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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1981/2018

ATAS/16/2019 du 15.01.2019 ( PC ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1981/2018 ATAS/16/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 15 janvier 2019

2ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à GENÈVE

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante) est née le ______ 1950 à Genève. Elle est ressortissante de Carouge (GE). Célibataire, sans enfant, vivant seule, elle a habité depuis lors dans le canton de Genève (sous la réserve, ici sans incidence, d’années passées à Fribourg et à Bienne), à savoir – à teneur des données résultant de la banque de données de l’office cantonal de la population et des migrations [ci-après : OCPM] – à Vernier du 1er juillet 1977 au 1er juillet 1994, puis à Carouge jusqu’au 15 janvier 1998, puis à la rue B______ ______ à Genève.

2.        Par décision du 7 décembre 1999, l’office de l’assurance-invalidité de Genève a mis l’assurée au bénéfice d’une rente entière d’invalidité avec effet au 1er janvier 2000.

3.        Par décision du 30 mars 2000, l’office cantonal des personnes âgées (ci-après : OCPA) – devenu par la suite le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC ou l’intimé) a mis l’assurée au bénéfice de prestations complémentaires fédérales (ci-après : PCF) et cantonales (ci-après : PCC), ainsi que de subsides d’assurance-maladie (ci-après : SubAM).

4.        Ledit office a, depuis lors, rendu de nombreuses décisions d’octroi de telles prestations en faveur de l’assurée, en lui rappelant en principe chaque année, par le biais d’une « Communication importante », son obligation de l’informer de tout changement intervenant dans sa situation, en particulier d’« absence de plus de trois mois du canton de Genève » (cf. not. pièces 21, 31, 36 SPC), d’« absence de plus de trois mois, par année civile, du canton de Genève » (pièces 44, 56, 63, 67, 76, 81, 92, 97, 104, 110 SPC, ainsi que, dès décembre 2013, pièces 117, 135 et 140 SPC).

5.        Le 8 janvier 2014, le SPC a demandé à l’assurée de lui fournir toute une série de pièces dans le cadre d’une révision périodique de son dossier (pièce 124 SPC). L’assurée lui a envoyé diverses pièces, d’abord par un courrier du 17 février 2014 (pièce 128 SPC), lui rappelant qu’avec l’assistance de l’ASLOCA elle contestait devant le Tribunal des baux et loyers la résiliation de son bail à loyer lui ayant été notifiée pour le 31 octobre 2013, puis par un courrier du 21 mars 2014 expédié depuis Ovronnaz (VS) (pièce 130 SPC). Le SPC a rendu depuis lors plusieurs décisions d’octroi de PCF et de PCC en faveur de l’assurée, en particulier les 26 mars, 14 avril et 15 décembre 2014 (pièces 131, 134 et 136 SPC) et le 11 décembre 2015 (pièce 141 SPC).

6.        Par courrier recommandé expédié le 27 mai 2016 depuis Conthey (VS) (pièce 144 SPC), l’assurée a fait parvenir au SPC plusieurs décomptes de frais médicaux, pour lesquels ce dernier lui a versé une participation de CHF 1'062.80 à teneur d’une décision du 21 juillet 2016 accompagnée d’un récapitulatif (pièce 145 SPC).

7.        Par décision du 3 octobre 2016 accompagnée d’un récapitulatif, rendue après que l’assurée lui eut envoyé de nouveaux décomptes de frais médicaux, le SPC a fixé sa participation à CHF 360.05 (pièce 148 SPC). Ce courrier B est revenu en retour au SPC avec la mention « DÉMÉNAGÉ ».

8.        Le 8 novembre 2016, le SPC a envoyé à l’assurée, à son adresse connue (rue B______ ______ à 1206 Genève), un courrier de contrôle de domiciliation et de présence effective dans le canton de Genève (pièce 150 SPC), auquel l’assurée a répondu le 21 novembre 2016, en certifiant avoir son domicile et sa résidence effective sur le territoire du canton de Genève, par un courrier expédié ce même 21 novembre 2016 depuis Riddes (VS) (pièce 151 SPC).

9.        En décembre 2016, le SPC a envoyé à l’assurée le courrier habituel relatif aux prestations de l’année suivante, comportant le rappel de son obligation de l’informer de tout changement intervenant dans sa situation, en particulier d’« absence de plus de trois mois, par année civile, du canton de Genève » (pièce 152). Et, le 14 décembre 2016, le SPC lui a envoyé sa décision d’octroi de PCF et de PCC dès le 1er janvier 2017 (pièce 153 SPC).

10.    L’attestation pour la déclaration d’impôt que, comme chaque année, le SPC lui a envoyé le 20 janvier 2017 (pièce 154 SPC) est revenue en retour au SPC le 15 mars 2017 avec la mention « La boîte aux lettres / la case postale n’a plus été vidée » (pièce 155 SPC), mais tel n’a pas été le cas d’une attestation que le SPC lui a envoyée le 17 mars 2017 (pièce 156 SPC).

11.    Le 17 novembre 2017, le SPC a demandé à l’assurée de lui fournir toute une série de pièces dans le cadre d’une révision périodique de son dossier (pièce 157 SPC), dont un relevé détaillé, du 1er janvier 2011 à la date de cette demande, des deux comptes PostFinance dont elle était titulaire et une attestation officielle si elle était ou non, à titre conjoint ou individuel, propriétaire d’un bien immobilier en Valais (à solliciter du Registre foncier de Martigny).

12.    En décembre 2017, le SPC lui a envoyé une même « communication importante » que chaque année (pièce 158 SPC), et, le 13 décembre 2017, il lui a envoyé sa décision d’octroi de PCF et de PCC dès le 1er janvier 2018 (pièce 159 SPC).

13.    Le 19 décembre 2017, le SPC a adressé à l’assurée un premier rappel de sa demande précitée du 17 novembre 2017 (pièce 160 SPC), à la suite duquel l’assurée lui a adressé, par recommandé expédié le 15 janvier 2018 depuis Saillon (VS), une pile de documents (formulaire « Révision périodique », attestation de SubAM 2018, déclaration selon laquelle elle ne possédait pas et n’avait pas vendu ou donné de biens immobiliers en Suisse ou à l’étranger, preuve de la résiliation d’un de ses deux comptes PostFinance, relevés détaillés de son autre compte PostFinance pour la période du 1er janvier 2011 au 30 novembre 2017, documents fiscaux) (pièces 161 SPC).

14.    Par un courrier du 12 février 2018 au SPC, expédié depuis Saillon (VS) (pièce 164), l’assurée s’est dite sidérée par les preuves demandées, ajoutant que si elle était de temps en temps en Valais, c’était pour des raisons de santé, et lui communiquant encore d’autres pièces, dont une attestation des Bains de Saillon SA que l’assurée avait séjourné à plusieurs reprises dans cet établissement durant les années 2016, 2017 et 2018, un acte de défaut de biens délivré le 2 janvier 2018 à l’encontre de l’assurée, une attestation du 6 février 2018 du Registre foncier de Martigny que l’assurée n’est pas inscrite en qualité de propriétaire d’un immeuble dans l’arrondissement du Registre foncier de Martigny pour les communes connaissant le système fédéral (ne comprenant pas les communes de Bagnes, Bovernier, Finhaut, Isérables, Martigny-Combe, Salvan, Fully et Liddes).

15.    Le 21 février 2018, le SPC a rendu deux décisions concernant l’assurée :

-          l’une par laquelle, ayant appris son départ de Genève pour le canton du Valais, il interrompait le versement de ses prestations dès le 28 février 2018 et transférait son dossier à la caisse de compensation du canton du Valais pour examen de la situation en vue d’un versement de prestations complémentaires (pièce 166 SPC), ce qu’il a fait par un courrier du même jour (pièce 168 SPC), en même temps qu’il a informé l’agence immobilière s’occupant de l’immeuble de la rue B______ ______ à Genève qu’il cessait le versement direct du loyer de l’assurée et l’invitant à adresser dorénavant toute correspondance à cette dernière (pièce 165 SPC) ;

-          l’autre par laquelle il recalculait le droit de l’assurée aux prestations complémentaires pour la période du 1er janvier 2014 au 28 février 2018, lui reconnaissant exactement, au titre des PCF, le même montant que celui lui ayant été versé, mais lui déniant tout droit à des PCC et lui réclamant la restitution des PCC lui ayant été versées durant ladite période, totalisant un montant de CHF 42'564.- (pièce 167 SPC).

16.    Par un courrier du 26 février 2018 expédié depuis Saillon (VS), l’assurée a fait parvenir au SPC des décomptes de frais médicaux (pièce 169 SPC), que celui-ci a fait suivre, avec le dossier de l’assurée, à la caisse cantonale valaisanne de compensation le 8 mars 2018 (pièce 171 SPC).

17.    Par un recommandé expédié le 26 mars 2018 depuis Genève (pièce 172 SPC), consécutif à une opposition formée oralement le 14 mars 2018, l’assurée a retourné au SPC une copie de sa décision précitée du 21 février 2018 mettant fin au versement de ses prestations dès le 28 février 2018, en entourant la mention « Courrier B » et ajoutant « Reçu le 19.3.2018 » et les mots « Jamais reçu d’autre décision » et en y faisant encore figurer les mentions suivantes : « OPPOSITION TOTALE. PURE MENSONGE. Je n’ai jamais déménagé de Genève. Preuves à l’appui : Impôts Médaille pr chien. Mon domicile (avec apposition de son tampon encreur indiquant son adresse à la rue B______ ______ à Genève), C’est vous qui payé le loyer à Gérofinance depuis 2001, au ______, rue B______ 1206 Genève ».

18.    Le 11 avril 2018, le docteur C______, médecin généraliste de l’assurée installé à Thônex (GE), a écrit au SPC à la demande de l’assurée, inquiète de la « suspension » de ses prestations depuis le 1er mars 2018 au motif d’une présence soutenue en Valais. L’assurée était au bénéfice d’une rente d’invalidité pour un trouble de la personnalité avec des éléments persécutoires de type paranoïaque, invalidants sur le plan socio-professionnel, ayant par le passé motivé de nombreux séjours à la Clinique genevoise de Montana. Des péripéties juridiques relatives à son bail avaient abouti à une décision du Tribunal des baux et loyers favorable à l’assurée, qui considérait Genève comme son principal lieu d’attache. La stratégie de l’assurée de « mise au vert » à Ovronnaz s’inscrivait dans un besoin d’échapper à un voisinage immédiat vécu comme persécutoire ; le bénéfice de ses séjours prolongés à Ovronnaz était clairement favorable pour la santé de l’assurée. Le projet de cette dernière était d’entrer dans un appartement protégé à Carouge, avec le soutien de la mairie de cette commune et de l’Institution genevoise de maintien à domicile (ci-après : IMAD), entrée qui se profilait pour la fin de l’été 2018 à moins qu’elle ne lui soit refusée pour cause d’insolvabilité à la suite de la suspension de ses prestations, situation qui précipitait une péjoration de son état de santé (pièce 174 SPC).

19.    Par courrier du 11 mai 2018 expédié depuis Saillon (VS) (pièce 177 SPC), l’assurée a indiqué au SPC, en complément à son opposition précitée, qu’avec le soutien de la mairie de Carouge et de l’IMAD elle était sur le point de se voir attribuer un appartement protégé à la Résidence D______ à Carouge, mais que la suppression de ses prestations dès mars 2018, ne lui laissant plus que sa rente AVS de CHF 1'824.- par mois, compromettait cette solution.

20.    Par décision sur opposition du 14 mai 2018 (pièce 176 SPC), le SPC a rejeté l’opposition de l’assurée, qu’il a considérée comme dirigée contre les deux décisions précitées du 21 février 2018. Si, d’après les indications de l’OCPM, n’ayant que valeur d’indice, l’assurée était officiellement domiciliée dans le canton de Genève sans interruption depuis le 1er juillet 1977, elle n’y était en réalité pas domiciliée ni n’y avait sa résidence effective, ainsi que l’établissait le fait que, depuis le 12 janvier 2014, tous ses retraits bancaires (sauf deux en 2014 et un en 2015) avaient été effectués dans le canton du Valais et la grande majorité de ses frais médicaux correspondaient à des honoraires de médecin ou des frais de pharmacie encourus dans le canton du Valais. Aussi était-ce à juste titre que le SPC avait réclamé le remboursement des PCC versées indûment du 1er janvier 2014 au 28 février 2018 et avait supprimé ses prestations dès le 1er mars 2018 et transféré son dossier à la caisse de compensation du canton du Valais comme objet de sa compétence.

21.    Par recommandé posté le 8 juin 2018 à Conthey (VS), l’assurée a recouru contre cette décision sur opposition par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : CJCAS). Depuis le 1er mars 2018, elle n’avait que sa rente AVS de CHF 1'824.- pour vivre, avec un loyer mensuel de CHF 1'230.- ; elle avait quatre mois de retard pour le paiement de ses primes d’assurance-maladie. Après avoir payé ses impôts dans le canton de Genève pendant 48 ans, elle se faisait « jeter comme une chiffonnière » et dire d’aller vivre en Valais, où elle n’avait aucun domicile. Elle s’y trouvait de temps en temps pour des raisons de santé, devant se mettre à l’abri de l’hostilité de son voisinage à Genève et des travaux de réfection des façades de l’immeuble où elle habitait à Genève. Caritas, Pro Senectute, Pro Infirmis et l’Hospice général ne pouvaient l’aider financièrement ; elle devait se débrouiller toute seule, en étant malade. Elle avait répondu à toutes les demandes du SPC. Il lui était impossible de rembourser la somme réclamée par le SPC. Elle n’avait pas reçu la décision du 21 février 2018, envoyée par pli recommandé, mais en avait pris connaissance à la mi-mars 2018 après avoir pris contact avec le SPC (et elle en joignait une copie à son recours).

22.    Par écriture du 6 juillet 2018, le SPC a conclu au rejet du recours. Il résultait du dossier que l’assurée n’avait plus son domicile et sa résidence effective dans le canton de Genève depuis janvier 2014 ; depuis lors, elle avait fait quasiment tous ses retraits bancaires en Valais, où elle avait également eu la grande majorité de ses frais de médecin et de pharmacie ; elle lui avait expédié de nombreux courriers depuis le Valais ; une décision que le SPC lui avait adressée le 3 octobre 2016 avait été retournée à ce dernier avec la mention « Déménagé », et un courrier du 20 janvier 2017 le lui avait été le 15 mars 2017 avec la mention « La boîte aux lettres / la case postale n’a plus été vidée ».

23.    Le 30 juillet 2018, l’assurée a communiqué des pièces à la CJCAS démontrant selon elle qu’elle avait son « domicile fixe et unique » à la rue B______ ______ à Genève depuis le 16 janvier 1998, à savoir des pièces fiscales, des documents de sa caisse-maladie, le bail à loyer portant sur l’appartement précité, des attestations de l’OCPM, une attestation des Services industriels de Genève, une photo de sa voiture immatriculée GE ______. Se disant victime d’attitudes hostiles des concierges et de voisins de son immeuble, elle a en outre produit un jugement du Tribunal des baux et loyers du 13 août 2015 déclarant inefficace le congé que la régime immobilière dudit immeuble avait donné à l’assurée le 8 juillet 2013 pour le 31 octobre 2013 à la suite de nombreuses plaintes de voisins, la procédure n’ayant pas permis d’établir que des faits atteignant un degré de gravité rendant insupportable la continuation du contrat seraient à nouveau survenus après le 14 mars 2013 ; à bout de nerfs, elle avait fait de petits séjours en Valais, sans cependant changer de domicile ; sa vie était à Genève. Elle ne pouvait payer « les 42'000.- demandés ». Elle demandait à pouvoir percevoir à nouveau les prestations complémentaires afin de pouvoir se faire attribuer l’appartement qu’elle avait en vue à Carouge avec le soutien de la mairie de Carouge.

24.    Le 30 août 2018, le SPC a persisté à conclure au rejet du recours. L’assurée ne fournissait aucun argument ni aucun document démontrant qu’elle avait eu sa résidence habituelle dans le canton de Genève durant la période litigieuse.

25.    Dans des observations du 17 septembre 2018, l’assurée a contesté avoir quitté Genève depuis 2014. Elle a produit des documents comportant son adresse précitée à Genève, en particulier son permis de conduire et le permis de circulation de sa voiture, une attestation d’assurance responsabilité civile pour propriétaire ou détenteur de chien, des pièces fiscales, des documents de sa caisse-maladie, un extrait du registre des poursuites faisant état, au 27 juillet 2018, de 37 actes de défaut de biens délivrés à son encontre non éteints des dernières vingt années. Elle a également produit des tickets de parking à la Coop de Champel des 25 janvier, 2 et 20 février, 1er et 26 mars, 3, 12, 19 et 26 avril, 3, 11, 18 et 25 mai, 1er, 7, 14 et 21 juin, 1er, 18, 26 et 30 juillet, 14, 20 et 27 août, 9, 10 et 16 septembre (tickets ne précisant pas l’année), de même qu’un extrait de son compte PostFinance faisant état (en un lieu non précisé) d’achats effectués les 13, 14 et 16 septembre 2018.

26.    L’assurée a annoncé à l’OCPM quitter Genève pour Saillon (VS) le 8 octobre 2018.

27.    Le 1er novembre 2018, elle a demandé à la CJCAS de statuer sur son recours, en indiquant ne plus toucher de prestations complémentaires depuis le 1er mars 2018 alors qu’elle n’avait jamais habité en Valais. Elle se disait dans l’impossibilité de rembourser les CHF 42'000.- réclamés par le SPC, et a produit un extrait de son casier judiciaire et un certificat de bonne vie et mœurs, établis respectivement les 12 et 19 octobre 2018.

28.    Par un téléphone du 28 novembre 2018, l’assurée a informé le greffe de la CJCAS que sa régie avait résilié son bail à loyer portant sur son appartement de la rue B______ ______ à Genève pour le 31 décembre 2018. Un ami l’avait aidée à payer son loyer jusqu’en août 2018, mais plus par la suite.

29.    Le 14 décembre 2018, l’assurée s’est insurgée contre le fait qu’une décision n’avait pas encore été rendue sur son recours, alors qu’elle était Carougeoise, donc Genevoise depuis 1950 et avait toujours habité dans le canton de Genève (sauf trois ans à Fribourg et trois ans à Bienne). S’étant vue résilier son bail à loyer, elle se retrouvait à la rue. Elle a produit une pièce fiscale du 12 décembre 2018 faisant état d’un solde d’impôt à payer de CHF 167.40, avec la preuve du paiement de cette somme, ainsi qu’une copie de l’avis de résiliation de son bail pour le 31 décembre 2018 pour non-paiement du loyer malgré une mise en demeure. Elle a aussi indiqué que Caritas avait refusé de l’aider.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la CJCAS connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, comme le rappelle l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25). Elle est donc compétente pour statuer sur le recours, dès lors que celui-ci est dirigé contre une décision sur opposition rendue en application des lois précitées.

Le recours a été interjeté en temps utile (art. 60 LPGA ; art. 43 LPCC).

Il satisfait aux exigences, peu élevées, de forme et de contenu prévues par la loi (art. 61 let. b LPGA ; art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Touchée par la décision attaquée et ayant un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification, la recourante a qualité pour recourir (art. 59 LPGA ; art. 60 al. 1 let. a et b et art. 89A LPA).

Le recours est donc recevable.

2.        Le litige porte sur la question de savoir si la recourante avait son domicile et sa résidence effective dans le canton de Genève depuis janvier 2014, question à laquelle l’intimé a répondu par la négative, avec la conséquence que, d’une part, il a mis fin au versement des PCF dès mars 2018 et d’autre part a révisé les décisions antérieures en vertu desquelles il lui avait versé, depuis janvier 2014, des PCC, lui niant le droit à de telles prestations depuis janvier 2014, et lui a réclamé le remboursement des PCC versées depuis lors, à savoir CHF 42'564.-.

3.        a. Pour l’établissement des faits pertinents, il y a lieu d’appliquer les principes ordinaires régissant la procédure en matière d’assurances sociales, à savoir, en particulier, la maxime inquisitoire, ainsi que les règles sur l’appréciation des preuves et le degré de la preuve.

b. La maxime inquisitoire régit la procédure (non contentieuse et contentieuse) en matière d’assurances sociales. L’assureur social (ou, en cas de litige, le juge) établit d’office les faits déterminants, sans préjudice de la collaboration des parties (art. 43 et 61 let. c LPGA ; Ghislaine FRÉSARD-FELLAY, Procédure et contentieux, in Ghislaine FRÉSARD-FELLAY / Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, Droit suisse de la sécurité sociale, vol. II, 2015, n. 27 ss). Les parties ont l’obligation d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués ; à défaut, elles s’exposent à devoir supporter les conséquences de l’absence de preuve (art. 28 LPGA ; ATF 125 V 193 consid. 2 ; 122 V 157 consid. 1a ; 117 V 261 consid. 3b et les références).

c. Comme l’administration, le juge des assurances sociales apprécie librement les preuves, sans être lié par des règles formelles (art. 61 let. c in fine LPGA, cf. aussi consid. 8b). Il doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux (Ghislaine FRÉSARD-FELLAY, op. cit., n. 78).

d. Quant au degré de preuve requis, le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n’existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a ; Ghislaine FRÉSARD-FELLAY, op. cit., n. 81 ss).

4.        a. Il y a lieu d’examiner premièrement la question du domicile et de la résidence effective de la recourante dès janvier 2014 (ATAS/365/2016 du 10 mai 2016 consid. 4).

b. Selon l’art. 2 LPC, la Confédération et les cantons accordent aux personnes qui remplissent les conditions fixées aux art. 4 à 6 des prestations complémentaires destinées à la couverture des besoins vitaux (al. 1). Les cantons peuvent allouer des prestations allant au-delà de celles qui sont prévues par la présente loi et fixer les conditions d’octroi de ces prestations (al. 2). D’après l’art. 4 al. 1 LPC, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse ont droit à des prestations complémentaires (donc des PCF) dès lors que, notamment, elles ont droit à certaines prestations d'assurances sociales, dont une rente de vieillesse de l’assurance-vieillesse et survivants ou de l’assurance-invalidité (art. 4 al. 1 let. a et c LPC). Sur le plan cantonal, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle sur le territoire de la République et canton de Genève ont droit aux PCC à la condition, notamment, d’être au bénéfice de certaines prestations d'assurances sociales, dont une rente de l'assurance-vieillesse et survivants ou d’invalidité (art. 2 al. 1 let. a et b LPCC).

Le droit aux PCF et aux PCC suppose donc notamment que le bénéficiaire ait son domicile et sa résidence habituelle respectivement en Suisse et dans le canton de Genève. Lesdites prestations ne sont donc pas exportables. Les conditions de domicile et de résidence sont cumulatives (Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI, 2015, n. 15 ad art. 4).

Selon l’art. 12 al. 3 LPC, le droit à une prestation complémentaire annuelle s’éteint à la fin du mois au cours duquel l'une des conditions dont il dépend cesse d'être remplie. Il en va de même pour les PCC (art. 18 al. 3 LPCC).

c. Selon l’art. 13 LPGA, le domicile d’une personne est déterminé selon les art. 23 à 26 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), et une personne est réputée avoir sa résidence habituelle au lieu où elle séjourne un certain temps même si la durée de ce séjour est d’emblée limitée.

Cette disposition s’applique en matière de prestations complémentaires fédérales, du fait du renvoi qu’opère la LPC à la LPGA de façon générale comme sur cette question spécifique (art. 1 et 4 al. 1 LPC), mais aussi en matière de prestations complémentaires cantonales, en raison du silence de la LPCC sur le sujet, appelant l’application de la LPGA (art. 1A al. 1 LPCC), ainsi que de motifs de sécurité juridique et d’harmonisation des pratiques administratives (ATAS/1235/2013 du 12 décembre 2013 consid. 5). Les notions de domicile et de résidence habituelle doivent donc être interprétées de la même manière pour les deux prestations considérées.

d. Le domicile de toute personne est au lieu où elle réside avec l'intention de s'y établir (art. 23 al. 1 CC). La notion de domicile comporte deux éléments : l'un objectif, la résidence, soit un séjour d'une certaine durée dans un endroit donné et la création en ce lieu de rapports assez étroits ; l'autre, l'intention d'y résider, soit de se fixer pour une certaine durée au lieu de sa résidence, qui doit être reconnaissable pour les tiers et donc ressortir de circonstances extérieures et objectives. Cette intention implique la volonté manifestée de faire d'un lieu le centre de ses relations personnelles et professionnelles. Le domicile d'une personne se trouve ainsi au lieu avec lequel elle a les relations les plus étroites, compte tenu de l'ensemble des circonstances (ATF 136 II 405 consid. 4.3 p. 409 ss et les arrêts cités). Le lieu où les papiers d'identité ont été déposés ou celui figurant dans des documents administratifs, comme des attestations de la police des étrangers, des autorités fiscales ou des assurances sociales, constituent des indices, qui ne sauraient toutefois l'emporter sur le lieu où se focalise un maximum d'éléments concernant la vie personnelle, sociale et professionnelle de l'intéressé (ATF 125 III 100 consid. 3 p. 101 ss. ; Michel VALTERIO, op. cit., n. 16 ad art. 4 ; Ueli KIESER, ATSG-Kommentar, 3ème éd., 2015, n° 15 s. ad art. 13 LPGA).

Lorsqu'une personne séjourne en deux endroits différents, il faut tenir compte de l'ensemble de ses conditions de vie, le centre de son existence se trouvant à l'endroit, lieu ou pays, où se focalise un maximum d'éléments concernant sa vie personnelle, sociale et professionnelle, de sorte que l'intensité des liens avec ce centre l'emporte sur les liens existant avec d'autres endroits ou pays (ATF 125 III 100 consid. 3 p. 101). En ce qui concerne les prestations complémentaires, la règle de l'art. 24 al. 1 CC, selon laquelle toute personne conserve son domicile aussi longtemps qu'elle ne s'en est pas créé un nouveau, s'applique (ATF 127 V 237 consid. 1 p. 239). Le domicile est maintenu lorsque la personne concernée quitte momentanément (p. ex. en raison d'une maladie) le lieu dont elle a fait le centre de ses intérêts ; le domicile reste en ce lieu jusqu'à ce qu'un nouveau domicile est, le cas échéant, créé à un autre endroit (ATF 99 V 106 consid. 2 p. 108 ; Michel VALTERIO, op. cit., n. 22 ad art. 4).

e. Selon l'art. 13 al. 2 LPGA, une personne est réputée avoir sa résidence habituelle au lieu où elle séjourne un certain temps même si la durée du séjour est d'emblée limitée. Selon la jurisprudence, la notion de résidence doit être comprise dans un sens objectif, de sorte que la condition de la résidence effective en Suisse n'est en principe plus remplie à la suite d'un départ à l'étranger. Il n'y a cependant pas interruption de la résidence en Suisse lorsque le séjour à l'étranger, correspondant à ce qui est généralement habituel, est dû à des motifs tels qu'une visite, des vacances, une absence pour affaires, une cure ou une formation. De tels séjours ne peuvent en principe dépasser la durée d'une année. Des motifs contraignants et imprévisibles, tels que la maladie ou un accident, peuvent justifier de prolonger au-delà d'une année la durée du séjour. Il en va de même lorsque des motifs contraignants existant dès le début exigent une résidence à l'étranger de durée supérieure à une année, par exemple pour des motifs d'assistance, de formation ou de traitement d'une maladie (ATF 111 V 180 consid. 4 p. 182 ; arrêt 9C_696/2009 du 15 mars 2010 consid. 3.3 ; voir également arrêt H 71/89 du 14 mai 1990 consid. 2a, in RCC 1992 p. 36). Cela étant, dans la mesure où la durée admissible d'un séjour à l'étranger dépend en premier lieu de la nature et du but de celui-ci, la durée d'une année fixée par la jurisprudence ne doit pas être comprise comme un critère schématique et rigide (arrêt 9C_696/2009 cité). Dans le même sens, le Tribunal fédéral a jugé trop schématique la durée de trois mois que prévoyait le ch. 2009 des directives de l'office fédéral des assurances sociales (ci-après : OFAS) concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI (ci-après : DPC) dans leur version du 1er janvier 2002 (arrêt du Tribunal fédéral 9C 345/2010 du 16 février 2011 consid. 5.1 in fine). Le Tribunal fédéral a aussi jugé que des exceptions au principe de la résidence en Suisse ne peuvent entrer en considération que lorsque l’intéressé avait envisagé dès le début un départ temporaire et non pas définitif de Suisse (ATF 111 V 180 consid. 4c ; Michel VALTERIO, op. cit., n. 27 i.f. ad art. 4).

f. Selon les DPC en vigueur dès le 1er avril 2011, lorsqu’une personne – également lors d’une période à cheval entre deux années civiles – séjourne à l’étranger plus de trois mois (92 jours) d’une traite sans raison majeure ou impérative, le versement de la prestation complémentaire est suspendue dès le mois suivant. Il reprend dès le mois au cours duquel l’intéressé revient en Suisse (DPC n° 2330.01).

Lorsqu’au cours d’une même année civile, une personne séjourne plus de six mois (183 jours) à l’étranger, le droit à la prestation complémentaire tombe pour toute l’année civile en question. Le versement de la prestation complémentaire doit dès lors être supprimé pour le restant de l’année civile ; les prestations complémentaires déjà versées doivent être restituées. Lors de plusieurs séjours à l’étranger au cours de la même année civile, lesdits séjours sont additionnés au jour près. En cas de séjour à cheval entre deux années civiles, seuls les jours de l’année civile correspondante sont pris en compte. Les jours d’arrivée et de départ ne sont pas considérés comme jours de résidence à l’étranger (DPC n° 2330.02).

Lors d’un séjour à l’étranger dicté par une raison majeure, la prestation complémentaire peut continuer à être versée pour une année au maximum. Si le séjour à l’étranger se prolonge au-delà de douze mois, le versement de la prestation complémentaire prend fin dès le mois civil suivant. La prestation complémentaire est à nouveau versée dès le mois civil à partir duquel la personne est de retour en Suisse (DPC n° 2340.01). Seuls des motifs d’ordre professionnel, ou la poursuite d’une formation professionnelle, peuvent être considérés comme relevant d’une raison majeure, mais pas un séjour pour cause de vacances ou de visites (DPC n° 2340.02). En cas de séjour à l’étranger dicté par des raisons impératives, la prestation complémentaire continue d’être versée tant et aussi longtemps que l’intéressé garde le centre de tous ses intérêts personnels en Suisse (DPC n° 2340.03). Les raisons impératives ne peuvent être que des raisons inhérentes à la santé des personnes comprises dans le calcul PC (p. ex. impossibilité de transport suite à maladie ou accident) ou d’autres circonstances extraordinaires qui rendent impossible tout retour en Suisse (DPC n° 2340.04).

g. Comme le Tribunal fédéral l’a rappelé dans l’arrêt 9C 345/2010 précité (consid. 5.1 in fine, mentionnant l’ATF 126 V 64 consid. 3b p. 68), de telles directives ne lient pas le juge des assurances sociales, ces délais de trois ou douze mois ne doivent pas être appliqués de façon schématique et rigide. Les exceptions n’en sont pas moins conçues d’une manière restrictive ne permettant guère sinon pas la prise en compte de raisons d’ordre social, familial, personnel (ATF 126 V 463 consid. 2c ; Michel VALTERIO, op. cit., n. 32 ad art. 4).

h. Selon l’art. 1 al. 1 du règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 25 juin 1999 (RPCC-AVS/AI - J 4 25.03), le bénéficiaire qui séjourne hors du canton plus de trois mois au total par année perd son droit aux prestations, à moins qu’il ne s’agisse d’une hospitalisation ou d’un placement dans un home ou dans un établissement médico-social pour personnes âgées ou invalides. La chambre de céans a cependant jugé (ATAS/1235/2013 précité consid. 5c) que cette disposition réglementaire outrepasse le cadre fixé par l’art. 2 al. 1 let. a LPCC en définissant la notion de résidence de façon plus restrictive que celle qui doit se déduire de l’interprétation de cette disposition légale, et donc qu’elle n’est pas valable et ne doit pas être appliquée.

Dans la mesure où – comme en l’espèce – il n’est pas question de séjours à l’étranger, mais dans un autre canton au surplus proche de celui de Genève (comme le Valais), il se justifie de suivre par analogie la pratique s’étant développée pour les PCF en lien avec des séjours à l’étranger, toutefois avec une plus grande souplesse dictée par la possibilité le cas échéant exercée qu’offre une telle proximité géographique de conserver des liens étroits dans le canton de Genève et, en particulier, d’y revenir régulièrement.

Il n’est par exemple pas concevable de supprimer le droit aux prestations complémentaires à un bénéficiaire de telles prestations qui passerait la plupart de ses week-ends et deux à trois semaines de vacances en dehors du canton, et qui, de la sorte, totaliserait facilement plus de 120 jours d’absence du canton par année.

5.        En l’espèce, le dossier ne contient pas d’élément permettant, ne serait-ce qu’au degré de la vraisemblance prépondérante, de considérer que la recourante a transféré son domicile en Valais avant octobre 2018, donc tant à partir déjà du 1er mars 2018 (date depuis laquelle l’intimé a cessé de lui verser des prestations complémentaires) que pendant la période s’étant étendue de janvier 2014 à février 2018 (période couverte par la révocation des décisions d’octroi des PCC et la demande de restitution des CHF 42'564.- de PCC versées).

Il ne fait pas de doute, au contraire, que l’intention de la recourante, originaire de Carouge (GE) et ayant habité sa vie durant dans le canton de Genève (sous réserve de quelques années antérieures à tout le moins à l’année 1977), était de demeurer dans ce canton. En litige avec son voisinage, elle était à la recherche d’un autre appartement dans le canton de Genève, dans un cadre protégé, et elle était en bonne voie d’en obtenir un dans sa commune d’origine vers la fin de l’été 2018, les pièces du dossier faisant apparaître cette possibilité comme probable au vu du soutien dont elle paraissait bénéficier dans cette perspective de la part de la mairie de ladite commune et de l’IMAD.

6.        a. Encore fallait-il que la recourante conserve en outre sa résidence effective dans le canton de Genève.

Des indices commandaient de s’interroger à ce propos, la recourante apparaissant avoir, notamment depuis 2014, des liens étroits dans le canton du Valais, attestés par les retraits bancaires qu’elle a effectués régulièrement et presque exclusivement en Valais depuis cette année-ci, des frais de médecin et de pharmacie encourus principalement en Valais durant ces années 2014 à début 2018, l’envoi de plusieurs courriers à l’intimé depuis le Valais et le retour à l’intimé, par la poste, de deux courriers, l’un en novembre 2016 et un autre entre la fin janvier et début mars 2017. Aussi l’intimé avait de bons motifs d’initier une procédure de révision du dossier de la recourante.

b. La décision que l’intimé serait appelé à rendre au terme de cette procédure était susceptible d’avoir de lourdes conséquences pour la recourante, si bien que ledit service devait mener une enquête approfondie afin de s’assurer de ne pas commettre d’injustice, d’autant plus lorsqu’il a eu connaissance – au plus tard par le courrier circonstancié et crédible que le médecin traitant de la recourante (le Dr C______) lui a adressé le 11 avril 2018, près d’un mois avant que la décision attaquée ne soit rendue – des problèmes de santé que rencontrait la recourante, des contentieux dans lesquels celle-ci était (ou s’était) empêtrée ainsi que de la probable prochaine entrée de cette dernière dans un appartement protégé à Carouge. Ce souci d’un complet et précis établissement des faits était dicté par le principe de la proportionnalité, voulant que la décision rendue ne soit le cas échéant pas plus rigoureuse que nécessaire.

À ce stade, force est de constater que la suppression, dès mars 2018, non seulement – d’après la décision d’octroi de ces prestations du 13 décembre 2017 (pièce 159 SPC), rendue après ouverture de la procédure de révision précitée – de, par mois, CHF 852.- de PCC mais aussi et surtout de CHF 884.- de PCF pourtant non remises en question (sous réserve du canton appelé à verser ces dernières), et le transfert du dossier à la caisse de compensation du canton du Valais manifestement sans concertation préalable avec cette dernière, ont péjoré gravement la situation de la recourante et, très vraisemblablement, compromis l’attribution dudit appartement protégé à Carouge à la recourante, et finalement ont de facto contraint cette dernière à transférer son domicile en Valais en octobre 2018 faute de ressources pour payer son loyer à Genève.

À cette considération s’ajoute qu’il est important que les faits pertinents soient dûment établis avant que l’intimé ne statue, de la façon la plus contemporaine possible avec leur survenance, et non superficiellement dans l’idée que, le cas échéant, la chambre de céans complèterait l’instruction, en particulier pour établir le lieu du domicile ou de la résidence effective d’assurés, comme la chambre de céans l’a déjà dit (ATAS/638/2018 du 10 juillet 2018 consid. 5b ; ATAS/1132/2017 du 12 décembre 2017 consid. 3 ; ATAS/396/2017 du 23 mai 2017 consid. 4 et 5).

c. Or, s’ils faisaient apparaître comme possible que la recourante avait sa résidence effective en Valais, les faits précités ne l’établissaient pas de façon suffisante pour que, même au degré de la vraisemblance prépondérante, il se justifiât de rendre les deux décisions initiales du 21 février 2018, confirmées par la décision attaquée, du moins sans procéder à des investigations complémentaires plus approfondies.

De nombreux courriers de l’intimé, tous adressés à l’adresse genevoise de la recourante, ont bel et bien été reçus par cette dernière, tout au long des quatre ans et deux mois de la période allant de janvier 2014 à février 2018, de même que durant les mois suivants. Comme tendent à le confirmer notamment les quelques tickets de parking que la recourante a versés au dossier, certes pas pour les années 2014 à 2017 (mais cela s’explique qu’on ne conserve pas de tels indices probants), il est des plus probables que la recourante est venue régulièrement à Genève durant toute cette période, ou – inversement dit – s’est rendue régulièrement en Valais sans pour autant y établir sa résidence effective. Sans doute a-t-elle effectué des opérations sur son compte PostFinance essentiellement en Valais depuis 2014 (à savoir, en 2014, 5 dans le canton de Genève, 87 en Valais et 1 dans le canton de Vaud, en 2015 respectivement 1, 102 et 0, en 2016 respectivement 0, 68 et 2, et, de janvier à novembre 2017, respectivement 0, 64 et 0). Il n’apparaît toutefois pas extraordinaire qu’elle ait pris l’habitude de faire ses retraits bancaires en Valais et même d’y consulter des médecins (l’intimé n’indiquant au demeurant pas lesquels ni à quelle fréquence) et d’y faire des achats en pharmacie. Toujours est-il que la recourante avait un médecin dans le canton de Genève, à savoir le Dr C______, et qu’elle avait manifestement des contacts avec la mairie de Carouge et l’IMAD.

Il est par ailleurs avéré que, très probablement aussi ces dernières années, la recourante a fait l’objet de nombreuses poursuites, qui ont abouti à la délivrance à son encontre d’actes de défauts de biens, sans que les agents notificateurs et les huissiers de l’office des poursuites n’aient pas pu la localiser et la joindre à son adresse à Genève.

Sans doute n’était-il pas habile de la part de la recourante d’envoyer des courriers à l’intimé depuis le Valais. Cependant, le fait même qu’elle l’a fait à plusieurs reprises alors qu’elle se savait faire l’objet d’un contrôle de sa domiciliation et de sa résidence effective et d’une révision périodique de son dossier de prestations complémentaires peut aussi être compris comme un indice d’une présence certes fréquente en Valais mais pas pour autant d’une résidence devenue effective dans ce canton à l’exclusion de celui de Genève. Il témoigne par ailleurs de sa compréhension, pas nécessairement erronée, que la condition répétée chaque année dans la « communication importante » de signaler toute absence de plus de trois mois par année civile du canton de Genève ne vise que des séjours d’une traite à l’extérieur de ce dernier, condition dont rien ne démontre que la recourante ne la satisfaisait pas.

d. Le devoir d’instruction incombant en l’espèce à l’intimé comportait celui de procéder à des investigations complémentaires, avant de retenir une prétendue absence de résidence effective dans le canton de Genève, si ledit service n’entendait pas se fier à des indices probants habituels (certes pas décisifs) tels que l’assujettissement fiscal, l’immatriculation d’un véhicule, l’affiliation à une caisse-maladie, l’enregistrement auprès de l’OCPM, éléments la localisant dans le canton de Genève. Au nombre des actes d’instruction qu’il lui appartenait le cas échéant d’effectuer, il y a lieu de citer en l’espèce l’audition en bonne et due forme de la recourante et de témoins, comme le Dr C______, des représentants de l’IMAD et de la mairie de Carouge, voire d’agents notificateurs et/ou d’huissiers de l’office des poursuites, ainsi que d’autres témoins dont la recourante, dans une procédure respectant pleinement son droit d’être entendue, aurait alors pu solliciter l’audition (Jacques Olivier PIGUET, in Commentaire romand de la loi sur la partie générale des assurances sociales, éd. par Anne-Sylvie DUPOT / Margit MOSER-SZELESS, n. 13 ss ad art. 43).

e. La chambre de céans retient qu’il n’est établi, ne serait-ce qu’au degré de la vraisemblance prépondérante, ni que la recourante a fait en Valais, durant chacune des années considérées en l’espèce, de longs séjours d’une traite, notamment de plus de trois mois d’affilée, ni même des séjours suffisamment fréquents et répétés, avec l’intention d’emblée d’y demeurer durablement, pour permettre de retenir qu’elle n’avait plus sa résidence effective dans le canton de Genève et n’avait donc plus droit, dès le 1er mars 2018, aux PCF et aux PCC ni, dès janvier 2014, aux PCC et devait en conséquence restituer les PCC perçues de janvier 2014 à février 2018.

f. Il n’y a dès lors pas lieu d’examiner si, dans l’hypothèse contraire sur la question de la résidence effective de la recourante, l’intimé était en droit de réviser les décisions entrées en force en vertu desquelles lesdites prestations avaient été versées à la recourante, avec effet ex nunc pour les PCF et effet ex tunc pour les PCC (même si – sied-il néanmoins d’indiquer – il faudrait alors sans doute l’admettre), ni si, à ce stade, la recourante remplissait manifestement les conditions de la bonne foi et de l’exposition à une situation difficile, en sorte que l’intimé n’aurait d’emblée pas dû lui faire obligation de restituer les CHF 42'564.- de PCC versées de janvier 2014 à février 2018, ce sans préjudice d’un examen plus approfondi à un stade ultérieur à l’encontre le cas échéant d’un refus qui serait confirmé sur opposition d’une remise de l’obligation de restituer.

7.        En conclusions, il se justifie – sans préjudice que l’intimé complète l’instruction lacunaire qu’il a menée – d’admettre le recours au sens des considérants, d’annuler la décision attaquée, s’étant substituée aux deux décisions initiales du 21 février 2018, et de renvoyer la cause à l’intimé pour qu’il en tire les conséquences pertinentes, à savoir – ce qui doit être laissé à son appréciation – soit pour complément d’instruction sur la question de la résidence effective de la recourante durant la période litigieuse puis pour nouvelle décision, soit pour élucidation de la question, dont il n’apparaît pas s’être préoccupé, de savoir si, à partir de quand et à hauteur de quelles prestations l’autorité valaisanne compétente a repris le versement de prestations complémentaires en faveur de la recourante et le cas échéant pour versement de celles qui ne lui auraient pas été versées (étant entendu que la recourante ne saurait percevoir lesdites prestations à double).

8.        La procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA ; art. 89H al. 1 LPA).

Il n’y a pas matière à allocation d’une indemnité de procédure.

* * * * * *

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet au sens des considérants.

3.        Annule la décision attaquée et renvoie la cause au service des prestations complémentaires au sens des considérants.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie NIERMARÉCHAL

 

Le président

 

 

 

 

Raphaël MARTIN

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le