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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3404/2019

ATA/435/2023 du 25.04.2023 sur JTAPI/1181/2022 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS;CONSTRUCTION ET INSTALLATION;PROPORTIONNALITÉ;ZONE À PROTÉGER;REMISE EN L'ÉTAT;AMENDE;PROCÉDURE D'AUTORISATION;MESURE DE PROTECTION;PAYSAGE;PLAN D'AFFECTATION CANTONAL;OBJET(PROTECTION DE LA NATURE)
Normes : Cst.5.al2; Cst.36; LCI.1.al1; LCI.15.al1; LCI.129; LCI.130; LCI.137; LAT.16; LAT.22; OAT.34; RPPMF.13.al4; RPPMF.19; RPPMF.21.al1.letd
Résumé : Rejet d’un recours contre un ordre de remise en état d’une parcelle sise en zone agricole et dans le périmètre protégé de l’Allondon, inscrit à l’IFP et à l’ISOS ainsi que couvert par l’OROEM en qualité de réserve d’importance nationale et internationale d’oiseaux d’eau et de migrateurs. Au vu des nombreux statuts de protection la régularisation d’une terrasse de 16 m2 construite sans autorisation devant une capite ne pouvait être autorisée. Examen de la proportionnalité de la mesure et de l’amende de CHF 3'000.-.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3404/2019-LCI ATA/435/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 25 avril 2023

3ème section

 

dans la cause

 

M. A______
M. B______

représentés par Me Robert Cramer, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE - OAC

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 novembre 2022 (JTAPI/1181/2022)


EN FAIT

1) MM. A______ et B______ sont copropriétaires de la parcelle no 2’095 de la commune de C______, de 5'610 m2, sise en zone agricole dans le vignoble en coteaux situé entre la route des D______ et E______.

Un bâtiment de 11 m2 est cadastré sur le haut de cette parcelle.

2) Le 20 février 2019, le département du territoire (ci-après : le département) a adressé aux copropriétaires un courrier les informant avoir reçu une dénonciation concernant l'agrandissement et le changement d'affectation d'une cabane ainsi que la création d'une terrasse sur leur parcelle.

3) Le 4 mars 2019, M. A______ a indiqué au département que la cabane de vigne avait subi d'importantes dégradations et qu'il avait entrepris des travaux d'entretien et de rafraichissement, sans agrandissement ni changement d'affectation. Cette cabane permettait aux personnes travaillant dans le vignoble de se reposer, de manger et d'y ranger du matériel. Une petite terrasse avait été aménagée pour que les ouvriers puissent jouir d'un endroit plat pour faire leurs pauses.

4) a. Le 14 mars 2019, le département a imparti un délai de soixante jours aux copropriétaires pour rétablir une situation conforme au droit en procédant à la démolition de la terrasse et à la remise en état d'origine, avant travaux, de la cabane, les travaux entrepris n'ayant fait l'objet d'aucune requête en autorisation de construire. En vue de tenter de légaliser les constructions, une demande d’autorisation pouvait être déposée dans un délai de trente jours.

b. Aucun recours n’a été déposé contre cette décision.

5) Le 23 avril 2019, les copropriétaires ont déposé, par l'intermédiaire de leur architecte, une requête en autorisation de construire concernant la rénovation d'une cabane et d'une terrasse auprès du département qui l’a enregistré sous APA 1______.

6) Dans le cadre de l'instruction de l’APA 1______, le service des monuments et des sites (ci-après : SMS) et la direction des autorisations de construire ont sollicité des pièces complémentaires, le 21 mai 2019.

La direction générale de l'agriculture et de la nature, aujourd’hui office cantonal de l’agriculture et de la nature (ci-après: OCAN) a rendu un préavis défavorable, retenant que le projet consistait en la mise en conformité d'une cabane agricole et d'une terrasse, que la nouvelle affectation de la cabane n'était pas conforme à la zone et que les requérants possédaient suffisamment d'espace dans les infrastructures existantes.

7) a. Le 10 juillet 2019, aucun document n'était parvenu au département, qu’il a rendu une décision refusant de délivrer l'autorisation de construire sollicitée (APA/2______).

Le département faisait siens les préavis rendus.

b. Par décision du 10 juillet 2019 également, le département a ordonné aux copropriétaires de rétablir une situation conforme au droit en procédant à la démolition de la cabane et de la terrasse dans un délai de soixante jours. Une amende administrative de CHF 3'000.- leur était également infligée.

8) Par deux actes du 11 septembre 2019, MM. A______ et B______ ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre le refus d'autorisation de construire ainsi que contre l'ordre de procéder à la démolition de la cabane et de la terrasse ainsi que l'amende de CHF 3'000.-, concluant à leur annulation.

Les recours ont été enregistrés respectivement sous les nos de causes A/3404/2019 et A/3409/2019.

Le département avait procédé à une constatation inexacte des faits ; la cabane existait depuis 1963 à tout le moins et était cadastrée. Aucun agrandissement ni changement d'affectation n'avait eu lieu. La réalisation d'une petite terrasse permettait d'accéder plus aisément à la cabane.

L'amende était disproportionnée, étant précisé que leur négligence portait sur une procédure accélérée.

9) Le département a répondu aux deux recours par une seule et même écriture du 15 novembre 2019, concluant à leurs rejets.

Selon le cadastre, la cabane avait une surface de 11 m2 et une hauteur de 2,36 m. Or, à teneur des plans, la surface de la cabane restait la même mais son élévation divergeait puisque sa hauteur variait entre 2,5 m et 2,9 m. Les travaux de fondation pouvaient expliquer ce rehaussement.

L'amende était clémente au vu des travaux réalisés et du lieu de cette réalisation.

10) Le 22 janvier 2019, les copropriétaires ont répliqué.

La cabane n'avait pas été démolie, ce que divers témoins pouvaient confirmer. Les travaux d'entretien étaient parfaitement conformes à la zone agricole et il n'y avait pas eu de changement d'affectation.

La terrasse, elle n'impliquait aucune emprise sur la zone agricole et était indispensable pour accéder à la capite.

11) Le 13 février 2020, le département a dupliqué.

Si les copropriétaires s'estimaient en mesure de démontrer que les murs du cabanon étaient ceux d'origine, ils pouvaient déposer une nouvelle requête en autorisation de construire visant à légaliser les travaux et la procédure de remise en état pouvait être suspendue à l'égard dudit cabanon.

La création de la terrasse avait un impact sur la zone agricole vu que les vignes sises en aval avaient été supprimées sur environ 4-5 m. Des intérêts prépondérants s'opposaient à la présence de cette nouvelle construction dans le périmètre de protection du val de l'E______.

12) a. Le TAPI a entendu les parties lors d’une audience le 20 mai 2020.

Le représentant du département a indiqué qu’il était nécessaire que les recourants déposent une nouvelle demande d’autorisation de construire en précisant qu’il s’agissait d’une rénovation du bâtiment et que la terrasse pourrait être utile dans le cadre d’un projet d’œnotourisme.

Les parties ont donné leur accord à la suspension de l’instruction des deux procédures.

b. Par deux décisions du 20 mai 2020 (DITAI/187/2020 et DITAI/188/2020), le TAPI a suspendu les deux procédures. À la demande des parties, une seconde suspension a été prononcée le 21 juin 2021 (DITAI/312/2021 et DITAI/313/2021).

13) Les copropriétaires ont déposé un nouveau dossier auprès du département, lequel contenait notamment le « Formulaire A : ouvrage pour exploitation agricole » daté du 22 décembre 2021 et de nouveaux plans.

14) Dans le cadre de l’instruction complémentaire menée par le département, l’OCAN a préavisé favorablement sous conditions le projet le 23 novembre 2021. Il a retenu que les requérants exerçaient la profession d’agriculture à titre principal et que la capite devait conserver sa fonction initiale permettant au personnel travaillant dans la vigne de s’abriter et de se restaurer ainsi que le stockage de petit matériel. Elle pouvait être utilisée ponctuellement et exceptionnellement comme lieu d’accueil pour valoriser les produits d’exploitation. Il a posé dix conditions, en lien avec l’utilisation ponctuelle de la construction pour des manifestations et précisé que l’autorisation devait être octroyée pour une durée de cinq ans renouvelable, sauf décision contraire du département.

La direction des autorisations de construire a également préavisé favorablement le projet le 10 mars 2022.

Le SMS a quant à lui rendu un préavis défavorable le 17 mars 2022. L’objet était situé dans le périmètre protégé par le règlement du val de E______, inscrit à l’inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d’importance nationale (IFP) no 1204 « F______ - Vallons de E______ et de la G______ », à l’inventaire fédéral des sites construits d’importance nationale à protéger en Suisse (ISOS) no 1870 « C______ » ainsi qu’à l’inventaire fédéral des réserves d’oiseaux d’eau et de migrateurs d’importance internationale et nationale no 9 « réserve d’importance internationale – Rade et F______ » et donc couvert par l’ordonnance sur les réserves d’oiseaux d’eau et de migrateurs d’importance internationale et nationale du 21 janvier 1991 (OROEM - RS 922.32).

Suite à l’analyse du site et vu ses nombreux statuts de protection, il refusait la régularisation de toutes les interventions qui ne correspondaient pas à l’esprit initial du lieu. La massivité de la terrasse et sa démesure par rapport à la construction existante ne se justifiaient pas dans ce contexte. Une remise en état des espaces extérieurs à la cabane agricole était demandée.

15) Le 4 avril 2022, l’architecte des requérants a indiqué au département, que la terrasse était une adjonction de toute petite surface de quelques mètres carrés qui permettait l’accès à la capite. En suivant le préavis du SMS, l’accès à cette cabane serait malaisé et son existence même serait compromise. Or, elle était indispensable à l’exploitation viticole des requérants.

16) Le SMS a rendu un second préavis défavorable le 7 avril 2022, considérant que l’argumentation produite par les requérants n’était pas recevable.

17) Le 9 juin 2022, MM. A______ et B______ ont sollicité une nouvelle suspension des procédures, à laquelle le département a donné son accord le 11 juin 2022.

18) Par décision du 30 juin 2022 annulant et remplaçant celle du 10 juillet 2019, le département a refusé de délivrer l’autorisation sollicitée.

La parcelle concernée était protégée à plus d’un titre et, à l’instar de l’avis exprimé par le SMS, il considérait que la terrasse extérieure, de par sa nature, ses dimensions et sa disproportion par rapport à la cabane agricole, nuisait au caractère et à l’intérêt du site protégé inscrit à l’IFP pour le vallon de E______ et à l’ISOS pour le plateau agricole de C______.

La cabane et la terrasse avaient notamment pour vocation de promouvoir les produits viticoles à travers l’organisation d’événements d’œnotourisme ponctuels ; malgré les limitations proposées par l’OCAN dans son préavis, il considérait que ces événements, même en nombre limité, s’avéraient incompatibles avec la zone protégée. De plus, au vu de la localisation isolée de la terrasse, il y avait lieu de craindre une utilisation sauvage par des tiers.

C’était en premier lieu l’absence d’intégration dans le site qui motivait la décision négative, soit un aspect sur lequel le préavis du SMS primait sur celui de l’OCAN.

Le complément d’instruction avait par ailleurs permis de constater que les travaux sur la seule cabane agricole (sans la terrasse) auraient pu être régularisés, pour autant que cette dernière ne serve que dans sa fonction initiale, soit comme lieu permettant au personnel travaillant dans la vigne de s’abriter et de se restaurer ainsi qu’au stockage du petit matériel viticole.

19) Le 30 juin 2022, le département a transmis au TAPI copie de la nouvelle décision de refus d’autorisation de construire.

Il allait prochainement se déterminer sur la question de savoir si l’ordre de remise en état devait être revu en conséquence, étant relevé que les travaux de réfection de la construction préexistante auraient pu être régularisés s’ils avaient été le seul objet de la requête en autorisation de construire.

20) Par acte du 31 août 2022, les copropriétaires ont recouru contre la décision de refus d’autorisation de construire du 30 juin 2022, concluant préalablement à la jonction de la cause avec la cause A/3404/2019 et à ce qu’un transport sur place soit ordonné et, au fond, à l’annulation de la décision et à la délivrance de l’autorisation de construire, subsidiairement au renvoi de la cause au département pour nouvelle décision.

L’OCAN avait rendu un préavis favorable sous dix conditions cumulatives. Ce préavis appuyait les enjeux auxquels les vignerons devaient faire face et faisait écho au développement d’une promotion de l’œnotourisme à Genève et en Suisse.

L’objet litigieux était une capite de 7,7 m2 et une terrasse de 16 m2. Ce type d’édifice servait d’abri temporaire aux ouvriers de la vigne et avait désormais également vocation d’accueil convivial. Le projet s’intégrait parfaitement au lieu protégé et les observations du SMS sur ce point devaient être appréciées avec la plus grande retenue en l’absence d’un transport sur place connu de celui-ci.

Le projet ne portait pas atteinte au milieu naturel ; les conditions posées par l’OCAN et acceptées par eux appuyaient cette appréciation et annihilaient toute possibilité d’abus. Les activités visées sur le site ciblaient principalement les travaux nécessaires à l’entretien des vignes et le projet présentait un outil de promotion de l’agriculture de sort qu’il s’inscrivait donc dans le cadre d’une exploitation agricole.

21) Le département a transmis ses observations le 22 septembre 2022. Il a conclu au rejet des recours, à la confirmation de sa décision du 30 juin 2022 et à la constatation que l’ordre de remise en état ordonné par décision du 10 juillet 2019 ne portait plus que sur la terrasse, la capite pouvant être maintenue.

22) Par jugement du 7 novembre 2022 (JTAPI1181/2022), le TAPI a rejeté les recours après les avoir joints sous no de cause A/3404/2019. Il donnait acte au département de ce que l’ordre de remise en état ordonnée le 10 juillet 2019 ne portait plus que sur la terrasse, la capite pouvant être maintenue.

Il faisait siens les arguments du département reprenant le préavis négatif du SMS s’agissant du refus d’autorisation de construire la terrasse litigieuse.

L’ordre de remise en état, soit la démolition de la terrasse était conforme au droit et l’amende devait être confirmée.

23) Par acte mis à la poste le 8 décembre 2022, MM. A______ et B______ ont interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement du TAPI, concluant à son annulation ainsi qu’à celle de la décision du département ordonnant la démolition de la terrasse ainsi qu’à la délivrance de l’autorisation de construire relative à la terrasse. Préalablement, ils sollicitaient un transport sur place, permettant notamment de constater que la terrasse était nécessaire à l’accès au site.

Ils faisaient grief au TAPI d’avoir violé leur droit d’être entendus en ne procédant pas à un transport sur place.

En soutenant une prévalence absolue du préavis du SMS sans aucune motivation, il avait mésusé de son pouvoir d’appréciation et violé l’interdiction de l’arbitraire. Le TAPI avait abusé de son pouvoir d’appréciation et n’avait pas traité les griefs soulevés, occultant la cohérence et l’importance du projet dans le cadre de la politique publique visant à développer et promouvoir l’œnotourisme à Genève et en Suisse.

Vu le lien fonctionnel entre la terrasse et la capite qui n’avait pas été pris en compte par le TAPI, la destruction de la terrasse était disproportionnée. Les différents intérêts en jeu étaient examinés.

Le jugement violait les règles en matière de fixation de l’amende en ne prenant pas en compte plusieurs éléments dans l’analyse de la culpabilité. L’amende était disproportionnée.

24) Le 9 janvier 2023, le département a conclu au rejet du recours et répondant point par point à l’argumentation des recourants.

25) Le 13 février 2023, les recourants ont répliqué.

Les conditions mises par l’OCAN à l’appui de son préavis favorable attestaient du caractère nécessairement pratique et ciblé de l’analyse et témoignaient d’une connaissance approfondie du terrain par l’OCAN.

Le jugement était inexécutable en l’absence de travaux supplémentaires, susceptibles d’être refusés, permettant l’accès à la capite. La sécurité du personnel travaillant dans les vignes serait mise en péril en l’absence de terrasse.

26) Le 15 février 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur un ordre de remise en état qui ne concerne à ce stade, plus qu’une terrasse de 16 m2, accolée à une capite de 7,7 m2 ainsi que sur une amende de CHF 3'000.-.

3) Les recourants sollicitent un transport sur place et font valoir une violation de leur droit d’être entendus, le TAPI ayant refusé de procéder à cette mesure d’instruction.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_157/2021 du 7 juillet 2021 consid. 3.1).

Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_576/2020 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; ATA/965/2021 du 21 septembre 2021 consid. 2a et les références citées).

Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 142 III 433 consid. 4.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_90/2020 du 17 novembre 2020 consid. 4.1.2 ; ATA/907/2021 du 6 septembre 2021 consid. 4a).

b. En l’espèce, la chambre de céans dispose des plans et des photographies figurant au dossier, dont notamment celles du reportage photographique réalisé par AS Architectes le 3 mars 2022 faites depuis huit point de vue différents et celles accessibles sur le site d’information du territoire genevois (SITG).

Ces éléments sont suffisants pour trancher le litige et le transport sur place requis n’est pas susceptible d’apporter d’autres éléments pertinents nécessaires pour statuer en toute connaissance de cause. Notamment la pente de la parcelle et l’accès à la capite par la terrasse ainsi que les paysages alentour apparaissent clairement sur plusieurs photographies figurant au dossier. Quant à l’atout que représente ce lieu dans le cadre du développement et de la promotion cantonale de l’œnotourisme, il est sans incidence sur la solution au litige, comme cela ressort des considérants qui suivent.

En conséquence, il ne sera pas donné suite à la demandes d’acte d’instruction et il appert que le TAPI n’a pas commis de violation du droit d’être entendu en renonçant à cette mesure.

4) a. En procédure administrative genevoise, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (art. 61 al. 1 let. a LPA), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. b LPA). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA).

b. De jurisprudence constante, la chambre de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l'autorité inférieure suive l'avis de celles-ci. Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/498/2020 du 19 mai 2020 ; ATA/1098/2019 du 25 juin 2019).

5) Les recourants contestent le refus d’autorisation de construire concernant la terrasse litigieuse, le département ayant abusé de son pouvoir d’appréciation en estimant que celle-ci n’était pas nécessaire à l’utilisation de la capite et en suivant le préavis défavorable du SMS.

a. Aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente (art. 22 al. 1 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 - LAT - RS 700 ; art. 1 al. 1 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 - LCI - L 5 05). L'autorisation est délivrée si la construction ou l'installation est conforme à l'affectation de la zone (art. 22 al. 2 let. a LAT) et si le terrain est équipé (art. 22 al. 2 let. b LAT). Le droit fédéral et le droit cantonal peuvent poser d'autres conditions (art. 22 al. 3 LAT). Dès que les conditions légales sont réunies, le département est tenu de délivrer l'autorisation de construire (art. 1 al. 5 LCI).

b. Les zones agricoles servent à garantir la base d'approvisionnement du pays à long terme, à sauvegarder le paysage et les espaces de délassement et à assurer l'équilibre écologique ; elles devraient être maintenues autant que possible libres de toute construction en raison des différentes fonctions de la zone agricole et comprennent : les terrains qui se prêtent à l'exploitation agricole ou à l'horticulture productrice et sont nécessaires à l'accomplissement des différentes tâches dévolues à l'agriculture (let. a) ; les terrains qui, dans l'intérêt général, doivent être exploités par l'agriculture (let. b, art. 16 al. 1 LAT). Il importe, dans la mesure du possible, de délimiter des surfaces continues d'une certaine étendue (art. 16 al. 2 LAT). Dans leurs plans d'aménagement, les cantons tiennent compte de façon adéquate des différentes fonctions des zones agricoles (art. 16 al. 3 LAT).

La zone agricole est en principe inconstructible. Aussi, le fait qu'une construction soit reconnue conforme à l'affectation de la zone ne signifie pas encore que le permis doit être délivré. En effet, l'autorité compétente doit examiner en premier lieu si la nouvelle activité peut être réalisée dans les locaux existants ; si tel n'est pas le cas, elle doit en outre vérifier que la nouvelle construction n'est pas surdimensionnée par rapport à l'utilisation envisagée et les besoins de l'exploitation et qu'aucun intérêt prépondérant ne s'oppose à l'implantation du nouveau bâtiment à l'endroit prévu (art. 34 al. 4 de l’ordonnance sur l’aménagement du territoire du 28 juin 2000 - OAT - RS 700.1 ; ATF 129 II 413 consid. 3.2, arrêt du Tribunal fédéral 1C_631/2019 consid. 2.4.5).

c. Sont conformes à l'affectation de la zone agricole les constructions et installations qui sont nécessaires à l'exploitation agricole ou à l'horticulture productrice (art. 16a al. 1 LAT) et qui servent au développement interne d'une exploitation agricole ou d'une exploitation pratiquant l'horticulture productrice sont conformes à l'affectation de la zone (art. 16a al. 2 LAT).

Aux termes de l'art. 20 LaLAT, la zone agricole est destinée à l'exploitation agricole ou horticole. Ne sont autorisées en zone agricole que les constructions et installations qui sont destinées durablement à cette activité et aux personnes l'exerçant à titre principal (let. a) ; respectent la nature et le paysage (let. b) ; respectent les conditions fixées par les art. 34 ss OAT (let. c).

L’art. 34 OAT précise que l’autorisation de construire ne peut être délivrée que si la construction ou l’installation est nécessaire à l’exploitation (art. 34 al. 3 let. a OAT) si aucun intérêt prépondérant ne s’oppose à leur implantation à l’endroit prévu (let. b) et s’il est prévisible que l’exploitation pourras subsister à long terme (let. c ).

La nécessité de nouvelles constructions s’apprécie en fonction de critères objectifs (arrêt du Tribunal fédéral 1C_266/2013 du 9 octobre 2013 consid. 3.1.1 et les références citées). Par ailleurs même si un emplacement peut se justifier selon des critères objectifs, des intérêts prépondérants peuvent s’y opposer, notamment en termes de protection du paysage, des biotopes et de sites (Alexander RUCH/Rudolf MUGGLI, in Heinz AEMISEGGER/Pierre MOOR/Alexander RUCH/Pierre TSCHANNEN [éd.], Commentaire pratique LAT : construire hors zone à bâtir, 2017, n. 46 et 56 ad art. 16a LAT).

La jurisprudence a également retenu que les bâtiments concernés sont considérés comme conformes à l’affectation de la zone agricole si leur implantation à l’endroit choisi est indispensable à l’exploitation rationnelle du sol et s’ils ne sont pas surdimensionnés.

d. La parcelle étant sise en zone agricole, dans un périmètre figurant aux inventaires IFP et ISOS ainsi que dans le périmètre protégé de la réserve naturelle du Vallon de E______, plan de site créé le 15 mars 1968, les constructions, installations et transformations sont soumises au préavis de l’OCAN (art. 38 al. 2 let. d de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 - LPMNS - L 4 05 ; 21 al. 3 du règlement sur la protection du paysage, des milieux naturels et de la flore du 25 juillet 2007 - RPPMF - L 4 05.11). Le projet est également soumis au préavis du SMS en lieu et place de celui de la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : CMNS) en application des art. 5 al. 2 let. f et al. 4 du règlement d’exécution de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 29 novembre 1976 (RPMNS - L 4 05.01), compte tenu de la procédure accélérée à laquelle a été soumise la demande de régularisation de la terrasse.

e. Dans un site protégé, les constructions autorisées doivent y être intégrées. À cet effet, un plan d’aménagement paysagers doit être joint à la requête en cas de modification de l’état extérieur des lieux (art. 13 al. 4 RPPMF). Afin d’assurer l’intégrité des réserves naturelles, leur tranquillité doit être préservée (art. 19 al. 1 RPPMF). Pour la protection des milieux naturels, le RPPMF prévoit encore qu’une autorisation préalable de l’OCAN pour des manifestations collectives de plus de dix personnes (art. 21 al. 1 let. d RPPMF).

f. Les préavis ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Selon le système prévu par la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi. Lorsque la consultation d'une instance de préavis est imposée par la loi, son préavis a un poids certain dans l'appréciation qu'est amenée à effectuer l'autorité de recours et il convient de ne pas le minimiser (ATA/1176/2022 du 22 novembre 2022 consid. 6b et les références citées).

g. Selon l’art. 15 al. 1 LCI, le département peut interdire ou n’autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l’intérêt d’un quartier, d’une rue ou d’un chemin, d’un site naturel ou de points de vue accessibles au public.

Cette disposition légale renferme une clause d’esthétique, qui constitue une notion juridique indéterminée, laissant ainsi un certain pouvoir d’appréciation à l’administration, celle-ci n’étant limitée que par l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation. L’autorité de recours s’impose une retenue particulière lorsqu’elle estime que l’autorité inférieure est manifestement mieux en mesure qu’elle d’attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, soit quand elle fait appel à des connaissance spécialisée ou particulières. Ainsi, dans l’application de cette disposition, une prééminence est reconnue au préavis de la CMNS lorsqu’il est requis par la loi, comme elle l’est dans l’application de la disposition analogue concernant les villages protégés, l’art. 106 al. 1 LCI. (ATA/860/2021 du 24 août 2021 consid. 7b ; ATA/146/2021 du 9 février 2021 consid. 10a ; ATA/213/2018 du 6 mars 2018 consid. 7 et 9b).

6) En l’espèce, les recourants font valoir que la terrasse située à l’avant du bâtiment sert d’accès à la capite dont l’entrée est située au centre de la façade tournée vers le bas de la pente. De ce fait, la terrasse fait office de marche d’escalier nécessaire, vu la pente du terrain, la disposition et les caractéristiques du bâtiment. En cela, elle serait indispensable à l’utilisation de la capite, laquelle n’est pas aisément accessible sans la terrasse, surtout en période de vendanges où le personnel travaillant dans les vignes porte un matériel encombrant.

À ce raisonnement, s’oppose le fait qu’une terrasse de la dimension de celle construite par les recourants, soit 16 m2, n’est pas nécessaire pour permettre un accès aisé au bâtiment, une marche devant l’entrée étant suffisante ce qu’ils ne contestent pas. L’OCAN, dans son premier préavis défavorable du 2 mai 2019, avait déjà retenu que la terrasse n’était pas conforme à la zone agricole. Il s’avère en effet que son usage par le personnel travaillant dans les vignes n’est pas suffisant et surtout, n’est pas nécessaire au sens de l’art. 16a LAT. Elle est en outre surdimensionnée s’agissant d’un simple accès à la cabane, laquelle a pour seule vocation d’abriter le personnel et les outils.

Dans le sens des recourants, l’OCAN a modifié son préavis en prenant en compte une vocation oenotouristique des lieux qui permettrait de justifier l’existence de la terrasse pour une utilisation différente. L’OCAN a également tenté de limiter l’impact de cette activité en posant des conditions limitatives.

Toutefois, le SMS, dont le préavis défavorable a été suivi par le département, s’oppose à l’existence même de la terrasse dans ses dimensions, estimant celle-ci massive et démesurée par rapport à la capite, ce que les recourants ignorent dans leur argumentation. Le SMS s’oppose de surcroit à l’utilisation projetée, soulignant que le site, situé en zone agricole, hors zone à bâtir est protégé par de nombreuses législations pour sa valeur naturelle, environnementale et paysagère. Quant à l’usage que veulent en faire les recourants, il s’oppose à la tranquillité du site localisé dans une réserve d’importance internationale (Rade et F______ – no 9) laquelle suppose une protection particulière s’agissant des oiseaux en particulier (art. 14 de la loi sur la faune du 7 octobre 1993 - LFaune - M 5 05). Le département relève également que la diffusion du bruit, vu la configuration du vallon de E______ est à craindre et cela même si l’organisation d’événements reste ponctuelle. En outre, l’usage par des tiers était également à craindre, la terrasse et le site étant isolé mais aisément accessible, proche de la route, ce qui augmenterait d’autant plus les nuisances potentielles.

En cas de préavis divergents, comme en l’espèce, il n’est pas possible de retenir comme principe, comme le font les recourants, que le préavis qui fait suite à des discussions et/ou à une visite des lieux doive être privilégié. Cette conclusion ne repose sur aucune base légale ou jurisprudentielle et le transport sur place n’est pas nécessaire pour évaluer, par exemple, les effets de l’utilisation de la terrasse ou de sa dimension par rapport à la cabane, comme l’a fait le SMS dans son préavis. Il faut plutôt retenir, en application de la jurisprudence concernant les préavis de la CMNS dans l’application des art. 15 et 106 LCI, citée ci-dessus, la prééminence du préavis de l’instance spécialisée en matière de site protégé.

Il appert ainsi que c’est sans abus de son pouvoir d’appréciation que le département a refusé de délivrer l’autorisation de construire de régularisation sollicitée, fondé sur le préavis obligatoire du SMS et en application de l’art. 15 al. 1 LCI notamment et a retenu qu’une terrasse de 16 m2, devant une cabane agricole de 7,7 m2, portait atteinte au site, sis hors zone à bâtir et protégé à plusieurs titres.

Le grief doit être écarté.

7) Le recours porte également sur l’ordre de remise en état que les recourants estiment contraire au principe de la proportionnalité.

Lorsque des constructions ou des installations illicites sont réalisées en dehors de la zone à bâtir, le droit fédéral exige en principe que soit rétabli un état conforme au droit. Le principe de la séparation de l'espace bâti et non bâti, qui préserve différents intérêts publics, est de rang constitutionnel ; il fait partie intégrante de la notion d'utilisation mesurée du sol de l'art. 75 al. 1 Cst. (Message du Conseil fédéral du 20 janvier 2010 relatif à une révision partielle de la LAT ; FF 2010 964 ch. 1.2.1 et 973 ch. 2.1; ATF 147 II 309 consid. 5.5). Cette séparation doit par conséquent, en dehors des exceptions prévues par la loi, demeurer d'application stricte (ATF 132 II 21 consid. 6.4). Si des constructions illégales, contraires au droit de l'aménagement du territoire, sont indéfiniment tolérées en dehors de la zone constructible, le principe de la séparation du bâti et du non-bâti est remis en question et un comportement contraire au droit s'en trouve récompensé. S'ajoute à cela que la remise en état poursuit encore d'autres intérêts publics, à savoir la limitation du nombre et des dimensions des constructions en zone agricole (ATF 132 II 21 consid. 6.4) ainsi que le respect du principe de l'égalité devant la loi (arrêt 1C_76/2019 du 28 février 2020 consid. 7.1 et les références citées)

Lorsque l'état d'une construction, d'une installation ou d'une autre chose n'est pas conforme aux prescriptions de la loi, des règlements qu'elle prévoit ou des autorisations délivrées en application des dispositions légales ou réglementaires, le département peut en ordonner la remise en état, la réparation, la modification, la suppression ou la démolition (art. 129 et 130 LCI).

Depuis l’arrêt du Tribunal fédéral précisant que la prescription trentenaire ne s'applique pas hors de la zone à bâtir (ATF 147 II 309), quatre conditions cumulatives sont nécessaires pour un ordre de remise en état à savoir :

- 1° l'ordre doit être dirigé contre le perturbateur ;

- 2° les installations en cause ne doivent pas avoir été autorisées en vertu du droit en vigueur au moment de leur réalisation ;

- 3° l'autorité ne doit pas avoir créé chez l'administré concerné, que ce soit par des promesses, par des infractions, des assurances ou encore un comportement des conditions telles qu'elle serait liée par la bonne foi ;

- 4° l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit doit l'emporter sur l'intérêt privé de l'intéressé au maintien des installations litigieuses (ATA/1030/2018 du 2 octobre 2018 consid. 6c et les références citées).

8) Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 Cst., exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent pas être atteints par une mesure moins incisive. En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 126 I 219 consid. 2c et les références citées).

a. Les critères de l'aptitude et de la subsidiarité sont particulièrement concernés lorsqu'un ordre de démolition pur et simple est envisagé. Ils impliquent en effet de déterminer si une – ou plusieurs – autre mesure administrative pourrait être préférée, le cas échéant en combinaison.

La proportionnalité au sens étroit implique une pesée des intérêts. C'est à ce titre que l'autorité renonce à ordonner la remise en conformité si les dérogations à la règle sont mineures, si l'intérêt public lésé n'est pas de nature à justifier le dommage que la démolition causerait au maître de l'ouvrage, si celui-ci pouvait de bonne foi se croire autorisé à construire ou encore s'il y a des chances sérieuses de faire reconnaître la construction comme conforme au droit qui aurait changé dans l'intervalle.

Dans la règle, l’intérêt public majeur à la préservation des zones agricoles et la distinction fondamentale entre espace bâti et non-bâti l’emporte (arrêt du Tribunal fédéral 1C_60/2021 du 27 juillet 2021 consid. 3.4.2 confirmant l'ATA/1304/2020 du 15 décembre 2020 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_233/2014 du 23 février 2015 consid. 4). L'intérêt privé de pouvoir continuer à profiter de constructions et d'utilisations illégales en dehors de la zone à bâtir ne pèse pas lourd (ATF 147 II 309 consid. 5.6).

b. Le postulat selon lequel le respect du principe de la proportionnalité s'impose même envers un administré de mauvaise foi est relativisé, voire annihilé, par l'idée que le constructeur qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que cette dernière se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que des inconvénients qui en découlent pour le constructeur (Nicolas WISARD/Samuel BRÜCKNER/Milena PIREK, Les constructions « illicites », in Jean-Baptiste ZUFFEREY [éd.], op. cit., p. 218).

c. L'autorité peut renoncer à un ordre de démolition, conformément au principe de la proportionnalité, si les dérogations à la règle sont mineures, si l'intérêt public lésé n'est pas de nature à justifier le dommage que la démolition causerait au maître de l'ouvrage, si celui-ci pouvait de bonne foi se croire autorisé à construire ou encore s'il y a des chances sérieuses de faire reconnaître la construction comme conforme au droit (ATF 132 II 21 consid. 6 ; 123 II 248 consid. 3a/bb). Celui qui place l'autorité devant un fait accompli doit s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe plus de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (ATF 123 II 248 consid. 4a; 111 Ib 213 consid. 6b et la jurisprudence citée).

9) En l’espèce, sous l’angle de la proportionnalité, l’ordre de remise en état, soit la suppression de la terrasse, est une mesure adéquate et apte à atteindre les buts d’intérêt publics précités, soit notamment le respect de la séparation du bâti et du non bâti, de la limitation du nombre et des dimensions des constructions en zone agricole ainsi que le respect du principe de l’égalité devant loi auxquels s’ajoutent les buts d’intérêt publics liés aux différentes zones de protection dans lesquels est situé la parcelle concernée. À cela s’ajoute que la capite, laquelle, contrairement à la terrasse est directement utile à l’exploitation viticole, peut être maintenue.

S’agissant de la promotion de leurs produits dans le cadre d’événements d’œnotourisme, les recourants n’ont pas contesté, comme l’a retenu le TAPI, qu’ils disposaient d’autres bâtiments leur permettant de recevoir des clients et de promouvoir les vins genevois. Ils critiquent uniquement le fait que les attributs de ces lieux n’ont pas été décrits. Quant aux intérêts privés et publics qu’ils avancent, celui de disposer d’une terrasse affectée principalement au repos des travailleurs ne saurait être pris en compte puisque la capite existe déjà à cet effet. Les autres intérêts, soit ceux d’avoir un lieu d’accueil pour la promotion de leur produits, des produits du terroir en général, l’organisation des événements d’œnotourisme par la ville et le canton de Genève, le développement des activités de tourisme rural, la découverte des zones protégées ou la conservation et promotion des capites, ne sont pas particulièrement en lien avec le maintien de la terrasse, puisqu’ils peuvent être poursuivis par les recourants dans tout autre bâtiment ou installation de leur domaine viticole.

C’est en vain également que les recourants reviennent sur les conditions fixées par l’OCAN dans son préavis, la construction de la terrasse n’étant pas autorisable, comme vu ci-dessus.

En conséquence, le grief sera écarté et l’ordre de remise en état confirmé.

10) Les recourants conteste l’amende de CHF 3'000.- laquelle serait disproportionnée.

a. Selon l'art. 131 LCI, les propriétaires ou leurs mandataires, les entrepreneurs et les usagers sont tenus de se conformer aux mesures ordonnées par le département en application des art. 129 et 130 LCI. Le département notifie aux intéressés, par lettre recommandée, les mesures qu'il ordonne. Il fixe un délai pour leur exécution, à moins qu'il n'invoque l'urgence (art. 132 al. 1 LCI).

b. Aux termes de l'art. 137 LCI, est passible d'une amende administrative de CHF 100.- à CHF 150'000.- tout contrevenant à la LCI, aux règlements et aux arrêtés édictés en vertu de ladite loi, ainsi qu'aux ordres donnés par le département dans les limites de ladite loi et des règlements et arrêtés édictés en vertu de celle-ci (al. 1). Le montant maximum de l'amende est de CHF 20'000.- lorsqu'une construction, une installation ou tout autre ouvrage a été entrepris sans autorisation mais que les travaux sont conformes aux prescriptions légales (al. 2). Il est tenu compte, dans la fixation du montant de l'amende, du degré de gravité de l'infraction. Constituent notamment des circonstances aggravantes la violation des prescriptions susmentionnées par cupidité, les cas de récidive et l'établissement, par le mandataire professionnellement qualifié ou le requérant, d'une attestation, au sens de l'art. 7 LCI, non conforme à la réalité (al. 3). La poursuite et la sanction administrative se prescrivent par 7 ans (al. 5).

c. Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C'est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/159/2021 du 9 février 2021 consid. 7b).

d. En vertu de l'art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif. On doit cependant réserver celles qui concernent exclusivement le juge pénal (ATA/440/2019 du 16 avril 2019 consid. 5c et les références citées).

Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d'une simple négligence. Selon la jurisprudence constante, l'administration doit faire preuve de sévérité afin d'assurer le respect de la loi et jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour infliger une amende. La juridiction de céans ne la censure qu'en cas d'excès ou d'abus. Enfin, l'amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst. ; ATA/440/2019 précité consid. 5c et les références citées).

L'autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d'une sanction doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss CP (principes applicables à la fixation de la peine), soit tenir compte de la culpabilité de l'auteur et prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP ; ATA/440/2019 précité consid. 5c et les références citées).

e. S'agissant de la quotité de l'amende, la jurisprudence de la chambre de céans précise que le département jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour en fixer le montant. La juridiction de céans ne la censure qu'en cas d'excès. Sont pris en considération la nature, la gravité et la fréquence des infractions commises dans le respect du principe de la proportionnalité (ATA/260/2023 du 14 mars 2023 consid. 2f et les arrêts cités).

11) En l’espèce, l’amende, lorsqu’elle a été fixée, concernait la construction sans autorisation de la terrasse litigieuse mais également celle de la construction ou reconstruction de la capite. Le maintien de cette dernière a depuis lors été admise par le département.

Toutefois, l’amende a été prononcée pour avoir procédé à des travaux sans avoir requis les autorisations nécessaires. Qu’une partie de ces travaux aient finalement pu être autorisée, ne modifie pas l’infraction qui a été réalisée et le principe de l’amende reste acquis, ce que les recourants ne contestent d’ailleurs pas.

S’agissant de sa quotité, aucun des arguments avancés par les recourants ne permet de s’écarter du montant retenu par le département. En effet, si les antécédents constituent une circonstance aggravante, l’absence d’antécédents est une circonstance neutre qui n’a pas l’effet de minorer la sanction (ATA/174/2023 du 22 février 2023 consid. 2.2.2).

Les motivations avancées par les recourants, soit notamment la promotion de leur production dans le cadre du développement de l’œnotourisme, n’est pas susceptible de modifier leur culpabilité, s’agissant principalement d’un intérêt personnel. De même, le fait que l’OCAN a préavisé favorablement le projet, ou qu’une réflexion est amorcée au niveau des autorités quant à la mise en valeur des capites existantes dans le canton, ne diminue en rien la culpabilité des recourants qui ne pouvaient ignorer qu’ils avaient procédé à des travaux illicites hors de la zone à bâtir et de surcroît dans un périmètre protégé pour ses qualités paysagère et environnementale et qu’ils mettaient ainsi le département devant le fait accompli.

Finalement, les recourants n’allèguent pas de circonstances quant à leur situation personnelle qui aurait dû être prise en compte.

En conséquence, il appert que le département n’a pas excédé son pouvoir d’appréciation en fixant le montant de l’amende à CHF 3'000.-.

En tous points infondé, le recours doit être rejeté.

12) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge conjointe des recourants (art. 87 al. 1 LPA) et il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 8 décembre 2022 par M. A______ et M. B______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 novembre 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge conjointe de M. A______ et M. B______;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Robert Cramer, avocat des recourants, au département du territoire - OAC, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu’à l’office fédéral du développement territorial (ARE).

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Lauber, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :