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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1911/2016

ATA/621/2016 du 19.07.2016 ( FPUBL ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1911/2016-FPUBL ATA/621/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 juillet 2016

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

COMMUNE DE PLAN-LES-OUATES
représentée par Me Eric Maugué, avocat

et

Madame B______

 

 



EN FAIT

1. Monsieur A______, domicilié en France, a été engagé par la commune de Plan-les-Ouates (ci-après : la commune) à compter du 16 mai 2010, en qualité de C______.

2. Par courrier du 26 avril 2016, remis en mains propres, la commune l’a informé de sa décision du 19 avril 2016 de le « suspendre de [son] activité professionnelle » avec effet immédiat et d’ouvrir une enquête administrative à son encontre, laquelle était confiée à Madame B______ (ci-après : l’enquêtrice). Lui étaient notamment reprochés divers propos inadéquats et répétés, une violation du secret de fonction et de la déloyauté à l’égard de son employeur. Le traitement de l’intéressé était maintenu.

3. Le 3 mai 2016, une avocate s’est constituée pour la défense des intérêts de M. A______.

4. Une audience de comparution personnelle des parties s’est tenue devant l’enquêtrice le 18 mai 2016 dès 9h. Elle s’est terminée à 13h05.

5. Par courrier du 20 mai 2016, anticipé par fax à l’instar de tout l’échange de correspondances qui suit, l’avocate a transmis un certificat médical daté de la veille, signé par la Doctoresse D______, médecin spécialiste FMH en psychiatrie – psychothérapie, attestant que l’état de santé de M. A______ nécessitait de limiter le temps d’audience à quatre heures maximum.

6. Par courrier du 25 mai 2016, le conseil de M. A______ a informé l’enquêtrice que l’état de santé de son mandant s’était détérioré. Il était en incapacité de travail à 100 % depuis le 24 mai 2016, jusqu’au 9 juin 2016. Il n’était pas apte à se présenter à la deuxième audience de comparution personnelle des parties, fixée le jeudi 26 mai 2016. Un certificat médical du 24 mai 2016 était joint.

L’avocate relevait par ailleurs ne pas pouvoir rencontrer son client et, par voie de conséquence, ne pas être à même de préparer les audiences d’enquêtes, prévues les 30 et 31 mai 2016. Or, il était impératif qu’elle puisse s’entretenir avec lui avant toute audience et que ce dernier puisse assister aux auditions pour pouvoir poser toutes les questions en lien avec les griefs soulevés à son encontre.

7. Par courrier du même jour, l’enquêtrice a annulé l’audience de comparution personnelle des parties du lendemain.

Les audiences d’instruction consacrées à l’audition de témoins des 30 et 31 mai 2016 étaient maintenues. Le temps d’audience ne serait pas limité à quatre heures. Il n’était pas nécessaire que M. A______ comparaisse personnellement, pouvant se faire représenter. Toutes questions utiles pourraient être posées par l’entremise de son conseil. L’intéressé et son avocate avaient disposé de plusieurs semaines pour préparer l’instruction, les pièces du dossier ayant été communiquées au mandataire le 6 mai 2016.

8. Par courrier du 26 mai 2016, l’avocate a contesté pouvoir valablement représenter son client compte tenu de l’état de santé de celui-ci. Le droit d’être entendu de ce dernier était en conséquence violé. Si elle ne pouvait pas obtenir la garantie écrite de l’enquêtrice que trois témoins pourraient être réentendus en présence de son client, une fois celui-ci rétabli, l’existence de son mandat mettait en péril les droits les plus essentiels de son client. De nombreuses pièces importantes en lien avec les griefs soulevés par la commune faisaient par ailleurs défaut dans le dossier. La ré-audition sollicitée ne devait dès lors intervenir qu’une fois lesdites pièces produites.

Afin d’éviter le cumul de « ré-interrogatoires et d’audition des parties », l’avocate sollicitait la suspension de l’enquête jusqu’au rétablissement de son mandant et l’apport complet de toutes les pièces requises.

Par courrier séparé du même jour, elle a énuméré vingt pièces dont elle sollicitait la production.

9. Par réponse du même jour, l’enquêtrice a refusé de suspendre la procédure. Le droit d’être entendu de M. A______ n’était en aucune manière compromis. La ré-audition des trois témoins serait ordonnée si celle-ci s’avérait pertinente.

En tant que de besoin, le courrier pouvait être considéré comme une décision, exécutoire nonobstant recours.

10. Par courrier du 27 mai 2016, l’avocate a indiqué être contrainte de mettre fin à son mandat avec effet immédiat, pour les motifs précédemment expliqués. Elle déplorait la situation.

11. Par pli du même jour à M. A______, l’enquêtrice a invité celui-ci à se présenter aux audiences d’enquêtes des 30 et 31 mai 2016 si son état de santé le lui permettait. Le certificat médical produit faisait mention de son impossibilité de se présenter le 26 mai, mais ne mentionnait pas les audiences précitées. À défaut, l’enquêtrice veillerait à ce que son droit d’être entendu soit respecté par écrit.

12. Les audiences d’enquêtes des 30 et 31 mai 2016 se sont tenues. M. A______ était absent et non représenté.

13. Par certificat médical du 1er juin 2016, la Dresse D______ a certifié que son patient souffrait d’un état dépressif et anxieux sévère avec des troubles du sommeil importants portant à la fois sur des difficultés d’endormissement, des réveils nocturnes et précoces qui engendraient un état de fatigue, d’énormes difficultés de concentration et des crises d’angoisse. Ce tableau clinique entravait ses capacités cognitives et l’empêchait de s’exprimer valablement dans les auditions telles que celles auxquelles il était convoqué.

14. Par acte mis à la poste le 6 juin 2016 et reçu par la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le 9 juin 2016, M. A______ a, sous sa signature, interjeté recours contre la décision rendue le 26 mai 2016.

Il a conclu préalablement à la restitution de l’effet suspensif au recours. Principalement, la décision du 26 mai 2016 devait être annulée. Il devait être constaté que les audiences d’instructions tenues en son absence constituaient une violation de son droit d’être entendu ainsi que de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et devaient être annulées. L’enquête administrative devait être suspendue pendant la durée de son incapacité totale. Il devait être ordonné qu’aucune audience ne se tienne tant qu’il était en incapacité. Suivaient des conclusions subsidiaires. Toutes les conclusions étaient prises sous suite de « frais et dépens ».

Son incapacité était attestée par certificat médical et limitée au 9 juin 2016. L’enquête administrative aurait aisément pu se poursuivre à compter de cette date. « Décider de tenir les auditions d’instruction en [son] absence constitu[ait] la menace d’un dommage difficile à réparer et la condition de l’urgence [était] réalisée ». Son droit d’être entendu avait été violé alors même que le statut du personnel de la commune garantissait que la personne faisant l’objet d’une enquête administrative pouvait participer à toutes les audiences d’enquête et requérir des mesures d’instruction. Les audiences s’étaient tenues en son absence. Il n’avait pas pu questionner les témoins et les confronter aux pièces dont il avait demandé l’apport. Il subissait un préjudice irréparable.

15. Par observations sur effet suspensif du 20 juin 2016, la commune a conclu à l’irrecevabilité du recours. Subsidiairement, il devait être rejeté. Les conclusions étaient prises sous suite de « frais et dépens ».

La décision incidente ne causait aucun préjudice irréparable à l’intéressé, lequel pouvait se faire représenter dans la procédure. « La manœuvre [du] conseil consistant à cesser abruptement d’occuper et de rédiger dans la foulée un recours à la signature de son mandant pour se plaindre d’une violation du droit d’être entendu constitu[ait] un abus de droit manifeste ». L’avocate avait requis, le 26 mai 2016, la production de plus de vingt pièces, dont elle ne pouvait de toute évidence pas connaître l’existence, a fortiori apprécier leur pertinence, sans en avoir préalablement conféré avec son mandant. Elle ne pouvait pas sérieusement et simultanément soutenir qu’il lui serait impossible de s’entretenir avec ce dernier dans la perspective de prochaines audiences en raison de l’état de santé de l’intéressé. De surcroît, l’impossibilité de s’entretenir avec son avocate n’était pas établie par certificat médical. L’enquêtrice était par ailleurs tenue à un devoir de célérité dans l’accomplissement de sa mission. Il existait un intérêt objectif pour les deux parties en présence à ce que l’enquête soit menée à son terme dans un délai raisonnable. Le recours était manifestement irrecevable.

16. Par observations du 20 juin 2016, l’enquêtrice a conclu au rejet de la requête en restitution de l’effet suspensif.

Le 13 juin 2016, elle avait reçu un courrier de M. A______ comprenant trois certificats médicaux, respectivement des 1er, 9 et 10 juin 2016. Au certificat médical du 9 juin 2016 était joint un certificat d’incapacité de travail à 100 % du 9 au 19 juin 2016 pour cause de maladie. Le certificat médical du 9 juin 2016 indiquait que l’état de santé de l’intéressé nécessitait de limiter le temps d’audience, de sorte qu’il ne dépasse pas quatre heures. Le certificat médical du 10 juin 2016 indiquait que M. A______ ne pouvait pas assister à quelque audience que ce soit tant qu’il était en incapacité de travail à 100 %.

Elle avait reçu le 17 juin 2016 un certificat médical indiquant une totale incapacité de travail de M. A______ du 20 au 30 juin 2016.

17. Par décision du 30 juin 2016, la chambre de céans a rejeté la requête en restitution de l’effet suspensif. Aucun certificat médical n’indiquait que M. A______ ne pouvait pas exercer son droit d’être entendu par écrit, indépendamment de la constitution, ou non, d’un avocat pour la défense de ses intérêts.

18. Par observations sur le fond du 30 juin 2016, la commune a persisté dans ses conclusions en irrecevabilité du recours, subsidiairement en son rejet.

19. Par écriture du même jour, l’enquêtrice a conclu à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet. Le 22 juin 2016, elle avait donné en grande partie suite à la requête en production de pièces de M. A______ du 26 mai 2016. Par courrier du même jour, elle avait sollicité de celui-ci qu’il lui communique, d’ici au 30 juin 2016 un domicile de notification en Suisse, respectivement désigne un avocat pour le représenter. Par courrier du 28 juin 2016, reçu le lendemain, M. A______ s’était plaint de subir des pressions constantes de l’enquêtrice, aucune base légale ne l’autorisant à exiger un domicile de notification en Suisse ou à ce qu’il prenne un avocat. Elle était enjointe à retirer ses requêtes d’ici au 30 juin 2016, sous peine que le recourant soit « dans l’obligation d’entreprendre d’autres démarches », selon les termes de celui-ci.

20. Le 30 juin 2016 encore, M. A______ a déposé au greffe de la chambre administrative des pièces complémentaires, à savoir des certificats médicaux déjà versés à la procédure ainsi que deux certificats, respectivement des 15 et 30 juin 2016 attestant d’une incapacité totale de travail pour cause de maladie, le second indiquant une durée probable jusqu’au 17 juillet 2016. Par certificat du 29 juin 2016, la Dresse D______ indiquait avoir reçu M. A______ suite au courrier de l’enquêtrice du 22 juin 2016. « Suite à cette lettre, que M. A______ a vécue comme très menaçante, il présente à nouveau une aggravation de son état dépressivo-anxieux, avec réapparition de troubles du sommeil et de crises de panique qui s’étaient amendés ces dernières semaines. M. A______ a déjà subi un choc violent en étant suspendu d’un jour à l’autre de ses fonctions. Son état de santé est de plus fragile, tant sur le plan physique que psychique et ne permet pas, à l’heure actuelle, qu’il soit présent à des audiences qui représentent un stress tel pour lui qu’elles mettraient gravement sa santé en jeu. Il me semble évident qu’un arrêt à 100 % et qu’une incapacité d’assister à des auditions, ce qui je le rappelle est dû à son état de santé, couvre également une incapacité à se déterminer. Par ailleurs, le "quant au surplus" est probablement un jargon juridique sur lequel je ne puis me prononcer, ne le comprenant pas ».

21. Invité à se déterminer sur les écritures des intimés s’il le souhaitait, M. A______, sous sa signature, a déposé une réplique, dans le délai imparti au 12 juillet 2016.

Il ne pouvait s’exprimer clairement sur papier que grâce à l’aide de ses enfants, majeurs. L’acharnement de l’enquêtrice et de la commune était incompréhensible alors même que les certificats médicaux attestaient d’une grave péjoration de son état de santé, incompatible avec sa présence à des audiences. L’atteinte à sa santé avait commencé en automne 2015 au moment où il avait appris qu’un dossier était en train d’être « monté » contre lui. Sa suspension était dramatique. Outre qu’elle n’était pas fondée, il n’avait pas pu dire au revoir aux adolescents qu’il suivait. S’il avait pu commencer à organiser sa défense avec son conseil au début du mois de mai, y compris la liste de témoins, il n’avait pas été capable de rédiger le moindre document depuis son audition du 18 mai 2016. Pour l’heure, sa santé était atteinte et la poursuite de la procédure dans de telles circonstances ne pouvait pas avoir lieu sans bafouer ses droits les plus essentiels, celui du respect de sa santé et celui de pouvoir valablement se défendre en instruisant un avocat et en participant aux audiences.

22. Par courrier du 12 juillet 2016, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.


 

EN DROIT

1. La chambre administrative est l’autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). Selon l’art. 132 al. 2 LOJ, le recours y est ouvert contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e, ainsi que 57 LPA. Sont réservées les exceptions prévues par la loi.

Aux termes de l’art. 4 al. 1 LPA, sont considérées comme des décisions, les mesures individuelles et concrètes prises par l’autorité dans les cas d’espèce fondés sur le droit public fédéral, cantonal, communal et ayant pour objet : de créer, de modifier ou d’annuler des droits ou des obligations ; de constater l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits, d’obligations ou de faits ; de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations. Les décisions incidentes sont également considérées comme des décisions (art. 4 al. 2 LPA).

2. a. Les décisions incidentes sont susceptibles de recours si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 57 let. c LPA).

b. Cette disposition légale a la même teneur que l’art. 93 al. 1 let. a et b de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110). Un préjudice est irréparable au sens de cette disposition lorsqu’il ne peut être ultérieurement réparé par une décision finale entièrement favorable au recourant (ATF 138 III 46 consid. 1.2 et les références citées). La jurisprudence rendue sous l’ancien droit, applicable à l’art. 93 LTF, estimait qu’un intérêt économique ou un intérêt tiré du principe de l’économie de la procédure pouvait constituer un préjudice irréparable (ATF 127 II 132 consid. 2a et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_100/2009 consid. 1.3). Le simple fait d’avoir à subir une procédure et les inconvénients qui y sont liés ne constitue toutefois pas en soi un préjudice irréparable. Un dommage de pur fait, tel que la prolongation de la procédure ou un accroissement des frais de celle-ci, n’est notamment pas considéré comme un dommage irréparable de ce point de vue (ATF 138 III 190 consid. 6 et les références citées).

c. La chambre de céans a précisé à plusieurs reprises que l’art. 57 let. c LPA devait être interprété à la lumière de ces principes (ATA/746/2014 du 23 septembre 2014 et les références citées).

En matière d'enquête administrative, elle a déclaré irrecevable, pour défaut de préjudice irréparable, un recours contre une décision d'ouverture d'une enquête administrative (ATA/16/2016 du 12 janvier 2016 ; ATA/657/2015 du 23 juin 2015 et les références citées), de même qu'un recours contre une décision de l'enquêteur administratif d'entendre en qualité de témoins des collaborateurs d'une autorité ayant requis du Conseil d'État l'ouverture de l'enquête administrative (ATA/715/2013 du 29 octobre 2013 consid. 3). Elle a également nié l'existence d'un préjudice irréparable en cas d'ouverture d'une procédure de reclassement, une telle décision étant au contraire destinée, dans l’hypothèse où le reclassement aboutirait, à éviter ou à atténuer les effets de la décision de licencier envisagée (ATA/1149/2015 du 27 octobre 2015 ; ATA/923/2014 du 25 novembre 2014).

3. Le Tribunal fédéral (arrêt 2P.183/2005 du 19 juillet 2005) a rejeté un recours dirigé contre un arrêt du Tribunal administratif du canton de Neuchâtel du 29 juin 2005. Cette juridiction avait déclaré irrecevable un recours contre une décision de refus d'audition de témoins dans le cadre d'une enquête administrative au motif qu'une telle décision prise en matière d'administration des preuves ne pouvait causer un préjudice irréparable. La notion de décision incidente créant un dommage irréparable, prévue par le droit de procédure administrative cantonale pour régir les conditions de recevabilité d'un recours contre une décision incidente, avait été interprétée par cette instance conformément à celle prévue par le droit fédéral (art. 45 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 - PA - RS 172.021) et le jugement attaqué ne pouvait être qualifié d'arbitraire.

4. Les rapports de service du recourant sont soumis au Statut du personnel de la commune du 20 mai 2014 (LC 33 151 ; ci-après : le statut).

Aux termes de l’art. 100 du statut, lorsque l'instruction d'une cause le justifie, le Conseil administratif peut confier une enquête administrative à une ou plusieurs personnes choisies au sein ou à l'extérieur de l'administration communale (art. 100 al. 1 statut). La personne concernée est informée par écrit de l'ouverture de l'enquête administrative et de son droit de se faire assister. Elle peut participer à toutes les audiences d'enquêtes et requérir des mesures d'instruction (art. 100 al. 2 statut). Au terme de l'enquête, le Conseil administratif communique le rapport à la personne concernée et lui impartit un délai de réponse (art. 100 al. 1 statut).

5. En l’espèce, le litige porte exclusivement sur la décision du 26 mai 2016 de l’enquêtrice de refuser de suspendre la procédure d’enquête administrative le temps que le recourant se rétablisse, étant précisé qu’à la date de la décision litigieuse, celui-ci était représenté par un avocat.

S’agissant d’une décision incidente, ce que les parties ne contestent pas, se pose la question des conditions de recevabilité de l’art. 57 let. c LPA.

Les faits postérieurs à la décision du 26 mai 2016 ne sont pas l’objet du présent litige.

6. Le recourant allègue que la décision lui cause un préjudice irréparable au vu de la violation de son droit d’être entendu.

a. Les parties ont le droit d’être entendues par l’autorité compétente avant que ne soit prise une décision. Elles ne peuvent prétendre à une audition verbale sauf dispositions légales contraires (art. 41 LPA). Les parties ont le droit de participer à l’audition des témoins, à la comparution des personnes ordonnées par l’autorité ainsi qu’aux examens auxquels celle-ci procède (art. 42 al. 1 LPA).

b. Tel qu’il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 138 II 252 consid. 2.2 p. 255 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_588/2014 du 22 juin 2015 consid. 2.1 ; 8C_269/2013 du 25 février 2014 consid. 5.2 ; ATA/414/2015 du 5 mai 2015 consid. 11 et les arrêts cités).

Cela n’implique pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6 p. 76 ; 134 I 140 consid. 5.3 p. 148 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_443/2012 du 27 novembre 2012 consid. 4.5 ; 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3 et les arrêts cités ; ATA/695/2015 du 30 juin 2015 consid. 2a et les arrêts cités).

c. À la question de savoir qui doit être entendu en cas de maladie du collaborateur, la doctrine précise qu’« il s'agit de savoir si le collaborateur doit être entendu personnellement ou s'il peut être représenté par son avocat. En premier lieu, il s'agit de déterminer si le collaborateur ne peut réellement pas exercer son droit d'être entendu, ni par écrit, ni par oral. Un certificat médical d'incapacité de travail ne suffit pas, car ne pas être en état de travailler n'équivaut pas à ne pas pouvoir s'exprimer par écrit ou par oral. Si le collaborateur prétend ne pas être en état d'être entendu, il faut exiger un certificat médical attestant que le collaborateur ne peut pas être entendu, ni par écrit, ni par oral. En deuxième lieu, il s'agit d'examiner la question de la représentation. Le droit d'être entendu étant un droit fondamental, il est personnel, c'est-à-dire rattaché au sujet du droit et indissociable de la personnalité de celui-ci. Par contre, son exercice peut être confié à un représentant, par le sujet du droit, qu'il soit en état d'être entendu personnellement ou non. La difficulté pourrait surgir là où l'intéressé refuse de se faire représenter, alors qu'il est lui-même incapable d'être entendu. À notre connaissance, il n'y a pas eu de situation de ce type. L'incapacité attestée d'être entendu ne permettrait pas de conclure à une renonciation tacite à l'exercice du droit. Dans une telle impasse, il ne resterait probablement pas d'autre solution que de s'adresser à l'autorité tutélaire » (Gabrielle STEFFEN, « Le droit d’être entendu du collaborateur de la fonction publique : juste une question de procédure » in RJN 2005, p. 49 ss, p. 63).

d. À titre de comparaison l'art. 44 du règlement d’application de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01), non applicable en l'espèce, prévoit spécifiquement une procédure écrite qui permet de renoncer à une audition orale. Le droit d'être entendu est exercé de manière écrite dans les situations où un entretien de service ne peut pas se dérouler dans les locaux de l'administration en raison, notamment, de la détention du membre du personnel, de sa disparition, de son absence pour cause de maladie ou d'accident, ou de sa non-comparution alors qu'il a été dûment convoqué (al. 6). Le supérieur hiérarchique transmet par écrit au membre du personnel les faits qui lui sont reprochés et lui impartit un délai de trente jours pour faire ses observations (al. 7).

e. En l’espèce, si le souci du recourant de pouvoir participer activement aux audiences d’enquêtes afin de pouvoir interroger directement les témoins et contribuer ainsi activement à défendre ses droits est compréhensible et que le principe d’une participation aux audiences doit être préféré à l’exercice d’un droit d’être entendu par écrit, ni la Cst. ni la LPA ne lui permettent toutefois d’exiger un droit à être entendu exclusivement oralement. Par ailleurs, aucun document médical ne prouve que l’intéressé n’était pas capable d’exercer son droit d’être entendu par écrit au moment de la décision litigieuse, seul moment déterminant en l’espèce. Conformément à ce qui précède et à la doctrine précitée, c’est en conséquence à tort que le recourant prétend qu’il n’était pas apte à exercer son droit d’être entendu.

Contrairement à ce qu’indique le recourant, le statut ne lui est d’aucune aide. Celui-ci emploie un terme identique à la LPA, soit le droit de « participer » à l’audition des témoins et n’offre en conséquence pas de garanties supplémentaires au recourant.

Enfin, l’enquêtrice avait expressément réservé tant le droit d’être entendu par écrit du recourant que l’éventuelle ré-audition de certains témoins si celle-ci s’avérait pertinente.

L’enquêtrice n’a dès lors pas violé le droit d’être entendu du recourant en refusant de suspendre l’enquête administrative compte tenu de l’état de santé du fonctionnaire concerné, ce d’autant plus qu’il était probable que l’incapacité de travail du recourant se prolonge, le médecin ayant attesté, dès le 1er juin 2016, que son patient souffrait d’un état dépressif et anxieux sévère, ce qui par la nature de l’atteinte à la santé prend plus de temps à guérir que certaines autres affections.

Cette conclusion s’impose d’autant plus que le recourant était, au moment de la décision litigieuse, dûment représenté par un avocat, lequel aurait pu assister aux audiences d’enquêtes. Les conséquences du choix du mandataire de résilier son mandat au motif qu’il estimait ne pas pouvoir le remplir correctement ne font pas l’objet du présent litige.

En conséquence, la décision du 26 mai 2016 de ne pas suspendre la procédure jusqu’au rétablissement du recourant ne cause pas de préjudice irréparable à l’intéressé, ce d’autant moins que le reccourant aura en tous les cas la possibilité de se déterminer par écrit avant que le rapport de l’enquêtrice ne soit rendu et qu’une décision ne soit prise par la commune.

7. La seconde hypothèse de l'art. 57 let. c LPA, à savoir la venue à chef immédiate d'une décision finale susceptible d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse, n'est pas davantage réalisée et le recourant ne le prétend d’ailleurs pas.

8. Vu ce qui précède, le recours sera déclaré irrecevable.

9. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à la commune, qui compte plus de dix mille habitants. Celle-ci est en effet réputée disposer de son propre service juridique et ne pas avoir à recourir pour le présent type de procédure, au service d’un mandataire extérieur (art. 87 al. 2 LPA ; ATA/20/2015 du 6 janvier 2015 et jurisprudence citée).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 6 juin 2016 par Monsieur A______ contre la décision Madame B______ du 26 mai 2016 refusant de suspendre la procédure d’enquête administrative ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15’000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15’000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15’000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt (la présente décision) et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à Me Eric Maugué, avocat de la commune de Plan-les-Ouates ainsi qu’à Madame B______.

Siégeants : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Pagan, Mme Galeazzi, M. Martin, juges et M. Hoffmann, juge-suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :