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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3252/2013

ATA/905/2015 du 01.09.2015 sur JTAPI/1391/2014 ( ICCIFD ) , REJETE

Descripteurs : DROIT FISCAL; IMPÔT; IMPÔT CANTONAL ET COMMUNAL; IMPÔT FÉDÉRAL DIRECT; IMPÔT SUR LE REVENU; REVENU; PRESTATION APPRÉCIABLE EN ARGENT; FARDEAU DE LA PREUVE; TAXATION CONSÉCUTIVE À UNE PROCÉDURE
Normes : LIFD.16.al1; LIPP.17; LIFD.20.al1.letc; aLIPP-IV.6.al1.letc; LIPP.22.al1.letc
Résumé : Rejet du recours de l'autorité fiscale. Cette dernière n'a pas apporté la preuve de l'existence d'un prêt simulé qu'aurait octroyé la société à son unique actionnaire. Une partie de la dette a été amortie avant l'ouverture de la procédure en rappel et en soustraction d'impôt. La volonté initiale de l'actionnaire était, en l'espèce, celle de rembourser la dette.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3252/2013-ICCIFD ATA/905/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er septembre 2015

4ème section

 

dans la cause

 

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE


contre


Madame et
Monsieur A______
représentés par Swiss Audit& fiduciary Services SA, mandataire

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________

Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 4 décembre 2014 (JTAPI/1391/2014)


EN FAIT

1) Madame et D______ A______ (ci-après : les contribuables) sont mariés et domiciliés à Genève.

2) Le contribuable est actionnaire unique et administrateur-président de la société B______ SA (ci-après : la société), qui a pour but : « toutes protections et remises en état de surfaces de toute nature, de tous matériaux dans les domaines du bâtiment, des voitures-automobiles (sic) et bateaux en particulier et de l'industrie en général ».

La contribuable est pour sa part administratrice-secrétaire de cette société.

Swiss Audit & Fiduciary services SA est l'organe de révision de la société depuis l'année 2012.

3) En 2009, les contribuables ont déclaré un revenu brut de CHF 87'828.- pour l'impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) et de CHF 95'369.- pour l'impôt fédéral direct (ci-après : IFD). En 2010, ces montants s'élevaient à CHF 86'352.- pour l'ICC et CHF 94'836.- pour l'IFD. Ils provenaient du salaire du contribuable, des revenus bruts mobiliers et immobiliers et des rentes AVS/AI.

4) Dans leur déclaration fiscale 2009, les contribuables ont déduit de leur fortune un montant de CHF 65'077.- correspondant à une dette envers la société et porté en déduction de leur revenu la somme de CHF 1'587.- à titre d'intérêts. En 2010, cette dette s'élevait à CHF 117'935.- et les intérêts y relatifs à CHF 2'595.-.

5) Par décisions des 27 septembre 2010 et 5 mars 2012, l'administration fiscale cantonale (ci-après : l'AFC) a taxé les contribuables pour les années 2009 et 2010.

Non contestés, ces bordereaux sont entrés en force.

6) Par lettre du 30 octobre 2012, l'AFC a informé les contribuables de l'ouverture à leur encontre d'une procédure en rappel d'impôt et soustraction pour les années 2009 et 2010. Selon des informations transmises par le service des personnes morales, les contribuables avaient bénéficié de prestations appréciables en argent, sous la forme d'un prêt simulé octroyé par la société. Le montant du prêt de CHF 65'077.- en 2009 et son augmentation de CHF 52'858.- en 2010 allaient être ajoutés à leurs états des titres en tant que rendement de fortune mobilière. La dette et les intérêts relatifs n'étaient pas admis en déduction de leur fortune, respectivement de leurs revenus.

7) Dans sa réponse du 5 novembre 2012, le contribuable a contesté avoir bénéficié de la part de la société d'un prêt simulé.

Il existait depuis longtemps un compte courant actionnaire entre lui et la société. En fin d'année, un intérêt était dûment calculé et comptabilisé dans les comptes de celle-ci.

En 2011, il avait remboursé en partie son compte courant actionnaire à hauteur de CHF 35'000.- et poursuivrait l'amortissement en 2012 et 2013.

Un extrait dudit compte courant était joint à son courrier. Les remboursements à hauteur de CHF 35'000.- y figuraient.

8) Le 30 novembre 2012, l'AFC a notifié au contribuable les bordereaux de rappel d'impôt et d'amendes pour les années 2009 et 2010.

9) Le 13 décembre 2012, les contribuables ont élevé réclamation à l'encontre de ces décisions.

L'AFC n'avait pas démontré l'existence d'un prêt simulé et n'avait pas requis la production des documents permettant de corroborer leurs allégations, soit le contrat de prêt, l'échéancier des remboursements ainsi que la garantie du prêt.

Par ailleurs, au regard de plusieurs indices, les avances perçues par le contribuable ne pouvaient être qualifiées de prêt simulé. En 2011, elles avaient déjà fait l'objet de deux amortissements d'un montant de CHF 30'000.- et de CHF 5'000.-. De plus, la société était propriétaire d'immeubles en cours de réalisation et disposait ainsi d'une réserve latente supérieure aux montants des avances accordées. La situation financière du contribuable était « absolument saine », puisqu'il était propriétaire de son logement ainsi que d'autres biens immobiliers.

10) Le 8 février 2013, l'AFC a demandé aux contribuables de lui fournir la preuve des remboursements de CHF 35'000.- et de CHF 5'000.- effectués en 2011 et le détail du compte courant actionnaire 2012.

11) Le 19 mars 2013, les contribuables ont produit les documents suivants :

- un extrait du compte courant de la société pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011, faisant état des montants de CHF 30'000.- et de CHF 5'000.-, crédités respectivement les 30 juin et 30 novembre 2011 ;

- un extrait du livre des comptes de la société relatif au mois de juin 2011 ;

- un extrait du livre des comptes de la société relatif au mois de novembre 2011 ;

- un extrait du compte courant de la société pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012 faisant état d'un montant de CHF 15'000.- crédité le 31 décembre 2012 ;

- un extrait du livre des comptes de la société relatif au mois de décembre 2012.

12) Le 8 mai 2013, l'AFC a sollicité des explications sur la provenance des fonds ayant servi au remboursement.

13) Dans leur réponse du 31 mai 2013, les contribuables ont expliqué que le montant de CHF 35'000.-, remboursé en 2011, provenait en partie d'un acompte perçu par le contribuable sur la vente d'un terrain (soit CHF 10'000.-). Le solde avait été pris sur les économies faites sur ses salaires des années 2010 et 2011, qu'il avait conservées en espèces, à son domicile.

Le remboursement de CHF 15'000.- effectué en 2012, avait également été financé par de l'épargne réalisée sur son salaire de la même année.

14) Par décisions du 17 septembre 2013, l'AFC a maintenu les bordereaux de rappel d'impôts et les amendes.

L'ajustement fiscal opéré auprès de la société constituait un rendement de participation imposable pour les contribuables. Les indices retenus permettant de conclure à l'existence d'un prêt simulé étaient l'inexistence de garanties données par l'emprunteur, l'absence de plan de remboursement du prêt, le non-paiement des intérêts et enfin, la solvabilité, ainsi que la capacité de remboursement de l'emprunteur qui n'étaient pas démontrées. Dans les mêmes conditions, le prêt n'aurait pas été octroyé à une tierce personne.

S'agissant des remboursements intervenus les années ultérieures, la provenance des fonds et les explications des contribuables ne permettaient pas de suivre de manière fiable et précise les opérations alléguées.

15) Par acte du 9 octobre 2013, les contribuables ont recouru contre ces décisions auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI), concluant implicitement à leur annulation.

Le prêt dont il avait bénéficié ne pouvait être qualifié de simulé.

L'AFC avait ignoré l'existence du contrat de prêt, daté du 10 décembre 2012 et annexé au recours. Celui-là prévoyait que le prêt était octroyé pour 10 ans, portait intérêts, et que ces derniers étaient ajoutés au compte courant en fin d'année.

En tenant compte des remboursements déjà effectués, il était convenu un amortissement de CHF 5'000.- par année.

À titre de garantie, 50% des actions, entièrement libérées, étaient déposées en nantissement dans les coffres de la société, et une priorité d'achat, sur l'appartement que possédait le contribuable à la rue E______, était accordée à la société.

Le contribuable, propriétaire de son appartement, était solvable et apte à rembourser sa dette. Les contribuables étaient des personnes âgées qui avaient pour habitude de garder des économies chez eux.

16) Par écritures du 15 janvier 2014, l'AFC a conclu au rejet du recours.

Elle avait procédé, le 17 novembre 2011, à la taxation de la société, en tenant compte d'une distribution dissimulée de bénéfice à hauteur des prêts comptabilisés. L'ajustement fiscal opéré auprès de la société constituait, dans le cadre de l'imposition des contribuables, un rendement de participation imposable.

Les contribuables n'avaient pas la capacité financière de rembourser le prêt. On ne pouvait pas tenir compte de remboursements intervenus au moyen de sommes en liquide non mentionnées dans les déclarations fiscales, dont les montants étaient supérieurs au salaire annuel du contribuable et qui auraient été accumulées à son domicile pendant plusieurs années

17) Par réplique du 17 février 2014, les contribuables ont persisté dans leurs conclusions.

Afin de répondre à la problématique soulevée par le fisc et de prouver leur bonne foi, ils avaient conclu un contrat écrit.

18) Sur demande du TAPI, les contribuables ont produit les bilans de la société pour les années 2008 à 2012.

Selon le bilan 2009, le compte courant s'élevait à CHF 63'409.90 au 31 décembre 2008 et à CHF 65'077.15 au 31 décembre 2009. Le total de l'actif était de CHF 337'475.20 et les intérêts sur comptes courants de CHF 1'587.25. La valeur de rendement des immeubles correspondait à CHF 1'423'000.- au 31 décembre 2009.

Il ressort du bilan 2010 que le compte courant s'élevait à CHF 117'935.10 au 31 décembre 2010, les actifs étaient de CHF 400'078.85 et les intérêts sur comptes courants de CHF 2'595.15 au 31 décembre 2010. La valeur de rendement des immeubles correspondait à CHF 1'423'000.-.

19) Par jugement du 4 décembre 2014, le TAPI a admis le recours des contribuables et annulé les décisions entreprises et les bordereaux du 30 novembre 2012.

Aucun indice tangible ne permettait de conclure à l'existence d'une volonté initiale ou postérieure des parties de ne pas rembourser ce prêt.

L'AFC n'étant pas parvenue à démontrer la réalité d'un prêt simulé, il ne pouvait être retenu que le contribuable avait bénéficié à ce titre d'un revenu imposable en 2009 et 2010.

20) Le 15 janvier 2015, l'AFC a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement susmentionné, concluant à son annulation et à la confirmation de ses propres décisions du 17 décembre 2013.

Le TAPI avait omis de procéder à l'examen de la situation financière du contribuable. Leurs revenus bruts s'élevaient en 2009 et 2010 respectivement à CHF 87'828.- et CHF 86'351.- et ils ne possédaient pas de fortune nette imposable. Après déduction des charges, le revenu disponible était inférieur au montant annuel théorique à rembourser. L'origine des fonds destinés à l'amortissement du prêt n'avait pas été clairement établie. Ainsi, la solvabilité et la capacité de remboursement de l'emprunteur devaient être considérées comme nulles ou insuffisantes.

Le versement des intérêts n'avait pas été démontré par pièces et il était par conséquent raisonnable de retenir que ceux-ci avaient été uniquement comptabilisés.

Un tiers, dans une situation identique à celle de l'actionnaire unique, n'aurait jamais obtenu le même prêt de la société.

D'autres éléments permettaient de confirmer que le prêt constituait une prestation appréciable en argent :

- le débiteur du prêt était actionnaire de la société ;

- le but statutaire ne consistait pas à emprunter ou prêter des fonds à des tiers ;

- le montant du prêt en fin d'exercice était supérieur ou égal à CHF 20'000.- et à 20% du total des actifs ;

- les garanties étaient nulles ou insuffisantes ;

- le plan de remboursement du prêt était inexistant ou insuffisant ou non communiqué.

Enfin, pour les années 2009 et 2010, la solution retenue par le TAPI créait une divergence entre les taxations de la personne morale et celles de l'actionnaire, ayant pour conséquence que tant le prêt que les intérêts n'étaient fiscalement pas appréhendés.

21) Le TAPI a transmis son dossier sans formuler d'observations.

22) Le 19 février 2015, les contribuables ont conclu implicitement au rejet du recours et à ce que l'AFC soit condamnée au paiement de CHF 10'000.- à titre d'honoraires de son mandataire.

Le prêt ne devait pas être comparé uniquement aux actifs comptables de la société anonyme, les réserves latentes devaient également être prises en compte.

Le montant de l'emprunt représentait 4,50 % de la valeur fiscale de la société et 2,50 % de la valeur de l'immeuble dont elle était propriétaire, si bien qu'il ne pouvait être constaté qu'elle s'était appauvrie anormalement.

À tous les stades de la procédure, les pièces démontrant qu'il ne s'agissait pas d'un prêt simulé avaient été fournies, si bien qu'il appartenait à l'AFC de démontrer que le contrat de prêt était de complaisance.

23) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Les questions de droit matériel sont résolues par le droit en vigueur au cours des périodes fiscales litigieuses (arrêts du Tribunal fédéral 2C_835/2012 du 1er avril 2013 consid. 8 ; 2A.568/1998 du 31 janvier 2000 ; ATA/780/2013 du 26 novembre 2013 consid. 2 et les références citées), sous réserve de l'amende pour laquelle s'applique le principe de la lex mitior.

De même, les prétentions découlant du rappel d'impôt sont régies par le droit en vigueur au cours des périodes fiscales en cause (arrêts du Tribunal fédéral 2C_662/2014 du 25 avril 2015 consid. 4 ; 2A.568/1998 du 31 janvier 2000 consid. 2.1 ; ATA/342/2015 du 14 avril 2015 consid. 5a ; ATA/790/2013 du 3 décembre 2013 consid. 2 ; ATA/505/2008 du 30 septembre 2008 consid. 3 ; ATA/93/2005 du 1er mars 2005 consid. 3d et les références citées).

En l'espèce, l'IFD est soumis à la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11), entrée en vigueur le 1er janvier 1995.

Quant à l'ICC, le 1er janvier 2010 est entrée en vigueur la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), dont l'art. 69 abroge les cinq anciennes lois sur l'imposition des personnes physiques - Impôt sur le revenu (revenu imposable ; aLIPP-IV - D 3 14). L'art. 72 al. 1 LIPP prévoit que cette loi s'applique pour la première fois pour les impôts de la période fiscale 2010 et que les impôts relatifs aux périodes fiscales antérieures demeurent régis par les dispositions de l'ancien droit, même après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi.

Le recours concerne les périodes fiscales 2009 et 2010 si bien que le droit cantonal dans sa teneur à cette date est applicable pour l'année 2009 (aLIPP-IV), la LIPP pour l'année 2010.

3) L'objet du litige porte sur la reprise dans le revenu imposable IFD et ICC 2009-2010 des contribuables des montants de CHF 65'077.- et CHF 52'858.- au titre d'avantage appréciable en argent, ainsi que des intérêts y relatifs. Il convient par conséquent de déterminer si les contribuables ont bénéficié d'un tel avantage, sous forme de prêt simulé, comme le soutient la recourante.

4) a. L'impôt sur le revenu a pour objet tous les revenus du contribuable, qu'ils soient uniques ou périodiques (art. 16 al. 1 LIFD ; art. 17 LIPP).

b. Tout revenu que la loi n'exclut pas expressément du champ d'application de la LIFD et de la LIPP est considéré comme faisant partie du revenu imposable. Celui-ci comprend l'ensemble des revenus du contribuable, quelle qu'en soit leur nature ou leur forme. L'impôt frappe le revenu global (ATA/342/2015 précité consid. 6b ; ATA/682/2014 du 26 août 2014 consid. 3b ; ATA/503/2009 du 6 octobre 2009 ; ATA/110/2009 du 3 mars 2009).

c. Si la notion de revenu n'est pas définie précisément par la loi, la jurisprudence et la doctrine suisses retiennent en principe comme déterminante la théorie de l'accroissement net du patrimoine (ATF 125 II 113 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_766/2010 du 29 juillet 2011 consid. 2.1 ; ATA/682/2014 du 26 août 2014 consid. 3c ; ATA/714/2012 du 30 octobre 2012 consid. 6b), c'est-à-dire une conception extensive de la notion de revenu (ATA/167/2012 du 27 mars 2012 consid. 7). Selon celle-ci, le revenu acquis par un contribuable se compose de tout accroissement de son patrimoine constaté au cours de la période fiscale considérée, ce qui peut provenir tant d'une augmentation des actifs que d'une diminution des passifs (ATA/342/2015 précité consid. 6c ; ATA/682/2014 du 26 août 2014 consid. 3c).

5) a. Selon les art. 20 al. 1 let. c LIFD, 6 al. 1 let. c aLIPP-IV et 22 al. 1 let. c LIPP, est imposable le rendement de la fortune mobilière, en particulier les dividendes, les parts de bénéfice, les excédents de liquidation et tous autres avantages appréciables en argent provenant de participations de tout genre.

b. Selon le Tribunal fédéral, font partie des avantages appréciables en argent au sens de l'art. 20 al. 1 let. c LIFD, les distributions dissimulées de bénéfice (art. 58 al. 1 let. b LIFD), soit des attributions de la société aux détenteurs de parts auxquelles ne correspond aucune contre-prestation ou une contre-prestation insuffisante et qui ne seraient pas effectuées ou dans une moindre mesure en faveur d'un tiers non participant (ATF 138 II 57 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_605/2014 et 2C_606/2014 du 25 février 2015 consid. 6 ; 2C_1023/2013 du 8 juillet 2014 consid. 3.4.1 ; 2C_644/2013 du 21 octobre 2013 consid. 3.1 ; ATA/594/2015 du 9 juin 2015 consid. 6b). Sont ainsi imposables, à titre de revenus, les prestations appréciables en argent, à savoir les avantages accordés par la société aux actionnaires ou à leurs proches sans contre-prestation et qui ne s'expliquent qu'en raison du rapport de participations, dès lors que la société ne les aurait pas faites, dans les mêmes circonstances, à des tiers non participants (ATF 119 Ib 116 consid. 2 ; ATA/780/2013 du 26 novembre 2013 consid. 5 ; Xavier OBERSON, Droit fiscal suisse, 4ème éd., 2012, p. 138 n. 139). En raison du contenu similaire de l'art. 20 al. 1 let. c LIFD et de l'art. 22 al. 1 let. c LIPP, cette jurisprudence peut également s'appliquer à l'ICC, dans la mesure où le droit cantonal genevois comporte, à l'art. 12 de la loi sur l'imposition des personnes morales du 23 septembre 1994 (LIPM - D 3 15) en particulier en sa let. h, une disposition équivalente à l'art. 58 al. 1 let. b LIFD (ATA/594/2015 précité consid. 6b).

De jurisprudence constante, il y a un avantage appréciable en argent si 1) la société fait une prestation sans obtenir de contre-prestation correspondante ; 2) cette prestation est accordée à un actionnaire ou à une personne le ou la touchant de près ; 3) elle n'aurait pas été accordée à de telles conditions à un tiers ; 4) la disproportion entre la prestation et la contre-prestation est manifeste, de telle sorte que les organes de la société savaient ou auraient pu se rendre compte de l'avantage qu'ils accordaient (ATF 140 II 88 consid. 4.1 ; 138 II 57 consid. 2.2 ; 131 II 593 consid. 5.1 ; 119 Ib 116 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1082/2013 du 14 janvier 2015 consid. 4.2 ; 2C_589/2013 et 2C_590/2013 du 17 janvier 2014 consid. 7.2). L'évaluation de la prestation se mesure par comparaison avec une transaction qui aurait été effectuée entre parties non liées et en tenant compte de toutes les circonstances concrètes du cas d'espèce (principe du « dealing at arm's length » ; ATF 140 II 88 consid. 4.1 ; 138 II 545 consid. 3.2 ; 138 II 57 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_927/2013 du 21 mai 2014 consid. 5.1).

c. Le Tribunal fédéral a développé un certain nombre de critères dont la réalisation permet de conclure au fait qu'un prêt à l'actionnaire constitue une prestation appréciable en argent. C'est notamment le cas lorsque le prêt octroyé par la société n'est pas couvert par le but social ou qu'il s'avère inhabituel dans la structure globale du bilan (autrement dit, lorsque le prêt ne peut pas être couvert par les moyens existants de la société ou qu'il apparaît excessivement élevé en comparaison avec les autres actifs et qu'il génère ainsi un gros risque), ensuite, en cas de doutes sérieux sur la solvabilité du débiteur ou lorsqu'aucune garantie n'est prévue et qu'il n'existe aucune obligation de remboursement, que les intérêts ne sont pas payés, mais qu'ils sont portés constamment en augmentation du compte d'emprunt et qu'il n'existe pas de convention écrite (ATF 138 II 57 consid. 3.2).

6) En matière de prêt simulé, les critères pour apprécier si des prêts à l'actionnaire équivalent à des prestations appréciables en argent ne peuvent pas être appliqués sans autre, cette question étant plus étroite que le problème général des prêts à l'actionnaire. Il ne suffit dès lors pas de mettre en évidence que le prêt en question n'aurait pas été octroyé entre tiers qui ne seraient pas proches ou alors seulement à d'autres conditions, mais il faut aussi démontrer que, sur la base de la relation particulière entre les proches, on ne peut pas (plus) compter sérieusement sur un remboursement de l'emprunt (ATF 138 II 57 consid. 5).

Par conséquent, à teneur de la jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 138 II 57 consid. 5.1 à 5.3), les critères susmentionnés revêtent une importance différente.

- À elle seule, l'absence d'une convention écrite ne s'avère que peu concluante, puisqu'elle peut reposer sur d'autres raisons qu'une intention de simulation. Il est plus parlant que le prêt ne figure au bilan ni de la créancière ni du débiteur et que l'emprunteur ne revendique aucune déduction d'intérêts passifs auprès des autorités fiscales. Une telle manière d'agir peut signifier que les intéressés eux-mêmes partent de la non-existence (comptable) de l'emprunt.

- Le fait que le but statutaire de la prêteuse ne comprenne pas l'octroi de crédits ne permet pas non plus de conclure nécessairement à une simulation.

- Pareillement, il y a lieu d'effectuer une distinction en rapport avec les situations de fortune respectives du prêteur et de l'emprunteur : ainsi, il peut bien paraître très insolite en comparaison avec des tiers que l'attribution effectuée atteigne une hauteur inhabituelle ; cela peut se produire dans la mesure où le prêt constitue le seul actif notable de la société ou qu'il dépasse le capital propre existant. Tout cela ne permet cependant pas encore de tirer la conclusion qu'il ne faut pas compter avec un remboursement du prêt. Le fait doit en tout cas être apprécié différemment si le prêteur n'est certainement pas en mesure d'octroyer des prêts au moyen de ses propres ressources, mais qu'il doit lui-même se procurer ces moyens auprès d'un tiers. Les conditions pour reconnaître une simulation sont seulement clairement remplies lorsque le débiteur de l'emprunt se trouve dans des circonstances financières extrêmement serrées et qu'il ne lui est pas possible de satisfaire dans la durée, par ses propres moyens, aux obligations résultant de l'emprunt (paiement de l'intérêt et de l'amortissement, par exemple dans un excédent de passifs de plusieurs millions de francs).

7) En ce qui concerne les prestations appréciables en argent faites par la société, sans contre-prestation, à ses actionnaires, c'est en principe à l'autorité fiscale qu'il appartient de les prouver. Le contribuable n'a donc pas à supporter les conséquences d'un manque de preuves, à moins qu'on ne puisse lui reprocher une violation de ses devoirs de collaboration (ATF 138 II 57 consid. 7.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_589/2013 et 2C_590/2013 du 17 janvier 2014 consid. 7.2 ; 2C_76/2009 du 23 juillet 2009 consid. 2.2 ; ATA/594/2015 précité consid. 6d ; ATA/780/2013 du 26 novembre 2013 consid. 6a).

8) En l'espèce, il ressort du dossier que le contribuable est actionnaire unique ainsi qu'administrateur-président de la société et qu'il a bénéficié d'un prêt de la part de celle-ci.

Selon ses explications, il existait depuis longtemps un compte courant actionnaire qu'il remboursait régulièrement. Les intérêts étaient dûment calculés et comptabilisés, en fin d'année, dans les comptes de la société.

La lecture du bilan 2009 permet en effet de constater qu'il existait en 2008 déjà un compte courant, portant intérêts, ceux-ci étant comptabilisés. Le montant du prêt était de CHF 63'409.90 au 31 décembre 2008.

De 2008 à 2012, le solde de ce compte a augmenté puis diminué. En effet, conformément aux pièces produites, le contribuable a procédé à deux remboursements en 2011, soit CHF 30'000.- le 30 juin et CHF 5'000.- le 30 novembre.

Il a ainsi amorti sa dette d'un montant non négligeable, avant même d'être informé par la recourante, le 30 octobre 2012, de l'ouverture à son encontre d'une procédure en rappel et soustraction d'impôt.

Il apparaît ainsi que la volonté initiale du contribuable était de rembourser sa dette, intention qui n'apparaît pas avoir changé par la suite puisque le prêt a encore été amorti.

Selon la jurisprudence, le fait que le but statutaire de la prêteuse ne comprenne pas l'octroi de crédits, ne permet pas de conclure nécessairement à une simulation. De même, l'absence d'une convention écrite ne s'avère que peu concluante, puisqu'elle peut reposer sur d'autres raisons qu'une intention de simulation. Cependant, les parties se sont par la suite conformées aux critiques émanant de la recourante en concluant un contrat de prêt en décembre 2012.

La recourante semble avoir ainsi ignoré des éléments pertinents dans l'analyse faite de la situation. Elle n'a pas tenu compte du fait que la dette était dûment mentionnée dans les bilans de la société, ainsi que dans les déclarations fiscales des contribuables. Elle a ignoré les garanties prévues par le contrat de prêt, et n'a pas tenu compte, en déterminant la solvabilité de l'emprunteur, du fait que le remboursement s'échelonnait sur dix ans et qu'une partie de la dette avait déjà été amortie.

Le prêt n'était ainsi pas particulièrement risqué pour la société, le montant de ce dernier étant d'ailleurs largement couvert par les actifs de celle-ci.

La situation financière du contribuable ne saurait prêter le flanc à la critique. Propriétaire d'un appartement, il a offert à la société, en garantie du prêt, une priorité d'achat sur ce bien immobilier, dont la valeur, après déduction de la dette hypothécaire, couvre largement l'emprunt. De plus, et contrairement à ce que soutient la recourante, il n'apparaît pas invraisemblable, au vu des montants concernés, que les contribuables aient pu constituer de l'épargne et garder cet argent chez eux.

Enfin, ces derniers ont expliqué que les intérêts n'étaient pas payés mais portés chaque année en augmentation du compte d'emprunt, si bien qu'il n'était pas pertinent d'apporter la preuve de ces paiements. Bien que ce procédé puisse constituer un indice en faveur de l'existence d'un prêt simulé, il n'est pas à lui seul suffisant pour le démontrer, en particulier dans le cas d'espèce. Les contribuables n'ont pas tenté de le dissimuler et la dette a été régulièrement amortie.

La recourante, à qui il appartient de prouver l'existence d'un prêt simulé, n'a ainsi pas réussi à le démontrer.

Pour ces motifs, il ne peut pas être retenu que le prêt litigieux serait constitutif d'un avantage appréciable en argent devant être pris en compte dans le calcul du revenu.

Par conséquent, le recours sera rejeté.

9) Vu l'issue de la procédure, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA).

Une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée aux contribuables, à la charge de l'État de Genève (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 janvier 2015 par l'administration fiscale cantonale contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 4 décembre 2014 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue une indemnité de CHF 1'500.- à Madame et Monsieur A______, à la charge de l'État de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à l'administration fiscale cantonale, à Swiss Audit & Fiduciary Services SA, mandataire des époux A______, à l'administration fédérale des contributions, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Junod et M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Rodriguez Ellwanger

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :