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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1389/2023

ATA/493/2023 du 11.05.2023 sur JTAPI/475/2023 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1389/2023-MC ATA/493/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 11 mai 2023

en section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Francesco MODICA, avocat

contre

COMMISSAIRE DE POLICE intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 avril 2023 (JTAPI/475/2023)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1986, également connu sous l’alias de B______, est originaire de Guinée.

b. A______ est en possession d’un passeport guinéen, valable jusqu’au 17 mai 2027, et d’un titre de séjour espagnol, valable jusqu’au 3 août 2027.

c. Il a déposé une demande d’asile en Suisse le 9 septembre 2012, laquelle a fait l’objet d’une ordonnance de non-entrée en matière le 1er octobre 2012. Il a depuis lors été renvoyé à six reprises au Portugal, État responsable dans le cadre des accords de Dublin, le 17 mars 2021 pour la dernière fois. Il avait été placé en détention administrative en vue dudit renvoi.

d. Il a fait l’objet de deux mesures d’interdiction d’entrée en Suisse, la dernière notifiée le 7 août 2019 et valable jusqu’au 26 mai 2022.

e. Une décision de renvoi lui a été notifiée le 2 décembre 2020.

f. Il a été condamné à neuf reprises entre septembre 2013 et octobre 2021, pour des délits à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), délit et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121), opposition aux actes de l’autorité et dommages à la propriété.

La chambre d’appel et de révision de la Cour de justice a, le 8 octobre 2021, prononcé son expulsion de Suisse pour une durée de 3 ans, sur la base de l’art. 66a bis du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0).

g. Une décision de non-report de son expulsion lui a été notifiée le 2 mars 2021.

h. A______ a été arrêté le 25 mars 2023 par la police genevoise, alors qu’il était en possession de six boulettes de cocaïne d’un poids total de 5.3 g, ainsi que de quatre sachets de marijuana d’un poids total de 10 g.

Prévenu de rupture de ban, d’empêchement d’accomplir un acte officiel et de trafic de stupéfiants, il a refusé de répondre aux questions de la police.

La procédure est en cours devant le Ministère public (ci-après : MP).

i. Il a été acheminé le 25 mars 2023 à la prison de Champ-Dollon pour exécuter une peine privative de liberté. Sa libération conditionnelle a été ordonnée par jugement du Tribunal d’application des peines et des mesures du 26 avril 2023.

Il a alors été remis à la police en vue de son refoulement.

B. a. Le 26 avril 2023, à 19h45, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de A______ pour une durée de six semaines.

Les démarches en vue de la réadmission de l'intéressé en Espagne étaient en cours d'organisation.

A______ a déclaré qu'il était d'accord de retourner en Espagne. Il n'était pas en bonne santé et suivait un traitement contre la dépression.

Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) le même jour

b. Le 27 avril 2023, le conseil de A______ a requis du TAPI la tenue d'un transport sur place à Favra.

Évoquant la dépression dont souffrait son client et l'intervention d'un médecin lors de son audition devant le commissaire de police, il a également sollicité du TAPI qu'il ordonne l'apport du dossier médical de son mandant à l'Unité médicale de Champ-Dollon, subsidiairement l'audition d'un médecin de cette Unité.

c. Le 27 avril 2023 encore, le commissaire de police a transmis au TAPI une copie du formulaire de demande de réadmission concernant l'intéressé, ainsi que le rapport d'intervention du 26 avril 2023 établi par le médecin ayant examiné A______. Il est mentionné sur ce second document que le médecin lui avait prescrit du Temesta 2.5 mg.

d. Lors de l’audience devant le TAPI le 28 avril 2023, A______ a déclaré être d'accord de retourner en Espagne. Sa femme, enceinte de 8 mois, était prête à accoucher et il souhaitait vivement pouvoir assister à la naissance de son premier enfant. Il souffrait de dépression et prenait des anxiolytiques depuis son incarcération à Champ-Dollon. Il souffrait de savoir que son épouse était éprouvée par son absence.

Il avait dû passer une nuit à Carl-Vogt après sa sortie de Champ-Dollon, ce qui n'était pas normal. À Favra, on ne lui avait pas donné ses médicaments et il n’avait pas vu d’infirmier. Il avait été placé dans la cellule n° 1______, juste à côté de celle où un détenu s'était récemment suicidé, ce qui lui faisait peur. Il n'avait même pas osé aller prendre sa douche le matin même à l'étage. Il pensait sans arrêt à ce suicide, qui l'empêchait de dormir. Il avait vainement demandé à être changé de cellule. On ne lui avait pas encore indiqué qu'il pouvait disposer d'un accès internet, possibilité qui ne figurait pas dans le règlement de l'établissement, établissement qui était sale et où il avait vu des cafards.

La représentante du commissaire de police a précisé que les autorités espagnoles disposaient d'un délai de 24 heures pour se déterminer, voire de 4 jours si elles avaient des doutes sur l'autorisation de séjour de l'intéressé. Leur accord obtenu, une place serait réservée à bord d'un avion en tenant compte du délai d'annonce pour le vol, devant permettre aux autorités espagnoles d'enregistrer la réadmission. Une dizaine de jours devrait être nécessaire pour exécuter le renvoi.

Un médecin se rendait à Favra pour les affections somatiques tous les mercredis et un médecin psychiatre un vendredi sur deux. En cas d'urgence, il était fait appel à une équipe médicale mobile.

e. Le TAPI a, par jugement du 28 avril 2023, confirmé l’ordre de mise en détention jusqu’au 6 juin 2023 inclus.

Il disposait des éléments nécessaires, énumérés, pour statuer en toute connaissance de cause, de sorte qu’il ne donnait pas suite aux actes d’instruction requis.

A______ faisait l'objet d'une décision d'expulsion de Suisse prononcée le 8 octobre 2021 pour une durée de trois ans. Il était est revenu sans droit en Suisse, pendant la période d’interdiction démontrant, par ce comportement, son total mépris des ordres et décisions prises à son encontre. En outre, le renvoi n'était pas possible immédiatement, dès lors que l'accord préalable des autorités espagnoles était nécessaire. Les conditions d’une détention administrative étaient fondées, sur la base de l’art. 75 al. 1 let. c LEI par renvoi de l’art. 76 al. 1 let. b ch.1 LEI. Vu la violation de la mesure d'expulsion, seule une détention administrative permettrait d'assurer sa présence au moment où l’exécution de son expulsion aurait lieu. L’assurance de son départ de Suisse répondait à un intérêt public certain.

La police avait agi avec célérité en entreprenant sans attendre les démarches nécessaires en vue de sa réadmission en Espagne.

Une détention d’une durée de 6 semaines, qui respectait le cadre légal, n'apparaissait pas d'emblée inadéquate ou excessive, même s’il y avait tout lieu de penser que l'exécution du renvoi pourrait avoir lieu avant cette échéance.

Dès lors que selon les récentes informations de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) un accès à Internet était désormais garanti à Favra, ce dont A______ était désormais informé, et que les soins ambulatoires et d'urgence y étaient assurés, il n'apparaissait pas que ses conditions de détention contreviennent aux exigences légales et jurisprudentielles. Le fait que sa cellule jouxte celle ayant été le théâtre d’un suicide, certes regrettable, ne saurait à lui seul justifier sa mise en liberté. Sa demande de médicaments devrait pouvoir être transmise sans délai au personnel médical. Ainsi, dans les présentes circonstances, soit en particulier la durée de sa détention et la nécessité pour les autorités suisses de s’assurer de son départ, A______ ne saurait se prévaloir de la pénibilité de sa détention administrative, pour s’opposer à celle-ci et exiger sa mise en liberté.

C. a. A______ a formé recours contre ce jugement par acte déposé le 2 mai 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Il a conclu préalablement à ce que soit ordonné un transport sur place, à ce que l’unité médicale de la prison de Champ-Dollon produise son dossier médical d’ici au 3 mai 2023 et à ce que le taux d’occupation des établissements de Favra et de Frambois, au 26 avril 2023 et au jour du dépôt du recours soit produit. Au fond, il a conclu à l’annulation du jugement, au constat de l’illicéité de sa détention administrative à l’établissement de Favra et à sa mise en liberté immédiate.

Par communiqué de presse du 30 avril 2023, la ligue suisse des droits de l’Homme – Genève (ci-après : LSDH-Ge), avait dénoncé son placement à l’établissement de Favra et une nouvelle fois demandé au Conseil d’État sa fermeture immédiate et définitive. Selon courriel de la LSDH-Ge du 1er mai 2023, seules douze personnes étaient détenues à l’établissement de Frambois qui disposait d’une capacité de vingt places. Dans un courrier du même jour de Me C______ à la direction de Favra, plusieurs détenus avaient sollicité l’accès à l’espace extérieur, ce qui leur avait été refusé au motif que l’herbe était mouillée. Lui-même n’avait toujours pas accès à Internet alors qu’il y était détenu depuis 5 jours.

Le jugement attaqué violait le droit d’être entendu, les principes de l’interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (art. 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 [CEDH - RS 0.101]) et la liberté d’expression (art. 10 CEDH).

Le TAPI avait violé son droit d’être entendu. Il n’avait à tort pas accédé à ses demandes d’actes d’instruction. Or, la chambre administrative, dans les procédures A/1240/2023 et A/1262/2023, avait estimé nécessaire d’y procéder pour constater par elle-même les conditions de détention à Favra. Dans ces causes, les conditions de détention avaient été fortement discutées par les parties et les témoins, dont un représentant de la LSDH-Ge. Il y avait été question de la taille de la cour intérieure et du fait qu’elle soit entièrement encagée, du soi-disant « terrain de foot », auquel les détenus n’avaient jamais eu accès. C’était de façon erronée que le TAPI avait considéré que dans la présente procédure la situation et les conditions de détention dans cet établissement étaient « connues ». Au vu de la dépression dont lui-même souffrait, de son placement dans la cellule jouxtant celle où un détenu s’était suicidé, des conditions de détention indignes fondées sur les nombreux rapports rendus par la Commission nationale de prévention de la torture (ci-après : CNPT) et la LSDH-Ge, et de la fragilité psychique avérée des détenus administratifs, il était indispensable pour le TAPI d’obtenir son dossier médical avant de trancher le litige. Cette instance avait un délai au dimanche 30 avril 2023 pour rendre son jugement et aurait donc eu le temps d’obtenir ce dossier à Champ-Dollon. Il n’avait ensuite à tort pas motivé son jugement sur ce point essentiel de sa dépression et le fait que le suicide d’un autre détenu le hantait. Le TAPI n’avait pas examiné ses motifs en lien avec une violation de l’art. 3 CEDH, en particulier le fait que la détention administrative n’obéissait pas aux mêmes standards que la détention pénale. La chambre administrative ne pouvait pas réparer toutes ces violations, grave, ni renvoyer la cause à l’autorité inférieure, cette possibilité n’ayant pas été prévue à l’art. 10 al. 3 loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10).

Sa détention violait l’art. 3 CEDH. Favra avait été conçu comme une prison destinée à l’exécution de fin de peine pénale et de ce fait était d’origine inadapté à la détention administrative, ce qui avait été dénoncé par la CNPT, la LSDH-Ge et admis par le Conseil d’État dans son projet de loi sur la planification pénitentiaire de juin 2022. Au regard des normes du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (ci-après : CPT), ce seul élément suffisait à le fermer et à ordonner la libération immédiate des personnes y étant placées.

Dès son arrivée, il avait constaté la présence de cafards, ce qui ressortait également des procédures A/1240/2023 et A/1262/2023 et était un indicateur important de la mauvaise hygiène des locaux et d’un risque de transmission de maladie élevé. La cour intérieure de l’établissement ne constituait à l’évidence pas une aire d’exercice en plein air accessible à la lumière naturelle, puisqu’entièrement bétonnée et encagée, par des barreaux relativement épais auxquels s’ajoutait une clôture grillagée. L’espace vert n’était dans les faits pas accessible et supposait que le personnel soit en nombre suffisant. Les détenus n’avaient accès à des activités qu’en nombre très restreint. Il ignorait qu’il aurait accès à Internet, qui plus est dans une pièce polyvalente où se faisaient également les téléphones, les parloirs avec les avocats et les familles, les entretiens avec la LSD-Ge, l’assistant social du centre ainsi que les fouilles corporelles. La requête devait de plus être déposée 24 heures à l’avance.

Les modalités d’accès aux soins médicaux étaient largement insuffisantes au regard des normes du CPT. Il n’y avait pas de personnel médical sur place du vendredi après-midi au mercredi, ni de personne formée pour intervenir en cas d’urgence ou identifier des situations de crise psychique. Le fait que la boîte aux lettres comptant les demandes de visite médicale ne soit pas relevée pendant cette même période posait également problème et était inadaptée aux urgences. Le récent suicide suffisait à démontrer ces carences manifestes. L’absence de prise de toute mesure prise depuis ce tragique incident faisait fortement craindre le risque d’un nouveau passage à l’acte. Il était à déplorer que cet élément déterminant pour l’appréciation des conditions de détention administrative n’ait pas été pris en considération par la chambre administrative dans son arrêt ATA/451/2023 du 28 avril 2023 (cause A/1262/2023).

Il était étonnant, vu les récents jugements du TAPI et le drame survenu à Pâques, qu’il n’ait pas été transféré à Frambois, qui n’affichait pas un taux d’occupation plein, information qu’il y avait lieu de vérifier.

Il suivait notamment un traitement à base d’anxiolytiques depuis son incarcération à Champ-Dollon. L’accès aux soins psychiatriques était problématique, puisque les médecins généralistes de l’unité mobile exigeaient d’assister aux entretiens entre le détenu et le psychiatre, ce qui violait d’une manière crasse les droits du patient. L’absence d’accès à des soins thérapeutiques en complément des soins somatiques, à savoir le traitement d’anxiolytiques, pourrait avoir des conséquences désastreuses sur sa santé. Il n’avait bénéficié d’aucun examen médical à son arrivée à Favra et les médicaments qu’il prenait quotidiennement avaient été saisis par le personnel qui refusait de les lui rendre avant toute consultation avec un médecin de l’unité mobile. Il était terrorisé d’occuper une cellule jouxtant celle où un détenu s’était suicidé.

Il souffrait de ne pas être auprès de son épouse, qui allait accoucher prématurément, pour l’aider dans son quotidien et préparer l’arrivée de leur premier enfant. Il trouvait injuste d’être enfermé à Favra.

Vu les modalités d’accès à Internet restreintes, telles que relevées ci-dessus, qui ne sauraient constituer un accès effectif, l’article 10 CEDH était violé.

b. Le commissaire de police a conclu le 5 mai 2023 au rejet du recours.

Le recourant était un trafiquant de cocaïne récidiviste qui avait violé, notamment, aussi bien l’interdiction d’entrée en Suisse valable jusqu’au 26 mai 2022, que celle de pénétrer dans le canton de Genève pour une durée de douze mois prononcée le 9 septembre 2020. Il était sans domicile fixe ni ressources financières légales avérées et se moquait des instructions données par les autorités suisses. Il pouvait en conséquence être placé en détention administrative aux fins de mise en œuvre de son expulsion.

La chambre administrative avait effectué un transport sur place à Favra et constaté dans ses deux arrêts rendus le 28 avril 2023 que, compte tenu de certains aspects devant être améliorés, à savoir l’accès des détenus à Internet et l’aménagement de la cellule forte ainsi que de la promenade extérieure, la détention administrative dans cet établissement, pour une durée non excessive, respectait les exigences légales en la matière. Elle avait aussi relevé que l’établissement était globalement propre, l’hygiène des détenus y était garantie, de même que les soins médicaux, même en l’absence d’une équipe médicale à demeure.

Favra, par courriel du 4 mai 2023, avait confirmé que des détenus avaient eu accès à Internet. A______ avait bien été informé de cette prestation lors de son arrivée en détention et avait même indiqué souhaiter pouvoir converser avec son épouse par Skype avant d’y renoncer, n’étant pas sûr que celle-ci soit équipée de cette application.

Il ressort de ce même courriel qu’une annexe au règlement pour Skype était distribuée à l’entrée d’un détenu, qu’une nouvelle annexe serait intégrée au règlement dans la mesure où avait été rajouté Internet. La prise de rendez-vous était notée dans l’agenda du greffe. Était jointe également la demande d’accès Skype – Internet que le détenu devait remplir.

c. Dans sa réplique du 4 mai 2023, A______ a relevé que le commissaire de police ne disait mot de ce qu’il en était de l’effectivité de son renvoi. Huit jours s’étaient écoulés depuis l’ordre de mise en détention et la soumission de la demande de réadmission aux autorités espagnoles et il restait dans l’incertitude de son sort. Il restait deux jours avant l’échéance du délai annoncé devant le TAPI pour exécuter son renvoi et rien ne semblait avoir été fait pour qu’il soit renvoyé auprès de son épouse qui allait incessamment accoucher. Ceci était d’autant plus choquant qu’il demeurait détenu dans des conditions violant l’art. 3 CEDH.

Il n’avait pas eu accès au procès-verbal établi par la chambre administrative à la suite du transport sur place effectué en avril 2023, pas plus que le TAPI. Le commissaire ne pouvait donc en tirer argument.

Il n’avait toujours pas été reçu par un psychiatre, alors qu’il souffrait de dépression et ingérait quotidiennement une quantité très importante d’anxiolytiques. Il ne pouvait donc pas être retenu que les soins médicaux étaient garantis, en tout cas pas dans son cas, qui nécessitait un suivi régulier. Ceci était d’autant plus indécent alors que l’on savait qu’un jeune homme dépressif s’était donné la mort il y avait moins d’un mois.

Il était primordial que les modalités d’accès à Internet soient connues, de sorte que la chambre administrative devait ordonner au commissaire de police de produire les annexes adressées par courriel du 4 mai 2023 (production qui est intervenue le 8 mai 2023).

d. À la demande de la juge déléguée, la docteure D______, cheffe de clinique au service de médecine pénitentiaire, a indiqué, dans un courrier du 9 mai 2023, qu’en qualité de médecin de garde, elle confirmait qu’A______ avait eu accès aux soins médicaux à l’établissement de Favra, à savoir une consultation avec le médecin le 4 mai 2023.

e. Les parties ont été informées le 9 mai 2023 que la cause était gardée à juger.

f. Le conseil d’A______ a ajouté dans des déterminations subséquentes du 9 mai 2023 que son mandant lui avait dit le jour même au téléphone n’avoir eu accès qu’à une consultation médicale le 4 mai 2023, et non pas à un psychiatre, malgré la dépression dont il souffrait. Cette consultation avait eu lieu seulement une semaine après son arrivée à Favra et après qu’un recours avait été interjeté auprès de la chambre administrative. Il recevait uniquement des anxiolytiques et ne bénéficiait ni d’un suivi thérapeutique, ni d’un traitement destiné à soigner sa dépression. Il joignait en annexe des documents en lien avec le traitement de la dépression. Favra n’était pas en mesure d’offrir une prise en charge en matière de soins effective et adaptée à cette maladie.

Aucune réponse n’avait été donnée à sa demande au commissaire de police de connaître les démarches entreprises en vue de son renvoi.

g. Sur ce, les parties ont été informées que la cause demeurait gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Selon l'art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10), la chambre administrative doit statuer dans les 10 jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 2 mai 2023 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

3. Le recourant sollicite un transport sur place, la production de son dossier médical auprès de la prison de Champ-Dollon, ainsi que d’un document indiquant le taux d’occupation des établissements de Favra et de Frambois du 26 avril 2023 au 2 mai 2023. Il soutient que le TAPI aurait violé son droit d’être entendu en ne procédant pas à ces actes d’instruction.

3.1 Le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_507/2021 du 13 juin 2022 consid. 3.1). L’autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures d’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d’une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l’amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les références citées). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

3.2 En l’espèce, un transport sur place à l’établissement de Favra, dans la présente procédure n’est ni nécessaire, ni utile, compte tenu de celui qui a été effectué par les magistrats de la chambre administrative le 24 avril 2023, dans le cadre des procédures ayant donné lieu aux ATA/450/2023 et ATA/451/2023 du 28 avril 2023, puis ATA/460/2023 du 2 mai 2023. Il ressort desdits arrêts les renseignements essentiels pour trancher les doléances du recourant.

Ce dernier avait par ailleurs la possibilité de requérir lui-même, avec l’aide de son conseil, son dossier médical auprès de la prison de Champ-Dollon. En tout état, la cause peut être tranchée sans ledit dossier, comme il sera vu ci-dessous.

Enfin, les considérants qui suivent permettent, par appréciation anticipée des preuves, de considérer qu’il n’est pas nécessaire d’obtenir les taux d’occupation actuelle des deux établissements de détention administrative sis sur sol genevois. À cet égard, il appartient à l’autorité compétente de décider dans lequel de ces établissements un détenu doit être attribué, ce sous la réserve que l’un d’eux présente des conditions de détention d’emblée illicites.

Il ne sera donc pas fait droit aux requêtes d’acte d’instruction du recourant.

Pour cette même raison, le TAPI n’a pas violé le droit d’être entendu du recourant en refusant d’accéder à ces trois demandes.

4. Dans la mesure où le recourant a conclu à sa mise en liberté immédiate, il convient d'examiner en premier lieu si les conditions générales de la mise en détention administrative étaient données.

4.1 La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 CEDH (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 précité consid. 4.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).

4.2 Selon l'art. 28 par. 2 du Règlement (UE) n° 604/2013 (ou Règlement Dublin III du 26 juin 2013 ; ci-après : le Règlement), les États membres peuvent placer les personnes concernées en rétention en vue de garantir les procédures de transfert conformément audit règlement lorsqu'il existe un risque non négligeable de fuite de ces personnes, sur la base d'une évaluation individuelle et uniquement dans la mesure où le placement en rétention est proportionnel et si d'autres mesures moins coercitives ne peuvent être effectivement appliquées. À teneur du § 3 du même article, le placement en rétention est d'une durée aussi brève que possible et ne se prolonge pas au-delà du délai raisonnablement nécessaire pour accomplir les procédures administratives requises avec toute la diligence voulue jusqu'à l'exécution du transfert au titre du Règlement. La durée maximale de la détention en vue du renvoi dans le cadre de la procédure Dublin s’élève à six semaines au plus à compter de la date à laquelle a été ordonnée la détention (SEM, Directives et commentaire, Domaine des étrangers, 2013, état au 1er janvier 2021, ch. 9.9.3).

4.3 Selon l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, qui renvoie à l'art. 75 al. 1 LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'une décision de première instance d'expulsion au sens des art. 66a ou 66abis CP, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée notamment : b. si elle quitte la région qui lui est assignée ou pénètre dans une zone qui lui est interdite en vertu de l’art. 74 LEI ; c. si elle franchit la frontière malgré une interdiction d’entrer en Suisse et ne peut pas être renvoyée immédiatement ; g. si elle menace sérieusement d’autres personnes ou met gravement en danger leur vie ou leur intégrité corporelle et fait l’objet d’une poursuite pénale ou a été condamnée pour ce motif.

Elle peut mettre en détention la personne concernée si des éléments concrets font craindre que qu’elle entende se soustraire à son renvoi, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEI). Les ch. 3 et 4 de l'art. 76 LEI décrivent tous deux les comportements permettant de conclure à l'existence d'un risque de fuite ou de disparition (arrêt du Tribunal fédéral 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).

4.4 En l'espèce, il n’est pas contesté que le recourant fait l'objet d'une décision d'expulsion de Suisse (art. 66a bis CP) prononcée le 8 octobre 2021 pour une durée de trois ans, à la suite de sa condamnation pour infractions aux art. 19 al. 1 let. d LStup et 119 al. 1 LEI. Il est ce nonobstant revenu en Suisse le 25 mars 2023 et a été interpellé par la police genevoise alors qu’il était en possession de cocaïne et de marijuana conditionnées pour la revente. Dans la mesure où il a franchi la frontière nonobstant cette expulsion, il a été prévenu, outre d’infraction à la LStup, de rupture de ban. La procédure est en cours au MP. Le simple fait que le recourant se soit trouvé en Suisse 25 mars 2023, nonobstant la décision d’expulsion, démontre son total mépris des décisions prises à son encontre.

Comme justement retenu par le TAPI, son renvoi nécessite l'accord préalable des autorités espagnoles. Les conditions d’une détention administrative sont dès lors fondées sur la base de l’art. 75 al. 1 let. c LEI par renvoi de l’art. 76 al. 1 let. b ch.1 LEI et il n’est pas nécessaire d'examiner si la détention se justifierait également pour un autre motif.

Sous l'angle du principe de proportionnalité, le TAPI doit également être suivi lorsqu’il retient que seule une détention administrative est à même de permettre de s'assurer de sa présence au moment où la prochaine exécution de son expulsion aura lieu. À cet égard, le simple fait qu’il dise vouloir rejoindre son épouse en Espagne sur le point d’accoucher ne suffit pas à fonder l’assurance qu’il quittera effectivement et immédiatement la Suisse volontairement, une fois qu’il serait libéré, étant relevé que cette grossesse ne l’a pas dissuadé de venir à Genève et de s’y trouver le 25 mars 2023. L’assurance de son départ de Suisse répond par ailleurs à un intérêt public certain.

Toute autre mesure moins incisive que la détention administrative serait vaine pour assurer sa présence au moment où il devra être renvoyé. Il ne dispose en effet d’aucun lieu de résidence fixe en Suisse et il a démontré, par son comportement, qu’il était peu enclin à respecter l’ordre juridique suisse. Quant à la durée de la détention, elle respecte le cadre fixé par l’art. 76a al. 3 LEI et est adéquate pour assurer son renvoi, la police étant dans l’attente de l’accord formel de réadmission des autorités espagnoles et devant ensuite organiser le vol de retour.

La détention respecte ainsi le principe de proportionnalité.

4.5 Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEI ; « principe de célérité ou de diligence »). Il s'agit d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt du Tribunal fédéral 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; ATA/1305/2022 du 21 décembre 2022 consid. 4d ; ATA/611/2021 du 8 juin 2021 consid. 5a). Le principe de célérité est violé si les autorités compétentes n'entreprennent aucune démarche en vue de l'exécution du renvoi ou de l'expulsion pendant une durée supérieure à deux mois et que leur inactivité ne repose pas en première ligne sur le comportement des autorités étrangères ou de la personne concernée elle-même (ATF 139 I 206 consid. 2.1).

4.6 Contrairement enfin à ce que soutient le recourant, le principe de célérité ne pose nullement problème dans le cas d’espèce. Ce n’est en effet pas parce que le commissaire de police a indiqué devant le TAPI que les autorités espagnoles devraient répondre sous 4 jours au plus à la demande de réadmission et que tel ne semble pas encore avoir été le cas, qu’il doit être fait grief à cette autorité de ne pas avoir entrepris ou pas poursuivi les démarches nécessaires en vue de l’expulsion du recourant, dont il sera rappelé qu’il n’est détenu administrativement que depuis le 26 avril 2023.

Ces griefs doivent être rejetés.

5. Le recourant soutient que ses conditions de détention violeraient les art. 3 et 10 CEDH.

5.1 Au niveau conventionnel, l'art. 3 CEDH prévoit que nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. La Suisse a également ratifié la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 (RS 0.105), édictée sous l'égide des Nations Unies. Au plan constitutionnel, l'art. 7 Cst. prescrit de son côté que la dignité humaine doit être respectée et protégée. À teneur de l'art. 10 al. 3 Cst., la torture et tout autre traitement ou peine cruels, inhumains ou dégradants sont interdits. La Constitution genevoise prévoit aussi que la torture et tout autre traitement ou peine cruels, inhumains ou dégradants sont interdits (art. 18 al. 2 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 - Cst-GE - A 2 00) et que la dignité humaine est inviolable (art. 14 al. 1 Cst- GE).

Selon le Tribunal fédéral, les garanties de la CEDH relatives aux conditions de détention n'offrent pas une protection plus étendue que celles garanties par la Constitution fédérale (ATF 145 I 318 consid. 2.1 ; 143 I 241 consid. 3.4).

5.2 Dans le plus récent arrêt rendu par la chambre de céans, l’ATA/460/2023 du 2 mai 2023, concernant la problématique d’une personne détenue à Favra, il a été retenu, après avoir développé les bases conventionnelles et légales et la jurisprudence y relative, considérants auxquels il doit être renvoyé, que la difficulté à supporter l’enfermement, inhérente à l’exécution d’une mesure de privation de liberté telle que la détention administrative, ne justifiait pas, en soi, qu’il y soit mis fin. Quant aux évènements survenus le 8 avril 2023 au sein de cet établissement, qu’on ne pouvait que déplorer, si l’on pouvait comprendre que l’intéressé ait été choqué et traumatisé par ces derniers, il devait également être relevé qu’il pouvait bénéficier d’un soutien médical au sein de son lieu de détention administrative. En particulier, des somnifères pouvaient lui être prescrits pour ses problèmes de sommeil. Enfin, il ne fallait pas perdre de vue que l’objectif de sa mise en détention administrative était de permettre l’exécution de son expulsion. En aucun cas, la décision litigieuse de le placer en détention, dans ces conditions, ne contrevenait par elle-même au droit à la vie garanti par l’art. 2 § 1 et 3 CEDH. Dans ces conditions, soit en particulier l’imminence de son renvoi et la nécessité des autorités suisses de s’assurer de son départ, l’intéressé ne pouvait se prévaloir de la pénibilité de sa détention administrative, notamment sur le plan psychique, pour s’opposer à celle-ci et solliciter sa mise en liberté.

Quand bien même la CNPT enjoignait depuis 2019 aux autorités genevoises de ne plus utiliser Favra comme établissement de détention administrative, la chambre de céans avait admis encore récemment la légalité de la détention administrative au sein de cet établissement.

S'agissant des conditions de détention proprement dites, à l'évidence Favra ne pouvait être comparé à certains lieux de détention décrits dans certains arrêts de la CourEDH. Les constats effectués lors du transport sur place (du 24 avril 2023) montraient que l'établissement était globalement propre, l'hygiène des détenus y était garantie, ainsi que les soins médicaux, même en l'absence d'une équipe médicale à demeure. Certaines conditions posent néanmoins problème. La cellule forte apparaissait trop exiguë, pas assez lumineuse et le détenu n'y avait pas accès à l'eau courante ; cela étant, ce problème n'était pas directement pertinent en l'espèce, le recourant ne se plaignant pas d'y avoir été enfermé. Le second problème concernait l'installation seulement très récente d'un accès au World Wide Web, alors que la chambre de céans avait fixé un délai au 16 janvier 2023 pour ce faire, sur la base de la jurisprudence du Tribunal fédéral. Cet accès, de même que celui à l'application Skype, se faisait dans la même pièce que les parloirs avec les avocats et les familles ainsi que les fouilles corporelles, ce qui diminuait considérablement les possibilités pour les détenus d'y avoir accès. En outre, pour l'accès au World Wide Web et à Skype, mais aussi au programme d'activités occupationnelles, les détenus étaient visiblement mal informés, malgré la pose d'affichettes, ce qui accentuait le problème. Enfin, l'accès à l'air libre pourrait être amélioré. L'aménagement décrit par le Conseil d'État dans sa dernière prise de position auprès de la CNPT ne semblait pas avoir avancé, un an après la date prévue. La promenade de 165 m2 était certes accessible une grande partie de la journée, mais elle était grillagée de toutes parts. Quant à la petite prairie à l'air libre décrite devant le TAPI comme « terrain de football », la chambre de céans prenait acte de ce que la direction de l'établissement s'engageait à la mettre à disposition des détenus sur simple demande. Il semblait toutefois que tel n’ait pas été le cas jusqu’à présent.

Ces carences décrites étaient certes à déplorer. La chambre de céans considérait toutefois que, prises individuellement, elles ne rendaient pas les conditions de détention illicites – sauf peut-être le défaut d'accès au Web, au vu de la jurisprudence du Tribunal fédéral ; l'OCD venait toutefois d’y remédier (ATA/450/023 et ATA/451/023 du 28 avril 2023).

Il était vrai qu’en fonction de la durée du séjour d'un détenu, de telles carences, prises dans leur ensemble, pouvaient s'avérer problématiques. En effet, des conditions qui pouvaient être acceptables pendant quelques jours ne l’étaient plus forcément lorsqu'un détenu passait une année dans l'établissement. À cet égard, si Favra était il y a quelques années avant tout utilisé pour des détentions administratives de courte durée, lesdits séjours y étaient désormais parfois beaucoup plus longs.

Dans le cas de l’ATA/460/2023 précité, au moment où le recourant avait été transféré à Frambois le 25 avril 2023, il était détenu à Favra depuis le 24 mars 2023, soit environ un mois, soit un séjour qui ne saurait être qualifié de longue durée. Il convenait certes de prendre en compte le fait que le décès d’un co-détenu l’avait fortement ébranlé. Toutefois, l’établissement de Favra bénéficiait d’un service médical approprié. Les personnes détenues pouvaient, en particulier, s’annoncer au service médical afin de recevoir le traitement approprié ainsi qu’au directeur de l’établissement ou son suppléant, étant précisé que le personnel médical s’y rendait chaque semaine. Le recourant se plaignait certes du retard dans sa prise en charge suite au décès de son co-détenu. Il ne démontrait toutefois pas avoir formé une demande de suivi auprès du service médical, ni que celle-ci n’aurait pas été traitée dans les délais. C’était le lieu de rappeler que, conformément au RFavra, l’intéressé avait tout loisir de s’annoncer, en parallèle, au directeur de l’établissement, ce qu’il ne prétendait pas non plus avoir fait. Ainsi, au vu des circonstances particulières du cas d’espèce, notamment l’imminence de son départ et la nécessité pour les autorités suisses de s’assurer de son départ, les conditions de sa détention administrative ne sauraient être considérées comme illicites.

Il s'ensuivait que le jugement attaqué était conforme au droit. Le recours était dès lors rejeté.

5.3 Rien ne permet dans le cas d’espèce de s’éloigner de ce raisonnement qui peut sans autre s’appliquer à la situation du recourant. Celui-ci entre tout juste en détention, qui ne saurait donc être qualifiée de longue. Il n’a pas été confronté directement au décès d’un ancien détenu de l’établissement, dont il ne dit pas qu’il l’aurait connu. Il n’occupe pas sa cellule, mais la cellule voisine.

La prétendue absence de possibilité de s’entretenir avec son épouse par Skype est contredite par un courriel de la direction de Favra au commissaire de police du 4 mai 2023 dont il ressort que le recourant a pu faire une demande dans ce sens mais a finalement renoncé à cette possibilité dans la mesure où il ignorait si son épouse pouvait converser par ce biais. Il ressort du même courriel que les détenus sont désormais informés dès leur entrée de leur accès à Internet, dont Skype, et disposent de formulaires pour l’organisation concrète de cet accès. Deux détenus en ont déjà bénéficié.

L’état de salubrité des lieux a déjà été jugé conforme par la chambre céans qui a pu le constater lors du transport sur place du 24 avril 2023.

Enfin, il ressort d’un courriel de la cheffe de clinique du service de médecine pénitentiaire que le recourant a bénéficié d’une consultation avec le médecin le 4 mai 2023. Le fait qu’on lui aurait soustrait des médicaments, apparemment des anxiolytiques à son entrée dans les locaux, peut aisément s’expliquer pour des raisons de sécurité, la sienne comprise. Il appartiendra au service médical, avec l’aide du recourant, de se procurer le dossier qui serait en mains du service médical de la prison de Champ-Dollon pour poursuivre une prise en charge adéquate de la dépression dont il dit souffrir.

Au vu de ces éléments, les conditions de sa détention administrative ne sauraient être considérées comme illicites. Il ne sera partant pas fait droit à sa demande de libération immédiate.

En tous points mal fondé, le recours sera rejeté.

6. La procédure étant gratuite, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA cum art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 mai 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 avril 2023 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Francesco MODICA, avocat du recourant, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, au secrétariat d'État aux migrations, ainsi qu'à l’établissement Favra, pour information.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Présidente, Jean-Marc VERNIORY, Valérie LAUBER, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. MARINHEIRO

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :