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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/844/2019

ATA/879/2019 du 13.05.2019 ( FORMA ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/844/2019-FORMA

" ATA/879/2019

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 13 mai 2019

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

Monsieur A_______
représenté par Me Amin Ben Khalifa, avocat

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE

 



Attendu en fait que :

1. Monsieur A_______ est inscrit à la Faculté de médecine (ci-après : la faculté) de l’Université de Genève (ci-après : l’université) depuis l’année académique 2015-2016 en vue de l’obtention d'une maîtrise universitaire en médecine humaine (ci-après : la maîtrise).

2. M. A_______ a obtenu la note de 3,75 lors de sa troisième et ultime tentative à l’examen d’apprentissage en milieu clinique (ci-après : AMC ou l’examen) de pédiatrie lors de la session d’avril-mai 2018.

3. Par décision du 7 juin 2018, le doyen de la faculté a prononcé l’élimination de M. A_______ au motif qu’il avait échoué définitivement à l’examen.

4. Par décision du 1er février 2019, le doyen de la faculté a rejeté l’opposition contre le relevé de notes de la session d’avril-mai 2018 et la décision d’élimination du 7 juin 2018. Il s’appuyait sur le préavis de la commission d’opposition pour les études en faculté de médecine. La décision sur opposition était exécutoire nonobstant recours.

5. Par acte du 1er mars 2019, M. A_______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Il a conclu à la réussite de la session d’examen d’avril-mai 2018 et à sa réintégration dans la faculté. L’effet suspensif devait être restitué afin qu’il puisse continuer son cursus dans l’attente d’une décision finale. Son droit d’être entendu et celui à une procédure équitable avaient été violés. Il y avait de considérables différences entre la version d’examen AMC de la pédiatrie sur papier imprimé, qu’il avait pu consulter, et le rapport développé postérieurement à son opposition par l’autorité intimée, basée sur une interview collective des examinateurs. La décision était arbitraire et violait le principe d’égalité de traitement. Postérieurement à l’examen, la faculté avait supprimé des questions auxquelles il avait répondu correctement. Cette décision de suppression aurait été prise en raison du faible nombre d’étudiants (23 %) qui avait donné la bonne réponse. Pour le surplus, les faits avaient été constatés de façon inexacte et la décision violait le principe de la proportionnalité. Il avait terminé les cours du master en médecine humaine, validé tous ses stages de quatrième et cinquième année avec une partie de la sixième année, validé son mémoire et réussi tous les examens qu’il avait pu passer sauf l’AMC de pédiatrie. La faculté avait négligé le contexte social qui était le sien, particulièrement difficile pendant cette année. Il sollicitait diverses mesures d’instruction.

6. L’université a conclu au rejet de la requête de restitution d’effet suspensif. Elle contestait tous les griefs. Le recourant avait répondu de façon erronée à la question n° 28 qui avait été supprimée. Le contexte social du recourant n'avait jamais été évoqué auparavant. Il était forclos à s'en prévaloir.

Cette procédure s'inscrivait dans un contexte de différents litiges, à la suite d'oppositions de l'intéressé, respectivement les 3 mars 2016 – devenue sans objet –, 12 avril 2017 – rejetée –, et 28 mars 2019 à l'encontre d'une décision de constat d'échec, pour avoir obtenu un zéro à son travail de mémoire de maîtrise universitaire d'études avancées en santé publique dispensé par la faculté que le recourant suivait en parallèle depuis l'automne 2013.

7. Dans sa réplique, le recourant a insisté sur le retard considérable sur le programme d’étude qu’il risquait d’accumuler si l’effet suspensif n’était pas restitué. Il fallait tenir compte des circonstances exceptionnelles du cas d’espèce, notamment dues au fait que le recourant avait été sans domicile fixe, devant même dormir dans la rue la même année que celle de ses examens de deuxième et troisième année, y compris de ses cours finaux ainsi que de ses stages. Aucun intérêt public ne justifiait in casu qu’il soit immédiatement déscolarisé. L’échec ne tenait qu’à deux points, lesquels auraient pu être obtenus si des questions n’avaient pas été supprimées. Le cas présentait des circonstances exceptionnelles.

8. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif.

 

Considérant en droit que :

1. Aux termes de l'art. 21 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) - loi applicable par renvoi des art. 35 et 37 du règlement relatif à la procédure d’opposition au sein de l’université du 16 mars 2009 (RIO-UNIGE) -, l’autorité peut d’office ou sur requête ordonner des mesures provisionnelles en exigeant au besoin des sûretés (al. 1) ; ces mesures sont ordonnées par le président s’il s’agit d’une autorité collégiale ou d’une juridiction administrative (al. 2 ; art. 9 al. 1 du règlement de la chambre administrative du 26 septembre 2017).

2. En vertu de l'art. 66 LPA, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1) ; toutefois, lorsqu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3).

3. Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles – au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif (Philippe WEISSENBERGER/Astrid HIRZEL, Der Suspensiveffekt und andere vorsorgliche Massnahmen, in Isabelle HÄNER/Bernhard WALDMANN [éd.], Brennpunkte im Verwaltungsprozess, 2013, 61-85, p. 63) – ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/955/2016 du 9 novembre 2016 consid. 4 ; ATA/1244/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2 ; ATA/1110/2015 du 16 octobre 2015 consid. 3). Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités).

Ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, 265).

4. Au regard des principes rappelés plus haut et conformément à la jurisprudence constante de la chambre de céans, admettre en l’espèce la restitution de l’effet suspensif aurait pour effet que le recourant serait encore étudiant de la faculté et qu’il serait fait droit, de manière provisoire, aux conclusions de celui-ci sur le fond, ce qui est en principe prohibé (ATA/448/2016 du 31 mai 2016 consid. 4 ; ATA/156/2015 du 9 février 2015 consid. 3). Il n’y a en l’occurrence aucune circonstance particulière qui justifierait une exception à cette règle (ATA/367/2018 du 18 avril 2018 consid. 6), le recourant n'ayant, à première vue, invoqué sa situation personnelle que tardivement.

L’intimé fait pour le reste valoir un intérêt public – légitime – à ce qu’elle n’accueille que des étudiants ayant rempli les critères académiques de sélection (ATA/367/2018 précité consid. 6 ; ATA/263/2018 du 20 mars 2018 consid. 7 ; ATA/74/2015 du 20 janvier 2015 consid. 4). Cet intérêt prime l’intérêt privé du recourant à continuer de bénéficier du statut d’étudiant pour suivre des cours de la faculté alors qu’il n’en remplit plus les conditions selon l’université, ce d'autant plus que les chances de succès du recours n'apparaissent, prima facie, pas suffisantes pour contrebalancer cet intérêt.

5. La restitution de l'effet suspensif sera donc refusée, le sort des frais de la procédure étant réservé jusqu'à droit jugé au fond.

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

refuse de restituer l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s’il porte sur le résultat d’examens ou d’autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d’exercice d’une profession ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision à Me Amin Ben Khalifa, avocat du recourant, ainsi qu'à l'Université de Genève.

 

 

 

 

 

La vice-présidente :

 

 

 

F. Krauskopf

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :