aucune garantie que C______ puisse bénéficier au F______ d’un traitement adéquat de son trouble et suivre un enseignement spécialisé. L’Ambassade de Suisse au F______ avait contredit la jurisprudence invoquée par l’OCPM.

d. Le 9 août 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le recours a été formé par A______ exclusivement.

2.1 L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours, les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. En d'autres termes, l'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; ATA/123/2019 du 5 février 2019 consid. 5).

2.2 En l’espèce, dans son courrier du 14 mars 2018, A______ a agi en son nom et n’a conclu qu’à la régularisation de ses propres conditions de séjour. Toutefois, son épouse et ses enfants ont déposé le même jour des demandes d’autorisation de séjour. L’OCPM a instruit conjointement les demandes de toute la famille et le 15 juillet 2023, les a rejetées par une décision unique, examinant au fond les conditions pour chacun de ses membres, avec une attention particulière pour la situation médicale de C______.

Assisté d’une avocate, A______ a recouru contre cette décision auprès du TAPI le 15 août 2022 en son nom, sans préciser qu’il agissait également pour son épouse et ses enfants, et sans prendre de conclusions pour eux. Il n’a toutefois soulevé que des griefs relatifs à l’établissement des faits concernant la situation de C______.

Devant la chambre de céans, sous la plume du même conseil, A______ a recouru le 17 avril 2023 en son nom contre ce jugement, sans mentionner qu’il agissait également pour son épouse et ses enfants et en prenant des conclusions uniquement en sa propre faveur relativement à son autorisation de séjour. Il n’a, de même, soulevé que des griefs relatifs à la situation de C______.

Dans le jugement attaqué, le TAPI a relevé cet élément, observé que C______, dont le recourant invoquait l’état de santé, n’était pas « directement concernée par la décision entreprise », et rejeté le recours en tant qu’il était formé par A______.

Sur ce dernier point, il y a plutôt lieu de considérer que C______, dont la demande a été rejetée par l’OCPM, n’était formellement pas recourante, et donc partie, devant le TAPI.

Dans ses observations devant le TAPI, l’OCPM a certes évoqué le recours respectivement la réplique de « la famille ». Il résulte de ses écritures qu’il a examiné, pour appuyer le rejet du recours, la situation globale du couple et des enfants et s’est penché sur la situation de C______. De même, devant la chambre de céans, l’OCPM a évoqué le recours « interjeté par les personnes citées en marge », soit la famille.

Cette dernière circonstance n’est toutefois pas déterminante dès lors qu’il ressort clairement des écritures de A______ formées par une avocate successivement devant le TAPI et la chambre de céans, que celui-ci ne recourait que contre le rejet de sa propre demande d’autorisation de séjour.

La chambre de céans observe ainsi que seul A______ est partie à la présente procédure. Les décisions de refus de délivrer des autorisations de séjour à son épouse et à ses enfants, sauf à avoir été contestées dans des procédures séparées, sont entrées en force.

3.             Le recourant se plaint d’une constatation inexacte et arbitraire des faits et de la violation de la loi.

3.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à l'art. 126 LEI, les demandes déposées avant cette date sont régies par l'ancien droit, ce qui est le cas en l'espèce puisque la demande d'autorisation de séjour a été formée en septembre 2018.

L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

L’art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.4 ; C-6379/2012 et C-6377/2012 du 17 novembre 2014 consid. 4.3).

Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; ATA/432/2023 du 25 avril 2023 consid. 3.6).

Aux termes de l'art. 96 al. 1 LEI, les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger ainsi que de son intégration.

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

3.2 Dans l'examen d'un cas de rigueur concernant le renvoi d'une famille, il importe de prendre en considération la situation globale de celle-ci. Dans certaines circonstances, le renvoi d'enfants peut engendrer un déracinement susceptible de constituer un cas personnel d'extrême gravité.

D'une manière générale, lorsqu'un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse et y a seulement commencé sa scolarité, il reste encore attaché dans une large mesure à son pays d'origine, par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet (arrêt du TAF C-636/2010 du 14 décembre 2010 consid. 5.4 et la référence citée). Avec la scolarisation, l'intégration au milieu suisse s'accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l'âge de l'enfant lors de son arrivée en Suisse et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, de l'état d'avancement de la formation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter, dans le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle entamée en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L'adolescence, une période comprise entre douze et seize ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 9a). Sous l'angle du cas de rigueur, il est considéré que cette pratique différenciée réalise la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, telle qu'elle est prescrite par l'art. 3 al. 1 de la Convention relative aux droits de l'enfant, conclue à New York le 20 novembre 1989 (CDE - RS 0.107) ; arrêts du Tribunal fédéral 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3 et 2A.43/2006 du 31 mai 2006 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C 3592/2010 du 8 octobre 2012 consid. 6.2 ; ATA/434/2020 du 31 avril 2020 consid. 10).

3.3 L'opération « Papyrus » développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes de l’UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir, selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » disponible sous https://www.ge.ch /regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter), avoir un emploi ; être indépendant financièrement ; ne pas avoir de dettes ; avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; faire preuve d'une intégration réussie ; absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

L'opération « Papyrus » n'emporte aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

Ces conditions devaient être remplies au moment du dépôt de la demande d’autorisation de séjour (ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 8b).

3.4 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation. Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui‑ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L'exécution n'est pas possible lorsque la personne concernée ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyée dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsqu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger la personne étrangère, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

L'art. 83 al. 4 LEI s'applique en premier lieu aux « réfugiées et réfugiés de la violence », soit aux personnes étrangères qui ne remplissent pas les conditions de la qualité de réfugiée ou réfugié parce qu'elles ne sont pas personnellement persécutées, mais qui fuient des situations de guerre ou de violence généralisée (Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, éd., Code annoté de droit des migrations, volume II : loi sur les étrangers, Berne 2017, p. 949). En revanche, les difficultés socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, de logement, d'emplois et de moyens de formation, ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (ATAF 2010/54 consid. 5.1 ; arrêt du TAF E-5092/2013 du 29 octobre 2013 consid 6.1 ; ATA/515/2016 du 14 juin 2016 consid. 6b).

S'agissant plus spécifiquement de l'exécution du renvoi des personnes en traitement médical en Suisse, celle-ci ne devient inexigible que dans la mesure où ces dernières ne pourraient plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine. L'art. 83 al. 4 LEI, disposition exceptionnelle, ne saurait en revanche être interprété comme impliquant un droit général d'accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d'origine ou de destination de l'intéressé n'atteignent pas le standard élevé qu'on trouve en Suisse (arrêt du TAF : 2011/50 consid. 8.3). La gravité de l'état de santé, d'une part, et l'accès à des soins essentiels, d'autre part, sont déterminants. Ainsi, l'exécution du renvoi demeure raisonnablement exigible si les troubles physiologiques ou psychiques ne peuvent être qualifiés de graves, à savoir s'ils ne sont pas tels qu'en l'absence de possibilités de traitement adéquat, l'état de santé de l'intéressé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du TAF F‑1602/2020 du 14 février 2022 consid. 5.3.4).

Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (ci‑après : CourEDH), l'exécution du renvoi ou de l'expulsion d'un malade physique ou mental est exceptionnellement susceptible de soulever une question sous l'angle de l'art. 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) si la maladie atteint un certain degré de gravité et qu'il est suffisamment établi que, en cas de renvoi vers l'État d'origine, la personne malade court un risque sérieux et concret d'être soumise à un traitement interdit par cette disposition (ACEDH N. c. Royaume-Uni du 27 mai 2008, req. n° 26565/05, § 29 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_3/2021 du 14 avril 2021 consid. 4.2). C'est notamment le cas si sa vie est en danger et que l'État vers lequel elle doit être expulsée n'offre pas de soins médicaux suffisants et qu'aucun membre de sa famille ne peut subvenir à ses besoins vitaux les plus élémentaires (ACEDH N. c. Royaume-Uni précité § 42 ; ATF 137 II 305 consid. 4.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_14/2018 du 13 août 2018 consid. 4.1 ; 2C_1130/2013 du 23 janvier 2015 consid. 3).

Le renvoi d'un étranger malade vers un pays où les moyens de traiter sa maladie sont inférieurs à ceux disponibles dans l'État contractant reste compatible avec l'art. 3 CEDH, sauf dans des cas très exceptionnels, en présence de considérations humanitaires impérieuses (ACEDH N. c. Royaume-Uni précité § 42 ; Emre c. Suisse du 22 mai 2008, req. n° 42034/04, § 89). Dans un arrêt du 13 décembre 2016 (ACEDH Paposhvili c. Belgique, req. n° 41738/10, § 173 ss, not. 183), la Grande Chambre de la CourEDH a clarifié son approche en rapport avec l'éloignement de personnes gravement malades et a précisé qu'à côté des situations de décès imminent, il fallait entendre par « autres cas très exceptionnels » pouvant soulever un problème au regard de l'art. 3 CEDH les cas d'éloignement d'une personne gravement malade dans lesquels il y a des motifs sérieux de croire que cette personne, bien que ne courant pas de risque imminent de mourir, ferait face, en raison de l'absence de traitements adéquats dans le pays de destination ou de défaut d'accès à ceux-ci, à un risque réel d'être exposée à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie ; ces cas correspondent à un seuil élevé pour l'application de l'art. 3 CEDH dans les affaires relatives à l'éloignement des étrangers gravement malades. La CourEDH a aussi fixé diverses obligations procédurales dans ce cadre (ACEDH Savran c. Danemark du 7 décembre 2021, req. n° 57467/15, § 130).

3.5 Le Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF) a jugé inexigible le renvoi au F______ et ordonné l’admission provisoire d’adolescents présentant tous deux des troubles spécifiques mixtes du développement et un retard mental non spécifié, des anomalies au niveau neurologique et de graves troubles du comportement avec idées suicidaires et manifestations hétéroagressives, au sujet desquels la thérapeute avait évoqué un risque suicidaire en cas de renvoi et dont les parents étaient dépourvus des capacités pour les éduquer en raison de leur désorganisation et de troubles psychiques (arrêt du TAF [ci-après : ATAF] E-469/2018 du 11 février 2019).

Il a en revanche rejeté le recours d’enfants présentant un stress post-traumatique, un retard du développement au niveau du langage, de troubles de l’apprentissage sévères, un retard important du développement et des acquisitions associé à un trouble de la coordination, une dyspraxie et une hypotonie possiblement dans le contexte d’un syndrome génétique non étiqueté, dont les thérapeutes pronostiquaient une stagnation du développement en cas de retour au F______. Le F______ disposait en effet de structures de soins et de médicaments nécessaires aux maladies physiques et psychiques. Les enfants identifiés comme ayant des besoins spéciaux étudiaient dans des classes spéciales attachées à des écoles classiques ou dans des écoles spéciales. Les recourants pourraient prétendre dans leur pays d’origine à un traitement essentiel de leurs troubles, même si les soins n’atteignaient pas le standard élevé de ceux dont ils bénéficiaient en Suisse. Ils étaient également censés avoir accès à une éducation adaptée à leurs besoins, correspondant aux standards locaux (ATAF E-2798/2017 du 11 juillet 2017 et les références citées).

Plus récemment, examinant la révision d’un refus d’admission provisoire, il a estimé qu’un enfant atteint d’un trouble du spectre autistique, d’une microcéphalie légère, d’un retard de croissance ainsi que d’un trouble alimentaire, et qui bénéficiait en Suisse d’un suivi pédiatrique, socio-éducatif, logopédique, physiothérapeutique et ergothérapeutique pourrait obtenir au F______ un diagnostic gratuit et l’aide d’organisations non gouvernementales prenant en charge des enfants autistes, et que rien n’indiquait par ailleurs que les parents ne seraient pas en mesure d’assumer les frais de la prise en charge (ATAF E-3421/2023 du 10 juillet 2023).

Dans un arrêt récent portant également sur un enfant atteint d’autisme et devant être placé en classe spécialisée, la chambre de céans a retenu qu’il existe au F______ des offres psychologiques et psychiatriques ainsi que des programmes de thérapie par l’activité, qui améliorent les capacités motrices, communicatives et sociales. Trois organisations non gouvernementales s’occupent d’enfants autistes et proposent des services de prises en charge. Les examens et traitements dans les hôpitaux publics sont gratuits. La famille ayant un enfant autiste reçoit une aide de EUR 100.- par mois. À cela vient s’ajouter le constat effectué par le TAF que les enfants identifiés comme ayant des besoins spéciaux étudient dans des classes spéciales attachées à des écoles classiques ou dans des écoles spéciales (ATA/391/2023 du 18 avril 2023 consid. 2.4).

3.6 En l’espèce, le recourant ne critique pas le raisonnement au terme duquel l’OCPM puis le TAPI ont conclu qu’il ne remplissait ni les conditions de l’opération « Papyrus » ni celles du cas individuel d’extrême gravité. À juste titre, dès lors que ce raisonnement est conforme à la loi.

Le recourant, qui a indiqué lors de son audition par la police le 31 janvier 2021 être venu en Suisse pour la première fois en 2004, avoir ensuite habité en H______, être revenu à Genève à fin 2005 et y être resté jusqu’en 2009 environ, puis être retourné au F______ et y avoir travaillé et vécu avec sa famille avant de revenir en Suisse en 2016 ou en 2017, admet ne pas avoir séjourné de manière continue en Suisse plus d’une année ou deux avant le dépôt de sa demande le 14 mars 2018, ce qui ne remplit pas la condition de la longue durée, que ce soit sous l’angle de l’opération « Papyrus » ou du cas individuel d’extrême gravité. Il en va de même de son épouse et de sa fille arrivées à Genève en 2017.

Le recourant, qui a travaillé dans le bâtiment, la restauration et le nettoyage, n’a pas acquis de connaissance professionnelles qu’il ne pourrait mettre à profit au F______, et son intégration professionnelle ne peut être qualifiée de remarquable.

Le recourant n’établit pas d’intégration sociale exceptionnelle, notamment de liens familiaux ou amicaux d’une intensité telle qu’il ne pourrait être exigé de lui qu’il quitte la Suisse. Il ne fait pas valoir d’engagement associatif, culturel ou sportif particulier. Le fait qu’il maîtrise le français au niveau requis, n’émarge pas à l’aide sociale, ne fasse pas l’objet de poursuites et parvienne à subvenir à ses besoins et ceux de sa famille peut être attendu de tout candidat à la délivrance d’un titre de séjour, étant observé que son épouse n’a, selon ses explications, que récemment entrepris d’améliorer sa connaissance de la langue française.

Le recourant a été condamné le 8 février 2022 pour pornographie, soit une infraction sans rapport avec la nature illégale de son séjour, ce qui fait en soi obstacle à l’application de l’opération « Papyrus » et dénote pour le surplus un certain mépris de l’ordre juridique incompatible avec la reconnaissance d’une intégration poussée.

Enfin, le recourant ne soutient pas qu’il ne pourrait lui-même être renvoyé au F______ et s’y réintégrer, à juste titre puisqu’il y a passé toute son enfance, son adolescence et le début de l’âge adulte, en maîtrise la langue et les codes culturels, y a gardé des attaches et pourra sans doute y faire valoir l’expérience professionnelle acquise en Suisse, de sorte que si sa réintégration ne sera probablement pas simple, elle ne sera pas plus difficile que celle de ses compatriotes placés dans une situation semblable à la sienne.

L’OCPM puis le TAPI ont examiné la situation de l’ensemble de la famille et ont conclu que l’épouse et les enfants du recourant ne se trouvaient pas non plus dans un cas d’extrême gravité.

Le recourant ne fait pas valoir que ses enfants seraient désormais enracinés en Suisse au point que leur départ ne pourrait être exigé. Ceux-ci sont en effet encore jeunes, âgés respectivement de 8 et 6 ans, et scolarisés depuis quelques années seulement. Il peut être attendu d’eux qu’ils suivent leurs parents, et qu’ils se réintègrent dans le système scolaire du F______ en faisant valoir l’acquis scolaire suisse.

Le recourant soutient cependant que la situation de sa fille C______ réaliserait les conditions d’un cas individuel d’extrême gravité, ce que l’OCPM puis le TAPI auraient ignoré de façon arbitraire.

La question de savoir si le recourant peut se prévaloir uniquement de la situation personnelle de sa fille C______ à l’appui de sa demande de permis de séjour, alors que celle-ci n’a pas recouru contre le rejet de sa propre demande de permis, souffrira de rester indécise dès lors que le grief tiré de l’état de santé de celle-ci doit en tout hypothèse être écarté.

Le recourant ne remet pas en cause le fait que sa fille souffre d’un retard mental léger et d’un retard global du développement moteur, ainsi que l’a retenu le TAPI.

Le rapport de l’OMP du 5 avril 2023 produit par le recourant décrit un retard mental léger (CIM-10 F.70) et un trouble du développement moteur (CIM-10 F82). Il mentionne qu’un traitement de psychomotricité a débuté en septembre 2020 à raison d’une fois par semaine et a pris fin en septembre 2022. En novembre 2022 C______ a intégré un groupe thérapeutique animé par une psychologue et une psychomotricienne, et le rapport préconise la continuation d’un suivi. C______ a par ailleurs été placée dans une classe intégrée en école ordinaire dès la rentrée 2022. Elle a besoin de travailler en petits groupes et d’avoir l’attention de l’adulte pour la rassurer.

Le recourant fait valoir que les soins et l’encadrement de sa fille au F______ seraient inaccessibles ou de mauvaise qualité.

L’Ambassade de Suisse au F______ a indiqué le 25 octobre 2022 qu’une prise en charge des enfants souffrant d’un retard de développement et cognitif existait au F______, mais seulement sous forme d’un forfait mensuel de EUR 100.- versé par le ministère des affaires sociales indépendamment du lieu de traitement. Selon elle, le suivi psychologique était officiellement possible auprès de l’hôpital public, qui était gratuit, mais il était très difficile d’y obtenir un rendez-vous et celui-ci ne garantissait pas la présence du médecin. Les traitements y étaient selon elle de mauvaise qualité. De meilleurs traitements étaient possibles auprès de plusieurs cliniques privées, au prix de EUR 30.- à 40.- par séance alors qu’il fallait compter deux à trois traitements par semaine. Il n’y avait pas au F______ d’écoles pour enfants souffrant de retard de développement et cognitif, mais il existait cinq centres de ressources distribués dans le pays s’occupant des enfants avec ce diagnostic, au prix de EUR 100.- à 110.- par mois.

Sur la seule base de ces explications, et contrairement à ce que soutient le recourant, il apparaît que le traitement dispensé par les centres de ressources serait couvert par l’allocation mensuelle. De même, un traitement dans un hôpital privé à raison d’une séance par semaine, soit la fréquence de la psychomotricité dont C______ a bénéficié en Suisse, coûterait un peu plus de EUR 100.- par mois.

En ce qui concerne la qualité des soins, les indications de l’Ambassade de Suisse au F______ doivent être relativisées en regard de la jurisprudence constante susmentionnée, qui a notamment établi l’existence de structures de prise en charge thérapeutique au F______, de classes spéciales attachées à des écoles classiques et d’écoles spéciales pour les enfants en difficulté, et rappelé que si la qualité des soins et de l’encadrement n’était sans doute pas aussi bonne qu’en Suisse, ceux-ci répondaient aux besoins des enfants.

Le recourant ne peut rien tirer des déclarations du directeur municipal de l’école de L______ au F______, selon lequel il n’y aurait pas au sein de la municipalité d’école s’occupant du traitement des enfants ayant des troubles du développement moteur mental faute de personnel qualifié. Ces déclarations n’excluent en effet pas que des telles structures existent dans d’autres municipalités, où il peut être attendu du recourant qu’il s’installe, dans l’intérêt bien compris de sa fille.

Enfin, c’est en vain que le recourant invoque les salaires que sa femme et lui pourraient espérer gagner au F______. Outre qu’il ne cite pas ses sources, apparemment trouvées sur internet, il oublie de mentionner la subvention versée par les autorités, et ne tient aucun compte de l’aide que pourraient lui apporter les organisations non gouvernementales citées par le TAF ou encore de l’appui qu’il pourrait trouver auprès de sa famille et de celle de son épouse. Il ne soutient pas, enfin, que les centres de ressources ou l’enseignement spécialisé seraient payants.

Le recourant se plaint encore de ce qu’il n’aurait pas été prouvé qu’une place serait disponible pour sa fille dans un centre de ressources. Cet argument ne lui est d’aucun secours, dès lors qu’il ne rend pas vraisemblable que le système de soins et d’encadrement scolaire au F______ serait moins en mesure que le système suisse de s’adapter aux fluctuations périodiques prévisibles des besoins.

L’OCPM et le TAPI étaient ainsi fondés, sans commettre ni excès ni abus de leur pouvoir d’appréciation, à retenir que C______ pourra trouver au F______ le soutien thérapeutique et scolaire nécessaire et que son renvoi dans son pays d’origine ne l’exposera pas à un risque réel de déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie.

C’est donc conformément à la loi qu’ils ont conclu qu’elle ne remplissait pas les conditions du cas individuel d’extrême gravité et que son renvoi n’était ni illicite, ni impossible et qu’il pouvait raisonnablement être exigé.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

4.             Vu l'issue du recours, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, et aucune indemnité ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, dans la mesure où il est recevable, le recours interjeté le 17 avril 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 14 mars 2023 ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. de Lausanne 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Patricia MICHELLOD, avocate du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Valérie LAUBER, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.