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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/470/2022

ATA/65/2023 du 24.01.2023 sur JTAPI/766/2022 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 01.03.2023, rendu le 07.03.2023, IRRECEVABLE, 2D_4/2023
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/470/2022-PE ATA/65/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 janvier 2023

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______, agissant en leur nom propre et en celui de leurs enfants mineurs C______, D______, E______, et F______   recourants
représentés par Me Bernard Cron, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 22 juillet 2022 (JTAPI/766/2022)


EN FAIT

A. a. Monsieur B______, né le ______ 1982, et Madame A______, née le ______ 1987, sont ressortissants du Kosovo. Ils sont les parents d’C______, D______, E______ et F______ B______, nés respectivement les ______ 2006, ______ 2007, ______ 2013 et _____ 2018.

b. Le 20 février 1999, M. B______ a déposé une demande d'asile en Suisse, laquelle a été rejetée le 11 avril 2000. Séjournant en Suisse depuis 2013 de façon ininterrompue, il a fait venir sa famille le 1er septembre 2018.

c. M. B______ a été condamné le 6 juillet 2017 par le Ministère public du canton de Genève pour entrée illégale, séjour illégal, activité lucrative sans autorisation et violation des règles de la circulation routière à une peine pécuniaire de nonante jours amende à CHF 30.-, avec sursis à l'exécution de la peine pendant un délai d'épreuve de trois ans et à CHF 800.- d’amende.

Par ordonnance pénale du 10 juin 2021, il a été condamné pour faux dans les titres, comportement frauduleux à l'égard des autorités, séjour illégal et exercice d'une activité lucrative sans les autorisations à une peine pécuniaire de cent cinquante jours amende à CHF 30.-. Il lui était notamment reproché d’avoir produit des documents falsifiés, dans le but d’obtenir une autorisation de séjour, à savoir notamment des fiches et des certificats de salaire pour une activité au sein de l'entreprise G______, ainsi qu’un faux décompte de salaire pour une activité au sein de l'entreprise H______.

d. Depuis 2008, M. B______ fait construire une maison au Kosovo.

B. a. Le 19 juillet 2018, M. B______ a déposé une demande d'autorisation de séjour dans le cadre de « l'opération Papyrus » auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM).

b. Le 23 octobre 2020, l’OCPM a réceptionné un formulaire M daté du 25 août 2020 par lequel M. B______ sollicitait un regroupement familial en faveur de Mme A______ et leurs quatre enfants.

c. Le 14 septembre 2021, l’OCPM a informé M. B______ de son intention de refuser sa demande d'autorisation de séjour pour lui-même et les cinq membres de sa famille, de prononcer leur renvoi de Suisse et de « transmettre ses actes » au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) afin qu’il juge de l’opportunité de prononcer une interdiction d'entrée en Suisse à son encontre.

d. Par décision du 3 janvier 2022, l'OCPM a refusé d'accéder à la requête de M. B______, Mme A______ et leurs enfants et prononcé leur renvoi de Suisse. Un délai au 3 avril 2022 leur était imparti pour quitter la Suisse.

C. a. Par acte du 4 février 2022, M. B______ et Mme A______, agissant en leur nom et celui de leurs enfants, ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant, principalement, à son annulation et à ce qu'il soit ordonné à l'OCPM de leur délivrer une autorisation de séjour. Préalablement, ils ont requis l’audition de Mesdames et Messieurs et I______, J______, K______ et L______.

 

Arrivé en Suisse à l’âge de 17 ans, M. B______ y avait été présent, de manière continue, depuis 1999. Mme L______ avait été sa petite amie en 2003 et 2004. Sous réserve d’une longue période entre 2005 et 2007, de quelques mois en 2008 (il était revenu en Suisse en automne 2008) et d’un mois en 2012, il avait toujours résidé et travaillé à Genève, ce dont pourraient témoigner les personnes dont il demandait l’audition. Ils n'avaient jamais bénéficié d'une quelconque aide financière de l'Hospice général, ne faisaient l'objet d'aucune poursuite ou acte de défaut de biens et n'avaient aucune dette. Il bénéficiait du niveau A2 exigé en langue française. Il remplissait les conditions de régularisation simplifiées des conditions de séjour dans le cadre de « l'opération Papyrus », malgré sa condamnation pénale, dont il rappelait que, dans un état de détresse pour prouver son séjour en Suisse, il s’était laissé persuader, par négligence, de produire ces documents. Son intégration sociale était réussie, ce dont pourraient témoigner MM. K______ et J______.

 

Ils remplissaient par ailleurs les critères relatifs à un cas individuel d'extrême gravité au sens des art. 30 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et 31 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) .

b. Par jugement du 22 juillet 2022, le TAPI a rejeté le recours. L’audition des témoins n’était pas nécessaire. Quatre des personnes dont l’audition était souhaitée avaient rédigé des attestations. Les déclarations de l’intéressé avaient varié quant à sa date d’arrivée en Suisse. Conformément à la jurisprudence, la préférence était accordée à celles qu’il avait données en premier lieu, soit une présence par intermittence dès 1998, sous réserve de onze mois passés au Kosovo en 2008, et stable en Suisse dès 2013. Plusieurs pièces versées à la procédure pour attester de sa présence en Suisse de 2009 à 2012 étaient des faux. Les critères de « l’opération Papyrus » n’étaient pas remplis.

S’agissant du cas de rigueur, la notion d'intégration rattachée à la durée du séjour impliquait que la personne concernée implante véritablement son centre de vie en Suisse et qu'elle ne quitte plus ce pays, hormis pour de courts voyages à l'extérieur. Tel n’avait pas été le cas. Il avait œuvré en Suisse dans le domaine du bâtiment. Son intégration socio-professionnelle n’était pas exceptionnelle et il n’avait pas fait preuve d’une ascension professionnelle remarquable. Sa conduite, au regard notamment de sa condamnation pour faux dans les titres et comportement frauduleux à l'égard des autorités, n’était pas compatible avec ce qui était exigible de tout étranger qui vivait en Suisse. Jeune et en bonne santé, il pourrait se réadapter au Kosovo où il avait conservé des attaches.

Quant à sa compagne et ses enfants, arrivés à Genève en septembre 2018, la durée de leur séjour ne pouvait pas être considérée comme suffisante pour remplir le critère de durée exigé pour obtenir une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Mme A______ n’exerçait pas d’activité professionnelle en Suisse, ne démontrait pas s’être investie d'une quelconque manière dans la vie associative ou culturelle genevoise et n’avait fourni aucune attestation validant des connaissances de la langue française, éléments qui tendaient à démontrer son absence d'intégration. Les enfants étaient âgés respectivement de 15, 14, 9 et 4 ans. Arrivés en Suisse il y avait moins de quatre ans, en début d’adolescence pour le premier, s’ils s’étaient certes créés un nouvel environnement de vie à Genève. Cela ne permettait toutefois pas encore de tenir pour établi qu’ils auraient tissé avec la Suisse des attaches profondes et durables. Les trois premiers étaient scolarisés à Genève. Ils avaient commencé leur scolarisation au Kosovo où ils avaient vécu la majeure partie de leur vie, de sorte que leur intégration en Suisse ne paraissait pas si profonde et qu'une réintégration dans leur pays d'origine n'apparaissait pas compromise. Ils avaient gardé des liens étroits avec leur pays d’origine, puisqu'en 2021 encore, ils avaient sollicité des visas de retour afin de « voir leur famille et surtout leurs grands-parents ». Le cadet, encore très jeune et pas encore scolarisé, restait rattaché dans une large mesure, par le biais de ses parents, frères et soeur, à leur pays d'origine. Il ne devrait ainsi pas rencontrer de difficultés particulières pour s'adapter à son nouvel environnement.

L’éventuelle autorisation de séjour pour cas de rigueur n’aurait, quoi qu’il en soit, pas pu être délivrée à M. B______ en vertu de l’art. 62 al. 1 let. a LEI traitant de la révocation des autorisations. Il s'était en effet prévalu de faux dans le cadre de la régularisation de ses conditions de séjour. Il ne saurait être dédouané du fait qu’il se serait trouvé dans une situation de détresse personnelle, circonstance au demeurant non retenue sur le plan pénal. C'était ainsi à dessein et en toute connaissance de cause qu'il s'était prévalu de faux afin de démontrer un fait essentiel et décisif pour l’OCPM lors de l’analyse de son dossier.

D. a. Par acte du 14 septembre 2022, M. B______ (ci-après : le recourant) et Mme A______ ont interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement du 22 juillet 2022, concluant, principalement, à son annulation et à ce qu'il soit ordonné à l'OCPM de leur délivrer une autorisation de séjour. Préalablement, ils ont requis l’audition des mêmes témoins que devant le TAPI.

 

À son arrivée en Suisse en 2018, C______ avait été intégrée à l’école primaire. Elle avait commencé le cycle en regroupement (ci-après : R) R2, puis avait été promue en R3. Grâce à son parcours exemplaire, elle étudiait au ______ en vue d’obtenir une maturité gymnasiale. D______ avait été admis au cycle lors de l’année scolaire 2020-2021 en R1 avant de passer en R2 à la rentrée 2021. Il terminait son cycle. E______ effectuait sa dernière année d’école primaire alors que F______ venait de commencer sa scolarité. Mme A______ avait obtenu un diplôme de l’ « école des mamans » pour sa participation aux cours de français entre 2020 et 2022. Les faits avaient été constatés de façon inexacte. Le TAPI n’avait pas tenu compte de la progression scolaire manifeste des enfants, prouvée par pièces.

 

Leur droit d’être entendus n’avait pas été respecté, le TAPI ayant refusé d’auditionner leurs témoins à propos de leur présence et de leur intégration sociale en Suisse.

 

L’art. 30 al. 1 let. b LEI avait été violé. Les quatre enfants poursuivaient leur scolarité à Genève depuis 2018 pour les plus âgés. Ils avaient fourni de grands efforts d’intégration et avait démontré une ascension scolaire exemplaire. Un retour forcé dans leur pays d’origine constituerait un véritable déracinement dans la mesure où ils étaient en pleine adolescence et avaient créé, depuis leur arrivée en Suisse, des attaches profondes et durables avec leur pays d’adoption, tout particulièrement les trois aînés. Par ailleurs, M. B______ était arrivé en Suisse pour la première fois en 1999 et avait résidé et travaillé de manière continue depuis 2008. La famille ne pourrait pas retourner vivre dans son pays d’origine.

b. Les recourants ont produit plusieurs pièces nouvelles : la maîtresse de classe d’C______, pendant l’année scolaire 2021-2022, attestait que celle-ci avait été exemplaire tout au long de l’année. Elle avait été très impliquée et appliquée. Elle avait su faire preuve de grande capacité d’adaptation et avait été « épatante » lors du voyage d’études à Zermatt où elle avait su apprendre les bases du ski alpin en trois jours et vivre dans un milieu « qui est loin de ses habitudes » ; une attestation de la maîtresse de classe d’D______, élève en 11ème en « langues vivantes et communication (LC) » selon laquelle l’élève n’avait pas de problèmes de discipline et était respectueux envers son entourage. Il avait bien réussi sa promotion à la fin de l’année précédente ; de même, l’enseignant d’E______ attestait qu’il parlait couramment le français, était très appliqué et impliqué dans tous ses apprentissages au quotidien dans la classe. Il était très bien intégré, se montrait toujours respectueux envers ses camarades et ses enseignants. Il obtenait de bons résultats scolaires et était très apprécié de tous ; une attestation de la maison de quartier du Grand-Lancy attestait qu’E______ et F______ fréquentaient très régulièrement l’ « accueil libre enfant », comme l’avaient fait précédemment C______ et D______. Tous quatre étaient parfaitement intégrés dans le quartier et à la maison de quartier. Ils participaient activement aux animations et étaient respectueux des règles de fonctionnement.

c. L’OCPM a conclu au rejet du recours. Si l’intégration scolaire des enfants était certes méritoire, ces éléments devaient s’apprécier au regard des autres circonstances propres au cas d’espèce. Tous les membres de la famille avaient passé la majorité de leur vie au Kosovo où ils étaient régulièrement retournés pour rendre visite à leur famille au vu des demandes de visas retour versées au dossier. Compte tenu de la courte durée de séjour en Suisse des enfants, leur retour dans leur pays natal n’apparaissait pas encore constitutif d’un véritable déracinement quand bien même ils étaient actuellement en pleine période d’enfance, respectivement d’adolescence. Ils étaient arrivés en Suisse quatre ans auparavant. Leur intégration n’apparaissait pas encore irréversible. Ils n’avaient pas développé de fortes attaches avec leur pays d’accueil. La situation des enfants n’était pas suffisante pour parvenir à une autre solution que le rejet du recours.

d. Dans leur réplique, les recourants ont une nouvelle fois détaillé la situation de leurs enfants, leurs excellents résultats scolaires, leur intégration et leur connaissance de la langue française.

La durée de leur séjour avait été mal établie par le TAPI qui n’avait pas voulu entendre leurs témoins. La condamnation pénale de M. B______ ne suffisait pas à nier son intégration, puisqu’il résidait et travaillait en Suisse depuis presque vingt ans, n’avait fait l’objet d’aucune poursuite ni d’aucune autre condamnation pénale que celle liée à sa situation irrégulière (sic).

E. a. Il ressort du dossier un procès-verbal d’audition de M. B______ du 9 juin 2021 à la police que, selon ses déclarations, son père était décédé le 4 juin 2020 et sa mère début 2021. Il était rentré au Kosovo en 2005 pour une durée de deux ans environ. Le couple s’était marié civilement au Kosovo le 27 juin 2005. En 2007, en Suisse, il avait rencontré une Suissesse âgée de 50 ans environ avec laquelle il avait vécu à Carouge et avait envisagé de se marier « pour les papiers ». Il ne ressentait aucun sentiment pour elle. Il avait dépensé approximativement CHF 70'000.- pour les travaux de sa maison au Kosovo. Il avait déposé une demande de titre de séjour en France en 2009 laquelle avait été refusée. Il n’y était resté que deux semaines.

b. Dans une attestation du 28 janvier 2022, M. K______ affirme connaître M. B______ pour l’avoir côtoyé à plusieurs reprises professionnellement et en privé. Il le décrit comme une personne très sérieuse, correcte et d’une attitude très agréable. Depuis 2007 (sic), la famille de M. B______ ainsi que ses centres d’intérêt étaient en Suisse où les enfants suivaient une scolarité exemplaire. La famille méritait d’être mise au bénéfice d’une autorisation de séjour.

c. M. J______ a affirmé, dans une attestation du 29 janvier 2022, rédigée dans des termes quasi identiques à celle de M. K______, avoir côtoyé à plusieurs reprises, professionnellement ou en privé, M. B______. Il était sérieux, correct et d’un commerce très agréable. Depuis 2012 (sic), la famille de M. B______ ainsi que ses centres d’intérêt étaient en Suisse. La famille méritait d’être mise au bénéfice d’une autorisation de séjour.

d. I______ et son père, ont produit trois photos à l’appui de leur attestation du 14 novembre 2021. La première les réunissait avec le recourant. Elle datait de 2000. Mme I______ avait deux ans. Deux photos supplémentaires dataient de 2007. Ces photos prouvaient que M. B______ « résidait en Suisse depuis plusieurs années ».

F. a. Sur ce, les parties ont été informées, le 14 décembre 2022, que la cause était gardée à juger.

b. Le contenu des pièces sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Les recourants se plaignent d’une violation de leur droit d’être entendus.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1)

2.2 En l'espèce, les recourants ont eu l’occasion de s’exprimer devant l’OCPM, le TAPI et la chambre de céans, et de produire toute pièce utile. Deux des témoins souhaités ont produit des attestations, relativement évasives et dont les termes sont pour partie identiques. Deux autres ont produit trois photos. Contrairement à ce qu’ils soutiennent, lesdites images ne sont pas aptes à prouver la présence continue du recourant en Suisse, mais confirme tout au plus sa présence aux dates de leur prise, soit en 2000 et 2007. De surcroît, l’un des témoins souhaités ne peut avoir que des souvenirs peu précis, au vu de son jeune âge au moment des faits (2 ans en 2000). Le dernier témoin proposé, Mme L______, est l’ancienne amie du recourant, avec laquelle il a vécu entre 2003 et 2004. Le recourant a surtout admis, lors de deux auditions devant la police, qu’il ne s’était établi en Suisse qu’à compter de 2013, procédant auparavant par des « va-et-vient » avec le Kosovo. L’audition des témoins n’est en conséquence pas de nature à influer sur ce fait, admis par le recourant. S’agissant de l’intégration de l’intéressé, les contacts avec les personnes proposées pour être auditionnées apparaissent avoir été relativement sporadiques au vu de leurs attestations. Les auditions ne sont par ailleurs pas aptes à modifier l’issue du litige au vu des considérants qui suivent. La chambre de céans dispose d'un dossier complet lui permettant de trancher le litige en toute connaissance de cause. Il ne sera pas donné acte à la demande d’audition.

2.3 Pour les mêmes motifs, le TAPI n’a pas violé le droit d’être entendu des recourants.

3. Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), devenue la LEI, et de l'OASA. Conformément à
l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l'espèce, avant le 1er janvier 2019 sont régies par l'ancien droit (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1075/2019 du 21 avril 2020 consid. 1.1).

3.1 L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

3.2 L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g).

Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (Directives du SEM, domaine des étrangers, octobre 2013, actualisées le 1er janvier 2021 [ci-après : Directives LEI] ch. 5.6.12)

3.3 Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c ; Directives LEI, op. cit., ch. 5.6).

La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Ses conditions de vie et d'existence doivent ainsi être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des étrangers. En d'autres termes, le refus de le soustraire à la réglementation ordinaire en matière d'admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il y soit bien intégré, tant socialement et professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger qu'il vive dans un autre pays, notamment celui dont il est originaire. À cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage que l'intéressé a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3 ; 124 II 110 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 7.2).

Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.4 ; C-6379/2012 et C-6377/2012 du 17 novembre 2014 consid. 4.3).

3.4 L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique qu'il se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération (ATF 123 II 125 consid. 5b.dd ; arrêts du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/90/2021 du 26 janvier 2021 consid. 3e).

La question est donc de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (ATA/90/2021 précité consid. 3e ; ATA/1162/2020 du 17 novembre 2020
consid. 6b ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015
consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

4. Les recourants se plaignent d’une constatation inexacte des faits pertinents.

4.1 Le recours peut être formé pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. b LPA).

4.2 En l’espèce, quand bien même il ressort de l’état de fait du jugement du TAPI une confusion entre les quatre enfants et leur date de naissance, le TAPI a discuté leur situation dans la partie en droit. Il est juste qu’aucun développement particulier n’est fait sur les commentaires élogieux des enseignants ainsi que la progression des enfants, notamment le passage, huit semaines après son arrivée de R2 en R3 s’agissant d’C______, du transfert de R1 en R2 d’D______, ainsi que l’obtention de son certificat. Ces faits ne sont toutefois pas de nature à influer l’issue du litige. Leur scolarité et intégration ne sont en effet qu’un élément parmi d’autres et ne sont pas déterminantes conformément aux considérants qui suivent. Le grief n’est en conséquence pas fondé.

4.3 Le recourant considère que le TAPI a mal établi les faits en ne retenant pas qu’il séjournait en Suisse depuis 2008, voire depuis « vingt ans ».

Or, les documents qualifiés de faux dans les titres par le Ministère public genevois, dans une décision définitive et exécutoire, concernent précisément les pièces qu’il a produites pour prouver son séjour et son activité auprès de G______, et H_______, soit respectivement des certificats de salaire pour les années 2010 à 2012 pour la première entreprise et une fiche de salaire du mois de mai 2009 pour la seconde. Par ailleurs et surtout, son affirmation devant la chambre de céans selon laquelle son séjour serait ininterrompu depuis 2008 est contredite par ses propres déclarations à la police des 28 février 2017 et 9 juin 2021. Il a à celle-ci indiqué avoir fait des « va et vient » entre le Kosovo et la Suisse de 1998 jusqu’en 2013. Ce n’était qu’à cette date qu’il s’était installé en Suisse. Conformément à ses propres déclarations, il ne peut en conséquence pas être retenu qu’il séjourne en Suisse depuis vingt ans, ni même depuis 2008.

Le grief sera rejeté.

5. Les recourants invoquent une violation des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 de l’OASA.

5.1 Le recourant se prévaut d’une intégration réussie et exemplaire, allègue résider et travailler en Suisse depuis presque vingt ans et n’avoir été condamné que pour sa situation irrégulière en Suisse. Or, d’une part il oublie sa condamnation du 10 juin 2021 pour faux dans les titres, comportement frauduleux à l’égard des autorités, infractions d’une gravité certaine, en l’espèce d’autant plus que les documents falsifiés concernaient précisément la présente procédure d’octroi d’une autorisation de séjour. D’autre part, indépendamment d’avoir commis lesdites infractions à la législation en vigueur, témoignant ainsi indéniablement de problèmes d’intégration et de non-respect de l’ordre juridique suisse, l’intéressé n’a manifestement pas pris conscience de la gravité de ses actes.

Le recourant produit par ailleurs des attestations de connaissances. Elles évoquent son caractère aimable et le fait que la famille mériterait d’être mise au bénéfice d’une autorisation de séjour. Elles ne font toutefois pas état d’une intégration sociale particulière, d’une implication dans le réseaux culturel, sportif, associatif ou autre genevois. De surcroît, lors de l’audition du recourant par la police le 9 juin 2021, un interprète a été nécessaire, alors même qu’il est retenu qu’il a été en Suisse depuis 2013, soit huit ans plus tôt. Il ne remplit en conséquence pas le critère de l’intégration de l’art. 31 al. 1 let. a OASA.

5.2 Il a fait l’objet de deux condamnations, dont une, grave, pour faux dans les titres, comportement frauduleux. Il n’a pas respecté la décision de renvoi dont il a fait l’objet en 2000 suite au refus de sa demande d’asile. La condition du respect de l’ordre juridique suisse au sens de l’art. 31 al. 1 let. b OASA n’est pas remplie.

5.3 Le critère de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (art. 31 al. 1 let. c OASA) sera analysé dans les considérants qui suivent.

5.4 Son intégration professionnelle ne répond pas aux exigences jurisprudentielles strictes. En effet, la société M______ l’avait engagé en qualité de manœuvre C le 8 juillet 2019. Le procès-verbal de son audition devant la police le 9 juin 2021 mentionne le métier de peintre. Il avait précédemment déclaré avoir travaillé en qualité de monteur de vitres et de maçon. Il ne peut être retenu que le recourant possède des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les utiliser dans son pays d’origine ou qu’il aurait réalisé une insertion professionnelle remarquable (art. 31 al. 1 let. d OASA).

5.5 Au vu de ses déclarations, il doit être retenu une durée de séjour en Suisse depuis 2013, soit neuf ans (art. 31 al. 1 let. e OASA), ce qui peut être qualifié de relativement long. Cette durée a toutefois été effectuée dans l’illégalité.

5.6 Le recourant ne rencontre pas de problème de santé (art. 31 al. 1 let. f OASA).

5.7 S’agissant des possibilités de réintégration, il peut travailler et pourra mettre à profit au Kosovo les compétences acquises en Suisse. Il a encore de la famille dans son pays d’origine et s’y est rendu à quatre reprises ces dernières années. Si ses parents sont aujourd’hui décédés, il déclarait, lors de son audition de 2017, avoir encore au Kosovo trois sœurs et deux frères. Il s’est installé en Suisse en 2013 alors âgé de 31 ans environ. Il ressort de son audition par la police du 9 juin 2021, qu’il a suivi sa scolarité au Kosovo à Gjylekar où il a fait son collège. Il y a vécu l'intégralité de son adolescence, soit les années jugées cruciales et déterminantes pour la formation de sa personnalité. Il y a commencé sa vie professionnelle en qualité de coiffeur, métier qu’il a appris « sur le tas ». Il a par la suite fait des allers-retours avec la Suisse pendant quinze ans. Il a rencontré sa femme au Kosovo et s’est marié civilement en 2005. Sa fille aînée est née en 2006, puis son fils aîné en 2007. Dès 2008, il a commencé à construire sa maison au Kosovo. Il s’est établi à Genève, sans autorisation, à compter de 2013, étant précisé que son troisième enfant est né en avril de la même année. Il a donc vécu pendant la très grande majorité de sa vie au Kosovo, y a été scolarisé, y a travaillé, rencontré la mère de ses enfants et y a fondé une famille. Aucun obstacle ne s’oppose à son retour, qu’il semble au demeurant envisager au vu de la construction de sa maison (art. 31 al. 1 let. g OASA).

6. Les recourants invoquent leur situation familiale, particulièrement la période de scolarisation et la durée de la scolarité de leurs enfants.

6.1 Dans l'examen d'un cas de rigueur concernant le renvoi d'une famille, il importe de prendre en considération la situation globale de celle-ci. Dans certaines circonstances, le renvoi d'enfants peut engendrer un déracinement susceptible de constituer un cas personnel d'extrême gravité.

6.2 D'une manière générale, lorsqu'un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse et y a seulement commencé sa scolarité, il reste encore attaché dans une large mesure à son pays d'origine, par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet (arrêt du TAF C-636/2010 du 14 décembre 2010 consid. 5.4 et la référence citée). Avec la scolarisation, l'intégration au milieu suisse s'accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l'âge de l'enfant lors de son arrivée en Suisse et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, de l'état d'avancement de la formation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter, dans le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle entamée en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L'adolescence, une période comprise entre 12 et 16 ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 9a). Sous l'angle du cas de rigueur, il est considéré que cette pratique différenciée réalise la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, telle qu'elle est prescrite par l'art. 3 al. 1 de la convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (CDE - RS 0.107, entrée en vigueur pour la Suisse le 26 mars 1997 ; arrêts du Tribunal fédéral 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3 et 2A.43/2006 du 31 mai 2006 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C 3592/2010 du 8 octobre 2012 consid. 6.2 ; ATA/434/2020 du 31 avril 2020 consid. 10).

6.3 Dans un arrêt de principe (ATF 123 II 125), le Tribunal fédéral a mentionné plusieurs exemples de cas de rigueur en lien avec des adolescents. Ainsi, le cas de rigueur n'a pas été admis, compte tenu de toutes les circonstances, pour une famille qui comptait notamment deux adolescents de 16 et 14 ans arrivés en Suisse à, respectivement, 13 et 10 ans, et qui fréquentaient des classes d'accueil et de développement (arrêt non publié Mobulu du 17 juillet 1995 consid. 5). Le Tribunal fédéral a précisé dans ce cas qu'il fallait que la scolarité ait revêtu une certaine durée, ait atteint un certain niveau et se soit soldée par un résultat positif (ATF 123 II 125 consid. 4b). Le Tribunal fédéral a admis l'exemption des mesures de limitation d'une famille dont les parents étaient remarquablement bien intégrés ; venu en Suisse à 12 ans, le fils aîné de 16 ans avait, après des difficultés initiales, surmonté les obstacles linguistiques, s'était bien adapté au système scolaire suisse et avait achevé la neuvième primaire ; arrivée en Suisse à 8 ans, la fille cadette de 12 ans s'était ajustée pour le mieux au système scolaire suisse et n'aurait pu se réadapter que difficilement à la vie quotidienne scolaire de son pays d'origine (arrêt non publié Songur du 28 novembre 1995 consid. 4c, 5d et 5e). De même, le Tribunal fédéral a admis que se trouvait dans un cas d'extrême gravité, compte tenu notamment des efforts d'intégration réalisés, une famille comprenant des adolescents de 17, 16 et 14 ans arrivés en Suisse cinq ans auparavant, scolarisés depuis quatre ans et socialement bien adaptés (arrêt Tekle du 21 novembre 1995 consid. 5b ; arrêt non publié Ndombele du 31 mars 1994 consid. 2, admettant un cas de rigueur pour une jeune femme de près de 21 ans, entrée en Suisse à 15 ans)

6.4 En l’espèce, à ce jour, les deux derniers de la fratrie sont âgés de presque 10 ans et de 5 ans. Ils sont arrivés en Suisse respectivement à 5 ans et âgé de quelques mois seulement pour le benjamin. Celui-ci vient de commencer sa scolarité. Son frère E______ est en 7ème primaire. Quand bien même son enseignant fait état, dans une attestation du 2 décembre 2022, d’excellents résultats scolaires et d’une très bonne intégration en classe, et qu’un document fait état de sa fréquentation régulière de la maison de quartier de Lancy où il est parfaitement intégré, sa situation relève, au sens de la jurisprudence, de celle d’un enfant qui a passé ses premières années de vie en Suisse et y a seulement commencé sa scolarité. Dans ces conditions, son intégration au milieu socioculturel suisse n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet.

Autre est la question des deux aînés, âgés respectivement aujourd’hui de 16 et 15 ans, adolescents au sens de la jurisprudence précitée. Ils sont arrivés en Suisse à presque 12 et 11 ans. Tous deux ont manifestement consenti des efforts importants d’intégration, ce que leurs enseignants ont relevé et qui ressort de leur évolution scolaire. Ils ont ainsi été intégrés, à totale satisfaction à teneur des pièces du dossier, dans leur environnement scolaire depuis quatre ans. Il convient cependant de constater que, s’il est certes réjouissant que l’aînée ait pu entamer une formation gymnasiale, elle ne se trouve qu’au début de celle-ci, commencée il y a quatre mois alors que son frère est en train d’achever son cycle d’orientation, soit de finir sa scolarité obligatoire. Le critère jurisprudentiel de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter, dans le pays d’origine, la scolarisation ou la formation professionnelle entamée en Suisse permet de considérer que si certes les enfants ont réussi à s’intégrer au niveau scolaire, le renvoi décidé par l’OCPM dans le cadre d’une analyse globale de la famille, comme l’impose la loi, n’est pas incompatible et inexigible de la part des enfants qui pourront, à l’instar de leur père à l’époque, poursuivre leur cursus scolaire au collège au Kosovo.

La jurisprudence mentionnée par les recourants fait référence à l’analyse de situation globale où l’intégration des parents est fréquemment qualifiée de remarquable. Tel n’est pas le cas en l’espèce au vu des considérants qui précèdent sur la situation du père de famille et du fait que s’il est exact que la famille n’a pas de dettes ni n’a sollicité l’aide sociale, qu’elle est au bénéfice d’un contrat de bail à loyer, la situation de la mère des enfants ne peut pas non plus être qualifiée de remarquable. Celle-ci ne travaille pas et a attesté d’une participation au cours de français de l’école des mamans de 2020 à 2022 sans toutefois apporter la preuve d’une certification A2. Elle ne manifeste pas d’envie de s’intégrer professionnellement, n’indique pas participer à la vie locale, a une courte durée de présence en Suisse et n’allègue pas de problèmes de santé. Aussi originaire du Kosovo, sa réintégration n’apparaît pas problématique dès lors qu’elle en parle la langue, y a grandi et vécu jusqu’à ses 31 ans et est aujourd’hui âgée de 36 ans.

Les recourants ne peuvent pas être suivis lorsqu’ils affirment que les enfants n’auraient pas d’attaches au Kosovo. Si les deux aînés ont passé des années importantes de leur adolescence en Suisse, ils ont vécu respectivement presque 11 et 12 ans au Kosovo, soit pour l’aînée les trois quarts de son existence. Ils en parlent la langue, connaissent les us et coutumes, y ont vécu, y ont été scolarisés, y ont de la famille, et des projets d’avenir au vu de la maison que la famille y construit.

Ainsi, au vu de tous les critères pertinents, pour chacun des membres de la famille, d’une appréciation globale de la situation de celle-ci, c’est sans violer le droit, ni abuser de son large pouvoir d’appréciation, que l’autorité intimée a refusé de délivrer une autorisation de séjour aux recourants et à leurs quatre enfants.

Le grief de violation de l’art. 30 al. 1 let. e LEI sera rejeté.

7. Le recourant ne remplissant pas les conditions d’octroi d’un permis pour cas d’extrême gravité, comme vu dans les considérants qui précèdent, c’est à bon droit qu’il ne se prévaut pas de « l’opération Papyrus ». En effet, « l'opération Papyrus » n'emporte en particulier aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/539/2020 du 29 mai 2020 consid. 6b ; ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

8. Selon l'art. 64 al. 1 LEI, les autorités compétentes renvoient de Suisse tout étranger qui n'a pas d'autorisation alors qu'il y est tenu (let. a), ainsi que tout étranger dont l'autorisation est refusée, révoquée ou n'a pas été prolongée (let. c) en assortissant ce renvoi d'un délai de départ raisonnable (al. 2). Le renvoi d'un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI

En l'espèce, rien ne permet de retenir que l'exécution du renvoi du recourant et de sa famille ne serait pas possible, licite ou raisonnement exigible.

Dans ces circonstances, la décision querellée est conforme au droit.

Mal fondé, le recours sera donc rejeté.

9. Vu l’issue, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge des recourants qui succombent (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 septembre 2022 par Madame A______ et Monsieur B______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 22 juillet 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Madame A______ et Monsieur B______, solidairement ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Bernard Cron, avocat des recourants, à l’office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et Michon Rieben, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.