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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/915/2017

ATA/57/2019 du 22.01.2019 ( FPUBL ) , REJETE

Recours TF déposé le 28.02.2019, rendu le 28.05.2020, REJETE, 8D_2/2019
Descripteurs : FONCTIONNAIRE ; RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC ; INTERPRÉTATION(SENS GÉNÉRAL) ; DROIT DU TRAVAIL ; DURÉE RÉGLEMENTAIRE DU TRAVAIL ; VACANCES ; DURÉE DU REPOS ; DURÉE ET HORAIRE DE TRAVAIL ; LÉGALITÉ ; ÉGALITÉ DE TRAITEMENT
Normes : LPAC.1.al1.letb; aLPol.26; aLPol.30.al1; aLPol.34.al1; RPAC.27.al3; Cst.5.al1; Cst.8; aLPol.49.al1
Résumé : Rejet du recours d'un fonctionnaire de police, soumis à un horaire irrégulier, qui allègue que la valorisation de ses jours de vacances dans le décompte des heures à effectuer à hauteur de 8 heures par jour serait contraire au droit et violerait le principe de l'égalité de traitement. Cette valorisation, rendue nécessaire par l'annualisation du temps de travail, est au contraire conforme au droit. Ce système, appliqué à tous les policiers soumis tant à un horaire administratif qu'à un horaire planifié, permet précisément d'éviter des inégalités qui ne se justifieraient pas et permet à chacun d'eux de bénéficier du nombre exact de jour auquel ils ont droit.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/915/2017-FPUBL ATA/57/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 22 janvier 2019

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Jacques Roulet, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE LA SÉCURITÉ



EN FAIT

1. Monsieur A______ a été nommé le 1er février 2007 à la fonction de gendarme et a été confirmé à cette fonction une année plus tard.

Le 1er février 2012, il a été promu en qualité d’appointé de gendarmerie.

2. Par courrier du 12 juin 2015, l’Union du personnel du corps de police du canton de Genève (ci-après : UPCP) a indiqué au directeur des ressources humaines de la police qu’elle considérait que la comptabilisation des vacances à raison de 8 heures par jour sur l’annualisation des heures de travail était contraire au droit.

3. Par courrier du 28 juillet 2015, quatre cent cinquante-deux fonctionnaires de police - dont les noms figuraient en annexe au courrier -, l'UPCP et le Syndicat de la police internationale (ci-après : SPSI) ont interpellé le directeur des ressources humaines de la police, par l'intermédiaire de leur avocat commun, au sujet de l'annualisation du temps de travail.

Il avait unilatéralement été décidé que les heures de vacances des fonctionnaires de police seraient, dès 2011, valorisées à hauteur de 8 heures par jour. Cette méthode ne tenait toutefois pas compte de la spécificité de leurs horaires et les lésait gravement.

La situation de M. A______, président de l'UPCP, était citée à titre d’exemple. Durant l'année 2011, il avait pris trente jours de vacances. Avec la nouvelle méthode de calcul, deux cent quarante heures devaient lui être déduites. Or, si l'on tenait compte de son horaire planifié à l'origine, 261 heures et 30 minutes devaient être décomptées comme vacances sur les heures annualisées. Il s'était donc vu imposer 21 heures et 30 minutes de travail en trop sur l'année 2011. Si l'on tenait compte de son tarif horaire de CHF 41.05, son dommage s'élevait à CHF 882.60 pour l'année 2011. Le dommage s'élevait par ailleurs à CHF 951.05 pour 2012, CHF 1'378.- pour 2013, CHF 911.40 pour 2014, soit CHF 4'123.05 au total. Ce montant devait être majoré de 25 % puisqu'il s'agissait en réalité d'heures supplémentaires qui n'avaient pas été compensées par des congés.

Ils sollicitaient l'établissement et la remise de leurs décomptes annuels d’heures pour les années 2011 à 2015 afin de pouvoir procéder aux vérifications utiles. Sur la base desdits décomptes, ils réclamaient le versement de la compensation financière correspondante.

4. Le 6 août 2015, la directrice des ressources humaines (ci-après : DRH) du département de la sécurité et de l'économie, devenu le 1er juin 2018 le département de la sécurité (ci-après : le département), a indiqué au mandataire des fonctionnaires de police qu'elle allait reprendre la gestion de ce dossier.

5. Par courriers des 18 septembre et 3 novembre 2015, la DRH du département a indiqué au conseil des fonctionnaires de police qu'une réponse serait apportée dans le courant du mois d'octobre 2015, respectivement fin novembre 2015.

6. Par courrier du 27 novembre 2015, la DRH du département a pris position sur le courrier du 28 juillet 2015.

Lorsqu'un fonctionnaire de police prenait un jour de vacances sur une journée durant laquelle son horaire planifié prévoyait 12 heures de travail, son solde de vacances était déduit d'un jour, correspondant à 8 heures, et les 4 heures de différence étaient comptabilisées dans le nombre annuel d'heures qu'il devait effectuer pour son employeur (heures prestées). Si un fonctionnaire de police prenait congé un jour durant lequel son horaire planifié était de 6 heures, son solde de vacances était déduit d'un jour, correspondant à 8 heures. Les 2 heures de différence étaient déduites des heures à effectuer annuellement pour le compte de l'employeur (heures prestées), de sorte qu'il bénéficiait d'un solde de 2 heures en sa faveur.

Si les vingt-neuf jours de vacances étaient comptabilisés en jours, sans tenir compte des heures planifiées pour les jours en question, cela induirait des différences significatives en termes de droit aux vacances, selon les jours choisis par les collaborateurs, lesquelles pouvaient potentiellement conduire à des inégalités de traitement. Un collaborateur qui prendrait systématiquement des vacances les jours durant lesquels son travail planifié correspondrait à 12 heures pourrait bénéficier de 116 heures (29 jours x 4 heures) de congé supplémentaires par rapport à ses collègues. En d'autres termes, il travaillerait 116 heures de moins qu'un collègue ayant inscrit ses vacances, par hypothèse, durant des journées planifiées à 8 heures, alors qu'il devait effectuer, durant l'année, un nombre d'heures identique. Le nombre d'heures à travailler dépendrait ainsi des jours durant lesquels un collaborateur inscrirait ses vacances, ce qui serait parfaitement inéquitable. Au demeurant, avec cette manière de procéder, il ne réaliserait plus les conditions prévues par le règlement applicable, à savoir une durée de travail moyenne de 520 heures par trimestre, soit 2080 heures, en moyenne, par année, respectivement 1752 heures prestées.

Si un fonctionnaire venait à travailler plus que le nombre annuel d'heures prestées, soit par hypothèse plus de 1'762 heures, celles-ci seraient compensées par des jours de liberté octroyés en sus.

S'agissant du cas de M. A______, il avait pris trente jours de vacances en 2011, comprenant un reliquat d'un jour relatif à l'année 2010. Il avait travaillé
12 heures de plus que les heures prestées relatives à cette année et avait pu compenser lesdites heures effectuées en trop, majorées de 25 %, durant l'année 2012.

Cette manière de procéder s'appliquait à l'ensemble des fonctionnaires de police depuis plusieurs années, et ce en accord avec les syndicats. Cela permettait de respecter la réglementation et les spécificités des horaires de la police. Il était pour le moins surprenant que cette méthode de calcul soit soudainement remise en question.

Elle souhaitait savoir si les quatre cent cinquante-deux fonctionnaires de police maintenaient leur demande de décomptes de leurs horaires pour les années 2011 à 2015.

7. Le 22 avril 2016, le mandataire susmentionné a indiqué à la DRH qu'il était dorénavant constitué à la défense de cinq cent quatre-vingt-huit fonctionnaires de police, dont les noms et adresses figuraient à titre liminaire dans son courrier.

La moyenne des heures effectuées sur les jours de travail ne correspondait pas à 8 heures, dès lors que les rotations d'horaires se faisaient par exemple sur
six et non sept jours. Ainsi, les 40 heures hebdomadaires se répartissaient sur un nombre de jours moindre que cinq, ce qui augmentait nécessairement le nombre d'heures journalières. Il s'agissait dès lors d'une aberration de calculer les vacances à hauteur de 8 heures par jour pour les reporter sur le décompte annuel. Les fonctionnaires de police ne se voyaient dès lors pas attribuer leurs réelles vacances au regard des jours de travail qu'ils accomplissaient. Contrairement à ce qu'elle relevait, les fonctionnaires de police n'avaient pas la faculté de choisir des vacances jour par jour, en les faisant porter sur des jours qui seraient plus travaillés. C'était le décompte global qui était faux.

Les intéressés souhaitaient dorénavant faire trancher cette question par la justice si le département ne revenait pas à raison sur ce sujet et s'il ne compensait pas les pertes subies depuis la modification du système de calcul.

Ils sollicitaient dès lors formellement une décision du département sur leurs conclusions, à savoir qu'il soit dit que leurs vacances devaient être octroyées en jours et non converties en heures, qu'ils avaient subi un dommage à hauteur de la différence existant entre leurs heures planifiées et les 8 heures octroyées comme vacances depuis le 1er janvier 2011, et enfin à ce qu'ils soient indemnisés pour le dommage précité en leur versant le salaire horaire y afférent, majoré de
25 % et des intérêts moratoires à 5 % l'an. Leurs décomptes horaires annuels précis à compter du 1er janvier 2011 devaient également leur être remis.

8. Le 13 mai 2016, la secrétaire générale adjointe du département a indiqué au mandataire des cinq cent quatre-vingt-deux fonctionnaires de police que les décomptes des horaires de ses mandants lui seraient remis le plus rapidement possible, mais qu'un délai de plusieurs semaines serait nécessaire au vu de la tâche à accomplir.

Pour pouvoir examiner les prétentions de chacun de ses mandants, notamment vérifier si la manière d'octroyer des vacances leur causait véritablement un dommage et, le cas échéant, rendre des décisions motivées sujettes à recours, il était indispensable que l'autorité puisse se fonder sur des cas concrets à l'égard desquels il lui appartenait de prendre des conclusions motivées, individualisées et chiffrées.

Afin de ne pas surcharger inutilement l'administration et les tribunaux, il lui semblait opportun que la demande concernant un seul fonctionnaire de police soit adressée dans un premier temps au département. Les demandes de ses autres mandants seraient examinées individuellement au plus tard une fois l'issue de cette procédure connue.

9. Le 26 mai 2016, le mandataire susmentionné a indiqué que ses mandants sollicitaient principalement une décision de principe, à savoir le constat de l'illicéité des modalités de calcul des vacances appliquées par le département, laquelle n'impliquait pas de devoir procéder aux calculs demandés.

Une décision individuelle et concrète pouvait d'ores et déjà être prise dès lors que les prétentions formulées n'étaient pas ambiguës et que les informations nécessaires pour statuer étaient en possession du département.

Ses mandants n'étaient pas en mesure de chiffrer plus précisément leurs prétentions puisque le département indiquait qu'un délai de plusieurs semaines serait nécessaire pour leur remettre les décomptes des horaires. Ceux-ci avaient pourtant été demandés depuis près d'une année.

Un cas individuel et dûment chiffré, soit celui de M. A______, avait d'ores et déjà été soumis sans qu'aucune décision soit rendue.

Le refus de statuer du département était injustifié et abusif. Une décision devait dès lors être rendue, sous quelque forme que ce soit.

10. Le 15 juillet 2016, le Conseiller d'État en charge du département a réitéré auprès du mandataire précité les explications selon lesquelles la demande formulée, en tant qu'elle concernait cinq cent quatre-vingt-huit fonctionnaires de police, n'était pas individualisée et ne comportait aucune conclusion chiffrée, permettant de rendre une décision individuelle et concrète.

Pour faire droit à sa demande, une décision de principe comportant des voies de recours était rendue, la recevabilité d'un recours contre celle-ci étant toutefois réservée. Aux termes de celle-ci, il était constaté que le droit aux vacances était octroyé en jours, un jour correspondant à 8 heures, étant précisé que le nombre d'heures planifié durant le jour de vacances inscrit était pris en compte, s'agissant des heures prestées.

11. Par courrier du 14 octobre 2016, le mandataire des fonctionnaires de police a indiqué au département que ses mandants n'avaient pas recouru contre sa dernière correspondance pour des motifs de recevabilité.

Afin de pouvoir obtenir une décision sujette à recours, M. A______ faisait formellement valoir les prétentions suivantes : qu'il soit constaté que ses vacances prises entre 2011 et 2015 auraient dû être comptabilisées en jours et non en heures, qu'il soit indemnisé à hauteur de CHF 846.65.- avec intérêts à 5 % l'an à compter du 1er janvier 2012, CHF 467.30.- avec intérêts à 5 % l'an à compter du 1er janvier 2013, CHF 1'376.40.- avec intérêts à 5 % l'an à compter du 1er janvier 2014, CHF 911.40.- avec intérêts à 5 % l'an à compter du 1er janvier 2015,
CHF 1'497.30.- avec intérêts à 5 % l'an à compter du 1er janvier 2016 et que les cotisations sociales afférentes auxdits montants soient versées. À l'avenir, ses vacances devaient être calculées en jours en non en heures.

La nouvelle méthode de calcul des vacances, applicable dès l'année 2011, était prévue dans une instruction de service du 7 mars 2012 (ci-après : instruction 1/2012), dont il n'avait pu avoir copie, mais dont il avait pris connaissance à travers son projet dénommé « COPP-annualisation » du 14 février 2012. Elle prévoyait que le fonctionnaire pouvait prendre 232 heures de vacances, au lieu des vingt-neuf jours prévus par la législation sur la police. Cette directive prévoyait qu'un jour de vacances correspondait à 8 heures de travail. Cette méthode lui causait un dommage consistant dans l'obligation de travailler des heures en plus, à savoir 20 heures et 30 minutes en 2011, 21 heures en 2012, 32 heures et 30 minutes en 2013, 21 heures en 2014 et 34 heures et 30 minutes en 2015.

Étaient joints des décomptes de vacances de M. A______ pour les années 2011 à 2015 à teneur desquels avaient été additionnées ses heures planifiées durant les jours où il avait finalement pris des vacances puis soustrait 240 heures (correspondant à 30 jours à 8 heures). La différence qui en résultait consistait en le dommage allégué.

12. Le 11 novembre 2016, la secrétaire générale adjointe du département a indiqué au mandataire des fonctionnaires de police qu'une décision sujette à recours relative à M. A______ serait rendue dans les meilleurs délais.

13. Par décision du 15 février 2017, le Conseiller d'État en charge du département a refusé de donner suite à la demande d'indemnisation de
M. A______ et confirmé que les jours de vacances étaient comptabilisés en jours et non en heures.

Les policiers devaient effectuer une durée normale de travail de 40 heures par semaine, respectivement 520 heures par trimestre selon l'ancien règlement. Ce chiffre ne tenait pas compte des vacances et des jours fériés. La durée normale de travail devait être distinguée des heures effectivement travaillées par les collaborateurs, soit 40 heures par semaine, dont il convenait notamment de déduire les jours fériés et les jours « pont » ; il s'agissait là d'heures dites prestées. En tant que policier, M, A______ avait le droit à vingt-neuf jours de vacances par an. Ces vingt-neuf jours étaient inscrits sur les jours dits prestés. Dans la mesure où la règlementation prévoyait un horaire moyen de 40 heures par semaine, lequel correspondait en principe à cinq jours, les vingt-neuf jours de vacances auxquels les policiers avaient droit avaient logiquement été valorisés à 8 heures, et ce quel que soit le nombre d'heures planifiées pour la journée en question.

Entre 2011 et 2015, M. A______ devait effectuer respectivement 1'992 heures, 1'773.73 heures, 1'968 heures, 1'968 heures, 1'976 heures, et son horaire avait été planifié chaque année en fonction de ces chiffres. Il avait pris toutes ces années ses vingt-neuf jours de vacances, sauf en 2011 où il en avait pris trente étant précisé qu'il bénéficiait d'un solde de un jour relatif à l'année 2010. Entre 2011 et 2015, il avait travaillé respectivement 2'004 heures, 1'817.50 heures, 2'009.50 heures, 2'046 heures et 1'976 heures et avait ainsi effectué des heures en plus à hauteur de 12 heures, respectivement 43.77 heures, 41.50 heures, 78 heures et 14 heures, qu'il avait pu compenser l'année suivante, étant précisé que lesdites heures avaient été majorées à hauteur de 25 %.

À titre d'exemple, lorsque M. A______ avait pris congé les 4 et 7 mars 2015, durant lesquels son horaire planifié prévoyait des journées de 8 heures respectivement 2 heures et 30 minutes, deux fois un jour avaient été déduits de son solde de vacances et deux fois 8 heures avaient été déduites de son solde d'heures. Cette manière de calculer les vacances était conforme aux dispositions légales applicables et tenait compte du nombre d'heures qui devaient être effectuées par chaque collaborateur.

M. A______ souhaitait, lorsqu'il prenait un jour de congé, que le nombre d'heures planifiées soit déduit du solde qu'il devait effectuer pour son employeur, soit par exemple 10 heures pour le 4 mars 2015, alors même qu'il n'avait pas travaillé ce jour-là. Cette manière de procéder aurait pour effet que les policiers bénéficieraient d'un solde de vacances plus important que celui prévu par la loi. Elle créerait au surplus des inégalités de traitement, au sein de la police, puisqu'en choisissant opportunément les services planifiés, respectivement les journées de travail dont les heures planifiées seraient supérieures à 8 heures, un policier pourrait être nettement avantagé par rapport à ses collègues, et plus généralement, par rapport aux collaborateurs administratifs travaillant au sein de la police, lesquels se voyaient comptabiliser leurs vacances en heures et au prorata de leur activité. Enfin, cette manière de faire aurait pour conséquence que la durée normale de travail prévue par la législation ne serait plus respectée.

La présente décision pouvait faire l'objet d'un recours dans un délai de
trente jours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

14. Par acte du 14 mars 2017, M. A______ a interjeté recours contre la décision précitée auprès de la chambre administrative, en concluant à son annulation, en tant qu'elle rejetait ses prétentions financières formulées aux fins d'indemnisation des jours de vacances dont il n'avait pas bénéficié durant les années 2011 à 2015, et à sa confirmation en tant qu'elle admettait que les jours de vacances des policiers étaient calculés en jours et non en heures. Cela fait, le département devait être condamné à lui verser les montants suivants :
CHF 846.65 avec intérêts à 5 % l'an à compter du 1er janvier 2012, CHF 467.30 avec intérêts à 5 % l'an à compter du 1er janvier 2013, CHF 1'376.40 avec intérêts à 5 % l'an à compter du 1er janvier 2014, CHF 911.40 avec intérêts à 5 % l'an à compter du 1er janvier 2015, CHF 1'497.30 avec intérêts à 5 % l'an à compter du 1er janvier 2016. Subsidiairement, la décision du département du 15 février 2017 devait être annulée et il devait être dit que les vacances devaient être calculées en jours, indépendamment de la durée de l'horaire planifié, et non en heures. L'État de Genève devait être condamné au paiement des frais et « dépens ».

Certains fonctionnaires de police étaient soumis à un horaire administratif comme tout employé de l'État, à savoir du lundi au vendredi à raison de 8 heures par jour. Toutefois, une grande partie d'entre eux était soumis à des horaires particuliers et spécifiques, soit en particulier les policiers de l'ancienne gendarmerie. En raison de la nature particulière de leurs tâches, ils exerçaient selon des horaires irréguliers, en rotation sur 6 ou 8 jours. Depuis de nombreuses années, le calcul des vacances s'effectuait en jours, sans égard à la durée horaire et quel que soit l'horaire planifié. Ensuite de diverses tentatives de remettre en cause ce principe, la DRH du département avait adressé une note à la cheffe de la police le 26 février 2010 à teneur de laquelle elle lui annonçait qu'il avait été décidé de revenir à une gestion des vacances en jours et non en heures. Nonobstant, l'instruction 1/2012 avait prévu, rétroactivement dès 2011, que les vacances seraient déduites des heures à produire avec une valorisation de 8 heures. L'instruction de service 1/2014 du 20 février 2014 (ci-après : instruction 1/2014) posait quant à elle le principe selon lequel les vacances ne pouvaient être prises que pour des périodes consécutives, ce qui empêchait les policiers de les prendre jour par jour, et de ce fait de choisir les jours qui contiendraient l'horaire planifié le plus dense. Cette instruction précisait également que quel que soit l'horaire journalier, chaque jour de service correspondait à un jour de vacances. Malgré la clarté de cette instruction, les ressources humaines de la police et du département avaient continué à appliquer la valorisation du jour de vacances à hauteur de
8 heures, ce qui avait été largement contesté par les fonctionnaires de police. Depuis 2012, son horaire de travail se faisant en rotation sur six jours comprenant
quatre journées consécutives de travail de respectivement 10 heures, 10 heures,
12 heures et 2 heures et 30 minutes, puis deux jours de repos.

Le département se fondait principalement sur les dispositions légales entrées en vigueur le 1er mai 2016 pour rejeter ses prétentions. Or, dès lors que l'ensemble de ses prétentions portaient sur des périodes antérieures au 1er mai 2016, le nouveau droit n'était pas applicable.

Le but des vacances était de permettre au travailleur de se reposer plutôt que de travailler le jour en question. Avec le système du département, le policier qui prenait ses vacances alors que son horaire de travail était de 10 ou 11 heures devait en réalité rattraper 2 à 3 heures à un autre moment pour compenser les heures manquantes puisque seules 8 heures lui étaient accordées.

La pratique consistant à valoriser les vacances à hauteur de 8 heures par jour, plutôt que de considérer qu’un jour de vacances équivalait à un jour de travail, violaient les principes de la légalité et de l’égalité de traitement. L'intimé commettait en réalité un excès de son pouvoir d’appréciation, lequel heurtait lesdits principes.

La loi, qui prévoyait l'équivalence entre le jour de travail et le jour de vacances, était parfaitement claire et ne permettait aucune interprétation selon laquelle un jour de vacances devait être valorisé à hauteur de 8 heures de travail. Il était faux de prétendre qu'en l'absence de valorisation, les policiers bénéficiaient d'un solde de vacances plus important. Si l'on prenait vingt-neuf jours de vacances, quel que soit l'horaire de travail, la durée des vacances était respectée.

La pratique du département dans le calcul des vacances consacrait une inégalité de traitement à l'égard des policiers contraints de travailler selon des horaires irréguliers. Lorsqu'ils prenaient une semaine de vacances, ils devaient rattraper des heures de travail allant de 30 minutes à 6 heures et 30 minutes, alors que leurs collègues en horaire administratif ne devaient rien rattraper. Contrairement à ce qu'indiquait le département, les policiers ne pouvaient pas prendre des jours de vacances isolés en faisant le choix des jours les plus longs dès lors qu'ils avaient l'obligation, selon l'instruction 1/2014, de prendre au moins quatre ou cinq jours de vacances d'affilée et au moins une fois une période de trois semaines consécutives.

Les horaires irréguliers des policiers avaient pour effet que la moyenne du temps de travail journalier était toujours supérieure à 8 heures par jour, de sorte que la valorisation d'un jour de vacances à hauteur de 8 heures par jour était une aberration mathématique.

Enfin, le département n’avait pas critiqué le calcul de son préjudice. Il l’avait uniquement rejeté au motif qu’il considérait, à tort, sa pratique comme étant conforme à la loi. La chambre de céans pouvait donc statuer sur ses conclusions principales, sans renvoyer la cause à l’autorité précédente.

Étaient notamment joints au recours des « feuilles de calcul » établies par le recourant mentionnant notamment, pour les années 2011 à 2015, les heures dues et les heures travaillées, et distinguant le décompte d'heures selon sa méthode et selon celle du département.

15. Dans ses observations du 8 juin 2017, le département a conclu au rejet du recours.

Durant le courant de l'année 2010, l'État de Genève avait décidé d'appliquer, pour l'ensemble de ses collaborateurs, le principe de l'annualisation du temps de travail. Ce principe signifiait que les heures de travail devaient être réparties sur l'année civile. À cette occasion, il avait été décidé que les vacances des policiers seraient valorisées à hauteur de 8 heures dès le 1er janvier 2011.

En 2011, l'horaire planifié de M. A______ avait été organisé à partir du nombre de 2'080 heures annuelles (40 heures par semaine x 52 semaines), desquelles il fallait déduire 56 heures correspondant à sept jours fériés à 8 heures et 32 heures correspondant à 4 jours de pont de 8 heures, soit 1'992 heures. Ce chiffre avait été déduit chaque jour en fonction du nombre d'heures effectuées, correspondant en principe à l'horaire planifié. Durant cette année, il avait pris
trente jours de vacances. Pour chaque jour de vacances, une réduction de 8 heures avait été effectuée. À la fin de l'année 2011, M. A______ avait effectué
12 heures en trop, lesquelles avaient été compensées l'année suivante, avec une majoration à hauteur de 25 %. Le département a apporté les mêmes explications détaillées pour les années suivantes.

Les dispositions légales applicables ne faisaient pas de différence, concernant les jours de vacances et les heures de travail, entre les fonctionnaires de police soumis à un horaire administratif et ceux soumis à un horaire planifié. Dans les deux cas, les vacances étaient fixées à vingt-neuf jours, la durée du travail à 520 heures par trimestre ou 40 heures par semaine. La nouvelle réglementation sur la police prévoyait que les 40 heures hebdomadaires étaient des moyennes, réparties sur cinq jours et mentionnait l'horaire planifié. Le nouveau droit ne faisait que préciser une pratique qui existait déjà. Si les vacances des policiers soumis à un horaire planifié étaient comptabilisées en heures, de façon différente de celles des fonctionnaires soumis à un horaire régulier, le nombre d'heures résiduelles à effectuer serait moindre pour les premiers que pour les seconds.

Dans l'horaire planifié, un jour de travail correspondait rarement à 8 heures ; il pouvait s'élever à 10 heures, 12 heures et parfois même 2 heures et 30 minutes. Toutefois, afin de respecter la loi, le législateur n'avait pas eu d'autre choix que de donner une valeur à un jour de vacances et ne pouvait valoriser celui-ci autrement qu'à hauteur de 8 heures. Si on valorisait les jours de vacances en fonction du nombre d'heures planifiées, les policiers bénéficieraient systématiquement d'un nombre de jours de vacances supérieur à celui prévu par la loi. À titre d'exemple, si l'on comptabilisait les heures planifiées lors des 30 jours de vacances pris par M. A______ en 2011, on arrivait à un total de 260,5 heures soit 32,5625 jours de vacances. Ainsi, la méthode du département était la seule qui permettait de respecter le texte de la loi.

Les travaux préparatoires faisaient clairement apparaître que le nombre de jours de vacances des policiers étaient supérieur à celui des fonctionnaires soumis à la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05), notamment pour compenser l'aspect pénible du travail du policier. Ils n'indiquaient en revanche rien sur la manière de comptabiliser ou valoriser les
vingt-neuf jours de vacances. Ils ne faisaient en particulier aucune distinction entre les collaborateurs de la police soumis à des horaires administratifs et ceux soumis à des horaires planifiés. La manière de procéder du département n'était donc pas contraire à la volonté du législateur.

Contrairement à ce qu'indiquait le recourant, les policiers ne devaient aucunement effectuer des heures en plus en raison de la manière de comptabiliser leurs vacances. Ils devaient effectuer 2'080 heures par an et les heures effectuées en sus étaient considérées comme des heures supplémentaires qui étaient récupérées au cours de l'année suivante.

L'égalité de traitement entre les fonctionnaires de police soumis à un horaire administratif et ceux soumis à un horaire planifié devait être respectée. Ils devaient tous travailler en moyenne 2'080 heures par an, soit 40 heures par semaine, et avaient le droit à vingt-neuf jours de vacances par an. À cet égard, leur situation était en tous points semblables. Valoriser les heures de vacances à concurrence du nombre d'heures planifiées chaque jour revenait non seulement à créer des inégalités entre les policiers soumis à un horaire planifié mais prenant des vacances à des époques différentes ou lors de tournus différents, mais également entre ceux soumis à un horaire administratif et ceux soumis à un horaire planifié. Les indemnités octroyées en faveur des policiers pour service de nuit, pour risque inhérent à la fonction et les débours tenaient précisément compte des spécificités liées à l'horaire planifié.

Étaient notamment joints les décomptes d'heures du recourant intitulés
« annualisation » pour les années 2011 à 2015.

16. Le 18 août 2017, M. A______ a répliqué, persistant intégralement dans ses conclusions.

Si le législateur entendait prévoir des vacances valorisées en heures et non en jours, il aurait alors indiqué que les fonctionnaires de police avaient le droit à 232 heures de vacances et non à vingt-neuf jours de vacances. L'argument du département selon lequel, en valorisant les vacances en jours plutôt qu'en heures, les policiers travailleraient moins de 520 heures par semaine [recte : par trimestre] ne tenait que si l'on considérait qu'un jour de vacances correspondait à 8 heures, ce qui était contesté.

Le fait de calculer les vacances en heures pour s'approcher du système prévalant pour les policiers soumis à un horaire administratif augmentait considérablement la pénibilité, déjà existante, du travail pour les policiers soumis à un horaire irrégulier.

17. Le 26 mars 2018, le département a indiqué ne pas avoir de nouveau élément à soumettre à la chambre administrative.

18. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le litige porte sur la manière de comptabiliser les jours de vacances pris par le recourant entre 2011 et 2015, lequel exerce la fonction de policier et est soumis à un horaire planifié.

3. À titre préalable, il convient de déterminer le droit applicable au présent litige.

a. La loi sur la police du 27 octobre 1957 (aLPol - F 1 05) et son règlement d’application du 25 juin 2008 (aRPol - F 1 05.01) ont été abrogés respectivement par la loi sur la police du 9 septembre 2014 (LPol - F 1 05) et par le règlement sur l’organisation de la police du 16 mars 2016 (ROPol - F 1 05.01), entrés en vigueur le 1er mai 2016.

L’art. 67 LPol relatif aux dispositions transitoires n’est pas pertinent dans le cas d’espèce.

b. En règle générale, s'appliquent aux faits dont les conséquences juridiques sont en cause, les normes en vigueur au moment où ces faits se produisent
(Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. 1, 3ème éd., 2012, p. 184 n. 2.4.2.3). La rétroactivité d'une disposition légale est contraire aux principes de la sécurité et de la prévisibilité du droit. Elle n'est admise qu'exceptionnellement par la jurisprudence, qui exige, entre autres conditions, qu'elle figure dans une base légale claire
(ATF
116 Ia 207 ; 104 Ib 157 ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, op. cit., p. 200 n. 2.4.3.1).

c. En l'occurrence, les revendications du recourant portent sur les années 2011 à 2015, de sorte que seules les dispositions de l'aLPol et de l'aRPol s’appliquent au présent litige.

Les fonctionnaires de police sont par ailleurs soumis à la LPAC et à ses dispositions d'application, sous réserve des dispositions particulières de l’aLPol (art. 1 al. 1 let. b LPAC, dans sa teneur en vigueur avant le 1er mai 2016, et
art. 26 aLPol).

4. Le recourant considère que le calcul des vacances opéré par le département, soit la valorisation des vacances à hauteur de 8 heures par jour, viole le principe de la légalité, est illégal et constitue un excès de son pouvoir d’appréciation.

5. À teneur de l’art. 5 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit est la base et la limite de l’activité de l’État. Toute activité étatique doit reposer sur une règle de droit générale et abstraite, les actes de rang inférieur devant respecter ceux qui sont de rang supérieur (Jean-François AUBERT/Pascal MAHON, Petit commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, 2003, p. 43 ; ATA/606/2018 du 13 juin 2018 consid. 3).

Le principe de la légalité se compose de deux éléments : le principe de la suprématie de la loi et le principe de l’exigence de la base légale. Le premier signifie que l'autorité doit respecter l’ensemble des normes juridiques ainsi que la hiérarchie des normes. Le second implique que l’autorité ne peut agir que si la loi le lui permet ; son action doit avoir un fondement dans une loi (ATA/606/2018 précité consid. 3 ; ATA/383/2017 du 4 avril 2017 consid. 5a).

Le principe de la légalité exige donc que les autorités n'agissent que dans le cadre fixé par la loi. Il implique qu’un acte étatique se fonde sur une base légale matérielle qui est suffisamment précise et qui a été adoptée par l’organe compétent (ATF 141 II 169 consid. 3.1).

Sous son aspect de primauté de la loi, le principe de la légalité, signifie d’abord que l’administration doit respecter la loi, s’en tenir à ses prescriptions. (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 467 p. 155).

6. Selon l'art. 30 al. 1 aLPol, il peut être fait appel en tout temps aux fonctionnaires de police pour les besoins du service. Ils sont tenus de se soumettre aux horaires de service. Selon l'art. 30A aLPol, les fonctionnaires de police interviennent, au besoin, en conformité des instructions reçues, même s'ils ne sont pas de service (al. 1). Le Conseil d'État détermine par règlement le barème de majoration et le mode de rémunération des heures supplémentaires effectuées par les fonctionnaires de police (al. 2). Les heures supplémentaires sont compensées prioritairement par des congés (al. 3).

L’art. 34 al. 1 aLPol prévoit que les fonctionnaires de police, qui n'ont pas atteint l'âge de 60 ans et n'ont pas le statut de cadre supérieur de l'administration cantonale, ont droit à vingt-neuf jours de vacances par année.

La durée normale du travail est, en moyenne, de 520 heures par trimestre (art. 2 aRPol). Le chef de la police détermine les horaires de service dans le cadre de l'art. 2 (art. 3 al. 1 aRPol). Une heure supplémentaire est une heure effectuée en dépassement du temps de travail planifié (art. 4 aRPol). Selon l'art. 5 aRPol, chaque heure supplémentaire est majorée de 25 % en temps ou en francs (al. 1). Chaque heure supplémentaire effectuée pendant un jour de liberté ou de repos est rétribuée avec une majoration de 100 % (al. 2). Les heures supplémentaires sont compensées prioritairement par des congés (al. 3).

L’art. 27 al. 3 RPAC, applicable par renvoi de l’art. 26 aLPol, prévoit que chaque jour de vacances correspond à un jour de travail.

7. a. L’office du personnel de l'État (ci-après : OPE) a édicté des directives (mémento des instructions de l'OPE, ci-après : MIOPE) passant en revue et explicitant l’ensemble des règles relatives aux rapports de service des collaborateurs de l’État (consultable sur le site http://ge.ch/etat-employeur/memento-instructions-de-lope-miope).

La fiche 03.01.08 du MIOPE du 1er octobre 2010 définit les principes généraux de l’annualisation du temps de travail au sein de l'État, soit la répartition des heures de travail sur l'année civile. L'annualisation du temps de travail s’applique à toutes les catégories de personnel (plein temps ou temps partiel) en fonction du besoin de l'unité organisationnelle et en accord avec la hiérarchie. Dans le cadre de l'annualisation du temps de travail, l'horaire administratif s'applique. Néanmoins, lorsque les prestations à fournir au public ou des raisons techniques l'exigent impérativement, un service de l'administration peut rester en activité le samedi, le dimanche, les jours fériés ou la nuit, c'est-à-dire entre 19h et 6h. L'introduction de ce modèle devait respecter les « Principes de l'annualisation du temps de travail », ainsi que la législation et la réglementation en vigueur.

Selon cette fiche, pour l'année 2015, l’annualisation du temps de travail doit être calculée sur une base de 261 jours ouvrés, représentant un total de 2’088 heures. Il convient de déduire de ce total : les congés officiels (nombre de jours de congé officiels x 8 heures), les vacances des collaborateurs (25 ou 30 jours de vacances annuelles x 8 heures) ainsi que les jours de congé accordés par le Conseil d'État s'il y a lieu (nombre de jours accordés x 8 heures).

b. Le MIOPE constitue une ordonnance administrative. Une telle ordonnance ne lie pas le juge, mais celui-ci la prendra en considération, surtout si elle concerne des questions d’ordre technique, tout en s’en écartant dès qu’il considère que l’interprétation qu’elle donne n’est pas conforme à la loi ou à des principes généraux (ATA/697/2016 du 23 août 2016 consid. 5c : ATA/722/2015 du
14 juillet 2015 consid. 4b).

8. a. La loi s’interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n’est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, le juge recherchera la véritable portée de la norme au regard notamment de la volonté du législateur, telle qu’elle ressort notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, en particulier de l’intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d’autres dispositions légales (interprétation systématique ; ATF 140 II 202 consid. 5.1). Appelé à interpréter une loi, le juge ne privilégie aucune de ces méthodes, mais s’inspire d’un pluralisme pragmatique (ATF 139 IV 270 consid. 2.2).

b. Le juge est en principe lié par un texte clair et sans équivoque. Ce principe n’est toutefois pas absolu, dès lors que le texte d’une norme peut ne pas correspondre à son sens véritable. L’autorité qui applique le droit ne peut ainsi s’en écarter que s’il existe des motifs sérieux de penser que sa lettre ne correspond pas en tous points au sens véritable de la disposition visée. De tels motifs sérieux peuvent résulter des travaux préparatoires, du fondement et du but de la prescription en cause, de même que de sa relation avec d’autres dispositions (ATF 138 II 557 consid. 7.1). En dehors du cadre ainsi défini, des considérations fondées sur le droit désirable ne permettent pas de s’écarter du texte clair de la loi, surtout si elle est récente (ATF 118 II 333 consid. 3e).

9. De manière générale, la jurisprudence reconnaît à l’administration une grande latitude pour s’organiser et un large pouvoir d’appréciation. Celle-ci dispose ainsi d’une très grande liberté de décision dans la définition des modalités concernant les rapports de service qu’elle entretient avec ses agents (arrêt du Tribunal fédéral 2P_46/2006 du 7 juin 2006 ; François BELLANGER, Contentieux communal genevois in : L’avenir juridique des communes, Schulthess 2007, p. 149). Ainsi, l’administration doit bénéficier de la plus grande liberté d’appréciation pour fixer son organisation et créer, modifier ou supprimer des relations de service nécessaires à son bon fonctionnement, questions relevant de l’opportunité et échappant par conséquent au contrôle de la chambre administrative. Ce pouvoir discrétionnaire ne signifie pas que l’autorité est libre d’agir comme bon lui semble. Elle ne peut ni renoncer à exercer ce pouvoir ni faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l’égalité de traitement, la proportionnalité et l’interdiction de l’arbitraire (Blaise KNAPP, Précis de droit administratif, 1991,
p. 35-36 n. 161 ss). L’exercice d’un contrôle judiciaire dans ce cadre-là garde tout son sens, même si le juge administratif doit alors observer une très grande retenue dans l’examen de la manière dont l’administration a exercé ses prérogatives. Le juge doit ainsi contrôler que les dispositions prises demeurent dans les limites du pouvoir d’appréciation de l’autorité et qu’elles apparaissent comme soutenables au regard des prestations et du comportement du fonctionnaire ainsi que des circonstances personnelles et des exigences du service. Seules les mesures objectivement insoutenables et arbitraires doivent être annulées, la chambre administrative vérifiant que l’autorité n’outrepasse pas son pouvoir d’appréciation et respecte les conditions de fond et de forme dont les textes imposent la réalisation (ATF 108 I b 209 publié in : JT 1984 I 331, consid. 2 ; ATA/870/2014 du 11 novembre 2014 consid. 17b).

10. Le recourant considère que la loi - qui prévoit l'équivalence entre le jour de travail et le jour de vacances - est parfaitement claire et ne permet aucune interprétation selon laquelle un jour de vacances serait valorisé à hauteur de
8 heures de travail.

À titre préalable, il convient de relever que les jours de vacances des policiers, comme de tout autre fonctionnaire de l’État de Genève, sont comptabilisés en jours et non en heures, ce qui n'est d'ailleurs contesté par aucune des parties. Il n’est pas non plus contesté que le recourant, policier âgé de moins de 60 ans et qui n’est pas un cadre supérieur, a droit à vingt-neuf jours de vacances par an. Par ailleurs, comme le relève à juste titre l'intimé, les dispositions légales applicables ne font pas de différence, s'agissant des vacances et du nombre d'heures de travail, entre les fonctionnaires de police soumis à un horaire administratif et ceux soumis à un horaire planifié.

Comme susmentionné, l'art. 2 aRPol prévoit que la durée normale du travail est, en moyenne, de 520 heures par trimestre. Il en découle que les policiers doivent effectuer, en moyenne, 40 heures par semaine (520 heures / 13 semaines), soit 2'080 heures par an (40 heures x 52). Le fait qu'ils effectuent en réalité leur horaire en rotation sur 6 ou 8 jours n'y change rien, dès lors qu'il s'agit d'une moyenne. Le nombre d'heures annuel varie en réalité entre 2'080 heures et 2'096 heures par an, en fonction du nombre de jours ouvrés par année. Par ailleurs, si le droit aux vacances est effectivement calculé en jours (art. 34 aLPol) et non en heures, rien n'interdit à l'administration de valoriser les vingt-neuf jours auquel le recourant, et plus généralement les policiers, ont le droit en heures afin d'établir le nombre d'heures à effectuer par année. Ceci est rendu nécessaire par l'annualisation du temps de travail à laquelle l'intimé, et plus généralement l'État de Genève, ont décidé de recourir à compter de l'année 2011 et dont les principes sont définis à la fiche 03.01.08 du MIOPE. Cette manière de procéder n'empêche en outre aucunement le recourant de bénéficier de ses vingt-neuf jours de vacances par an. Reste à savoir si la valorisation d'un jour de vacance à hauteur de 8 heures est conforme au droit.

Ni la LPAC ni l'aLPol, pas plus que leurs règlements d'application, ne définissent la manière de comptabiliser en heures un jour de vacances, le seul impératif étant que chaque jour de vacances corresponde à un jour de travail
(art. 27 al. 3 RPAC applicable par renvoi de l’art. 26 aLPol). La fiche 03.01.08 du MIOPE prévoit en revanche la multiplication du nombre de jours de vacances par 8 heures dans le calcul visant à définir le nombre d'heures à travailler par année.

À teneur des feuilles de calcul établies par le recourant pour les années 2011 à 2015, celui-ci admet que pour établir le nombre d'heures qu'il doit effectuer sur l'année, il convient de prendre le nombre de jours ouvrés, valorisé à hauteur de
8 heures par jour, et d'en soustraire le nombre de jours fériés et de ponts, tous deux valorisés à raison de 8 heures par jour. Or, rien ne justifie qu'un jour férié ou qu'un point soit valorisé à hauteur de 8 heures par jour et qu'un jour de vacances soit, à teneur de l'argumentation du recourant, valorisé par hypothèse à hauteur de
10 heures ou 12 heures. À l'instar d'un jour de travail planifié durant lequel le recourant est finalement en vacances, ce dernier pourrait être amené à travailler 10 ou 12 heures durant un jour férié, lequel est pourtant valorisé à hauteur de
8 heures par jour. Par ailleurs, si des jours de vacances peuvent effectivement être pris sur des journées comprenant initialement, selon le planning établi, 10 ou 12 heures de travail, ils peuvent également l'être sur des journées ne comprenant initialement que 2 heures et trente minutes de travail. Seule la valorisation d'un jour de vacances à hauteur de 8 heures permet dès lors de rester cohérent avec la manière dont est établi le nombre d'heures à effectuer par an, laquelle n'est au demeurant pas contestée par le recourant.

Le recourant ne conteste pas avoir bénéficié des vingt-neuf jours de vacances auxquels il avait le droit pour chacune des années concernées. Il considère en revanche avoir dû « rattraper » des heures de travail pour jouir pleinement de ceux-ci. Or, son raisonnement ne saurait être suivi.

Le nombre d'heures à effectuer par le recourant chaque année est établi en début d'année. À titre d'exemple, pour l'année 2015, laquelle comptait 261 jours ouvrés, le recourant devait effectuer 2'088 heures, sous déduction de 72 heures pour les jours fériés (9 jours x 8 heures) et de 32 heures pour les ponts (4 jours x
8 heures), soit 1'976 heures. Pour les raisons susmentionnées, la valorisation des heures de vacances doit également être faite à hauteur de 8 heures par jour, soit 232 heures (29 jours x 8 heures). De cette manière, le choix du jour de vacances
n'a aucune incidence sur le nombre d'heures à effectuer sur l'année. En réalité, la comptabilisation des heures planifiées à l'origine lors de la prise d'un jour de vacances - soutenue par le recourant - aurait au contraire comme conséquence une inégalité de traitement par rapport aux policiers soumis à un horaire administratif.

Dès lors, la valorisation des vacances prises par le recourant, durant les années 2011 à 2015, à hauteur de 8 heures par jour, n'a pas porté préjudice à ce dernier, lequel a effectivement bénéficié de ses vingt-neuf jours de vacances. De même, cette comptabilisation, rendue nécessaire par l'annualisation du temps de travail, ne viole pas les dispositions légales applicables et il ne saurait être considéré que l'autorité, qui dispose d'une grande liberté pour fixer son organisation, a commis un excès de son pouvoir d’appréciation.

Ce grief est ainsi infondé.

11. Le recourant considère également que la manière dont le département comptabilise ses vacances créerait une inégalité de traitement pour les policiers travaillant comme lui en horaires irréguliers. Lors de la prise d’une même semaine de vacances, il serait contraint de rattraper des heures de travail allant de
30 minutes à 2 heures et 30 minutes alors qu’un collègue travaillant selon un horaire administratif n’aurait rien à rattraper.

12. Une décision ou un arrêté viole le principe de l’égalité de traitement garanti par l’art. 8 Cst. lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances, c’est-à-dire lorsque ce qui est semblable n’est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l’est pas de manière différente. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 138 V 176 consid. 8.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_862/2015 du 7 juin 2016 consid. 9.1 et les références citées ; ATA/1090/2018 du 16 octobre 2018 consid. 6a ; Vincent MARTENET, Géométrie de l'égalité, 2003, p. 260 ss).

13. En l’espèce, la chambre administrative ne souscrit pas à la vision du recourant selon laquelle il serait contraint de rattraper des heures de travail. En effet, le fait de valoriser un jour de vacances à hauteur de 8 heures permet précisément d'aboutir au fait que tous les fonctionnaires de police doivent, au terme de chaque année, effectuer le même nombre effectif d'heures, celles éventuellement effectuées en sus étant compensées par un congé et majorées à 25 ou 100 % (art. 5 aRPol). Ce système, appliqué à tous les policiers soumis tant à un horaire administratif qu'à un horaire planifié, permet précisément d'éviter des inégalités qui ne se justifieraient pas dans ces circonstances.

Si la pénibilité de l'horaire irrégulier du recourant - lequel implique de travailler la nuit et durant les week-ends - est incontestable, elle est déjà prise en considération lors de l'octroi, par exemple, d'une indemnité pour service de nuit (art. 49 al. 1 aLPol). Dans ces circonstances, il ne se justifie pas d’appliquer un système diamétralement différent à celui mis en place par l’autorité compétente.

Ce grief sera dès lors également écarté.

14. Compte tenu de ce qui précède, le recourant n'est pas parvenu à démontrer que la manière dont ont été comptabilisés ses jours de vacances durant les années 2011 à 2015 serait contraire au droit. Ses conclusions relatives au paiement du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de cette comptabilisation seront dès lors également écartées.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

15. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1’500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 mars 2017 par Monsieur A______ contre la décision du département de la sécurité du 15 février 2017 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 1’500.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Jacques Roulet, avocat du recourant, ainsi qu'au département de la sécurité.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mmes Krauskopf et Junod, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :