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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3112/2020

ATA/303/2021 du 09.03.2021 ( AIDSO ) , REJETE

Recours TF déposé le 14.04.2021, rendu le 07.12.2021, IRRECEVABLE, 8C_264/2021
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3112/2020-AIDSO ATA/303/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 mars 2021

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

HOSPICE GÉNÉRAL




EN FAIT

1) Monsieur A______ est né le ______1959 au Burkina Faso, pays dont il est originaire et qu'il a quitté en 1979 pour la Suisse, où il est titulaire d'un permis d'établissement depuis 1994.

2) Du 1er juillet 2003 au 30 novembre 2016, M. A______ a été mis au bénéfice des prestations d'aide financière délivrées par l'Hospice général (ci-après : l'hospice).

3) En février 2015, l'hospice a procédé à une enquête au sujet de M. A______.

4) Par décision du 8 mai 2015, déclarée exécutoire nonobstant opposition, l'hospice a mis un terme à l'aide financière accordée à M. A______ dès le 1er mai 2015.

L'enquête menée avait révélé que le montant de la fortune de M. A______ dépassait la limite admise par la loi, fixée à CHF 4'000.-, dès lors qu'il était détenteur d'un véhicule de type B______, année 2014 (ci-après : le véhicule), d'une valeur d'achat par un garagiste d'environ CHF 20'730.- et immatriculé à son nom le 5 août 2014. Bien qu'ayant affirmé que le véhicule ne lui appartenait pas, il en était le détenteur et n'avait pu justifier de la provenance de l'argent ayant permis le paiement de l'assurance et de l'impôt de la voiture. Il avait ainsi failli à son devoir de collaboration après avoir été averti des conséquences de ce manquement.

5) Le 9 juin 2015, M. A______ a formé opposition contre cette décision, concluant à son annulation.

6) Par décision du 1er juillet 2015, l'hospice a rejeté l'opposition de M. A______ et confirmé la décision du 8 mai 2015.

7) Par acte du 23 juillet 2015, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation, à ce qu'il soit dit que l'aide sociale n'était pas interrompue et qu'il pouvait en bénéficier à nouveau dès le 1er avril 2015.

8) Par décision du 13 août 2015 (ATA/836/2015), la présidence de la chambre administrative a constaté, en tant que de besoin, que le recours de M. A______ avait effet suspensif depuis le prononcé de la décision sur opposition, soit depuis le 1er juillet 2015.

9) Par arrêt du 18 octobre 2016 (ATA/878/2016), la chambre administrative a rejeté le recours de M. A______.

Bien que M. A______ alléguât que le véhicule appartînt à son cousin, divers éléments mettaient en évidence qu'il en était bien le propriétaire. Ainsi, en retenant la valeur résiduelle non contestée de la voiture, soit CHF 20'735.-, la fortune mobilière de l'intéressé dépassait la valeur-seuil de CHF 4'000.- permettant à une personne seule de bénéficier des prestations d'aide sociale.

10) Le 15 novembre 2016, l'hospice a informé M. A______ qu'il ne lui verserait plus de prestations à compter du 1er décembre 2016 et qu'une demande de remboursement des prestations obtenues en vertu de l'effet suspensif de son recours lui serait notifiée prochainement.

11) Le 18 novembre 2016, M. A______ a recouru au Tribunal fédéral contre l'arrêt précité.

12) Par arrêt du 16 janvier 2017 (8C_764/2016), le Tribunal fédéral a déclaré le recours irrecevable, M. A______ n'ayant pas versé l'avance de frais demandée.

13) Il ressort de l'arrêt ATA/34/2019 du 15 janvier 2019 les éléments suivants :

Par décision du 16 mars 2017, l'hospice avait refusé à M. A______ l'octroi de prestations d'aide sociale dès le 1er février 2017.

Il était toujours propriétaire du véhicule, dont la valeur, de CHF 15'941.-, était supérieure à la limite de fortune admise pour une personne seule. Aucune déduction ne pouvait être admise sur ce montant, dès lors qu'il n'avait pas procédé à la vente du véhicule et utilisé une partie du produit de celle-ci pour régulariser sa situation financière. Il en résultait que sa fortune dépassait le montant admis par les barèmes de CHF 11'941.-.

Par décision du 18 mai 2017, l'hospice avait rejeté l'opposition formée par M. A______ et confirmé la décision du 16 mars 2017.

Par arrêt du 2 août 2017, la chambre administrative avait rejeté le recours interjeté le 21 juin 2017 (ATA/1150/2017). Le recourant persistait à affirmer ne pas être propriétaire du véhicule, alors même que cette question avait déjà été examinée et tranchée par la chambre de céans dans son arrêt du 18 octobre 2016 (ATA/878/2016) entré en force de chose jugée et aux développements duquel il était renvoyé. Dans ce cadre, il était sans pertinence que le Tribunal fédéral ne se soit pas penché sur le fond de la cause en raison de l'absence de paiement de l'avance de frais par le recourant.

Par arrêt du 20 décembre 2017 (cause 8C_661/2017), le Tribunal fédéral avait retenu que, dans la mesure où le recours déposé contre l'arrêt cantonal du 18 octobre 2016 avait été déclaré irrecevable par le Tribunal fédéral, l'autorité précédente pouvait - sans violer le droit fédéral - se déclarer liée par son arrêt antérieur sur la question de la propriété du véhicule (consid. 4.3).

Par courrier du 30 janvier 2018, M. A______ avait informé l'hospice de l'annulation de la carte grise du véhicule le 29 décembre 2017 et sollicité la réouverture de ses droits à l'aide sociale, rappelant qu'une procédure d'expulsion de son logement était pendante par-devant le Tribunal des baux et loyers.

Selon un contrôle effectué par le service des enquêtes de l'hospice, parallèlement à l'annulation de la carte grise le 29 décembre 2017, M. A______ avait fait établir une nouvelle carte grise à son nom pour le même véhicule. Seule la compagnie assurant le véhicule avait été modifiée. M. A______ avait indiqué, le 19 février 2018, que les démarches de l'annulation de la carte grise avaient été effectuées « par une connaissance qui n'avait pas compris les instructions données ». La carte grise avait été à nouveau annulée le 1er février 2018.

Par décision du 1er février 2018, confirmée sur opposition le 27 avril 2018, l'hospice a refusé d'octroyer des prestations d'aide sociale à M. A______, retenant qu'il était toujours propriétaire du véhicule, dont la valeur d'achat estimée à CHF 12'817.- était supérieure de CHF 8'817.- à la limite de fortune admise pour une personne seule.

Dans le cadre du recours déposé le 28 mai 2018 par M. A______ contre cette décision, la chambre de céans avait entendu plusieurs témoins et des pièces avaient été produites, dont une lettre de M. A______ au directeur de l'hospice dans laquelle celui-là s'étonnait que, malgré ses diverses demandes, son dossier n'ait toujours pas été mis à sa disposition. Il avait fait l'objet de harcèlement de la part de l'ancienne responsable de l'unité C______ et de menaces. Plainte pénale avait été déposée, y compris pour parjure au vu des fausses déclarations qu'elle avait faites devant le juge des baux et loyers.

La chambre administrative rejetait le recours formé le 28 mai 2018 par M. A______ contre la décision de l'hospice du 27 avril 2018, confirmant sa décision sur opposition du 1er février 2018 lui refusant l'octroi des prestations d'aide sociale. M. A______ était toujours propriétaire du véhicule, dont la valeur d'achat estimée à CHF 12'817.- était supérieure de CHF 8'817.- à la limite de fortune admise pour une personne seule.

14) Par décision du 6 novembre 2018, l'hospice a demandé à M. A______ le remboursement de la somme de CHF 38'059.55, prenant en compte les prestations d'aide sociale versées directement, mais également à des tiers en sa faveur, du 1er juillet 2015 (selon décision de la chambre de céans du 13 août 2015) au 30 novembre 2016 (suite à l'arrêt du 18 octobre 2016).

15) L'hospice a rendu une décision sur opposition le 4 septembre 2020.

L'arrêt définitif de la chambre administrative du 18 octobre 2016 avait confirmé qu'il était le propriétaire du véhicule et que sa fortune dépassait le seuil de CHF 4'000.-. Partant, toutes les prestations touchées du 1er juillet 2105 au 30 novembre 2016 l'avaient été de manière indue, au sens de l'art. 36 al. 1 de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04), ce dont il était parfaitement informé, comme l'en attestaient notamment le document « mon engagement » signé en janvier 2015, ainsi que les courriers du centre d'action sociale C______ (ci-après : CAS) des 9 mars et 9 avril 2015. Dans cette mesure, il ne pouvait être retenu qu'il avait touché de bonne foi les prestations réclamées en remboursement.

Toutefois, en application de la jurisprudence, qui rappelait l'obligation d'apprécier de cas en cas le montant des prestations perçues indûment, l'hospice décidait de réduire la somme demandée en restitution à la valeur du prix de vente du véhicule, soit CHF 20'300.-.

La décision du 6 novembre 2018 était confirmée à hauteur de ce montant.

16) M. A______ a formé recours auprès de la chambre administrative contre cette décision par acte expédié le 2 octobre 2020, concluant à son annulation.

À aucun moment la chambre administrative n'avait évoqué la restitution des prestations reçues durant les deux ans qu'avait duré la procédure et donc l'effet suspensif accordé le 13 août 2015. La signature du document « mon engagement » n'avait pas pour conséquence qu'il doive renoncer à tous ses droits. Le prix de vente du véhicule était de CHF 23'300.-. CHF 9'500.- avaient été envoyés au « vrai propriétaire » du véhicule. Avec l'accord de ce dernier, il avait pu utiliser le solde pour rembourser des tiers auxquels il avait dû emprunter de l'argent pour survivre entre janvier 2017 et novembre 2018, ne percevant alors aucune aide sociale. Dès lors, il n'y avait plus aucun montant à « compenser par les 20'300.- aujourd'hui réclamés à nouveau, en restitution du prix dudit véhicule ».

M. A______ a notamment produit deux relevés de la Banque cantonale de Genève du 20 décembre 2018 intitulés « Paiement saisi » selon lesquels les montants de EUR 500.- puis EUR 9'000.- étaient virés, valeur 19 et 22 novembre 2018, de son compte sur un compte bancaire à Ouagadougou au nom de « D______», avec la mention « exécuté » et la communication au bénéficiaire « te rendre ton argent » et la référence personnelle « Rendre argent véhicule ».

Le recours contient en outre diverses critiques formulées à l'encontre de la chambre administrative et de l'hospice.

17) L'hospice a conclu le 26 novembre 2020 au rejet du recours.

M. A______ bénéficiait à nouveau de prestations financières depuis le 1er décembre 2018.

M. A______ contestait avoir commis la moindre faute ou négligence et se prévalait de sa bonne foi. Il répétait que le véhicule ne lui avait jamais appartenu et qu'il avait versé une partie de son prix de vente au réel propriétaire. Force était de rappeler que le litige avait pour origine le défaut d'information de M. A______ s'agissant de sa situation financière, alors même qu'il était parfaitement informé de ses obligations en la matière et avait déjà fait l'objet de décisions de justice pour des faits similaires par le passé (cf. une ordonnance de condamnation pour escroquerie du 22 novembre 2007 et une décision de fin de prestations et de demande de remboursement de prestations reçues indûment du 28 octobre 2005 pour un montant de CHF 39'447.95, jointes à la réponse de l'hospice). Assisté par son avocat durant toute la procédure, il ne pouvait pour le surplus ignorer que l'hospice lui réclamerait les prestations obtenues indûment.

Les conditions de l'art. 36 LIASI étant réunies, l'hospice était fondé à lui réclamer le remboursement de l'intégralité des prestations obtenues sans droit. La réduction au montant de CHF 20'300.- tenait compte de sa situation. Le fait qu'il ait utilisé tout ou partie du prix de vente du véhicule pour rembourser des tiers, au détriment de l'hospice, était contraire au principe de subsidiarité et ne modifiait en rien l'analyse de la situation.

18) Un échange de correspondance est ensuite intervenu entre M. A______, la chambre de céans et l'hospice en lien avec la consultation de son dossier auprès du CAS.

19) M. A______ a demandé le 7 décembre 2020, puis à plusieurs reprises, un délai pour produire une réplique en connaissance de cause de son dossier et pour « remettre les choses dans leur vrai contexte ». Il a également conclu au rejet de la réponse à son recours de l'hospice, lequel se livrait à nouveau à des calomnies à son égard et à des délations gratuites et non constructives.

20) Dans le délai prolongé au 29 janvier 2020, M. A______ a déposé une réplique de douze pages au guichet de la chambre administrative.

La demande de restitution était une mesure de représailles à son encontre. Il développait les divers éléments appuyant cette appréciation sur cinq pages. Il revenait sur les circonstances des faits ayant donné lieu à l'ordonnance pénale de 2007 et du remboursement de la somme à restituer, notamment par une retenue de CHF 3'500.- dont l'hospice n'avait pas tenu compte et qui devait lui être restituée. Il développait ensuite diverses doléances, notamment à l'encontre des personnes suivant son dossier à l'hospice.

21) Le 10 février 2021, l'hospice a adressé un courrier à M. A______ pour lui faire savoir que ses critiques figurant dans ses écritures du 29 janvier 2021 à l'encontre de leur conseillère juridique en charge du dossier étaient inadmissibles et qu'il réservait toute action à son encontre pour le cas où il ne les cesserait pas immédiatement.

22) La cause a été gardée à juger le 2 février 2021.

23) M. A______ a spontanément déposé de nouvelles écritures le 16 février 2021 contenant à nouveau diverses critiques à l'encontre de personnes ayant eu à traiter son dossier, écritures qui ont été transmises à l'hospice.

24) Il a été, dans le même temps, rappelé à M. A______, par courrier du 22 février 2021, que la cause avait été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige a trait à la demande de restitution des prestations d'aide financière accordées par l'intimé au recourant, d'un montant total initial de CHF 38'059.55, réduit toutefois à CHF 20'300.- au terme de la décision sur opposition contestée du 4 septembre 2020.

Le montant de CHF 38'059.55 correspondait aux prestations versées en faveur du recourant sur la période du 1er juillet 2015 au 30 novembre 2016, des suites de la décision de la présidence sur effet suspensif, respectivement de l'arrêt de la chambre de céans des 13 août 2015, puis 18 octobre 2016.

Il ressort dudit arrêt du 18 octobre 2016 que c'est à raison que l'hospice a mis un terme, dès le 1er mai 2015, aux prestations en faveur du recourant, en raison de sa propriété sur un véhicule alors d'une valeur résiduelle non contestée de CHF 20'735.-, soit une fortune mobilière dépassant le seuil de CHF 4'000.- permettant à une personne seule de bénéficier des prestations d'aide financière (art. 1 du règlement d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 25 juillet 2007 - RIASI - J 4 04.01).

Cette question est définitivement tranchée.

3) a. Aux termes de l'art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), quiconque est dans une situation de détresse et n'est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d'être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine. L'art. 39 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00) contient une garantie similaire.

b. En droit genevois, la LIASI et le RIASI concrétisent ces dispositions constitutionnelles, en ayant pour but de prévenir l'exclusion sociale et d'aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1 LIASI). Les prestations de l'aide sociale individuelle sont l'accompagnement social, des prestations financières et l'insertion professionnelle (art. 2 LIASI). La personne majeure qui n'est pas en mesure de subvenir à son entretien ou à celui des membres de la famille dont il a la charge a droit à des prestations d'aide financière. Celles-ci ne sont pas remboursables sous réserve notamment de leur perception indue (art. 8 al. 1 et 2 LIASI). Elles sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI).

4) a. Le demandeur doit fournir tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d'aide financière (art. 32 al. 1 LIASI). La LIASI impose ainsi un devoir de collaboration et de renseignement. Le bénéficiaire ou son représentant légal doit immédiatement déclarer à l'hospice tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d'aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression (art. 33 al. 1 LIASI ; ATA/1446/2019 du 1er octobre 2019 consid. 5a).

Le document intitulé « mon engagement en demandant une aide financière à l'hospice » concrétise cette obligation de collaborer en exigeant du demandeur qu'il donne immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaires à l'établissement de sa situation économique (ATA/93/2020 du 28 janvier 2020 consid. 3a).

b. Selon l'art. 36 LIASI, est considérée comme étant perçue indûment toute prestation qui a été touchée sans droit (al. 1). Par décision écrite, l'hospice réclame au bénéficiaire le remboursement de toute prestation d'aide financière perçue indûment par la suite de la négligence ou de la faute du bénéficiaire (al. 2). Le remboursement des prestations indûment touchées peut être réclamé si le bénéficiaire, sans avoir commis de faute ou de négligence, n'est pas de bonne foi (al. 3). L'action en restitution se prescrit par cinq ans, à partir du jour où l'hospice a eu connaissance du fait qui ouvre le droit au remboursement. Le droit au remboursement s'éteint au plus tard dix ans après la survenance du fait (al. 5).

c. Celui qui a encaissé des prestations pécuniaires obtenues en violation de son obligation de renseigner est tenu de les rembourser selon les modalités prévues par la LIASI qui concrétisent tant le principe général de la répétition de l'enrichissement illégitime que celui de la révocation, avec effet rétroactif, d'une décision administrative mal fondée, tout en tempérant l'obligation de rembourser en fonction de la faute et de la bonne ou mauvaise foi du bénéficiaire (ATA/93/2020 précité consid. 3c et les références citées).

d. La chambre de céans a déjà considéré à plusieurs reprises qu'il n'appartenait pas à l'État et indirectement à la collectivité, de désintéresser d'éventuels créanciers. En effet, tel n'est pas le but de la loi, qui poursuit celui de soutenir les personnes rencontrant des difficultés financières, en les aidant à se réinsérer socialement et professionnellement, étant rappelé que l'aide est subsidiaire, de manière absolue, à toute autre ressource. Il n'est ainsi pas acceptable d'être au bénéfice d'une aide sociale ordinaire et d'utiliser sa fortune personnelle et récemment acquise pour désintéresser ses créanciers (ATA/479/2018 du 15 mai 2018 consid. 6 et les références citées).

5) a. L'action en restitution se prescrit par cinq ans, à partir du jour où l'hospice a eu connaissance du fait qui ouvre le droit au remboursement. Le droit au remboursement s'éteint au plus tard dix ans après la survenance du fait (art. 36 al. 5 LIASI ; ATA/1083/2016 du 20 décembre 2016).

Lorsqu'il s'agit d'une créance de droit public, la prescription s'examine d'office. En revanche, elle ne s'examine que sur exception de l'État, lorsque c'est un particulier qui est créancier (ATF 138 II 169 consid. 2.2 in RDAF 2013 II 101 et la jurisprudence citée ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 745 p. 263).

b. En l'espèce, s'agissant d'une créance de droit public, la prescription s'examine d'office.

c. La prescription est notamment interrompue lorsque le créancier fait valoir ses droits par une action devant un tribunal (art. 135 ch. 2 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220). Les conditions d'interruption de la prescription sont plus souples en droit public que celles prévues par l'art. 135 CO. Il s'agit de tout acte propre à faire admettre la prétention en question, visant à l'avancement de la procédure et accompli dans une forme adéquate. L'administré interrompt la prescription par toute intervention auprès de l'autorité compétente tendant à faire reconnaître ses droits. Pour l'autorité, le délai est interrompu en particulier dès lors qu'elle déclare son intention d'ouvrir une procédure et par tout acte qu'elle prend pendant celle-ci : par exemple par l'envoi au contribuable d'une formule de déclaration fiscale et, par la suite, par les actes qui, jusqu'à la décision, visent à établir la créance puis, ensuite, à la recouvrer. En revanche, des actes préparatoires tels que des mesures d'instruction ne suffisent pas. Le débiteur doit avoir reçu connaissance du fait interruptif (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 100 et la jurisprudence citée).

d. À teneur du dossier, l'hospice a pris connaissance des faits à la base de la demande de restitution au terme de l'enquête diligentée en février 2015 à l'encontre du recourant. C'est déjà dire que la version de ce dernier, selon laquelle il aurait spontanément indiqué à l'hospice être propriétaire du véhicule incriminé, n'est pas avérée, étant au contraire relevé qu'il a depuis la découverte dudit véhicule dans son patrimoine soutenu qu'elle appartenait à un tiers.

L'hospice a depuis lors manifesté à tout le moins à deux reprises son intention de recouvrer le trop-perçu mentionné ci-dessus, à savoir dans sa décision du 15 novembre 2016, puis dans sa demande de remboursement du 6 novembre 2018. Ce sont là deux actes interruptifs de la prescription de cinq ans, étant relevé que le délai de péremption de dix ans n'est pas davantage acquis.

6) L'hospice a, en novembre 2018, dans un premier temps, réclamé au recourant l'intégralité de prestations versées, soit CHF 38'059.55, pour les arrêter finalement, près de deux ans plus tard, soit selon décision du 4 septembre 2020, à CHF 20'300.- correspondant à la valeur vénale du véhicule.

a. De jurisprudence constante, toute prestation obtenue en violation de l'obligation de renseigner l'hospice est une prestation perçue indûment (ATA/918/2019 du 21 mai 2019 consid. 2). Les bénéficiaires des prestations d'assistance sont tenus de se conformer au principe de la bonne foi dans leurs relations avec l'administration, notamment en ce qui concerne l'obligation de renseigner prévue par la loi, sous peine d'abus de droit. Si le bénéficiaire n'agit pas de bonne foi, son attitude doit être sanctionnée et les décisions qu'il a obtenues en sa faveur peuvent être révoquées en principe en tout temps. Violer le devoir de renseigner est contraire à la bonne foi (ATA/93/2020 précité consid. 3c).

b. Il convient toutefois d'apprécier, au cas par cas, chaque situation pour déterminer si l'entier des prestations, ou seulement une partie de celles-ci, a été perçu indûment et peut faire l'objet d'une demande de remboursement (ATA/947/2018 du 18 septembre 2018 consid. 3d).

c. Le bénéficiaire de bonne foi n'est tenu au remboursement, total ou partiel, que dans la mesure où il ne serait pas mis de ce fait dans une situation difficile (art. 42 al. 1 LIASI). De jurisprudence constante, les conditions de la bonne foi et de la condition financière difficile sont cumulatives (ATA/93/2020 précité consid. 4b et les références citées). La condition de la bonne foi doit être réalisée dans la période où l'assuré concerné a reçu les prestations indues dont la restitution est exigée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_766/2007 du 17 avril 2008 consid. 4).

Selon la jurisprudence de la chambre administrative, un assuré qui viole ses obligations d'informer l'hospice de sa situation financière ne peut être considéré de bonne foi (ATA/93/2020 précité consid. 4b et les références citées). La bonne foi doit être niée quand l'enrichi pouvait, au moment du versement, s'attendre à son obligation de restituer parce qu'il savait ou devait savoir, en faisant preuve de l'attention requise, que la prestation était indue (art. 3 al. 2 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210 ; ATF 130 V 414 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_385/2011 du 13 février 2012 consid. 3).

7) En l'espèce le recourant ne saurait être considéré comme de bonne foi. Comme déjà relevé, c'est au terme d'une enquête que l'hospice a découvert sa propriété sur une voiture estimée en 2015 à plus de CHF 20'000.-. Alors que le 8 mai 2015 l'hospice avait mis un terme à son aide financière compte tenu de cet élément de fortune à l'évidence connu de lui-même, le recourant y a formé opposition puis, le 23 juillet 2015, a formé recours contre la décision de l'hospice sur opposition du 1er juillet 2015. C'est dans le cadre de son recours contre cette dernière décision et alors que le signal lui avait déjà été donné par deux fois que l'hospice entendait cesser son aide compte tenu de la présence de ce véhicule dans son patrimoine, que le recourant a fait valoir devant la chambre de céans son droit aux prestations le temps de la procédure, ce qui a été constaté par décision sur effet suspensif du 13 août 2015, entraînant la reprise des versements concernés par la décision de demande de restitution faisant l'objet du présent recours.

Dans la mesure où il contestait alors le bien-fondé de l'arrêt des prestations, lequel était donc litigieux et dont le versement a été repris par le jeu de l'effet suspensif au recours, il ne saurait être suivi en prétendant qu'il ne pouvait pas s'attendre à devoir rembourser les prestations en définitive indûment perçues. Il connaissait au demeurant cette obligation de restitution pour en avoir déjà fait l'expérience en 2005 pour près de CHF 40'000.-.

Sur le principe, la demande de restitution est donc fondée.

Dans la mesure où la condition de la bonne foi n'est pas réalisée en l'espèce, nul n'est besoin d'examiner la condition cumulative d'une situation financière difficile dans laquelle le remboursement placerait le recourant, étant relevé que ce dernier a déjà bénéficié d'un geste de l'hospice qui a réduit sa demande de restitution de près de moitié du montant perçu indûment et correspondant au montant de la valeur du véhicule ayant appartenu au recourant.

Il sera au demeurant relevé que le recourant concède avoir vendu le véhicule pour le montant de CHF 23'300.-, soit un montant supérieur à celui qui lui est en définitive réclamé par l'hospice, et avoir affecté une partie dudit montant à désintéresser des créanciers. Il ne peut dans ces circonstances se prévaloir valablement d'une situation difficile à laquelle l'exposerait la restitution, étant relevé qu'il a versé EUR 9'500.- sur le compte bancaire à Ouagadougou d'un tiers portant le même nom de famille, entre le 19 et le 22 novembre 2018, alors même qu'il avait connaissance de la demande de restitution du 6 novembre précédent.

La décision attaquée est ainsi conforme au droit sur les éléments qui précèdent et la demande de remboursement s'avère, dans son principe et son montant, fondée.

Le recours sera partant rejeté.

8) Vu la nature et l'issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al.  1 LPA ; art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 octobre 2020 par Monsieur A______ contre le la décision de l'Hospice général du 4 septembre 2020 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______ ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et Tombesi, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :