Aller au contenu principal

Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

1 resultats
P/21087/2022

AARP/22/2025 du 20.01.2025 sur JTDP/448/2024 ( PENAL ) , REJETE

Descripteurs : LÉSION CORPORELLE SIMPLE;VIOLENCE DOMESTIQUE
Normes : CP.123.al2
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/21087/2022 AARP/22/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 20 janvier 2025

 

Entre

A______, domicilié c/o Mme B______, ______, comparant par Me C______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/448/2024 rendu le 18 avril 2024 par le Tribunal de police,

 

et

B______, partie plaignante, comparant par Me D______, avocate,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 18 avril 2024, par lequel le Tribunal de police (TP), l'a acquitté du chef d'accusation de menaces (art. 180 al. 1 et 2 let. a du code pénal suisse [CP]) mais l'a reconnu coupable de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 et 2 al. 1 et 4 CP) et lui a infligé une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 10.- (sous déduction d'une unité pour un jour de détention avant jugement), tout en renonçant à révoquer le sursis octroyé le 8 décembre 2020 par le Ministère public du canton de Genève (MP). A______ a également été condamné à payer à B______ CHF 1'000.- avec intérêts à 5% dès le 1er octobre 2022 (tort moral), frais de la procédure à sa charge.

Il conclut à son acquittement, avec les conséquences qui en découlent, y compris l'octroi d'une indemnité de CHF 200.- pour la détention subie à tort.

b. Selon l'ordonnance pénale du 12 juillet 2023, il est encore reproché à A______ d'avoir, le 1er octobre 2022, attrapé violemment B______, son épouse, au niveau des côtes et par le sein, lui causant de la sorte des ecchymoses, lésions attestées par certificat médical, avant de la saisir par les mollets et de la jeter sur le canapé.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Le 2 octobre 2022, B______ a déposé plainte à la police, exposant que son compagnon et désormais époux et elle rencontraient des difficultés depuis trois ans, l'homme se montrant violent. Il la frappait plusieurs fois par semaine, à coups de poings, généralement au niveau des côtes. Elle avait fait à diverses reprises appel à la police et à une occasion déjà porté plainte. Le 30 septembre 2022, A______ était rentré à la maison après une séparation de deux semaines, intervenue à la demande de B______. Elle avait déposé ses affaires devant l'appartement et avait appelé la police, en raison de ses insultes, mais il avait refusé de partir. Après le passage des agents, il s'était mis à se moquer d'elle, à danser et à boire de l'alcool, disant qu'il avait tous les droits. À leur réveil, le lendemain matin, comme le téléphone de A______ sonnait longuement, elle avait regardé l'écran et avait constaté la réception de messages d'une femme, selon lesquels le prévenu n'attendait plus que ses papiers pour quitter son épouse. Voulant en avoir le cœur net, elle avait appelé la correspondante et s'était disputée avec elle. A______ avait surgi et tenté de lui arracher l'appareil téléphonique des mains, lequel avait chuté, de sorte que l'homme s'était mis en colère. B______ avait tenté de se défendre et de s'échapper mais il l'avait rejointe afin de lui prendre à son tour son propre téléphone qu'elle tentait de glisser dans sa poche. Il l'avait attrapée par les côtes et avait tiré violemment son sein. Elle avait eu si mal qu'elle avait essayé de le mordre pour se libérer. Elle lui avait dit que s'il continuait, elle déchirerait l'attestation de l'Office cantonal de la population et des migrations (OCPM) qui autorisait le prévenu à séjourner en Suisse. Celui-ci l'avait alors saisie par les mollets, fait tourner et jetée sur le canapé. Elle s'était mise à pleurer et il avait quitté les lieux, emmenant le téléphone de la partie plaignante, les clés de la maison ainsi que le livret de famille et des documents de l'une de leurs filles. Lorsqu'il l'avait tenue par le sein, elle avait eu si peur qu'elle avait vraiment pensé qu'il allait la tuer.

Étaient annexés à la plainte un constat médical et deux photographies du visage et d'une partie du corps de la partie plaignante sur laquelle une marque est décelable. Bien que cela ne soit pas clair, on suppose, vu la teneur du document écrit, qu'il s'agit du dessous du sein gauche. Ledit constat médical décrit la présence d'ecchymoses sous le sein gauche avec des douleurs costales gauches à la respiration et une induration des mollets sans signe de lésion cutanée. Une radio thoracique avait été prescrite. Selon son récit, la patiente avait jeté le téléphone de son époux par terre, ce qui l'avait énervé, de sorte qu'il s'était saisi de son sein gauche et l'avait tiré violemment alors qu'ils étaient dans une chambre. Elle avait couru dans le salon, où il l'avait attrapée par les mollets, fait tourner et jetée sur le canapé. La patiente était apeurée à l'idée que son époux pût revenir et la tuer.

b. Le 5 octobre suivant, à 21 heures, B______ a requis l'intervention de la police à son domicile, où le prévenu se trouvait. Le rapport mentionne qu'il était censé ce jour-là se présenter au poste pour être entendu suite à la plainte, mais ne l'avait pas fait. Sont également énumérés plusieurs incidents ayant été l'objet de mains courantes déposées par B______ entre le 30 juillet 2020 et le 26 septembre 2022.

c.a. Auditionné dans la foulée par la police, A______ a admis avoir "porté" son épouse en la "saisissant par les mollets afin de la déposer sur le canapé". Les douleurs au sein tenaient du mensonge, quand bien même le constat médical mentionnait la présence d'ecchymoses. B______ avait volontairement jeté son téléphone sur le sol, alors qu'il lui demandait de le lui rendre, et l'avait ainsi cassé. Il lui avait donc dit qu'il allait prendre son propre appareil et qu'elle ne pourrait le récupérer qu'en lui en payant un nouveau. B______ avait commencé à le frapper et à le repousser. Il n'avait pas répondu à ses coups mais l'avait saisie par les mollets afin de la déposer sur le canapé. Il lui avait ensuite rendu son portable et lui-même appelé la police avec le téléphone fixe de la maison. Il lui avait été dit qu'il n'y avait pas de quoi justifier une intervention de sorte qu'il avait quitté l'appartement. Il a reconnu avoir par le passé saisi une fois son épouse par les poignets et avoir dû s'expliquer à la police à cet égard, ainsi que diverses occurrences où il avait proféré des insultes, jamais donné de coups. Il savait qu'il pourrait être l'objet d'une mesure d'éloignement, car tel avait déjà été le cas durant une dizaine de jours en juin ou juillet 2022.

c.b. Devant le MP, A______ a confirmé qu'à son retour au domicile conjugal, le 26 septembre 2022 selon lui, il avait trouvé ses affaires devant la porte mais avait refusé de quitter la maison. B______ avait requis l'intervention de la police, qui lui avait indiqué qu'elle devait entreprendre des démarches judiciaires. Il était également exact qu'avant la dispute, la partie plaignante avait eu une conversation sur l'appareil téléphonique du prévenu. Il lui avait demandé de le lui rendre mais elle avait refusé et annoncé qu'elle allait briser l'objet, ce qu'elle avait fait. Il avait alors pris celui de B______, qui s'était mise à le frapper. Il avait "rigolé en tant qu'homme" et l'avait saisie par les cuisses pour la déposer sur le canapé. Cela s'était passé en présence du beau-frère de B______, E______.

d.a.a. Lors des débats de première instance, B______ a confirmé sa plainte et a indiqué qu'elle avait bien effectué la radio du thorax prescrite mais n'en avait pas reçu les résultats. Elle était suivie par un psychologue depuis une fausse couche tardive en 2020 mais évoquait également ses difficultés conjugales lors des séances.

d.a.b. Elle a produit diverses pièces, notamment :

- un certificat médical du 16 avril 2024 de son psychiatre-psychothérapeute indiquant qu'elle était suivie dans le contexte d'un conflit de couple et avait subi de la violence tant physique que psychologique de la part du prévenu. Elle conservait des séquelles psychologiques sévères ;

- un précédent certificat du 16 février 2022 du même praticien, évoquant une détresse psychique au quotidien depuis la rencontre des futurs conjoints. Le prévenu souffrait d'alcoolisme chronique et était violent. La patiente avait effectué "plusieurs allers-retours à l'hôpital" en raison de ces violences et fait appel à la police. À l'hôpital, elle n'avait pas toujours dit la vérité sur les traces présentes sur son corps. Elle avait également évoqué des rapports sexuels contraints et souffrait beaucoup des conséquences de la "relation toxique" ;

- un certificat médical du 21 février 2022 de la Dre F______. Celle-ci avait repris le suivi de B______ en raison d'hypertension mais aussi de craintes de ses collègues liées à la suspicion de violences conjugales dont la patiente "ne pouvait que difficilement parler". B______ avait relaté un tel épisode survenu le 13 novembre 2021, au cours duquel elle avait été traînée par terre, sa tête heurtant une table, suite auquel elle avait été conduite aux Urgences, pour une consultation psychiatrique. Quatre jours plus tard, elle avait consulté en raison d'une persistance de céphalées et d'inquiétudes d'un traumatisme crânien cérébral mais l'examen neurologique détaillé s'était révélé normal. Pour la Dre F______, comme pour la sage-femme et la gynécologue qui avaient précédemment assuré le suivi, les plaintes somatiques répétées de B______, sa difficulté à se présenter aux rendez-vous et ses consultations fréquentes aux Urgences fondaient la suspicion de violences conjugales, d'autant que la patiente ne pouvait s'exprimer, étant généralement accompagnée de son époux. Il était par ailleurs connu que des céphalées pouvaient avoir un rapport avec de la violence et que le stress et la peur aggravaient l'hypertension. La difficulté à créer un lien de confiance avec les soignants était une indication supplémentaire ;

- un courrier du 11 février 2022 de la sage-femme et de la gynécologue précitées à l'avocate de B______ dont il résulte que les deux praticiennes éprouvaient des craintes quant à de possibles violences conjugales depuis leur suivi de la partie plaignante pour une grossesse en 2020. La patiente donnait constamment des excuses au comportement de son époux et n'avait donc jamais fait état de violences physiques, tout en évoquant divers griefs à son égard (oisiveté, excès d'orgueil, d'alcool et de tabac). En octobre 2021, elle avait décrit "une situation complexe" et son espoir que leur récent mariage allait permettre un changement d'attitude. Ce n'était donc qu'en date du 7 février 2022 qu'elle avait clairement parlé de violence, y compris sexuelle ;

- un certificat médical du 5 octobre 2022 de la pédiatre de l'une des filles du couple, dont il résulte que selon le rapport de consultation de néonatalogie, il y avait eu des actes de violence conjugale durant la grossesse et que la mère avait de nouveau subi de tels faits récemment, ce qui l'avait conduite à déposer plainte et requérir le prononcé d'une mesure d'éloignement.

d.b. Requis d'expliquer comment il était possible de porter une personne en la tenant par les mollets, A______ a exposé au premier juge qu'il avait pris à la rigolade les coups que lui donnait sa femme et l'avait tenue par les cuisses. Il concédait cependant qu'il l'avait "fait tourner un peu comme ça". En fait, il l'avait ceinturée par devant, au niveau des cuisses, soulevée et déposée sur le canapé, ce en présence de E______. Il n'aurait pas pu la faire tournoyer en la tenant par les mollets, car elle serait tombée, vu son poids, s'il l'avait tenue à cette hauteur. D'ailleurs, il n'avait pas agi "méchamment" car il rigolait. Il pensait donc que la référence à une induration dans le constat médical était fausse.

e. Convoqué pour être entendu en qualité de témoin, E______ n'a pas comparu aux débats de première instance mais il a adressé au TP un courriel en date du 18 avril 2024 intitulé "témoignage". Il affirmait avoir assisté à plusieurs incidents entre les parties lors desquels A______ manquait de respect à son épouse, l'insultait et la maltraitait physiquement. Il était lui-même intervenu, lors d'un événement particulièrement violent, ce qui avait résulté en une fracture du doigt causée par le prévenu. Il n'avait cependant pas donné son identité "par compassion" lorsqu'il s'était présenté à l'hôpital. À une autre reprise, B______ avait été contrainte de se défendre avec un couteau. Par ailleurs, A______ avait "comploté pour obtenir des avantages personnels, y compris des papiers d'immigration, tout en menant une vie personnelle parallèle avec d'autres partenaires".

C. a. Initialement, l'instruction de la cause par la voie écrite avait été ordonnée, avec l'accord des parties. Toutefois, constatant, à l'issue de l'échange d'écritures, que A______ avait attendu son mémoire d'appel pour requérir l'audition de E______, la juridiction d'appel a décidé de faire droit à cette demande, dès lors qu'il était affirmé par le prévenu et pas expressément contesté par la partie plaignante, que l'intéressé avait été témoin direct des faits. Des débats ont donc été fixés, puis annulés, le mandat de comparution notifié à E______ à son adresse auprès de la sœur de la partie plaignante ayant été retourné faute d'avoir été retiré, étant précisé que les parties ont indiqué que le couple s'était séparé et n'ont pas été en mesure de renseigner la Cour sur sa nouvelle adresse. Elles ont été avisées de l'annulation des débats, par courrier les informant également de ce que la cause serait gardée à juger sous dizaine.

b.a. Aux termes de son mémoire d'appel puis d'une brève détermination suite à l'annulation des débats, A______ persiste dans ses conclusions et requiert également "une juste indemnité pour [ses] frais de défense".

Il estime avoir été constant dans ses déclarations, alors que son épouse s'était contredite, pour avoir soutenu, au cours de son examen médical du 1er octobre 2022, qu'il l'avait saisie par le sein dans la chambre puis par les mollets après qu'elle se fût réfugiée au salon alors qu'elle avait indiqué à la police qu'elle avait d'abord tenté de courir et qu'ensuite A______ l'avait saisie par les côtes et tirée par le sein. Elle avait aussi ajouté qu'elle avait essayé de le mordre. Elle n'avait jamais produit les résultats de la radiographie thoracique et elle travaillait en qualité d'aide-soignante dans la même clinique que l'auteure du constat médical du 1er octobre 2022. L'ecchymose présente sous le sein aurait pu être causée avant les faits, "involontairement", lors de relations sexuelles consenties entre les parties, ou alors tandis que le prévenu se défendait, étant rappelé que B______ avait concédé s'être énervée du fait de ses soupçons d'une relation extra-conjugale et qu'il avait décrit qu'elle l'avait frappé. Enfin, les faits ne pouvaient être tenus pour établis, les déclarations du seul témoin n'ayant pu être recueillies. Subsidiairement, seul un verdict de culpabilité du chef de voies de fait pourrait être retenu au regard des séquelles présentées par son épouse.

b.b. B______ conclut au rejet de l'appel.

Il n'y avait pas eu de contradiction dans son propos, uniquement une confusion minime, voire une erreur de transcription par le médecin. À teneur du dossier, E______ confirmait l'existence d'un conflit durable entre les époux mais se décrivait incapable d'en dire plus, de sorte que sa déposition n'aurait pas permis d'éclairer sur des éléments pertinents. Le dossier établissait que B______ subissait de longue date des violences conjugales, dont elle avait eu de la difficulté à s'ouvrir, à l'instar de nombreuses autres victimes. Il n'était pas acceptable de contester la valeur probante d'un certificat médical en raison d'une proximité professionnelle, sans préjudice de ce que les photographies produites en confirmaient la teneur. Elle n'avait jamais admis s'être énervée et avoir jeté le téléphone portable au sol. Le prévenu pour sa part s'était contredit, ayant initialement reconnu qu'il l'avait prise par les mollets puis évoqué les cuisses, et il était incohérent d'évoquer une légitime défense après avoir affirmé qu'il avait pris l'attitude de la partie plaignante à la rigolade. Les lésions constatées relevaient bien de l'art. 123 CP s'agissant d'une ecchymose et de douleurs suffisamment fortes pour avoir justifié un examen complémentaire, quand bien même les résultats n'en étaient pas connus.

b.c. Le MP et le TP se réfèrent au jugement entrepris, dont le premier requiert la confirmation.

D. A______ est né le ______ 1993 en République démocratique du Congo (RDC). Il s'est marié avec B______ en 2021, union dont deux enfants sont issus. Le couple est séparé, un jugement l'autorisant et octroyant à la partie plaignante la garde sur les enfants ainsi que la jouissance exclusive du domicile conjugal ayant été rendu le 19 mars 2024. Selon cette même décision, le droit aux relations personnelles du père avec sa progéniture est limité à une heure tous les 15 jours dans un Point de rencontre, en mode un pour un, et la situation financière du premier ne lui permet pas de verser de contribution d'entretien. À teneur du rapport de police du 5 octobre 2022, l'OCPM avait confirmé que A______ attendait la délivrance d'un permis de séjour, les conditions étant remplies du fait de son mariage avec B______. Il perçoit une aide de CHF 280.- de l'Hospice général et vit dans un foyer à G______. Il a deux autres enfants, l'un vivant en France, l'autre en RDC.

A teneur de l'extrait de son casier judiciaire suisse, A______ a été condamné le 8 décembre 2020 par le MP pour appropriation illégitime et utilisation frauduleuse d'un ordinateur (infraction d'importance mineure), à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 30.-, avec sursis pendant trois ans, ainsi qu'à une amende de CHF 300.-.

E. Les états de frais des défenseur d'office et conseil juridique des parties facturent, pour la procédure d'appel :

- 8 heures et trente minutes pour le premier ;

- 6 heures et trente minutes pour la seconde.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La juridiction d'appel n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2. 2.1.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; 127 I 28 consid. 2a).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, elle signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1 ; 145 IV 154 consid. 1.1).

2.1.2. Le juge du fait dispose d'un large pouvoir dans l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 4b). Confronté à des versions contradictoires, il forge sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents. Les preuves doivent être examinées dans leur ensemble et l'état de fait déduit du rapprochement de divers éléments ou indices. Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (ATF 129 I 8 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_324/2017 du 8 mars 2018 consid. 1.1 ; 6B_1183/2016 du 24 août 2017 consid. 1.1 ; 6B_445/2016 du 5 juillet 2017 consid. 5.1).

2.1.3. Les cas de "déclarations contre déclarations", dans lesquelles les déclarations de la victime en tant que principal élément à charge et les déclarations contradictoires de la personne accusée s'opposent, ne doivent pas nécessairement, sur la base du principe in dubio pro reo, conduire à un acquittement. L'appréciation définitive des déclarations des participants incombe au tribunal du fond (ATF 137 IV 122 consid. 3.3 = JdT 2012 IV ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1306/2017 du 17 mai 2018 consid. 2.1.1 ; M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER [éds], Strafprozessordnung / Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 2ème éd., Bâle 2014, n. 83 ad art. 10).

Les déclarations de la victime constituent un élément de preuve. Le juge doit, dans l'évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires rassemblés au dossier, les apprécier librement (arrêts du Tribunal fédéral 6B_942/2017 du 5 mars 2018 consid. 2.1.2 ; 6B_614/2012 du 15 février 2013 consid. 3.2.5).

Les déclarations successives d'un même témoin ne doivent pas nécessairement être écartées du seul fait qu'elles sont contradictoires ; il appartient au juge de retenir, sans arbitraire, la version qui lui paraît la plus convaincante et de motiver les raisons de son choix (arrêts du Tribunal fédéral 6B_28/2013 du 13 juin 2013 consid. 1.2 ; 6B_429/2008 du 7 novembre 2008 consid. 4.2.3). Dans le cadre du principe de libre appréciation des preuves, rien ne s'oppose non plus à ne retenir qu'une partie des déclarations d'un témoin globalement crédible (ATF 120 Ia 31 consid. 3).

Le juge doit en particulier se forger une conviction aussi bien sur les premières déclarations du prévenu ou d'un témoin, que sur les nouvelles, valant rétractation, et apprécier les circonstances dans lesquelles l'intéressé a modifié ses dires initiaux (arrêts du Tribunal fédéral 6B_157/2011 du 20 septembre 2011 consid. 1.2 ; 6B_626/2008 du 11 novembre 2008 consid. 2.1).

2.2.1. Pour l'essentiel, et contrairement à ce que soutient l'appelant, l'intimée a été constante et cohérente dans son récit, livré à trois reprises (médecin, police, MP), décrivant le contexte (retour de son époux au domicile conjugal après une période de séparation, celui-ci trouvant ses affaires devant la porte), la cause de la dispute (elle avait surpris un échange avec une probable maîtresse sur le téléphone de son époux et l'avait utilisé pour l'appeler ; celui-ci avait tenté de le récupérer) la chute de l'appareil et la réaction violente de l'appelant qui s'en était pris à elle dans l'intention de s'emparer du sien. Elle a décrit trois actes de violence, soit la prise au niveau des côtes, son sein tiré puis la saisie de ses mollets l'ayant fait tournoyer et chuter sur le canapé.

La variation sur l'enchaînement mise en exergue par l'appelant n'entame en rien la crédibilité de l'intimée. D'une part, celle-ci souligne à bon escient que ses explications à la doctoresse qui l'a examinée peuvent avoir été confuses, en raison de son émotion, et/ou avoir été mal comprises ou transcrites par la praticienne, étant rappelé que le rôle d'un médecin en pareil cas n'est pas de tenir une sorte de procès-verbal, avec les garanties qui l'accompagnent. D'autre part, cette variation est plutôt le gage d'un discours non plaqué ou appris par cœur, et donc de sincérité, étant observé qu'elle ne peut être qualifiée d'opportuniste. On ne se trouve en effet pas dans un cas où on pourrait soupçonner l'intimée d'avoir modifié sa narration pour mieux coller aux éléments du dossier ou parce que l'une des deux versions n'aurait intrinsèquement pas été plausible, les deux versions étant cohérentes et compatibles avec lesdits éléments.

La non évocation, devant le médecin, de la tentative de l'intimée de mordre son époux est dénuée de toute portée. Celle-ci peut fort bien ne pas avoir songé à en faire état immédiatement, ou ne pas avoir eu ce détail à l'esprit. Le fait qu'elle l'ait par la suite rapporté va ici encore dans le sens d'une certaine sincérité, dès lors que la réaction qu'elle a de la sorte admis avoir eue aurait pu être interprétée en sa défaveur, car indicatrice d'une certaine agressivité de sa part.

L'intimée s'est aussi contredite en ce qu'elle a admis lors de l'entretien avec son médecin, puis nié dans la procédure, avoir volontairement jeté le téléphone de son époux plutôt que l'avoir laissé tomber ; toutefois, cela concerne un détail périphérique, non les gestes reprochés au prévenu, et n'est donc pas déterminant. C'est ainsi à raison que l'appelant ne le relève pas.

2.2.2 En outre, les déclarations de l'intimée sont corroborées par certains éléments soit :

- leur convergence avec celles de l'appelant sur de nombreux points (cause de la dispute ; jet ou chute du téléphone ; réaction de l'appelant qui a entrepris de s'emparer de l'appareil de son épouse pour compenser le bris du sien ; prise ayant fait tournoyer l'intimée avant qu'elle ne se retrouvât sur le canapé) ;

- les blessures constatées par le médecin, soit des ecchymoses sous le sein gauche, des douleurs costales et une induration des mollets, compatibles avec le récit de la partie plaignante (sein violemment et douloureusement tiré, prise au niveau des côtes puis des mollets). L'argument de l'appelant, selon lequel il faudrait relativiser la portée du constat en raison des relations professionnelles entre son épouse et l'auteure du document, ne saurait être suivi. Rien ne permet en effet de penser que cette doctoresse serait disposée à commettre une attestation erronée du simple fait que la patiente est une collègue. Les explications alternatives à la présence d'ecchymoses proposées par l'appelant ne convainquent pas davantage (cf. infra).

2.3.1. Pour sa part, l'appelant a certes invariablement contesté avoir été violent lors de l'incident litigieux, mais il s'est montré inconsistant sur deux éléments déterminants :

- après avoir admis qu'il avait saisi son épouse par les mollets pour la déposer, plutôt que la jeter, sur le canapé, il a prétendu que la prise était intervenue à hauteur des cuisses. Contrairement à celle de l'intimée sur l'enchaînement de faits, cette variation est opportuniste, l'appelant ayant réalisé que le fait d'attraper et soulever quelqu'un par les mollets, soit à un niveau très bas par rapport à son centre de gravité, trahissait l'intention de déséquilibrer la victime, non de la "déposer", pas "méchamment", sur un canapé. Cela est du reste ce qui est arrivé, puisque les deux parties s'accordent pour dire que l'intimé a "tournoyé" avant de se retrouver sur le canapé ;

- après avoir soutenu qu'en " homme" qu'il est, il n'avait réagi qu'en "rigolant" aux coups supposément assenés par l'intimée, l'appelant prétend soudainement au stade de l'appel, certes sous la plume de son conseil, qu'il se serait défendu et aurait, ce faisant, pu provoquer l'ecchymose au sein, ce qui est totalement contradictoire.

2.3.2. Par effet miroir, les constatations médicales qui soutiennent la version de la partie plaignante infirment celle de l'appelant. Celui-ci en est conscient, raison pour laquelle il tente, en vain, de mettre en cause l'objectivité de l'auteure du constat médical et offre subsidiairement des explications qui ne convainquent pas : l'hypothèse de la légitime défense vient d'être écartée ; celle des ecchymoses survenues au cours d'ébats intimes consentis n'a été présentée qu'au stade de l'appel et est peu plausible car il n'est guère fréquent qu'une relation intime entraîne une telle lésion. Elle s'inscrit d'autant moins logiquement dans le présent contexte que les parties exposent toutes deux que le prévenu venait de réintégrer, contre la volonté de son épouse, le domicile conjugal après une période d'absence, ce qui rend hautement douteuse une relation sexuelle. Aucun ne l'a d'ailleurs évoqué avant le mémoire d'appel. Enfin, l'intéressé est incapable de justifier l'induration aux mollets (compatible avec la prise à ce niveau du corps) et les douleurs costales (ce qui implique que l'appelant a exercé une forte pression lorsqu'il a ceinturé son épouse, ainsi qu'il l'admet).

2.3.3 En conclusion, la crédibilité de l'appelant est bien moindre que celle de l'intimée, ce qui justifie de se tenir aux dires de la première.

2.4. Par surabondance, il sera encore relevé que les données consignées dans le rapport de police du 5 octobre 2020 et le journal requis par le TP, de même que les divers rapports des médecins ou sage-femme ayant suivi l'intimée alimentent le soupçon de violences conjugales exercées de longue date par le prévenu. Certes, ces documents ne font que relayer les dires de la partie plaignante ou les inquiétudes nourries par les professionnels de la santé mais le nombre de signalements et le ressenti commun desdits professionnels sont à tout le moins des indices qui à eux seuls ne suffiraient pas mais viennent conforter dans l'idée que l'appelant est capable d'adopter des comportements tels ceux objet de la présente procédure.

2.5. À l'inverse, l'impossibilité de recueillir les déclarations du témoin qui aurait, semble-t-il, assisté à la scène, est certes regrettable mais ne saurait imposer d'admettre la version de l'appelant, fût-ce au bénéfice du doute, dès lors que rien n'indique que ledit témoin l'aurait corroborée. L'absence de ce moyen de preuve n'est donc qu'un élément neutre, qui n'enlève, ni n'ajoute, rien aux éléments du dossier.

2.6. En conclusion, il est établi que, le 1er octobre 2022, l'appelant a attrapé violemment son épouse, au niveau des côtes et par le sein, avant de la saisir par les mollets et de la jeter sur le canapé, lui causant de la sorte des ecchymoses comme décrit dans l'acte d'accusation.

3. 3.1. En application de l'art. 123 ch. 1 CP, se rend coupable de lésions corporelles simples, quiconque, intentionnellement, fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité corporelle. Selon l'art. 126 al. 1 CP, quiconque se livre sur une personne à des voies de fait qui ne causent ni lésion corporelle ni atteinte à la santé se rend coupable de l'infraction du même nom.

Une voie de fait au sens de l'art. 126 CP est une atteinte physique qui excède ce qui est socialement toléré, soit qui a une certaine intensité, mais qui ne cause ni lésions corporelles, ni dommage à la santé ; il n'est pas nécessaire que l'atteinte ait engendré une douleur physique (ATF 119 IV 25 consid. 2a ; 117 IV 14 consid. 2a/bb ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_1257/2023 du 18 juin 2024 consid. 2.1.2 ; 6B_979/2021 du 11 avril 2022 consid. 6.1). Une gifle, un coup de poing ou de pied, de fortes bourrades avec les mains ou les coudes, l'arrosage d'une personne au moyen d'un liquide, l'ébouriffage d'une coiffure soigneusement élaborée ou encore un "entartrage" et la projection d'objets durs d'un certain poids peuvent être qualifiés de voie de fait (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1257/2023 du 18 juin 2024 consid. 2.1.2 ; 6B_652/2023 du 11 décembre 2023 consid. 1.1.4 ; 6B_979/2021 du 11 avril 2022 consid. 6.1).

L'infraction de l'art. 123 CP réprime toutes les atteintes à l'intégrité physique ou psychique qui sont d'une certaine importance, sans atteindre le stade de gravité exigé par l'art. 122 CP (ATF 134 IV 189 consid. 1.1 ; 119 IV 25 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1257/2023 du 18 juin 2024 consid. 2.1.1). Afin de déterminer si l'atteinte est suffisamment importante pour constituer une lésion corporelle et plus une voie de fait, il y a lieu de tenir compte, d'une part, du genre et de l'intensité de l'atteinte et, d'autre part, de son impact sur le psychisme de la victime, lequel doit être examiné objectivement au regard des circonstances concrètes telles que l'âge de la victime, son état de santé, le cadre social dans lequel elle vit ou travaille, etc. (ATF 134 IV 189 consid. 1.3 et 1.4 ; 119 IV 25 consid. 2a ; 119 IV 1 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1257/2023 du 18 juin 2024 consid. 2.1.1).

Quelques rougeurs au niveau du cuir chevelu, des ecchymoses au cou et aux bras ainsi que des dermabrasions au cou et au bras relèvent a priori de simples voies de fait, notamment lorsque la lésée a été saisie au cou durant quelques secondes, sans avoir été empêchée de respirer et a pu se dégager d'elle-même (arrêt du Tribunal fédéral 1B_259/2021 du 19 août 2021 consid. 2.2).

En revanche, des tuméfactions et rougeurs dans la région du sourcil et de l'oreille d'une grosseur d'environ 2 x 5 cm, et des douleurs à la palpation à la côte inférieure gauche ont été qualifiées de lésions corporelles simples (ATF 127 IV 59 = JdT 2003 IV 151), de même qu'une marque d'un coup de poing à l'œil et une contusion à la lèvre inférieure, des éraflures et des égratignures à l'avant-bras et à la main (ATF 103 IV 70 = JdT 1978 IV 66). De même, une rupture de vaisseaux sanguins avec épanchement sous-cutané constitue une lésion du corps humain, même si celle-ci est superficielle et de peu d'importance. Ainsi, un hématome, résultant de la rupture de vaisseaux sanguins, qui laisse normalement des traces pendant plusieurs jours, doit donc être qualifié de lésion corporelle (ATF 119 IV 25 consid. 2a).

Ecchymose et hématome témoignent toutes deux de la présence d'un épanchement sanguin. Ils se distinguent cependant par la profondeur, l'évolution possible et la gravité potentielle : une ecchymose est superficielle, sous-cutanée, elle guérit toujours spontanément et est bénigne tandis qu'un hématome peut être plus profond, sa résorption sans intervention n'est pas assurée et ce type de lésion peut être grave, selon sa localisation (https ://www.vocabulaire-medical.fr/encyclopdie/036-ecchymose-hematome). Selon deux autres sources, un hématome est une accumulation de sang sous la peau ou dans un organe. Des vaisseaux sanguins se rompent et provoquent alors une lésion bleutée et gonflée. Une ecchymose ou "bleu" est un épanchement diffus de sang sous la peau. Le gonflement est moins important que pour un hématome. L'ecchymose guérit spontanément en quelques jours. Les causes des hématomes comme des ecchymoses sont les mêmes (choc brutal et violent) mais dans le second cas les vaisseaux touchés sont plus petits (https://www.sciencesetavenir.fr/sante-maladie/hematome-et-ecchymose-definition-symptomes-traitements_104590 ; https://www.vidal.fr/maladies/appareil-locomoteur/hematome-ecchymose.html).

3.2. En l'occurrence, il est vrai que les ecchymoses décrites dans l'ordonnance pénale tenant lieu d'acte d'accusation au chapitre des faits reprochés et de leur résultat (douleurs et induration aux mollets évoqués dans le dossier ne sont pas mentionnées) de même que les comportements consistant à avoir saisi l'épouse au niveau des côtes, au sein puis par les mollets pour la jeter sur le canapé, ne relèveraient, chacun envisagé indépendamment, que de voies de fait. Il demeure cependant que ces faits sont intervenus tour à tour, dans le contexte d'une unique scène qui n'a pas été brève, la victime s'étant déplacée d'une pièce à une autre pour échapper à l'appelant, que celle-ci n'a pas pu, au contraire du cas à l'origine de la jurisprudence évoquée ci-dessus, se dégager d'elle-même, malgré ses efforts en ce sens (outre ladite fuite, tentative de morsure et menace de déchirer l'autorisation de l'OCPM), et qu'au moins une blessure, bien que légère, a eu lieu. Cette scène a donc été marquée par plusieurs actes de violence dont la juxtaposition et le résultat, lequel, considéré isolément, relèverait d'un cas limite de voies de fait, font que le seuil de gravité atteint est suffisant pour que des lésions corporelles simples soient retenues. L'appel est donc rejeté en ce qu'il vise le verdict de culpabilité.

4. 4.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

4.3. L'appelant n'a développé aucune critique à l'égard de la peine fixée par le TP, pour l'hypothèse où le verdict de culpabilité serait confirmé également en ce qui concerne la qualification juridique de l'infraction commise. Comme retenu par le premier juge, sa faute est importante. Le condamné s'est en effet laissé aller à plusieurs comportements violents, provoquant des ecchymoses, une induration et des douleurs à l'intimée. Celle-ci a également éprouvé de la peur.

Ce faisant, l'intéressé a cédé à la colère, faisant preuve de son intolérance à la frustration. Sa motivation tient sans doute aussi à un sentiment mal placé de toute puissance masculine, vu son sentiment de s'être comporté comme "un homme". L'altercation est certes intervenue à l'issue d'une dispute au cours de laquelle l'appareil téléphonique de l'appelant avait chuté des mains de l'intimée qui s'en était emparée, ou été jeté au sol par elle, mais cela n'autorisait nullement le recours à la violence au titre de justice privée.

L'appelant n'a pas collaboré à la procédure, commençant par ne pas se rendre comme il en avait été requis à la police, puis niant les reproches quitte à taxer de mensongers les déclarations de la victime et le constat médical. Il n'a évoqué aucun regret ni fait preuve de la moindre empathie. Il n'y a ainsi aucune prise de conscience.

Il a un antécédent, mais il est non spécifique.

Les parties traversaient apparemment de longue date des difficultés conjugales. Abstraction faite de ce qu'elles pourraient principalement avoir été imputables à l'appelant, ce que certains éléments du dossier donnent à penser, le contexte peut expliquer, dans une certaine mesure, ses agissements mais, comme déjà dit, aucunement les justifier.

Au regard de ces éléments, la quotité de 60 unités pénales infligée est adéquate.

La situation financière de l'appelant est précaire, raison pour laquelle le TP a à raison arrêté le montant du jour-amende au minimum de CHF 10.-.

Le jugement est dès lors confirmé en ce qui concerne la peine également.

4.4. La renonciation du premier juge à révoquer le précédent sursis est acquise à l'appelant.

5. Vu l'issue, la détention subie ne l'a pas été à tort. Les conclusions en indemnisation y relatives sont rejetées.

6. 6.1. En vertu de l'art. 47 du Code des obligations [CO], le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles une indemnité équitable à titre de réparation morale.

Les circonstances particulières à prendre en compte se rapportent à l'importance de l'atteinte à la personnalité du lésé, l'art. 47 CO étant un cas d'application de l'art. 49 CO. Les lésions corporelles, qui englobent tant les atteintes physiques que psychiques, doivent donc en principe impliquer une importante douleur physique ou morale ou avoir causé une atteinte durable à la santé. Parmi les circonstances qui peuvent, selon les cas, justifier l'application de l'art. 47 CO, figurent une longue période de souffrance ou d'incapacité de travail, de même que les préjudices psychiques importants (arrêts du Tribunal fédéral 6B_746/2022 du 30 mars 2023 consid. 8.1 ; 6B_1335/2021 du 21 décembre 2022 consid. 2.2.1).

L'ampleur de la réparation morale dépend avant tout de la gravité des souffrances physiques ou psychiques consécutives à l'atteinte subie par la victime et de la possibilité d'adoucir sensiblement, par le versement d'une somme d'argent, la douleur morale qui en résulte. Sa détermination relève du pouvoir d'appréciation du juge. L'indemnité allouée doit toutefois être équitable (ATF 143 IV 339 consid. 3.1 ;
141 III 97 consid. 11.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_858/2022 du 2 juin 2023 consid. 4.1).

6.2. Comme déjà dit, l'appelante a bien subi une atteinte à son intégrité corporelle, bien que légère. Elle a en outre supporté des douleurs et été fortement effrayée. Le simple fait d'être victime d'un épisode de violences conjugales d'une certaine intensité, comme le présent, est de surcroît de nature à porter sérieusement atteinte au bien-être psychologique. Par conséquent, il se justifie d'allouer une indemnité pour tort moral, et le montant de CHF 1'000.- (plus intérêts) déterminé par le premier juge est adéquat. Du reste, la défense n'a discuté la question, ni sur le principe, ni sur le quantum.

7. 7.1. L'appelant qui succombe intégralement supportera les frais de la procédure d'appel, comprenant un émolument de CHF 1'200.-, ainsi que de l'émolument complémentaire de motivation du jugement entrepris (art. 428 al. 1 CPP et art. 14 al. 1 let e du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale [RTFMP]). Le solde de ces frais sera laissé à la charge de l'État.

7.2. L'issue de la procédure d'appel n'a pas d'influence sur la réparation des frais de la procédure préliminaire et de première instance. Cela étant, le TP aurait dû tenir compte, en application de l'art. 426 al. 1 CPP, de l'acquittement qu'il a prononcé du chef de menaces. Il sied dès lors de revoir d'office ladite répartition et de ne mettre que les 2/3 des frais à la charge du prévenu.

8. Considérés globalement, les états de frais des avocats plaidant au bénéfice de l'assistance judiciaire satisfont les exigences légales et jurisprudentielles régissant la matière.

Ils seront partant rémunérés par CHF 2'205.25 pour le défenseur d'office du prévenu (montant tenant compte de l'indemnité pour les activités diverses, de 20% en l'espèce, et de la TVA au taux de 8.1 %) et CHF 1'686.35 pour la conseil juridique gratuite (avec les mêmes précisions).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/448/2024 rendu le 18 avril 2024 par le Tribunal de police dans la procédure P/21087/2022.

Le rejette.

Annule néanmoins ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ de menaces (art. 180 al. 1 et 2 let. a CP).

Le déclare coupable de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 et 2 al. 1 et 4 CP).

Le condamne à une peine pécuniaire de 60 jours-amende, sous déduction d'un jour-amende, correspondant à un jour de détention avant jugement (art. 34 et 51 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 10.-.

Renonce à révoquer le sursis octroyé le 8 décembre 2020 par le Ministère public du canton de Genève (art. 46 al. 2 CP).

Condamne A______ à payer à B______ CHF 1'000.-, avec intérêts à 5% dès le 1er octobre 2022, à titre de réparation du tort moral (art. 47/49 CO).

Condamne A______ aux deux tiers des frais de la procédure préliminaire et de première instance, s'élevant à CHF 1'035.-, soit CHF 690.-.

Le condamne aux frais de la procédure d'appel par CHF 1'635.-, comprenant un émolument d'arrêt de CHF 1'200.-, ainsi que l'émolument complémentaire de motivation de première instance, par CHF 600.-.

Laisse le solde des frais de la procédure à la charge de l'État.

Arrête la rémunération, pour leurs diligences durant la procédure d'appel,

-          de Me C______, à CHF 2'205.25 ;

-          de Me D______, à CHF 1'686.35.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police et à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

La greffière :

Linda TAGHARIST

 

La présidente :

Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'035.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

360.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'200.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'635.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

2'670.00