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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/5044/2007

ATA/587/2008 du 18.11.2008 ( VG ) , REJETE

Parties : SCHMID QUISPE VALLE Caroline / VILLE DE GENEVE
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/5044/2007-VG ATA/587/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 18 novembre 2008

 

dans la cause

 

Madame Caroline SCHMID QUISPE VALLE
représentée par Me Philippe Cottier, avocat

contre

CONSEIL ADMINISTRATIF DE LA VILLE DE GENÈVE


 


EN FAIT

1. Le 12 septembre 2007, Madame Caroline Schmid Quispe Valle a conclu un contrat de vente devant notaire portant sur l'acquisition de la parcelle n° 2124, feuille 43, du cadastre de la Ville de Genève (ci-après : la Ville), section Petit-Saconnex, avec Mesdames Christiane Barjon et Brigitte Barjon Dekumbis pour un montant de CHF 2'100'000.-.

2. La parcelle de 2'381 m2, sur laquelle est édifiée une villa de 107 m2 au sol, est située au 21, de l'avenue Eidguenots et se trouve dans une zone 5 de développement 3, dite secteur Nant-Cayla.

3. Le 12 septembre 2007, le notaire ayant instrumenté l'acte de vente a écrit à l'Etat de Genève et à la Ville en invitant le premier à faire connaître sa position quant à l'exercice de son droit de préemption dans les 60 jours.

4. Le 19 septembre 2007, les architectes mandatés par Mme Schmid Quispe Valle ont discuté d'un projet de construction sur la parcelle précitée avec le représentant du service d'urbanisation de la Ville.

5. Le 3 octobre 2007, a eu lieu une autre séance à laquelle participaient deux collaborateurs du département des constructions et des technologies de l'information (ci-après : le département) et deux représentants de la Ville. Le projet présenté consistait notamment à développer dans cette zone, sur la parcelle n° 2124 et trois parcelles voisines, l'implantation de petits immeubles, comprenant une partie de logements sociaux.

A l'issue de la réunion, les représentants de la Ville et de l'Etat ont invité les architectes à leur présenter, dans le délai d'un mois, leurs premières réflexions et esquisses d'un plan localisé de quartier (ci-après : PLQ).

6. Le 5 octobre 2007, la Ville, par son conseil administratif, a informé Mesdames Barjon de son intention d'exercer son droit de préemption sur la parcelle.

7. Le 18 octobre 2007, Mme Schmid Quispe Valle s'est opposée à l'exercice du droit de préemption de la Ville.

8. Le 7 novembre 2007, le conseil administratif de la Ville a adressé un projet au conseil municipal en vue de l'approbation de l'exercice du droit de préemption.

9. Le 16 novembre 2007, l'Etat a fait savoir au notaire qu'il ne souhaitait pas exercer son droit de préemption.

10. Le 20 novembre 2007, Monsieur Eric Schmid de l'agence immobilière A.E. Schmid S.A., père de Mme Schmid Quispe Valle, a été auditionné par la commission de l'aménagement et de l'environnement du Conseil municipal. Lors de cette audition, M. Schmid a soumis le projet de construction des quatre immeubles sur la parcelle concernée et celles avoisinantes et a fait part de la volonté des promoteurs de réaliser 30% de logements sociaux.

11. Le 28 novembre 2007, le Conseil municipal de la Ville a adopté un arrêté prévoyant l'exercice du droit de préemption.

12. Le 10 décembre 2007, la Ville a informé le notaire de la décision du Conseil municipal du 28 novembre 2007, en précisant que ladite décision était soumise au délai référendaire et devait ensuite être avalisée par le Conseil d'Etat.

13. Le 20 décembre 2007, Mme Schmid Quispe Valle a recouru auprès du Tribunal administratif contre la décision de la Ville d'exercer son droit de préemption, en concluant à son annulation et à ce que les frais de la procédure soient mis à la charge de l'Etat.

Le projet de ses architectes portait sur plusieurs parcelles et prévoyait la construction de quatre immeubles de logements. 30% des surfaces à construire étaient destinées à des logements sociaux. Dans ce projet, elle deviendrait propriétaire d'un appartement en lieu et place de la villa érigée sur la parcelle n° 2124.

Au sud des parcelles incluses dans son projet de construction, se trouvaient des maisons familiales du "Coin-de-Terre" construites en 1948 et qui, à sa connaissance, étaient inscrites à l'inventaire. Ce secteur ne pourrait par conséquent pas faire l'objet d'un PLQ. La parcelle n° 2278 sise au nord-est de la parcelle n° 2124 avait fait l'objet d'un contrat de vente le 21 juin 2007 et ni l'Etat ni la Ville de Genève n'avaient exercé leur droit de préemption. De même, la parcelle n° 2237, adjacente, avait été vendue en juillet 2005. Le projet des architectes portait également sur cette dernière parcelle. Ni la Ville ni le canton ne possédaient de parcelle dans le quartier.

La possibilité pour les communes et l'Etat d'exercer leur droit de préemption était influencée par la nouvelle loi pour la construction de logements d'utilité publique du 24 mai 2007 (LUP - I 4 06) qui déterminait la politique sociale du logement.

La décision de préemption ne répondait pas à un but d'intérêt public suffisant dès lors que Mme Schmid Quispe Valle entendait construire un certain nombre de logements d'utilité publique sur le bien immobilier visé. Le projet de construction, contenant 30 % de logements soumis au régime des immeubles d'habitation mixtes (HM), remplissait le but voulu par la LUP. L'impératif d'utilité publique ne pouvait plus être invoqué dans la situation où la personne privée avait choisi de réaliser les 30% de logement d'utilité publique et de se conformer par conséquent à la loi. L'exercice du droit de préemption ne se justifiait plus.

La décision violait également le principe de proportionnalité. La Ville ne rendait pas plausible l'existence d'un besoin précis. La configuration du quartier ainsi que les caractéristiques de la parcelle et celles des environs démontraient que la décision n'était pas fondée. La Ville et le canton ne s'étaient jamais intéressés à ce quartier. Il n'y avait aucun plan localisé de quartier et son élaboration éventuelle serait très longue. Le projet de construction était en revanche réalisable dans un proche avenir. L'atteinte à la propriété et à la liberté économique de la propriétaire était disproportionnée.

La décision violait également le principe de la protection de la bonne foi et était arbitraire. En effet, les représentants de la Ville et du Canton avaient chargé les mandataires de préparer un projet de PLQ et les avaient confortés dans le rôle dominant qu'ils allaient jouer. L'avancement du projet n'avait pas été présenté de façon correcte au Conseil municipal par le Conseil administratif. De plus, la Ville avait renoncé à son droit de préemption sur la parcelle adjacente et sur une parcelle sise au 26, avenue des Eidguenots en juin 2007. Ceci démontrait l'arbitraire de la décision litigieuse.

14. Le 21 décembre 2007, le Conseil d'Etat n'ayant pas encore approuvé la décision de la Ville, la procédure a été suspendue dans l'attente de l'approbation.

15. Le 10 mars 2008, le Conseil d'Etat a approuvé l'exercice du droit de préemption de la Ville.

16. Le 29 avril 2008, la Ville a répondu au recours en concluant à son rejet.

Depuis le 1er juin 2007, début de la législature, le Conseil administratif voulait mener une politique d'acquisitions foncière plus active et ce, dans le but de se doter de moyens concrets pour encourager et favoriser la construction de logements sociaux bon marché dans les secteurs en développement. Quelques mois avaient été nécessaires pour mettre en place la politique nouvellement menée par le Conseil administratif. D'importants périmètres situés en zone de développement étaient encore occupés par de l'habitat pavillonnaire, incompatible avec une politique urbaine durable de densification raisonnée et de mise à disposition de logements bon marché. L'entrée en vigueur de la LUP n'avait pas modifié la politique souhaitée, bien au contraire.

Les mandataires de Mme Schmid Quispe Valle n'avaient pas produit un projet abouti mais une simple esquisse et n'avaient en aucun cas produit de plan financier. La Ville avait préavisé défavorablement une demande de renseignement relative à la construction de villas dans le même secteur.

La parcelle n° 2237 avait fait l'objet d'une promesse de vente et non d'un acte de vente comme allégué par Mme Schmid Quispe Valle. A cette époque, la Ville ne menait pas encore la même politique d'acquisition foncière. Ses efforts étaient concentrés sur les secteurs de la Forêt et des Allières, dans lesquels, elle avait acquis dix-neuf parcelles. Concernant la parcelle n° 2278, l'acte de vente avait été signé le 21 juin 2007 et la nouvelle législature venait de commencer sans que le nouveau magistrat en place ait pu encore définir sa stratégie d'acquisition.

Le projet de la Ville sur la parcelle n° 2124 était de construire des logements de type HBM, soit des logements sociaux pérennes. Vu la situation et la configuration de la parcelle, vingt-quatre logements pouvaient être construits sans nécessiter l'acquisition de parcelles voisines, étant précisé que l'indice serait de 1 sur une surface de 2'381 m2, pour une surface moyenne de 100 m2 par logement. Le secteur Nant-Cayla était en zone de développement 3 depuis l'adoption, le 29 juin 1957, de la loi sur l'extension de l'agglomération urbaine genevoise, qui a été maintenue après l'entrée en vigueur de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35). Depuis lors, aucun projet d'importance n'avait été édifié dans le secteur.

L'entrée en vigueur de la LUP n'avait pas modifié les conditions du droit de préemption des communes ou de l'Etat. La décision poursuivait un but d'intérêt public évident puisqu'elle visait à permettre la réalisation de logements sociaux pérennes. Les logements HM, tels que prévus par les promoteurs, ne constituaient pas de tels logements puisqu'après 20 ans, ils n'étaient plus soumis au régime de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 (LGL - I 4 05).

Tant le projet des promoteurs que celui de la Ville nécessitaient un plan localisé de quartier. Des séances d'information et de concertation pour les habitants du quartier avaient déjà eu lieu les 27 février et 29 avril 2008. Le projet de développement du quartier avait été exposé à cette occasion. Un PLQ était prévu dans la zone pavillonnaire entre l'avenue d'Aïre et le chemin du Nant-Cayla, ainsi qu'un plan de site couvrant les habitations érigées aux abords dudit chemin, soit les maisons du "Coin-de-Terre", dont la valeur patrimoniale devait encore être estimée.

17. Le 5 mai 2008, les parties ont été informées que l'affaire était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. La recourante reproche à la décision de ne pas être fondée sur un intérêt public suffisant en lien avec l'entrée en vigueur de la LUP. Cette dernière aurait notamment modifié les conditions de l'exercice du droit de préemption des communes.

a. Le 31 juillet 2007 est entrée en vigueur la LUP dont le but est de permettre à l'Etat de constituer un parc de logements d'utilité publique de 15% du parc locatif du canton dans un délai de 10 ans, par la construction et l'acquisition de logements (art. 1 al. 1 LUP). Un logement est d'utilité publique au sens de la présente loi si un taux d'effort et un taux d'occupation sont appliqués et s'il est détenu par l'Etat, une fondation de droit public, une commune ou un organisme sans but lucratif (art. 1 al. 2 LUP). Des logements d'utilité publique peuvent également être détenus par toute autre entité, si celle-ci s'engage contractuellement à cette fin, pour 50 ans au moins, avec l'Etat de Genève (art. 1 al. 3 LUP).

Parallèlement à l'adoption de la LUP, le législateur a adopté l'article 4A LGZD qui fixe les catégories de logements pouvant être construits en zone de développement. Dans les périmètres sis en zone de développement et, dont la zone primaire est la zone villa, celui qui réalise des logements a le choix entre : la construction de logements soumis au régime HM, au sens de l'article 16, alinéa 1, lettre d, de la LGL, ou en coopérative d'habitation à raison de 30% du programme, ou la cession à l'Etat, à une commune ou à un autre organisme sans but lucratif, à titre onéreux et au prix admis par l'Etat dans les plans financiers, de 25% du périmètre pour la construction de logements d'utilité publique (art. 4A al. 1 LGZD).

L'objectif annoncé de la loi est de remplacer la pratique administrative consistant, en zone de développement, à imposer la construction de deux tiers de logements subventionnés et d'un tiers de logements en PPE ou à loyer non subventionné, instaurée principalement en réponse à la diminution du nombre de logements subventionnés. Celle-ci n'ayant pas porté ses fruits, il a été prévu de constituer un parc de logement d'utilité publique de 15% du parc locatif, formant un socle permanent. Cette qualité est assurée, en premier lieu, par le fait que ces logements seront principalement en mains de propriétaires qui, en leur qualité de fondation immobilière de droit public, de commune ou d'organisme sans but lucratif, vont durablement offrir à bail des logements d'utilité publique destinés aux ménages dont les ressources sont modestes. Cet objectif est accompagné d'un assouplissement des contraintes en zone de développement selon l'article 4A LGZD exposé ci-dessus, d'une accession facilité à la PPE et au développement des coopératives ainsi que par le maintien d'aides personnalisées (Exposé de motifs PL 10008, MGC [en ligne], Séance du 22 mars 2007 à 17h00, disponible sur http://www.ge.ch/grandconseil/memorial/data/560206/26/560206_26_partie34.asp ) [consulté le 18 novembre 2008]).

b. L'Etat et les communes, dans le cadre de leur politique générale d'acquisition de terrains, disposent, outre la possibilité d'achat de gré à gré, du droit de préemption légal et d'expropriation qui leur est conféré par la présente loi aux fins de construction de logements d'utilité publique (art. 2 LGL). Les biens-fonds sis en zone de développement sont grevés d'un droit de préemption au profit de l'Etat et des communes intéressées. Le droit de préemption ne peut s'exercer qu'aux fins de construction de logements au sens de la présente loi (art. 3 al. 1 LGL).

Ainsi, à teneur du texte légal, rien dans la nouvelle loi n'indique une modification des conditions auxquelles l'Etat ou les communes peuvent exercer leur droit de préemption. En particulier, la LGL n'a pas été modifiée.

3. a. Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral et du Tribunal administratif, les articles 2 et 3 alinéa 1 LGL et l’intérêt public ainsi poursuivi, à savoir contribuer à la politique sociale du logement, permettent de restreindre valablement la garantie constitutionnelle de la liberté économique et de la garantie de la propriété, dans le respect du principe de la proportionnalité (Arrêt du Tribunal fédéral 1P.552/1998 du 9 février 1999 ; ATA/606/2007 du 27 novembre 2007 ; ATA/800/2005 du 22 novembre 2005).

b. L’exercice du droit de préemption par une collectivité publique en application de la LGL n’implique pas nécessairement la présentation d’un projet de construction détaillé. Le Tribunal fédéral a reconnu la possibilité d’acquérir des terrains pour des besoins futurs, à la condition qu’il s’agisse d’un but précis et de besoins qui devront être satisfaits tôt ou tard, dans un avenir qui n’est pas trop éloigné (Arrêt du Tribunal fédéral C.R. c. Conseil d’Etat du canton de Genève du 23 janvier 1985, consid. 5c). Lorsqu’elle acquiert un bien-fonds par voie de préemption, l’autorité doit cependant tenir compte de la situation et des caractéristiques de la parcelle et de ses environs. Elle doit faire un pronostic sur les possibilités de bâtir, à moyen terme, des logements sur l’emplacement considéré (ATF 114 Ia 17 consid. 2b). L’acquisition du terrain par la collectivité publique et l’édification d’immeubles destinés à abriter des logements doivent ainsi se trouver dans un rapport d’adéquation (ATA/557/2001 du 4 septembre 2001, consid. 3b).

c. S’agissant du principe de l’adéquation, le tribunal de céans a déjà eu l’occasion de préciser que les obstacles que peuvent constituer les parcelles voisines et l’incertitude relative à la difficulté de les surmonter n’est pas en soi un argument valable, d’une part parce que rien ne permet de prévoir une attitude définitivement négative de la part des propriétaires concernés, et d’autre part parce que s’il fallait suivre le raisonnement contraire, l’Etat ne pourrait plus acquérir que des parcelles dont la superficie suffirait entièrement à édifier un bâtiment de logements, notamment du point de vue des limites de distance et de l’indice d’utilisation du sol encore disponible au regard des constructions voisines. L’acquisition du terrain nécessaire, parcelle par parcelle, ne serait en revanche plus possible, chacune d’elle pouvant constituer l’obstacle à l’acquisition publique d’une autre. Une telle solution serait de nature à mettre un terme à la politique des autorités en matière de construction de logements, dans un canton dont le territoire exigu, impliquant de multiples contraintes d’aménagement du territoire, ne donne à l’Etat qu’une marge de manœuvre restreinte. Au demeurant, si les négociations futures ne devaient pas permettre de trouver les moyens de surmonter ces obstacles, l’Etat pourrait encore faire usage de son droit d’expropriation (ATA/161/2008 du 8 avril 2008 ; ATA/557/2001 du 4 septembre 2001).

En l'espèce, la parcelle est située en zone de développement. Elle est donc propre à permettre la construction de logements sociaux, ce qui n'est pas contesté. La Ville met en œuvre depuis plusieurs années une politique volontariste dans des secteurs qualifiés de prioritaires. Bien que le quartier Nant-Cayla ne fasse pas partie des secteurs qui jusque là étaient qualifiés de prioritaires et que la Ville ne dispose pas d'autres parcelles dans le secteur concerné, elle a rendu vraisemblable sa volonté de concrétiser sa politique en la matière et dans ce quartier, notamment par le biais des séances d'information publique sur le PLQ et le plan de site projeté. A cela s'ajoute le fait qu'elle rend vraisemblable la possibilité de construire un immeuble de vingt-quatre logements d'utilité publique sur la parcelle litigieuse, sans que d'autres acquisition ne soient nécessaires. Il faut dès lors considérer que la décision répond au but d'intérêt public requis.

4. La recourante allègue encore que son projet de construction répond dans la même mesure que celui de la Ville au but d'intérêt public, puisqu'il prévoit la construction de 30% de logement HM.

Le projet présenté par la recourante ne fait que correspondre aux exigences de la loi en tant qu'il prévoit 30% de logements HM (art. 4A LGZD). La Ville quant à elle entend réaliser uniquement des logements HBM. Dans la situation notoire, au demeurant non contestée par la recourante, de pénurie de logement sociaux pérennes dont souffre le canton de Genève, qui a notamment mené le législateur à l'adoption de la LUP, on ne saurait faire reproche à l'autorité intimée de mettre en œuvre une politique susceptible d'enrayer ces difficultés.

5. La recourante allègue que le comportement de la Ville et de l'Etat, notamment, lors des différentes rencontres avec ses mandataires, laissait supposer qu'ils n'entendaient pas exercer leur droit de préemption. Le principe de la bonne foi aurait ainsi été violé.

Découlant directement de l’article 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités (ATF 126 II 377 consid. 3a p. 387 et les arrêts cités ; 124 II 265 consid 4a p. 269/270). Selon la jurisprudence, les assurances ou les renseignements erronés donnés par les autorités confèrent des droits aux justiciables lorsque les cinq conditions cumulatives suivantes sont remplies. Tout d’abord, on doit être en présence d’une promesse concrète effectuée à l’égard d’une personne déterminée. Il faut également que l’autorité ait agi dans le cadre et dans les limites de sa compétence, que la personne concernée n’ait pas été en mesure de se rendre compte immédiatement de l’inexactitude du renseignement fourni, qu’elle se soit fondée sur ce renseignement pour prendre des dispositions qu’elle ne peut ensuite modifier sans subir de préjudice et, enfin, que la loi n’ait pas subi de changement depuis le moment où la promesse a été faite (ATF 121 II 473 consid. 2c p. 479 ; 121 V 65 consid. 2a p. 66 ss. avec les références ; 117 Ia 285 consid. 2b et références ; JT 1993 I 413 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A.9/1999 du 18 avril 2000, consid 3a ; ACOM/34/2008 du 2 avril 2008 ; ATA/609/07 du 27 novembre 2007).

En l'espèce, la Ville a exercé son droit de préemption dans les délais et les formes exigées par la loi après que le notaire l'ait informée de la transaction. En particulier, aucune assurance ni promesse n'ont été données à la recourante s'agissant de la propriété de la parcelle concernée. Il faut relever que les discussions entre les mandataires de la recourante et les services de la Ville et de l'Etat, s'agissant des constructions qui pourraient être réalisées sur la parcelle et celles avoisinantes sont finalement indépendantes de la question de la propriété de la parcelle.

En conséquence, les conditions d'une violation du principe de la bonne foi ne sont pas réalisées et le grief sera écarté.

6. Finalement, la recourante allègue une violation du principe de l'égalité de traitement en relevant que la Ville n'a pas systématiquement exercé son droit de préemption s'agissant de parcelles voisines, dans un passé plus ou moins récent.

Or, comme l'a exposé de façon convaincante l'autorité intimée, son intention est d'acquérir plusieurs parcelles dans le secteur. Cette volonté, bien que nouvelle s'agissant du quartier concerné, est conforme aux objectifs de la LGL, comme vu ci-dessus. La décision litigieuse initie cette démarche. Les transactions visées par la recourante ne sont donc pas comparables à celle litigieuse car antérieures à la volonté de la Ville de développer le quartier Nant-Cayla.

Pour ces motifs et pour ceux liés à l'intérêt public, déjà développés ci-dessus, le grief invoqué doit être écarté.

7. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge de la recourante. Il ne sera pas accordé d'indemnité de procédure à la Ville conformément à la jurisprudence du tribunal de céans.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 décembre 2007 par Madame Caroline Schmid Quispe Valle contre la décision du conseil administratif de la Ville de Genève du 10 décembre 2007 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Mme Schmid Quispe Valle un émolument de CHF 2'000.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Philippe Cottier, avocat de la recourante ainsi qu'au conseil administratif de la Ville de Genève.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy, Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :