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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/65/2022

ATA/833/2022 du 23.08.2022 ( PATIEN ) , REJETE

Recours TF déposé le 19.09.2022, rendu le 13.12.2022, REJETE, 2C_759/2022, P 79/21
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/65/2022-PATIEN ATA/833/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 août 2022

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

 

COMMISSION DE SURVEILLANCE DES PROFESSIONS DE LA SANTÉ ET DES DROITS DES PATIENTS

et

Madame B______

 



EN FAIT

1) Le 17 novembre 2021, Madame A______ a saisi la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients
(ci-après : la commission) d’une « plainte pour diffamation » à l’encontre de la Doctoresse B______, spécialiste en médecine interne générale, au sein du Centre F______ à Genève.

Elle l’avait consultée à trois reprises soit les 21 et 29 juin ainsi que le 16 août 2021, après avoir dû changer de médecin traitant. Lors du premier rendez-vous, elle avait notamment parlé à la Dresse B______ du stress vécu suite à des événements qui avaient durablement marqué sa vie, soit l’enlèvement de ses deux filles par leur père en 1973 et les cambriolages intrusifs quotidiens, parfois plusieurs fois par jour, dont elle était victime depuis 1973.

Lors de la troisième consultation, elle avait indiqué à la Dresse B______ que les intrusions criminelles chez elle perduraient. La précitée, « apparemment sous pression », avait alors rédigé « nerveusement » deux courriers électroniques à ses confrères, les Docteurs C______, gastroentérologue, et D______, cardiologue. Dans son message au Dr D______, elle avait indiqué, s’agissant de ces antécédents, « stress sur histoire criminelle vs trouble hallucinatoire mentionné par patiente ». Le message envoyé au Dr C______ ne contenait pas cette remarque « abusive et diffamatoire ».

En transgressant de cette manière ses compétences médicales, la Dresse B______ avait non seulement gravement agi contre l’intérêt de sa patiente, mais encore contre ses devoirs de médecin et l’éthique de sa profession.

Étaient jointes plusieurs pièces, dont notamment :

-                 un courrier adressé par la Dresse B______ au Dr D______ le 16 août 2021 ;

-                 un courrier de la Dresse B______ à Mme A______ du 14 octobre 2021 mettant un terme à son mandat ; 

-                 plusieurs courriels et courriers adressés par Mme A______ à la Dresse B______ en date des 14, 18 et 20 octobre,
1er, 3 et 11 novembre 2021 dans laquelle celle-ci sollicitait notamment des explications quant à l’indication « stress sur histoire criminelle vs trouble hallucinatoire mentionné par patiente » et à la résiliation du mandat.

2) Le 19 novembre 2021, la commission a accusé réception de la plainte et a informé Mme A______ que celle-ci serait prochainement soumise au bureau de la commission (ci-après : le bureau) pour examen préalable.

3) Par décision du 15 décembre 2021, la commission a informé
Mme A______ du classement immédiat de sa plainte.

Après examen des pièces produites, le bureau observait que la
Dresse B______ avait émis un diagnostic différentiel à l’attention de son confrère, dans le but de le mener à procéder à des investigations appropriées. Ledit diagnostic se fondait sur les informations qu’elle avait elle-même fournies à la Dresse B______.

L’établissement d’un diagnostic différentiel faisait partie intégrante du raisonnement clinique et en constituait une part importante. Aussi, ses griefs n’apparaissaient pas suffisamment fondés pour justifier l’ouverture d’une procédure disciplinaire.

Enfin, la commission n’était pas compétente pour se déterminer sur son accusation de diffamation de la part de la médecin précitée, celle-ci étant du ressort des autorités pénales.

4) Par acte mis à la poste le 10 janvier 2022, Mme A______ a interjeté recours contre la décision précitée par-devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), en indiquant qu’elle n’acceptait pas celle-ci.

Le 29 novembre 2021, elle avait reçu une copie de son dossier médical constitué par la Dresse B______. Elle avait fait part à cette dernière, par courrier du 7 décembre 2021, de ses commentaires relatifs à son dossier. Il ressortait dudit dossier que la Dresse B______ avait noté, à la date du 21 juin 2021, « discussion sur ses propos qu’on lui aurait dit que c’est des hallucinations, intrusions chez elle, meubles abîmés par ex., a porté plainte mais classée via étude E______ ». Or, ces propos étaient incorrectement retranscrits, comme l’étaient d’autres notes du dossier. Contrairement à ce qu’avait indiqué la Dresse B______, elle n’avait jamais dit que les médecins avaient parlé d’hallucinations mais qu’incrédules face à de tels faits criminels, ils ne l’avaient pas crue et avaient pris ses propos pour des hallucinations.

Elle avait déjà porté plainte contre trois médecins par-devant le Ministère public de la Confédération pour des diagnostics et des procédés qu’elle jugeait inadmissibles et dommageables. Elle avait formé des plaintes à Genève contre les cambriolages intrusifs dont elle était victime, lesquelles avaient été classées.

S’agissant du courriel adressé le 16 août 2021 par la Dresse B______ au Dr D______, elle se demandait pour quel motif elle n’y avait pas simplement indiqué « stress sur histoire criminelle », dès lors que cela aurait suffi à renseigner son confrère, et avait mentionné des troubles hallucinatoires, alors que ce n’était pas nécessaire. Un diagnostic différentiel devait être clairement réfléchi et non pas « noté sur un coup émotionnel ». La tournure de phrase utilisée par la Dresse B______ signifiait qu’elle avait halluciné, ce qui était diffamatoire. Elle n’avait ainsi pas le droit de renseigner son confrère de la sorte et ne l’avait d’ailleurs pas fait dans son courriel au Dr C______. Il ne s’agissait ainsi pas d’un diagnostic différentiel, mais d’une notation formulée au détriment de la patiente, écrite à la hâte et sans nécessité ni droit à un confrère. En posant un diagnostic réservé aux médecins psychiatres, la Dresse B______ l’avait diffamée et avait abusé « des compétences de son champ matériel ».

La Dresse B______ n’avait par ailleurs jamais répondu à ses demandes d’explications formulées en lien avec son dossier médical.

La commission s’estimait incompétente pour se déterminer sur l’accusation de diffamation. Or, elle était un organe de l’État apte à prononcer une sanction lors d’un comportement incorrect de la part d’un médecin.

5) Par courriers des 19 et 31 janvier 2022, la recourante a encore transmis différents documents, dont notamment :

-                 un courrier de la Dresse B______ du 10 novembre 2021 dans lequel cette dernière affirmait n’avoir jamais eu la volonté de lui nuire mais acceptait, à bien plaire et dans un souci d’apaisement, de lui rembourser l’ensemble des frais médicaux facturés ;

-                 un courriel de la recourante du 11 novembre 2021 indiquant refuser le remboursement proposé de l’ensemble des frais médicaux.

6) Le 31 janvier 2022, la recourante a encore transmis un courrier du directeur général de la Clinique G______ daté du 18 novembre 2021.

7) Le 14 février 2022, la commission s'est rapportée à justice quant à la recevabilité du recours et a persisté dans les termes de sa décision, n'ayant pas d'observations particulières à formuler.

8) Dans ses observations du 28 janvier 2022, la Dresse B______ a conclu à la confirmation de la décision de la commission du 15 décembre 2021.

La consultation du 16 août 2021 visait à répondre aux besoins de la patiente, et à prendre en charge en particulier des facteurs de risques cardio-vasculaires non traités. Comme lors des deux précédentes consultations, le discours de la recourante était porté sur sa méfiance envers des personnes malveillantes avec une suspicion d’empoisonnement à l’arsenic et des intrusions répétitives à son domicile depuis 1973, lesquels étaient quotidiennes et toujours actuelles. Elle décrivait la disparition d’objets et de documents, des déprédations visibles et des déplacements d’objets. Elle attribuait ces actes malveillants à des intrus et à une bande de malfrats qui la poursuivaient depuis 1973. L’histoire rapportée par la patiente faisait état de nombreux et répétitifs préjudices, persécutions et injustices ayant donné lieu à de nombreuses plaintes pénales sur plusieurs décennies, qui n’avaient, selon elle, pas abouti.

À la question de savoir ce qu’en pensaient ses prédécesseurs, la recourante avait répondu qu’ils avaient attribué cela à des hallucinations. Dans ce contexte, elle lui avait demandé si elle souhaitait un soutien psychologique, ce que la recourante avait immédiatement refusé.

Dans le cadre de sa prise en charge, il avait été convenu que la patiente devait aller consulter le Dr D______. C’était dans ce contexte qu’elle avait rédigé une lettre de demande d’avis spécialisé à ce confrère, en indiquant notamment les antécédents pour permettre une compréhension des faits décrits par la patiente et une prise en charge adéquate. Il s’agissait d’une lettre et non d’un courrier électronique comme le prétendait la recourante. Elle estimait avoir transmis les informations nécessaires pour une bonne prise en charge médicale, en se basant sur les déclarations de la patiente et le « raisonnement médical » après l’avoir reçue à trois reprises.

La fin de la prise en charge de la recourante était intervenue après une accumulation de signes de méfiance de la part de la patiente et de difficultés à avancer dans sa prise en charge. La recourante lui avait demandé de modifier la date de la consultation du 16 août 2021, estimant qu’elle était fausse. Elle avait ensuite demandé au Dr C______ de modifier son rapport de consultation gastroentérologique en raison « d’erreurs ». Cette demande était toutefois injustifiée. Lorsque le Dr C______ l’avait informée de sa décision d’arrêter le suivi, elle en avait fait de même, non sans orienter la recourante vers un service compétent des HUG.

Elle estimait avoir agi selon l’éthique professionnelle, sans aucune intention de nuire à la patiente.

9) Le 26 mars 2022, la recourante a réitéré ses précédentes explications.

Elle rejetait formellement plusieurs des termes employés par la Dresse B______ dans ses observations, soit en particulier « méfiance » ; « personne malveillante », « suspicion d’empoisonnement », « préjudices, persécutions, injustices », « hallucination ». Lesdites observations la remettaient plusieurs fois en cause.

La formulation « stress sur histoire criminelle vs trouble hallucinatoire mentionné par patiente » laissait à penser à toute personne consultant son dossier médical qu’elle aurait elle-même utilisé le terme « d’hallucination », comme s’il s’agissait d’une affection mentale dont elle serait atteinte, ce qui était inacceptable. Ladite formulation portait atteinte à sa dignité et son honneur.

Le terme « d’hallucination » n’avait été employé en sa présence par aucun médecin consulté. Par contre, au vu de leur réaction, les médecins tenaient sa description des faits criminels pour des hallucinations.

10) Le 30 mars 2022, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 22 al. 1 de la loi sur la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients du 7 avril 2006 LComPS - K 3 03).

2) a. Conformément à la jurisprudence de la chambre de céans, le plaignant qui a saisi la commission en invoquant une violation de ses droits de patient peut recourir contre la décision classant sa plainte (ATA/990/2020 du 6 octobre 2020 consid. 2a ; ATA/238/2017 du 28 février 2017 consid. 1b ; ATA/558/2015 du 2 juin 2015 consid. 1b). Il ne peut en revanche pas recourir contre l'absence de sanctions prise par la commission (ATA/234/2013 du 16 avril 2013 consid. 3).

b. En l’espèce, le litige a pour objet le classement de la plainte formée par la recourante. Bien qu’elle ait indiqué à la commission vouloir former une « plainte pour diffamation », l’intéressée se plaint en réalité des agissements de la Dresse B______ à son égard, estimant notamment que cette dernière a agi contre son intérêt. Il convient dès lors d’admettre que la recourante conteste le classement de sa plainte par l’autorité intimée.

La recourante dispose donc de la qualité pour recourir, de sorte que son recours est recevable.

3) a. Aux termes de l'art. 1 LComPS, il est institué une commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients. Cette commission est chargée de veiller : au respect des prescriptions légales régissant les professions de la santé et les institutions de santé visées par la loi sur la santé du 7 avril 2006
(LS - K 1 03 ; let. a) et au respect du droit des patients (let. b).

b. La commission dispose de la compétence d'instruire, en vue d'un préavis ou d'une décision, les cas de violation des dispositions de la LS, concernant les professionnels de la santé et les institutions de santé, ainsi que les cas de violation des droits des patients (art. 3 al. 1 let. a LComPS).

c. À teneur de l'art. 9 LComPS, seul le patient ou la personne habilitée à décider des soins en son nom, qui a saisi la commission d'une plainte, le professionnel de la santé ou l'institution de santé mis en cause, ont la qualité de partie au sens de
l'art. 7 LPA dans la procédure devant la commission.

d. La commission de surveillance constitue en son sein un bureau de cinq membres, chargé de l'examen préalable des plaintes, dénonciations et dossiers dont elle s'est saisie d'office (art. 10 al. 1 LComPS).

L'art. 10 al. 2 LComPS prévoit que lorsqu'il est saisi d'une plainte, le bureau peut décider : d'un classement immédiat (let. a), de l'ouverture d'une procédure dans les cas présentant un intérêt public prépondérant justifiant une instruction par une sous-commission (let. b), dans tous les autres cas, d'un renvoi en médiation. En cas de refus ou d'échec de la médiation, le bureau ouvre une procédure (let. c).

Le bureau peut classer, sans instruction préalable et par une décision sommairement motivée, les plaintes qui sont manifestement irrecevables ou mal fondées (art. 14 LComPS).

4) a. Les principaux droits du patient sont énumérés aux art. 42 et ss LS. Il s'agit notamment du droit aux soins (art. 42 LS), du libre choix du professionnel de la santé (art. 43 LS), du libre choix de l'institution de santé (art. 44 LS), du droit d'être informé (art. 45 LS) et du choix libre et éclairé (art. 46 LS).

Selon l'art. 42 LS, le patient a droit aux soins qu'exige son état de santé à toutes les étapes de la vie, dans le respect de sa dignité et, dans la mesure du possible, dans son cadre de vie habituel. Le droit aux soins, tel qu'il est prévu à l'art. 42 LS ne saurait être compris comme conférant un droit absolument illimité à recevoir des soins. Il faut le comprendre comme le droit pour une personne, indépendamment de sa condition économique et sociale, d'accéder équitablement aux soins qu'elle demande et de recevoir les soins qui lui sont objectivement nécessaires, pour autant que ces soins soient effectivement disponibles
(MGC 2003-2004/XI A 5845 ; ATA/941/2021 du 14 septembre 2021 consid. 6 ; ATA/778/2013 du 26 novembre 2013 consid. 5).

b. Selon la jurisprudence de la chambre de céans, le droit de se faire soigner conformément aux règles de l'art médical est aujourd'hui un droit du patient. L'allégation d'une violation des règles de l'art équivaut à celle de la violation des droits du patient (ATA/355/2021 du 23 mars 2021 consid. 5b ; ATA/22/2014 du
14 janvier 2014 consid. 3). Les droits du patient sont en outre garantis par
l'art. 40 de la loi fédérale sur les professions médicales universitaires du 23 juin 2006 (LPMéd - RS 811.11 ; Dominique SPRUMONT/Jean-Marc GUINCHARD/ Deborah SCHORNO, in Ariane AYER/Ueli KIESER/Thomas POLEDNA/Dominique SPRUMONT, LPMéd, Commentaire, 2009, ad art. 40 n. 10), applicable par renvoi de l'art. 80 LS.

c. Compte tenu du fait que la commission respectivement son bureau est composée de spécialistes, mieux à même d'apprécier les questions d'ordre technique, la chambre de céans s'impose une certaine retenue (ATA/189/2021 du 23 février 2021 consid. 5c ; ATA/322/2014 du 6 mai 2014 consid. 8 ; ATA/778/2013 précité consid. 7 ; ATA/5/2013 précité ; ATA/642/2012 du
25 septembre 2012).

5) À teneur de l'art. 53 LS, le dossier médical comprend toutes les pièces concernant le patient, notamment l'anamnèse, le résultat de l'examen clinique et des analyses effectuées, l'évaluation de la situation du patient, les soins proposés et ceux effectivement prodigués, avec l'indication de l'auteur et de la date de chaque inscription.

Selon l'art. 55 LS, le patient a le droit de consulter son dossier et de s'en faire expliquer la signification. Il peut s'en faire remettre en principe gratuitement les pièces, ou les faire transmettre au professionnel de la santé de son choix (al. 1). Ce droit ne s'étend pas aux notes rédigées par le professionnel de la santé exclusivement pour son usage personnel, ni aux données concernant des tiers et protégées par le secret professionnel (al. 2).

Le traitement des données du patient, en particulier la communication de données à autrui, est régi par la législation fédérale, la législation cantonale sur la protection des données personnelles ainsi que par les dispositions spéciales de la présente loi (art. 56 al. 1 LS).

6) À titre préalable, il sera relevé, comme mentionné à juste titre par l’autorité précédente, que la commission, pas plus que la chambre de céans, ne saurait se prononcer sur l’éventuelle commission d’une infraction constitutive de diffamation au sens de l’art. 173 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), cette prérogative appartenant aux autorités pénales et non administratives.

Cela étant, la chambre de céans est compétente pour examiner si la mention litigieuse dans le courrier adressé par la Dresse B______ au Dr D______ le 16 août 2021 serait critiquable au regard du respect des droits de patient.

En l’occurrence, la recourante considère que la formulation « stress sur histoire criminelle vs trouble hallucinatoire mentionné par patiente » signifierait qu’elle avait halluciné, ce qui était diffamatoire. Elle laisserait également à penser qu’elle avait elle-même utilisé le terme « d’hallucination », comme s’il s’agissait d’une affection mentale dont elle était atteinte. Ladite mention portait ainsi atteinte à sa dignité et son honneur, et était diffamatoire. Dans le cadre de ses écritures, la recourante a expliqué que si le terme « hallucination » n’avait été employé en sa présence par aucun des médecins consultés, il apparaissait, au vu de leur réaction, qu’ils tenaient sa description des faits criminels pour des hallucinations.

De l’avis de la chambre de céans, la formulation litigieuse ne prête pas le flanc à la critique et ne contrevient pas aux droits de patiente de la recourante.

D’une part, contrairement à ce que soutient la recourante, la Dresse B______ n’y affirme pas qu’elle serait atteinte d’une affection mentale. D’autre part, l’utilisation de la mention « vs », abréviation du mot « versus » qui signifie « par opposition à », confirme effectivement, comme relevé par la commission, que la Dresse B______ a émis un diagnostic différentiel, opposant le stress lié à des affaires criminelles à celui lié à des hallucinations. La Dresse B______ n’a ainsi pas émis un diagnostic qui excéderait ses compétences de médecin interne, mais a apporté des informations à son confrère, en vue de la prise en charge de la patiente qu’elle lui a adressée pour un avis spécialisé. Il sera encore relevé que le courrier litigieux mentionnait également, à titre d’antécédents, le taux d’hématocrite de la recourante ainsi qu’une ostéopénie en 2015. Par ailleurs, il ressort des explications de la recourante qu’elle a elle-même signalé à la Dresse B______ que ses précédents médecins semblaient penser, sans l’avoir toutefois formulé à haute voix, qu’elle souffrait d’hallucinations. Cela explique ainsi que la praticienne ait utilisé ce mot. Enfin, dès lors qu’il ressort des explications de la Dresse B______ que le discours de la patiente durant les consultations s’était porté principalement sur les agissements dont elle se disait victime ce qui semble corroboré par les importantes descriptions qui ont également été apportées sur ces points par la recourante dans ses écritures devant la commission et la chambre de céans , il apparaît justifié qu’elle ait jugé utile de mentionner ces éléments à titre d’antécédents.

C’est donc à raison que la commission a considéré que la plainte était manifestement mal fondée, classant celle-ci sans instruction complémentaire.

Dans le cadre de ses écritures devant la chambre de céans, la recourante semble étendre ses griefs à l’encontre de la Dresse B______, lui reprochant par ailleurs certaines mentions dans les notes de cette dernière figurant dans son dossier médical. Cela étant, la chambre de céans ne saurait se prononcer sur des points qui n’ont pas été soulevés devant la commission et examinés – même sommairement – par celle-ci. En outre, s’il existe effectivement un droit à consulter son dossier médical et à s'en faire remettre les pièces – sous réserve des notes personnelles du médecin – au sens de l’art. 55 LS, la recourante ne saurait obtenir, à tout le moins sous l’angle des dispositions légales régissant les professions de la santé et le droit des patients, une modification des informations y figurant.

Au vu de ce qui précède, c'est donc à juste titre que le bureau de la commission a classé la plainte de la recourante. Le recours sera ainsi rejeté.

7) Un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à la Dresse B______ qui n'a pas eu recours aux services d'un avocat et n'y a pas conclu (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 janvier 2022 par Madame A______contre la décision de la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients du 15 décembre 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Madame A______ un émolument de procédure de CHF 500.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______, à la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients ainsi qu'à
Madame B______.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory,
Mme McGregor, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :