Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/2590/2017

ATA/1134/2017 du 02.08.2017 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2590/2017-FORMA ATA/1134/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 août 2017

1ère section

 

dans la cause

 

A______, enfant mineure, agissant par sa mère Madame B______

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA CULTURE ET DU SPORT



EN FAIT

1) En date du 19 février 2017, l’enfant A______, née le ______ 2004 et agissant par ses parents Madame B______ et Monsieur B______, a soumis au département de l’instruction publique, de la culture et du sport (ci-après : DIP ou le département) un dossier de candidature pour être admise dans le dispositif sport-art-études (ci-après : SAE) du cycle d’orientation (ci-après : CO) durant l’année scolaire 2017-2018 en 9P, dans la discipline patinage artistique.

Dans cette discipline, elle s’entraînait douze heures par semaine, aux centres sportifs des Vernets et de la Queue d’Arve ; elle disposait du résultat 4 au « test USP » (mesure de performance en patinage artistique) ; elle avait une licence de l’Association C______, mais pas de « Swiss Olympic Talent Card » ; elle ne faisait pas l’objet d’une sélection dans un cadre national ou régional.

2) Par pli du 27 février 2017, le D______ a transmis au service organisation et planification au sein de la direction générale de l’enseignement obligatoire (ci-après : DGEO) les inscriptions de ses patineurs potentiels pour le dispositif SAE au CO, à savoir A______ et une autre élève, dont les dossiers étaient signés par la responsable cantonale.

3) Par courrier du 10 mars 2017 de son service organisation et planification au sein de la DGEO, le DIP a confirmé la réception de cette demande d’admission.

Dans un premier temps, le niveau de compétence de l’enfant dans son domaine de prédilection serait évalué en collaboration avec les différents experts sous l’égide de l’office cantonal de la culture et du sport (ci-après : OCCS). Cela fait, l’ensemble des candidatures seraient considérées, et les places attribuées dans les établissements aux élèves dont le niveau artistique aurait été jugé suffisant. Si le nombre de places disponibles devait se révéler insuffisant au regard du nombre de candidatures à niveau, une liste d’attente serait établie.

4) Par lettre du 17 mai 2017 de son service organisation et planification au sein de la DGEO, le département a informé les parents d’A______ que, bien que le niveau de compétence de celle-ci était compatible avec les exigences fixées pour l’admission dans le dispositif SAE (selon rapport d’évaluation sportive et artistique joint), sa candidature dans ledit dispositif pour la prochaine rentrée scolaire n’avait pas été retenue et qu’elle devrait suivre sa scolarité au sein d’une classe ordinaire du CO.

La raison était le nombre de demandes supérieur au nombre de places disponibles.

Il conviendrait de voir avec la direction de l’établissement où serait scolarisée l’élève concernée si des aménagements ponctuels pouvaient être éventuellement envisagés, notamment selon le calendrier des événements spécifiques à la pratique de sa discipline sportive ou artistique.

5) Par acte expédié le 14 juin 2017 au greffe de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), A______, agissant par sa mère, a formé recours contre cette « décision » du DIP.

Elle sollicitait le réexamen, par ladite juridiction, de sa candidature, au vu de sa nouvelle « Talent Card » qui modifiait l’analyse de son dossier. Celle-ci, annexée au recours, consistait en une attestation établie le 13 juin 2017 par le directeur sportif confirmant qu’elle remplissait les exigences de Swiss Olympic pour la reconnaissance comme un « Talent local » dans le sens de Swiss Olympic et indiquant que la liste serait communiquée sur le site web de Swiss Olympic dans les jours prochains.

La patinoire du centre sportif des Vernets n’était que très peu disponible pour les heures libres laissées par un horaire de scolarité normale, alors que la pratique du patinage artistique nécessitait de nombreuses heures d’entraînement sur la glace. Cette situation était péjorée par de nouvelles réglementations émanant du service responsable de la patinoire et de E______.

En outre, les parents de la recourante avaient consenti des efforts financiers très importants pour l’exercice de ce sport et ne souhaitaient pas dire à celle-ci qu’elle devait passer en sport loisir pour des raisons de manque de places, alors qu’elle en avait le niveau et la motivation et qu’elle affichait d’excellents résultats scolaires.

Enfin, il était regrettable d’appliquer un « numerus clausus » aux sportifs qui en avaient le niveau requis en laissant de côté une partie de ceux-ci. Le DIP devrait satisfaire au moins cinquante sportifs individuels en 9ème du CO afin d’assurer la relève.

6) Dans sa réponse du juillet 2017, le DIP a conclu au rejet du recours.

7) La recourante n’ayant pas répliqué dans le délai imparti pour ce faire, la chambre administrative a, par lettre du 27 juillet 2017, informé les parties que la cause était gardée à juger.

8) Pour le reste, les arguments des parties seront repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit ci-après.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 al. 3 et 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 77 du règlement du cycle d'orientation du 9 juin 2010 - RCO - C 1 10.26).

2) a. Aux termes de l’art. 24 al. 1 let. c de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 (LIP - C 1 10), en référence aux finalités de l’école publique décrites à l’art. 10, le département met en place, dans chaque degré d’enseignement, des mesures intégrées à l’horaire régulier et complémentaires de soutien ainsi que des aménagements du parcours scolaire qui peuvent revêtir différentes modalités, destinées en priorité aux élèves dont les performances intellectuelles, sportives ou artistiques sont attestées par des organismes officiels reconnus par l’État.

Sous l’intitulé « Élèves à haut potentiel intellectuel, sportif ou artistique », l’art. 27 LIP prévoit que, pour permettre aux élèves dont les performances intellectuelles, sportives ou artistiques sont attestées par des organismes officiels reconnus par l’État de bénéficier d’aménagements de leur parcours scolaire, le département prend les mesures d’organisation adaptées selon les degrés d’enseignement, telles que l’adaptation de la durée de sa scolarisation ou l’admission en classe SAE.

b. En vertu de l’art. 22 al. 2 RCO dans sa version en vigueur depuis le 29 août 2016, les classes SAE reçoivent en fonction des places disponibles des élèves dont les performances sportives ou les potentialités artistiques sont attestées par des organismes officiels reconnus par l'État et qui ont besoin d'un aménagement horaire leur permettant de pratiquer leur sport ou leur art ; les programmes correspondent à ceux des classes régulières.

Selon l’art. 24 al. 3 let. e RCO, en cours d'année, les effectifs moyens des classes SAE d'un établissement ne doivent, en principe, pas dépasser le maximum de vingt élèves.

c. Selon le site internet de l’État, l’admission dans le dispositif SAE n’est pas automatique et est notamment conditionnée au nombre de places disponibles (http://www.ge.ch/cycle_orientation/sport-art-etudes, auquel les premières pages – contenant des informations générales – du formulaire de demande d’inscription au dispositif SAE au CO en patinage artistique – que l’intéressée et ses parents ont rempli – renvoyaient).

À teneur de la brochure « Dispositif sport-art-études – Critère de sélection – Cycle d’orientation – Année scolaire 2017-2018 (criteres-selection-sae-co.pdf) téléchargeable depuis le site internet de l’Etat (http://www.ge.ch/ cycle_orientation/sport-art-etudes/sports-individuels.asp), au titre des critères devant être remplis au moment du dépôt du dossier, soit au plus tard le 28 février 2017, le candidat en patinage artistique au dispositif SAE doit être titulaire du teste USP requis (p. 3) ; la sélection parmi les talents atteignant les performances minimales requises est, pour les disciplines sportives reconnues par Swiss Olympic, effectuée selon un classement des candidatures établi en fonction de l’ordre suivant : 1) membres des centres cantonaux de la relève détenteurs d’une « Swiss Olympic Talent Card » Nationale ; 2) détenteurs de « Swiss Olympic Talent Card » Nationales / membres d’un cadre national / membres d’une équipe de ligue nationale A ; 3) membres des centres cantonaux de la relève détenteurs d’une « Swiss Olympic Talent Card » Régionale ; 4) détenteurs de « Swiss Olympic Talent Card » Régionales ; 5) membres des centres cantonaux de la relève ; 6) analyse du besoin avéré d’aménagements horaires (nombre d’heures d’entraînement, déplacements, compétitions ; p. 4).

3) a. En l’espèce, il est incontesté – et incontestable – que la recourante remplit les conditions minimales lui permettant de prétendre à son admission dans le dispositif SAE en patinage artistique pour l’année scolaire 2017-2018.

b. À teneur des explications données par l’intimé dans sa réponse, la sélection est délicate et nécessite une étude approfondie des dossiers en tenant compte de la qualité des candidatures, de la diversité des disciplines artistiques ou sportives, des résultats acquis jusqu’à la date d’inscription et plus largement des critères tels qu’établis par les responsables techniques cantonaux de chaque discipline, en collaboration avec le DIP.

Pour la rentrée 2017-2018, en 9ème année, alors qu’il y avait quarante places disponibles (réparties sur deux établissements), quarante-sept candidatures remplissaient les conditions d’admission, soit trente sportifs, dix musiciens et sept danseurs.

Le nombre de places disponibles étant dépassé, une sélection objective a dû être effectuée par la DGEO, en collaboration avec l’OCCS, basée sur la qualité et la qualité de l’ensemble des candidatures retenues, en se référant notamment aux critères de classement parmi les talents atteignant les performances minimales requises, énumérés plus haut. Un classement final parmi toutes les candidatures a ensuite été établi, admettant en liste d’attente ou refusant les demandes d’admission au dispositif SAE.

Au 28 février 2017, délai de dépôt des candidatures en sport, l’intéressée ne remplissait aucun des critères de classement complémentaires susmentionnés. Compte tenu du nombre limité de places disponibles, ainsi que du nombre et de la qualité des autres candidatures, la sienne a dû malheureusement être placée en liste d’attente.

4) a. Conformément à l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé : pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a) ; pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). À teneur de l’al. 2, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi.

Lorsque l’admission à un parcours de formation est fondée sur l’examen d’un dossier ou l’évaluation de qualités spécifiques telles des qualités artistiques, l’autorité scolaire jouit d’un très large pouvoir d’appréciation (ATA/685/2016 du 16 août 2016 consid. 9b) et le pouvoir de l’autorité de recours est extrêmement restreint à l’instar de ce qui prévaut en matière d’examens (ATA/681/2014 du 26 août 2014 consid. 5), sauf pour les griefs de nature formelle, que celle-là peut revoir avec un plein pouvoir d’examen. En principe, la chambre administrative, dans ce domaine, n’annule donc le prononcé attaqué que si l’autorité intimée s’est laissée guider par des motifs sans rapport avec la nature de l'évaluation qui lui est demandée ou, d’une autre manière manifestement insoutenable (ATF 121 I 225 consid. 4d ; 118 Ia 488 consid. 4c ; ATA/681/2014 précité consid. 5).

b. Conformément à la jurisprudence de la chambre de céans, l'évaluation des candidatures se fait sur la base des résultats obtenus au cours de l'année écoulée à la date limite de dépôt des inscriptions. Le cadre de référence est ainsi objectivé et identique pour toutes les disciplines et pour les candidats de chaque discipline. Il est ainsi propre à assurer l'égalité de traitement entre les postulants (ATA/683/2016 du 26 août 2016 consid. 3 ; ATA/811/2015 du 11 août 2015 consid. 4 ; ATA/679/2014 du 26 août 2014).

c. Même si un élève remplit les critères minimaux d’admission à la date limite d’inscription, cela ne lui confère pas de droit à être admis. L’art. 22 al. 2 RCO conditionne l’admission au dispositif SAE au nombre de places disponibles (ATA/685/2016 précité consid. 9b).

5) Dans le cas présent, la recourante n’était, à la date limite de dépôt des inscriptions, soit au 28 février 2017, titulaire d’aucune « Swiss Olympic Talent Card » et ne remplissait ainsi à tout le moins aucun des quatre premiers critères de classement parmi les talents atteignant les performances minimales requises.

Au regard notamment de ces circonstances, rien ne permet de penser que, pour la recourante, le DIP se serait laissé guider par des motifs sans rapport avec la nature de l'évaluation qui lui était demandée ou d’une autre manière manifestement insoutenable.

Les arguments énoncés par l’intéressée dans son recours – problème des heures libres laissées pour l’entraînement sur la glace, efforts importants de celle-ci et de ses parents en vue de sa progression en patinage artistique et regret que le département n’offre pas plus de places dans le dispositif SAE – ne sont pas pertinents par rapport à la législation et à la jurisprudence citées plus haut.

Au demeurant, concernant le dernier grief, l’intime explique que, pour des motifs afférents aux finances publiques, il ne peut pas ouvrir des classes supplémentaires en SAE, même s’il le souhaitait, et qu’il s’agit de surcroît d’une prestation non réellement nécessaire en matière d’instruction publique.

6) Vu ce qui précède, la décision querellée, reposant sur des critères fondés, officiels et objectifs, est conforme au droit.

Le recours sera rejeté.

Cela n’enlève rien au talent de la recourante et à ses efforts méritoires. Au demeurant, celle-ci est placée en liste d’attente pour le dispositif SAE de l’année scolaire 2018-2019.

7) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante. Celle-ci, enfant mineure ayant agi par sa mère, verra cette dernière astreinte au paiement dudit émolument (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 juin 2017 par A______, enfant mineure, agissant par sa mère Madame B______, contre la décision du département de l’instruction publique, de la culture et du sport du 17 mai 2017 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge d’A______, enfant mineure, agissant par sa mère Madame B______, un émolument de procédure de CHF 400.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame B______, mère de la recourante, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la culture et du sport.

Siégeant : Mme Junod, présidente, MM. Verniory et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :