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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2738/2016

ATA/238/2017 du 28.02.2017 ( PATIEN ) , REJETE

Descripteurs : DROIT DU PATIENT; SOINS MÉDICAUX; MÉDICAMENT; DENRÉE ALIMENTAIRE; OBLIGATION DE RENSEIGNER; DEVOIR PROFESSIONNEL
Normes : LS.45.al1 ; CEDH.8 ; LS.114.al3 ; LPTh.4.al1.leta ; LDAI.3.al1 ; LS.80 ; LPMéd.40.leta ; LPMéd.40.letc
Résumé : Le médecin n'a pas commis de violation de la LS en vendant à son patient des aliments et/ou des compléments alimentaires puisque seule la vente de médicaments est interdite. La remise de produits alimentaires n'impose aucun devoir d'information de la part du médecin, ceux-ci n'étant pas susceptibles de causer des atteintes graves et durables à l'intégrité corporelle. En l'état de dossier, pas de preuve que le médecin traitant aurait commis une violation de la LS ou de la LPMéd en n'apportant pas les soins nécessaires à son patient. Le médecin a répondu de manière correcte et dans des délais acceptables à la demande de renseignements formulée par l'assurance perte de gain du patient.
En fait
En droit

république et

canton de genève

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2738/2016-PATIEN ATA/238/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 28 février 2017

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

COMMISSION DE SURVEILLANCE DES PROFESSIONS DE LA SANTE ET DES DROITS DES PATIENTS

et

Monsieur B______

 



EN FAIT

1. Le 25 avril 2013, Monsieur A______, né le ______ 1964, a formé une plainte à l'encontre du Docteur B______, spécialiste FMH en médecine interne, auprès du médecin cantonal, lequel l'a transmise à la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients (ci-après : la commission) le 26 avril 2013, pour raison de compétence.

En substance, M. A______ reprochait au Dr B______ de lui avoir vendu un produit paramédical l'ayant rendu malade, de ne pas avoir géré cette maladie de manière professionnelle, de ne pas avoir mentionné ladite maladie à son assurance perte de gain « pour se couvrir » et d'utiliser le système de soins de manière abusive.

Lors d'une consultation le 23 mars 2012, il avait reçu un certificat médical renouvelable après avoir indiqué à son médecin qu'il était déprimé et qu'il avait mal au dos. Le Dr B______ lui avait alors proposé d'entreprendre une cure d'amaigrissement avec les produits « Premium GO » de la marque Premium Diet Concept. Dès le premier jour de cette diète, il avait rencontré des problèmes urinaires, ce dont il avait informé son médecin qui lui avait conseillé de boire de l'eau et de continuer la cure. Au bout de dix jours, il avait stoppé de lui-même cette cure. Lors d'une consultation survenue le 1er mai 2012, le Dr B______ lui avait indiqué qu'il ne devait pas s'inquiéter de ses problèmes urinaires et avait renouvelé son arrêt de travail. Ce n'est que le 31 mai 2012 que son médecin avait finalement effectué des analyses de son urine. Il l'avait appelé quelques jours après pour lui annoncer qu'il souffrait d'une infection grave et lui avait prescrit des antibiotiques. Si l'antibiotique avait aidé, il n'avait pas fait disparaître tous les problèmes urinaires, ce qu'il avait indiqué à son médecin en consultation le 2 août 2012. Le Dr B______ n'avait jamais voulu admettre que ses problèmes urinaires avaient été causés par le produit vendu. Fin 2012, il avait changé de médecin. Ce dernier lui avait donné un médicament gratuitement, lequel avait résolu ses problèmes urinaires.

Le Dr B______ avait par ailleurs tardé à remplir un formulaire qui lui avait été adressé par la SWICA, son assurance perte de gain.

Au lieu de soigner ses patients, il les rendait « malades et fous ». De plus, il gonflait ses factures.

2. Par courrier du 12 août 2013, M. A______ a confirmé à la commission sa dénonciation à l’encontre du Dr B______ pour lui avoir vendu un produit lui ayant causé de graves problèmes urinaires et pour avoir attendu près de deux mois avant d'effectuer les analyses demandées en lien avec lesdits problèmes.

3. Le 12 septembre 2013, la commission a informé M. A______ qu’elle avait décidé d’ouvrir une procédure administrative à l’encontre du Dr B______ et de renvoyer le dossier à une sous-commission pour instruction.

4. Le même jour, le Dr B______ a été informé de l'ouverture d'une instruction suite à la plainte formée à son encontre et a été invité à se déterminer.

5. Par courrier du 30 septembre 2013, le Dr B______ a transmis ses observations.

Il avait suivi M. A______ entre le 17 décembre 1999 et le 29 novembre 2012, date à laquelle il avait mis fin à la relation thérapeutique, ce dernier devenant de plus en plus violent verbalement avec son assistante, les harcelant au téléphone et se présentant parfois sans rendez-vous. Ce patient avait présenté de grosses difficultés psychologiques, avec de l'anxiété et des troubles du sommeil, en raison de son passé (arrivé en Suisse suite à la guerre en Irak).

M. A______ l'avait consulté le 29 mars 2012 pour des lombalgies invalidantes, raison pour laquelle il lui avait remis un certificat d'incapacité de travail totale. À cette occasion, il lui avait indiqué souhaiter perdre du poids et être intéressé par les produits Premium Health Concept (ci-après : PHC) dont il avait vu les affiches dans la salle d'attente. Il avait été convenu d'en rediscuter à son prochain rendez-vous. Le 1er mai 2012, il avait renouvelé le certificat d'incapacité de travail de M. A______ et avait discuté avec lui des modalités pratiques du régime PHC, insistant sur le fait que les premiers jours de celui-ci pouvaient être difficiles en raison de la sensation de faim. Le 3 mai 2012, M. A______ l'avait appelé pour lui faire part des difficultés de ce régime. Il l'avait alors encouragé et son patient ne l'avait plus rappelé. Lors d'une consultation le 31 mai 2012,
M. A______ l'avait informé qu'il avait arrêté le régime après une semaine. Il lui avait également fait part de nycturie et de difficultés mictionnelles, raison pour laquelle une culture complète d'urine avait été effectuée. Cette dernière avait révélé une infection urinaire basse non compliquée pour laquelle une ordonnance avait été envoyée au patient. Il n'y avait aucun lien entre celle-ci et les produits PHC. Une nouvelle culture d'urine avait été faite le 3 juillet 2012 à la demande du patient, laquelle s'était avérée négative. Le 6 juillet 2012, il avait transmis à
M. A______ les coordonnés du Docteur C______, urologue, et avait adressé par fax à ce dernier les résultats des deux cultures d'urine. Il avait également remis un arrêt de travail à son patient, fixant la reprise au 2 août 2012. M. A______ avait tenté d'obtenir une prolongation de son arrêt de travail, invoquant ses problèmes urinaires, ce qu'il avait refusé car lesdits problèmes ne justifiaient pas un arrêt de travail. Son cabinet médical avait par la suite été fermé du 25 juillet au 21 août 2012. À son retour, il avait pris connaissance d'une demande de rapport médical de la SWICA auquel il avait répondu le 24 août 2012. Un courrier de rappel de la SWICA du 29 août 2012 s'était croisé avec son propre courrier. Le 29 novembre 2012, il avait répondu à une seconde demande de rapport médical de la SWICA datée du 21 novembre 2012. Suite au refus de la SWICA de prendre en charge l'incapacité résultant de douleurs lombaires, M. A______ lui avait demandé, à de très nombreuses reprises, de modifier son rapport médical afin d'indiquer que l'incapacité de travail était consécutive aux problèmes urinaires. Il avait refusé car cela ne correspondait pas à la réalité. Entre août et novembre 2012, chaque appel de M. A______ avait pour but de le faire changer de diagnostic. Le patient était devenu de plus en plus menaçant, raison pour laquelle il avait mis un terme à leur relation thérapeutique.

6. Le 7 novembre 2013, le Dr B______ a transmis à la commission le dossier médical de M. A______, à l'exception des documents qui avaient été remis à ce dernier le 29 novembre 2012, soit en particulier les rapports médicaux reçus de la part de confrères spécialistes, ainsi qu'un duplicata des ordonnances médicales prescrites au patient entre 2011 et 2012.

7. Par courrier du 25 novembre 2013, M. A______ a transmis à la commission son dossier médical, précisant qu'il manquait un rapport que les hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) avaient envoyé au Dr. B______ après son opération et stipulant qu'il n'avait pas confiance en ledit médecin.

8. Par courrier du 28 novembre 2013, le Dr. B______ a persisté dans ses observations. Il avait répondu de manière rapide aux demandes de rapports médicaux de la SWICA, hormis pour celle reçue pendant qu'il était en vacances.

9. Par courrier du 4 décembre 2013, le Dr B______ a confirmé que tous les documents concernant le dossier médical de M. A______ avaient été transmis à la commission, à l'exception de ses notes personnelles.

10. Par courrier du 20 février 2014, la commission a invité le Dr B______ à lui remettre ses éventuelles notes de suite concernant M. A______, ce que ce dernier a fait le 10 mars 2014.

11. Le 11 mars 2014, la commission a informé M. A______ qu'il pouvait venir prendre connaissance des notes de suite transmises par le Dr. B______.

12. Par courrier du 22 mai 2014, M. A______ a indiqué qu'il n'était pas venu prendre connaissance des notes de suite du Dr. B______ car il lui était impossible de comprendre le jargon médical utilisé dans ce type de notes. Il doutait toutefois de l'existence préalable de ces notes dans la mesure où il n'avait jamais vu son médecin en prendre durant les consultations. Le Dr. B______ avait ainsi pu en rédiger à posteriori, en se basant sur la date des factures. Il se demandait par ailleurs pourquoi il avait conservé ces notes alors qu'elles auraient été très utiles à son nouveau médecin.

13. Par décision du 30 juin 2016, adressée par courrier recommandé du même jour à M. A______, la commission a classé la plainte.

Le dossier médical comprenait toutes les pièces utiles concernant le patient. Le Dr B______ avait en particulier respecté l'obligation légale qui lui incombait en tenant des notes de suite. Il n'apparaissait pas à la lecture de ces dernières qu'elles avaient été consignées a posteriori, de sorte que les allégations de M. A______ à ce propos tombaient à faux.

Les produits PHC vendus par le Dr B______ ne contenaient pas de principes actifs et n'étaient donc pas visés par l'interdiction faite aux médecins de vendre des médicaments. Aucune disposition légale n'interdisait la vente d'aliments par un médecin. Le Dr B______ n'avait ainsi pas adopté de comportement professionnel incorrect à cet égard.

L'incapacité de travail de M. A______ du 29 mars au 1er août 2012 était bien consécutive à des douleurs lombaires et non à l'infection urinaire dont il souffrait. Le Dr B______ avait d'ailleurs posé le bon diagnostic concernant cette infection et assuré le suivi de celle-ci dans les règles de l'art. Les symptômes de nycturie et de difficultés mictionnelles n'avaient été évoqués que lors de la consultation du 31 mai 2012, date à partir de laquelle deux analyses d'urine avaient été pratiquées. La prescription médicamenteuse était par ailleurs adéquate et le Dr B______ avait fait preuve de prudence en adressant son patient chez un urologue. Le fait que l'infection urinaire soit survenue en même temps que le programme PHC relevait d'un concours de circonstances, un régime alimentaire particulier ne faisait pas partie des facteurs déclenchant une telle infection. Enfin, les informations médicales sollicitées par la SWICA avaient été transmises dans un délai convenable et les conséquences de celles-ci relevaient de la responsabilité de M. A______. Aucun manquement professionnel n'avait ainsi été constaté.

14. Le 18 juillet 2016, la commission a adressé la décision du 30 juin 2016 à
M. A______ par pli simple, le courrier recommandé ayant été retourné avec la mention « non réclamé ».

15. Par courrier du 17 août 2016, M. A______ a recouru contre la décision de la commission précitée auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

Les éléments avancés pour justifier cette décision étaient partiaux, reposaient sur des hypothèses qui n'avaient pas lieu d'être et ne tenaient aucun compte des droits du patient.

16. Par courrier du 23 août 2016, déposé au guichet, M. A______ a sollicité un délai pour compléter son recours.

17. Par courrier du 30 août 2016, M. A______ a complété son recours.

La décision indiquait que le Dr B______ l'avait envoyé chez un urologue, le Dr C______, ce qui était inexact. Il n'avait jamais vu ce médecin de sa vie. Elle indiquait également que le produit qui lui avait été prescrit et vendu par le
Dr B______ était un complément alimentaire qui ne pouvait en aucun cas provoquer des problèmes urinaires. Or, la littérature scientifique médicale rapportait de nombreux cas d'infections et d'effets secondaires dangereux suite à la prise d'une monodiète hyperprotéinée. Les produits vendus, que ce soit sous forme de bouillon, de soupe ou de milkshake, concernaient bien une diète hyperprotéinée. Il n'avait par ailleurs jamais reçu la facture relative à son achat, alors qu'il l'avait réclamée. S'agissant de son problème urinaire, il avait dû se rendre trois fois au cabinet du Dr B______ avant d'être pris au sérieux. Avant cela, il lui avait dit par téléphone que ce n'était rien et qu'il devait boire de l'eau. Ce n'était d'ailleurs pas la première fois que le Dr B______ ne prenait pas au sérieux l'un de ses problèmes. Il avait dû se faire opérer d'une hernie discale suite à une visite aux urgences. Il s'était pourtant plaint de douleurs au dos à de nombreuses reprises auprès de son médecin sans qu'il ne lui prescrive le moindre examen. Il souffrait encore aujourd'hui des conséquences de la prise de ces produits hyperprotéinés prescrits et vendus par le Dr B______ alors qu'il n'avait pas été averti de l'existence d'effets secondaires.

La commission avait par ailleurs retenu que le Dr B______ avait adressé son dossier à son assurance, la SWICA, dans un délai raisonnable. Elle n'avait toutefois pas tenu compte qu'il avait dû pour ce faire se rendre à deux reprises chez son médecin et le contacter téléphoniquement à dix reprises. De plus, les causes évoquées dans ce rapport étaient fausses. Le Dr B______ avait évoqué un mal de dos récurrent alors qu'il souffrait, en plus de l'infection urinaire, d'une grave dépression. Le fait qu'il n'ait pas indiqué la vérité lui avait fait perdre quatre mois de salaire.

Enfin, il avait été obligé de changer de médecin. Le Dr B______ avait dans un premier temps refusé de lui remettre son dossier médical, preuve qu'il avait des choses à cacher.

18. Par courrier du 20 septembre 2016, la commission a indiqué qu'elle n'avait pas d'observations à formuler et a persisté intégralement dans les termes de sa décision du 30 juin 2016. Elle a par ailleurs transmis son dossier à la chambre administrative.

Les éléments pertinents dudit dossier seront repris en tant que besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

19. Le 20 octobre 2016, M. A______ a persisté dans son recours, après avoir pris connaissance du dossier de la cause et notamment du courrier du Dr B______ du 30 septembre 2013 adressé à la commission.

Il n'était pas allé voir le Dr B______ le 29 mars 2012 pour des douleurs lombaires, mais en raison d’une grande dépression causée par des problèmes dans sa profession, soit la perte d'un gros client. Contrairement à ce qu'indiquait le
Dr B______, il n'avait jamais cherché à profiter des assurances sociales. S'il n'avait pas été malade, le Dr B______ n'aurait d'ailleurs pas rédigé les certificats médicaux des 29 mars et 6 juillet 2012 ainsi que tous les autres certificats établis durant leur relation thérapeutique.

Lorsqu'il avait contacté le Dr B______ le 3 mai 2012, les difficultés rencontrées avec le régime concernaient les problèmes urinaires. Il avait rencontré ces problèmes depuis le premier jour de la prise de la diète hyperprotéinée.
Ceux-ci persistaient, de sorte qu'il était encore suivi par un urologue et passait régulièrement des examens aux HUG.

C'était par ailleurs lui et non le Dr B______ qui avait mis fin à leur relation thérapeutique. Il n'avait plus confiance en lui depuis l'opération de son hernie discale en 2001, alors que son médecin n'avait pas voulu l'envoyer faire des examens plus approfondis. Il avait d'ailleurs indiqué à son chirurgien, qui l'avait consigné dans son rapport, qu'il ne souhaitait plus se rendre chez son médecin traitant. Lorsque le Dr B______ avait pris connaissance du rapport du chirurgien, il l'avait convoqué pour le convaincre de rester son patient. Le rapport du chirurgien ne figurait toutefois pas dans son dossier médical.

La commission avait rendu une décision partiale en faveur du Dr B______ en retenant des faits de manière erronée, sans qu'il ait été consulté, et sans tenir compte de sa propre argumentation. Ladite commission avait d'ailleurs mis plus de trois ans pour statuer sur sa plainte, laissant ainsi « traîner les choses ».

20. Le 25 octobre 2016, la chambre administrative a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. a. Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ -
E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 63 al. 1 let. b LPA ; art. 22 al. 1 de la loi sur la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients du 7 avril 2006 - LComPS - K 3 03).

Il est ainsi recevable sur ces points.

b. La décision entreprise classe la procédure ouverte contre le Dr B______.

Conformément à la jurisprudence de la chambre de céans, le plaignant qui a saisi la commission en invoquant une violation de ses droits de patient peut recourir contre la décision classant sa plainte (ATA/558/2015 du 2 juin 2015 consid. 1b).

Si le recours du 18 août 2016, complété le 30 août 2016, ne contient pas de conclusions expresses, il en ressort toutefois que M. A______ conteste la décision de classement du 30 juin 2016, au motif que celle-ci ne respecterait pas ses droits de patient.

Le recours est donc également recevable de ce point de vue.

2. L'objet du litige porte sur la question de savoir si c'est à bon droit que l'autorité intimée a procédé à un classement de la plainte de l'intéressé.

3. Le recourant reproche au Dr B______, dans un premier grief, de lui avoir vendu « un produit paramédical » lequel lui a causé des problèmes urinaires alors qu'il n'avait pas été informé de l'existence d'effets secondaires.

4. a. À teneur de l'art. 45 al. 1 de la loi sur la santé du 7 avril 2006 (LS - K 1 03), le patient a le droit d'être informé de manière claire et appropriée sur son état de santé (let. a), les traitements et interventions possibles, leurs bienfaits et leurs risques éventuels (let. b) ainsi que les moyens de prévention des maladies et de conservation de la santé (let. c).

Le devoir d'information conditionne l'exercice par le patient de son droit à l'autodétermination en matière médicale, garanti par l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101 ; ACEDH Pretty c. Royaume-Uni, du 29 avril 2002,
Rec. 2002-III, req. n° 2346/02, § 61). Il vise aussi bien à assurer la libre formation de sa volonté qu'à protéger son intégrité corporelle (ATF 117 Ib 197 ; arrêt du Tribunal fédéral 4P.265/2002 du 28 avril 2003 consid. 4 et les références citées ; ATA/129/2015 du 3 février 2015 consid. 6). Il permet au patient de donner, cas échéant de refuser, en connaissance de cause, son accord à une atteinte à son intégrité corporelle. Corrélativement, le respect du devoir d'information permet au médecin de justifier cette atteinte au droit absolu du patient en invoquant le consentement éclairé de ce dernier (art. 46 LS ; ATF 133 III 121 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 4C.66/2007 du 9 janvier 2008 consid. 5 ; 4P.265/2002 consid. 4.1 et les références citées).

b. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le médecin doit donner au patient, en termes clairs, intelligibles et aussi complets que possible, une information sur le diagnostic, la thérapie, le pronostic, les alternatives au traitement proposé, les risques de l'opération, les chances de guérison, éventuellement sur l'évolution spontanée de la maladie et les questions financières, notamment relatives à l'assurance (ATF 133 III 121 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 4C.66/2007 précité consid. 5.1 ; 4P.265/2002 précité consid. 4.2).

Des limitations, voire des exceptions au devoir d'information du médecin ne sont admises que dans des cas très précis, par exemple lorsqu'il s'agit d'actes courants sans danger particulier et n'entraînant pas d'atteinte définitive ou durable à l'intégrité corporelle (ATF 119 II 456 consid. 2a et les références citées), s'il y a une urgence confinant à l'état de nécessité ou si, dans le cadre d'une opération en cours, il y a une nécessité évidente d'en effectuer une autre (arrêt du Tribunal fédéral 4P.265/2002 précité consid. 4.2 et les références citées ; ATF 108 II 59).

5. a. À teneur de l'art. 114 al. 3 1ère phrase LS, la vente directe de médicaments par le médecin traitant (propharmacie) est interdite.

L'art. 4 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux du 15 décembre 2000 (loi sur les produits thérapeutiques, LPTh -
RS 812.21) définit les médicaments comme étant les produits d'origine chimique ou biologique destinés à agir médicalement sur l'organisme humain ou animal, ou présentés comme tels, et servant notamment à diagnostiquer, à prévenir ou à traiter des maladies, des blessures et des handicaps ; le sang et les produits sanguins sont considérés comme des médicaments.

L'art. 3 al. 1 de la loi fédérale sur les denrées alimentaires et les objets usuels - LDAI - RS 817.0) définit les denrées alimentaires comme des produits nutritifs. Les produits nutritifs sont des produits destinés à la constitution et à l'entretien de l'organisme humain, qui ne sont pas prônés comme médicament
(art. 3 al. 2 LDAI).

b. Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de relever que la délimitation entre les médicaments et les denrées alimentaires n'est pas toujours aisée. Il n'y a pas de lacune entre la législation sur les médicaments et celle sur les denrées alimentaires ; chaque produit est inclus dans le champ d'application soit de l'une législation soit de l'autre. La législation sur les produits thérapeutiques prime toutefois le droit des denrées alimentaires (ATF 138 IV 57 ; ATF 127 II 91 ; Message relatif à la loi fédérale sur les denrées alimentaires et les objets usuels, FF 2011 5181 ss, 5206).

Selon la définition de l'art. 4 al. 1 let. a LPTh, un produit est un médicament soit s'il possède objectivement des propriétés énoncées dans cette disposition soit si, sans avoir ces propriétés, il est présenté comme tel. Doivent en revanche être considérés comme des compléments alimentaires soumis à l'ordonnance du
23 novembre 2005 du DFI sur les aliments spéciaux (ci-après : ordonnance du DFI ; RS 817.022.104), les produits qui contiennent des vitamines, des sels minéraux ou d'autres substances sous forme concentrée et ayant un effet nutritionnel ou physiologique, et qui sont destinés à compléter l'alimentation
(art. 22 al. 1 de l'ordonnance du DFI).

Savoir à quel groupe appartient un produit qui ne présente pas objectivement les propriétés définies à l'art. 4 al. 1 let. a LPTh dépend donc de la manière dont il est présenté. Tout produit présenté à la vente comme médicament, mais qui, objectivement, n'en est pas un, relève de la loi sur les produits thérapeutiques. La notion de « présentation à la vente » permet notamment d'empêcher une personne de mettre sur le marché des produits en affirmant qu'ils ne sont pas des médicaments, tout en leur attribuant des vertus thérapeutiques qui n'ont pas été vérifiées lors d'une procédure d'autorisation (ATF 138 IV 57 ;
ATF 127 II 91 ; Message concernant une loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux, FF 1999 3151 ss, 3185). Il y a lieu de considérer qu'un produit est présenté comme un médicament lorsque, eu égard à son étiquetage, à son conditionnement ou à sa publicité, il apparaît comme étant destiné à agir médicalement sur l'organisme (ATF 138 IV 57 et les références citées).

c. En l'espèce, la commission a retenu que les produits PHC remis à
M. A______, intitulés « soupe, bouillon ou milk-shake » étaient des aliments, soit des produits nutritifs, puisqu'ils ne contenaient pas de principes actifs.

L'un des slogans présents sur le site internet de la marque PHC (site internet consulté le 23 février 2017 : http://www.premiumdiet.ch/fr/), est le suivant :
« Perdre du poids grâce au concept nutritionnel avec surveillance médicale ». Le site internet précise encore, s'agissant des produits « Premium GO » consommés par M. A______ : « Premium Diet Go vous permet de préparer idéalement votre corps au bouleversement nutritionnel qui l’attend. La poudre est mélangée avec de l’eau pour former une délicieuse boisson » (site internet consulté le 23 février 2017 : http://www.premiumdiet.ch/fr/assortiment/produits-go). Le recourant ne démontre d’ailleurs pas que ceux-ci contiendraient des principes actifs. Il apparaît ainsi, conformément à ce qu'a retenu la commission, que les produits qui ont été vendus au recourant sont des aliments et non des médicaments. Restera ouverte la question de savoir s'ils devraient en réalité être définis comme des compléments alimentaires, soumis à l'ordonnance du DFI, ce point étant sans importance en l'espèce. Si la LS prohibe la vente de médicaments par un médecin traitant, aucune disposition de ladite loi ne lui interdit de vendre des aliments et/ou des compléments alimentaires. Aucun reproche ne peut donc être fait au Dr B______ sous cet angle.

Par ailleurs, la remise de produits alimentaires ne saurait imposer un devoir d'information du médecin, tel que défini ci-avant par la loi et la jurisprudence, puisqu'elle n'est, selon toute vraisemblance, pas susceptible d'entraîner d'atteintes définitives et durables à l'intégrité corporelle. La commission a de plus relevé dans sa décision qu'un régime alimentaire particulier ne faisait pas partie des facteurs déclenchant une infection urinaire. Bien que le recourant allègue que la littérature scientifique médicale rapportait de nombreux cas d'infections et d'effets secondaires dangereux suite à la prise d'une « monodiète hyperprotéinée », il n'en apporte aucune preuve, alors que le fardeau de celle-ci lui appartient.

Pour ces motifs, ce grief sera donc écarté.

6. Le recourant reproche également au Dr B______, dans un second grief, de ne pas avoir pris au sérieux ses problèmes urinaires et de ne pas les avoir gérés de manière adéquate.

7. a. L’art. 80 LS, intitulé « devoirs professionnels », prévoit que, sauf dispositions contraires de la LS, les devoirs professionnels prévus à l’art. 40 de la loi fédérale sur les professions médicales universitaires du 23 juin 2006 (LPMéd - RS 811.11) s’appliquent à tous les professionnels de la santé.

Ces derniers doivent notamment exercer leur activité avec soin et conscience professionnelle et respecter les limites des compétences qu’elles ont acquises dans le cadre de leur formation universitaire, de leur formation postgrade et de leur formation continue ainsi que garantir les droits du patient (art. 40 let. a et let. c LPMéd).

b. Compte tenu du fait que la commission est composée de spécialistes, mieux à même d’apprécier les questions d’ordre technique, la chambre de céans s’impose une certaine retenue (ATA/322/2014 du 6 mai 2014   ATA/5/2013 du 8 janvier 2013 ; ATA/642/2012 du 25 septembre 2012).

c. En l'espèce, la commission a considéré que la prise en charge de l'infection urinaire de M. A______ avait été faite dans les règles de l'art. Elle a en particulier retenu que les symptômes évocateurs d'une infection urinaire, soit la nycturie et les difficultés mictionnelles, n'avaient été évoqués la première fois que lors de la consultation du 31 mai 2012. À cette date, le Dr B______ avait alors posé le bon diagnostic, puis assuré le suivi de l'infection en pratiquant à deux reprises des tests d'urine, en prescrivant à M. A______ le médicament adéquat et en adressant ce dernier à un urologue, compte tenu de la persistance des symptômes.

Il ressort par ailleurs du dossier médical que le Dr B______ a transmis le
6 juillet 2012 par télécopie au Dr C______ le résultat des analyses urinaires de M. A______ des 31 mai et 3 juillet 2012, précisant à celui-ci que le patient allait le contacter pour fixer un rendez-vous. Les notes de suite du Dr B______ du 6 juillet 2012 indiquent également que les coordonnées de l'urologue ont été remises à
M. A______. Ainsi, si le recourant allègue n'avoir jamais rencontré le
Dr C______, il apparaît que cela relève de sa responsabilité et non de celle de son ancien médecin traitant qui l'a bel et bien adressé à un confrère urologue.

M. A______ n'apporte par ailleurs aucun élément permettant d'établir que la prise en charge de son infection urinaire n'aurait pas été faite selon les règles de l'art. De plus, ses déclarations quant à ses problèmes urinaires sont fluctuantes voire contradictoires. Il a en effet mentionné, dans sa plainte du 25 avril 2013, que son nouveau médecin avait guéri ses problèmes urinaires en lui remettant à titre gratuit un médicament, alors qu'il a par la suite indiqué, soit notamment dans son écriture à la chambre administrative du 30 août 2016, qu'il souffrait encore desdits problèmes.

En l'état, aucun motif ne permet à la chambre de céans de remettre en cause l’avis de la commission, selon lequel le Dr B______ a traité les problèmes urinaires du recourant dans les règles de l'art. En particulier, rien ne permet d'établir que le Dr B______ aurait commis une quelconque violation de la LS ou de la LPMéd.

Partant, ce grief sera également écarté.

8. Le recourant reproche enfin au Dr B______ d'avoir tardé à transmettre à la SWICA les informations médicales le concernant et d'avoir rempli le formulaire de manière non conforme à la réalité. À teneur du dossier, il apparaît toutefois que ces accusations sont infondées.

Dans la mesure où il s’agirait là de droits des patients, ce qui n’est pas évident, d'une part, il ne peut être fait aucun reproche au Dr B______ s'agissant du délai de transmission des informations à la SWICA. Ce dernier a répondu à la première demande de renseignements de la SWICA du 27 juillet 2012 en date du 24 août 2012. Si un délai de réponse de moins d'un mois n'apparaît pas excessif, il l'est encore moins compte tenu de la période estivale et de la fermeture du cabinet médical entre le 25 juillet et le 21 août 2012. Il a par ailleurs répondu à la deuxième demande de renseignements de la SWICA du 21 novembre 2012 en date du 28 novembre 2012, soit dans un délai de sept jours.

D'autre part, rien ne permet d'affirmer, comme le prétend le recourant, que son incapacité de travail durant la période du 29 mars au 1er août 2012 aurait été causée par une dépression et non des douleurs lombaires. Il ressort du dossier médical de M. A______ qu'il a été effectivement suivi et mis en arrêt de travail par le Dr B______, au cours de leur relation thérapeutique, pour des problèmes de dépression. Toutefois, tel n'était manifestement pas la raison de l'arrêt de travail pour la période susmentionnée. Il ressort des notes de suite du Dr B______ du
29 mars 2012 que M. A______ s'était plaint, lors de la consultation, de douleurs lombaires et de douleurs des membres inférieures. Une prescription de physiothérapie datée du 1er mai 2012 figure également au dossier et mentionne, à titre de diagnostic, des lombalgies chroniques. Enfin, rien ne permet de remettre en cause les explications du Dr B______ dans ses observations à la commission du 30 septembre 2013 selon lesquelles le recourant était venu le consulter le 29 mars 2012 en raison de douleurs lombalgiques.

Partant, ce grief sera également écarté.

9. Compte tenu de ce qui précède, le recours sera rejeté sans qu’il ne soit nécessaire d’interpeller une nouvelle fois, au stade de la chambre administrative, le médecin concerné.

10. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 18 août 2016 par Monsieur A______ contre la décision de la commission de surveillance des professions de la sante et des droits des patients du 30 juin 2016 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 500.- ;

dit qu’il ne lui est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients ainsi qu'au Docteur  B______.

Siégeants : M. Thélin, président, MM. Dumartheray et Verniory, Mme Payot
Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :