Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/666/2021

ATA/964/2021 du 21.09.2021 ( DIV ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 27.10.2021, rendu le 17.01.2023, ADMIS, 2C_849/2021
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/666/2021-DIV ATA/964/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 septembre 2021

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______

contre

ASSOCIATION C______
représentée par Me Franco Saccone, avocat

et

VILLE DE GENÈVE – SERVICE DE LA PETITE ENFANCE



EN FAIT

1) C______ (ci-après : l'association) est une association sans but lucratif organisée corporativement au sens des art. 60 ss du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210). Il ressort de ses statuts que son but est notamment d'accueillir des enfants en âge préscolaire (art. 2).

L'association regroupe à Genève, où elle a son siège, quatre espaces de vie enfantine, à savoir D______, E______, F______et G______(ibid.).

Ses organes sont l'assemblée générale, le comité et l'organe de révision (art. 3 statuts).

Les membres de l'association sont notamment les parents des enfants inscrits dans l'institution, ainsi que toute personne physique ou morale qui en partage les buts et paie une cotisation (art. 6 statuts). Les statuts de l'association n'attribuent pas la qualité de membre à la Ville de Genève (ci-après : la ville) ou à un quelconque représentant de cette dernière. La ville, soit pour elle un représentant du service de la petite enfance, a une voix consultative lors de l'assemblée générale qui est l'organe suprême de l'association (art. 9 al. 3 statuts), de même que dans les séances du comité (art. 13 ch. 2 statuts).

Les ressources de l'association sont les pensions versées par les parents des enfants, les subventions publiques et privées, les cotisations des membres, les dons, legs ou autres affectations en espèces ou en nature, les revenus de la fortune sociale, les produits de collectes et de ventes et des recettes diverses (art. 4 statuts).

2) L'association est une structure d'accueil de la petite enfance (ci-après : SAPE) subventionnée par la ville.

3) Madame A______ et Monsieur B______ sont les parents (ci-après : les parents), non mariés, d'H______, née le ______2013 et de I______, né le ______2017, lesquels portent le nom de leur père.

4) Le 12 mai 2014, les parents ont conclu et signé les trois parties du « Contrat d'accueil » avec l'association, relatif à la prise en charge d'H______. Ils ont fait de même le 27 juin 2017 pour la prise en charge de I______.

5) La troisième partie dudit contrat, soit les « Clauses contractuelles », prévoyait notamment, en son art. 5, que le calcul de la pension annuelle avait pour base les tarifs adoptés par le Conseil administratif de la ville et reposait sur une évaluation du revenu ou de la fortune du groupe familial dans lequel vivait l'enfant. Ainsi, les pensions étaient calculées en fonction de la capacité économique des parents.

6) En date du 1er juin 2018, vu l'augmentation des revenus de Mme A______, les parents ont signé un avenant au contrat du mois de juin 2017, portant le numéro 5______.

7) Entre août et octobre 2018, l'association a cherché, vainement, à obtenir de M. B______son bilan 2017, afin de recalculer les revenus annuels 2017 et l'ajustement 2018.

8) Le 3 septembre 2019, les parties ont signé un nouvel avenant au contrat d'accueil portant le numéro 1______, puis le 15 octobre 2019, un avenant n° 2______ compte tenu de modifications dans leurs revenus, respectivement « révision de la tarification 2019/reprise des revenus 2018 ».

9) Les parents ont été informés, par lettre circulaire éditée par la ville et distribuée en août 2019, avec une brochure explicative, puis en octobre 2019, qu'un changement de tarification entrerait en vigueur dès le 1er novembre 2019. Les éventuelles augmentations de tarifs seraient compensées par des réductions d'impôts découlant des nouvelles possibilités offertes par la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08) de déduire les frais de garde à concurrence de CHF 25'000.- par enfant au titre de l'impôt cantonal et communal (ci-après : ICC), au lieu de CHF 3'992.- jusqu'alors. Dès le 1er novembre 2019, le prix de pension serait calculé sur la base de l'avis de taxation de l'année précédente. Le prix serait plafonné à CHF 20'000 par an. En comparaison intercommunale, après la modification, les tarifs en ville restaient parmi les plus bas du canton. Le coût moyen annuel d'une place en crèche sur le territoire de la ville était de CHF 42'000.-.

10) Le 22 mai 2020, l'association a réclamé aux parents leur avis de taxation 2018 de même que cas échéant, l'avis de taxation immobilier.

11) Le 11 juillet 2020, les parents ont signé le nouveau « Contrat d'accueil » avec l'association pour la prise en charge de I______, n° 3______, valable dès le 1er novembre 2019. Il est composé de quatre parties, dont les « Conditions générales » (ci-après : CG), édition août 2020, sont la troisième partie.

L'art. 3 al. 7 let. a CG prévoit que le revenu déterminant du groupe familial est déterminé sur la base des éléments ressortant de l'avis de taxation reçu de l'administration fiscale cantonale genevoise (ci-après : AFC) pour l'ICC. Il ressort de l'art. 5 al. 1 CG que les parents s'engagent à fournir, dans les meilleurs délais, de leur propre initiative des données précises sur l'ensemble des revenus du groupe familial, ainsi que tous les documents et informations susceptibles d'influencer le montant du prix de pension. Sur demande, ils sont tenus de fournir tous documents complémentaires. S'ils s'en abstiennent ou refusent de remettre ces documents et informations, la tarification maximum est appliquée et est due avec effet rétroactif au 1er août précédant la rentrée de l'année scolaire en cours.

12) L'association a sollicité des parents, par courriels des 2 et 11 juillet 2020, qu'ils fournissent leurs avis de taxation 2018 et 2019, comprenant cas échéant l'avis de taxation immobilier, et, dans le cas où ils occuperaient le bien dont ils seraient propriétaires, les relevés bancaires concernant les intérêts hypothécaires, demande renouvelée par un « rappel urgent » le 8 septembre 2020, puis le 18 novembre 2020. L'adjointe de direction de l'association, Madame J______ est intervenue dans ce sens par courriel du 7 décembre 2020 pour obtenir les pièces nécessaires à l'établissement de la facture.

13) Mme A______ a répondu à l'association le 10 septembre 2020 qu'elle ne retrouvait pas sa taxation 2018.

14) M. B______ a, par courriel du 10 décembre 2020, demandé l'octroi d'un délai supplémentaire et a envoyé à l'association, le 16 décembre 2020, l'avis de taxation 2018 qu'il avait adressé préalablement caviardé, cette fois non caviardé. Il n'y a pas joint l'avis de taxation immobilier 2018.

15) Le 22 décembre 2020, l'association a adressé aux parents un avenant au contrat d'accueil (4______). Cet avenant faisait état d'un revenu déterminant de CHF 336'286.-, soit un montant supérieur au plafond fixé à CHF 220'000.-, conformément au barème A en vigueur. Il en résultait un prix de pension mensuel de CHF 1'454.60, avec effet rétroactif au 1er novembre 2019.

16) La facture du 25 décembre 2020 adressée aux parents pour le mois de janvier 2021 mentionne, en référence avec le montant à acquitter de CHF 1'454.60 « prestations contractuelles ».

17) Par courriel du 19 janvier 2021, M. B______ a produit son avis de taxation immobilier 2018. Il contestait la « décision de taxation » du 22 décembre 2020, laquelle ne tenait pas compte des déductions contenues dans la grille établie par le service de la petite enfance (ci-après : SAPE), en particulier des charges et frais d'entretien d'immeubles et des intérêts hypothécaires.

18) Selon l'association, M. B______ aurait contacté par téléphone, le 21 janvier 2021, la secrétaire comptable, Madame K______. Il aurait persisté à prétendre ne pas être en mesure de fournir les justificatifs des intérêts hypothécaires réclamés à maintes reprises. De guerre lasse, la secrétaire comptable aurait accepté de déduire des revenus bruts de M. B______ les intérêts hypothécaires tels que figurant sur l'avis de taxation de 2018.

19) Un nouvel avenant au contrat, n° 4______, a été adressé aux parents le 22 janvier 2021, lequel retient un revenu déterminant de CHF 232'364.-, soit un montant supérieur au plafond de CHF 220'000.- susmentionné, d'où un prix de pension mensuel de CHF 1'454.60.

20) Les parents ont formé recours par acte expédié à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le 22 février 2021 contre cet avenant, dont ils ont, à titre principal, demandé l'annulation. Préalablement, la chambre de céans devait constater l'absence d'une base légale suffisante à l'art. 20 de la loi sur l'accueil préscolaire du 12 septembre 2019 (LAPr - J 6 28), de même que l'inconstitutionnalité et l'absence de base légale du système de détermination du revenu déterminant et des barèmes d'imposition visant à arrêter le prix des pensions en structure d'accueil de la petite enfance adoptés par le Conseil administratif de la ville.

Malgré sa forme, l'acte attaqué, dénommé « contrat », était une décision. Les éléments y figurant ne pouvaient être négociés et affectaient de manière unilatérale et obligatoire la situation juridique des parents concernés. L'avenant au contrat et, en tout état de cause, les factures émises en application du système d'imposition tel que susdécrit, constituaient des décisions.

Ils ont évoqué le contexte général de la prise en charge des enfants d'âge préscolaire à Genève, l'adoption en juin 2012 de l'art. 160G de l'ancienne Constitution de la République et canton de Genève du 24 mai 1847 (aCst-GE - A 2 00), repris à l'art. 200 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00), l'historique de l'adoption de la LAPr, et le principe de financement du secteur de la petite enfance qui se voulait essentiellement public (investissements et coûts d'exploitation). S'agissant spécifiquement de la participation des parents, aucun élément dans le contexte constitutionnel proposé par l'initiative populaire IN 143 « Pour une véritable politique d'accueil de la petite enfance », reprise sur ce point dans le contre-projet du Grand Conseil (L 10'895), ne laissait supposer que ceux-ci visaient autre chose qu'une participation équivalente de chaque parent, en particulier en présence d'une contribution de nature causale, par opposition à l'impôt général. Compte tenu de l'objectif affirmé de mettre en œuvre un financement essentiellement public du coût d'exploitation des places d'accueil, ce serait contrevenir aux textes des initiants et du contre-projet, à tout le moins à leur esprit général, mais également à l'intérêt public poursuivi par ces textes, que de mettre en place un système où en réalité certains parents viendraient indirectement subventionner d'autres parents en lieu et place des pouvoirs publics. Ainsi, l'art. 20 LAPr, fondé essentiellement sur la capacité économique des parents et les barèmes de la ville qui en étaient issus, apparaissait contraire aux art. 202 et 155 Cst-GE, ainsi qu'à l'art. 127 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101).

En ville, le coût d'une place de crèche atteignait CHF 42'000.- par an, alors que selon la Cour des Comptes, il se situait autour de CHF 35'000.- par an. Dans le cadre de la LAPr et du financement obtenu des entreprises, la ville avait estimé que celle-ci participerait à hauteur de CHF 11'000'000.- par an au financement de ses crèches. Sur les CHF 6'800'000.- de contribution totale émanant du canton, le montant reçu par la ville s'élevait à environ CHF 4 millions par an. Avec 4'003 places d'accueil en ville, la nouvelle charge sociale versée par les employeurs et la contribution du canton réduisaient de CHF 3'747.-/an (CHF 15'000'000.- : 4'003) le coût d'une place d'accueil, soit de CHF 42'000.- à CHF 38'253.- par an.

Dans le cadre de sa politique budgétaire, la ville subventionnait 75 % du coût des places en crèche, la participation des parents s'établissant à 21 %. Ainsi, pour un coût de CHF 38'253.- par place en crèche, la participation égale de chaque parent/famille, serait de CHF 8'033.- par an, soit CHF 1'606.- par an pour une journée d'accueil par semaine ou CHF 146.- par mois (CHF 1'606.- : 5 jours). Cette participation serait de CHF 8'820.- pour un coût de CHF 42'000.- par place en crèche.

À compter du 1er novembre 2019, le prix de la pension avait été sensiblement augmenté, avec l'introduction d'un nouveau modèle de fixation du revenu déterminant, très éloigné de la réglementation adoptée par le législateur cantonal dans le cadre de la LIPP et d'un barème d'imposition présentant une forte progressivité. Or, cette contribution causale, construite en réalité comme un véritable impôt et cela sans même respecter le principe de la capacité contributive des parents, violait dans son principe plusieurs dispositions et règles constitutionnelles et, en sus, avait été établie par l'administration communale en absence de base légale suffisante. Force était de constater que l'art. 20 LAPr ne prévoyait ni l'objet, ni l'assiette, ni le taux qu'il conviendrait d'appliquer à cette participation des parents fondée sur la capacité économique. Le règlement sur les structures d'accueil et sur l'accueil familial de jour du 21 décembre 2005 (RSAPE - J 6 29.01) ne précisait pas davantage la manière de la délimiter et de la calculer. Les lacunes de l'art. 20 LAPr apparaissaient de manière plus évidente encore au regard de la densité normative et la précision des art. 10 à 19 LAPr encadrant la contribution des entreprises.

C'était pour des raisons de confidentialité que M. B______ avait transmis le 18 novembre 2020 à Mme K______ le feuillet fiscal partiellement caviardé, tout en laissant apparaître le revenu net déterminant pour l'ICC 2018. À la demande du SAPE, il lui avait transmis, le 16 décembre 2020, ledit feuillet complet, tout en relevant qu'il trouvait choquant que la ville ait mis en place un véritable impôt supplémentaire, alors que les revenus visés avaient déjà été imposés en fonction de la capacité contributive de chacun. Le 22 décembre 2020, le SAPE avait transmis aux parents une première décision ne prenant pas en compte les éléments relatifs aux intérêts hypothécaires et aux charges et frais d'entretien d'immeubles, pourtant préalablement transmis. Le SAPE avait tenu compte, dans la décision du 22 janvier 2021, de ces éléments, sur la base de l'avis de taxation requis.

Nonobstant ces réductions liées aux charges directes des immeubles loués, la nouvelle décision retenait un revenu total déterminant du groupe familial de CHF  232'364.-, dépassant de CHF 86'993.- le revenu net déterminant admis par l'AFC pour l'ICC, à savoir CHF 145'371.- pour les parents considérés ensemble, soit CHF 45'172.- pour Mme A______ et CHF 100'199.- pour M. B______. Ce revenu total déterminant du groupe familial ainsi calculé entrait dans la tranche de revenus la plus élevée du nouveau barème de la ville.

Non seulement le système mis en place par la ville ne reconnaissait pas la majeure partie des déductions fiscales admises pour la détermination de l'ICC, mais il ne tenait même pas compte de la charge fiscale dont ce même revenu avait déjà fait l'objet au titre de l'ICC et de l'impôt fédéral direct (IFD). Or, pour M. B______, cette charge fiscale globale s'était élevée en 2018 à CHF 63'413.-, représentant 63 % de son revenu déterminant de CHF 100'199.- et un solde après impôts de CHF 36'786.-. Pour Mme A______, cette charge fiscale s'était établie à CHF 789.10, selon avis de taxation 2019. En retenant un revenu déterminant de CHF 123'700.- pour M. B______, sans base légale, le système violait les principes de la capacité contributive et de l'égalité de traitement entre citoyens, dès lors que des citoyens présentant en réalité des revenus disponibles équivalents pourraient se voir imposer des contributions sensiblement différentes. Ce raisonnement s'appliquait aussi à Mme A______ pour laquelle le SAPE avait retenu un revenu déterminant de CHF 108'644.-, alors que son revenu déterminant ICC s'élevait à CHF 45'172.-, d'où une charge fiscale de CHF 789.-.

Leur fille fréquentant la crèche quatre jours par semaine, leur contribution avait été fixée à CHF 16'110.60 par année, soit à CHF 20'000.75 par année pour cinq journées par semaine, ce qui représentait plus de 50 % du coût d'exploitation d'une place de crèche, après déduction de la subvention cantonale et du financement issu des entreprises ce, en violation évidente de la volonté du souverain telle qu'exprimée aux art. 200 et 202 Cst-GE, celui-ci n'ayant jamais visé à faire du parent le principal contributeur du système, devant la commune et le canton.

21) L’association a conclu, le 26 avril 2021, principalement à l'irrecevabilité du recours et subsidiairement à son rejet.

Sous l'égide de la loi sur les structures d’accueil et sur l’accueil familial de jour du 14 novembre 2003 (LSAPE - J 6 29), les pensions étaient déjà calculées en fonction de la capacité économique des parents. La loi n'avait donc pas changé, sauf l'ajout selon lequel le nombre d'enfants à la charge des parents était désormais pris en compte, ce qui était à leur avantage. La part du coût global de la ville était de 75 % et celle des parents de 21 %. La collectivité assumait donc clairement une part prépondérante du coût de l'offre, bien que cela ne fût pas une obligation légale. La participation ne couvrait donc manifestement pas les frais.

La qualification de contribution de nature causale, par opposition à l'impôt général, était fermement contestée. Il s'agissait en effet en l'espèce simplement de la participation des parents expressément prévue par la Cst-GE, dans le cadre d'un contrat de droit privé, autrement dit d'une partie, réduite, du coût effectif de la prestation que les parents utilisaient. En aucun cas des parents subventionnaient d'autres parents, même indirectement. Chaque parent couvrait, très partiellement, une partie différenciée du coût d'exploitation selon sa capacité économique, en application de l'art. 20 LAPr.

Contrairement à ce que soutenaient les parents, le principe d'égalité était parfaitement respecté. La tarification était plafonnée, ce dont ils bénéficiaient, et différencié pour tenir compte de la capacité économique de chacun. Le système de tarification comportait de nombreux avantages, y compris pour les parents, notamment par le fait qu'il se fondait sur l'avis de taxation, ce qui assurait une égalité de traitement par le SAPE. S'agissant d'un document uniforme, le calcul était rendu plus compréhensible et vérifiable par les parents. En outre, conformément au principe d'égalité, le fait de ne pas prendre en compte la charge fiscale s'appliquait à tous les parents.

Il était particulièrement contradictoire de soutenir d'un côté voir appliqués au prix de pension de l'accueil préscolaire les principes jurisprudentiels reconnus relatifs aux taxes causales, à savoir de l'équivalence et de la couverture des frais, et de l'autre côté que le coût de l'accueil préscolaire devait être la charge essentielle de la collectivité. Il ne ressortait au demeurant aucunement de l'art. 202 Cst-GE, issu du contre-projet du Grand Conseil finalement choisi par le peuple par rapport à l'IN 143, le Parlement s'étant au demeurant fondé sur la loi existante à l'époque, à savoir la LSAPE pour retenir le même principe figurant à l'actuel art. 20 LAPr, que le coût essentiel de l'accueil préscolaire était supporté de manière prépondérante, et encore moins essentielle, par la collectivité, étant relevé que bien que les parents n'osent pas utiliser le terme gratuité, ils le faisaient comprendre en filigrane de leur propos.

L'art. 20 LAPr figurait dans une loi formelle. Ensuite, si l'on devait considérer que la relation liant l'association aux parents était une relation de droit public, ce qui était contesté, on se trouverait dans le cadre de l'administration de prestations, dès lors qu'il s'agissait de l'accueil des enfants en âge préscolaire. Or, dans ce cadre, les exigences relatives à la base légale étaient moindres à teneur de la jurisprudence du Tribunal fédéral, ce qui était aussi l'avis de la doctrine. L'égalité de traitement était parfaitement respectée, puisqu'à revenu déterminant du groupe familial égal, le prix de pension était identique. La densité normative de cette disposition était clairement suffisante.

Il était erroné de dire que la ville estimait le montant du financement des entreprises, lequel résultait d'un calcul de répartition complexe assuré par la fondation pour le développement de l'accueil préscolaire (ci-après : FDAP) mis en place par la LAPr. Cette répartition dépendait également de décisions politiques.

Les parents avaient signé sans réserve le nouveau contrat d'accueil, le 11 juillet 2020, à la base de l'avenant querellé du 22 janvier 2021, qualifié à tort de décision, fondé sur la nouvelle tarification en vigueur depuis le 1er novembre 2019, ce qu'ils avaient fort opportunément tu dans leur recours. À aucun moment ils n'avaient prétendu que ce contrat serait une décision. Ils n'avaient pas fait recours contre la prétendue décision de taxation du 22 décembre 2020, M. B______ s'étant au contraire limité, dans son courriel du 19 janvier 2021, à en demander la correction au vu des nouvelles pièces produites. Ainsi, les parents avaient accepté l'avenant du 22 décembre 2020 moyennant les corrections sollicitées. Le contrat signé avec l'association était par définition de droit privé et la facturation en résultant était le prix de la prestation qu'ils utilisaient.

L'avenant attaqué n'avait pas été délivré par une autorité administrative au sens de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), étant rappelé que l'énumération des autorités figurant à son art. 5 était exhaustive et dépourvue de toute ambiguïté. L'association était manifestement un organisme privé, organisé selon le droit privé. Il n'existait aucune disposition fédérale ou cantonale par laquelle l'association aurait été investie d'un pouvoir de décision (art. 5 let. g LPA). Elle n'était à l'évidence pas une autorité communale, ni un service ou une institution qui en dépendait, puisqu'elle agissait en toute autonomie (art. 5 let. h LPA). Ses statuts n'attribuaient qu'une voix consultative à un représentant de la ville à son assemblée générale et celle-ci ne faisait pas partie du comité, ne disposant que de la faculté d'assister à ses séances avec voix consultative uniquement. Cette faculté ne lui était pas donnée s'agissant des séances du bureau. L'avenant attaqué n'était donc pas une décision, faute déjà d'avoir été délivré par une autorité administrative.

Par ailleurs, pour qu'un acte administratif puisse être qualifié de décision, il devait revêtir un caractère obligatoire pour les administrés. En l'espèce, les parents avaient parfaitement le choix de ne pas conclure le contrat d'accueil avec l'association, établi le 2 juillet 2020, qu'ils avaient pris le temps nécessaire à leur réflexion de ne signer que le 11 juillet suivant. Ils connaissaient alors le barème applicable. Il existait d'autres options de garde de leur fille que la crèche, ne serait-ce que l'engagement de personnel privé, solution qu'ils n'évoquaient pas et probablement plus onéreuse et moins qualitative. L'avenant, comme son nom l'indiquait, ne constituait rien d'autre que la mise à jour du prix de pension une fois le revenu déterminant effectif connu, ce qui était expressément prévu dans le contrat de base qu'ils avaient sans autre signé après avoir été dûment informés des changements de tarification.

Il s'ensuivait que la chambre administrative n'était pas compétente pour connaître du litige. Le recours devrait être déclaré irrecevable également dans la mesure où, faute de décision, les parents n'avaient pas la qualité pour recourir.

Les parents avaient entravé de manière significative le travail administratif de l'association en ne produisant pas les pièces utiles alors qu'ils les détenaient depuis longtemps, et ce malgré de multiples relances.

Si avec le nouveau système certains parents avaient vu le prix de pension augmenter, d'autres avaient bénéficié de diminutions. Les parents omettaient fort opportunément de rappeler que dès 2019, la déduction fiscale ICC pour les frais de garde effectifs était passée de CHF 3'992.- à CHF 25'000.- par année, ce qui préfigurait de substantielles économies d'impôt, en particulier pour eux, puisque ladite déduction portait en l'espèce sur la totalité des frais engendrés, soit CHF 16'000.60 par année.

Enfin, le prix de pension de l'accueil préscolaire ne constituant aucunement un impôt, mais le prix d'une prestation, le principe de la capacité contributive au sens de l'art. 127 Cst. ne s'appliquait manifestement pas.

22) La ville a, le 26 avril 2021 également, conclu au rejet du recours.

Elle n'intervenait dans la présente procédure qu'en qualité d'autorité de subventionnement, rappelant que le contrat liant les parents à l'association reposait exclusivement sur un rapport de droit privé auquel elle n'était pas partie.

Contrairement à l'enseignement obligatoire, le législateur, lorsqu'il avait concrétisé le mandat constitutionnel, n'avait pas fait du placement des enfants dans des structures d'accueil exploitées ou financées par l'État au sens large une obligation pour les familles. Il ne ressortait ni de la Cst-GE, ni de la LAPr que les collectivités publiques seraient tenues d'assumer une part prépondérante des coûts relatifs aux structures d'accueil préscolaire par principe. Elles étaient tenues au financement de manière subsidiaire à la perception des prix de pension et autre ressources, selon les termes mêmes de l'art. 8 LAPr. Si le législateur avait vraiment eu une intention telle que supposée par les parents de viser à une « participation équivalente de chaque parent », il aurait profité de la réécriture de cette loi pour l'exprimer clairement. Les parents qui payaient un prix de pension plus élevé, calculé en fonction de leur capacité économique, ne subventionnaient pas d'autres parents, chacun couvrant une partie différenciée du coût d'exploitation selon ses capacités financières en application de l'art. 20 LAPr. En tenant compte de la capacité financière des familles, les prix pratiqués par les structures subventionnées par la ville étaient de nature à rendre l'offre d'accueil accessible à toutes les familles, en application du principe de non-discrimination et d'égalité des chances de bénéficier d'une place en structure petite enfance.

La contribution des parents n'était nullement un impôt, étant rappelé que les parents avaient signé un contrat avec une structure associative privée et que la facturation en résultant était le prix de la prestation qu'ils utilisaient. Les règles de facturation des prix de pension de la petite enfance n'avaient rien à voir avec les règles de taxation fiscale.

L'existence d'un intérêt juridique à contester l'avenant en question apparaissait douteuse dans la mesure où le plafond de CHF 220'000.- par an était atteint dans le cas des parents, ce qu'ils ne remettaient pas en cause, et ce même avant la rectification du premier avenant, alors que tous les éléments à déduire n'avaient pas encore pu être pris en considération.

Les arguments de la ville rejoignent pour le surplus ceux de l'association.

23) Les parents ont longuement répliqué le 7 juin 2021.

Il était indubitable, au vu des éléments qu'ils exposaient, que l'accueil de jours des enfants en âge préscolaire constituait en droit genevois une tâche publique dont les communes avaient la responsabilité et que la ville avait choisi d'accomplir sa mission de service public par le biais de structures d'accueil subventionnées qu'elle contrôlait étroitement. Cette délégation comprenait implicitement le pouvoir décisionnel nécessaire à son accomplissement, notamment en vue d'appliquer le système de tarification décidé par le Conseil administratif. En l'espèce, en matière d'application des tarifs, cette compétence décisionnelle découlait en outre d'une délégation expresse en vertu de l'art. 13 al. 1 du règlement d'accueil de la ville. Le système de tarification adopté par la ville affectait de manière obligatoire et unilatérale leur situation juridique puisqu'ils ne pouvaient négocier avec les structures d'accueil subventionnées le prix auquel serait soumis l'accueil de leur enfant, ces structures ayant aliéné leur liberté contractuelle en s'engageant à appliquer la tarification décidée par la ville. Les prestations financières étant prédéterminées par des règles de droit public adoptées en amont par l'autorité, la tarification de l'accueil d'un enfant ne saurait ainsi faire l'objet d'un contrat bilatéral, qu'il soit de droit privé ou de droit administratif.

La ville détenait un monopole en matière de crèches et tout le monde pouvait convenir que les autres modes de garde n'étaient pas comparables, en termes de sociabilité et de développement des enfants notamment. En l'espèce, l'avenant du 22 janvier 2021 avait bien fixé de manière unilatérale et contraignante le nouveau prix de pension, unique modification qu'il contenait. Il s'agissait bien d'une décision de sorte, que la chambre administrative était compétente pour traiter du litige.

Les parents confirmaient et développaient à nouveau que selon eux il était incontestable que la participation financière en relation avec la mise à disposition d'une place d'accueil préscolaire constituait une contribution causale.

Au rang du principe de la capacité économique, en considérant les déductions admises dans le cadre de la LIPP et la charge déjà supportée par leur groupe familial, le revenu effectif s'établissait à CHF 81'168.90, correspondant selon le barème à un prix de pension annuel de CHF 6'927.25 pour cinq jours d'accueil, soit CHF 629.75 par mois.

24) Après avoir pu dupliquer, les parties ont été informées, le 9 août 2021, que la cause était gardée à juger.

Les arguments et documents produits par les parties seront pour le surplus repris ci-dessous dans la partie en droit dans la mesure nécessaire pour trancher le litige.

EN DROIT

1) De jurisprudence constante, la chambre administrative est habilitée à revoir, à titre préjudiciel et à l'occasion de l'examen d'un cas concret, la conformité des normes de droit cantonal au droit fédéral (ATA/1200/2017 du 22 août 2017 ; ATA/614/2017 du 30 mai 2017 ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/ Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. 1, 3ème éd., 2012, p. 345 ss n. 2.7.3). Cette compétence découle du principe de la primauté du droit fédéral sur le droit des cantons, ancré à l'art. 49 al. 1 Cst. (ATF 138 I 410 consid. 3.1 ; ATA/43/2016 du 19 janvier 2016). D'une manière générale, les lois cantonales ne doivent rien contenir de contraire à la Cst., ainsi qu'aux lois et ordonnances du droit fédéral (ATF 127 I 185 consid. 2 ; ATA/43/2016 précité ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. 1, 3ème éd., 2013, p. 786 n. 2337 ss). Le contrôle préjudiciel permet de déceler et de sanctionner la violation par une loi ou une ordonnance cantonale des droits garantis aux citoyens par le droit supérieur. Toutefois, dans le cadre d'un contrôle concret, seule la décision d'application de la norme viciée peut être annulée (ATA/614/2017 précité ; ATA/43/2016 précité ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, op. cit., p. 352 ss n. 2.7.4.2).

Se pose néanmoins in casu la question de la compétence de la chambre de céans pour trancher le litige.

2) a. La chambre administrative est l'autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). Le recours à la chambre administrative est ouvert contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e et 57 LPA. Sont réservées les exceptions prévues par la loi (art. 132 al. 2 LOJ). La chambre administrative connaît en instance cantonale unique des actions fondées sur le droit public qui ne peuvent pas faire l'objet d'une décision au sens de l'art. 132 al. 2 LOJ et qui découlent d'un contrat de droit public.

b. La chambre administrative connaît en instance cantonale unique des actions fondées sur le droit public qui ne peuvent pas faire l'objet d'une décision au sens de l'art. 132 al. 2 LOJ et qui découlent d'un contrat de droit public (art. 132 al. 3 LOJ). L'action contractuelle de l'art. 132 al. 3 LOJ est une voie de droit réservée au contentieux découlant des contrats de droit public (ATA/1301/2015 du 8 décembre 2015 consid. 2b et les références citées). Pour que l'action soit recevable, il faut ainsi que les conclusions prises par la personne concernée ne puissent faire l'objet d'une décision (ATA/1139/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b ; ATA/119/2013 du 26 février 2013 consid. 2).

c. Selon la doctrine, le contrat de droit administratif est un acte régi par le droit public qui résulte de la concordance de deux ou plusieurs manifestations de volonté concrétisant la loi dans un cas d'espèce, ayant pour objet l'exécution d'une tâche publique et visant à produire des effets bilatéraux obligatoires. Le contrat de droit administratif est ainsi une forme de contrat de droit public. Le contrat de droit administratif se caractérise, d'une part, par sa nature bilatérale, ce qui le distingue de la décision, et, d'autre part, par son inscription dans l'exécution d'une tâche publique prévue par la loi, ce qui le distingue du contrat de droit privé (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd. 2018, n. 970 et 971).

Une fois établi qu'une relation avec l'administration est de nature bilatérale, donc contractuelle, il faut encore déterminer si elle relève du droit public ou du droit privé. Le critère privilégié par la jurisprudence est celui de l'objet du contrat, considéré sous l'angle des intérêts en présence, et de sa fonction. Il s'agit d'un contrat de droit public lorsque l'intérêt public est directement en jeu, à savoir lorsque le contrat a pour objet direct l'exécution d'une tâche publique ou qu'il concerne un objet réglementé par le droit public (Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 978 et 981).

3) a. La Cst-GE dispose que l'offre de places d'accueil de jour pour les enfants en âge préscolaire est adaptée aux besoins (art. 200 Cst - Ge). Le canton et les communes organisent l'accueil préscolaire, évaluent les besoins, planifient, coordonnent et favorisent la création de places d'accueil, le canton étant responsable de la surveillance (art. 201 Cst - Ge). Les communes financent la construction et l'entretien des structures d'accueil, le canton et les communes financent leur exploitation après déduction de la participation des parents (art. 202 Cst - Ge). Le canton et les communes encouragent la création et l'exploitation de structures d'accueil de jour privées, en particulier les crèches d'entreprise, et ils favorisent le partenariat entre acteurs publics et privés (art. 203 Cst - Ge).

b. La LAPr s'applique à toutes les structures d'accueil soumises à surveillance (art. 1 al. 1). Elle règle essentiellement l'autorisation, la surveillance et le subventionnement des institutions. Elle dispose que les communes, ou groupements de communes, offrent des places dans les différents modes d'accueil pour les enfants en âge préscolaire ; à cette fin, elles peuvent collaborer entre elles, confier à une association ou à une fondation à but non lucratif la mise à disposition de places d'accueil préscolaire ; les modalités de cette collaboration sont définies statutairement, par voie réglementaire ou contractuelle (art. 6 al. 1).

c. Le Règlement LC 21 551 relatif à l’accueil préscolaire en Ville de Genève et aux conditions d’octroi des subventions aux structures d’accueil adopté par le Conseil administratif le 20 avril 2016 entré en vigueur le 1er septembre 2016 suivant (ci-après : règlement communal LC 21 551) s'applique aux structures d’accueil qui répondent à la définition de la LSAPE (art. 3 al. 1).

Conformément à ses missions et obligations découlant de la Constitution et de la législation cantonales, la ville dirige la politique de la petite enfance, planifie, organise et assure le maintien et le développement de l’offre de places d’accueil, sur son territoire. À cette fin, la ville subventionne les structures d’accueil sises sur son territoire, aux conditions et dans la mesure définies par le présent règlement et veille à ce que les structures d’accueil disposent de locaux adaptés à l’exercice de leur activité, en met à leur disposition si nécessaire, et prend en charge leur entretien, en conformité aux normes et aux besoins liés à l’accueil d’enfants en bas âge. La ville peut subventionner une structure d’accueil située à proximité immédiate de son territoire, à condition que celle-ci respecte le présent règlement et les autres conventions spécifiquement établies, notamment en ce qui concerne la provenance des enfants accueillis. La ville peut également soutenir et subventionner d'autres formes d'accueil préscolaire et développer des collaborations et des partenariats avec d’autres acteurs publics ou privés conformément au chapitre VIII du règlement (art. 1 du règlement communal LC 21 551).

L'application du règlement communal LC 21 551est confiée au département dont dépend le service de la petite enfance (ci-après : SDPE) et en particulier à ce dernier (art. 6 du règlement communal LC 21 551).

Le SDPE œuvre à la qualité de l’accueil préscolaire et collabore avec les structures d’accueil. En particulier, il promeut une gestion rationnelle des ressources, pour assurer une base économique sûre aux structures d’accueil, il élabore les contrats de prestations qui lient la ville et chaque entité juridique et contrôle leur bonne application, il fournit aux structures d’accueil les directives, instructions et recommandations utiles à l’application du présent règlement, il préavise et opère le versement des subventions aux structures d’accueil. Il participe à l’élaboration et à la mise en œuvre du changement de gouvernance du domaine de l’accueil préscolaire en fonction des décisions prises par les autorités municipales compétentes. Il est chargé du secrétariat des commissions et groupes de travail créés par la ville et, le cas échéant, la représente dans les groupes de travail et de réflexion concernant la petite enfance (art. 7 du règlement communal LC 21 551).

Le SDPE exerce les compétences qui lui sont attribuées par le règlement ainsi que toutes autres tâches que le Conseil administratif ou le-la magistrat-e délégué-e peut lui confier. En matière de soutien aux structures d’accueil, le SDPE les assiste dans l'élaboration et la conduite de leurs projets institutionnels et pédagogiques, leur gestion administrative et financière, la gestion des ressources humaines, le respect de la protection des données, leur réflexion éthique. En matière de contrôle, supervision et validation de la qualité du fonctionnement des structures d’accueil, le SDPE veille au respect des normes d'encadrement des enfants en fonction du cadre en vigueur et du taux d'occupation réel de chaque structure d’accueil, fait appliquer les conditions d’inscription des enfants par le biais du Bureau d'Information Petite Enfance (ci-après : BIPE), évalue la réalisation des prestations socioéducatives attendues et, au besoin, définit les actions à entreprendre, vérifie que les exigences de qualification du personnel des structures d’accueil soient remplies, contrôle la stricte application des barèmes des prix de pension approuvés par le Conseil administratif, veille au respect des procédures et des modèles de plans comptables établis, valide le budget et les comptes annuels des structures d’accueil, conclut avec les structures d’accueil des contrats de mise à disposition de locaux, dont l’usage doit être réservé en priorité à leur activité d’accueil de la petite enfance (art. 8 du règlement communal LC 21 551).

Un contrat-type d’accueil mis à disposition par le SDPE est conclu avec les représentants de l’enfant. Il est complété par un règlement interne propre à chaque structure d’accueil et préalablement approuvé par le SDPE (art. 12 du règlement communal LC 21 551).

Les structures d’accueil appliquent les barèmes des prix de pension fixés par le Conseil administratif. Elles ne peuvent y déroger qu'en cas de situation exceptionnelle, moyennant l'accord préalable de leur comité ou conseil de fondation et du SDPE. Le Conseil administratif peut décider d'appliquer des barèmes de prix de pension différenciés en fonction du domicile des parents ou si ceux-ci sont des fonctionnaires internationaux au bénéfice d’une exonération fiscale sur leurs revenus (art. 13 du règlement communal LC 21 551).

Les structures d’accueil sont organisées sous la forme de personnes morales de droit privé ou de droit public. Leurs statuts ou acte constitutif et règlement doivent avoir été approuvés par le SDPE. Elles doivent respecter les conditions posées par la loi cantonale concernant l’attribution de subventions aux institutions recevant des enfants d’âge préscolaire du 17 décembre 1971 (LASIEP - J 6 30) et son règlement d’application du 21 mars 1973 (RASIEP - J 6 30.01). Elles doivent avoir signé avec la ville un contrat de prestations qui définit les obligations devant être remplies pour assurer la qualité requise et les exigences de la ville en matière d’accueil d’enfants en âge préscolaire et d’usage de la subvention. Elles adhèrent à la Fédération genevoise des institutions de la petite enfance et aux contrats d’assurance conclus par celle-ci. Les conditions de subventionnement des autres formes d’accueil et de collaboration sont régies par le chapitre VIII (art. 14 du règlement communal LC 21 551).

Les statuts des associations subventionnées sont établis selon les modèles fournis par le SDPE. Sauf exception validée par le SDPE, la personne assurant la présidence de l’association doit être domiciliée sur le territoire de la ville. Les parents des enfants fréquentant la structure d’accueil sont représentés dans le comité, avec voix délibérative. Le personnel et la direction de la structure d’accueil sont représentés dans le comité, avec voix consultative. Un-e représentant-e du SDPE est invité-e permanent-e à l'assemblée générale et aux séances du comité, sans droit de vote. Il-elle se prononce sur tout objet pertinent pour la ville ; son opinion fait l’objet du débat et est consignée au procès-verbal de la séance (art. 15 al. 1 à 5 du règlement communal LC 21 551).

Il n’existe aucun droit à recevoir une subvention. Les décisions en matière d’octroi de subvention ne font pas l’objet d’un recours. Une subvention peut être allouée uniquement aux conditions suivantes : a) un contrat de prestations, au sens de l’art. 14 al. 4 du règlement communal LC 21 551, a été signé avec la ville ; b) le montant est disponible dans le budget de la ville ; c) la subvention a fait l’objet d’une décision d’octroi du ou de la magistrat-e délégué-e. Il peut être refusé une subvention à une organisation disposant de fonds propres importants (art. 21 du règlement communal LC 21 551).

À certaines conditions, la ville peut accorder des subventions d'exploitation, de travaux et acquisitions, ainsi que pour des projets spécifiques (art. 23 à 25 du règlement communal LC 21 551).

Les structures d’accueil doivent tenir leur comptabilité conformément aux prescriptions de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (Code des obligations, CO - RS 220 ; art. 957ss), présenter leurs comptes annuels, les faire contrôler et, selon les instructions du SDPE, mettre en place un système de contrôle interne. Au plus tard six mois après la fin de l’exercice comptable, elles remettent pour analyse à la ville les comptes annuels, le rapport de l’organe de révision, le rapport d’activité et tout autre document permettant de rendre compte de l’utilisation de la subvention. Au besoin, des documents complémentaires peuvent être exigés. À défaut de présentation des documents précités dans le délai imparti, une décision de révocation de la subvention allouée peut être prononcée (art. 28 du règlement communal LC 21 551).

Chaque structure d'accueil soumet ses comptes annuels à un organe de révision, conformément à l’Annexe 1 du règlement communal LC 21 551. À cet effet, l'une des trois fiduciaires choisies au préalable par la ville est mandatée. Le SDPE vérifie que les structures d'accueil respectent leurs obligations légales et contractuelles, notamment ses propres instructions en matière de système de contrôle interne. La ville peut procéder à des contrôles ou réaliser un audit sur l’utilisation de la subvention accordée. À cette fin, elle peut également mandater l’organe de révision de la structure d’accueil ou un organisme tiers (art. 29 al. 1 à 3 du règlement communal LC 21 551).

En tout temps, le-la magistrat-e délégué-e peut révoquer, réduire ou suspendre une subvention et décider de résilier le contrat de prestation, renoncer au versement de la subvention et/ou en demander la restitution s’il apparaît qu'une structure d’accueil : a) ne remplit plus les conditions posées à l'octroi et à l'utilisation de la subvention ; b) a manqué à son devoir d’information ou a induit ou tenté d’induire la ville en erreur en fournissant des informations inexactes ou en dissimulant des faits importants ; c) ne respecte pas les obligations auxquelles elle a souscrit dans le cadre du contrat de prestation ; d) n’utilise pas la subvention conformément à l’affectation prévue ; e) a gravement contrevenu à la législation fédérale ou cantonale, ou aux obligations découlant du présent règlement (art. 30 du règlement communal LC 21 551).

d. Selon le prospectus « Nouveaux tarifs dès l'automne 2019 » émis par le SPE, la réforme du système de tarification de l'accueil devait permettre de faciliter l'inscription d'un enfant, de simplifier le calcul du prix de pension et de s'harmoniser avec les tarifs des autres communes du canton.

c. En l'espèce, la crèche est exploitée par une association de droit privé, régie par les art. 60 ss CC. La gestion de la crèche figure expressément dans les statuts de l'association, laquelle n'a aucun but lucratif.

Selon ses statuts, adoptés le 11 juin 2015, les parents des enfants accueillis ou les représentants légaux de ces derniers deviennent membres avec l'inscription et cessent de l'être notamment au départ de l'enfant (art. 6.1 et 7.1 let. a).

Le site de la commune, consulté le 13 septembre 2021 (https://www.geneve.ch/fr/themes/structures-accueil-enfance-activites-extrascolaires/creches-autres-structures-accueil/creches-espaces-vie-enfantine/liste-creches-espaces-vie-enfantine) indique que les inscriptions en structure d'accueil sont centralisées auprès du BIPE et propose un formulaire en ligne. Le site indique également qu'une structure d'accueil du quartier d'habitation sera privilégiée en fonction des critères d'attribution établis.

4) a. En l'espèce, les recourants estiment que l'avenant au contrat d'accueil de leur fille qu'ils ont signé le 11 juillet 2020 serait une décision, attaquable devant la chambre de céans.

Ce « contrat d'accueil » a été passé par les recourant avec la crèche elle-même. Par ce contrat, ceux-ci se sont engagés à payer les pensions et à adhérer au règlement communal LC 21 551 ainsi qu'au règlement interne de la structure d'accueil.

Les recourants ont correspondu avec la crèche et ses organes, et c'est à elle qu'ils ont remis les documents relatifs à leurs revenus. C'est l'association qui leur a adressé l'avenant querellé du 22 janvier 2021.

Ils n'ont eu aucun contact avec la ville. En particulier, ils n'ont conclu aucun contrat avec elle, et celle-ci n'a pris aucune décision concernant l'accueil ou la pension de leur fils.

Il ressort des éléments qui précèdent que l'accueil du fils des recourants est l'objet d'une relation contractuelle entre ses parents et l'association exclusivement. Le fait que la commune subventionne par ailleurs la structure d'accueil, et même assume l'essentiel du coût de l'accueil des enfants, comme le fait qu'elle centralise et répartisse les inscriptions, ne change rien au fait que les recourants n'avaient pas de relation contractuelle ou administrative avec celle-ci.

Les recourants n'attaquent par ailleurs aucune décision de la ville, pas plus qu'ils n'élèvent contre elle de prétentions pécuniaires.

b. Il ne résulte ni de ses statuts ni de la réglementation de la ville que la crèche serait délégataire de tâches publiques. La réglementation communale n'attribue pas à la commune la tâche d'accueillir ou d'assurer l'accueil des enfants en âge préscolaire, pas plus qu'elle ne détermine les modalités selon lesquelles la commune accomplirait ou déléguerait cette tâche. Les modalités envisagées à l'art. 6 al. 1 LAPr ne paraissent pas exclure qu'une structure privée assume l'accueil de jour sans délégation de tâches publiques. L'art. 203 Cst-GE le prévoit même expressément, puisqu'il dispose que canton et communes « encouragent » la création de crèches privées et « favorisent » les partenariats. Le subventionnement des crèches peut certes être vu comme une modalité de l'accomplissement par la commune d'une tâche publique, mais il ne comporte pas pour autant la délégation de cette tâche à la crèche. Enfin, le fait que la crèche soit soumise à autorisation et surveillance administrative de l'État est sans effet sur son statut de droit privé.

Il ressort de la procédure que la structure d'accueil est exploitée par une association, soit une entité de droit privé, jouissant de la personnalité juridique, dotée d'organes et bénéficiant d'une complète autonomie financière et organisationnelle. Elle n'est pas contrôlée par l'État ni par la ville. Le fait qu'elle soit subventionnée par la ville, fût-ce au terme d'un contrat ou d'une convention de subventionnement, n'en fait pas une entité publique.

Le règlement interne du SAPE, qui fait partie intégrante du contrat d'accueil qui lie les parents et le SAPE, dont seule une version de juin 2020 figure à la procédure, correspond à des conditions générales de droit privé assortissant les contrats individuels, et auxquelles les parents doivent adhérer. Il attribue sans équivoque aux structures l'accueil des enfants et la relation contractuelle avec leurs parents, sans mentionner la commune, sinon pour rappeler qu'elle subventionne les crèches. Il règle dans le détail les droits et obligations des parties, soit en particulier les prestations caractéristiques du contrat - l'accueil de l'enfant et l'abonnement (en renvoyant au contrat d'accueil) - mais également les horaires, la résiliation, la fourniture des couches.

La LAPr, si elle détermine les conditions de l'obtention d'une autorisation, ne règle pas et ne prétend pas régler les relations entre parents et crèches, qui sont laissées à l'autonomie contractuelle des parties, et soumises par défaut au droit privé.

Le contrat liant la crèche au recourant est ainsi régi par le droit privé.

Il résulte de ce qui précède que la chambre de céans n'est pas compétente pour connaître du litige opposant les recourants à l'association. Ce cas de figure compte de grandes similitudes avec le cas traité par la chambre administrative dans un ATA/399/2021 du 13 avril 2021 dont les considérants, s'ils concernaient une autre commune du canton, peuvent s'appliquer en l'espèce quasiment mutatis mutandis.

Le cas traité dans l'ATA/844/2019 du 20 avril 2019 était différent du cas présent sur un point essentiel : les institutions de la petite enfance y étaient gérées par la commune elle-même, et c'était le service des finances de la commune qui facturait les prestations (règlement du Conseil administratif de la Ville de Vernier relatif aux institutions de la petite enfance du 11 août 2015 - RIPE - 540.0 ; cf. le nouveau règlement communal relatif aux structures d'accueil de la petite enfance de la ville de Vernier du 23 août 2019 - LC 43 551). C'était ainsi une autorité publique qui passait le contrat avec les parents, alors qu'en l'espèce la crèche est un acteur de droit privé.

L'action contractuelle formée par les recourants sera déclarée irrecevable.

C'est à juste titre que la commune a considéré ne pas avoir la légitimation passive dans la présente procédure. Il ne sera toutefois pas nécessaire de la mettre hors de cause vu l'issue du litige.

5) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'200.- sera mis à la charge conjointe et solidaire des recourants, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'200.- sera allouée à l'association, à la charge conjointe solidaire des deux recourants. Conformément à la jurisprudence constante de la chambre administrative, aucune indemnité de procédure ne sera en revanche accordée à la commune, qui compte plus de dix mille habitants (ATA/1260/2018 du 27 novembre 2018 et les références citées ; art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 22 février 2021 par Madame A______ et Monsieur B______ contre l'avenant établi par l'association C______ le 22 janvier 2021 ;

met un émolument de CHF 1'200.- à la charge conjointe et solidaire de Madame A______ et de Monsieur B______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'200.- à l'association C______, à la charge conjointe et solidaire de Madame A______ et de Monsieur B______ ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______ et Monsieur B______, à Me Franco Saccone, avocat de l’association C______, ainsi qu’à la Ville de Genève.

Siégeant : M. Mascotto, président, M. Verniory, Mmes Payot Zen-Ruffinen, Lauber et Tombesi, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

I. Semuhire

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :