Décisions | Tribunal pénal
JTDP/1248/2023 du 27.09.2023 sur OPMP/9006/2021 ( OPOP ) , JUGE
En droit
Par ces motifs
république et | canton de genève | |
pouvoir judiciaire | ||
JUGEMENT DU TRIBUNAL DE POLICE Chambre 8
|
MINISTÈRE PUBLIC
Monsieur A______, partie plaignante, assisté de Me K______
contre
Monsieur X______, prévenu, né le ______ 1962, domicilié ______[VD], assisté de Me Tony DONNET-MONAY
CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :
Le Ministère public conclut à un verdict de culpabilité du prévenu des chefs de lésions corporelles par négligence (art. 125 al.1 CP), d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91a al.1 LCR) et de violation des obligations en cas d'accident (art. 92 al. 2 LCR) et requiert le prononcé d'une peine pécuniaire de 90 jours-amende à CHF 140.- avec sursis pendant 3 ans. A titre de sanction immédiate, il requiert le prononcé d'une amende de CHF 2'300.-.
A______, par la voix de son conseil, conclut à un verdict de culpabilité des chefs de lésions corporelles par négligence au sens de l'art. 125 CP, et d'infractions au sens des art. 91a al. 1 LCR et 92 al. 2 LCR, qu'un accueil favorable soit accordé à sa note d'honoraires au sens de l'art. 433 CPP, et qu'il soit renvoyé à agir sur le plan civil.
X______, par la voix de son conseil, conclut à son acquittement des chefs d'infractions au sens de l'art. 125 CP, 91a al. 1 LCR et 92 al. 2 LCR. Il conclut à l'octroi d'une indemnité au sens de l'art. 429 CPP à hauteur de CHF 8'680.40 et à ce que les frais de la procédure soient laissés à la charge de l'Etat.
*****
Vu l'opposition formée le 31 janvier 2022 par X______ à l'ordonnance pénale rendue par le Ministère public le 5 octobre 2021;
Vu la décision de maintien de l'ordonnance pénale du Ministère public du 25 juillet 2022;
Vu l'art. 356 al. 2 et 357 al. 2 CPP selon lequel le tribunal de première instance statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition;
Attendu que l'ordonnance pénale et l'opposition sont conformes aux prescriptions des art. 352, 353 et 354 CPP;
LE TRIBUNAL DE POLICE
statuant sur opposition :
Déclare valables l'ordonnance pénale du 5 octobre 2021 et l'opposition formée contre celle-ci par X______ le 31 janvier 2022.
et statuant à nouveau contradictoirement :
A. Par ordonnance pénale du 5 octobre 2021, il est reproché à X______ d'avoir, à Genève, le 28 mai 2021, aux alentours de 14h15 :
- en effectuant une marche arrière sans précaution au volant du poids lourd immatriculé VD 1______, heurté avec le pare-chocs arrière de son camion, le pare-chocs avant ainsi que le capot moteur de la voiture immatriculée ______ / France, qui était stationnée derrière lui et ainsi causé des lésions corporelles à son conducteur A______, soit notamment des cervicalgies en lien avec une entorse cervicale, des douleurs à l'épaule droite, une contusion au genou gauche, des acouphènes et un état de stress post-traumatique, ainsi qu'un arrêt de travail, faits qualifiés de lésions corporelles par négligence (art. 125 al. 1 CP);
- à la suite du heurt, quitté les lieux de l'accident sans avoir pris le soin d'appeler la police et les secours et sans avoir donné ses coordonnées au blessé, se dérobant ainsi aux mesures permettant de déterminer son incapacité de conduire, alors qu'il ne pouvait ignorer, au vu des circonstances que ces mesures auraient été diligentées au moment où les autorités se seraient rendues sur place, faits qualifiés d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91a al. 1 LCR) et de violation des obligations en cas d'accident (art. 92 LCR).
B. Les faits pertinent suivant ressortent du dossier :
a.a. Le 7 juillet 2021, le Conseil de A______ a transmis le courrier de plainte de son mandant, daté du 29 juin 2021. Celui-ci a expliqué que, le 28 mai 2021, il avait dû intervenir sur un poste haute tension des SIG, situé à la route ______[GE]. Vers 13h45, arrivé à la hauteur de la porte d'accès de ce poste, un camion de l'entreprise B______, immatriculé VD 1______, en obstruait l'accès en étant stationné sur la droite de la chaussée. Il s'était arrêté à bonne distance derrière le camion, pour attendre que celui-ci s'en aille. Aux alentours de 13h50, le conducteur du poids lourd avait soudainement reculé et était venu emboutir son véhicule, qui avait été poussé en arrière sur plusieurs mètres, laissant des traces de ripage sur la chaussée. Le crochet du poids lourd avait d'abord enfoncé le capot, puis la barre anti-encastrement avait heurté le pare-chocs. Il avait été violemment propulsé contre le siège. Au moment, du choc, il avait craint pour sa vie, la benne du camion se retrouvant à quelques centimètres de son pare-brise. Il avait été sérieusement blessé, subissant une entorse cervicale, lui causant des cervicalgies, des douleurs au niveau de l'épaule droite, une contusion au niveau du genou gauche, des acouphènes ainsi qu'un état de stress post-traumatique. Après l'accident, le conducteur du camion avait refusé de remplir un constat amiable. Celui-ci avait quitté les lieux en lui disant de s'adresser à son entreprise, alors même qu'il avait vu qu'il était blessé.
a.b. Il a produit un certain nombre de pièces, dont notamment :
- des photographies prises après le choc, montrant que la benne du camion est arrivée très proche du pare-brise du véhicule qu'il conduisait, dont le pare-chocs était appuyé contre la barre anti-encastrement du camion. Une légende a été ajoutée pour indiquer la présence de "traces de recul de plus de un mètre au sol";
- des certificats médicaux de la Dre C______, établissant une incapacité de travail de A______ du 28 mai 2021 au 25 juin 2021;
- un certificat médical du 11 juin 2021 de la Dre C______, certifiant avoir examiné A______ le jour en question et avoir constaté des cervicalgies en lien avec une entorse cervicale, des douleurs à l'épaule droite, une contusion au genou gauche, des acouphènes et un état de stress posttraumatique.
b. Selon le rapport de renseignement du 15 septembre 2021, à l'arrivée de la patrouille, A______ attendait à proximité de l'accident et X______ avait quitté les lieux avec son camion. Le véhicule de A______ se trouvait à son point d'arrêt après le heurt. Aucune trace de freinage ou de ripage n'était visible sur la chaussée. X______ s'était rendu à la déchèterie, à la hauteur de la route ______. Arrivé à l'entrée, il avait dû immobiliser son camion, pour laisser sortir un autre poids lourd. Lors de sa manœuvre, le pare-chocs arrière de son camion avait heurté le pare-chocs avant et le capot moteur du véhicule de A______, stationné derrière lui. Celui-ci avait expliqué qu'il s'était stationné à cet endroit pour décharger quelques cartons et qu'il n'avait pas été blessé suite au heurt.
c. Le 22 juillet 2021 devant la police, X______ a expliqué que, le 28 mai 2021, vers 14h15, il avait immobilisé son camion, immatriculé VD 1______, à la route ______[GE], dans l'attente de pouvoir entrer dans l'enceinte où il devait vider sa benne. Un autre camionneur, arrivant en sens inverse, lui avait dit de faire attention, car il y avait une voiture garée derrière lui. Il n'avait pas compris et était sorti de son camion. Il avait alors vu un véhicule derrière son camion. Le conducteur de ce véhicule lui avait dit s'être garé pour décharger deux cartons. Le pare-chocs arrière de son poids lourd avait heurté le pare-chocs avant de la voiture, dans sa manœuvre de léger recul pour laisser passer l'autre camion. Il avait proposé au conducteur d'appeler la police, mais celui-ci avait refusé. Il avait alors quitté les lieux. Il reconnaissait avoir percuté le véhicule en reculant légèrement. Avisé que, selon la plainte déposée par le conducteur, celui-ci aurait été blessé suite à l'accident, il a indiqué qu'il ne l'avait pas su et que, lorsqu'il était descendu de son camion, l'intéressé ne se trouvait pas dans sa voiture.
d.a. Par courrier du 5 octobre 2021, le Conseil de A______ a transmis le témoignage écrit de D______, précisant que celui-ci aurait assisté à l'accident.
d.b. Selon le document daté du 17 septembre 2021, intitulé "demande de témoignage" et non signé, D______ a expliqué que, le 28 mai 2021, il intervenait dans un poste SIG situé à la route ______[GE], où il avait rendez-vous avec A______, qui devait amener du matériel. Aux environs de 13h40, il était arrivé en motocycle devant ce poste et avait dû contourner un camion, qui se trouvait à l'arrêt devant la porte d'entrée, pour accéder au poste. Il avait refermé les portes du local. Vers 13h50, son collègue, choqué et se plaignant de sa nuque, était venu le chercher pour qu'il l'aide. Celui-ci avait été embouti par le camion, qui avait reculé. Il était certain que le camion se trouvait alors trois mètres plus en arrière que lorsqu'il était arrivé. Les traces de pneus laissées par la voiture de A______ montraient bien que la voiture avait fortement reculé, car le crochet du camion s'était enfoncé dans le capot et la benne ne se trouvait qu'à quelques centimètres du pare-brise. Il avait pris des photographies qu'il avait présentées à la police.
A______ avait voulu remplir un constat amiable, mais le chauffeur du camion, très virulent, avait refusé. Il avait déclaré qu'il fallait envoyer le constat à son entreprise, qu'il n'était pas fautif. Ils avaient suggéré de faire venir la police, mais le chauffeur avait dit qu'il n'attendrait pas. Il avait alors contacté l'employeur de celui-ci, qui lui avait confirmé que le constat pouvait leur être envoyé. Le chauffeur du camion était parti, son collègue avait rentré le véhicule dans le bâtiment et appelé la police, qui était arrivé une trentaine de minutes plus tard.
e.a. Le 5 octobre 2021, une ordonnance pénale a été rendue à l'encontre de X______, le condamnant à une peine pécuniaire de 90 jours-amende, à CHF 140.-, avec sursis durant 3 ans et une amende immédiate de CHF 2'300.-, pour lésions corporelles par négligence, entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire et violation des obligations en cas d'accident. Cette ordonnance lui a été notifiée par pli recommandé, à l'adresse de son employeur, auprès de qui il n'avait pas fait élection de domicile.
e.b. Après avoir reçu un rappel de paiement de la part du Service des contraventions, par courrier du 31 janvier 2022, X______ a avisé le Ministère public qu'il n'avait jamais reçu de jugement et sollicité l'envoi d'une copie.
e.c. Par courrier du 3 février 2022, le Ministère public a transmis l'ordonnance pénale du 5 octobre 2021.
e.d. Par courrier du 15 février 2022, B______ SA a informé le Service des contraventions que X______ les avait avertis de l'accident et que leur assurance avait indemnisé le lésé pour les frais de réparation de son véhicule, s'élevant à CHF 1'300.- environ. L'assurance avait en revanche refusé de payer les frais médicaux réclamés, qui s'élevaient à CHF 30'000.-.
e.f. Par courrier du 16 février 2022, X______ a avisé le Ministère public qu'il n'avait pas été informé de la procédure ouverte à son encontre et qu'il souhaitait faire opposition à l'ordonnance rendue à son encontre.
e.g. Par ordonnance du 11 mai 2022, le Ministère public a transmis la procédure au Tribunal de police pour que celui-ci statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition.
e.h. Par courrier du 28 mai 2022, X______ a expliqué qu'au moment de l'accident, le conducteur du véhicule ne se trouvait pas dans sa voiture. Celui-ci avait refusé, dans un premier temps que la police intervienne. Il ne comprenait pas comment un véhicule de 20 tonnes avait pu provoquer si peu de dégâts au véhicule, mais des lésions corporelles si importantes à son conducteur. Par ailleurs l'assurance du véhicule avait refusé d'entrer en matière pour les lésions corporelles. Il n'y avait pas d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire car le conducteur n'était pas au volant. Il n'y avait pas eu de lésions corporelles, si bien qu'il n'avait pas violé ses obligations en cas d'accident. Le tachygraphe du véhicule était à disposition pour attester de la vitesse du véhicule.
e.i. Par ordonnance du 30 mai 2022, le Tribunal de police a renvoyé la procédure au Ministère public pour nouvelle notification de l'ordonnance.
f.a. Par courrier du 15 juin 2022, X______ a maintenu que le conducteur ne se trouvait pas dans son véhicule au moment du choc. Il s'était dirigé vers le véhicule juste après le choc et A______ n'était pas au volant. Il avait discuté avec celui-ci après l'accident. Celui-ci avait demandé à ne pas faire venir la police et ne s'était pas plaint de la moindre douleur. Il avait appelé le service des sinistres de son employeur, soit Madame E______, dont il sollicitait l'audition. Celle-ci lui avait dit qu'elle contacterait le lésé et son assurance et qu'il pouvait dès lors partir. Selon le tachygraphe de son véhicule, l'accident s'était produit vers 13h30. Le camion n'avait pas poussé la voiture sur plusieurs mètres. Les photographies jointes en annexe montraient que le déplacement avait été de 70 cm au plus, car le véhicule de A______ était collé au sien. Si la version du plaignant s'était produite, les dégâts sur son véhicule auraient été beaucoup plus importants. Les photographies prises après les faits permettaient également de voir le plaignant prendre des photos, alors qu'il avait, selon ses dires, de nombreuses lésions corporelles. Il reconnaissait ne pas avoir pris toutes les mesures de sécurité avant de reculer, mais contestait avoir occasionné des lésions corporelles.
f.b. X______ a produit plusieurs documents :
- des photographies montrant le choc entre les deux véhicules permettant de voir que l'arrière de la benne du camion se trouvait très proche du pare-brise du véhicule de A______ et qu'une trace a été laissée au sol sur une longueur non mesurée, mais qui semble inférieure à un mètre.
- un graphique journalier du conducteur X______ pour le 28 mai 2021, dont les données ne sont pas interprétables en l'état.
g.a.a. Le 13 juillet 2022 devant le Ministère public, A______ a confirmé sa plainte du 7 juillet 2021. Il était allé chercher D______ dans l'usine afin que celui-ci l'assiste, puisque le chauffeur du camion avait été agressif et n'avait pas voulu remplir le constat. Le chauffeur lui avait reproché de s'être garé trop proche de son camion. Cet endroit n'était toutefois pas destiné à l'arrêt des véhicules. Si le camion ne s'était pas trouvé à cet endroit, il serait entré dans le poste avec sa voiture. Il avait parqué à environ trois mètres du camion. Il se trouvait bien dans son véhicule au moment de l'accident. Il doutait que quiconque en ait été témoin. Son véhicule était au point mort et le frein à main était tiré. Au moment du choc, il était en train de poser ses lunettes de soleil dans la boite à gants. Il avait freiné avec les pieds, ce qui expliquait les traces de ripage au sol. Il avait également klaxonné. Il avait eu très peur car il pensait que la benne allait faire exploser son parebrise. Il avait appelé la police à 14h12, car il n'avait pas eu confiance en un constat fait par email, comme le proposait l'entreprise B______.
Il s'était rendu chez le médecin le jour de l'accident. Il travaillait toujours à 80%, ressentait des douleurs aux cervicales et des acouphènes dans les deux oreilles. Il faisait de la physiothérapie et d'autres choses, mais il était difficile de faire disparaitre ses lésions. Son véhicule avait été endommagé, et la barre antichoc ainsi que le capot avaient été changés.
g.a.b. A______ a produit un plan de situation et une photographie de son véhicule après le choc.
g.b.a. Le 13 juillet 2022 devant le Ministère public, X______ a confirmé son opposition. Il n'avait pas vu la voiture de A______ derrière le camion, avant de reculer. Lorsqu'il s'était arrêté, celle-ci n'était pas encore là et il ne l'avait pas vu arriver. Il avait regardé avant de reculer, mais, vu la position du véhicule, il n'était pas possible de voir celui-ci. Il n'avait pas entendu de bruit au moment de reculer. Le chauffeur de l'autre camion lui avait dit qu'il avait heurté un véhicule derrière lui, à travers la vitre de son véhicule. Lui-même avait sa fenêtre ouverte. Il était descendu de sa cabine et avait vu la voiture, sans conducteur. Celui-ci était arrivé depuis l'usine et lui avait dit s'être garé à cet endroit car il avait juste du carton à décharger. Le capot de la voiture avait été endommagé par le crochet de la remorque. Il avait proposé d'appeler la police mais A______ n'avait pas voulu. Il avait proposé un constat amiable, que l'intéressé avait refusé également. Il avait contacté le service sinistre de son entreprise, qui lui avait dit de donner ses coordonnées et qu'ils allaient prendre la situation en charge. Une autre personne était sortie de l'usine pour les rejoindre. Tous deux lui avaient dit qu'il pouvait partir. A______ ne lui avait pas dit avoir été blessé. Le tachygraphe de son camion indiquait qu'il avait reculé pendant trois ou quatre secondes, sur 75 cm au maximum. Il était absolument certain que le conducteur ne se trouvait pas dans le véhicule au moment du choc. Il ne pensait pas qu'il y avait un angle mort derrière son véhicule, mais il devait y en avoir un puisqu'il n'avait pas vu la voiture en question. La barre anti-encastrement de son camion n'était pas engagée car il avait déjà préparé celui-ci pour vider la benne. Il n'avait pas appelé la police par gentillesse.
Après avoir entendu les déclarations de A______, il a maintenu que le lésé ne se trouvait pas dans le véhicule. Si celui-ci avait klaxonné, il l'aurait entendu et aurait immédiatement stoppé son véhicule.
g.b.b. X______ a présenté les photographies prises avec son téléphone et il a été constaté par le Ministère public qu'elles avaient été prises entre 13h53 et 14h08.
h. Par courrier de son Conseil du 19 juillet 2022, A______ a produit divers documents :
- une facture du garage F______ Sàrl, établissant les frais de réparation du véhicule à EUR 1'291.79;
- un certificat médical de la Dre C______ du 15 juillet 2022, attestant avoir examiné A______ le 28 mai 2021 et avoir constaté des cervicalgies et contractures cervicales, une gonalgie à gauche et un état de stress posttraumatique;
- un certificat établi le 18 juillet 2022, par G______, masseur-kinésithérapeute, selon lequel A______ est suivi depuis le 1er juin 2021 suite à son accident du 28 mai 2021, pour des cervicalgies et une épaule droite douloureuse.
i. Par ordonnance sur opposition du 25 juillet 2022, le Ministère public a maintenu l'ordonnance pénale du 5 octobre 2021 et transmis la procédure au Tribunal de police.
C. A l'audience de jugement, le Tribunal a entendu les parties et deux témoins.
a. X______ a confirmé ses précédentes déclarations, reconnaissant avoir effectué une marche arrière et heurté un véhicule. Il a précisé qu'il avait rien vu dans son rétroviseur, son camion étant plus large qu'une voiture, qu'il avait reculé sur 50 cm et n'avait senti aucun impact, ni rien entendu, notamment pas de coup de klaxon. Le chauffeur du camion qui sortait s'était arrêté à sa hauteur et lui avait dit qu'il y avait une voiture derrière lui. Il était sorti du camion, en avait fait le tour – ce qui lui avait pris une vingtaine de seconde – et avait vu la voiture, sans personne dedans ou autour. A______ se trouvait dans un bâtiment à proximité et était venu trois à quatre minutes plus tard. Vu qu'il n'y avait personne dans le véhicule au moment du choc, il ne pouvait rien dire des lésions subies par le plaignant. A______ s'était excusé d'avoir garé son véhicule à cet endroit mais n'avait pas voulu appeler la police.
Il était chauffeur poids-lourd depuis 1983 et suivait régulièrement des formations continues.
b.a. A______ a confirmé sa plainte et ses déclarations figurant à la procédure. Il a précisé que le camion avait fini de reculer en entrainant son véhicule, sans que celui-ci ne l'arrête. Au moment du choc, il était penché sur le côté et avait été propulsé en arrière, ses pieds ne touchant plus les pédales. Quand son corps était revenu en avant, il avait pu klaxonner et freiner, ce qui avait peut-être amené le chauffeur à freiner. Il n'avait pas la notion du temps qui s'était écoulé entre le moment du choc et celui où le chauffeur était sorti de son véhicule. Ils s'étaient vus sur la route et avaient discuté. X______ disait que ce n'était pas sa faute et que le véhicule était garé trop près. Celui-ci avait refusé de signer un constat, si bien qu'il s'était ensuite rendu dans le poste SIG pour chercher de l'aide. Il s'était rendu auprès de D______, à qui il venait d'apporter du matériel, et lui avait expliqué la situation et demandé de la gérer. Pendant ce temps, X______ avait dû appeler son entreprise et prendre des photographies. Celui-ci avait maintenu sa position et indiqué qu'il fallait s'adresser à son employeur.
Au cours du mois de mars 2021, il avait eu un accident de parking à ______[VS]. Sa voiture était garée au bord de la route et il avait beaucoup neigé. Quand il l'avait récupérée, deux ou trois jours plus tard, il avait constaté que l'aile avant droite avait été endommagée, certainement par le chasse-neige.
b.b. A______ a produit un bordereau de pièces comprenant notamment :
- des documents LAA;
- un descriptif mécanique et énergétique de l'accident établi à titre privé par H______, ingénieur EPFL;
- Une note destinée à la hiérarchie établie par la Dre I______ du 14 mars 2023, mentionnant, selon son entretien avec A______ et les documents médicaux reçus, que celui-ci ne pouvait pas porter un casque de chantier plus de deux heures, ne devait pas être exposé au stress sonore et ne pouvait pas assister aux réunions très bruyantes;
- un certificat médical de la Dre C______ du 19 septembre 2023, confirmant qu'elle avait examiné A______ le 28 mai 2021 et avoir constaté les lésions déjà mentionnées;
- un certificat établi le 18 septembre 2023 par G______, masseur-kinésithérapeute, selon lequel A______ est suivi depuis le 1er juin 2021 à un rythme hebdomadaire. Des douleurs, des raideurs et des acouphènes persistaient. Il connaissait A______ depuis septembre 2018, l'ayant eu en soins jusqu'en février 2020, pour le traitement d'entretien de son membre inférieur droit, suite à un accident du 6 octobre 1994. Celui-ci était sportif et présentait une bonne condition physique, sans acouphènes;
- une attestation établie le 20 avril 2022 par J______, ostéopathe, déclarant avoir reçu A______ en consultation. Le traumatisme avait provoqué une compression crânienne et méningée, communément appelée "coup du lapin", avec perturbation immédiate des plusieurs nerfs crâniens, notamment un nerf auditif entrainant des acouphènes, revenant dans les états de fatigue et de stress important;
- plusieurs certificats de la Dre C______, faisant mention des incapacités de travail suivantes :
- 100 % du jour de l'accident au 11 juillet 2021;
- 50 % du 12 juillet 2021 au 8 septembre 2021;
- 40 % du 9 septembre 2021 au 17 octobre 2021;
- 30 % du 18 octobre 2021 au 16 décembre 2021;
- 25 % du 17 décembre 2021 au 16 janvier 2022;
- 20 % du 17 janvier 2022 au 9 mai 2023;
- 25 % du 10 mai 2023 au 10 novembre 2023.
c. E______, a expliqué travailler comme assistante technique et sinistre auprès de l'entreprise B______. Le 28 mai 2021, elle avait reçu un téléphone de X______, l'informant d'un accident. Les deux parties n'étaient pas d'accord et celui-ci ne savait pas ce qu'il devait faire. X______ lui avait expliqué qu'il avait reculé contre un véhicule qui était garé sur un endroit interdit à cet effet, sans rien sentir. Il avait voulu appeler la police, mais l'autre partie pas, celle-ci préférant faire un constat à l'amiable. Elle avait conseillé à X______ de remplir le constat et que l'assurance de l'entreprise allait prendre le cas en charge, mais X______ n'avait pas voulu signer le constat. Elle avait transmis le numéro de sinistre au lésé, qui l'avait contacté par mail le même jour, et le sinistre avait été traité. Elle avait eu un contact téléphonique avec l'épouse du lésé, qui était énervée de ne plus pouvoir rouler avec le véhicule. Elle l'avait rassurée sur le fait que les réparations seraient prises en charge. Elle n'avait eu contact avec aucune autre personne qui aurait été présente sur place.
d. D______ a confirmé les termes de sa lettre du 17 septembre 2021, qu'il avait lui-même écrite. Il n'avait pas vu l'accident mais se trouvait dans un bâtiment à proximité. A______ était entré dans le bâtiment, l'avait appelé et il était tout de suite allé voir ce qu'il se passait. Quand il était arrivé, A______ était confus, pas bien et en état de stress, alors que X______ était remonté et agressif suite à son arrivée inattendue. Ce dernier n'avait pas demandé d'appeler la police et n'était pas d'accord de remplir un constat. Il avait alors pris des photographies et avait appelé l'entreprise B______. Il estimait que le camion avait reculé de deux ou trois mètres par rapport à la position que celui-ci avait occupé lorsqu'il était arrivé au poste SIG.
e. Les parties ont plaidé et pris les conclusions figurant en tête de jugement.
D. X______ est né le ______ 1962 au Kosovo, pays dont il est originaire. Il est titulaire d'un permis C en Suisse. Il est marié et a quatre enfants, dont trois à sa charge. Il travaille comme chauffeur poids-lourd et réalise un salaire mensuel net compris entre CHF 4'900.- et 5'200.-, ce qui constitue le seul revenu du ménage. Son loyer s'élève à CHF 1'530.- et les primes d'assurance-maladie de la famille à CHF 1'100.-. Ses impôts ont représenté CHF 5'800.- pour l'année 2021.
1.1.1. Selon l'art. 125 al. 1 aCP, celui qui, par négligence, aura fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
1.1.2. La réalisation de l'infraction réprimée par l'art. 125 aCP suppose la réunion de trois éléments constitutifs, à savoir une négligence imputable à l'auteur, des lésions corporelles subies par la victime, ainsi qu'un lien de causalité naturelle et adéquate entre la négligence et les lésions. Conformément à l'art. 12 al. 3 CP, il y a négligence si, par une imprévoyance coupable, l'auteur a agi sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. Il faut que l'auteur ait, d'une part, violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible et que, d'autre part, il n'ait pas déployé l'attention et les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir de prudence. Pour déterminer plus précisément les devoirs imposés par la prudence, on peut se référer à des normes édictées par l'ordre juridique pour assurer la sécurité et éviter des accidents. S'agissant d'un accident de la route, il convient de se référer aux règles de la circulation routière (arrêt du Tribunal fédéral 6B_69/2017 du 28 novembre 2017 consid. 2.1).
1.1.3.1. La violation fautive des devoirs de prudence doit être la cause naturelle et adéquate de l'accident (ATF 133 IV 158 consid. 6; 129 IV 119 consid. 2.4). Un comportement est la cause naturelle d'un résultat s'il en constitue l'une des conditions sine qua non, c'est-à-dire lorsque, sans lui, le résultat ne se serait pas produit (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_253/2012 du 7 septembre 2012 consid. 3.3.2). Le rapport de causalité peut être qualifié d'adéquat si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, le comportement était propre à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_253/2012 du 7 septembre 2012 consid. 3.3.2). La causalité adéquate suppose une prévisibilité objective. Il faut se demander si un tiers observateur neutre, voyant l'auteur agir dans les circonstances où il agit, pourrait prédire que le comportement considéré aura très vraisemblablement les conséquences qu'il a effectivement eues, quand bien même il ne pourrait prévoir le déroulement de la chaîne causale dans ses moindres détails. L'acte doit être propre, selon une appréciation objective, à entraîner un tel résultat ou à en favoriser l'avènement, de telle sorte que la raison conduit naturellement à imputer le résultat à la commission de l'acte (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3). La causalité adéquate sera admise même lorsque le comportement de l'auteur n'est pas la cause directe ou unique du résultat. Peu importe que le résultat soit dû à d'autres causes, notamment à l'état de la victime, à son comportement ou à celui de tiers (ATF 131 IV 145 consid. 5.2).
1.1.3.2. La causalité adéquate peut toutefois être exclue si une autre cause concomitante, par exemple le comportement de la victime, constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait s'y attendre. L'imprévisibilité d'un acte concurrent ne suffit pas, en soi, à interrompre le rapport de causalité adéquate. Il faut encore que cet acte revête une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'évènement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener et notamment le comportement de l'auteur (ATF 134 IV 255 consid. 4.4.2). La jurisprudence connaît comme exemple de circonstance tout à fait exceptionnelle et, partant, imprévisible, à laquelle ni (en l'occurrence) le chauffeur de bus, ni un autre automobiliste ne pouvait s'attendre, le cas d'un piéton qui, habillé de noir, en pleine nuit et alors que les conditions météorologiques sont défavorables, se couche sans aucune raison et sans d'ailleurs qu'on puisse comprendre un tel comportement, sur les voies d'autoroute (arrêt du Tribunal fédéral 6B_291/2015 c.3.2).
1.1.4. Le résultat typique de l'art. 125 aCP se définit en référence aux art. 122 et 123 aCP.
L'art. 122 aCP prévoit que sera puni d'une peine privative de liberté de six mois à dix ans celui qui, intentionnellement, aura blessé une personne de façon à mettre sa vie en danger (hyp. 1), aura mutilé le corps d'une personne, un de ses membres ou un de ses organes importants ou causé à une personne une incapacité de travail, une infirmité ou une maladie mentale permanentes, ou aura défiguré une personne d'une façon grave et permanente (hyp. 2), aura fait subir à une personne toute autre atteinte grave à l'intégrité corporelle ou à la santé physique ou mentale (hyp. 3).
L'art. 123 al. 1 phr. 1 aCP prévoit que celui qui, intentionnellement, aura fait subir à une personne une autre atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
1.1.5. Selon l'art. 26 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (RS 741.01 ; LCR), chacun doit se comporter, dans la circulation, de manière à ne pas gêner ni mettre en danger ceux qui utilisent la route conformément aux règles établies (al. 1). Une prudence particulière s'impose à l'égard des enfants, des infirmes et des personnes âgées, et de même s'il apparaît qu'un usager de la route va se comporter de manière incorrecte (al. 2).
1.1.6. Selon l'art. 31 al. 1 LCR, le conducteur devra rester constamment maître de son véhicule de façon à pouvoir se conformer aux devoirs de la prudence.
L'art. 3 al. 1 de l'ordonnance sur les règles de la circulation routière du 5 septembre 1979 (RS 741.11 ; OCR) précise que le conducteur vouera son attention à la route et à la circulation. Le degré de l'attention requise par l'art. 3 al. 1 OCR s'apprécie au regard des circonstances d'espèce, telles que la densité du trafic, la configuration des lieux, l'heure, la visibilité et les sources de danger prévisibles (ATF 137 IV 290 consid. 3.6 et les références citées; arrêt 6B_665/2015 du 15 septembre 2016 consid. 2.2).
1.1.7. Le conducteur qui veut faire marche arrière ne doit pas entraver les autres usagers de la route; ces derniers bénéficient de la priorité (art. 36 al. 4 LCR). Avant de commencer sa marche arrière, le conducteur s'assurera qu'il ne met en danger aucun enfant ou autre usager de la route (art. 17 al. 1 1ère phr. OCR). Lorsque le véhicule masque la vue vers l'arrière, le conducteur ne reculera pas sans aide d'une tierce personne, à moins que tout danger ne soit exclu (art. 17 al. 1 2ème phr. OCR).
1.1.8. Une éventuelle violation de l'art. 90 LCR est absorbée par l'art. 125 aCP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_291/2015 du 18 janvier 2016, consid. 3.2).
1.1.9. Le Tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure. Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le Tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (art. 10 al. 2 et 3 CPP).
Lorsque le Tribunal peut forger sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il importe peu que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble. Il n'y a pas d'arbitraire si l'état de fait retenu peut être déduit de manière soutenable du rapprochement de divers éléments ou indices. De même, il n'y a pas d'arbitraire du seul fait qu'un ou plusieurs arguments corroboratifs sont fragiles, si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (arrêt du Tribunal fédéral 6B_623/2012 du 6 février 2013, consid. 2.1).
1.2. En l'espèce, il est établi et admis par le prévenu que celui-ci a reculé avec son camion, sans prendre les précautions nécessaires.
Par conséquent, le Tribunal retient que le prévenu n'a pas respecté les prescriptions des art. 36 al. 4 LCR et 17 al. 1 OCR et a reculé sans faire preuve de l'attention exigée par les circonstances. Il n'a pas vu le véhicule du plaignant qu'il a heurté au court de sa marche arrière. En agissant ainsi, le prévenu a violé son devoir de prudence.
Le prévenu conteste en revanche que le plaignant se soit trouvé dans son véhicule au moment du choc et donc, de lui avoir occasionné des lésions corporelles. Au cours de la procédure, il a indiqué de manière constante qu'il n'avait pas vu le véhicule situé derrière son camion. Le prévenu n'ayant jamais vu le véhicule ni son conducteur, ses déclarations ne sont pas de nature à démontrer la présence ou l'absence du conducteur au volant de son véhicule. A l'audience de jugement, le prévenu a précisé avoir pris une vingtaine de secondes avant de descendre de son camion et en faire le tour. Ce laps de temps a pu permettre au conducteur de sortir de son véhicule, si bien que les déclarations du prévenu à cet égard n'emportent pas la conviction du Tribunal.
De son côté, le plaignant a affirmé s'être trouvé à l'intérieur du véhicule et a décrit la violence avec laquelle il avait vécu le choc. Il a consulté un médecin le jour-même des faits, lequel a signé un arrêt de travail et attesté les lésions subies, notamment dans la région cervicale suite à cet accident.
S'agissant des lésions subies par le plaignant, elles doivent être qualifiées de simples.
Le lien de causalité naturelle et adéquat est acquis pour les lésions subies par le plaignant puisque, sans le comportement du prévenu, le résultat ne se serait pas produit et qu'un choc entre un poids lourd et un véhicule est de nature à occasionner des lésions de type "coup du lapin", au conducteur du véhicule heurté.
Le prévenu sera par conséquent reconnu coupable de lésions corporelles simples par négligence au sens de l'art. 125 al. 1 aCP.
2.1.1. Selon l'art. 92 al. 1 LCR est puni de l'amende quiconque viole, lors d'un accident, les obligations que lui impose la présente loi. L'al. 2 de cette disposition punit d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire le conducteur qui prend la fuite après avoir tué ou blessé une personne lors d'un accident de la circulation.
2.1.2. L'art. 51 al. 1 LCR prévoit qu'en cas d'accident où sont en cause des véhicules automobiles ou des cycles, toutes les personnes impliquées devront s'arrêter immédiatement. Elles sont tenues d'assurer, dans la mesure du possible, la sécurité de la circulation.
L'al. 2 prévoit que, s'il y a des blessés, toutes les personnes impliquées dans l'accident devront leur porter secours; quant aux autres personnes, elles le feront dans la mesure qu'on peut exiger d'elles. Ceux qui sont impliqués dans l'accident, mais en premier lieu les conducteurs de véhicules, avertiront la police. Toutes les personnes impliquées, y compris les passagers, doivent prêter leur concours à la reconstitution des faits. Ces personnes ne pourront quitter les lieux sans l'autorisation de la police, sauf si elles ont besoin de secours, si elles doivent en chercher ou quérir la police.
L'al. 3 prévoit quant à lui que, si l'accident n'a causé que des dommages matériels, leur auteur en avertira tout de suite le lésé en indiquant son nom et son adresse. En cas d'impossibilité, il en informera sans délai la police.
2.1.3. Le comportement de fuite n'est rien d'autre que le fait de s'éloigner du lieu de l'accident, sans justification (chercher du secours, appeler la police), par quelque moyen que ce soit, indépendamment de savoir si le conducteur s'est d'abord arrêté ou a seulement continué sa route et sans qu'il soit nécessaire que l'abandon ait compromis la vie ou la santé du blessé (Jeanneret, Les dispositions pénales de la loi sur la circulation routière, 2007, n° 205 ad art. 92 LCR).
2.1.4. En rapport avec l'élément subjectif, les principes relatifs à l'art. 92 ch. 1 LCR (violation des devoirs en cas d'accident) sont pleinement applicables à l'hypothèse de l'infraction qualifiée (Jeanneret, op. cit., n° 216 ad art. 92 LCR). En matière de violation des devoirs en cas d'accident, délit d'omission pur, la distinction entre intention, dol éventuel, négligence et absence de culpabilité portera sur la conscience qu'a ou qu'aurait pu et/ou dû avoir l'auteur de la situation qui créée des devoirs à sa charge.
Ainsi, viole intentionnellement ses devoirs en cas d'accident le conducteur qui a conscience de se trouver dans une situation d'accident et décide librement de ne pas satisfaire aux devoirs que lui impose la loi dans de telles circonstances. L'intention peut aussi être réalisée sous la forme du dol éventuel, lequel portera sur la connaissance des circonstances qui engendrent des devoirs, soit l'existence d'un accident et les conséquences de ce dernier (dégâts matériels ou humains).
S'agissant de la négligence, elle découlera d'une imperfection non excusable dans la conscience de l'auteur de l'existence des circonstances propres à engendrer des devoirs. Si l'auteur a un doute à propos de l'existence d'un accident ou de ses conséquences, il ne peut se contenter de résoudre cette incertitude en sa faveur; à défaut, il commet une négligence consciente. En définitive, la violation par négligence des devoirs en cas d'accident interviendra sous la forme d'une erreur de fait évitable au sens de l'art. 19 al. 2 CP (art. 13 al. 2 CP) portant sur l'existence d'un accident et/ou sur sa nature (Jeanneret, op. cit., n° 131 ss ad art. 92 LCR).
2.2. En l'espèce, le prévenu a affirmé de manière constante qu'il avait voulu appeler la police, mais que le plaignant l'aurait refusé.
Le plaignant a pour sa part déclaré avoir voulu faire un constat amiable et appeler la police, mais que le prévenu avait refusé ces deux options et avait quitté les lieux de l'accident.
Selon les déclarations écrites du témoin D______, qu'il a confirmées en audience de jugement, le plaignant avait voulu établir un constat, ce que le prévenu avait refusé de faire, et celui-ci n'avait pas non plus voulu attendre la police.
Il ressort en outre des déclarations de la témoin E______ que le prévenu avait certes voulu appeler la police, mais qu'en aucun cas il n'avait voulu signer un constat.
Il est en outre établi par le rapport de police que le prévenu avait déjà quitté les lieux lorsque celle-ci est arrivée sur place.
La partie plaignante et l'ensemble des témoins s'accordent ainsi à dire que le prévenu a quitté les lieux de l'accident alors que la victime souhaitait simplement faire un constat amiable, ce que le prévenu a refusé de faire et ce que son employeur lui avait conseillé.
Partant, le prévenu a violé ses devoirs en cas d'accident et sera reconnu coupable de cette infraction.
3.1. Selon l'art. 91a al. 1 LCR, est puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire quiconque, en qualité de conducteur d’un véhicule automobile, s’oppose ou se dérobe intentionnellement à une prise de sang, à un contrôle au moyen de l’éthylomètre ou à un autre examen préliminaire réglementé par le Conseil fédéral, qui a été ordonné ou dont le conducteur devait supposer qu’il le serait, ou quiconque s’oppose ou se dérobe intentionnellement à un examen médical complémentaire ou fait en sorte que des mesures de ce genre ne puissent atteindre leur but.
3.2. Au vu des dommages matériels attestés par photographie et de la particularité de la situation liée à la nature du véhicule conduit par le prévenu, il ne s'agissait pas d'un simple accrochage. Le prévenu devait s'attendre à ce que la police procède à des mesures de contrôle de sa capacité de conduire. En quittant les lieux sans attendre l'arrivée des forces de l'ordre, le prévenu s'est dérobé aux mesures de contrôles qui auraient pu être ordonnées.
Partant, le prévenu sera reconnu coupable d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire.
4.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
4.1.2. Selon l'art. 34 al. 1 CP, sauf disposition contraire, la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur. L'art. 34 al. 2 CP dispose qu'en règle générale, le jour-amende est de 30 francs au moins et de 3000 francs au plus. Il peut exceptionnellement, si la situation personnelle et économique de l'auteur l'exige, être réduit jusqu'à 10 francs. Le juge en fixe le montant selon la situation personnelle et économique de l'auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d'assistance, en particulier familiales, et du minimum vital.
4.1.3. Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 CP). Le juge peut prononcer, en plus d'une peine avec sursis, une amende conformément à l'art. 106. (art. 42 al. 4 CP). Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis - ou du sursis partiel -, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit prononcer le sursis. Celui-ci est ainsi la règle dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable ou hautement incertain (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 p. 185 s. ; 134 IV 1 consid. 4.2.2 p. 5).
4.1.4. A teneur de l'art. 106 CP, sauf disposition contraire de la loi, le montant maximum de l'amende est de 10'000 francs (al. 1). Le juge prononce dans son jugement, pour le cas où, de manière fautive, le condamné ne paie pas l'amende, une peine privative de liberté de substitution d'un jour au moins et de trois mois au plus (al. 2). Le juge fixe l'amende et la peine privative de liberté de substitution en tenant compte de la situation de l'auteur afin que la peine corresponde à la faute commise (al. 3).
4.2. En l'espèce, la faute du prévenu n'est pas négligeable, car il n'a pas pris toutes les mesures de précaution pour vérifier si quelque chose ou quelqu'un se trouvait derrière son poids-lourd, au moment où il a reculé, et qu'il a atteint l'intégrité corporelle du plaignant.
Il a agi par une imprévoyance coupable.
Sa situation personnelle, qui est sans particularité, ne permet pas de justifier ses actes. En sa qualité de chauffeur expérimenté, il aurait dû prendre les précautions nécessaires avant de reculer.
Il a fait preuve d'une collaboration moyenne, n'admettant que le fait d'avoir heurté légèrement le véhicule du plaignant.
La prise de conscience est imparfaite.
En l'absence d'antécédents judiciaires et d'un pronostic défavorable, le prévenu est éligible au sursis, de sorte que le Tribunal prononcera à son encontre une peine pécuniaire de 90 jours-amende, peine assortie du sursis et d'un délai d'épreuve de trois ans, le montant du jour-amende étant fixé à CHF 140.-, pour tenir compte de sa situation financière.
L'amende à titre de sanction immédiate sera de CHF 2'000.-.
5.1.1 La question de l'indemnisation du prévenu et de la partie plaignante (art. 429 à 434 CPP) doit être traitée en relation avec celle des frais (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_385/2017 du 5 décembre 2017 consid. 2.1 ; 6B_620/2016 du 17 mai 2017 consid. 2.2.2 ; 6B_792/2016 du 18 avril 2017 consid. 3.3).
Le prévenu supporte les frais de procédure s'il est condamné (art. 426 al. 1 CPP). Les frais de procédure causés par les conclusions civiles de la partie plaignante peuvent être mis à la charge de celle-ci lorsque la partie plaignante a été renvoyée à agir par la voie civile (art. 427 al. 1 let. c CPP).
5.1.2. L'art. 433 al. 1 let. a CPP, applicable par renvoi de l'art. 436 al. 1 CPP, permet notamment à la partie plaignante de demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure lorsqu'elle obtient gain de cause. La partie plaignante obtient gain de cause au sens de l'art. 433 al. 1 CPP si les prétentions civiles sont admises et/ou lorsque le prévenu est condamné. Dans ce dernier cas, la partie plaignante peut être indemnisée pour les frais de défense privée en relation avec la plainte pénale (ATF 139 IV 102 consid. 4.1 et 4.3 p. 107 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_549/2015 du 16 mars 2016 consid. 2.3).
5.1.3. La notion de juste indemnité de l'art. 433 CPP ne se confond pas avec celle des prétentions civiles, tendant notamment à la réparation du dommage, mais est spécialement réglée par l'art. 433 CPP (ATF 143 IV 495 consid. 2.2.4 ; Moreillon / Parein-Reymond, PC-CPP, 2ème éd., Bâle 2016, n° 6 ad art. 433 CPP). Cette notion laisse un large pouvoir d'appréciation au juge et couvre les dépenses et les frais nécessaires pour faire valoir le point de vue de la partie plaignante dans la procédure pénale. Il s'agit en premier lieu des frais d'avocat (ATF 139 IV 102 consid. 4.1 p. 107).
5.1.4. Les honoraires d'avocat se calculent selon le tarif usuel du barreau applicable dans le canton où la procédure se déroule (arrêt du Tribunal fédéral 6B_392/2013 du 4 novembre 2013 consid. 2.3). La Cour de justice retient en principe un tarif horaire entre CHF 400.- et CHF 450.- pour un chef d'étude, de CHF 350.- pour les collaborateurs et de CHF 150.- pour les stagiaires (arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2010 du 31 octobre 2011 consid. 3; 2C_25/2008 du 18 juin 2008 consid. 3, en matière d'assistance juridique, faisant référence aux tarifs usuels d'un conseil de choix à Genève ; AARP/125/2012 du 30 avril 2012 consid. 4.2 ; ACPR/178/2015 du 23 mars 2015 consid. 2.1).
5.2. En l'occurrence, le plaignant s'est porté demandeur au pénal mais n'a pas fait valoir de conclusions civiles dans la procédure. Il a ainsi obtenu gain de cause au pénal et a droit à ce que ses dépenses en lien avec sa défense soit mis à la charge du prévenu. Le prévenu sera ainsi condamné à verser au plaignant une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure sur le plan pénal, laquelle est fixée à CHF 5'529.90.
Compte tenu de sa condamnation, le prévenu sera condamné aux frais de la procédure, qui s'élèvent CHF 998.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP) et sa demande d'indemnisation sera rejetée.
LE TRIBUNAL DE POLICE
statuant à nouveau contradictoirement :
Déclare X______ coupable de chefs de lésions corporelles par négligence (art. 125 al.1 aCP), d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91a al.1 LCR) et de violation des obligations en cas d'accident (art. 92 al. 2 LCR).
Condamne X______ à une peine pécuniaire de 90 jours-amende (art. 34 CP).
Fixe le montant du jour-amende à CHF 140.-.
Met X______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).
Avertit X______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).
Condamne X______ à une amende de CHF 2000.- (art. 106 CP).
Prononce une peine privative de liberté de substitution de 20 jours.
Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.
Renvoie la partie plaignante A______ à agir par la voie civile (art. 126 al. 2 CPP).
Rejette les conclusions en indemnisation de X______ (art. 429 CPP).
Condamne X______ à verser à A______ CHF 5'529.90, à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure (art. 433 al. 1 CPP).
Condamne X______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 998.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).
Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Office cantonal de la population et des migrations, Service cantonal des véhicules, Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).
Informe les parties que, dans l'hypothèse où elles forment un recours à l'encontre du présent jugement ou en demandent la motivation écrite dans les dix jours qui suivent la notification du dispositif (art. 82 al. 2 CPP), l'émolument de jugement fixé sera en principe triplé, conformément à l'art. 9 al. 2 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale (RTFMP; E 4.10.03).
La Greffière | La Présidente |
Vu l'annonce d'appel formée par le prévenu, laquelle entraîne la motivation écrite du jugement (art. 82 al. 2 let. b CPP),
LE TRIBUNAL DE POLICE
Condamne X______ à payer un émolument complémentaire de CHF 600.- à l'Etat de Genève.
La Greffière | La Présidente |
Voies de recours
Les parties peuvent annoncer un appel contre le présent jugement, oralement pour mention au procès-verbal, ou par écrit au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans le délai de 10 jours à compter de la communication du dispositif écrit du jugement (art. 398, 399 al. 1 et 384 let. a CPP).
Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.
Si le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit conteste également son indemnisation, il peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours dès la notification du jugement motivé, à la Chambre pénale d'appel et de révision contre la décision fixant son indemnité (art. 396 al. 1 CPP).
L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).
Etat de frais
Frais du Ministère public | CHF | 510.00 |
Convocations devant le Tribunal | CHF | 90.00 |
Frais postaux (convocation) | CHF | 41.00 |
Emolument de jugement | CHF | 300.00 |
Etat de frais | CHF | 50.00 |
Frais postaux (notification) | CHF | 7.00 |
Total | CHF | 998.00 |
========== | ||
Emolument complémentaire | CHF | 600.00 |
Total | CHF | 1'598.00 |
|
| ========== |
Notification à X______, soit pour lui son conseil, Me Tony DONNET-MONAY
Par voie postale
Notification à A______, soit pour lui son conseil, Me K______
Par voie postale
Notification au Ministère public
Par voie postale