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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1436/2023

ATA/609/2023 du 09.06.2023 sur JTAPI/551/2023 ( MC ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1436/2023-MC ATA/609/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 juin 2023

en section

 

dans la cause

 

COMMISSAIRE DE POLICE recourant

contre

A______ intimé
représenté par Me Dina Bazarbachi, avocate

_________



Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 15 mai 2023 (JTAPI/551/2023)


EN FAIT

A. a. A______ se dit né le ______2001 ainsi que ressortissant d'Algérie. Il est démuni de tout document d'identité.

b. Il s'est vu notifier le 13 juillet 2020 par l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une décision de renvoi de Suisse, au sens de l'art. 64 à la la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20 LEI).

c. Depuis 2019, il a fait l'objet de onze condamnations par les instances pénales suisses, principalement pour des infractions à la LEI (séjour illégal, entrée illégale et non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée), à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121 ; consommation et trafic de stupéfiants) et au code pénal suisse (violation de domicile, dommages à la propriété, vol, lésions corporelles simples, menaces).

d. Le 22 février 2022, il a fait l'objet d'une interdiction de pénétrer dans le canton de Genève pour une durée de douze mois, à la suite de son implication dans un trafic de stupéfiants.

e. Par décision du 23 septembre 2022, le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) a rendu une décision d'interdiction d'entrer en Suisse valable du 26 octobre 2022 au 25 octobre 2027.

f. A______ a été interpelé le 17 avril 2023 à Genève pour infractions à la LEI, empêchement d'accomplir un acte officiel et infractions à la LStup.

g. Selon le rapport d'arrestation, il s'est soustrait le 14 avril 2023 à un contrôle de police en prenant la fuite, durant laquelle il a jeté au sol 122.52 gr de résine de cannabis et 9.19 gr de cocaïne. Un ordre d'arrestation provisoire a été émis à son encontre et la police l'a interpelé le 17 avril 2023.

h. La perquisition du domicile de B______, mère de l’enfant âgé de 18 mois dont il indique être le père biologique, a permis la découverte de 28.28 gr de résine de cannabis, 0.83 gr de cocaïne, ainsi que divers effets personnels appartenant à A______, que ce dernier portait lors des évènements du 14 avril 2023.

i. Entendu par les services de police, l'intéressé a déclaré que les effets trouvés chez B______ lui appartenaient et que les stupéfiants étaient destinés à sa consommation personnelle. Il a nié les faits qui s'étaient déroulés le 14 avril 2023 et le fait de s'adonner au trafic de stupéfiants. S'agissant de sa situation personnelle, il a expliqué n'avoir pas de moyens légaux de subsistance et n'être pas en mesure de payer les frais de son rapatriement. Sa compagne et sa fille vivaient à Genève et il n'avait pas de domicile fixe en Suisse. Il venait à Genève depuis chez sa sœur, qui vivait à Annemasse/France et dont il possédait la clé de l’appartement, pour voir sa compagne et sa fille.

j. Le 18 avril 2023, il a été condamné par ordonnance pénale du Ministère public notamment pour infraction à l'art. 19 al. 1 let. d LStup, en référence aux éléments de son arrestation, contre laquelle il a formé opposition.

B. a. Le 18 avril 2023, en application de l'art. 74 LEI, le commissaire de police a prononcé à l’encontre de A______ une mesure d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée (interdiction d'accès au canton de Genève) pour une durée de vingt-quatre mois.

b. Ce dernier a formé opposition contre cette décision par courrier du 28 avril 2023 auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

c. A______ ne s'est pas présenté à l'audience du 12 mai 2023, bien que dûment convoqué.

Son conseil a conclu à la réduction de la mesure dans sa durée et dans son étendue géographique, celle-ci ne devant pas s'étendre au-delà du centre-ville de Genève.

La représentante du commissaire de police a conclu au rejet de l'opposition et à la confirmation de l'interdiction pour une durée de vingt-quatre mois.

d. Par jugement du 15 mai 2023, le TAPI a partiellement admis l’opposition, en confirmant la décision d’interdiction de pénétrer dans une région déterminée, mais en la réduisant à une durée de 18 mois. La décision précédente d’interdiction pour une durée de douze mois avait pour but d’éloigner A______ du territoire et de servir d’avertissement en cas de récidive, de sorte qu’il ne pouvait pas en faire abstraction puisque l’intéressé s’y était montré indifférent. Faisant l’objet d’une décision de renvoi, il avait néanmoins sa fille à Genève, qui vivait avec sa mère, chez laquelle il semblait séjourner par périodes. Il ne pouvait pas être fait abstraction de son intérêt à ne pas quitter le canton de Genève, sauf à ne pas appliquer le principe de proportionnalité. Une durée de 24 mois était trop longue au regard de l’importance relative du trouble à l’ordre public dont il s’était rendu fautif et de son intérêt à ne pas être éloigné de Genève pendant une telle durée.

C. a. Par acte du 30 mai 2023, le commissaire de police a interjeté recours contre ce jugement. Il a conclu à son annulation et à la confirmation de sa décision du 18 avril 2023 faisant interdiction à A______ de pénétrer dans le canton de Genève pour une durée de 24 mois.

A______ était un délinquant et un criminel multirécidiviste, qui faisait encore l’objet de deux procédures pénales en cours pour trafic de stupéfiants, notamment de cocaïne, de vols et de violences physiques, notamment des lésions corporelles simples, n’avait jamais cessé ses actes pénalement répréhensibles malgré les condamnations et s’était vu refuser sa libération conditionnelle par le Tribunal d'application des peines et des mesures le 20 septembre 2022. Il troublait et représentait une menace importante envers l’ordre et la sécurité publics à Genève, n’ayant en outre respecté aucune des mesures prises à son encontre et étant insensible aux nombreuses condamnations dont il était l’objet. Le raisonnement du TAPI était choquant et arbitraire et violait gravement l’art. 74 LEI, à tout le moins était constitutif d’un abus de son pouvoir d’appréciation. A______ faisant l’objet d’une décision définitive de renvoi de Suisse, étendue à l’ensemble de l’espace Schengen, le principe de proportionnalité ne pouvait être invoqué pour lui permettre de demeurer dans un canton Suisse. Aucun document n’attestait de sa paternité laquelle reposait sur ses seules affirmations, alors qu’il lui appartenait de procéder à sa reconnaissance selon les formes et procédures légales. Réduire la durée de son interdiction de périmètre en raison de la présence à Genève d’un enfant dont la paternité n’était pas établie revenait à vider la décision de renvoi et celle d’interdiction d’entrée en Suisse de toute substance.

À titre exemplatif, il a rappelé et documenté que la seule commission d’un vol suffisait dans les cantons de Zürich et de Berne pour que l’autorité cantonale compétente prononce une interdiction de pénétrer dans le canton concerné pour une durée de deux ans.

b. A______ a conclu au rejet du recours. Il n’avait pas encore pu reconnaitre son enfant en raison de sa situation administrative irrégulière, mais elle avait été démontrée lors de la perquisition du 17 avril 2023. Il n’était pas un criminel, comme le soutenait le commissaire de police, et n’avait pu se présenter à l’audience du TAPI pour des raisons de maladie et non parce qu’il s’en désintéressait. Une interdiction territoriale de la durée maximale de 24 mois devait rester exceptionnelle, alors que le commissaire de police la généralisait à chaque fois que l’administré avait fait l’objet d’une première interdiction. Les infractions qu’il avait commises relevaient de la petite délinquance et la sécurité publique n’avait jamais été réellement mise en danger. Sa fille de 18 mois avait la nationalité suisse et l’empêcher d’entretenir des relations personnelles avec elle dans son canton relevait de l’arbitraire. Étendre la durée de l’interdiction de 18 à 24 mois était inhumain. Il ne comptait pas quitter la Suisse, mais régulariser sa situation administrative pour pouvoir vivre en toute légalité auprès d’elle.

c. Le commissaire n’a pas répliqué dans le délai imparti.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Selon l'art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10), la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 31 mai 2023 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

3.             À teneur dudit art. 10 LaLEtr, la chambre de céans est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle en cette matière (al. 2 2ème phr.) ; elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; le cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l'étranger (al. 3 1ère phr.).

4.             Le litige porte sur la durée de l’interdiction de pénétrer dans une région déterminée.

4.1 Aux termes de l'art. 74 al. 1 let. a LEI, l'autorité cantonale compétente peut enjoindre à un étranger de ne pas pénétrer dans une région déterminée si celui-ci n'est pas titulaire d'une autorisation de courte durée, d'une autorisation de séjour ou d'une autorisation d'établissement et trouble ou menace la sécurité et l'ordre publics.

4.2 Selon le message du Conseil fédéral du 22 décembre 1993 (FF 1994 I 325), les étrangers dépourvus d'autorisation de séjour et d'établissement n'ont pas le droit à une liberté totale de mouvement ; s'agissant d'une atteinte relativement légère à la liberté personnelle de l'étranger concerné, « le seuil, pour l'ordonner, n'a pas été placé très haut » ; il suffit de se fonder sur la notion très générale de la protection des biens par la police pour définir le trouble ou la menace de la sécurité et de l'ordre publics.

4.3 La mesure d'interdiction de pénétrer dans un périmètre déterminé vise en particulier à combattre le trafic de stupéfiants ainsi qu'à maintenir les requérants d'asile éloignés des scènes de la drogue (arrêts du Tribunal fédéral 6B_808/2011 du 24 mai 2012 consid. 1.2 ; 2C_437/2009 du 27 octobre 2009 consid. 2.1).

Des indices concrets de délits commis dans le milieu de la drogue ou des contacts avec des extrémistes suffisent à justifier une telle mesure, de même que la violation grossière des règles tacites de la cohabitation sociale (ATA/607/2013 du 12 septembre 2013 consid. 4 ; ATA/46/2013 du 25 janvier 2013 consid. 3 et les références citées). Le simple soupçon qu'un étranger puisse commettre des infractions dans le milieu de la drogue justifie une mesure prise en application de l'art. 74 al. 1 let. a LEI ; en outre, de tels soupçons peuvent découler du seul fait de la possession de stupéfiants destinés à sa propre consommation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 3.1 et les arrêts cités). De plus, même si la simple présence en des lieux où se pratique le commerce de la drogue ne suffit pas à fonder un soupçon de menace à l'ordre et à la sécurité publics, tel est le cas lorsque la personne concernée est en contacts répétés avec le milieu de la drogue (arrêt du Tribunal fédéral 2C_437/2009 précité consid. 2.1). Le Tribunal fédéral a du reste confirmé une telle mesure visant un recourant qui avait essentiellement été condamné pour de simples contraventions à la LStup (arrêt du Tribunal fédéral 6B_808/2011 précité).

4.4 L'assignation d'un lieu de résidence ou l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée fondée sur l'art. 74 al. 1 let. b LEI vise à permettre le contrôle du lieu de séjour de l'intéressé et à s'assurer de sa disponibilité éventuelle pour la préparation et l'exécution de son renvoi de Suisse par les autorités (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.1), mais aussi, en tant que mesure de contrainte poursuivant les mêmes buts que la détention administrative, à inciter la personne à se conformer à son obligation de quitter la Suisse (ATF 144 II 16 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_828/2017 du 14 juin 2018 consid. 4.1 ; CHATTON/MERZ, in Code annoté de droit des migrations, vol. II : Loi sur les étrangers [LEtr], 2017 n° 22 ad art. 74 LEtr).

4.5 La mesure d'interdiction de pénétrer peut s'appliquer à l'entier du territoire d'un canton (arrêts du Tribunal fédéral 2C_231/2007 du 13 novembre 2007 ; 2A.253/2006 du 12 mai 2006), même si la doctrine relève que le prononcé d'une telle mesure peut paraître problématique au regard du but assigné à celle-ci (Tarkan GÖKSU, op. cit., p. 725 n. 7). La portée de l'art. 6 al. 3 LaLEtr, qui se réfère à cette disposition et en reprend les termes, ne peut être interprétée de manière plus restrictive. C'est en réalité lors de l'examen du respect par la mesure du principe de la proportionnalité que la question de l'étendue de la zone géographique à laquelle elle s'applique doit être examinée.

4.6 L'art. 74 LEI ne précise pas la durée de la mesure. Celle-ci doit répondre au principe de proportionnalité, à savoir être adéquate au but visé et rester dans un rapport raisonnable avec celui-ci (ATF 142 II 1 consid. 2.3). Elle ne peut pas être ordonnée pour une durée indéterminée (arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.1 ; 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.3).

Des durées inférieures à six mois ne sont guère efficaces (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 précité consid. 4.2) ; vers le haut, des mesures d'une durée d'une année (arrêt du Tribunal fédéral 2C_330/2015 du 26 novembre 2015 consid. 3.2 ; ATA/1347/2018 du 13 décembre 2018 consid. 6), voire de deux ans (arrêt du Tribunal fédéral 2C_828/2017 du 14 juin 2018 consid. 4.5) ont été admises.

4.7 La chambre de céans a confirmé l’interdiction du territoire de tout le canton pour une durée de douze mois prononcée contre une ressortissante française condamnée à plusieurs reprises pour infractions à la LStup qui admettait consommer des stupéfiants et s’adonner au trafic de ceux-ci (ATA/255/2022 du 10 mars 2022).

5.             En l’espèce, le recourant ne possède aucun titre de séjour en Suisse. Il n’a pas déféré à la décision de l’OCPM du 13 juillet 2020 prononçant son renvoi de Suisse.

Entre le 1er mars 2019 et 22 août 2022, il a fait l’objet de onze condamnations, pour séjour illégal, infraction à la LStup, vol, dommages à la propriété, violation de domicile, menaces, lésions corporelles simples. S’y ajoute également une condamnation pour non-respect d’une assignation à un lieu de résidence ou d’une interdiction de pénétrer dans une région déterminée. En lien avec les délits, il a été condamné à des peines pécuniaires et à des peines fermes, dont privatives de liberté, la dernière pour une durée de sept mois. Il faisait en outre l’objet de deux autres procédures pénales au moment du jugement entrepris, pour injures, voies de fait, lésions corporelles simples et infraction à la LEI, ainsi que pour infraction à la LStup, empêchement d’accomplir un acte officiel et infraction à la LEI.

L'ensemble de ces éléments correspond indubitablement au simple soupçon que l'étranger puisse commettre des infractions dans le milieu de la drogue, étant rappelé que la jurisprudence du Tribunal fédéral retient que de tels soupçons peuvent découler du seul fait de la possession de stupéfiants destinés à sa propre consommation.

Les conditions pour le prononcé d’une mesure d’interdiction de pénétrer dans une région déterminée sont donc réunies.

6.             Le recourant considère que la décision entreprise viole gravement l’art. 74 LEI, heurte de manière choquante le sentiment de justice et d’équité et est constitutive d’un abus du pouvoir d’appréciation, le principe de proportionnalité ne permettant pas de faire abstraction de la décision de renvoi.

6.1 Le principe de la proportionnalité, garanti par les art. 5 al. 2 et 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 140 I 218 consid. 6.7.1 ; 136 IV 97 consid. 5.2.2 ; 135 I 169 consid. 5.6).

La mesure doit être nécessaire et suffisante pour empêcher que la sécurité et l'ordre publics ne soient troublés ou menacés. Il faut en outre qu'il existe un rapport raisonnable entre les effets de la mesure sur la situation de la personne visée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 137 I 167 consid. 3.6 ; 136 I 197 consid. 4.4.4). En particulier, la délimitation géographique et la durée de la mesure doivent être prises en considération en fonction du but poursuivi. En matière d'interdiction de pénétrer sur une partie du territoire, le périmètre d'interdiction doit être déterminé de manière à ce que les contacts sociaux et l'accomplissement d'affaires urgentes puissent rester possibles (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.3 ; 2A.514/2006 du 23 janvier 2007 consid. 3.3.1 ; 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 3c ; ATA/748/2018 du 18 juillet 2018 consid. 4b).

6.2 En l’occurrence, l’intimé ne dispose d’aucun lieu de vie en Suisse, hormis le domicile à Genève de sa compagne, où quelques affaires lui appartenant ont été retrouvées. Il parait également vivre chez sa sœur en France voisine.

Il ne peut se prévaloir d’aucun motif pour expliquer sa présence sur le territoire genevois. Il n’établit pas sa paternité sur l’enfant qu’il prétend être le sien et n’explique pas les démarches concrètes qu’il aurait entamées à cet égard en vue d’obtenir les documents d’identité nécessaires à cette reconnaissance. Rien ne s’oppose en tout état à ce qu’il exerce des relations personnelles avec elle en France voisine, étant relevé que tant la mère que l’enfant sont titulaires de la nationalité suisse et sont en mesure de traverser la frontière. Il ne dispose donc d’aucun intérêt privé à protéger, qui supplanterait la nécessité de préserver la sécurité et la santé publiques, puisqu’il a fait l’objet de multiples condamnations pénales pour infractions à la LStup, mais également pour violation de domicile, vol et dommages à la propriété et lésions corporelles simples contre sa compagne, a été condamné à des peines privatives de liberté, et que d’autres procédures pénales sont en cours contre lui.

Il s’agit en outre d’une seconde mesure et il n’a eu aucune considération pour la première décision d’interdiction territoriale prononcée à son encontre le 22 février 2022, pour une durée de douze mois, ni pour l’interdiction d’entrée valable jusqu’au 27 octobre 2027, soit encore pour plus de quatre années.

Une durée de 18 mois parait donc faible au regard de ces circonstances et le commissaire n’a pas abusé du large pouvoir d’appréciation qui est le sien en considérant qu’une durée 24 mois était nécessaire pour préserver la sécurité et la santé publiques, apte à atteindre ledit but et proportionnée au sens étroit, permettant ainsi d’éviter l’examen des conditions pour une éventuelle détention administrative.

De surcroît, la réduction opérée par le TAPI, motivée par la paternité du recourant ne peut en conséquence être confirmée notamment en l’absence de tout document établissant celle-ci.

Cet éloignement est conforme à la jurisprudence et respecte le principe de la proportionnalité et est également en mesure d’inciter l’intimé à se conformer à son obligation de quitter la Suisse, étant rappelé la mesure de renvoi de Suisse qui lui a été notifiée le 13 juillet 2020, et qu’il est interdit d’entrée en Suisse jusqu’au 25 octobre 2027.

Le recours sera admis.

7.             La procédure étant gratuite (art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), aucun émolument de procédure ne sera perçu (art. 87al. 1 LPA). Il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 30 mai 2023 par le commissaire de police contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 15 mai 2023 ;

au fond :

l’admet et annule le jugement précité ;

confirme la décision d’interdiction de pénétrer dans une région déterminée prise par le commissaire de police le 18 avril 2023 à l’encontre de A______ pour une durée de 24 mois ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt au commissaire de police, à Me Dina BAZARBACHI, avocate de A______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations, pour information.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Fabienne MICHON RIEBEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. MARINHEIRO

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :