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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3984/2015

ATA/1260/2018 du 27.11.2018 sur ATA/34/2017 ( MARPU ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : MARCHÉS PUBLICS ; APPEL D'OFFRES(MARCHÉS PUBLICS) ; PROCÉDURE OUVERTE ; ADJUDICATEUR ; CONCESSION
Normes : AIMP.8.al1; AIMP.8.al2; RMP.2.leta; RMP.2.letb; RMP.6; RMP.7.al1; RMP.7.al2; RMP.7A; RMP.11.al1; RMP.11.al2; RMP.15.al3; RMP.25.al1; RMP.25.leta; RMP.26.letb; RMP.26.letc; RMP.26.letd; RMP.26.lete; RMP.26.letf; RMP.26.letg; RMP.26.leth; RMP.26.leti; RMP.26.letj; RMP.26.letk; RMP.27; LDPu.12; LDPu.13; LDPu.15; LDPu.16; AIMP.6; AIMP.7; AIMP.12A.al1; AIMP.12A.al2; AIMP.parannexe1; AIMP.parannexe2; RMP.parannexe1; RMP.parannexe2
Parties : INTERMOBILITY SA / TPG VÉLO SA, CONSEIL D'ETAT ET AUTRES, CONSEIL D'ETAT
Résumé : L'appel à candidatures, lequel constitue un appel d'offres conformément à l'arrêt de renvoi du Tribunal fédéral, ne respecte pas plusieurs des conditions énoncées aux art. 25 à 30 RMP, soit notamment la publication sur la plateforme SIMAP ainsi que l'indication du nom de l'autorité adjudicatrice, du type de procédure et du fait que le marché était soumis aux traités internationaux. Ce constat ne peut conduire qu'à son annulation. Recours partiellement admis, dès lors que plusieurs intimés doivent être mis hors de cause.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3984/2015-MARPU ATA/1260/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 novembre 2018

 

dans la cause

 

INTERMOBILITY SA
représentée par Me Urs Portmann, avocat

contre

TPG VÉLO SA

et
CONSEIL D’ÉTAT
et
COMMUNE DE CAROUGE
COMMUNE DE LANCY
COMMUNE D’ONEX
COMMUNE DE PLAN-LES-OUATES
COMMUNE DE VERNIER
VILLE DE GENÈVE

représentés par Me Bertrand Reich, avocat


EN FAIT

1. a. Intermobility SA (ci-après : Intermobility), dont le siège se trouve dans le canton de Berne, est une société active dans le développement et la commercialisation du système de vélos en libre-service « vélospot ».

b. TPG Vélo SA (ci-après : TPG Vélo), inscrite au registre du commerce du canton de Genève depuis le 20 juin 2012, est une société ayant pour but l'exploitation, la gestion et la maintenance d'un système de vélos en libre-service (ci-après : VLS) ainsi que la vente de divers produits et services y relatifs.

2. Le 6 mars 2012, les Transports publics genevois (ci-après : TPG) ont lancé un appel d'offres portant sur la mise en œuvre d'un système de location automatisé de VLS dans le canton de Genève. La réalisation du marché, soit la conclusion du contrat, était subordonnée à l’obtention des crédits nécessaires.

3. a. Le 31 mai 2012, l'État de Genève a signé un « contrat de prestation
2012-2013 » (ci-après : le contrat de prestation) avec TPG Vélo en vertu duquel ladite société devait fournir une prestation de mise à disposition du public d'un réseau performant de VLS, sur le territoire cantonal genevois et assurer son exploitation en recourant à de la sous-traitance (art. 4), en échange d'une indemnité (art. 7). Ledit contrat valait octroi d'une concession d'utilisation du domaine public à titre gratuit par le Conseil d'État en faveur de TPG Vélo. Le contrat entrait en vigueur le 1er janvier 2013 et prenait fin le
31 décembre 2014 (art. 29).

b. Le 7 juin 2012, le Conseil d'État a transmis au Grand Conseil un projet de loi visant à ratifier le contrat de prestations et à verser à TPG Vélo l'indemnité prévue portant sur la prestation de VLS pour les années 2013 et 2014 (ci-après : PL 10'989).

4. a. Suite à l'appel d'offres lancé par les TPG le 6 mars 2012, une adjudication est intervenue en septembre 2012, mais a été révoquée le 6 février 2013.

b. Par décision du 8 juin 2015, les TPG ont annoncé qu'ils avaient décidé d'interrompre l’appel d’offres engagé le 6 mars 2012.

c. Par arrêt du 14 juin 2016 (ATA/501/2016), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a rejeté le recours formé contre la décision précitée. L'interruption n'était pas justifiée par la reprise du projet VLS par TPG Vélo, laquelle appartenait totalement au TPG, mais l'était par l’échec du pouvoir adjudicateur à obtenir les crédits nécessaires à la réalisation du projet, le PL 10’989 n'ayant toujours pas été adopté après trois renvois en commission des finances du Grand Conseil.

5. Le 17 mars 2017, le Grand Conseil a rejeté le PL 10'989.

6. a. Le 3 novembre 2015, est paru dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO), sous la rubrique « marchés publics », un « appel à candidatures » pour l’attribution d’une « concession d’occupation du domaine public en vue d’une exploitation d’un système de
[VLS] » sous l’appellation « Geroule ». L’objectif de cette mise en concurrence était de sélectionner un concessionnaire unique qui mettrait en œuvre un système de VLS au sein du périmètre de la concession. Cette dernière, d’une durée de sept ans, n’était soumise ni à l’Accord intercantonal sur les marchés publics du
25 novembre 1994 (AIMP - L 6 05), ni aux traités internationaux sur les marchés publics. Les dossiers de candidatures devaient parvenir à l’entité organisatrice, soit TPG Vélo, avant le 12 janvier 2016 midi et répondre aux exigences fixées dans la documentation mise à disposition.

Les documents relatifs à cette mise en concurrence comprenaient un formulaire de candidature et la description technique.

b. Le formulaire de candidature indiquait notamment que les dossiers qui ne respectaient pas les exigences minimales exposées dans la description technique et/ou qui n'étaient pas accompagnés des pièces exigées dans ledit formulaire seraient exclus (ch. 2.2). La composition du groupe d'évaluation chargé d'évaluer les offres remises par les candidats était la suivante : un représentant issu de l'État de Genève, six représentants issus respectivement des communes de Carouge, Genève, Lancy, Onex, Plan-les-Ouates et Vernier, un représentant de TPG Vélo ainsi que deux experts externes (ch. 2.3).

L'autorité concédante était le Conseil d'État, lequel avait délégué à TPG Vélo l'élaboration et le suivi de la procédure (ch. 2.10). À la suite de l'attribution de la concession, un contrat serait conclu entre l'autorité concédante et le candidat dont l'offre aurait été retenue (ch. 2.11). La concession était accordée par le Conseil d'État (ch. 2.12).

Les critères d'évaluation, notés sur 100 points, étaient les suivants : adéquation de l'offre avec la description technique (40 points), business plan
(25 points), développement durable (10 points), références et expériences similaires (15 points), gestion de projet (10 points ; ch. 2.14).

c. La description technique indiquait notamment que la concession était assortie d'une obligation pour le bénéficiaire de s'acquitter d'une redevance annuelle de CHF 10.- par m2 (ch. 5.4). La concession était octroyée pour une durée de sept ans (ch. 6.9), renouvelable sous conditions pour des périodes de
sept ans (ch. 5.6). Les recettes liées aux contrats de sponsoring et l'utilisation du système par les clients étaient au bénéfice du concessionnaire (ch. 5.5). Les périmètres proposés pour la concession étaient ceux des communes de Carouge, Genève, Lancy, Onex, Plan-les-Ouates et Vernier, ces dernières faisant parties de la présente mise en concurrence (ch. 6.4). Les droits et devoirs du candidat et de TPG Vélo seraient réglementés dans un contrat après l'octroi de la concession, dont les dispositions contractuelles importantes seraient déjà énoncées dans la concession. Ce contrat serait actualisé chaque année par le biais d'un avenant au contrat, sous forme de conventions annuelles (ch. 6.7, 6.10 et 6.11). Le système proposé devait inclure des bornes ou points d'attaches, permettant un accrochage et un décrochage intuitif, simple et sécurisé des vélos, compréhensible par tout public, y compris les visiteurs étrangers. Les bornes devaient être conçues de manière à être protégées au maximum du vandalisme et du vol de vélos (ch. 6.6 et 6.16).

Le document contenait encore un glossaire, lequel indiquait notamment que TPG Vélo était l'entité organisatrice de la procédure de mise en concurrence, avec laquelle le concessionnaire collaborerait également à la suite de l'attribution du marché dans le cadre d'une convention annuelle (ch. 12).

7. Le 13 novembre 2015, Intermobility a interjeté un recours auprès de la chambre administrative tendant à l’annulation de l’appel à candidatures susmentionné et à ce que les intimés soient condamnés aux « dépens » de la procédure, comprenant une participation à ses honoraires d'avocat. Préalablement, l’effet suspensif devait être octroyé au recours et il devait être ordonné à TPG Vélo de désigner tous les participants à « Geroule ». Les intimés désignés étaient TPG Vélo, le département de l'environnement, des transports et de l'agriculture, devenu le 1er juin 2018 le département des infrastructures (ci-après : le département) et les communes de Carouge, Genève, Lancy, Onex, Plan-les-Ouates et Vernier.

La législation sur les marchés publics étant applicable, l’appel à candidatures aurait dû prendre la forme d’un appel d’offres non discriminatoire en bonne et due forme.

Intermobility était active dans le développement et la commercialisation d’un système de VLS appelé « Vélospot », lequel comprenait une structure minimale, à savoir un serveur central qui communiquait avec les cadenas des vélos à travers des stations par ondes radio et le réseau GSM. Ce système ne nécessitait aucune infrastructure particulière sur le domaine public et se passait en particulier des racks à vélos et des bornes fixes pour l'interface avec l'utilisateur du système.

L'appel d'offres ne pouvait pas, sans violer l'égalité de traitement, viser un seul système ou un seul offreur. Or, en exigeant des attaches fixes, deux acteurs principaux sur le marché du VLS, dont elle-même, étaient exclus du marché.

8. Dans leur détermination sur effet suspensif du 30 novembre 2015, TPG Vélo, le Conseil d’État et les six communes visées par le recours ont conclu à ce que l’effet suspensif soit retiré au recours et, préalablement, à ce que les qualités des parties soient rectifiées en ce sens que seul le Conseil d’État, autorité concédante, soit partie à la procédure.

L’octroi d’une concession n’était pas soumis à la réglementation sur les marchés publics, de sorte que l’appel à candidatures n’était pas un appel d’offres et ne pouvait faire l’objet d’un recours, faute d’être une décision.

Seul le Conseil d’État pouvait octroyer des concessions d’utilisation du domaine public d’une durée inférieure à vingt-cinq ans. TPG Vélo n’était que l’entité organisatrice et n'allait en particulier pas choisir le futur concessionnaire mais proposer une entreprise au Conseil d'État. Elle ne disposait d'ailleurs que d'une voix sur huit parmi le groupe d'évaluation pour désigner l'entreprise retenue. S'agissant des six communes visées, aucune d'elles n'avait pris la décision de lancer un appel à candidature. Le projet leur avait été présenté par TPG Vélo et le département et elles avaient fait part de leur intérêt. Si la concertation était de mise et si l'apport des communes était essentiel, elles n'avaient pas organisé la mise en concurrence. Avant la publication de l'appel à candidatures, TPG Vélo avait adressé un questionnaire à vingt et une entreprises susceptibles de présenter une offre, dont la recourante, pour leur présenter succinctement le projet. Six entreprises, dont la recourante, avaient sollicité alors une audition. Celle-ci avait eu lieu le 8 octobre 2015 pour la recourante.

Sur le fond, même si deux entreprises étaient effectivement exclues de la compétition, faute de pouvoir présenter un système de VLS avec attaches, il restait à tout le moins dix-neuf entreprises susceptibles de proposer ce système. Les exigences techniques posées permettaient ainsi à au moins 90 % du marché de répondre à l'appel à candidatures, lequel n'empêchait ainsi en rien une réelle et efficace concurrence.

9. Par décision sur effet suspensif du 22 décembre 2015, la demande de restitution d’effet suspensif a été partiellement admise. Le processus d’appel à candidatures pouvait se poursuivre jusqu’à l’échéance fixée pour le dépôt des dossiers, mais il était fait interdiction à l’entité organisatrice de procéder à l’ouverture et à l’évaluation des offres reçues jusqu’à droit jugé ou nouvelle décision sur mesures provisionnelles.

10. a. Le 25 janvier 2016, le Conseil d’État, TPG SA et les six communes ont recouru auprès du Tribunal fédéral contre la décision susmentionnée, concluant à son annulation.

b. Par arrêt du 30 juin 2016 (cause 2C_82/2016), le Tribunal fédéral a déclaré ledit recours irrecevable, faute de préjudice irréparable.

11. Lors de l'audience de comparution personnelle des parties du 14 avril 2016, le conseiller d'État en charge du département a notamment indiqué qu'en l’état, le périmètre de la concession concernait six communes mais qu'il pouvait être étendu à d’autres. Le département avait travaillé sur le projet de concert avec TPG Vélo et les communes. On ne pouvait pas exclure que se développent plusieurs systèmes de VLS dans le canton, selon le modèle auquel les communes auraient choisi de se rallier.

Le représentant d’Intermobility a notamment indiqué que dans son système, on pouvait attacher le vélo, puisqu’il s’apparentait à un vélo ordinaire que l’on pouvait attacher de manière ordinaire. Elle avait un accord avec quatre communes pour déployer son système sous le régime de la permission d’installation d’infrastructures sur le domaine public et des contacts avaient été pris avec quatre autres communes. Elle souhaitait pouvoir exploiter son système sur l’ensemble du territoire cantonal. Elle n’avait pas déposé d’offres, estimant que le cahier des charges était tel que son système n’était pas souhaité. Elle avait recherché si ce système pouvait être compatible avec celui de sociétés qui souhaitaient déposer une offre. Tel était le cas avec une société avec laquelle une possibilité de collaboration était à l’étude.

12. Le 18 août 2016, le Conseil d’État, TPG Vélo SA et les six communes visées par le recours ont conclu à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet. Préalablement, la qualité des parties devait être rectifiée en ce sens que seul le Conseil d’État devait être partie à la procédure, les autres intimées devant être écartées de la procédure. Une indemnité de procédure devait être allouée à TPG Vélo et aux six communes, à la charge de la recourante, pour les frais indispensables causés par la procédure.

Ils ont repris leur argumentation selon laquelle l'appel à candidatures n'était pas un appel d'offres susceptible de recours et seul le Conseil d'État devait être partie à la procédure.

Sur le fond, le choix technique opéré pour le système d’attaches fixes avait été dicté par des raisons objectives et ne réduisait pas la concurrence de manière artificielle, plusieurs entreprises ayant déposé leur dossier. L’autorité concédante ignorait que cette exigence pouvait exclure qui que ce soit et en doutait, compte tenu de la démonstration faite par la recourante.

13. Les 24 août et 23 septembre 2016, Intermobility a repris son argumentation et persisté dans son recours. Elle a pour le surplus sollicité la production de tous documents permettant d'établir le contenu et la teneur du mandat donné aux personnes physiques représentants les six communes au sein du groupe d'évaluation du projet « Geroule », de tous les procès-verbaux des séances concernant l'organisation interne dudit projet réunissant le Conseil d'État, TPG Vélo et les six communes, toute convention et/ou document démontrant l'organisation interne dudit projet, tout document démontrant les mécanismes de contrôle mis en place au sein dudit projet et enfin tous procès-verbaux ou document permettant d'établir la motivation du Conseil d'État, de TPG Vélo et des six communes concernant le choix de la procédure.

14. Par arrêt du 17 janvier 2017 (ATA/34/2017), la chambre administrative a déclaré irrecevable le recours interjeté le 13 novembre 2015 par Intermobility et a mis hors de cause les communes de Carouge, Genève, Lancy, Onex, Plan-les-Ouates et Vernier.

L’objet de l’appel à candidatures portait de manière claire sur l’octroi d’une concession d’occupation du domaine public pour l’exploitation d’un système de VLS. Les modalités choisies ne répondaient pas à la définition d’un marché public, mais bien à celle d'une permission d’occupation du domaine public excédant l’usage commun. Dès lors qu’il n’y avait pas de marché public, l’appel à candidatures n’était pas un appel d’offres et ne pouvait dès lors faire l’objet d’un recours sur la base des dispositions relatives aux marchés publics.

15. Par arrêt du 9 mars 2018 (2C_229/2017), le Tribunal fédéral a annulé l'arrêt de la chambre administrative précité et lui a renvoyé la cause pour qu'elle en traite matériellement.

Le système de VLS dont il était question entrait dans le champ d'application objectif des marchés publics. Il convenait néanmoins d'examiner encore la question du champ d'application subjectif. Pour que les dispositions de l'AIMP puissent s'appliquer, le pouvoir adjudicateur devait remplir les conditions de
l'art. 8 al. 1 ou al. 2 AIMP. Or, rien dans l'arrêt entrepris ne permettait de traiter cette question. La publication du 3 novembre 2015 constituait un appel d'offres susceptible de recours, de sorte qu'il était insoutenable que la chambre administrative ait refusé d'entrer en matière sur le recours. L'arrêt entrepris devait être annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente. La chambre administrative devait examiner en particulier si les intimés pouvaient être considérés comme pouvoir adjudicateur pour le marché en cause et déterminer la valeur de celui-ci.

16. Dans leurs déterminations du 30 avril 2018, TPG Vélo, le Conseil d’État et les six communes visées par le recours ont conclu, préalablement, à la rectification des parties dans ce sens que TPG Vélo et les communes de Carouge, Genève, Lancy, Onex, Plan-les-Ouates et Vernier devaient être écartées de la procédure, seul le Conseil d'État devant être considéré comme partie intimée, et à ce qu'il soit alloué une indemnité pour les frais indispensables causés par cette procédure à TPG Vélo. Principalement, le recours devait être rejeté et une indemnité pour les frais indispensables causés par cette procédure devait être allouée au Conseil d'État.

Ils ont repris leur argumentation selon laquelle TPG Vélo n'avait pas la qualité de pouvoir adjudicateur.

La recourante s'était associée avec une autre entreprise pour déposer une offre dans le cadre de l'appel à candidatures litigieux. La surface du domaine public qui serait utilisé pour le projet correspondait à 1'000 m2 environ et il était prévu de déployer mille vélos. Selon l'offre à laquelle la recourante était associée, le coût du système de VLS dépassait largement vingt millions. Lors de l'appel d'offres lancé par les TPG, une offre avait été adjugée pour un montant de
CHF 6'182'713.-, lequel ne couvrait pas le coût des stations d'accueil et des travaux de génie civil. Le prix du marché résidait dans le différentiel entre la redevance prévue, CHF 10.- par m2, et une redevance fixée par analogie, comprise entre CHF 19.- et CHF 66.-, selon les tarifs applicables aux tentes, respectivement à l'entreposage de cycles en vertu du règlement fixant le tarif des empiétements sur ou sous le domaine public du 21 décembre 1988 (RTEDP - L 1 10.15). En prenant en compte la redevance la plus élevée, c'était un différentiel de CHF 56.- par m2 qui constituait le prix, soit CHF 56'000.- (56 x 1'000 m2) par an et
CHF 392'000.- pour sept ans. Il résultait de cette valeur que la mise en concurrence devait faire l'objet d'une procédure ouverte. Si l'on considérait que la procédure de mise en concurrence était un marché public et non une concession, c'était six marchés distincts qui devaient être adjugés, par chacune des communes concernées. Une procédure de gré à gré serait dès lors adéquate, puisque chacun des marchés serait inférieur à CHF 150'000.-.

Ils ont par ailleurs repris leur argumentation s'agissant de la concurrence efficace de l'appel à candidatures, relevant encore que la recourante s'était associée avec une autre entreprise dans la cadre du marché querellé.

17. Dans ses déterminations du 18 mai 2018, Intermobility a conclu à ce que toutes les conclusions de son recours du 13 novembre 2015 soient admises.

Elle a repris ses précédentes explications sur le fait que le Conseil d'État, TPG Vélo et les six communes étaient tous des pouvoirs adjudicateurs et avaient donc la qualité pour défendre.

Il fallait appliquer un tarif de CHF 711.- par m2, soit celui applicable à des distributeurs d'essence selon le RTEDP, pour déterminer la valeur du marché. Dès lors que la surface nécessaire avait été estimée à 1'000 m2, la valeur de la concession d'une durée de sept ans s'élevait à CHF 4'977'000.-. La valeur des installations et de l'exploitation devaient encore s'ajouter à ce calcul pour déterminer la valeur du marché. À titre d'exemple, la ville de Sion, équipée d'un système de VLS, dépensait à titre de coût d'exploitation CHF 1'861.- par vélo et par an. Dès lors qu'il était prévu de déployer mille vélos à Genève, sur une durée de sept ans, le coût d'exploitation pouvait être estimé sur cette base à
CHF 13'027'000.-. Selon son propre modèle d'affaires, le coût d'exploitation d'un vélo était de CHF 900.- par an. Pour l'exploitation de mille vélos, pendant sept ans, le coût d'exploitation serait ainsi de CHF 6'300'000.-. En prenant le modèle d'affaires le moins cher et en y soustrayant la valeur de la concession, le prix du marché s'élevait à CHF 1'323'000.-. Il fallait encore ajouter à ce montant le coût des installations.

Elle sollicitait la production de l'offre de PubliBike afin de déterminer les coûts d'exploitation envisagés et des installations relatifs au développement de son réseau dans les six communes genevoises, respectivement qu'une expertise soit ordonnée afin de déterminer les coûts d'exploitation et d'installation relatifs au développement d'un système de VLS répondant aux conditions de l'appel à candidatures du 3 novembre 2015.

Contrairement à ce que prétendaient TPG Vélo, le Conseil d’État et les six communes visées par le recours, un seul marché devait être ouvert dès lors qu'il était question d'une seule concession, sur un périmètre cantonal, résultant d'une seule et unique procédure.

Elle a par ailleurs repris son argumentation selon laquelle l'appel à candidature était discriminatoire et devait être annulé.

18. Le 30 mai 2018, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Le présent arrêt fait suite à l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_229/2017 du
9 mars 2018, lequel a retenu que le mandat tendant à l'exploitation d'un système de VLS dans les communes concernées entrait dans le champ d'application de l'AIMP. Le Tribunal fédéral a ainsi considéré que la chambre administrative était compétente pour traiter le recours formé le 13 novembre 2015 par la recourante contre l'appel à candidature publié dans la FAO le 3 novembre 2015, lequel constituait un appel d'offres susceptible de recours.

Dans ces conditions, le recours du 13 novembre 2015, formé dans les dix jours suivants la publication de l'appel à candidature dans la FAO du 3 novembre 2015, est recevable.

2. La recourante sollicite la mise en œuvre d'une expertise afin de déterminer les coûts d'exploitation et d'installation relatifs au développement d'un système de VLS répondant aux conditions de l'appel à candidatures du 3 novembre 2015 ainsi que la production de différents documents en lien avec le projet « Geroule » et de l'offre de PubliBike.

Compte tenu de ce qui suit, il ne sera pas fait droit aux réquisitions de preuves formées par la recourante, lesquelles ne sont pas pertinentes pour la résolution du présent litige.

3. À titre préalable, il convient de déterminer l'identité du pouvoir adjudicateur dans la présente affaire. La recourante considère que le Conseil d'État, TPG Vélo et les communes de Carouge, Genève, Lancy, Onex, Plan-les-Ouates et Vernier ont tous la qualité de pouvoir adjudicateur, et donc de parties. Les intimés considèrent quant à eux que seul le Conseil d'État peut être le pouvoir adjudicateur.

4. a. Le droit suisse des marchés publics tire sa source, d’une part, des traités internationaux ratifiés par la Suisse en la matière, notamment l’Accord GATT/OMC du 15 avril 1994 sur les marchés publics (AMP - RS 0632.231.422) et ses annexes et, d’autre part, au plan du droit interne de la loi fédérale sur le marché intérieur du 6 octobre 1995 (LMI - RS 943.02). Cette législation est concrétisée à Genève par l’AIMP et le RMP.

b. L'AIMP vise l'ouverture des marchés publics des cantons, des communes et des autres organes assumant des tâches cantonales ou communales. Il s'applique également aux tiers, dans la mesure où ceux-ci sont obligés par des accords internationaux (art. 1 al. 1 AIMP).

Selon l’art. 8 al. 1 AIMP, sont soumis aux dispositions des accords internationaux les pouvoirs adjudicateurs suivants : les cantons, les communes, de même que les autres collectivités de droit public cantonal ou communal, dans la mesure où elles n’ont pas un caractère commercial ou industriel (let. a) ; les autorités de même que les entreprises publiques et privées opérant au moyen d’un droit exclusif ou particulier dans les domaines de l’approvisionnement en eau, en énergie et dans celui des transports et des télécommunications. Sont seuls soumis au présent accord les marchés en relation avec l’exécution en Suisse de leurs tâches dans les domaines précités (let. c) ; les autres adjudicateurs selon les traités internationaux en vigueur (let. d).

L'art. 8 al. 2 AIMP prévoit encore que sont en outre soumis aux dispositions relatives aux marchés non soumis aux traités internationaux, lorsqu'ils adjugent d'autres marchés publics, les autres collectivités assumant des tâches cantonales ou communales dans la mesure où elles n’ont pas de caractère commercial ou industriel (let. a) et les projets et prestations qui sont subventionnés à plus de 50 % du coût total par des fonds publics (let. b).

c. Selon l'art. 2 let. a RMP, constitue un marché public, tout contrat passé entre un pouvoir adjudicateur désigné à l’art. 7 et une entreprise privée ou une personne indépendante qui vise à l’acquisition d’un ouvrage, d’une prestation ou d’un bien immobilier, moyennant le paiement d’un prix.

Le marché public en question peut être ou non soumis aux traités internationaux (art. 6 RMP).

Aux termes de l’art. 7 al. 1 RMP, qui reprend en grand partie le contenu de l’art. 8 al. 1 et 2 AIMP, sont assujettis au RMP : l'État, les communes et leurs établissements ou fondations de droit public, dans la mesure où ils n'ont pas un caractère commercial ou industriel (let. a) ; les entreprises publiques ayant pour but l'accomplissement de tâches cantonales ou communales (let. b) ; les privés pour les projets et prestations subventionnés à plus de 50% du coût total par des fonds publics (let. c) ; les organismes et entreprises privés ou publics opérant au moyen d'une concession ou d'un monopole de droit dans les domaines de l'approvisionnement en eau, en énergie et dans ceux des transports et des télécommunications, pour les seuls marchés en relation avec l'exécution à Genève de leurs tâches dans les domaines précités (let. d) ; les autres autorités adjudicatrices, selon les traités internationaux en vigueur (let. e) ; les organisations communes, quelle que soit leur forme juridique, composées d'autorités adjudicatrices assujetties (let. f).

Ne sont pas assujetties audit règlement, les autorités adjudicatrices au bénéfice d'une décision d'exemption prise en application de l'art. 3 par. 5 de l'accord bilatéral entre la Communauté européenne et la Confédération suisse sur certains aspects relatifs aux marchés publics du 21 juin 1999 (RS 0.172.052.68 ; art. 7 al. 2 RMP).

d. Une entité qui n’entre pas dans le champ d’application subjectif du droit des marchés publics n’a pas la faculté de s’y soumettre spontanément (Étienne POLTIER, Droit des marchés publics, 2014, n. 249 p. 155).

5. Selon l'art. 12 de la loi sur le domaine public du 24 juin 1961 (LDPu - L 1 5), chacun peut, dans les limites des lois et des règlements, utiliser le domaine public conformément à sa destination et dans le respect des droits d’autrui

À teneur de l'art. 13 LDPu, l'établissement de constructions ou d'installations permanentes ou non permanentes sur le domaine public, son utilisation à des fins industrielles ou commerciales ou toute autre occupation de celui-ci excédant l'usage commun sont subordonnés à une permission (al. 1). Les utilisations précitées sont subordonnées à une concession si elles sont assorties de dispositions contractuelles (al. 2).

Les permissions sont accordées par l’autorité cantonale ou communale qui administre le domaine public (art. 15 LDPu).

Les concessions sont octroyées par le Conseil d'État ou, si leur durée est supérieure à vingt-cinq ans, par le Grand Conseil (art. 16 al. 1 LDPu).

6. En l'espèce, il ne fait aucun doute que l'État de Genève, représenté par le Conseil d'État, tout comme les communes sont des pouvoirs adjudicateurs soumis aux règles des marchés publics au sens des art. 7 al. 1 let. a RPM et
8 al. 1 let. a AIMP. Toutefois, s'agissant du marché visé en l'espèce, à savoir l'octroi d'une concession d’occupation du domaine public en vue de l’exploitation d’un système de VLS, il ressort des dispositions légales précitées que seul le Conseil d'État peut octroyer ladite concession. Le formulaire de candidature prévoit d'ailleurs que, à la suite de l'attribution de la concession, un contrat serait conclu entre l'autorité concédante - le Conseil d'État - et le candidat dont l'offre aura été retenue (ch. 2.10, 2.11 et 2.12). Dès lors, seul le Conseil d'État peut être considéré comme étant le pouvoir adjudicateur. Le fait que des représentants des communes soient présents dans le groupe d'évaluation des offres (ch. 2.3 du formulaire de candidature), qu'elles souhaitent se doter d'un système de VLS ou que le territoire de la concession distingue les différents périmètres des communes, comme le relève la recourante, est sans incidence sur ce qui précède. Par ailleurs, contrairement à ce que relève la recourante, le formulaire ne mentionne aucunement en page 5 que le Conseil d'État et les six communes concernées auraient délégué la procédure à TPG Vélo ; seul le Conseil d'État, en sa qualité d'autorité concédante, est mentionné comme ayant délégué l'élaboration et le suivi de la procédure à TPG Vélo.

S'agissant de TPG Vélo SA, il ressort clairement, comme susmentionné, des documents relatifs à l'appel à candidatures publié le 3 novembre 2015 que le Conseil d'État a délégué l'élaboration et le suivi de la procédure à TPG Vélo
(ch. 2.10 du formulaire de candidature et ch. 12 de la description technique). Le ch. 2.11 du formulaire de candidature prévoit par ailleurs la signature d'un contrat entre le Conseil d'État et le candidat retenu suite à l'attribution de la concession. Compte tenu de ce qui précède, TPG Vélo ne saurait être qualifiée d'adjudicatrice, mais bien de représentante de l'adjudicateur.

Ainsi, si on peut certes déplorer que l'identité du pouvoir adjudicateur n'ait pas été clairement mentionnée dans l'« appel à candidatures » publié le 3 novembre 2015, il n'en demeure pas moins, compte tenu de ce qui précède, que seul le Conseil d'État peut revêtir cette qualité dans la présente cause. TPG Vélo ainsi que les communes de Carouge, Genève, Lancy, Onex, Plan-les-Ouates et Vernier seront dès lors mises hors de cause, de sorte qu'il ne sera fait mention plus que d'un seul intimé dans la suite de l'arrêt.

Le grief de la recourante sera dès lors rejeté sur ce point.

7. Il convient également de déterminer, conformément à l'arrêt de renvoi du Tribunal fédéral, la valeur du marché en cause.

a. Selon l'art. 2 let. b RMP, le seuil est la valeur limite qui détermine si le marché est soumis ou non aux traités internationaux et quelle procédure lui appliquer.

Aux termes de l’art. 7A RMP, chaque autorité adjudicatrice définit, de manière formelle et transparente, les limites des marchés qu'elle entend adjuger en utilisant des critères ou indices tels que le périmètre, la durée, la portée transversale de l'adjudication ou les motifs organisationnels qui justifient son choix (al. 1) ; elle ne peut diviser le marché pour contourner les valeurs-seuils
(al. 2).

Les marchés soumis aux traités internationaux peuvent, au choix, être passés selon la procédure ouverte ou la procédure sélective. Dans des cas particuliers déterminés par les traités eux-mêmes, ils peuvent être passés selon la procédure de gré à gré (art. 12A al. 1 AIMP ; art. 11 al. 1 RMP). Les marchés publics non soumis aux traités internationaux peuvent en outre être passés selon la procédure sur invitation ou la procédure de gré à gré (art. 12A al. 2 AIMP ;
art. 11 al. 2 RMP).

Selon l'art. 6 AIMP, l'accord s'applique à la passation des marchés soumis aux traités internationaux suivants : marchés de construction (réalisation de travaux de construction de bâtiments ou de génie civil ; al. 1 let. a) ; marchés de fournitures (acquisition de biens mobiliers, notamment sous forme d'achat, de crédit-bail/leasing, de bail à loyer, de bail à ferme ou de location-vente ; al. 1
let. b) ; marchés de services (al. 1 let. c). Les dispositions des marchés publics non soumis aux traités internationaux s'appliquent à tous les marchés des adjudicateurs publics (al. 3).

Selon l’art. 8 RMP, un marché est soumis aux traités internationaux si sa valeur estimée dépasse les seuils de l'annexe 1 let. a et b ; en deçà, le marché n'est pas soumis aux traités internationaux (al. 1) ; l’estimation de la valeur du marché sert également à déterminer quelle est la procédure d'adjudication applicable, et cela conformément à l'annexe 2 (al. 2).

Selon l'art. 7 AIMP, les seuils de marchés soumis aux traités internationaux sont mentionnés dans l'annexe 1 (al. 1) et les seuils des marchés publics non soumis aux traités internationaux sont mentionnés dans l'annexe 2 (al. 2).

Les valeurs-seuils pour les marchés internationaux sont fixés au minimum à CHF 350'000.- pour les marchés de fournitures ou de services, lors que l'adjudicateur est un canton ou une commune (annexe 1 de l'AIMP et annexe 1 du RMP). Les procédures de gré à gré, applicables pour les marchés non soumis aux traités internationaux, sont possibles pour les marchés dont la valeur ne dépasse pas CHF 100'000.- pour les marchés de fournitures, respectivement
CHF 150'000.- pour les marchés de services (annexe 2 AIMP ; annexe 2 RMP).

b. Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de juger dans une affaire similaire que les prestations que le concessionnaire doit fournir au titre du système de VLS font assurément partie des biens et des services visés par l'art. 6 AIMP. Le fait que le concessionnaire conserve la propriété des vélos n'est à cet égard pas déterminant. Les marchés de fournitures englobent en effet les contrats entre un adjudicateur et un soumissionnaire concernant l'acquisition de biens mobiliers, notamment sous forme d'achat, de crédit-bail (leasing), de bail à loyer, de bail à ferme ou de location-vente (art. 6 al. 1 let. b AIMP). Par ailleurs, l'entretien et la réparation des vélos relèvent des marchés de services, de même que les autres prestations liées à l'exploitation et la gestion du système (annexe 4, appendice I de l'AMP). Quant aux stations automatisées, il n'est pas exclu qu'elles puissent, selon leur conception, tomber sous le coup des marchés de constructions visés à l'art. 6 al. 1 let. a AIMP (ATF 135 II 49 consid. 5.2).

De même, le Tribunal fédéral a relevé que le prix du marché correspondait à la diminution du montant offert par le soumissionnaire pour la redevance de la concession (ATF 135 II 49 consid. 5.2).

Dans le même sens, dans son arrêt de renvoi, le Tribunal fédéral a relevé que dans le cas d'espèce une indemnité de CHF 10.- par m2 ne correspondait nullement aux prix habituellement fixés pour l'utilisation du domaine public par une installation fixe durant une période de sept ans. Le prix de l'indemnité en cause étant à ce point insignifiant par rapport à la prestation de l'État, qu'il fallait considérer que ce dernier fournissait une contrepartie pour la prestation d'une tâche publique effectuée par une personne privée (arrêt du Tribunal fédéral précité 2C_229/2017 consid. 2.5).

c. Le pouvoir adjudicateur est soumis à une obligation de bonne foi ou de sincérité lors de la configuration des marchés ; il ne peut ainsi choisir la méthode d'évaluation, ni scinder les quantités à acquérir dans l'intention d'éviter l'application des règles sur les marchés publics (Etienne POLTIER, Droit des marchés publics, 2014, n. 218 p. 138).

8. En l'espèce, la recourante estime que la valeur du marché s'élèverait au minimum à CHF 1'323'000.-, tandis que l'intimé considère qu'il se monterait au total à CHF 392'000.-. Il apparaît ainsi acquis, même en l'absence d'évaluation précise, que la valeur du marché lié à l'octroi d’une concession d’occupation du domaine public durant sept ans pour l’exploitation d’un système de VLS est supérieure aux seuils des marchés soumis aux traités internationaux selon l'annexe I de l'AIMP et l'annexe I RMP, à savoir CHF 350'000.- tant pour les marchés de fournitures que de services, lorsque l'adjudicateur est un canton ou une commune.

L'intimé ne saurait prétendre de bonne foi que le fait que la présente mise en concurrence doive être assimilée à un marché public implique qu'il devrait exister en réalité six marchés distincts, pour chacune des six communes concernées, dont les valeurs seraient inférieures à CHF 150'000.-. En effet, l'intimé n'a eu de cesse d'affirmer que seul le Conseil d'État était le seul adjudicateur du projet. Il a notamment exposé, dans son écriture du 30 novembre 2015, qu'aucune des six communes n'avait pris la décision de lancer un appel à candidatures ni n'avait participé à l'organisation de celui-ci. Le projet avait été présenté par TPG Vélo et le département aux communes, lesquelles avaient uniquement fait part de leur intérêt. La présente mise en concurrence ne peut dès lors faire l'objet d'une procédure de gré à gré, comme le soutient l'intimé.

9. Le présent marché public, visant l'octroi d'une concession pour l'utilisation du domaine public en vue de l'exploitation d’un système de VLS, est donc soumis aux traités internationaux et ne pouvait donc faire l'objet que d'une procédure ouverte ou sélective (art. 12A al. 1 AIMP ; art. 11 al. 1 RMP), les conditions de l'art. 15 al. 3 RMP n'étant pas réalisées pour passer le marché de gré à gré (art. 11 al. 1 in fine RMP).

S'agissant des procédures ouvertes et sélectives, un avis d'appel d'offres est publié sur la plateforme électronique sur les marchés publics gérée par l’association simap.ch (www.simap.ch ; art. 25 al. 1 RMP). L'appel d'offres indique, notamment, le nom de l'autorité adjudicatrice, le type de procédure, l'objet et l'importance du marché, la date, le délai probable d'exécution ou la durée éventuelle du marché, les conditions de participation, les critères d'aptitude et/ou les critères d'adjudication énoncés par ordre d'importance, la langue de l'offre, l'adresse pour l'obtention des documents et renseignements supplémentaires, le lieu et l'échéance du délai pour la remise de l'offre, le cas échéant, le montant de l'émolument et si le marché est soumis aux traités internationaux
(art. 26 let. a à k RMP). L'art. 27 RMP défini le contenu minimum des documents mis à disposition des candidats, lesquels doivent contenir tous les renseignements nécessaires à l'établissement de l'offre. Les art. 28 à 30 RMP établissent encore un certain nombre de règles relatives à l'appel d'offres.

En l'occurrence, force est de constater que l'appel à candidatures du
3 novembre 2015, lequel constitue un appel d'offres conformément à l'arrêt de renvoi du Tribunal fédéral, ne respecte pas plusieurs des conditions énoncées
aux art. 25 à 30 RMP, soit notamment la publication sur la plateforme SIMAP ainsi que l'indication du nom de l'autorité adjudicatrice, du type de procédure et du fait que le marché était soumis aux traités internationaux. Ce constat ne peut conduire qu'à son annulation.

10. Compte tenu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis et l'appel à candidatures publié dans la FAO le 3 novembre 2015 sera annulé, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres griefs soulevés par la recourante se rapportant à la violation de règles spécifiques aux marchés publics, tels que les principes d'égalité de traitement et de non-discrimination. Il appartiendra le cas échéant à l'entité adjudicatrice de procéder à un nouvel appel d'offres, conforme aux dispositions légales applicables.

11. Nonobstant l’issue du litige, aucun émolument ne sera mis à la charge du Conseil d’État (art. 87 al. 1 2ème phr. LPA). Une indemnité de CHF 1'000.- sera allouée à la recourante, qui obtient essentiellement gain de cause, à la charge de l’État de Genève. Une indemnité de procédure de CHF 500.- sera allouée à TPG Vélo, à la charge de la recourante. Aucune indemnité de procédure ne sera allouée aux communes, qui comptent plus de dix mille habitants, celles-ci étant réputées disposer de leur propre service juridique et ne pas avoir à recourir au service d’un mandataire extérieur (art. 87 al. 2 LPA ; ATA/1531/2017 du 28 novembre 2017 consid. 18).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

préalablement :

met hors de cause TPG Vélo SA ainsi que les communes de Carouge, Genève, Lancy, Onex, Plan-les-Ouates et Vernier ;

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 13 novembre 2015 par Intermobility SA contre l'appel à candidatures du 3 novembre 2015 pour l’attribution d’une concession d’occupation du domaine public en vue de l'exploitation d’un système de vélos en libre-service sous l’appellation « Geroule » ;

au fond :

l'admet partiellement ;

annule l'appel à candidatures du 3 novembre 2015 pour l’attribution d’une concession d’occupation du domaine public en vue de l'exploitation d’un système de vélos en libre-service sous l’appellation « Geroule »

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue à Intermobility SA une indemnité de procédure de CHF 1'000.-, à la charge de l'État de Genève ;

alloue à TPG Vélo SA une indemnité de procédure de CHF 500.-, à la charge d'Intermobility SA ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure aux communes de Carouge, Genève, Lancy, Onex, Plan-les-Ouates et Vernier ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n’est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

s’il soulève une question juridique de principe ;

- sinon, par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Urs Portmann, avocat de la recourante, à
Me Bertrand Reich, avocat des intimés, ainsi qu'à la commission de la concurrence (COMCO), pour information.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mmes Krauskopf et Junod, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :