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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3029/2022

ATA/1086/2023 du 03.10.2023 sur JTAPI/530/2023 ( LCI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3029/2022-LCI ATA/1086/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 3 octobre 2023

3ème section

 

dans la cause

 

COMMUNE DE A______ recourante
représentée par Me Lucien LAZZAROTTO, avocat

contre

B______,

C______

D______,
représentées par Me Michel D'ALESSANDRI, avocat

et

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE intimés

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 mai 2023 (JTAPI/530/2023)


EN FAIT

A. a. B______ et C______ sont propriétaires de la parcelle n° 2'233 de la commune de A______ (ci-après : la commune), à l’adresse 21‑23, chemin E______.

Cette parcelle, en forme de « L » inversé et d’une surface de 10'744 m2, dont 7'981 m2 en zone 5 (partie sud-ouest) et 2'793 m2 en zone agricole (partie nord-est), est libre de construction et entoure les villas voisines.

Elle est notamment grevée d’une servitude à destination de route, RS 1______, en faveur de la commune et de l’État de Genève. Cette servitude longe la parcelle en bordure du chemin E______.

b. Le chemin E______, qui fait partie du réseau communal secondaire, est bidirectionnel et permet de relier la route de A______, route cantonale, et le chemin F______. Il fait l'objet d'une réglementation du trafic le soumettant au régime de la « zone 30 » et d’une mesure de restriction de circulation à l’heure de pointe du matin.

c. Le 25 mai 2020, le plan directeur communal (ci-après : PDCom) de la commune a été approuvé par le Conseil d'État.

Ce dernier prévoit en particulier que la densification de la zone 5 est conditionnée à la préservation des haies bocagères et des alignements de chênes existants caractéristiques du paysage communal (PDCm ch. A1.1 p. 40). Les constructions en sous-sol doivent se tenir suffisamment en retrait des limites de parcelles, afin de permettre les plantations en pleine terre d'arbres pouvant atteindre un grand développement (PDCom ch. A5.3 p. 43). En complément à l'art. 59 al. 8 et 9 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), il est préconisé, pour les parcelles de plus de 2’000 m2, que les constructions en sous‑sol soient majoritairement situées sous l'emprise des bâtiments, des emprises hors bâtiments n'étant tolérées que s'il peut être démontré qu'aucune solution rationnelle ne peut être mise en œuvre (PDCom ch. B7.2 p. 47). Les bâtiments doivent respecter par leur volumétrie et leur implantation sur la parcelle le caractère du quartier, notamment en terme de longueur de façade et de gabarit exposés à la vue (PDCom ch. B10.1 p. 48). Lors de tout projet sur les axes identifiés sur le plan, la commune négocie, en fonction des besoins ou des opportunités, une cession ou une servitude d’environ 10 à 50 m2 destinés à des installations d’utilité publique (PDCom ch. B3.1 p. 45).

B. a. Le 11 mars 2021, D______ a déposé auprès du département du territoire (ci-après : le département), une demande d’autorisation de construire (DD 2______), sur la parcelle n° 2'233 précitée, quatre habitats groupés (30% très haute performance énergétique [ci-après : THPE]), devant accueillir 20 logements, avec garage souterrain, sondes géothermiques et abattage d’arbres.

La version du projet du 9 février 2022 prévoit 19 places habitants, deux places handicapés, quatre places visiteurs, cinq places pour les motos et 60 places pour les vélos.

L’abattage d’un chêne serait compensé par la plantation de trois nouveaux chênes le long du chemin E______.

b. Dans le cadre de l’instruction de cette requête :

-       l’office de l’urbanisme (ci-après : OU) a émis un préavis favorable sans observation le 15 avril 2021 ;

-       la commune a émis un préavis défavorable le 19 mai 2021 ; le projet, situé dans un environnement très sensible, tant par sa relation au chemin E______ qu’à la proximité avec la zone agricole et à la présence d’un cordon de chênes et d’arbres isolés remarquables, contrevenait à plusieurs dispositions de son PDCom (soit A1 – haies bocagères à chêne, A5 et B7 – constructions en sous‑sol ; A10 – installations de collecte de déchets ; B3 – cession ou servitude à destination d’espaces ou d’installations à caractère public ; B10 – insertion morphologique) ; elle sollicitait plusieurs modifications, à savoir la suppression ou le redimensionnement de l’ouvrage de couverture de la rampe d’accès au parking souterrain pour assurer une meilleure intégration paysagère, la diminution de l’emprise latérale du parking pour permettre la plantation de haies le long des limites parcellaires, ainsi que l’installation d’une collecte de déchets ; elle a réitéré son préavis défavorable les 10 novembre 2021 et 23 mars 2022 ;

-       la commission d'architecture (ci-après : CA) a, le 16 décembre 2021, sous condition liée aux teintes et matériaux à soumettre à approbation, après avoir validé l’implantation et le gabarit des habitats groupés mais sollicité une modification du projet dans son préavis du 21 avril 2021 ; cette modification concernait le choix de l’emplacement de la rampe et son volume. Sa disposition juste en face du premier bâtiment, s’accompagnant d’un mur d’une hauteur très importante, péjorait les dégagements de certains appartements, ainsi que la qualité des aménagements extérieurs ; elle a relevé la qualité de la notice explicative ; son préavis était favorable ;

-       la police du feu a, le 13 octobre 2021, émis un préavis favorable sous conditions ;

-       l’office cantonal des transports (ci-après : OCT) a, le 23 février 2022, après avoir sollicité des modifications du projet en lien avec l’accès depuis le chemin E______ et les places de stationnement (préavis des 19 avril, 4 mai et 21 octobre 2021), émis un préavis favorable sous condition liée au revêtement de la voie d’accès des véhicules d’intervention des pompiers ;

-       l’office cantonal de l'agriculture et de la nature (ci-après : OCAN) a, le 29 mars 2022, émis un préavis liant favorable sous conditions et avec souhaits s’agissant de l’abattage d’un chêne selon le dossier d’abattage N° 3______ et la replantation d’arbres pour un montant d’au moins CHF 24'000.-, dont au minimum trois chênes pédonculés de taille 30/35 le long du chemin E______, ainsi qu’une haie vive plantée en cinq essences indigènes ; l’OCAN a émis six préavis dans le cadre de l’instruction du projet en cause (28 avril et 4 novembre 2021, 14 et 29 mars, 13 et 21juin 2022 ;

-       la commune a, le 16 juin 2022, réitéré ses préavis défavorables aux motifs que la préservation des arbres remarquables et du cordon de chênes n’était pas respectée ; le projet conduirait à un engorgement sur un chemin IVS étroit en zone 30 ; le parking en sous-sol débordait de l’assiette de bâti ; l’insertion morphologique du projet ne respectait pas le caractère du secteur ; les bâtiments de R+1 ou R+2, avec des toitures plates, ne respectaient pas le caractère du quartier ; les blocs R+2 se situaient à proximité immédiate de villas R+1 et bouleversaient l’harmonie du quartier ; la construction d’environ 70 nouveaux logements sur les parcelles nos 1’099 et 2'233 impliquait l’arrivée d’environ 130 véhicules, doublant le nombre de véhicules des riverains ; les sorties projetées des parkings se faisaient immédiatement face, risquant, aux heures de pointe, d’accroître les engorgements sur le chemin E______ ; elle sollicitait une modification du parking pour diminuer son emprise latérale et permettre, a minima, des plantations de haies le long des limites avec les parcelles voisines, ainsi que la création d’une cession ou d’une servitude à destination d’espaces ou installations à caractère public, conformément à son PDCom (B3) ;

-       l’OCAN a, le 21 juin 2022, émis un préavis favorable sous conditions et liant concernant le dossier d’abattage N° 3______ pour les arbres hors forêt en relation avec le dossier, et au respect du plan des aménagements extérieurs du 29 avril 2022 ;

-       les autres instances de préavis consultées se sont toutes déclarées favorables au projet, avec ou sans conditions.

c. Par décision globale du 16 août 2022, le département a délivré l’autorisation de construire sollicitée, laquelle a été publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève du même jour.

Le même jour, il a informé la commune des raisons qui l’avaient amené à ne pas prendre en considération son préavis défavorable.

C. a. Par acte du 15 septembre 2022, la commune a formé recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre l’autorisation précitée.

Le projet violait les art. 19 et 22 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700), faute d’accès suffisant. Le chemin E______ était une voie de desserte communale et fréquentée, déjà exiguë par rapport au trafic qu’elle desservait. Elle était inapte à accueillir le trafic qui serait engendré par le projet. L’OCT n’avait pas analysé la configuration du chemin d’accès, lequel devait être qualifié d’accès riverains de type B, s’agissant d’une route de liaison locale desservant de nombreux bien-fonds. À lui seul, le projet litigieux impliquerait la réalisation de 26 places de stationnement pour voitures. La largeur minimale de 5 m préconisée selon la norme VSS n’était pas respectée. L’accès n’était pas non plus garanti sur le plan juridique, la création de la rampe d’accès, de même que la plantation de trois chênes étant contraires à la servitude d’usage dont elle bénéficiait.

L’accroissement considérable du trafic sur le chemin E______ causerait une gêne durable pour la circulation au sens de l’art. 14 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) et la sécurité sur ce chemin exigu et saturé était déjà problématique. Aucune mesure supplémentaire à celles déjà prises (sécurisation et restriction de circulation) n’était susceptible de permettre une absorption du trafic supplémentaire.

Le projet violait l’art. 15 LCI. Le chemin E______ était inscrit à l’inventaire des voies historiques de la Suisse (ci-après : IVS) et méritait une protection particulière. La construction d’un vaste habitat groupé viendrait engorger ce chemin et nuirait au caractère du site. Le projet s’insérait dans la pénétrante de verdure de A______-G______, identifiée dans le plan directeur cantonal (ci-après : PDCn 2030) comme un corridor biologique et à enjeux. La parcelle se situait dans un site richement arboré, abritant d’importantes surfaces proches de l’état naturel auquel le bétonnage et la pollution lumineuse porteraient atteinte. Les parcelles avoisinantes présentaient toutes une faible densité. Le projet risquait de mettre en danger la survie du remarquable cordon de chênes sis au nord-est de la parcelle, les couronnes de ceux-ci apparaissant très proches des constructions projetées. Le seul préavis de l’OCAN apparaissait insuffisant pour pallier ce risque et une expertise devait être ordonnée.

Le département avait ignoré la teneur de son PDCom et de ses préavis, malgré la marge de manœuvre dont il bénéficiait.

b. Le département a conclu au rejet du recours.

Il avait répondu au dernier préavis de la commune de manière circonstanciée le 16 août 2022. La stratégie d’évolution de la zone 5 de la commune n’avait pas encore été approuvée. Son PDCom ne répondait dès lors pas aux exigences fixées à l’art. 10 al. 3 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30).

c. B______, C______ et D______ ont conclu au rejet du recours.

Aucune servitude de passage n’était nécessaire, la parcelle n° 2'233 bénéficiant d’un accès direct à la voie publique. La servitude à destination de route en faveur de la commune n’empêchait en rien l’accès à la construction projetée et la rampe d’accès n’empièterait pas sur ladite servitude.

d. Dans sa réplique, la commune a ajouté que la lecture des préavis de l’OCT démontrait qu’il avait uniquement examiné la question du débouché sur le chemin E______ et non l’aptitude de celui-ci à accueillir un trafic supplémentaire. La servitude d’usage dont elle bénéficiait avait pour objectif de réserver un futur élargissement de ce chemin. L’existence de cette servitude empêchait ainsi la construction d’une rampe – qui débutait bien sur l’assiette de la servitude – et la plantation des trois chênes.

e. Dans sa duplique, le département a relevé que cette servitude avait été créée le 27 décembre 1974 et que jusque-là, aucun projet concret de mise en œuvre n’avait été émis. La parcelle adjacente à l’ouest ne comportait d’ailleurs pas de servitude similaire.

f. Le TAPI a, par jugement du 11 mai 2023, rejeté le recours.

Les plans et les photographies des lieux, de même que les outils disponibles sur Internet, permettaient parfaitement de visualiser la configuration des lieux, étant en outre relevé que la question de l’accès suffisant via le chemin E______ avait déjà fait l’objet d’une analyse détaillée jusqu’au Tribunal fédéral (arrêt 1C_548/2021 du 24 février 2023). Dès lors, il n’était pas donné suite à la demande de transport sur place. Une expertise ne constituait pas une mesure nécessaire, le dossier contenant en particulier le préavis des instances compétentes en la matière.

Le chemin E______ était une route communale secondaire, classée dans le réseau de quartier. Il était limité à 30 km/h sur le tronçon reliant le chemin F______ à la parcelle litigieuse ; sur ce tronçon, rectiligne, plusieurs obstacles rétrécissant la chaussée et empêchant le croisement de véhicules avaient été construits. Il faisait également l’objet d’une restriction de circulation à l’heure de pointe du matin.

La parcelle en cause se trouvait au bout du quartier desservi par le chemin E______, en direction de la route de A______, avant que ce chemin ne longe sur sa seconde moitié la zone agricole. Dans le cadre de la procédure relative au projet de construction de 53 logements sur la parcelle n° 1'099 située en face du projet litigieux, la chambre administrative avait retenu que la parcelle en cause était équipée d’une manière adaptée à l’utilisation prévue via son accès par le chemin E______ (ATA/752/2021 du 13 juillet 2021). Dans l’arrêt 1C_548/2021 précité, le Tribunal fédéral avait notamment retenu que l’accroissement de trafic généré par le projet en cause restait tolérable, au vu de la charge de trafic actuelle et que les possibilités de croisement étaient suffisantes. On voyait mal comment l’accroissement du trafic devant résulter de l’adjonction de 20 logements, accompagnés d’une vingtaine de places de stationnement voiture serait susceptible de le rendre impraticable.

À cela s’ajoutait que l’OCT, après avoir sollicité et obtenu à trois reprises la modification du projet litigieux, avait émis un préavis favorable, sans émettre la moindre réserve quant à la capacité de l’accès prévu et alors même que l’autorisation de construire pour le projet situé en face de la parcelle n° 2'233 avait déjà été confirmée par les deux instances cantonales. Les différents préavis émis par cette instance démontraient en outre qu’elle avait procédé à un examen circonstancié et rigoureux de la situation, veillant notamment à l’amélioration des conditions de visibilité du côté nord du débouché de l’accès privé sur le chemin E______, des conditions d’insertion sur la parcelle des véhicules en provenance du sud du chemin E______, ainsi que du croisement des véhicules sur l’esplanade située avant la rampe d’accès au parking souterrain. Le fait que le chemin E______ ne respecterait par la largeur minimale préconisée selon la norme VSS 640 050 n'y changeait rien, ces normes VSS ne constituant pas des règles de droit et ne liant pas les autorités. La police du feu avait émis un préavis positif, manifestant ainsi la compatibilité du concept sécurité incendie avec le projet de construction, notamment sur les questions d'accès.

Il ressortait des plans visés ne varietur et de la notice explicative annexée au projet que ni la rampe d’accès, ni les trois chênes qui seraient plantés le long du chemin E______ n’empièteraient sur l’assiette de la servitude d’usage à destination de route dont la commune bénéficiait. La lecture combinée des plans nos 4______, 5______ et 6______ montrait que la pente de la rampe d’accès atteignait le niveau du terrain naturel avant le virage à droite pour rejoindre le domaine public.

La parcelle n° 2’033 bénéficiait d’un accès direct à la voie publique, de sorte qu’aucune servitude de passage n’était nécessaire.

L'accès aux constructions projetées était donc juridiquement et techniquement garanti.

Le projet autorisé était conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone villa, de sorte que le trafic supplémentaire engendré par la présence de nouveaux habitants ne pouvait en principe pas être considéré comme un « inconvénient grave ». Rien n’indiquait concrètement que la création de 20 logements constituerait une source d’importantes nuisances et induirait un trafic additionnel incompatible avec les caractéristiques du chemin. Le chemin E______ faisait déjà l’objet de plusieurs mesures (restriction de circulation, limitation de vitesse, rétrécissements) visant à garantir la sécurité des usagers et la fluidité du trafic aux heures de pointe. Seule la partie nord du chemin E______ était inscrite à l’inventaire IVS et le projet querellé se situait sur sa partie sud.

En conclusion, le département n'avait pas à refuser l'autorisation de construire litigieuse en raison des art. 19 al. 1 et 22 LAT et 14 LCI.

La CA, avait rendu le 12 octobre 2021, après avoir sollicité une modification du projet, un préavis favorable, n’émettant en particulier aucune réserve concernant une quelconque incompatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, étant rappelé qu’à l’exception de celui de la commune, tous les autres préavis rendus étaient favorables. Dans son premier préavis, la CA avait notamment validé l’implantation et le gabarit des habitats groupés, exigeant toutefois que les jardins ne soient pas clôturés, afin de préserver la qualité paysagère du site. Il n'apparaissait pas que le département, en tenant compte du préavis de la CA plutôt que de la commune, ait excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation.

Il n’était pas contesté que toutes les prescriptions relatives aux distances, vues droites et gabarits étaient respectées, étant relevé que l’IUS de 30% THPE restait bien en deçà du maximum admissible (48%, voire 50% pour une parcelle supérieure à 5'000 m2). Certes, le quartier était composé majoritairement de villas individuelles, mais un projet de construction de huit habitats groupés avait récemment été autorisé et validé par le Tribunal fédéral en face du projet litigieux (DD 111'943). Un autre projet de trois habitations contiguës était par ailleurs en cours de réalisation sur des parcelles voisines (DD 112'200) et le quartier comptait plusieurs villas mitoyennes, notamment deux ensembles de deux villas directement voisines du projet querellé. De plus, le projet prévoyait des hauteurs de un à deux étages sur rez, alors que le gabarit des villas alentours était généralement de un étage sur rez. La densité du projet apparaissait ainsi mesurée. Pour le surplus, la morphologie compacte des constructions, de même que leur implantation sur la parcelle permettaient de limiter l’emprise au sol – le projet proposant un indice de verdure important de 78.2% (pleine terre) – et de préserver les dégagements visuels pour les constructions environnantes.

Même si la parcelle en cause s’insérait, pour sa partie nord-est située en zone agricole, dans la pénétrante de verdure H-A______ (cf. fiche C04 du PDCn 2030), elle était pour le reste entourée de parcelles bâties.

L’OCAN avait examiné chaque version du projet pour aboutir à un préavis liant du 29 mars 2022 relatif à l’abattage d’un chêne et à un préavis favorable du 21 juin 2022 sous conditions concernant le dossier d’abattage et le respect du plan des aménagements extérieurs du 29 avril 2022. S’agissant de la préservation de l’allée de chênes située au nord-est de la parcelle, l’OCAN avait conditionné son préavis à la prise de toutes les précautions nécessaires (barrières type MÜBA à poser à l’aplomb des couronnes) afin de protéger valablement les arbres maintenus à proximité des travaux. Un arboriste-conseil devrait également être mandaté. Au surplus, il ressortait des plans et en particulier de la notice explicative du 8 février 2021 que les distances aux couronnes étaient respectées. Dans ces circonstances, l’expertise sollicitée n’apparaissait pas nécessaire.

L’abattage du chêne avait dûment été autorisé par l’OCAN au vu de son état sanitaire (branches mortes et tronc laissant apparaître un assèchement très marqué) et serait compensé par la plantation de trois nouveaux chênes pédonculés de taille 30/35, selon son préavis liant du 20 mars 2022.

C’était ainsi à tort que la commune, qui ne faisait que substituer sa propre appréciation à celle de l’autorité intimée, fondée sur les préavis positifs des instances de préavis compétentes, composées de spécialistes disposant des compétences utiles pour évaluer la situation, se plaignait d’une violation de l’art. 15 LCI.

En l’absence d’application de la dérogation prévue à l’art. 59 al. 4 et 4bis LCI, l’existence et le contenu du PDCom n’avaient pas d’importance décisive, étant rappelé qu’il ne pouvait à lui seul faire opposition à l'application du droit cantonal, respectivement à un projet de construction conforme aux normes de la zone 5. Au demeurant, ce projet n’entrait pas en contradiction avec les remarques formulées par la commune dans son dernier préavis. Il n’impliquait en effet l’abattage que d’un seul chêne qui, au vu des photographies historiques de la parcelle, ne pouvait être considéré comme faisant partie d’une « lignée » de chênes qui serait par hypothèse à préserver, l’alignement indiqué dans le PDCom n’étant en l’occurrence composé que de deux arbres, distants de plus de 20 m, respectivement de plus de 30 m de la haie bocagère existante au nord-est de la parcelle.

Le parking souterrain projeté déborderait effectivement de l’assiette du bâti. Toutefois, cette construction était prévue sur un seul niveau et, d’autre part, la mutualisation des stationnements permettait de limiter l’impact des autres constructions en sous-sol sur le reste de la parcelle. Par ailleurs, il ressortait des plans que la distance de 1 m minimum avait été préservée, permettant la plantation d’une haie de long des limites de parcelles et le maintien de la haie existante. Quant à l’insertion morphologique du projet, selon les données du système d’information du territoire à Genève (ci-après : SITG), le quartier comportait déjà plusieurs habitations dont le toit était plat. S’agissant de la création d’une cession ou d’une servitude à destination d’espaces ou installations à caractère public, dont la commune ne précisait ni la nature, ni l’emprise, ni même les motifs qui en justifieraient l’inscription, son PDCom prévoyait uniquement qu’il lui appartenait de négocier les cessions ou servitudes qui lui apparaissaient opportunes. L’autorisation querellée n’empêchait pas une telle démarche.

D. a. La commune a formé recours contre ce jugement par acte expédié à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le 12 juin 2023. Elle a conclu préalablement à ce que soient ordonnés un transport sur place et une expertise et, au fond, à l’annulation du jugement du TAPI ainsi que de l’autorisation de construire du 16 août 2022.

Le TAPI avait manifestement violé son droit d’être entendue en refusant de procéder aux deux actes d’instruction précités. Un plan, une photographie ou un outil Internet ne permettaient pas d’appréhender la charge de trafic du chemin E______ ni sa réelle accessibilité en cas de flux de véhicules. Le TAPI avait fondé son jugement sur une expertise à laquelle elle n’avait pas eu accès. Il n’y en avait qu’un bref résumé dans l’arrêt du Tribunal fédéral du 24 février 2023. Les préavis des instances étaient lacunaires quant à l’état actuel et futur du cordon de chênes. Certains éléments afférents à la protection de l’environnement nécessitaient des connaissances et une expertise dont les autorités judiciaires étaient en principe dépourvues.

Les art. 19 et 22 LAT, ainsi que 14 LCI étaient violés, puisque la parcelle n’était pas desservie par des voies d’accès adaptées à l’utilisation prévue. Dans une récente affaire genevoise, le Tribunal fédéral avait estimé que l’accès à un projet d’habitats groupés de seize logements n’était pas garanti, faute de pouvoir bénéficier de la servitude de passage existante compte tenu des précisions figurant au registre des servitudes. Or, on ne pouvait d’emblée déduire que l’accès à la parcelle litigieuse était en tous points identique à la parcelle n° 1'099 visée par l’expertise précitée, uniquement en raison de leur proximité. La parcelle n° 2’233 était « au bénéfice » d’une servitude, ce qui ne semblait pas être le cas de la parcelle n° 1'099. La construction sur cette parcelle de 53 logements avec parking souterrain collectif augmenterait de manière significative l’intensité du trafic sur le chemin E______, d’où la nécessité d’une nouvelle expertise. La circulation générée par ces 73 nouveaux logements sur les deux parcelles en cause serait incontestablement bien plus importante que le trafic de transit évoqué dans l’arrêt du Tribunal fédéral du 24 février 2023. En conséquence, le TAPI ne pouvait de toute évidence pas se fonder sur cette expertise. Il avait par ailleurs omis d’indiquer que le Tribunal fédéral avait précisé que les travaux de construction ne pourraient débuter qu’à condition de l’entrée en force d’une autorisation de construire portant sur la création d’un trottoir sur le chemin E______ vers l’accès piétonnier du projet litigieux, élément qui reflétait la dangerosité du chemin en cause. Or, il n’existait pas de trottoir sur ledit chemin vers l’accès piétonnier du projet.

Le non-respect de la largeur minimale de 5 m préconisée selon la norme VSS 640 505 illustrait l’exiguïté dudit chemin par rapport au trafic qu’il accueillait.

L’accès à la parcelle litigieuse pourrait être compromis par l’usage qu’elle pourrait faire de sa servitude, en agrandissant la largeur du chemin. Dans ce cas, la prise du virage à droite de la pente du parking souterrain deviendrait techniquement difficile, voire dangereuse pour les conducteurs, d’autant plus si des mesures visant à combler l’absence de trottoir devraient être prises.

Le TAPI avait versé dans l’arbitraire en retenant que l’augmentation de trafic induite par les 20 nouveaux logements ne serait pas la cause de nuisances sous la forme de bouchons et de ralentissements, puisque de manière récurrente, les riverains du quartier se plaignaient déjà que la circulation sur cette voie étroite était saturée.

L’art. 15 LCI avait été violé. Elle réitérait ses vives inquiétudes et persistait à considérer que les mesures imposées par l’OCAN étaient insuffisantes. Il existait un risque que les trois habitats groupés en bordure de l’allée de chênes ne viennent mettre en danger leur survie. Le dossier ne renseignait pas sur l’état sanitaire de ces chênes, ni sur la distance et la profondeur de leurs racines, ni sur leur périmètre d’approvisionnement en eau, ni sur les risques qu’ils encourraient et partant les mesures constructives aptes à supprimer cette mise en danger. Elle réservait son appréciation en fonction des résultats de l’expertise devant porter sur ces questions. Certes, seule la partie nord du chemin historique E______ était inscrite à l’inventaire IVS, toutefois, ce chemin créait un lien entre deux axes de circulation, de sorte qu’un projet de construction réalisé en son milieu viendrait immanquablement accroître le trafic aussi sur la partie protégée.

Le département avait à tort ignoré la teneur de son PDCom, dont elle énumérait les éléments pertinents pour le cas d’espèce (l’accès, le trafic, la clause d’esthétique, la préservation des arbres), ainsi que ses préavis, alors même que son pouvoir d’appréciation ne se limitait pas aux autorisation dérogatoires.

b. B______, C______ et D______ ont conclu au rejet du recours en abordant chacun des griefs de la recourante.

Ils ont notamment relevé que le TAPI ne s’était pas fondé sur l’expertise mobilité du projet de construction voisin, mais sur les considérants de l’arrêt du Tribunal fédéral relatif audit projet. Pour la parcelle n° 2'233, le trottoir menait jusqu’à son cheminement piétonnier.

c. Le département a conclu au rejet du recours en discutant chacun des griefs de la recourante.

Il a en particulier précisé que les possibilités de densification le long du chemin E______ étaient plus que limitées, dès lors qu’au nord il se situait exclusivement en zone agricole et qu’au sud une seule parcelle demeurait non construite. Il avait été de plus unanimement reconnu que la charge du trafic sur cette voie de desserte, rectiligne, était essentiellement liée au trafic de transit, d’où la mise en place de plusieurs mesures visant à garantir la sécurité des usagers et la fluidité du trafic aux heures de pointe. Il ressortait du plan des aménagements extérieurs du 29 avril 2022 que l’accès piétons pour les constructions projetées avait été prévu au niveau du trottoir déjà existant.

d. Dans sa réplique, la commune a ajouté à ses précédentes écritures qu’il était « quasiment certain » que l’OCT ne se soit prononcé que sur la base des plans et photographies sans pouvoir donc appréhender la réalité pratique et concrète du site. L’absence d’inspections locales pour apprécier les particularités du site avait conduit à une densification de la zone 5 peu respectueuse des particularités locales qui avait nécessité un moratoire, suivi d’une modification de la LCI. Une telle inspection locale ou le renvoi du dossier au département pour instruction complémentaire s’imposait pour constater que même si le chemin E______ devait être épargné du jour au lendemain par le trafic de transit, il n’en demeurerait pas moins inadapté à un trafic dense.

S’agissant de la servitude inscrite en sa faveur, en autorisant le projet, un élargissement du chemin serait compromis, ce qui irait non seulement à l’encontre d’un droit réel limité, mais bien de l’intérêt public en la privant de traiter l’aggravation de la situation générée par une circulation grandissante. Inversement, si elle faisait usage de sa servitude, l’accès à la parcelle litigieuse pourrait être compromis, compte tenu de la problématique technique de la prise du virage à droite de la pente du parking souterrain.

Il tombait sous le sens que les chemins de campagne dont les bordures étaient composées de terre végétale et d’arbres étaient rapidement dégradés lorsque des véhicules les empruntaient en grand nombre. Le projet litigieux contribuerait de façon significative à une telle dégradation.

L’arboriste-conseil censé intervenir pendant le chantier ne pourrait avoir une influence que sur la méthodologie d’intervention des entreprises, alors que le projet devrait être revu sous l’angle de son implantation et de ses aménagements extérieurs pour éviter que les arbres concernés ne finissent par périr.

Le domaine de prise en compte du PDCom n’était pas limité aux autorisations dérogatoires basées sur l’art. 59 al. 4 LCI. Le PDCom ne saurait être relégué au rang des « préavis consultatifs ».

e. Les parties ont été informées, le 17 août 2023, que la cause était gardée à juger.

f. Leurs arguments et la teneur des pièces figurant à la procédure seront pour le surplus repris ci-dessous dans la mesure nécessaire au traitement du litige.

 

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             La recourante sollicite un transport sur place ainsi que des expertises sur les questions de la préservation des chênes et de la mobilité. Le TAPI aurait violé son droit d’être entendue en ne procédant pas à ces actes d’instruction.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 En l'espèce, le dossier contient des plans et des photos de la parcelle concernée. Les outils numériques, parmi lesquels figure le SITG (découlant de la loi relative au système d’information du territoire à Genève du 17 mars 2000 - LSITG - B 4 36), permettent d'apprécier avec précision l'environnement où le projet litigieux est censé prendre place, les caractéristiques architecturales du quartier, l'emplacement, les dimensions et le périmètre dans lequel il s'insérerait.

Les questions du trafic ayant cours sur ce chemin et des conséquences de son augmentation dans le cas de l’arrivée des habitants de 20 nouveaux logements, de même que celle de la sauvegarde des chênes sont suffisamment instruites, comme il sera vu ci-dessous.

Par appréciation anticipée des preuves, il apparaît que ni un transport sur place ni des expertises s’avèrent nécessaires ou utiles à la solution du litige. Il ne sera ainsi pas donné suite à ces demandes d’actes d’instruction de la recourante.

Pour cette même raison, le TAPI n’a pas violé son droit d’être entendue en n’accédant pas à ses demandes.

3.             Le recours porte sur l’autorisation globale de construire DD 2______ délivrée par le département le 16 août 2022 et confirmée par le TAPI dans son jugement du 11 mai 2023.

Le projet litigieux, dans sa version du 9 février 2022, approuvée par toutes les instances ayant émis des préavis, à savoir la CA, la DAC, l’OCT, l’OCAN, l’OU et la police du feu, sauf donc la commune qui s’y et déclarée défavorable, vise la construction, sur la parcelle no 2’233 de A______, d’une surface de plus de 10'700 m2, située en zone 5, d’un habitat groupé comprenant quatre groupes de deux bâtiments pour 20 logements d’un indice de densité de (30% THPE). Ce projet prévoit 19 places de stationnement pour habitants, deux places handicapés, quatre places visiteurs, cinq places pour motos et 60 places pour les vélos.

3.1 En vertu de l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2).

3.2 Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; ATA/349/2021 du 23 mars 2021 consid. 3).

3.3 Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités et n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu’un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/486/2023 du 9 mai 2023 consid. 6.1.1 et les références citées).

Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l'autorité administrative suit les préavis des instances consultatives, l'autorité de recours observe une certaine retenue, fonction de son aptitude à trancher le litige (ATA/422/2023 du 25 avril 2023 consid. 5.3 et les références citées). Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/423/2023 du 25 avril 2023 consid. 5.2 ; ATA/1261/2022 du 13 décembre 2022 consid. 4d et les références citées).

4.             La recourante se plaint d’une violation des art. 19 et 22 LAT, ainsi que 14 LCI, en lien avec l’accès au futur projet, qui ne serait garanti ni dans les faits ni juridiquement, et du danger que représenterait une circulation additionnelle induite par l’arrivée des habitants des 20 nouveaux logements.

4.1 L'art. 22 LAT prévoit qu'aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente (al. 1). L'autorisation est notamment délivrée si le terrain est équipé (al. 2 let. b). Selon l'art. 19 al. 1 LAT, un terrain est réputé équipé lorsqu'il est desservi d'une manière adaptée à l'utilisation prévue par des voies d'accès.

4.2 Une voie d'accès est adaptée à l'utilisation prévue lorsqu'elle est suffisante d'un point de vue technique et juridique pour accueillir tout le trafic de la zone qu'elle dessert (ATF 121 I 65 consid. 3a). Il faut aussi que la sécurité des usagers soit garantie sur toute sa longueur, que la visibilité et les possibilités de croisement soient suffisantes et que l'accès des services de secours et de voirie soit assuré. Selon la jurisprudence, la loi n'impose pas des voies d'accès idéales ; il faut et il suffit que, par sa construction et son aménagement, une voie de desserte soit praticable pour le trafic lié à l'utilisation du bien-fonds et n'expose pas ses usagers ni ceux des voies publiques auxquelles elle se raccorderait à des dangers excessifs (arrêt du Tribunal fédéral 1C_424/2019 du 2 avril 2020 consid. 3.1). La réalisation de la voie d'accès est juridiquement garantie lorsque le terrain peut être raccordé à une route du domaine public ou à une route privée que les utilisateurs du bâtiment ont le droit d'emprunter (arrêt du Tribunal fédéral 1C_387/2014 du 20 juin 2016 consid. 7.1).

4.3 L'art. 19 LAT comporte des notions indéterminées. Les autorités communales et cantonales disposent en ce domaine d'un important pouvoir d'appréciation (ATF 121 I 65 consid. 3a). Elles peuvent également se fonder sur les normes VSS, étant précisé qu'elles sont non contraignantes et doivent être appliquées en fonction des circonstances concrètes et en accord avec les principes généraux du droit dont celui de la proportionnalité. Elles ne doivent ainsi pas être appliquées de manière trop rigide et schématique (arrêts du Tribunal fédéral 1C_88/2019 du 23 septembre 2019 consid. 3.2 ; 1C_225/2017 du 16 janvier 2018 consid. 4.1 et 5.3.3 ; 1C_255/2017 du 24 octobre 2017 consid. 4.8).

4.4 Le Tribunal fédéral a déjà estimé qu'une situation insatisfaisante préexistante à un projet de construction ne saurait justifier le refus d'un permis de construire lorsque l'augmentation du trafic était modeste (arrêt du Tribunal fédéral 1C_225/2017 du 16 janvier 2018 consid. 5.3.3). La jurisprudence admet que si les conflits entre véhicules sont gérables, le cas échéant au moyen d'une manœuvre en marche arrière, la voie d'accès demeure adaptée (arrêt du Tribunal fédéral 1C_481/2018 du 20 mai 2020 consid. 7.2.2).

Le Tribunal fédéral a confirmé une autorisation de construire un immeuble de 23 appartements avec un voie d'accès d'une centaine de mètres et d'une largeur de 3 à 3,5 m avec des murets de part et d'autre. L'étroitesse du chemin n'était pas rédhibitoire compte tenu de surlargeurs prévues tous les 30 m environ permettant le croisement de voitures de tourisme (arrêt du Tribunal fédéral 1C_597/2019 du 9 octobre 2020). La chambre de céans a confirmé que le département n'avait ni excédé, ni abusé de son pouvoir d'appréciation en suivant le préavis positif de l'OCT (anciennement DGT) pour un projet de réalisation de 18 appartements en zone 5, lorsque le projet se situait proche de l'extrémité du chemin concerné qui présentait une largeur variable inférieure à 4,8 m sur la majorité, voire même de 3,4 m par endroit et qu'aucun accident n'avait été répertorié sur le tronçon (ATA/155/2021 du 9 février 2021).

4.5 Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, l'accroissement du trafic routier, s'il est raisonnable, ne crée pas une gêne durable au sens de l'art. 14 LCI ; de fait, l'accroissement du trafic engendré par de nouvelles constructions conformes à la destination de la zone, ne constitue pas un inconvénient grave au sens de l'art. 14 LCI (ATA/259/2020 du 3 mars 2020 consid. 7b et les arrêts cités).

4.6 Dans l’arrêt ATA/752/2021 précité, la chambre administrative s’est référée aux conclusions d’une expertise privée produite par les recourants et au préavis de la commune du 28 novembre 2018, selon lesquels le chemin E______ connaissait déjà des problèmes de trafic importants dont les riverains se plaignaient de façon récurrente. Ces problèmes étaient dus, selon l’expertise, au trafic « parasitaire » et non au trafic généré par les habitants des logements du quartier connectés sur le chemin E______, le trafic de transit étant même 3,5 fois plus important que le trafic généré par les habitants du quartier. Les chiffres retenus par cette étude étaient de 1’748 véhicules par jour, dont seuls 500 correspondaient aux véhicules des habitants du quartier.

Ce considérant renseigne suffisamment sur la teneur de l’expertise à laquelle la chambre de céans s’est référée dans l’affaire en cause, tout comme le Tribunal fédéral dans l’arrêt 1C_548/2021 précité, de sorte que le TAPI n’a pas violé le droit d’être entendue de la recourante en reprenant ce constat, sans que celle-ci n’ait accès à ladite expertise. En tout état, rien n’empêchait la commune d’en commander une pour son compte si elle estimait que les chiffres retenus ci-dessus ne seraient pas conformes à la situation réelle.

4.7 En l’espèce, le TAPI a non seulement mentionné la jurisprudence pertinente pour le cas à trancher, de sorte qu’il peut être pour le surplus renvoyé au jugement attaqué pour cet aspect, mais a aussi procédé à une analyse détaillée du dossier et tenu un raisonnement fouillé et convaincant pour parvenir à la conclusion que la parcelle en cause bénéficie d’un accès permettant les constructions projetées et que la circulation induite par les nouveaux arrivants ne constitue pas un inconvénient grave au sens de l’art. 14 LCI. Ce raisonnement doit ainsi être confirmé, étant relevé que les arguments de la recourante ne permettent pas de le remettre en cause.

Ainsi, le chemin E______ est limité à 30 km/h sur le tronçon, rectiligne, qui relie le chemin F______ à la parcelle litigieuse et plusieurs obstacles rétrécissent la chaussée pour empêcher le croisement de véhicules. Il fait également l’objet d’une restriction de circulation à l’heure de pointe du matin. Ces mesures, prises par la commune, sont aptes à démontrer qu’il accueille notamment du trafic de transit dans la journée.

Il est constant que la parcelle des intimées se trouve au bout du quartier desservi par le chemin E______, en direction de la route de A______, avant que ce chemin ne longe sur sa seconde moitié la zone agricole. Dans sa dernière version du 9 février 2022, le projet prévoit 19 places de stationnement pour habitants, deux places handicapés, quatre places visiteurs, cinq places pour motos et 60 places pour les vélos.

Dans le cadre de la procédure relative au projet de construction de 53 logements sur la parcelle n° 1'099 située en face du projet litigieux, la chambre administrative a, dans l’arrêt ATA/752/2021 précité, retenu que la parcelle en cause était équipée d’une manière adaptée à l’utilisation prévue via son accès par le chemin E______, l’augmentation de trafic générée par les véhicules des habitants des nouveaux bâtiments n’étant pas susceptible de rendre impraticable cette voie d’accès. Dans son arrêt du 24 février 2023, le Tribunal fédéral a confirmé cette appréciation, retenant notamment que l’accroissement de trafic généré par le projet en cause restait tolérable, au vu de la charge de trafic actuelle et que des possibilités de croisement existaient et étaient suffisantes (arrêt 1C_548/2021 déjà cité, consid. 10.2.1 et 10.2.4). Certes, l’accroissement du trafic devant résulter de l’adjonction des 20 logements, accompagnés d’une vingtaine de places de stationnement voitures, ne va pas fluidifier le trafic. Il ne va toutefois pas non plus rendre ce chemin impraticable, ce que la recourante ne rend pas même vraisemblable. Il n’est pas besoin d’une (nouvelle) expertise pour parvenir à ce constat. S’agissant des nuisances liées à ce trafic supplémentaire, le projet autorisé est conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone dans laquelle il s’inscrit.

L’OCT, instance spécialisée en matière de mobilité et de sécurité routière, a finalement émis un préavis favorable, sans émettre la moindre réserve quant à la capacité de l’accès prévu. Il s’est avant cela penché sur le dossier à tout le moins à trois reprises et a obtenu la modification du projet litigieux. Comme retenu à juste titre par le TAPI, il ressort de ses différents préavis qu’il a cherché à améliorer les conditions de visibilité du côté nord du débouché de l’accès privé sur le chemin E______, d’insertion sur la parcelle des véhicules en provenance du sud dudit chemin, ainsi que du croisement des véhicules sur l’esplanade située avant la rampe d’accès au parking souterrain. Le fait que le chemin E______ ne respecterait par la largeur minimale préconisée selon la norme VSS 640 050, qui n'a pas force obligatoire, ne saurait conduire à l'annulation de l'autorisation de construire litigieuse. Il sera noté que ledit chemin est d’ores-et-déjà emprunté par du trafic de transit nonobstant cet élément. Enfin, la police du feu a émis un préavis positif, manifestant ainsi la compatibilité du concept sécurité incendie notamment sur les questions d'accès.

C’est vainement que la recourante soutient que la rampe d’accès et les trois chênes amenés à être plantés le long du chemin E______ empièteraient sur l’assiette de la servitude d’usage à destination de route dont elle bénéficie. Il ressort en effet le contraire des plans visés ne varietur nos 4______, 5______ et 6______ sur la base desquels le TAPI est parvenu au constat, que la recourante ne parvient pas à annihiler, que la pente de la rampe d’accès atteignait le niveau du terrain naturel avant le virage à droite pour rejoindre le domaine public. L’accès projeté n’empêcherait donc pas la mise en œuvre de ladite servitude.

La recourante ne peut valablement remettre en cause le fait que la parcelle n° 2’033 bénéficie d’un accès direct à la voie publique, de sorte qu’aucune servitude de passage n’est nécessaire.

C’est donc à juste titre que le TAPI a retenu que l'accès aux habitas groupés projetés était juridiquement et techniquement garanti.

Enfin, seule la partie nord du chemin E______ est inscrite à l’inventaire IVS, ce que la recourante concède finalement, alors que le projet auquel elle s’oppose se situe sur sa partie sud. Elle ne convainc pas avec sa dernière argumentation selon laquelle les habitants des 20 nouveaux logements, qui emprunteraient le partie nord du chemin pour rejoindre la route de A______, gâcheraient irrémédiablement ce chemin en roulant sur les bas-côté, ce qui au demeurant pourrait déjà être le cas du trafic de transit quotidien.

Le grief de la recourante sera donc écarté.

5.             La recourante soutient encore que le projet contreviendrait à son PDCom et à l’art. 15 LCI.

5.1 Sur tout le territoire du canton, nul ne peut, sans y avoir été autorisé, notamment, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail (art. 1 al. 1 let. a LCI). Dès que les conditions légales sont réunies, le département est tenu de délivrer l'autorisation de construire (art. 1 al. 6 LCI).

5.2 Le PDCom fixe les orientations futures de l'aménagement de tout ou partie du territoire d'une ou plusieurs communes. Il est compatible avec les exigences de l'aménagement du territoire du canton, contenues notamment dans le PDCn (art. 10 al. 1 et al. 2 LaLAT).

La fiche A04 du PDCn, intitulée « Favoriser une utilisation diversifiée de la zone 5 », a pour objectif la poursuite de la densification sans modification de zone de la zone villas en favorisant l'habitat individuel groupé. Elle vise une accentuation de la densification de la zone villas aux abords de l'agglomération, alors que les secteurs relevant de la protection du patrimoine et des sites devraient conserver une urbanisation plus légère. Cette fiche donne mandat aux communes de proposer, dans leurs PDCom, des stratégies communales pour leur zone villas en identifiant les secteurs à densifier, les éléments remarquables à protéger, le maillage arborisé à maintenir ou à créer, les espaces verts et publics à créer. Le plan directeur localisé adopté par une commune et approuvé par le Conseil d'État a force obligatoire pour ces autorités. Il ne produit aucun effet juridique à l’égard des particuliers, lesquels ne peuvent former aucun recours à son encontre, ni à titre principal, ni à titre préjudiciel. Pour autant que cela soit compatible avec les exigences de l'aménagement cantonal, les autorités cantonales, lors de l'adoption des plans d'affectation du sol relevant de leur compétence, veillent à ne pas s'écarter sans motifs des orientations retenues par le plan directeur localisé (art. 10 al. 8 LaLAT).

5.3 Selon la jurisprudence, un projet de construction conforme au droit cantonal ne peut être refusé au seul motif qu'il contreviendrait à un PDCom (arrêt du Tribunal fédéral 1C_257/2013 du 13 janvier 2014 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1A.154/2002 du 22 janvier 2003). Par « conforme au droit cantonal », il faut entendre conforme au plan d'affectation (nutzungskonformes Bauvorhaben). En effet, le refus d'une autorisation au seul motif que le projet de construction contreviendrait au PDCom, reviendrait à donner à ce plan directeur un effet anticipé inadmissible (unzulässige Vorwirkung) et à aboutir à une modification du plan d'affectation en vigueur (arrêt du Tribunal fédéral 1A.154/2002 précité consid. 4.1). Toutefois, il ne faut pas tirer de cette argumentation la conclusion que le plan directeur ne serait d'aucune importance dans le cadre d'une autorisation de construire. L'effet obligatoire d'un tel plan se déploie là où l'ordre juridique confère un pouvoir d'appréciation ou introduit des concepts juridiques indéterminés ménageant de la sorte une marge de manœuvre. Si le droit applicable exige une pesée globale des intérêts, alors le contenu du plan directeur doit être considéré, dans la pesée des intérêts, comme le résultat obligatoire du processus de coordination spatiale (räumlicher Abstimmungsprozess), étant précisé que le plan directeur n'exprime les besoins spatiaux que du point de vue de la collectivité publique. Reste réservée la pesée des intérêts qui doit être faite dans un cas particulier en prenant aussi en compte les intérêts publics qui ne relèvent pas de l'aménagement du territoire ainsi que les intérêts privés. Le plan directeur s'impose aux seules autorités chargées des tâches dont l'accomplissement a des effets sur l'organisation du territoire, et non aux autorités judiciaires qui ont pour fonction d'examiner la légalité des actes étatiques. Dans le cadre d'un recours interjeté par une personne privée, il y a lieu de vérifier si le refus de l'autorisation sollicitée dans cette affaire repose sur une pesée globale de tous les intérêts publics et privés déterminants, qui ne soit pas entachée d'un vice lié à l'exercice du pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 1A.154/2002 précité consid. 4.2 ; ATA/639/2020 du 30 juin 2020 consid. 5c).

5.4 Au niveau cantonal, le respect des plans directeurs est assuré par la direction de la planification cantonale, cette instance étant, selon la jurisprudence, celle qui est le plus à même de déterminer si une révision d'un PDCom est en cours, ainsi que l'impact de ce projet sur une requête en autorisation de construire (ATA/498/2020 du 19 mai 2020 consid. 4d).

5.5 En l'espèce, la demande d'autorisation de construire litigieuse, déposée le 8 juillet 2021, est postérieure à la modification de l'art. 59 LCI entrée en vigueur le 28 novembre 2020 (art. 156 al. 5 LCI ; ATA/156/2021 du 9 février 2021 consid. 3). C'est donc l'art. 59 LCI en vigueur dès le 28 novembre 2020 qui est applicable, ce que le TAPI a à juste titre retenu.

5.6 L’art. 59 al. 1 LCI, étant relevé que la dérogation prévue par son al. 4 ne s’applique pas au cas d’espèce qui concerne un projet de quatre habitats groupés (30% THPE), la surface de la construction, exprimée en m2 de plancher, ne doit pas excéder 25% de la surface de la parcelle. Cette surface peut être portée à 27,5% lorsque la construction est conforme à un standard de haute performance énergétique, respectivement à 30% lorsque la construction est conforme à un standard de THPE, reconnue comme telle par le service compétent.

5.7 Selon l’art. 15 al. 1 LCI, le département peut interdire ou n’autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l’intérêt d’un quartier, d’une rue ou d’un chemin, d’un site naturel ou de points de vue accessibles au public.

Sa décision se fonde notamment sur le préavis de la CA ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la commission des monuments, de la nature et des sites. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département (art. 15 al. 2 LCI).

La compatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, exigée par l'art. 15 LCI est une clause d'esthétique qui fait appel à des notions juridiques imprécises ou indéterminées, dont le contenu varie selon les conceptions subjectives de celui qui les interprète et selon les circonstances de chaque cas d'espèce ; ces notions laissent à l'autorité une certaine latitude de jugement. Lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est mieux en mesure d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l'autorité de recours s'impose une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, en matière économique, de subventions et d'utilisation du sol, notamment en ce qui concerne l'esthétique des constructions (ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3d ; ATA/639/2020 précité consid. 4c ; ATA/45/2019 du 15 janvier 2019 consid. 5b).

5.8 Selon une jurisprudence constante, s'ils sont favorables, les préavis de la CA n'ont, en principe, pas besoin d'être motivés (ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3g ; ATA/414/2017 du 11 avril 2017 confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_297/2017 du 6 décembre 2017 consid. 3.4.2).

6.             En l’espèce, comme l'a retenu à juste titre le TAPI, tous les préavis des instances spécialisées consultées sont favorables, sauf celui de la commune. La CA s'est penchée deux fois sur le projet. Elle a, après son premier examen, sollicité une modification dans son préavis du 21 avril 2021, quant au choix de l’emplacement de la rampe et son volume, relevant que le premier emplacement péjorerait les dégagements de certains appartements et la qualité des aménagements extérieurs. Elle a aussi exigé que les jardins ne soient « en aucun cas clôturés, pour garantir la qualité paysagère autour des plots, qui bénéficient d’un grand parc très agréable ». Son second préavis, du 12 octobre 2021, est uniquement conditionné à son approbation préalable du choix des teintes et matériaux choisis. Elle n'a donc émis aucune réserve concernant une quelconque incompatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier. La brièveté de sa motivation, que la loi et la jurisprudence n'exigent au demeurant pas, ne saurait signifier que cette instance n'aurait pas examiné de manière complète et circonstanciée l'intégration des constructions projetées dans le site et le quartier. L’analyse de la CA, composée de spécialistes en matière d'architecture et d'urbanisme, apparaît parfaitement défendable. Aucun élément ne permet de retenir que la CA n'aurait, dans le cas présent, pas disposé des éléments suffisants pour procéder à un examen minutieux de la clause d'esthétique contenue dans l'art. 15 al. 1 LCI.

Par ailleurs, le législateur a souhaité permettre à la zone villa d'évoluer et de se densifier, notamment par la création d'habitats groupés, qui modifieront à terme sa configuration. Il a eu conscience de cette évolution et, en augmentant les indices d'utilisation du sol dérogatoires susceptibles d'être appliqués dans cette zone, a souhaité encourager la réalisation de ces nouvelles formes d'habitation. L'exiguïté du territoire et la pénurie de logements sont en effet des problèmes auxquels le législateur a jugé nécessaire d'apporter des solutions (ATA/1274/2017 du 12 septembre 2017 ; ATA/284/2016 du 5 avril 2016 ; ATA/828/2015 du 11 août 2015, confirmé par le Tribunal fédéral dans son arrêt 1C_476/2015 du 3 août 2016).

De plus, l'obligation de densification émanant des autorités genevoises résulte du PDCn 2030, adopté le 20 septembre 2013 et approuvé par le Conseil fédéral le 28 janvier 2015. Ce document fondateur illustre leur réelle intention de procéder aux aménagements nécessaires. Or, le projet querellé s'inscrit dans cette optique, puisque, pour la parcelle visée, il n'est pas contesté que celle-ci est à destination d'utilisation diversifiée de la zone villa avec comme objectif de planification directrice la densification sans modification de zone de la zone villa, en favorisant l'habitat individuel groupé (fiche A04 ; ATA/498/2020 du 19 mai 2020 consid. 4e).

Il s'ensuit que le projet litigieux n'apparaît pas incompatible avec le nouveau visage du quartier, tel qu'il est appelé à se dessiner, conformément à la volonté du législateur (ATA/1485/2017 du 14 novembre 2017 consid. 8d ; ATA/284/2016 du 5 avril 2016 consid. 7e), étant souligné que la 5ème zone ne bénéficie en soi d'aucune protection particulière, de sorte que les constructions n'y sont pas soumises, s'agissant de leur expression architecturale, à une contrainte autre que celle résultant de la clause d'esthétique de l'art. 59 al. 4 let. a LCI (ATA/1485/2017 du 14 novembre 2017 consid. 8d ; ATA/1274/2017 du 12 septembre 2017 consid. 6f ; ATA/284/2016 du 5 avril 2016 consid. 7e).

Ainsi, c'est à bon droit que le TAPI a jugé que l’opposition à la densification du secteur en question situé en zone 5 formulée par la recourante, qui entend avant tout substituer sa propre appréciation à celle de l'autorité intimée, ne peut être suivie. En définitive, il ne peut pas être reproché au département, en présence de préavis favorables, en particulier ceux de la CA, de l’OU et de l’OCAN, d'avoir délivré l'autorisation de construire querellée. Le fait qu'il ait, en tenant compte de tous les intérêts en présence, procédé à une appréciation différente de celle de la recourante ne permet pas de retenir qu'il se serait fondé sur des critères et considérations dénués de pertinence et étrangers au but visé par les art. 59 al. 1 et 15 LCI. La chambre de céans, qui doit faire preuve de retenue et respecter la latitude de jugement conférée au département, ne saurait en corriger le résultat en fonction d'une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi ne lui permet pas (art. 61 al. 2 LPA).

En l’absence d’application de la dérogation prévue à l’art. 59 al. 4 et 4bis LCI, l’existence et le contenu du PDCom n’ont pas d’importance décisive, étant rappelé que le PDCom ne peut seul faire opposition à l'application du droit cantonal, respectivement à un projet de construction conforme aux normes de la zone 5.

Les instances compétentes, à savoir l’OCAN, l’OU et l’OCT, ont préavisé favorablement le projet, sans émettre de quelconque réserve, quant à son intégration sous l’angle de la végétation environnante et des voies d’accès.

Le TAPI a, à leur suite, à juste titre retenu que l’OCAN avait veillé à une implantation du projet permettant de préserver au mieux la végétation existante, à l’exception de l’abattage d’un chêne. Cette instance a rendu pas moins de six préavis. Cet abattage a dûment été autorisé par l’OCAN, instance spécialisée, sous réserve de l’accord formel du propriétaire de la parcelle sur laquelle il se trouve. En définitive, quand bien même la recourante estime que son état sanitaire ne justifierait pas son abattage, celui-ci a été autorisé par l’OCAN. En compensation, l’OCAN a exigé que trois nouveaux chênes soient replantés, pour CHF 24'000.-, le long du chemin E______, ainsi qu’une haie vive plantée de cinq essences. L’OCAN a aussi conditionné son préavis à la prise de toutes les précautions nécessaires (barrières type MÜBA à poser à l’aplomb des couronnes) afin de protéger valablement les arbres maintenus à proximité des travaux, à savoir l’allée de chênes située au nord-est de la parcelle. L’OCAN a aussi requis qu’un arboriste‑conseil soit mandaté pour le suivi des travaux à proximité des arbres conservés et pour la mise en place des mesures prophylactiques.

Enfin, la recourante n’a à ce jour pas manifesté son intention de faire usage de sa servitude de route, créée en 1974, pour élargir le chemin E______. Elle ne remet de plus pas en cause le constat du département selon lequel la parcelle adjacente à l’ouest ne comporte pas de servitude similaire. Dans la présente procédure, elle a plutôt manifesté son intention de maintenir ce chemin dans son état actuel, étant rappelé la protection dont il bénéficie sur sa partie nord, au-delà de la parcelle litigieuse.

Au vu de ce qui précède, le département et le TAPI n’ont pas excédé leur pouvoir d'appréciation ni violé le droit en délivrant l'autorisation de construire DD 314’799, respectivement en la confirmant.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

7.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 2’000.- sera mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 2’000.- sera allouée conjointement à B______, C______ et D______, à la charge de la recourante (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 juin 2023 par la commune de A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 mai 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2'000.- à la charge de la commune de A______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 2'000.- conjointement à B______, C______ et D______, à la charge de la commune de A______ ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF-RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les 30 jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Lucien LAZZAROTTO, avocat de la recourante, à Me Michel D'ALESSANDRI, avocat des intimées, au département du territoire - OAC ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF et Valérie LAUBER, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. MAZZA

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :