Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/1353/2021

ATA/229/2022 du 01.03.2022 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1353/2021-AIDSO ATA/229/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er mars 2022

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Samir Djaziri, avocat

contre

HOSPICE GÉNÉRAL

 



EN FAIT

1) Madame A______, née le ______ 1983, s'est rendue le 28 juillet 2017 au centre d'action sociale (ci-après : CAS) B______ pour solliciter des prestations d'aide sociale.

Elle avait déposé une demande en divorce. Le jugement sur mesures protectrices de l'union conjugale du Tribunal civil de première instance (ci-après : TPI) prévoyait en sa faveur une pension alimentaire de CHF 5'500.- par mois, mais celle-ci était limitée dans le temps et prendrait fin en septembre 2017, si bien qu'elle se trouverait alors sans ressources.

2) Le 30 août 2017, Mme A______ a complété et signé un formulaire de demande de prestations d'aide sociale financière, dans lequel elle a déclaré détenir deux comptes bancaires auprès de C______, et a également signé le document « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général [ci-après : l'hospice] ».

3) Mme A______ a bénéficié de prestations d'aide financière dès le 1er octobre 2017.

Dans le cadre des entretiens périodiques avec l'assistante sociale chargée de son dossier, elle a indiqué espérer obtenir une somme importante à l'issue de la procédure de divorce.

4) Le 27 août 2018, Mme A______ a remis à l'hospice copie de l'ordonnance sur mesures provisionnelles rendue le 5 juin 2018 par le TPI condamnant son époux au paiement d'une contribution d'entretien de CHF 3'500.- mensuels dès le prononcé de la décision.

La demande de divorce avait été déposée unilatéralement par Monsieur A______ le 31 octobre 2017.

5) Du 1er septembre au 30 novembre 2018, l'hospice n'a plus versé d'aide financière à Mme A______, celle-ci se trouvant hors des barèmes de revenu permettant de bénéficier de l'aide sociale.

6) Par décision du 1er octobre 2018, l'hospice, par le biais du CAS, a réclamé à Mme A______ la restitution de CHF 9'917.- correspondant aux prestations reçues de juin à août 2018, dans la mesure où Mme A______ avait reçu un arriéré de contributions d'entretien portant sur ces trois mois.

7) Le 6 décembre 2018, Mme A______ a produit un arrêt de la chambre civile de la Cour de justice (ci-après : la chambre civile) du 12 octobre 2018, lequel annulait partiellement l'ordonnance sur mesures provisionnelles et réduisait le montant mensuel de la contribution d'entretien à CHF 780.-. C'est ce dernier montant qui a été pris en compte.

8) Par décision du 21 août 2019, l'hospice a rejeté l'opposition formée par Mme A______ contre la décision de restitution du 1er octobre 2018. Il était indiqué que l'hospice avait versé des prestations à titre d'avances sur pensions alimentaires en raison du principe de la subsidiarité de l'aide sociale ; il en découlait que celles-ci devaient être remboursées une fois les contributions d'entretien reçues pour toute la période d'attente, jusqu'à concurrence du montant effectivement versé par l'hospice.

Cette décision sur opposition est entrée en force, n'ayant pas été contestée.

9) Le 1er septembre 2020, Mme A______ a transmis à l'assistante sociale suivant son dossier l'arrêt de la chambre civile notifié aux parties le 5 juin 2020. Selon cet arrêt, qui statuait sur l'appel formé par Mme A______ contre le jugement de divorce prononcé le 23 août 2019 par le TPI, M. A______ avait été condamné à payer à Mme A______ la somme de CHF 142'373.50 au titre de la liquidation du régime matrimonial.

10) Le 1er septembre 2020 également, Mme A______ a reçu sur son compte bancaire la somme de CHF 118'187.75 au titre de la liquidation du régime matrimonial.

11) Lors de l'entretien périodique du 8 septembre 2020, l'assistante sociale a informé Mme A______ qu'au vu de ce versement, l'aide financière était interrompue avec effet immédiat et que le remboursement des prestations financières qui lui avaient été allouées lui serait réclamé. Elle était priée de rembourser les prestations du mois de septembre 2020, qu'elle avait déjà reçues.

12) Par décision du 8 septembre 2020, l'hospice a réclamé à Mme A______ la restitution de la somme de CHF 89'977.35 correspondant aux prestations perçues entre le 1er octobre 2017 et le 31 août 2020.

13) Le 28 décembre 2020, Mme A______ a formé opposition contre la décision précitée.

Elle n'avait perçu que la somme de CHF 118'187.75, la somme prévue par l'arrêt de la chambre civile ayant été amputée de frais judiciaires et autres honoraires d'avocat. Avec cette somme, elle avait réglé diverses dettes, dont CHF 10'890.85 en faveur de l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE), CHF 1'000.- en faveur du Tribunal fédéral et CHF 3'019.- pour des frais d'auto-école et des émoluments du service des véhicules en vue d'obtenir son permis de conduire. Elle avait en outre remboursé à l'hospice les sommes de CHF 6'074.95 (correspondant aux prestations de juin à août 2020) et CHF 2'687.- (correspondant aux prestations de septembre 2020).

Depuis septembre 2020, elle devait subvenir à ses besoins avec ce montant, qui ne s'élevait plus, au 30 novembre 2020, qu'à CHF 65'419.90.

14) Par décision du 18 mars 2021, l'hospice a admis partiellement l'opposition, en confirmant la décision attaquée en tant qu'elle réclamait le remboursement d'une somme, mais en fixant cette dernière à CHF 47'392.80.

Selon les art. 9 al. 3 let. c et 38 al. 3 de la loi sur l’insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04), dès lors que les prestations étaient accordées en attendant que le bénéficiaire puisse toucher un capital au titre de la liquidation du régime matrimonial, elles étaient remboursables. Le fait que l'art. 38 LIASI n'ait pas été expressément cité dans la décision attaquée n'y changeait rien.

Cela étant, au vu de l'ensemble de la situation, à titre exceptionnel et à bien plaire, l'hospice était d'accord d'examiner l'opposition sous l'angle de l'art. 40 al. 2 LIASI, plus favorable à Mme A______. La somme reçue devait être qualifiée d'importante au sens de la jurisprudence et des normes de la conférence suisse des institutions d'aide sociale (ci-après : CSIAS). Étant rappelé qu'il n'était pas admissible de privilégier des créanciers au détriment de l'aide sociale, il était déduit à titre exceptionnel de la somme nette perçue les remboursements faits à l'AFC-GE et au Tribunal fédéral – mais pas les frais liés au permis de conduire, étant précisé par ailleurs que les remboursements en faveur de l'hospice avaient déjà été déduits de la somme réclamée.

Un montant de CHF 28'904.- pouvait en outre être déduit au titre de montant nécessaire à la subsistance de Mme A______ de septembre 2020 à avril 2021, ce qui ramenait la somme à rembourser à CHF 47'392.80.

Une remise n'était pas envisageable, aucune des deux conditions de celle-ci n'étant remplie. En effet, Mme A______ connaissait la subsidiarité de l'aide sociale, ce qui excluait sa bonne foi, et le montant encore à sa disposition, soit environ CHF 30'000.-, ne la mettait pas dans une situation difficile au sens de la loi.

15) Par acte posté le 19 avril 2021, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur opposition précitée, concluant à son annulation, au constat qu'elle ne devait restituer aucun montant à l'hospice et à l'octroi d'une indemnité de procédure.

Les prestations reçues n'étaient aucunement indues, puisqu'elle était totalement indigente au moment où elle les avait perçues. Aucune faute ni négligence ne pouvait lui être reprochée, et elle était de bonne foi. Le remboursement ne pouvait pas se fonder sur l'art. 38 LIASI, car les prestations n'avaient pas été accordées dans l'attente de la liquidation du régime matrimonial, la demande en divorce n'ayant d'ailleurs pas encore été déposée au moment de l'octroi des premières prestations.

S'agissant de l'art. 40 al. 2 LIASI, l'équité commandait de ne demander aucune restitution. En effet, elle avait affecté le montant de CHF 118'187.75 au paiement de factures et de dettes fiscales ainsi qu'à l'obtention de son permis de conduire, qui lui permettrait manifestement d'augmenter ses chances de trouver un emploi. Elle avait également dû l'utiliser pour ses besoins courants à partir du mois de septembre 2020.

Subsidiairement, la demande de remise aurait dû être acceptée, notamment dans la mesure où le remboursement demandé la mettrait dans une situation difficile, puisqu'elle devait continuer à subvenir à ses besoins au débit du capital reçu.

16) Le 27 mai 2021, l'hospice a conclu au rejet du recours.

Le texte des art. 9 al. 3 let. c et 38 al. 3 LIASI n'exigeait nullement que la demande en divorce ait été déposée antérieurement à l'octroi des prestations. Il arrivait souvent qu'en cours d'aide financière, un bénéficiaire dépose une demande en divorce, et c'était à compter de cette date que les prestations devenaient des avances dans l'attente de la liquidation du régime matrimonial, et donc remboursables à ce titre.

En l'espèce, Mme A______ ne pouvait ignorer que lorsqu'elle recevrait sa part dans la liquidation du régime matrimonial, elle devrait rembourser les prestations reçues. Elle avait en effet par deux fois été amenée à rembourser des prestations touchées pendant une période pour laquelle elle avait rétroactivement obtenu des pensions alimentaires. Il était en outre faux de dire que l'hospice avait renoncé à invoquer l'art. 38 LIASI pour fonder la décision attaquée. L'art. 40 al. 2 LIASI, appliqué à titre exceptionnel et à bien plaire, l'avait été de manière correcte. Quant au fait que Mme A______ ne disposerait plus de la somme nécessaire, il n'était pas pertinent.

Une remise n'était pas envisageable dans le cadre de l'application des art. 38 ou 40 al. 2 LIASI, mais seulement dans celui de l'application de l'art. 36 LIASI, à propos duquel pouvait se poser la question de la bonne foi. En particulier, s'agissant de l'art. 38 LIASI, en matière d'avances il n'y avait pas de place pour la bonne foi, le bénéficiaire connaissant le principe de subsidiarité de l'aide sociale. En toute hypothèse, la seconde condition d'une remise n'était pas remplie, dès lors que la somme laissée à disposition, soit CHF 30'000.-, la mettait à l'abri et que, de surcroît, elle n'avait pas apporté la preuve qu'elle ne disposait pas de CHF 47'392.80, dans la mesure où elle n'avait pas, au stade du recours, produit les relevés de tous ses comptes bancaires.

17) Le 1er juin 2021, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 25 juin 2021, prolongé par la suite au 10 juillet 2021, pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

18) Le 9 juillet 2021, Mme A______ a persisté dans ses conclusions.

Le solde de son de son compte courant s'élevait à ce jour à CHF 26'567.54, montant inférieur à la franchise sur la fortune de CHF 30'000.- prévue par les normes CSIAS.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la restitution à l'hospice de prestations d'aide financière à hauteur de CHF 47'392.80, et subsidiairement sur la remise de la somme qui devrait être remboursée.

3) a. Aux termes de l'art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), quiconque est dans une situation de détresse et n'est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d'être aidé et assisté, et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine.

Le droit constitutionnel fédéral ne garantit toutefois que le principe du droit à des conditions minimales d'existence ; il appartient ainsi au législateur fédéral, cantonal et communal d'adopter des règles en matière de sécurité sociale qui ne descendent pas en dessous du seuil minimum découlant de l'art. 12 Cst. mais qui peuvent aller au-delà (arrêts du Tribunal fédéral 2P.318/2004 du 18 mars 2005 consid. 3 ; 2P.115/2001 du 11 septembre 2001 consid. 2a ; ATA/790/2019 du 16 avril 2019 et les références citées). L'art. 39 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00) reprend ce principe : « toute personne a droit à la couverture de ses besoins vitaux afin de favoriser son intégration sociale et professionnelle ».

b. En droit genevois, la LIASI et le règlement d'exécution de la LIASI du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01) mettent en œuvre ce principe constitutionnel.

La LIASI a pour but de prévenir l'exclusion sociale et d'aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1). Ses prestations sont fournies sous forme d'accompagnement social et de prestations financières (art. 2 LIASI). Ces dernières sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI) et leurs bénéficiaires doivent faire valoir sans délai leurs droits auxquels l'aide financière est subsidiaire (art. 9 al. 2 LIASI ; ATA/790/2019 précité et les références citées).

Ont droit à des prestations d'aide financière les personnes qui ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire du canton de Genève, ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien et répondent aux autres conditions de la loi (art. 11 al. 1 LIASI). Les conditions financières donnant droit aux prestations d'aide financière sont déterminées aux art. 21 à 28 LIASI.

En contrepartie des prestations auxquelles il a droit, le bénéficiaire s'engage, sous forme de contrat, à participer activement à l'amélioration de sa situation (art. 14 LIASI). Il est tenu de participer activement aux mesures le concernant (art. 20 LIASI), de fournir tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d'aide financière (art. 32 al. 1 LIASI) et de se soumettre à une enquête de l'hospice lorsque celui-ci le demande (art. 32
al. 2 LIASI).

4) a. Aux termes de l'art. 38 LIASI, si les prestations d'aide financière prévues par la présente loi ont été accordées dans l'attente de la liquidation d'une succession, du versement d'un capital pour cause de décès par la prévoyance professionnelle ou par une assurance-vie, les prestations d'aide financière sont remboursables (al. 1). L'hospice demande au bénéficiaire le remboursement des prestations d'aide financière accordées depuis l'ouverture de la succession, dès qu'il peut disposer de sa part dans la succession ou du capital provenant de la prévoyance professionnelle ou d'une assurance-vie (al. 2). Les dispositions qui précèdent s'appliquent également aux prestations accordées dans l'attente de la liquidation du régime matrimonial ou du régime des biens des partenaires enregistrés ; dans ce cas, l'hospice demande le remboursement des prestations d'aide financière accordées depuis l'ouverture de l'action en liquidation du régime, dès que le bénéficiaire peut disposer de sa part de liquidation (al. 3). L'action en restitution se prescrit par cinq ans, à partir du jour où l'hospice a eu connaissance du fait qui ouvre le droit au remboursement ; le droit au remboursement s'éteint au plus tard dix ans après la survenance du fait (al. 4).

b. Selon l'art. 40 al. 1 et 2 LIASI, si des prestations d'aide financière ont été accordées alors que le bénéficiaire s'est dessaisi de ses ressources ou de parts de fortunes, les prestations d'aide financière sont remboursables.

c. Les limites de fortune permettant de bénéficier des prestations d'aide financière se montent à CHF 4'000.- pour une personne seule majeure (art. 1 al. 1 RIASI).

d. La chambre administrative a eu l'occasion de procéder à une interprétation historique de l'art. 40 al. 2 LIASI à la lumière des travaux préparatoires de la LIASI. Elle a retenu que cette disposition ne pouvait viser le seul remboursement des prestations servies dès l'entrée en possession de la fortune, mais bien aussi des prestations servies auparavant. En l'absence de limite temporelle passée fixée par la loi, on devait retenir que le législateur avait visé l'ensemble des prestations déjà servies, sans limite de temps, mais dans les seules limites de l'équité et de la proportionnalité (ATA/815/2021 du 10 août 2021 consid. 5d ; ATA/26/2021 du 12 janvier 2021 consid. 4d ; ATA/508/2016 du 14 juin 2016 consid. 8 et la référence citée). Cette jurisprudence a été confirmée par le Tribunal fédéral.

e. Enfin, la chambre de céans a déjà considéré à plusieurs reprises qu'il n'appartenait pas à l'État et indirectement à la collectivité, de désintéresser d'éventuels créanciers. En effet, tel n'est pas le but de la loi, qui poursuit celui de soutenir les personnes rencontrant des difficultés financières, en les aidant à se réinsérer socialement et professionnellement, étant rappelé que l'aide est subsidiaire, de manière absolue, à toute autre ressource. Il n'est ainsi pas acceptable d'être au bénéfice d'une aide sociale ordinaire et d'utiliser sa fortune personnelle et récemment acquise pour désintéresser ses créanciers (ATA/815/2021 précité consid. 5e ; ATA/26/2021 précité consid. 4f ; ATA/479/2018 du 15 mai 2018 consid. 6 et les références citées).

5) Le principe de la bonne foi entre administration et administré, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., exige que l'une et l'autre se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l'administration doit s'abstenir de toute attitude propre à tromper l'administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 129 I 161
consid. 4 ; 129 II 361 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1013/2015 du 28 avril 2016 consid. 3.1 ; ATA/393/2018 du 24 avril 2018 consid. 6b). Ne peut prétendre à être traité conformément aux règles de la bonne foi que celui qui n'a pas lui-même violé ce principe de manière significative. On ne saurait ainsi admettre, dans le cas d'espèce, de se prévaloir de son propre comportement déloyal et contradictoire (arrêt du Tribunal fédéral 2A.52/2003 du 23 janvier 2004 consid. 5.2 = RDAF 2005 II 109 ss, spéc. 120 ; ATA/112/2018 du 6 février 2018 consid. 4 ; ATA/1004/2015 du 29 septembre 2015 consid. 6d ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, n. 580).

6) En l'espèce, la recourante a signé le 30 août 2017 le document intitulé « Mon engagement » résumant ses obligations et notamment son engagement à rembourser toute prestation exigible à teneur des dispositions légales en vigueur.

Selon la lettre très claire de l'art. 38 al. 3 LIASI, les prestations accordées dans l'attente de la liquidation du régime matrimonial depuis l'ouverture de l'action en liquidation du régime, soit en l'occurrence à tout le moins depuis le dépôt de la demande en divorce, étaient remboursables, si bien que la critique de la recourante à cet égard tombe à faux. En ne tenant pas compte de l'aide accordée entre juin et septembre 2020, déjà remboursée, les prestations remboursables – soit celles servies entre le 1er novembre 2017 et le 31 mai 2020 – s'élevaient au total à CHF 75'355.-, soit un montant largement supérieur à celui réclamé par la décision attaquée.

Dès lors, la recourante ne peut rien tirer de ce que l'intimé a choisi d'appliquer une autre disposition légale, soit l'art. 40 al. 2 LIASI, avec un résultat qui lui est plus favorable. Elle perd en outre de vue la jurisprudence constante de la chambre de céans selon laquelle il n'est pas admissible d'être au bénéfice de prestations et d'utiliser des ressources récemment acquises pour désintéresser ses créanciers.

La décision attaquée est ainsi conforme au droit sur les éléments qui précèdent et la demande de remboursement s'avère, dans son principe, fondée.

7) a. À teneur de l'art. 42 LIASI, le bénéficiaire qui était de bonne foi n'est tenu au remboursement, total ou partiel, que dans la mesure où il ne serait pas mis, de ce fait, dans une situation difficile (al. 1) ; dans ce cas, il doit formuler par écrit une demande de remise dans un délai de trente jours dès la notification de la demande de remboursement ; cette demande de remise est adressée à l'hospice (al. 2). Les conditions de la bonne foi et de la condition financière difficile sont cumulatives (ATA/26/2021 précité consid. 7a ; ATA/1377/2017 du 10 octobre 2017 consid 11).

b. En l’espèce, la seconde de ces conditions n'est pas remplie, puisqu'au moment où a été rendue la décision attaquée, la recourante aurait encore disposé en cas de remboursement d'un montant à même de lui permettre de subvenir à ses besoins de base pendant un certain temps, lui donnant assez de temps pour redemander le cas échéant une aide financière une fois son capital épuisé, ou du moins revenu en dessous des limites de fortune admises.

La réalisation de la première condition, à savoir celle de la bonne foi, n'a pas lieu d'être examinée, les conditions posées par l'art. 42 al. 1 LIASI étant cumulatives.

La demande de remboursement étant fondée et son montant de CHF 47'392.80 inférieur à celui prévu par les dispositions applicables, le recours sera rejeté.

8) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87
al. 1 LPA ; art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu son issue, il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 avril 2021 par Madame A______ contre la décision sur opposition de l'Hospice général du 18 mars 2021 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Samir Djaziri, avocat de la recourante ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :