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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1595/2013

ATAS/664/2014 du 03.06.2014 ( AI ) , SANS OBJET

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1595/2013 ATAS/664/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 3 juin 2014

2ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié p.a. Mme A______, à VEYRIER, représenté par Madame A______

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITE DU CANTON DE GENEVE, sis rue des Gares 12, GENEVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Monsieur A______ (ci-après l'assuré ou le recourant), né le ______ 1967, souffre de troubles psychiques sévères et il a déposé le 22 juin 2001 une demande de prestations d'invalidité auprès de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (l'OAI).

2.        L'assuré est régulièrement représenté par sa mère, Madame A______- dans le cadre des démarches avec l'OAI et des procédures judiciaires menées.

3.        Par décision du 24 mai 2006, il a été mis au bénéfice d'une rente entière d'invalidité avec effet au 1er juillet 1999.

4.        Par décision du 24 mai 2006, il s'est vu octroyer une allocation pour impotent de degré faible dès le 1er janvier 2004, puis par décision du 7 juillet 2010 une allocation d'impotent de degré grave dès le 1er janvier 2009, puis moyenne dès le 1er avril 2010.

5.        L'arrêt de la chambre des assurances sociales du 15 février 2011 rejetant le recours formé contre cette dernière décision a été confirmé par arrêt du Tribunal fédéral du 15 novembre 2011.

6.        La mère de l'assuré a déposé le 19 mars 2012 une demande de contribution d'assistance pour son fils qui avait besoin d'aide pour le ménage, les loisirs, les activités journalières, puis a rempli le 25 mai 2012 le formulaire y relatif.

7.        L'OAI lui a alors adressé le formulaire d'auto-déclaration (description du besoin d'aide) en indiquant que les premières conditions d'octroi étaient réalisées.

8.        De juin 2012 à janvier 2013, l'OAI et la mère de l'assuré ont échangé de la correspondance concernant la demande de contribution d'assistance et un entretien a eu lieu le 10 août 2012.

9.        Par projet du 18 février 2013, confirmé par décision du 13 avril 2013, l'OAI a rejeté la demande pour défaut de collaboration, après la sommation du 24 janvier 2013.

10.    Entretemps, l'OAI a procédé à un signalement au Tribunal de protection de l'enfant et de l'adulte (TPAE) faisant valoir que la mère de l'assuré ne semblait plus en mesure de remplir ses obligations de représentante.

11.    La mère de l'assuré a déposé plainte à l'OFAS contre la directrice de l'OAI et le chef de service.

12.    L'assuré, représenté par sa mère, a recouru le 17 mai 2013 contre la décision de refus du 13 avril 2013 (A/1595/2013). L'OAI a conclu au rejet du recours, mais s'est déclaré prêt à revoir sa position si l'assuré acceptait de recevoir chez lui l'enquêtrice et produisait une procuration en faveur de sa mère.

13.    La mère de l'assuré a retiré la demande de prestations d'assistance de son fils le 23 avril 2013, ce dont l'OAI a pris acte le 10 mai 2013.

14.    Par décision du 13 juin 2013, l'OAI a refusé le retrait de la demande.

15.    L'assuré, représenté par sa mère, a recouru le 25 juin 2013 contre la décision de refus du retrait (A/2147/2013). L'OAI a conclu à l'irrecevabilité du recours.

16.    La mère de l'assuré a produit une procuration signée par son fils le 22 juin 2013.

17.    A l'issue de l'audience de comparution personnelle du 3 septembre 2013, la jonction des causes et la suspension jusqu'à droit jugé par le TPAE ont été prononcés par arrêt incident du 20 septembre 2013.

18.    Le 25 mars 2014, le TPAE a informé la chambre de céans que selon décision entrée en force, il avait été constaté que l'assuré ne remplissait pas les conditions à l'institution d'une mesure de protection en sa faveur.

19.    L'instance a été reprise et un délai a été fixé aux deux parties pour dire si la Cour pouvait rendre un arrêt prenant acte du retrait de la demande de contribution d’assistance, admettant en conséquence le recours du 15 juin 2013 contre la décision de refus du retrait de la demande et rejetant, en conséquence, le premier recours du 17 mai 2013 contre la décision de refus, moyennant quoi la procédure était gratuite, la Cour renonçant à la perception d’un émolument et les parties à l’allocation de dépens.

20.    Par pli du 29 avril 2014, l’OAI a indiqué être disposé à mettre fin à ce litige et à adhérer aux conclusions proposées par la Cour, à la condition que le recourant accepte également la suggestion du Tribunal. A défaut, l’OAI persistait dans ses conclusions.

21.    Par un mémoire de quatre pages, la mère de l’assuré a repris l’ensemble de la chronologie de la procédure. Elle a conclu à l’admission des deux recours, à l’annulation des deux décisions de l’OAI et à l’octroi de dépens, pour les frais occasionnés par la procédure (papier, timbres, utilisation d’appareils, téléphones, déplacements à la poste, temps consacré à la consultation des dossiers, à l’audience et pour la rédaction d’actes judiciaires et de démarches extrajudiciaires). Elle avait en effet dû écrire des dizaines et dizaines de courriers, se rendre à Berne pour une journée organisée à propos de la contribution d’assistance. Elle avait consacré en tout cas cent heures en tant que juriste à cette affaire.

22.    A défaut d’accord du recourant au dispositif proposé, la cause a été gardée à juger le 5 mai 2014.

EN DROIT

1.        a. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ; RS E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA; RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI; RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

b. Sur le plan matériel, le point de savoir quel droit s'applique doit être tranché à la lumière du principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 130 V 230 consid. 1.1; 335 consid. 1.2; ATF 129 V 4 consid. 1.2; ATF 127 V 467 consid. 1, 126 V 136 consid. 4b et les références).

En l'espèce, la demande de prestation d'assistance a été formée le 19 mars 2012. La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003 et s’applique donc au cas d’espèce. Tel est également le cas des modifications de la LAI du 21 mars 2003 (4ème révision), entrées en vigueur le 1er janvier 2004 (RO 2003 3852) et celles du 6 octobre 2006 (5ème révision de la LAI), entrées en vigueur le 1er janvier 2008.

c. Selon l'article 9 LPA, les parties peuvent se faire représenter par un conjoint, un ascendant ou un descendant majeur, un avocat ou un mandataire professionnellement qualifié.

En l'espèce, l'assuré est valablement représenté par sa mère, au vu de la décision du TPAE constatant que l'assuré ne remplissait pas les conditions à l'institution d'une mesure de protection en sa faveur, de sorte que la procuration du 22 juin 2013 est valablement signée par l'assuré.

2.        Dans la procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l’autorité administrative compétente s’est prononcée préalablement d’une manière qui la lie, sous la forme d’une décision. Dans cette mesure, la décision détermine l’objet de la contestation qui peut être déféré en justice par voie de recours. En revanche, dans la mesure où aucune décision n’a été rendue, la contestation n’a pas d’objet, et un jugement sur le fond ne peut pas être prononcé (ATF 131 V 164 consid. 2.1, 125 V 414 consid. 1a, 119 Ib 36 consid. 1b et les références citées).

L’objet du litige dans la procédure administrative subséquente est le rapport juridique qui – dans le cadre de l’objet de la contestation déterminé par la décision – constitue, d’après les conclusions du recours, l’objet de la décision effectivement attaqué. D’après cette définition, l’objet de la contestation et l’objet du litige sont identiques lorsque la décision administrative est attaquée dans son ensemble. En revanche, lorsque le recours ne porte que sur une partie des rapports juridiques déterminés par la décision, les rapports juridiques non contestés sont certes compris dans l’objet de la contestation, mais non pas dans l’objet du litige (ATF 125 V 414 consid. 1b et 2 et les références citées).

3.        En l'espèce, compte tenu de la décision du TPAE, force est de constater que la mère de l'assuré disposait des pouvoirs nécessaires pour retirer la demande de prestations d'assistance. Au moment du prononcé de la décision de refus du retrait, l'OAI pouvait légitimement douter du fait que ce retrait était dans l'intérêt du recourant et se poser la question du besoin de celui-ci d'être mis au bénéfice d'une mesure de protection, le cas échéant pourvu d'un curateur chargé de le représenter. Cela étant, la décision de refus du retrait de la demande s'avère finalement mal fondée et doit donc être annulée, ce qui implique l'admission du recours du 25 juin 2013. Au surplus, le retrait de la demande de prestations d'assistance a pour conséquence que le recours du 17 mai 2013 contre le refus de la prestation n'a en réalité plus d'objet. Il n'est donc pas nécessaire d'examiner si c'est à juste titre que l'OAI avait refusé la prestation en raison du défaut de collaboration de la représentante de l'assuré.

4.        a. Lorsqu’une partie obtient gain de cause, elle peut prétendre à l’octroi de dépens (art. 61 let. g LPGA en corrélation avec l’art. 89H al. 3 de la loi du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative [LPA]). L’autorité cantonale chargée de fixer l’indemnité de dépens jouit d’un large pouvoir d’appréciation (ATF 111 V 49 consid. 4a). La partie qui obtient gain de cause et qui n’est pas représentée par un avocat ou un mandataire professionnellement qualifié n’a qu’exceptionnellement droit à des dépens. Pour que l’on puisse admettre une telle exception, il faut notamment que l’affaire soit complexe, qu’elle porte sur un objet litigieux élevé, que la sauvegarde des intérêts de l’intéressé ait nécessité une grande dépense de temps, qui dépasse la mesure de ce qu’un particulier peut ordinairement et raisonnablement prendre sur lui, et que le rapport entre le temps consacré et le résultat de cette sauvegarde soit proportionné (VSI 2000/6 p. 337 consid. 5 ; ATF 110 V 134 consid. 4d ; RCC 1984 p. 278 ; ATFA non publié du 11 décembre 2001, K 10/99 consid. 6).

b. Les avocats bénéficient de par la loi d'une présomption de fait quant à leur aptitude à représenter efficacement les intérêts des parties dans les procédures administratives; tel n'est pas le cas en revanche des agents d'affaires qui ne disposent pas d'une formation juridique aussi complète et qui doivent établir leurs connaissances dans le domaine en cause pour être admis à procéder, sans que la différence de traitement réservée entre ces deux professions constitue une inégalité prohibée par l'art. 4 Cst. (ATF 43 I 34 ; ATF 125 I 166). L’aptitude à agir comme mandataire professionnellement qualifié devant la chambre administrative et celle des assurances sociales doit être examinée de cas en cas, au regard de la cause dont il s’agit, ainsi que de la formation et de la pratique de celui qui entend représenter une partie à la procédure. Il convient de se montrer exigeant quant à la preuve de la qualification requise d’un mandataire aux fins de représenter une partie devant la chambre administrative, dans l’intérêt bien compris de celle-ci et de la bonne administration de la justice (ATF 125 I 166; Arrêt du Tribunal fédéral 1P 416/2004 du 28 septembre 2004 consid. 2.2, confirmant l’ATA/418/2004 du 18 mai 2004). Pour recevoir cette qualification, les mandataires doivent disposer de connaissances suffisantes dans le domaine du droit dans lequel ils prétendent être à même de représenter une partie (ATA/14/2013 du 8 janvier 2013 consid. 2b ; ATA/330/2005 du 10 mai 2005 consid. 1). Tel est le cas du titulaire du brevet d'avocat employé d'une assurance de protection juridique, spécialisée dans la défense des usagers de la route, car il dispose de connaissances suffisantes dans le domaine du droit de la circulation routière, dans lequel il représente sa partie (ATA/619/2008; ATA/667/2013), d'un juriste titulaire employé par une institution sociale qui s'engage auprès d'étrangers en situation difficile (ATA/279/2012; ATA/177/2013). C'est dans le même sens que la chambre des assurances sociales admet la qualité de mandataire professionnellement qualifiés des juristes spécialistes et salariés d'organismes tels que Caritas, le CSP, le SIT, Unia, l'Assuas, Procap, etc.

c. Selon la jurisprudence applicable dans le cadre de l'art. 61 let. g LPGA, lorsque la cause est devenue sans objet, les dépens sont répartis en tenant compte de l'état de fait existant avant l'événement mettant fin au litige et de l'issue probable de celui-ci (SVR 2004 ALV Nr. 8 p. 22;ATF 110 V 54 consid. 3a; ATF 109 V 70 consid. 1; ATF 108 V 270 consid. 1). En conséquence, les frais et dépens sont supportés en premier lieu par la partie qui a provoqué la procédure devenue sans objet ou chez qui sont intervenues les causes qui ont conduit à ce que cette procédure devienne sans objet (ATF 125 V 373; ATF 118 Ia 488 consid. 4a; ATF non publié 9C_773/2011 du 30 juillet 2012, consid. 4).

d. En l'espèce, la qualité de mandataire professionnellement qualifié a déjà été refusée à la mère de l'assuré par arrêt du Tribunal cantonal des assurances sociales du 1er septembre 2005 (ATAS/711/2005). La Chambre de céans n'a pas eu à trancher la question dans son arrêt du 15 février 2011 (ATAS/150/2011), puisque le recours avait été rejeté. Force est de constater une fois encore que s'il est incontestable que la mère de l'assuré a acquis des connaissances juridiques dans le domaine de l'AI, au gré des nombreuses procédures qu'elle a menées pour défendre son fils, cela ne suffit pas pour lui reconnaître la qualité de mandataire professionnellement qualifié. De plus, elle représente uniquement son fils et n'a pas une activité de mandataire rémunérée pour d'autres assurés. Par ailleurs, une des règles professionnelles élémentaires du mandataire professionnel et de l'avocat est de ne pas agir dans sa propre cause et de ne pas représenter un proche si cela empêche de faire preuve de la distance nécessaire à l'accomplissement de son mandat, ce qui n'est manifestement pas le cas de la mère de l'assuré, qui est totalement impliquée, y compris émotionnellement, dans les causes de son fils. C'est donc bien en tant que mère qu'elle représente son fils, valablement puisqu'elle dispose d'une procuration et que le TPAE n'a pas mis l'assuré au bénéfice d'une mesure de protection.

Au surplus, la cause n'est pas particulièrement complexe, puisque des formulaires sont à disposition pour demander la prestation litigieuse, l'instruction a lieu d'office par une enquête sur place et la contestation du refus d'allocation n'est ni particulièrement compliquée, ni longue. Le fait que la mère de l'assuré ait rédigé de longs et nombreux courriers et mémoires et qu'elle ait consacré un nombre d'heures considérable à contester l'activité de l'OAI, à se renseigner sur les contours de la prestation, à déposer plainte à l'OFAS contre l'OAI et à se défendre contre la mise sous tutelle de son fils n'est pas déterminant en l'espèce, la procédure elle-même, si elle avait été limitée à son objet, ne nécessitant pas beaucoup de temps. A cet égard, la chambre de céans a d'ailleurs déjà eu l'occasion de relever que l'activité de la mère de l'assuré, qui consacre un temps important à chacune des affaires de son fils et rédige de très nombreux courriers, était disproportionnée (ATAS/777/2011). En conséquence, le recourant ne peut pas prétendre à des dépens pour l'activité déployée par sa mère.

5.        Au surplus, la question de savoir si le recourant devait retirer ses recours ou si l'OAI pouvait y acquiescer et lequel devrait supporter les frais du maintien de la procédure malgré le fait qu'elle n'avait plus d'objet sera laissée ouverte et la chambre de céans renoncera à la perception d'un émolument, par souci d'apaisement.

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

1.        Déclare les recours recevables.

Au fond :

2.        Prends acte du retrait de la demande de contribution d’assistance du 11 avril 2013.

3.        Annule la décision de refus de retrait de la demande de contribution d’assistance du 11 juin 2013 et admet en conséquence le recours du 25 juin 2013.

4.        Constate que le recours du 17 mai 2013 n’a plus d’objet.

5.        Renonce à la perception d'un émolument.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Irène PONCET

 

La présidente

 

 

 

 

Sabina MASCOTTO

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le