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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1684/2018

ATA/752/2018 du 18.07.2018 ( FORMA ) , REJETE

Descripteurs : ÉCOLE OBLIGATOIRE ; SPORT ; NATATION
Normes : RCO.77; LIP.24.al1.letc; LIP.27; RCO.22.al2; RCO.24.al3.lete; LPA.61
Résumé : Écolier qui recourt contre une décision l'écartant du dispositif sport, art, études au cycle pour l'année scolaire 2018-2019. À la date limite de dépôt des dossiers, le recourant ne remplissait pas, et dans une mesure non négligeable, le critère de performance minimale lui permettant de prétendre à son maintien dans le dispositif sport, art, études en natation pour l'année scolaire 2018-2019. Son investissement important dans son sport, sa progression remarquable, ainsi que sa situation personnelle et familiale ne sont pas pertinents. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1684/2018-FORMA ATA/752/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 18 juillet 2018

2ème section

 

dans la cause

 

A______, enfant mineur, agissant par sa mère Madame B______

contre

DÉPARTEMENT DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE



EN FAIT

1) A______, né le ______ 2004, pratique la natation de manière intensive. Durant l’année scolaire 2017-2018, il a effectué sa 9ème année de scolarité obligatoire dans le dispositif sport, art, études (ci-après : SAE) au sein du cycle d’orientation des Grandes-Communes.

2) Le 25 février 2018, agissant par sa mère, A______ a demandé son maintien dans le dispositif SAE pour l’année scolaire 2018-2019.

3) Le 2 mars 2018, la direction générale de l’enseignement obligatoire du département de l’instruction publique, de la culture et du sport, devenu depuis lors le département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse
(ci-après : le département ou DIP) a informé l’intéressé que sa demande était parvenue dans les délais, que son niveau de compétence dans son domaine de prédilection serait évalué en collaboration avec les écoles et différents experts et qu’il serait informé à la fin du mois de mai de la décision de maintien ou non dans le dispositif SAE. S’il ne devait plus répondre aux critères de performance de son sport, il devrait poursuivre sa scolarité dans une classe ordinaire de son établissement de secteur.

4) Le 27 mars 2018, le DIP a informé A______ qu’il envisageait de rejeter la demande de maintien dans le dispositif SAE les résultats minimaux requis n’ayant pas été atteints pendant la période de référence, soit du 1er mars 2017 au
28 février 2018.

5) Le 11 avril 2018, A______ a répondu qu’il n’avait certes pas atteint les 9,5 points de la table Rudolph servant à valider le statut de cadre régional
(ci-après : points Rudolph) mais il était en train de beaucoup progresser. Il s’investissait énormément dans ce sport qui lui avait permis de trouver son équilibre. Son frère avait déjà failli être éliminé du dispositif et avait dû se battre devant les tribunaux pour y être maintenu. Depuis lors, il avait gagné un titre « multiple champion » suisse en 2017.

6) Par décision du 20 avril 2018, déclarée exécutoire nonobstant recours, le DIP a communiqué à A______ sa décision de ne pas le maintenir dans le dispositif SAE pour l’année scolaire 2018-2019 dès lors qu’il ne remplissait plus les conditions lui permettant d’y poursuivre sa scolarité. Il n’avait acquis que
7,1 points Rudolph au 28 février 2018 alors que le niveau minimum requis à cette date pour les élèves nés en 2004 était de 9,5.

Par ailleurs, l’autorité avait appris qu’il avait été admis dans le dispositif SAE sur la base de résultats sportifs erronés, les 13,2 points Rudolph acquis le
5 juin 2016 et comptabilisés sous son nom, l’ayant été par son frère aîné.

7) Le 17 mai 2018, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant à son maintien dans le dispositif SAE pour l’année scolaire 2018-2019. Il n’avait certes pas atteint les 9,5 points Rudolph mais il était en phase de progression importante. Il nageait depuis son plus jeune âge, s’entraînait intensivement et participait à de nombreuses compétitions, consacrant à cette discipline entre 16 et 20 heures par semaines et au moins deux week-ends par mois. Ce sport était toute sa vie et avait participé à ce qu’il trouve un équilibre après le divorce de ses parents et la grave maladie que sa mère avait subie. Cet équilibre risquait d’être détruit s’il ne pouvait poursuivre dans le dispositif SAE.

8) Le 31 mai 2018, le DIP au rejet du recours.

Les classes SAE recevaient en fonction des places disponibles – vingt par classe – des élèves à haut potentiel intellectuel, sportif ou artistique, dont les performances sportives ou les potentialités artistiques étaient attestées par des organismes officiels et qui avaient besoin d’un aménagement horaire leur permettant de pratiquer leur discipline. Pour pouvoir être admis, puis maintenus dans le dispositif SAE, ils devaient atteindre des critères minimaux pouvant évoluer d’une année à l’autre. Afin d’assurer une égalité de traitement entre les candidats, ces critères devaient être atteints au plus tard à la date limite de dépôt des demandes d’admission ou de maintien, soit pour les disciplines sportives, le 28 février 2018 pour l’année scolaire 2018-2019. À cette date, pour la natation, les élèves nés en 2004 devaient avoir obtenu 9,5 points Rudolph en bassin de
50 m. Ce n’était pas le cas de A______, admis dans le dispositif SAE à la suite d’un résultat erroné. Son résultat réel ne lui aurait pas permis d’intégrer ce dispositif. Les résultats obtenus à la date limite étaient insuffisants, malgré son investissement et sa progression. Il ne pouvait pas être maintenu en classe SAE à titre exceptionnel, toutes les places disponibles étant pourvues par des élèves remplissant les conditions d’accès, un élève remplissant les critères étant en outre sur liste d’attente.

9) Le 24 juin 2018, A______ a exercé son droit à la réplique, soulignant qu’il avait remarquablement progressé depuis fin mars 2018. S’il n’avait pas atteint les points requis en février 2018, il les avait depuis lors dépassés dans quatre disciplines.

10) Le 27 juin 2018, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 77 du règlement du cycle d’orientation du 9 juin 2010 - RCO - C 1 10.26).

2) a. Aux termes de l’art. 24 al. 1 let. c de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 (LIP - C 1 10), en référence aux finalités de l’école publique décrites à l’art. 10, le département met en place, dans chaque degré d’enseignement, des mesures intégrées à l’horaire régulier et complémentaires de soutien ainsi que des aménagements du parcours scolaire qui peuvent revêtir différentes modalités, destinées en priorité aux élèves dont les performances intellectuelles, sportives ou artistiques sont attestées par des organismes officiels reconnus par l’État.

Sous l’intitulé « Élèves à haut potentiel intellectuel, sportif ou artistique », l’art. 27 LIP prévoit que, pour permettre aux élèves dont les performances intellectuelles, sportives ou artistiques sont attestées par des organismes officiels reconnus par l’État de bénéficier d’aménagements de leur parcours scolaire, le département prend les mesures d’organisation adaptées selon les degrés d’enseignement, telles que l’adaptation de la durée de sa scolarisation ou l’admission en classe SAE.

b. En vertu de l’art. 22 al. 2 RCO dans sa version en vigueur depuis le 29 août 2016, les classes SAE reçoivent en fonction des places disponibles des élèves dont les performances sportives ou les potentialités artistiques sont attestées par des organismes officiels reconnus par l’État et qui ont besoin d’un aménagement horaire leur permettant de pratiquer leur sport ou leur art ; les programmes correspondent à ceux des classes régulières.

Selon l’art. 24 al. 3 let. e RCO, en cours d’année, les effectifs moyens des classes SAE d’un établissement ne doivent, en principe, pas dépasser le maximum de vingt élèves.

c. Selon le site internet de l’État, l’admission dans le dispositif SAE n’est pas automatique et est notamment conditionnée au nombre de places disponibles ainsi qu’à des critères de résultats qui doivent être remplis à la date de dépôt du dossier, fixée au 28 février 2018 pour l’année scolaire 2018-2019 (http://www.ge.ch/cycle_orientation/sport-art-etudes). Pour la natation, les élèves nés en 2004 devaient avoir obtenu 9,5 points Rudolph entre le 1er mars 2017 et le 28 février 2018. La sélection parmi les talents atteignant les performances minimales requises se fait selon des critères complémentaires qu’il n’est pas nécessaire de détailler dans la présente cause.

3) a. Conformément à l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé : pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a) ; pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). À teneur de l’al. 2, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi.

Lorsque l’admission à un parcours de formation est fondée sur l’examen d’un dossier ou l’évaluation de qualités spécifiques telles des qualités artistiques, l’autorité scolaire jouit d’un très large pouvoir d’appréciation (ATA/685/2016 du 16 août 2016 consid. 9b) et le pouvoir de l’autorité de recours est extrêmement restreint à l’instar de ce qui prévaut en matière d’examens (ATA/681/2014 du 26 août 2014 consid. 5), sauf pour les griefs de nature formelle, que celle-là peut revoir avec un plein pouvoir d’examen. En principe, la chambre administrative, dans ce domaine, n’annule donc le prononcé attaqué que si l’autorité intimée s’est laissée guider par des motifs sans rapport avec la nature de l’évaluation qui lui est demandée ou, d’une autre manière manifestement insoutenable (ATF 121 I 225 consid. 4d ; 118 Ia 488 consid. 4c ; ATA/681/2014 précité consid. 5).

b. Dans une jurisprudence constante, la chambre de céans a confirmé les modalités mises en place par le DIP, selon lesquelles l’évaluation des candidatures se fait sur la base des résultats obtenus au cours de l’année écoulée à la date limite de dépôt des inscriptions. Le cadre de référence est ainsi objectivé et identique pour toutes les disciplines et pour les candidats de chaque discipline. Il est ainsi propre à assurer l’égalité de traitement entre les postulants (ATA/1134/2017 du
2 août 2017 consid. 4 ; ATA/683/2016 du 26 août 2016 consid. 3 ; ATA/811/2015 du 11 août 2015 consid. 4 ; ATA/679/2014 du 26 août 2014).

c. Même si un élève remplit les critères minimaux d’admission à la date limite d’inscription, cela ne lui confère pas de droit à être admis. L’art. 22 al. 2 RCO conditionne l’admission au dispositif SAE au nombre de places disponibles (ATA/685/2016 précité consid. 9b).

4) En l’espèce, il est incontesté – et incontestable – qu’à la date limite de dépôt des dossiers, le recourant ne remplissait pas, et dans une mesure non négligeable, le critère de performance minimale lui permettant de prétendre à son maintien dans le dispositif SAE en natation pour l’année scolaire 2018-2019. Fondée sur ce critère objectif, la décision du DIP est ainsi conforme au droit.

Les arguments énoncés par le recourant dans son recours – investissement important dans ce sport et progression remarquable après la date limite du
28 février 2018, au point de dépasser le critère de performance en juin 2018, situation personnelle et familiale particulière – ne sont pas pertinents par rapport à la législation et à la jurisprudence citées plus haut.

Ses derniers résultats ne permettent pas d’envisager un maintien à titre exceptionnel dès lors que le DIP indique, sans être contredit, que toutes les places du dispositif SAE pour l’année scolaire 2018-2019 ont été attribuées à des élèves remplissant les critères d’admission ou de maintien et qu’un tel élève figure encore en liste d’attente.

5) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

Cela n’enlève rien au talent et au mérite du recourant tels qu’ils ressortent du dossier. Sa déception compréhensible de voir sa candidature écartée ne saurait toutefois avoir une incidence sur la décision de sélection.

6) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant. Celui-ci, enfant mineur, ayant agi par sa mère, cette dernière se verra astreinte au paiement dudit émolument (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 17 mai 2018 par A______, enfant mineur, agissant par sa mère Madame B______, contre la décision du département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 20 avril 2018 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de A______, enfant mineur, agissant par sa mère Madame B______, un émolument de procédure de CHF 400.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame B______, mère du recourant, ainsi qu’au département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Mme Junod, présidente, Mmes Krauskopf et Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. Mazza

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :