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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2742/2018

ATA/844/2019 du 30.04.2019 ( DIV ) , ADMIS

Descripteurs : GARDERIE ; ENFANT ; CONTRAT DE DROIT ADMINISTRATIF ; ACTION EN PAIEMENT ; EXÉCUTION DE L'OBLIGATION ; RÉSILIATION IMMÉDIATE ; JUSTE MOTIF ; DEMANDE RECONVENTIONNELLE
Normes : RIP.5; CO.107; CO.108; LOJ.132; aLOJ.56A; aLOJ.56G; RIP.1; RIP.2.al1; RIP.4; Cst.29.al2; LSAPE.4.al1; RIP.14; CO.102ss; CO.108.ch1; CO.97; LSAPE.7; LSAPE.14; LPA.69.al1
Résumé : Action en paiement formée par une commune qui réclame le paiement d'un mois de pension pour l'accueil de l'enfant des défendeurs dans une de ses institutions de la petite enfance. Les éléments soulevés par les parents pour justifier une résiliation immédiate du contrat d'accueil de leur fille ne constituent pas des motifs suffisants dans le cadre de l'application de l'art. 108 ch. 1 CO. Malgré quelques imperfections également constatés par l'autorité de surveillance, l'institution a exécuté ses obligations à satisfaction de droit. Action admise.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2742/2018-DIV ATA/844/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 avril 2019

 

dans la cause

 

COMMUNE DE A______

contre

Madame et Monsieur B______

 



EN FAIT

1. Madame et Monsieur B______ (ci-après : les époux B______), domiciliés dans la commune de A______ (ci-après : la commune), sont les parents d'C______, née en ______ 2016.

2. Le 21 avril 2016, les époux B______ et la commune ont signé un contrat d'accueil concernant C______.

Le contrat prévoyait que la commune attribuait une place pour C______ dans l'une des institutions de la petite enfance de la commune, pour l'année scolaire 2016-2017.

L'art. 5 du contrat précisait que le représentant légal reconnaissait avoir pris connaissance du règlement du Conseil administratif de la Ville de A______ relatif aux institutions de la petite enfance du 11 août 2015 (RIPE - 540.0) applicable à l'année scolaire en cours. Il avait notamment pris note que la pension était payable par mois et d'avance et s'engageait à respecter ces échéances.

3. Du 17 au 26 août 2016, C______ a commencé la période d'adaptation à l'Espace de vie enfantine du D______ (ci-après : l'EVE du D______ ou l'institution). Elle a été attribuée au groupe des « E______ » qui concernait les enfants de 0 à 1 an.

4. En août 2016, les époux B______ ont payé la pension du mois de septembre 2016 de leur fille au sein de l'EVE du D______.

5. Le 5 septembre 2016, le service des finances de la commune a adressé aux époux B______ une facture d'un montant total de CHF 1'915.35 pour la pension du mois d'octobre 2016.

6. Le 26 septembre 2016, Mme B______ a contacté téléphoniquement le service d'autorisation et de surveillance de l'accueil de jour (ci-après : SASAJ) pour signaler des éléments de mécontentement de la prise en charge de sa fille au sein de l'EVE du D______.

7. Le même jour, les époux B______ ont contacté le service de la petite enfance de la commune (ci-après : SPE) pour demander un changement de structure pour leur fille en exposant leur insatisfaction à l'égard des prestations délivrées par l'EVE du D______. Une date de rencontre a été fixée au 4 octobre 2016.

8. Le 28 septembre 2016, une des directrices de l'institution a rencontré M. B______. Un nouvel entretien a été fixé le 3 octobre 2016, lequel a été annulé.

9. Le 29 septembre 2016, lors d'un entretien téléphonique avec le SPE, l'un des époux B______ a annoncé vouloir résilier le contrat d'accueil concernant leur fille. Le rendez-vous du 4 octobre 2016 était toutefois maintenu.

10. Le 30 septembre 2016, les époux B______ ont résilié avec effet immédiat le contrat d'accueil.

La commune avait manqué à ses obligations, en ce sens que la sécurité des enfants confiés n'était pas garantie. L'EVE du D______ avait fait preuve de négligence à plusieurs reprises. Le rapport de confiance était rompu.

Une liste d'événements survenus entre le 15 août et le 28 septembre 2016 était citée à l'appui de leurs allégations.

Le 22 septembre 2016 à 8h15, alors que Mme B______ avait confié C______ à une éducatrice seule avec cinq enfants, un enfant jouait au sol avec un hochet fabriqué par l'EVE du D______. Il s'agissait d'un flacon contenant des petites pierres ainsi que ce qui semblait être une crème ou pâte qui avait pourri avec les années. Le jouet se dévissait et l'enfant avait des cailloux ainsi que de la matière dans la bouche. Une des aides en crèche qui était arrivée à ce moment-là avait accouru la lui enlever de la bouche.

Les normes d'encadrement n'étaient pas respectées, en ce sens qu'il avait été constaté, à plusieurs reprises, qu'une seule personne s'occupait de six enfants en bas âge.

Une heure avant la fermeture de l'EVE du D______, les jouets étaient retirés et le sol était lavé alors que les enfants s'y trouvaient. Les portes-fenêtres étaient laissées grandes ouvertes pour faire sécher le sol et les enfants étaient habillés en body manches courtes. Leur fille avait eu de la fièvre pendant trois jours.

La chambre de sieste n'était pas conforme, avec un risque de mort subite du nourrisson élevé (une chambre de 6 m2 environ pour dix lits sans fenêtre sur l'extérieur de l'établissement, une ventilation défectueuse, une température beaucoup trop élevée à l'intérieur de la pièce, des lits superposés obsolètes et dangereux, des couvertures utilisées alors qu'elles étaient déconseillées pour les enfants de moins de 18 mois et des fermetures éclairs de 40 cm se trouvant en plein milieu d'un lit qui se trouvait à une hauteur de 1,40 m).

Les tapis en mousse où jouaient les enfants étaient déchirés. Les enfants pouvaient avaler facilement cette mousse qui se détachait.

Le personnel de l'EVE du D______ avait donné, à deux reprises, du poisson à C______, alors que les époux B______ avaient demandé de ne plus lui en donner.

Les éducatrices avaient introduit de nouveaux aliments sans demander la permission aux parents.

C______ n'était changée que deux fois par jour. En fin de semaine, les fesses de leur fille étaient toutes rouges avec parfois des blessures.

Il y avait un manque de transparence. Un soir, M. B______ était venu chercher C______, laquelle hurlait de douleur. L'éducatrice présente lui avait assuré à trois reprises que sa fille était tombée sur un coussin, alors qu'une autre éducatrice lui avait dit qu'C______ s'était tapé la joue contre une structure en bois.

Les époux B______ avaient vu et entendu une des éducatrices du groupe voisin hurler de manière disproportionnée sur un enfant déjà en pleurs.

Il y avait des tensions entre les employés notamment envers les aides en crèche. Le langage des éducatrices à leur égard était peu respectueux. L'environnement était malsain pour les enfants.

Les chaises hautes n'étaient pas stables ni conformes.

L'hygiène du personnel était inadéquate (cheveux non attachés, ongles longs et vernis, parfum).

Le groupe d'enfants de 1 à 2 ans était joint aux enfants de moins d'un an pendant deux heures le matin et deux heures en fin de journée, alors que le projet pédagogique ne prévoyait pas un tel regroupement. La directrice de l'EVE du D______ avait dit aux époux B______ que cette mise en commun était motivée par le travail pédagogique et par manque de personnel.

11. Le 4 octobre 2016, les époux B______ ont rencontré le secrétaire général adjoint de la commune, en charge de la petite enfance, et l'adjointe au SPE.

12. Par courriel du même jour, les époux B______ ont transmis au SASAJ leur courrier du 30 septembre 2016 et ont sollicité un rendez-vous avec ce service.

13. Le 14 octobre 2016, la commune a pris note du courrier de résiliation des époux B______ du 30 septembre 2016.

Selon le RIPE, un préavis de trois mois pour la fin d'un mois devait être appliqué à la résiliation. Néanmoins, au vu de la forte demande pour une place d'accueil dans ses institutions, la commune avait été en mesure de réattribuer la place vacante au 1er novembre 2016. Ainsi, seul le paiement d'octobre restait dû.

La commune contestait les faits sur lesquels se basaient les époux B______ pour invoquer la mauvaise exécution du contrat d'accueil. Toutefois, les points évoqués dans le courrier feraient l'objet d'une investigation et l'ensemble des griefs seraient instruits à l'interne. Le SASAJ allait également étudier les éléments soulevés.

Leur droit d'être entendus avait été respecté lors de la rencontre du 4 octobre 2016, au cours de laquelle ils avaient pu exposer leur point de vue.

C______ était incluse dans la liste d'attente pour une place dans une autre institution, dans la mesure où les institutions de la commune n'avaient pas à ce jour de place disponible.

La commune considérait l'affaire comme close et les époux B______ étaient priés de régler la facture relative au placement pour le mois d'octobre.

14. Le 21 octobre 2016, à la suite d'une rencontre du 14 octobre 2016 portant sur le signalement des époux B______ du 26 septembre 2016, le SASAJ a informé l'EVE du D______ que le service allait effectuer une visite non annoncée avant la fin de l'année afin d'évaluer les points soulevés par les époux B______ dans leur courrier du 30 septembre 2016. Par ailleurs, des documents devraient lui être remis avant le 31 octobre 2016 à propos de certains éléments.

De plus, certains points devaient être mis en exécution, tels que la vérification régulière du matériel pédagogique confectionné par le personnel éducatif, la porte de communication entre les deux salles de l'institution devait être systématiquement fermée pendant le nettoyage des salles en fin de journée, les couvertures placées contre les lits pour protéger les enfants de la lumière devaient être enlevées, ainsi que la mise en place de thermomètres dans les salles de sieste des bébés et la température contrôlée régulièrement.

15. Le 14 novembre 2016, les époux B______ ont répondu au courrier du 14 octobre 2016 de la commune, contestant le paiement de la facture pour le mois d'octobre 2016. Ils ont allégué de nouveaux manquements (notamment un appareil électrique cassé, au sol, dans la pièce de vie, des éprouvettes confectionnées en jouets, un bébé laissé seul à l'extérieur de la crèche dans sa poussette), ainsi que repris et développé ceux qu'ils avaient énumérés dans leur courrier du 30 septembre 2016. Ils ont également formulé de nombreuses questions. Enfin, ils ont demandé à la commune de rendre une décision susceptible de recours.

Des photographies étaient jointes à leur courrier, ainsi que différents documents dont il sera fait état dans la partie en droit, en tant que de besoin.

16. Le 14 décembre 2016, la commune a rappelé aux époux B______ sa position priant ceux-ci de s'acquitter de la somme due.

La commune n'avait pas d'obligation de rendre une décision dans le cadre d'un contrat de droit public.

Enfin, les signalements avaient été traités avec sérieux et avaient fait l'objet d'une enquête à la fois interne et par le SASAJ, si bien que toutes mesures nécessaires seraient prises, le cas échéant.

17. Le 3 mai 2017, le SASAJ a rendu son rapport de surveillance de l'EVE du D______ à la suite de la visite du 28 novembre 2016 (ci-après : le rapport du 3 mai 2017).

Selon la synthèse de ce rapport, la prise en charge des enfants respectait la sécurité physique et affective des enfants accueillis.

Les activités observées étaient adaptées aux enfants bien que devant être améliorées selon les groupes ou les moments. Les besoins physiologiques étaient respectés.

Les adultes présents apportaient une attention éducative adéquate et assuraient une présence sécurisante bien que des éléments d'amélioration soient préconisés, notamment dans l'articulation entre projet pédagogique et la prise en charge, ainsi que le système de référence lors d'absences du personnel, ou encore le partage des responsabilités pédagogiques selon les fonctions.

Les prestations que l'EVE du D______ fournissait en matière d'accueil des enfants étaient jugées conformes, bien que nécessitant certains ajustements. Les éléments évoqués dans le signalement ainsi que le contenu de l'évaluation commandaient la réalisation de dix exigences par l'EVE du D______.

Des contrôles réguliers des températures dans les salles de sieste des plus jeunes enfants devaient être effectués. Une réflexion sur une répartition des groupes d'âge pérenne d'année en année afin de stabiliser les groupes d'enfants devait être initiée ainsi que :

- mobiliser la réflexion et la mise en place des moyens pédagogiques décrits dans le rapport ;

- vérifier que la notion de secret de fonction soit comprise et intégrée par tous les membres du personnel ;

- étudier les moyens de remédier aux problématiques liées à la sous-dotation du personnel diplômé au sein des groupes, soit par des moyens pédagogiques et organisationnels adaptés, soit par une amélioration des ressources humaines ;

- établir des documents de pilotage conformes à la situation institutionnelle, notamment une liste du personnel et des plannings horaires ;

- remédier à la sous-dotation en personnel diplômé chez les « Oursons », tout en s'attachant à ne pas déstabiliser les autres groupes d'enfants ;

- fournir un rapport de la conformité de la ventilation de la salle de sieste des bébés ;

- remplacer les tapis de sol usagés ;

- mettre en place un dispositif relatif à l'organisation des remplacements de manière à ce que les remplaçants soient au clair avec leurs tâches.

Un suivi de la situation avec des délais à respecter serait effectué par le SASAJ. Par ailleurs, une visite de surveillance aurait lieu durant l'année scolaire 2017-2018.

Le détail du rapport sera repris dans la partie en droit, en tant que de besoin.

18. Le 24 mai 2017, le SASAJ a informé les époux B______ que le fonctionnement global de l'institution avait été analysé de manière approfondie, notamment lors de visites sur place. Le résultat de l'évaluation avait été communiqué à l'institution. Des points à améliorer avaient été relevés et le SASAJ se chargerait de leur suivi.

19. Le 30 juin 2017, la commune a procédé au premier rappel de paiement s'agissant de la facture de CHF 1'915.35 émise le 5 septembre 2016.

20. Le 28 juillet 2017, les époux B______ ont persisté dans leur position selon laquelle le paiement de la pension pour le mois d'octobre 2016 n'était pas dû car ils avaient été contraints de retirer leur fille de l'EVE du D______ du fait des événements qu'ils avaient exposés.

Par ailleurs, les questions contenues dans leur courrier du 14 novembre 2016 étaient restées sans réponse.

Enfin, dans son courrier du 24 mai 2017, le SASAJ avait confirmé la présence de dysfonctionnements.

21. Le 28 août 2017, la commune, se référant à ses réponses citées dans ses courriers des 14 octobre et 14 décembre 2016, a indiqué aux époux B______ qu'elle maintenait sa position, rappelant que le prix d'une pension mensuelle, soit CHF 1'915.35, était dû dans le cadre de la résiliation demandée.

22. Le 19 octobre 2017, la commune a procédé à une seconde sommation de paiement dans les dix jours, avec CHF 25.- de frais de rappel. Un montant total de CHF 1'940.35 était dû.

23. Par commandement de payer du 8 décembre 2017, poursuite n° 1______, notifié à Mme B______ le 12 décembre 2017, auquel celle-ci a formé opposition le jour même, la commune a requis le paiement de la facture d'un montant de CHF 1'940.35 avec intérêts à 5 % l’an dès le 19 octobre 2017.

24. Le 22 novembre 2017, le SASAJ a rendu un avis de suivi de la situation de l'EVE du D______.

Selon sa conclusion, de nombreux changements y étaient intervenus depuis janvier 2017. Tant la direction que les équipes éducatives œuvraient pour améliorer la qualité des prestations offertes aux enfants et à leurs familles. Les équipes avaient constaté une amélioration des moments comme les repas des enfants du 1er étage ou les transitions, et qu'elles étaient également satisfaites de la pérennisation des groupes d'âge. Des questionnements persistaient toutefois concernant l'organisation des horaires qui impliquaient une mise en commun des groupes notamment à l'accueil et aux départs.

Le SASAJ félicitait la direction et l'équipe éducative de l'institution pour le travail conséquent fourni tout au long des derniers mois afin de répondre aux demandes du SASAJ dans les délais attendus et de fournir une qualité d'accueil aux enfants et aux familles. Toutes les demandes du SASAJ avaient été exécutées dans les délais attendus.

L'EVE du D______ était encouragée à poursuivre sa réflexion sur l'organisation des horaires et il était attendu d'elle un retour sur la pérennisation des groupes d'âge et les prestations pédagogiques y afférentes.

L'institution devait enfin faire le nécessaire concernant les salles de sieste des groupes « Oursons » et « Poussins » afin que les températures ne dépassent pas 20°.

Le détail de cet avis de suivi sera repris dans la partie en droit, en tant que de besoin.

25. Le 16 août 2018, la commune a déposé auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) une action en paiement à l'encontre des époux B______, concluant à leur condamnation solidaire au paiement de CHF 1'940.62, avec intérêts à 5 % dès le 19 octobre 2017, « sous suite de frais et dépens ».

La relation entre la commune et les époux B______ avait été réglée sous la forme d'un contrat de droit administratif. La distinction avec un contrat de droit privé était claire, dans la mesure où le contrat avait pour objet la réalisation d'une tâche publique, soit l'offre de places d'accueil pour les enfants de 0 à 4 ans. La demande en paiement était dès lors recevable.

Les époux B______ avaient signé le contrat d'accueil le 21 avril 2016. La période d'adaptation avait pris fin le 26 août 2016, si bien que la demande de résiliation, effectuée par les parents par écrit le 30 septembre 2016, était intervenue après cette période.

Malgré l'art. 107 de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220), les défendeurs n'avaient pas fixé à la commune un délai de grâce qui lui aurait permis, pour autant qu'une exécution imparfaite fût établie, d'exécuter correctement le contrat. Les conditions légales de l'art. 107 CO n'étaient par conséquent pas remplies.

S'agissant de la résiliation immédiate prévue par l'art. 108 CO, seule l'hypothèse du ch. 1 était envisageable. Toutefois et selon le rapport du SASAJ du 3 mai 2017, pratiquement tous les points invoqués par les parents étaient infondés. Seule la sous-dotation en matière d'éducatrices diplômées dans un groupe d'âge devait être corrigée et un complément d'information devait être apporté s'agissant de la ventilation. Pour le reste, de simples améliorations étaient conseillées.

Concernant la ventilation, en mars 2017, une entreprise avait confirmé que le système était fonctionnel et conforme aux normes prévues en la matière. De plus, l'avis de suivi du SASAJ du 22 novembre 2017 faisait état des mesures de surveillance exécutées par le personnel de l'EVE du D______ concernant la température dans les salles de sieste. Le SASAJ concluait par ailleurs qu'il avait été remédié à la dotation générale et par groupe de l'institution laquelle était conforme aux normes en la matière. Le SASAJ avait d'ailleurs relevé les efforts remarquables fournis par les membres du personnel et la direction de l'institution pour répondre à toutes les exigences qu'il avait posées dans le cadre du suivi de la dénonciation.

À aucun moment, la commune n'avait fait montre de réticence quant à l'exécution du contrat qui la liait aux défendeurs. Elle n'avait jamais déclaré ne pas vouloir exécuter le contrat.

Les époux B______ n'ayant pas fixé un délai à la commune et cette dernière n'ayant aucunement fait preuve d'une intention de ne pas accomplir ses obligations, les conditions de la résiliation avec effet immédiat prévues par les art. 107 et 108 CO n'étaient pas réalisées.

Si, par impossible, un régime de résiliation immédiate pour justes motifs était admissible, il s'agirait d'établir que la continuation des rapports était intolérable et que la confiance était rompue, en référence aux exigences de l'art. 337 CO. Or, selon le rapport du 3 mai 2017, les conditions d'accueil n'étaient pas intolérables, contrairement aux allégations alarmistes des défendeurs, seule une sous-dotation avait été relevée dans un groupe et un complément d'information à apporter concernant la ventilation, tous les autres points ne faisant l'objet que de recommandations. On ne pouvait dès lors pas tirer la conclusion que la commune aurait violé ses obligations contractuelles si gravement que de justes motifs seraient donnés pour une résiliation immédiate.

26. Le 25 septembre 2018, les époux B______ ont demandé que la commune produise l'intégralité des annexes mentionnées dans le rapport du 3 mai 2017, ainsi que le rapport intégral d'évaluation de l'EVE du D______ établi par le SASAJ à la suite d'une visite de surveillance ayant eu lieu le 17 septembre 2015 et dont il était fait état dans le rapport du 3 mai 2017.

27. Le 11 octobre 2018, la commune a produit les annexes au rapport du 3 mai 2017, ainsi que le rapport de surveillance du SASAJ du 25 novembre 2015 relatif à une visite du 17 septembre 2015 (ci-après : le rapport du 25 novembre 2015) à l'EVE du D______.

Selon la synthèse de la visite de surveillance du 25 novembre 2015, l'institution remplissait toutes les conditions pour offrir des prestations de qualité aux enfants et à leur famille. Quelques réajustements devaient cependant être effectués au niveau des dotations de personnel diplômé dans chaque groupe d'âge. Une mise en conformité (informer le SASAJ lors de tout changement impactant les termes de l'autorisation) et deux recommandations (la répartition du personnel diplômé dans tous les groupes d'âge devait être revue afin de répondre aux normes en la matière et revoir les horaires en lien avec une répartition plus équitable du personnel diplômé) étaient formulées.

28. Le 13 novembre 2018, les époux B______ ont conclu au rejet de l'action en paiement, à ce qu'ils soient libérés de leur dette, à ce que la commune soit condamnée à une amende pour emploi abusif des procédures, à ce que la commune soit condamnée au remboursement de la pension du mois de septembre 2016 et à ce qu'il soit ordonné à un organe externe (la Cour des comptes ou autres) de « réviser » l'autorisation individuelle délivrée à la direction pour l'exploitation de l'EVE du D______. Leur audition, ainsi que celle de divers témoins, était également demandée.

Il convenait de se placer au moment où leur fille avait fréquenté l'établissement, soit du 17 août au 28 septembre 2016, pour examiner si la résiliation du contrat avec effet immédiat était conforme au droit.

La mise en danger de la santé et la vie des enfants du groupe « Oursons » (un risque élevé d'asphyxie et de mort subite, du matériel et des infrastructures défectueux), un non-respect des lois en matière de structure d'accueil, notamment de taux d'encadrement, de qualification du personnel, des installations et sécurité, une absence de mesures correctives malgré leurs différentes demandes, la mauvaise foi, les tentatives de dissimulation, la calomnie et une rupture du lien de confiance, ainsi que le climat de tension entre les employés constituaient notamment les motifs de la résiliation du contrat avec effet immédiat.

Ceux-ci seront, en tant que de besoin, repris et détaillés dans la partie en droit.

Par ailleurs, le rapport du 3 mai 2017 n'avait pas traité plusieurs points que les défendeurs avaient soulevés.

Ils avaient interpellé à plusieurs reprises le personnel éducatif, la direction et le SPE de la commune afin que des modifications soient apportées. En tout état, une interpellation n'était pas nécessaire lorsque, selon les règles de la bonne foi, celle-ci apparaissait superflue, notamment lorsque le débiteur avait clairement manifesté, par son comportement, qu'il ne s'exécuterait pas, ce qui était le cas. L'intérêt de l'enfant commandait de ne plus confier leur fille à l'institution. Un délai pour se mettre en conformité aurait été inutile.

La commune et l'EVE du D______ avaient fait preuve de mauvaise foi. Par ailleurs, le rapport du 3 mai 2017 était critiquable sur plusieurs aspects (notamment, des méthodes d'audit non adaptées, une absence de sanction, des incidents mal interprétés, une absence de parallèle avec les bases légales, la chargée d'évaluation jouait sur les mots et ne prenait pas ses responsabilités en termes d'irrégularités, la visite annoncée clairement, les félicitations à l'établissement). Il fallait de plus faire la différence entre dotation en personnel planifiée et dotation en personnel réelle.

Leur droit d'être entendus n'avait pas été respecté, en ce sens qu'aucune réponse n'avait été donnée à leurs questions formulées dans leur courrier du 14 novembre 2016, que le rapport du 3 mai 2017 ne leur avait pas été transmis, que la commune n'avait pas pris de décision formelle et qu'ils avaient rencontré des difficultés à s'entretenir avec les membres du SPE.

Les époux B______, conformément à l'art. 70 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), demandaient à ce que la commune soit condamnée au remboursement de CHF 1'915.35 correspondant au mois de septembre 2016 et à ce qu'elle soit condamnée à formuler des excuses écrites.

Enfin, l'action en paiement était la conséquence de leurs revendications et de leur signalement auprès de l'organe de contrôle, si bien qu'une amende pour emploi abusif des procédures devait être prononcée à son encontre.

29. Le 12 décembre 2018, la commune a répliqué, persistant dans ses conclusions.

L'EVE du D______ était au bénéfice d'autorisations de fonctionnement, ce qui attestait que les prestations servies étaient conformes aux exigences légales. Les différents rapports du SASAJ démontraient qu'à aucun moment les enfants n'avaient été mis en danger ni qu'il n'avait été question de suspendre l'autorisation délivrée, si bien qu'aucun motif de résiliation immédiate n'était susceptible de justifier l'application d'un régime exceptionnel.

La condition de la mise en demeure des art. 107 ss CO n'était pas remplie, dans la mesure où les revendications des parents allaient au-delà des prestations contractuelles et légales requises. Il n'y avait pas eu de pression sur les défendeurs pour qu'ils retirent leur enfant.

S'agissant de la dotation en personnel diplômé et du taux d'encadrement, le règlement sur les structures d'accueil de la petite enfance et sur l'accueil familial de jour du 21 décembre 2005 (RSAPE - J 6 29.01) ne requerrait pas une présence de 50 % de personnel diplômé par groupe d'âges, mais un nombre d'adultes par nombre d'enfants présents, en fonction de leur âge, ainsi qu'un pourcentage de personnel diplômé pour l'institution dans son ensemble.

Enfin, les travaux de rénovation effectués dans l'institution, dont faisaient état les parents dans leur mémoire de réponse, dataient de plus de six ans avant la période litigieuse et n'avaient dès lors aucun rapport avec celle-ci.

30. Le 25 janvier 2019, les époux ont dupliqué, reprenant et développant leur précédente argumentation sur l'importance de la période litigieuse, sur les travaux liés à la chaleur du bâtiment, sur la dotation insuffisante par groupe auprès des enfants, sur le refus de prendre en charge leur fille, sur la pression pour qu'ils retirent leur enfant de l'institution et enfin sur les différents manquements et autres objets dangereux.

31. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. La chambre administrative examine d'office la recevabilité d'un recours ou d'une demande portée devant elle (ATA/986/2018 du 25 septembre 2018 consid. 1 et les références citées).

2. a. La chambre administrative est l’autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05, correspondant à l’art. 56A al. 1 de l’ancienne loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - aLOJ, en vigueur jusqu’au 31 décembre 2010). Le recours à la chambre administrative est ouvert contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e et 57 LPA. Sont réservées les exceptions prévues par la loi (art. 132 al. 2 LOJ, correspondant à l’art. 56A al. 2 aLOJ). La chambre administrative connaît en instance cantonale unique des actions fondées sur le droit public qui ne peuvent pas faire l’objet d’une décision au sens de l’art. 132 al. 2 LOJ et qui découlent d’un contrat de droit public. Les dispositions de la LPA en matière de recours s’appliquent par analogie à ces actions (art. 132 al. 3 LOJ, correspondant à l’art. 56G aLOJ).

b. L’art. 56G aLOJ réglementait l’ancienne action pécuniaire largement utilisée pour régler le contentieux financier de la fonction publique. Tout d’abord intitulé « action contractuelle » depuis l’entrée en vigueur le 1er janvier 2009 de la modification législative du 18 septembre 2008, et réservé aux prétentions fondées sur le droit public qui ne pouvaient pas faire l’objet d’une décision et qui découlaient d’un contrat de droit public, il est devenu depuis le 1er janvier 2011 l’art. 132 al. 3 LOJ.

c. L'action contractuelle de l'art. 132 al. 3 LOJ est une voie de droit réservée au contentieux découlant des contrats de droit public (ATA/1301/2015 du 8 décembre 2015 consid. 2b et les références citées).

Pour que l’action soit recevable, il faut ainsi que les conclusions prises par la personne concernée ne puissent faire l'objet d'une décision (ATA/1139/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b ; ATA/119/2013 du 26 février 2013 consid. 2).

d. Selon la doctrine, le contrat de droit administratif est un acte régi par le droit public qui résulte de la concordance de deux ou plusieurs manifestations de volonté concrétisant la loi dans un cas d'espèce, ayant pour objet l'exécution d'une tâche publique et visant à produire des effets bilatéraux obligatoires. Le contrat de droit administratif est ainsi une forme de contrat de droit public. Le contrat de droit administratif se caractérise, d'une part, par sa nature bilatérale, ce qui le distingue de la décision, et, d'autre part, par son inscription dans l'exécution d'une tâche publique prévue par la loi, ce qui le distingue du contrat de droit privé (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd. 2018, n. 970 et 971).

Une fois établi qu'une relation avec l'administration est de nature bilatérale, donc contractuelle, il faut encore déterminer si elle relève du droit public ou du droit privé. Le critère privilégié par la jurisprudence est celui de l'objet du contrat, considéré sous l'angle des intérêts en présence, et de sa fonction. Il s'agit d'un contrat de droit public lorsque l'intérêt public est directement en jeu, à savoir lorsque le contrat a pour objet direct l'exécution d'une tâche publique ou qu'il concerne un objet réglementé par le droit public (Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 978 et 981).

e. Selon l'art. 1 RIPE, les institutions de la petite enfance de la commune (ci-après : IPE) ont pour but d’accueillir les enfants dès la fin du congé maternité jusqu’à l’âge de la scolarité, sans distinction d’origine, de religion, de culture ou de classe sociale (al. 1). Les IPE proposent un espace adapté aux besoins des enfants en complément de la vie familiale (al. 2). Les IPE sont gérées par le SPE (al. 3).

À teneur de l'art. 2 al. 1 RIPE, en principe, seuls les enfants dont les parents sont domiciliés sur le territoire de la commune peuvent s’inscrire sur la liste d’attente du service.

L'art. 4 RIPE précise que l’inscription est concrétisée par la conclusion d’un contrat d’accueil signé par les représentants légaux de l’enfant et la commune (1ère phr.).

f. Selon l'art. 1 du contrat d'accueil d'C______ signé le 21 avril 2016, la commune a attribué au représentant légal une place pour l'enfant dans l'une des IPE de la commune, pour l'année 2016-2017.

Le représentant reconnaissait avoir pris connaissance du RIPE applicable à l'année en cours. Il a notamment pris note que la pension était payable par mois et d'avance et s'engageait à respecter ces échéances (art. 5 du contrat d'accueil d'C______).

La prétention en paiement de la commune trouve donc son fondement dans le contrat d'accueil d'C______ signé le 21 avril 2016 la liant aux défendeurs, ainsi que dans le RIPE, lequel est applicable à l'année scolaire en cours.

Compte tenu de l'exécution de la tâche publique de la commune visant à accueillir les enfants dans ses IPE, la relation contractuelle entre la commune et les défendeurs, qui sont domiciliés sur le territoire de la commune, relève du droit public.

Par ailleurs, on ne se trouve pas dans une situation où la prétention de la commune pourrait faire l'objet d'une décision au sens de l'art. 4 LPA.

Par conséquent, la chambre administrative est compétente pour connaître de l’action en paiement de la demanderesse.

3. Les défendeurs ont pris des conclusions reconventionnelles dans leur réponse du 13 novembre 2018. La question de la recevabilité de celles-ci souffrira de rester ouverte compte tenu de ce qui suit.

4. Les parties demandent leur audition ainsi que celle de divers témoins.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes et d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_545/2014 du 9 janvier 2015 consid. 3.1 ; 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3).

Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; ATA/1111/2017 du 18 juillet 2017 consid. 2a).

b. En l'espèce, les parties ont eu l'occasion d’exposer leurs arguments dans leurs différentes écritures. Elles ont en outre remis à la chambre administrative les pièces justificatives qu’elles estimaient propres à étayer leurs positions. La chambre de céans dispose ainsi d’un dossier complet lui permettant de trancher les points pertinents en toute connaissance de cause. Il ne sera, par conséquent, pas donné suite aux actes d’instruction sollicités par les parties.

5. a. Les règles sur le placement d’enfants sont énoncées, au niveau fédéral, dans l’ordonnance sur le placement d'enfants du 19 octobre 1977 (OPE -
RS 211.222.338). Dans le canton de Genève, l’accueil et le placement d’enfants sont régis notamment par la loi sur l’enfance et la jeunesse du 1er mars 2018
(LEJ - J 6 01), entrée en vigueur le 19 mai 2018, laquelle a abrogé la loi sur l'accueil et le placement d’enfants hors du foyer familial du 27 janvier 1989 (LAPEF - J 6 25) en vigueur au moment des faits en cause, le règlement sur l’accueil et le placement d’enfants hors du foyer familial du 5 septembre 2007 (RAPEF - J 6 25.01), lequel n’est à ce jour pas abrogé, la loi sur les structures d’accueil de la petite enfance et sur l’accueil familial de jour du 14 novembre 2003 (LSAPE - J 6 29), ainsi que le RSAPE.

b. Selon l'art. 4 al. 1 LSAPE, les communes ou groupements de communes offrent des places d'accueil dans les différents modes de garde pour les enfants de 0 à 4 ans, limite portée à 12 ans pour l'accueil familial de jour.

c. Comme vu supra, l'art. 4 1ère phr. RIPE prévoit la conclusion d’un contrat d’accueil signé par les représentants légaux de l’enfant et la commune.

L'art. 5 du contrat d'accueil d'C______ précise que le représentant légal reconnaît avoir pris connaissance du RIPE applicable à l'année en cours. Il a notamment pris note que la pension est payable par mois et d'avance, et s'engage à respecter ces échéances.

Selon l'art. 7 du contrat d'accueil d'C______, le contrat prend effet à la date indiquée dans les conditions d'accueil annexées. Il se termine automatiquement à la fin de l'année scolaire.

d. À teneur de l'art. 14 RIPE qui traite de la résiliation du contrat d'accueil par les parents, à compter de la signature du contrat d’accueil et avant son échéance, les représentants légaux peuvent le résilier par écrit avec un préavis de trois mois pour la fin d’un mois (al. 1). Si la place peut être attribuée à un autre enfant durant le délai de préavis, le SPE peut fixer le terme de résiliation à une date antérieure et diminuer le prix de pension restant dû pro rata temporis (al. 2). Durant la période d’adaptation prévue à l’art. 9 RIPE, la résiliation par les représentants légaux est effective immédiatement, mais ne donne lieu à aucun remboursement de la pension pour le mois en cours (al. 3).

e. Selon la doctrine, en l'absence de réglementation administrative topique, le droit des obligations s'applique en tant que règles générales du droit à la conclusion, à l'interprétation, à l'exécution et à l'extinction des contrats de droit administratif (Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, Bâle 2014, n. 1105).

Un contrat de droit administratif s'éteint lorsqu'il est entièrement exécuté, lorsque la durée pour laquelle il est conclu est expirée, en vertu d'un accord des parties pour le terme qu'elles auront convenu, en cas d'expropriation intégrale des droits acquis de l'administré, en cas d'annulation ou de révocation, en cas de résiliation qui serait justifiée par la théorie de l'imprévision ou encore en cas de résiliation pour inexécution (Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1022).

En principe, le régime applicable à l'exécution imparfaite et à l'inexécution des contrats de droit administratif ainsi qu'à la demeure est celui des art. 97 ss CO, respectivement art. 102 ss CO, lesquels sont appliqués (par analogie) en tant que droit public supplétif ou en tant que règles générales du droit (Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, op. cit., n. 1125).

f. L'art. 107 al. 1 CO prévoit que lorsque, dans un contrat bilatéral, l'une des parties est en demeure, l'autre peut lui fixer ou lui faire fixer par l'autorité compétente un délai convenable pour s'exécuter.

La fixation d'un délai n'est pas nécessaire lorsqu'il ressort de l'attitude du débiteur que cette mesure serait sans effet (art. 108 ch. 1 CO).

L'attitude du débiteur peut faire de la fixation d'un délai supplémentaire une formalité complètement inutile. C'est notamment le cas lorsque le débiteur annonce « de manière claire et définitive » qu'il ne peut ou ne veut pas s'exécuter, que l'obligation soit déjà exigible ou qu'elle ne le soit pas encore (ATF 116 II 436 consid. 2b ; 110 II 141 consid. 1b) ou, lorsque, par son comportement, le débiteur manifeste clairement et définitivement qu'il refuse d'exécuter la prestation due (arrêt du Tribunal fédéral 4A_206/2007 consid. 6.3).

La résiliation abrupte, sans sommation, prévue notamment par l'art. 108 ch. 1 CO, constitue un procédé dérogatoire qui ne saurait être admis à la légère, sauf à dénaturer le régime ordinaire (arrêts du Tribunal fédéral 4A_323/2012 du 10 septembre 2012 consid. 1 ; 4A_518/2011 du 21 décembre 2011 consid. 5).

g. En l'occurrence, ni le contrat d'accueil d'C______ ni le RIPE ne prévoient pas de disposition sur la résiliation avec effet immédiat par les parents.

Toutefois et conformément à ce que prévoit la doctrine, la résiliation immédiate du contrat d'accueil par les parents est possible en vertu des art. 102 ss CO applicables par analogie en tant que droit public supplétif.

Le dossier ne contient pas de pièces attestant que les défendeurs auraient mis formellement en demeure la demanderesse, au sens de l'art. 107 al. 1 CO, – par rapport aux différents manquements auxquels il conviendrait, selon eux, de remédier – avant leur courrier de résiliation du 30 septembre 2016.

Dès lors, se pose la question de l'application de l'art. 108 ch. 1 CO.

Les défendeurs soutiennent avoir formulé plusieurs demandes oralement visant à ce que les conditions d'accueil de leur fille soient modifiées et que la direction et/ou le personnel éducatif ont refusé d'entrer en matière.

Si aucune pièce du dossier ne corrobore cette allégation, il ressort toutefois du courrier de la commune du 14 octobre 2016 adressé aux défendeurs que les faits sur lesquels ces derniers se basaient pour invoquer une mauvaise exécution du contrat d'accueil, étaient contestés. Par ailleurs et toujours selon ce courrier, la commune avait respecté l'ensemble des obligations légales, réglementaires et contractuelles qui lui incombaient dans le cadre de l'exercice de ses activités. Enfin, le SASAJ a commencé sa mission d'investigation non pas sur initiative de la commune mais à la suite du courriel des défendeurs du 4 octobre 2016 auquel était joint leur courrier de résiliation du 30 septembre 2016 accompagné de la liste d'événements. Force est ainsi de constater que le courrier de la commune du 14 octobre 2016 vient renforcer l'idée selon laquelle la fixation d'un délai à la demanderesse pour modifier les conditions d'accueil aurait été sans effet, puisque les manquements allégués étaient contestés.

h. Autre est la question de savoir si les manquements soulevés par les défendeurs pour procéder à la résiliation immédiate du contrat d'accueil sont fondés.

S'il est vrai que certains reproches évoqués par les défendeurs dans leur courrier de résiliation du 30 septembre 2016 ont été infirmés par le SASAJ (la planification de l'introduction des aliments, les lits et chaises hautes par exemple), d'autres points soulevés ont également été relevés par le SASAJ.

Dans son rapport du 3 mai 2017, le SASAJ a constaté que la dotation d'éducateurs diplômés pour l'année 2016-2017 du groupe des « E______ », groupe auquel appartenait la fille des défendeurs, était sous-évaluée, en ce sens qu'il manquait 1,2 poste pour être au 50 % de personnel diplômé. Par ailleurs et selon l'analyse des horaires, dans ce même groupe, il n'y avait pas de personnel diplômé le lundi, le mardi, le mercredi dès 14h30, le jeudi de 9h00 à 11h00, et il manquait un poste diplômé tous les jours. En outre, le nombre de personnes était de deux au lieu des trois personnes requises à plusieurs moments dans la semaine.

S'agissant des jouets « faits maison », lors de la visite du 28 novembre 2016, le SASAJ n'avait pas observé ce type de jouets. Lors d'une rencontre le 22 décembre 2016, la direction de l'EVE du D______ avait expliqué au SASAJ que ces « hochets » avaient fait l'objet d'un contrôle interne et qu'ils n'avaient pas été totalement supprimés.

Outre le fait que la direction avait reconnu que certains de ces jouets étaient défectueux, il ressort d'un complément au rapport d'évaluation formulé par l'EVE du D______, reçu le 11 avril 2017 par le SASAJ, que ce type de jouets a été jeté pour éviter tout autre litige autour d’eux.

Les tapis de mousse présents dans la salle du groupe « E______ » étaient conformes, mais leur état d'usage méritait néanmoins de les remplacer, ce qui a été fait par la suite.

S'agissant de la salle de sieste, le SASAJ avait formulé, dans son rapport du 3 mai 2017, une exigence à l'encontre de l'institution, en ce sens qu'un contrôle régulier des températures dans les salles de sieste des plus jeunes enfants devait être effectué. Il ressort de l'avis de suivi de situation du 22 novembre 2017 que les températures oscillaient entre 21° et 24° (selon le relevé de septembre à novembre 2017). Une solution devait être absolument trouvée afin de maintenir une température entre 18° et 20°.

Le SASAJ a également fait le constat que les adultes pouvaient adopter un ton « sec » lorsqu'ils interagissaient entre eux.

Toutefois et contrairement à ce que soutiennent les défendeurs, ces éléments, même pris dans leur ensemble, ne constituent pas des motifs suffisants leur permettant de faire usage de l'art. 108 ch. 1 CO dans le cadre de la relation contractuelle les liant à la commune.

En effet et comme le retient en définitive le SASAJ, la sécurité physique et affective des enfants accueillis n'a pas été mise en danger par ces imperfections. Les adultes présents apportaient une attention éducative adéquate et assuraient une présence suffisante. De plus, les prestations délivrées par l'institution en matière d'accueil des enfants étaient jugées conformes à ce qui était attendu de l'autorité de surveillance. D'ailleurs, à aucun moment dans les rapports du SASAJ figurant au dossier, il n'est question d'une éventuelle suspension de l'autorisation d'exploiter l'institution, au motif d'un éventuel péril en la demeure (art. 14 al. 3 LSAPE).

Ainsi et en définitive, l'EVE du D______ a exécuté ses obligations à satisfaction de droit dans le cadre du contrat d'accueil de la fille des défendeurs.

Par conséquent, conformément à l'art. 14 al. 2 RIPE et dans la mesure où la place de la fille des défendeurs avait pu être réattribuée au 1er novembre 2016, la commune est en droit de leur réclamer le prix de la pension pour le mois d'octobre 2016.

6. Au vu de ce qui précède, l'action en paiement sera admise. Les défendeurs seront solidairement condamnés à verser à la demanderesse la somme de CHF 1'940.35, avec intérêts à 5 % dès le 19 octobre 2017.

En l'absence de conclusions sur ce point (art. 69 al. 1 1ère phr. LPA), la chambre de céans ne prononcera pas la mainlevée de l'opposition au commandement de payer poursuite n° 1________.

7. Compte tenu de l'issue du litige, les conclusions reconventionnelles des défendeurs seront écartées, pour autant qu'elles aient été recevables.

8. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge des défendeurs, pris conjointement et solidairement, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA). Conformément à la jurisprudence constante de la chambre administrative, aucune indemnité de procédure ne sera accordée à la commune qui compte plus de dix mille habitants (ATA/1260/2018 du 27 novembre 2018 et les références citées) et dispose d'au moins une juriste au sein de son secrétariat général comme cela ressort de ses écritures (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable l'action interjetée le 16 août 2018 par la commune de A______ contre Madame et Monsieur B______ ;

au fond :

l'admet ;

condamne solidairement Madame et Monsieur B______ à verser à la commune de A______ la somme de CHF 1'940.35, avec intérêts à 5 % dès le 19 octobre 2017 ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de Madame et Monsieur B______, pris conjointement et solidairement ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à la commune de A______, ainsi qu'à Madame et Monsieur B______.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, Mme Junod, MM. Pagan et Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

K. De Lucia

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :