Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/2563/2008

ATA/473/2009 du 29.09.2009 ( GC ) , ADMIS

Descripteurs : ; AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ; PROCÉDURE DE PLANIFICATION ; ZONE À PROTÉGER ; CHANGEMENT D'AFFECTATION
Normes : OAT.3.al1 ; LaLAT.11A.al1 ; LaLAT.17.al1
Parties : PRO NATURA GENEVE / GRAND CONSEIL, MAISON DE VESSY
Résumé : Admission d'un recours contre une modification de limites de zones impliquant la diminution du périmètre de protection des rives de l'Arve. Pesée des intérêts. In casu, le Grand Conseil a mésusé de son pouvoir d'appréciation. La modification étant justifiée par des motifs de convenance et la procédure suivie contraire aux principes d'une planification directrice.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2563/2008-GC ATA/473/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 29 septembre 2009

 

dans la cause

 

 

 

 

 

 

PRO NATURA GENèVE
représentée par Me Alain Maunoir, avocat

 

 

contre

GRAND CONSEIL

 

et

 

MAISON DE VESSY
appelée en cause, représentée par Me François Bellanger, avocat

 


 


EN FAIT

1. La parcelle n° 2765 de la commune de Veyrier, d'une surface de 71'398 m2, est propriété de l'Hospice général. Située à l'angle de la route de Veyrier et du chemin des Beaux Champs au lieu-dit Grande Fin, ce terrain est colloqué en zone agricole au sens de l'art. 20 al. 1 de la loi d’application de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30) et, pour partie, en zone de bois et forêt. Le bien-fonds abrite l'établissement médico-social "la Maison de Vessy" (ci-après : l'EMS), établissement de droit public formé de quatre bâtiments et d'annexes.

2. La parcelle n° 1568 de la commune de Veyrier, d'une surface de 28'999 m2, est propriété de l'Etat de Genève. Située au nord de la parcelle n° 2765 qu'elle prolonge, elle est colloquée en zone agricole, libre de toute construction et entièrement incluse dans le périmètre de protection des rives de l'Arve, selon le plan annexé à la loi sur la protection générale et l'aménagement des rives de l'Arve du 4 mai 1995 (L 4 16 - LPRArve).

La limite de la zone de protection sépare les deux parcelles puis se prolonge à l'ouest en longeant l'EMS, suivant la zone boisée, jusqu'à la route de Veyrier. A l'est des parcelles, sur le plateau de Vessy, la limite de protection est située plus au nord sur la partie centrale puis se rapproche de la route de Veyrier à l'autre extrémité du plateau. A l'exception de ces zones, tout le plateau de Vessy, formé par les terrains situés dans un méandre de l'Arve, est inclus dans la zone de protection.

3. De juillet à septembre 2006, un avant-projet de modification de zones et de modification du périmètre de protection des rives de l'Arve, consistant principalement à placer en zone de développement 3 une surface totale d'env. 55'000 m2, constitué essentiellement par une part de la parcelle n° 2765 et une bande de trente mètres de large de la parcelle n° 1568, représentant une surface d'environ 4'800 m2 (env. 160 m x 30 m selon les plans figurants au dossier) a été soumis par le département du territoire (ci-après : DT) aux services concernés pour préavis technique. Des immeubles d'habitations devaient être réalisés dans le sud du périmètre. Conjointement, un projet d'agrandissement et de mise aux normes de l'EMS incluant son intégration dans le nouveau quartier, devait être réalisé.

Tous les préavis étaient favorables ou favorables sous réserve, excepté celui de la direction du domaine nature et paysage du département du territoire (ci-après : le DNP). Concernant la question litigieuse de la modification du périmètre de protection, le DNP a relevé le 20 septembre 2006 que la modification proposée entraînerait un affaiblissement de la protection des rives de l'Arve. Le découpage actuel du périmètre de protection résultait du constat, encore valide aujourd'hui, que l'inclusion d'une partie de la zone agricole du plateau de Vessy dans le périmètre de protection renforçait l'efficacité de cette dernière. Par ailleurs, ce recul de la zone de protection aurait pour effet de porter fortement atteinte à une pénétrante de verdure pourtant consacrée par le plan directeur cantonal (ci-après : PDC).

Le 16 août 2006, la sous-commission nature et sites de la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : SCNS), consultée à deux reprises, était favorable à la modification de zone compte tenu des projets en cours alors que dans un premier temps elle s'était opposée à la modification de la limite du périmètre de protection des rives de l'Arve.

4. Le projet de loi de modification de zones a été mis à l'enquête publique du 16 mai au 14 juin 2007 en même temps qu'un projet de plan localisé de quartier (ci-après : PLQ) prévoyant la réalisation de trois immeubles de trois étages sur rez-de-chaussée destinés à du logement sur le sud de la parcelle n° 2765 sur une surface d'environ 22'000 m2.

5. Le 25 septembre 2007, le conseil municipal de la commune de Veyrier a délivré un préavis favorable au projet de modification de zones.

6. Le 23 novembre 2007, le Conseil d'Etat a déposé sur le bureau du Grand Conseil le projet de loi n° 10174 modifiant les limites de zones et la procédure d'opposition a été ouverte du 19 décembre 2007 au 17 janvier 2008 simultanément à celle du projet de PLQ.

L'exposé des motifs indiquait que "les résultats du concours d'architecture organisé par l'EMS avaient montré l'intérêt à disposer d'une bande de terrain supplémentaire d'environ trente mètres au nord des immeubles existants afin de permettre une mise aux normes et un développement rationnel de l'EMS".

7. Le 16 janvier 2007, l'association Pro Natura Genève (ci-après : Pro Natura) a formé opposition tant au projet de loi qu'au projet de PLQ.

Les motifs pour lesquels le périmètre de protection des rives de l'Arve devait être diminué n'étaient pas clairs. L'intérêt public commandait le maintien de l'espace protégé.

8. Le 25 mars 2008, le projet de loi a été approuvé à l'unanimité par la commission de l'aménagement du Grand Conseil chargée de son étude.

Le 25 avril 2008, le Grand Conseil a adopté la loi n° 10174 et rejeté l'opposition formée par Pro Natura. S'agissant des motifs du rejet, le rapport de la commission d'aménagement, auquel renvoyait l'arrêté, précisait que la modification des limites du périmètre de protection des rives de l'Arve permettait la construction de pavillons à l'arrière de l'EMS et son maintien en activité durant tout le temps du chantier. Pour le surplus le rapport reprenait textuellement l'exposé des motifs du projet de loi.

9. La loi a été promulguée par arrêté du Conseil d'Etat du 18 juin 2008, paru dans la Feuille d'avis officielle (ci-après : FAO) du 23 juin 2008.

10. Par deux arrêtés du 25 juin 2008, le Conseil d'Etat a adopté le PLQ et rejeté l'opposition de Pro Natura.

11. Le 11 juillet 2008, Pro Natura a saisi le Tribunal administratif d'un recours contre la loi n° 10174 en concluant à son annulation en tant qu'elle s'appliquait à la parcelle n° 1568 de la commune de Veyrier et modifiait les limites du périmètre de protection des rives de l'Arve. Elle concluait également au versement d'une indemnité de procédure.

La liberté d'appréciation dont bénéficiaient les autorités en charge de l'aménagement du territoire n'était pas totale. Elle devait s'exercer en tenant compte des objectifs et des lignes directrices mentionnées dans le PDC. La pénurie de logements devait être mise en balance avec les autres activités requérant des parcelles constructibles et également avec la protection de la nature et du paysage. La pesée des intérêts avait été mal effectuée.

Le périmètre de protection délimité par la LPRArve constituait une zone à protéger au sens de l'art. 17 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700). Le PDC mentionnait l'Arve et ses abords comme une des principales pénétrantes de verdure à conserver et à mettre en valeur, selon le plan de la fiche 3.05 adoptée en 2007 par le Conseil d'Etat et approuvé par la Confédération. Le PDC prescrivait de "maintenir et mettre en valeur un ensemble diversifié de pénétrantes de verdure" en privilégiant les "pénétrantes à forte valeur paysagère ou liées au milieu aquatique". Sous l'angle des mesures compensatoires, la fiche 3.12 telle que modifiée en 2007 prévoyait qu'en cas d'extension urbaine dans la zone agricole, il convenait de procéder à des compensations, en faveur de la nature ou de l'agriculture. La mise en valeur et l'aménagement de pénétrantes de verdure faisaient partie des actions faisant office de compensation à une extension de la zone à bâtir au détriment de la zone agricole. Le secteur de Vessy était clairement mentionné comme une pénétrante de verdure à mettre en valeur.

Face à cette pluralité d'intérêts publics, tous soutenus par les législations fédérale et cantonale en vigueur ainsi que par le PDC, les intérêts justifiant de réduire le périmètre de protection au nord de l'EMS étaient extrêmement flous et insuffisants dans le cadre d'une pesée globale des intérêts en présence.

Aucun motif clair n'apparaissait dans le dossier et les raisons réelles de l'extension de l'EMS à l'intérieur du périmètre protégé étaient inconnues. Dans l'hypothèse où l'extension de la zone à bâtir était justifiée par des besoins de surfaces utiles supplémentaires en faveur de l'EMS, se posait la question de savoir pourquoi ces extensions ne pouvaient se faire au sud des bâtiments, sur les 55'000 m2 que la loi colloquait en zone de développement 3 avec un potentiel à bâtir de 66'000 m2. En déduisant les 12'100 m2 de surfaces brutes de plancher prévues par le PLQ, il subsistait un solde de 53'900 m2 à disposition de l'EMS. Il était difficile de comprendre comment les besoins prévisibles réels de cette institution ne pouvaient raisonnablement être satisfaits sans entamer le périmètre de protection de l'Arve.

En l'espèce, le projet de modification de zones prévoyait non seulement l'urbanisation d'une partie du plateau de Vessy mais aussi une réduction de la surface de protection de l'Arve, alors que le PDC imposait au contraire sa mise en valeur. Le projet litigieux allait à l'encontre des règles fixées par le PDC.

12. Le 26 août 2008, l'EMS a sollicité son intervention dans la procédure.

13. Le 25 septembre 2008, le Grand Conseil a répondu au recours en concluant à son rejet.

Sur le plan de la procédure, il était favorable à l'appel en cause de l'EMS.

Le développement du quartier de Vessy figurait parmi les sites possibles pour des extensions urbaines en zone agricole selon la fiche 2.04 du PDC.

Une étude de faisabilité, intitulée "Quartier de Vessy, étude de vérification" avait été réalisée par la direction générale de l'aménagement du territoire en 2004. Le bureau de pilotage comprenait la commune de Veyrier, l'Hospice général et l'EMS ainsi qu'un groupe de travail, formé d'un bureau d'architecture et d'urbanisme, d'un bureau compétent en matière de trafic et d'un autre chargé des questions environnementales. Différents services avaient été consultés dans le cadre de cette étude dont la SCNS. Les conclusions de l'étude indiquaient qu'il était préférable de réaliser l'extension de l'EMS au nord de la parcelle en prévoyant un empiètement de 30 m sur la parcelle n° 1568 comprise dans le périmètre de protection des rives de l'Arve.

Un premier préavis de la SCNS du 1er novembre 2004 préconisait une option de construction au sud de la parcelle et le respect des limites de la zone de protection des rives de l'Arve. Finalement, elle avait déclaré le 16 août 2006 ne pas être opposée au nouveau périmètre des rives de l'Arve, considérant les projets en cours sur ces parcelles.

Un concours avait été organisé pour la rénovation et l'extension de l'EMS. Le projet primé prévoyait la construction de deux bâtiments parallèles au chemin des Beaux Champs qui nécessitaient la surface de 30 m de largeur prise sur la parcelle n° 1568.

La délimitation des zones était une question qui relevait surtout de la politique générale de l'aménagement du territoire et le contrôle par le juge des choix opérés par le législateur ne devait pas s'étendre aux questions d'opportunité. Seule la légalité du plan d'affectation pouvait être revue. Dans le contexte de la pénurie de logement, la création de nouvelles zones de développement était nécessaire. Une centaine de logements reliés à l'EMS par un vaste espace public pouvaient être réalisés au sud de la parcelle appartenant à l'Hospice général.

La pénurie de logements se faisait également sentir dans le domaine particulier des EMS. Il s'agissait d'un intérêt public prioritaire et la modification de zones litigieuse s'inscrivait pleinement dans ce cadre.

Le PDC n'avait pas pour but de régler directement le mode d'utilisation du sol. Les fiches indiquant que la coordination était "en cours", telles celles citées par Pro Natura, n'avaient qu'une valeur indicative. Dans le cas précis de la parcelle n° 1568, l'art. 17 al. 1 LAT laissait à l'autorité compétente une latitude d'appréciation considérable pour définir les objets protégés. La bande de terrain inconstructible longeant l'Arve n'était pas touchée par la modification de zone litigieuse.

Le périmètre de protection datait de 1995 et avait été effectué alors que le déclassement du plateau de Vessy était une perspective à très long terme et que la nécessité de rénover l'EMS n'était pas aussi pressante qu'aujourd'hui. La limite avait été tracée sous l'empire d'un précédent PDC, en l'absence d'une étude approfondie. La limite du périmètre de protection suivait simplement celle des parcelles sans autre considération. Depuis lors, les besoins en logements et en EMS s'étaient accrus et commandaient une nouvelle appréciation de la situation.

14. Le 30 octobre 2008, Pro Natura s'est déterminée en faveur de l'appel en cause de l'EMS, le projet étant justifié par les nécessités d'une "mise aux normes" de celui-ci.

Elle persistait dans ses conclusions. A la lecture de la réponse du Grand Conseil, le fondement véritable du déplacement de trente mètres du périmètre de protection des rives de l'Arve restait des plus vagues. Aucune pièce produite ne permettait de comprendre les motifs raisonnables sur lesquels il s'était fondé pour estimer "qu'il était préférable de réaliser l'extension de cet établissement au nord de la parcelle". Il semblait que cette modification résultait d'un choix arbitraire. Aucun équipement ni aucune installation particulière ne devait impérativement trouver place au nord de la parcelle au vu du projet primé ; en l'absence de ces trente mètres, l'architecte aurait vraisemblablement déplacé les trois bâtiments prévus vers le sud, sans que le projet ne soit fondamentalement modifié. Il s'agissait d'une simple facilité octroyée pour des motifs mystérieux sans besoin ni nécessité. Le besoin de chambres supplémentaires pour l'EMS pouvait être facilement satisfait à l'intérieur de l'actuelle parcelle n° 1765, pour autant qu'un indice d'utilisation du sol (ci-après : IUS) conforme au PDC soit appliqué. La diminution du périmètre de protection des rives de l'Arve n'avait pas pour effet de permettre la création d'un seul logement supplémentaire.

A cela s'ajoutait que les nouveaux bâtiments prévus allaient s'implanter à la limite du périmètre de protection déplacé. Il était prévisible que, dans quelques années, l'EMS demanderait à nouveau le déplacement de la limite du périmètre en invoquant de nouveau besoins.

Les différents schémas figurant dans "l'étude de vérification" et portant sur l'ensemble de la partie à urbaniser du plateau de Vessy indiquaient que, sur ce secteur, le périmètre de protection de l'Arve était dans tous les cas respecté. Les surfaces à urbaniser dans les prochaines années suivaient partout les contours dudit périmètre, sans l'entamer, sauf au nord de la parcelle n° 2765. Cela signifiait que, même face à l'important objectif de création de logements supplémentaires, il était prévu de respecter les limites actuelles du périmètre de protection de l'Arve.

Les fiches du PDC indiquant que la coordination était "en cours" n'avaient pas seulement une valeur indicative, comme l'affirmait le Grand Conseil. Dans ce cas, le PDC n'aurait plus aucune valeur juridique puisque la plupart des fiches portaient cette mention. Au contraire, les fiches citées bénéficiaient de la force obligatoire visée à l'art. 9 LAT. Lorsqu'une fiche mentionnait "coordination en cours", cela visait le processus de mise en œuvre et de concrétisation des objectifs décrits par ladite fiche. Matériellement, la coordination entre des affectations rivales ou contradictoires était fixée par le contenu même de la fiche.

15. Le 10 novembre 2008, le juge délégué a ordonné l'appel en cause de la Maison de Vessy.

16. Le 16 décembre 2008, l'EMS a déposé ses observations.

Le recours devait être rejeté. La mise aux normes consistait à adapter les locaux aux exigences actuelles pour les EMS. L'un des quatre pavillons ne pouvait plus être modifié vu sa vétusté, les trois autres seraient conservés et aménagés. En particulier, la cuisine ne pouvait pas être adaptée et devait être déplacée dans l'un des nouveaux pavillons du projet d'architecture primé. Ce projet avait l'avantage d'éviter de porter atteinte de manière excessive au parc situé devant les bâtiments. Deux des nouveaux pavillons devaient être réalisés à cheval sur les deux parcelles. Cet empiètement très limité justifiait la modification du périmètre de protection des rives de l'Arve. Ces deux constructions étaient plus éloignés des rives de l'Arve que ne l'étaient les pavillons actuels et ne porteraient ainsi aucune atteinte à celles-ci.

Si l'EMS ne pouvait pas réaliser ce projet qui permettrait de porter le nombre de résidents de 194 à 240, il se verrait empêché de mener à bien sa rénovation. Les nouveaux bâtiments devaient servir au logement des résidents actuels pendant la rénovation, toutes les chambres étant occupées en permanence.

Si les futures constructions devaient être réalisées devant les bâtiments existants cela réduirait de manière considérable, voire supprimerait, l'avantage offert par le parc de l'EMS. En outre, l'éloignement des nouveaux pavillons, imposé par leur implantation devant le bâtiment principal, rendrait très difficile, voire impossible la réalisation de la nouvelle cuisine, celle-ci ne pouvant être trop éloignée du bâtiment actuel dans lequel se trouvait le restaurant.

La modification du périmètre de protection était mineure et ne heurtait aucun intérêt prépondérant. L'agrandissement et la mise aux normes de l'EMS répondait à un intérêt général.

Pour le surplus, il faisait sien l'argumentation développée par le Grand Conseil.

17. Le 11 février 2009, Pro Natura a répliqué.

La totalité de l'argumentation de l'EMS était fondée sur les détails du projet primé à l'issue du concours d'architecture. Or, il s'agissait d'un litige portant sur une modification de zone qui devait être examiné en fonction des affectations générales permises par la ou les nouvelles zones et non en examinant les détails constructifs d'un projet qui pourrait, cas échéant, faire l'objet d'une autorisation de construire.

Une modification de zones, et a fortiori le passage d'une zone inconstructible à une zone à bâtir, ne saurait avoir comme unique justification le respect d'un certain nombre de normes relatives aux aménagements intérieurs du projet de construction.

Toute la procédure suivie relevait du fait accompli. Le sens des circulations internes et les distances entre les différents locaux futurs de l'EMS avaient été fixés avant même que ne démarre la procédure de modification de zones. Il ne restait plus qu'à adapter les procédures et décisions administratives subséquentes pour que le projet initialement voulu soit réalisé sans aucune possibilité de modification de la part des autorités légalement compétentes.

Le programme constructif présenté par l'EMS pouvait tenir à l'intérieur de la parcelle n° 2765, étant rappelé que la loi contestée permettait de faire passer 55'000 m2 en zone de développement 3, dans laquelle l'indice usuel était de 1,2. En ajoutant, par exemple, un étage à deux des trois bâtiments projetés, on pouvait compenser facilement les surfaces débordant sur le périmètre de protection.

Il n'y avait eu aucune mise en balance des tous les intérêts en présence ni de juste appréciation par l'autorité compétente. L'exposé des motifs de la loi ne mentionnait même pas le fait que le maintien et la mise en valeur du périmètre de protection des rives de l'Arve constituaient une des compensations prévues par le PDC aux déclassements de la zone agricole. C'était lors de la mise en place des conditions du concours d'architecture que la réduction du périmètre de protection des rives de l'Arve avait été décidée par pure commodité, arbitrairement. Une fois le projet primé, il ne restait plus au Grand Conseil qu'à l'approuver, sans espace pour le moindre raisonnement critique.

18. Le 13 mars 2009, le Grand Conseil a dupliqué.

Le plan querellé répondait aux objectifs du PDC et faisait suite à une pesée rigoureuse de l'ensemble des intérêts en présence.

La modification de zones reposait sur une étude commencée en août 2003 et terminée en novembre 2004 portant sur le développement de l'ensemble du quartier de Vessy qui concluait notamment à ce que l'extension de la Maison de Vessy nécessitait une modification du périmètre de protection des rives de l'Arve sur une bande de terrain d'une largeur de 30 mètres en direction du Nord.

19. Le 16 mars 2009, l'EMS a dupliqué.

L'extension du périmètre de l'EMS autorisé par la loi querellée était justifiée par des contraintes techniques et géographiques liées à l'extension et à la rénovation des bâtiments.

A l'heure actuelle, en raison de l'exiguïté du territoire genevois et des besoins importants de surfaces constructibles, la réflexion sur des modifications de limites de zones était toujours effectuée par rapport à des projets concrets.

Il y avait un double intérêt en jeu, celui de la rénovation qui nécessitait de loger provisoirement les résidents dans les nouveaux bâtiments et celui de l'augmentation du nombre résidents.

La procédure reposait sur une analyse concrète et objective des besoins justifiant le changement de zone.

20. Le 17 mars 2009, le greffe a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 35 al. 1 et 2 LaLAT). Il émane, en outre, d'une association dont la qualité pour agir est reconnue (art. 35 al. 3 LaLAT; ATA/551/2006 du 17 octobre 2006 ; ATA/50/2006 du 31 janvier 2006).

Les autres conditions de recevabilité sont par ailleurs remplies (art. 35 al. 4 LaLAT ; art. 63 al. 1 let. a LPA), de sorte que le recours est recevable.

2. Le litige porte sur une modification des limites de zones. La délimitation des zones est une question qui relève surtout de la politique générale de l'aménagement du territoire et le Grand Conseil dispose d'une grande liberté d'appréciation en la matière (ATF 108 Ib 479, consid. 3c).

a. Aux termes de l'art. 33 al. 2 LAT, le droit cantonal doit prévoir au moins une voie "de recours" contre les plans d’affectation. Parmi les autorités chargées de cette tâche, l'une d'elle au moins doit disposer d’un libre pouvoir d’examen (art. 33 al. 3 let. b LAT). Selon la jurisprudence, cette disposition institue une protection juridique en faveur des propriétaires ou autres citoyens concernés par la planification (Arrêt du Tribunal fédéral 1C.84/2008 du 28 mai 2008 consid. 6). Pour le Tribunal fédéral, ce libre examen ne se réduit pas à un contrôle complet de la constatation des faits et de l'application du droit ; il comporte aussi un contrôle de l'opportunité ; l'autorité devant vérifier que la planification contestée devant elle est "juste" et "adéquate" (Arrêt du Tribunal fédéral 1C.84/2008 précité).

Le Tribunal fédéral considère que l'exigence de la voie de "recours" visée par l'art. 33 al. 2 LAT est assurée par l'instauration, en droit cantonal, d'une voie d'opposition, soit d'un contrôle effectué par la même autorité que celle ayant adopté le plan attaqué (ATF 127 II 238 consid. 3b/bb p. 242 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.17/2008 du 13 août 2008 consid. 2.4.1). L'art. 33 LAT n'est ainsi pas violé lorsque l'autorité d'adoption de la mesure et celle contrôlant sa légalité sont les mêmes, comme c'est le cas en l'espèce (le Grand Conseil étant compétent pour adopter le plan et statuer sur l'opposition selon l'art. 16 al. 5 LALAT). Dans son contrôle subséquent, le Tribunal administratif limite dès lors son pouvoir d'examen à la violation des seuls faits et du droit, en appliquant la réserve figurant à l'art. 61 al. 2 LPA (ATA/200/2008 du 29 avril 2008 consid. 3 ; ATA/331/2007 du 26 juin 2007 consid. 2 ; ATA/474/2006 du 31 août 2006 consid. 5 ; ATA/352/2005 du 24 mai 2005).

b. Le tribunal de céans a, en outre, admis la compatibilité de l'art. 61 al. 2 LPA avec les règles de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110 ; ATA/354/2009 du 28 juillet 2009).

Au vu de ce qui précède, le Tribunal administratif ne peut revoir l'opportunité du plan litigieux mais doit se borner à examiner si la solution adoptée est conforme à la loi.

3. a. Selon l'art. 3 LAT, le paysage doit être préservé (al. 2). Il convient notamment de réserver à l’agriculture suffisamment de bonnes terres cultivables (al. 2 let. a) ; de veiller à ce que les constructions prises isolément ou dans leur ensemble ainsi que les installations s’intègrent dans le paysage (al. 2 let. b) ; de conserver les sites naturels et les territoires servant au délassement (al. 2 let. d). Il y a également lieu d'aménager les territoires réservés à l’habitat et à l’exercice des activités économiques selon les besoins de la population et de limiter leur étendue (al. 3) en répartissant judicieusement les lieux d’habitation et les lieux de travail, et en les dotant d’un réseau de transports suffisant (al. 3 let. a), en préservant autant que possible les lieux d’habitation des atteintes nuisibles ou incommodantes, telles que la pollution de l’air, le bruit et les trépidations (al. 3 let. b) et en ménageant dans le milieu bâti de nombreuses aires de verdure et espaces plantés d’arbres (al. 3 let. e).

L'art. 3 LAT n'est pas directement applicable. Il contient des principes, obligatoires pour les autorités, qu'il y a lieu de prendre en compte lors de l'élaboration des plans d'aménagement et de la prise de décision. Il s'agit donc d'une norme programmatique, les décisions proprement dites étant prises sur la base du droit cantonal (TSCHANNEN, Commentaire LAT, art. 1er N° 3 et art. 3 N° 9 et 10 ; ATA/441/2006 du 31 août 2006 ; ATA/618/2003 du 26 août 2003).

b. Les activités des autorités qui ont des effets sur l'organisation du territoire doivent être guidées par les buts et les principes qui régissent l'aménagement du territoire. Les principes énoncent un ensemble de valeurs ou de critères qui doivent guider les autorités chargées de l'aménagement du territoire dans les décisions à prendre, vu qu'elles disposent dans ce domaine d'une marge d'appréciation relativement grande (P. ZEN RUFFINEN, C. GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, construction, expropriation, Berne 2001, p. 50ss, 50 et 53). Selon le Tribunal fédéral ces principes constituent des éléments d'appréciation et des critères de décision (ATF 115 Ia 353 consid. 3d). Ils servent exclusivement à protéger des intérêts publics (ATF 117 Ia 307 consid. 4b). Ils sont tous de même rang, car la loi n'établit pas de hiérarchie. Ils peuvent se contredire, ce qui oblige alors à apprécier les principes en cause en fonction de leur importance respective dans le cas concret. Les principes n'ont pas, en eux-mêmes, une portée absolue : ils n'affectent en rien la répartition des compétences ou la législation et ne peuvent pas abroger les plans d'affectation en vigueur (P. ZEN RUFFINEN, C. GUY-ECABERT, op. cit. p. 54 et 55 ; cf. également FF 1978 I 1007 ad art. 3 p. 1017).

4. L'art. 3 al. 1 de l'ordonnance sur l’aménagement du territoire du 28 juin 2000 (OAT - RS 700.1) impose à l'autorité qui, dans l'accomplissement et la coordination de tâches ayant des effets sur l'organisation du territoire dispose d'un pouvoir d'appréciation, de procéder à une pesée des intérêts en présence. Elle doit déterminer les intérêts concernés (let. a). Il s'agit d'abord des intérêts poursuivis par la LAT elle-même, mais aussi des autres intérêts protégés dans les lois spéciales ; les intérêts privés sont également pris en compte (Arrêt du Tribunal fédéral 1A.55/2002 du 25 novembre 2002, consid. 3.1). L'autorité apprécie ces intérêts notamment en fonction du développement spatial souhaité et des implications qui en résultent (art. 3 al. 1 let. b OAT) et fonde sa décision sur cette appréciation, en veillant à prendre en considération, dans la mesure du possible, l'ensemble des intérêts concernés (art. 3 al. 1 let. c).

5. Conformément à l'art. 11A al. 1 LaLAT, les autorités cantonales et communales appliquent les principes et les objectifs du PDC, notamment en veillant à ce que les plans d'affectation du sol soient conformes au PDC et à son concept de l'aménagement cantonal.

6. a. En matière d'espace urbain, le concept de l'aménagement comprend plusieurs objectifs visant à répondre à la crise du logement que connaît le canton de Genève. Parmi ceux-ci figurent l'utilisation, en priorité et de manière judicieuse, des zones à bâtir existantes, tout en veillant à conserver les qualités et la diversité des secteurs urbanisés et à respecter les sites de valeur, la préférence étant donnée aux solutions qui prévoient un usage mesuré du sol ainsi que, sous certaines conditions, des déclassements limités de la zone agricole, en continuité de la zone à bâtir, pour répondre à des besoins d'intérêt général qui ne pourraient pas être satisfaits à l'intérieur de celle-ci (Plan directeur cantonal, Concept de l'aménagement cantonal, objectifs 2.2 et 2.3, p. 27).

b. Le schéma directeur traite des extensions urbaines dans la zone agricole. Un inventaire a recensé les sites potentiels situés en zone agricole, mais contigus à la zone à bâtir, et répondant à des bonnes conditions d'aménagement, d'équipement et de desserte par les transports publics, par conséquent susceptibles d'être déclassés en cas de besoin pour l'urbanisation (fiche 2.04).

c. Le territoire situé sur le plateau de Vessy en dehors de la zone de protection instaurée par la LPRArve est considéré comme site dévolu à une extension urbaine dans le schéma directeur cantonal (fiche 2.04).

Il découle de ce qui précède, qu'en principe, la modification de zones, en tant qu'elle crée une zone de développement 3, est conforme au PDC.

La modification de zones n'est d'ailleurs pas critiquée en elle même mais uniquement en tant qu'elle entraîne une diminution du périmètre de protection des rives de l'Arve en étendant la zone de développement 3 au delà des limites du périmètre fixé par la LPRArve et figurant dans le PDC.

7. Selon l'art. 21 LAT, les plans d'affectation ont force obligatoire pour chacun (al. 1er). Ils font l'objet des adaptations nécessaires lorsque les circonstances se sont sensiblement modifiées (al. 2). Ce second alinéa a d'ailleurs été repris au niveau cantonal par l'art. 13A al. 1er LaLAT qui dispose que lorsque les circonstances se sont sensiblement modifiées, les plans d'affectation sont réexaminés et, si nécessaire, adaptés. Ces dispositions tendent à assurer à la planification une certaine stabilité, sans laquelle les plans d'aménagement ne peuvent remplir leurs fonctions (ATF 127 I 103 consid. 6b p. 105 ; 124 II 391 consid. 4b p. 396 ; 123 I 175 consid. 3a p. 182 et les arrêts cités). La stabilité des plans est un aspect du principe, plus général, de la sécurité du droit, qui doit permettre aux propriétaires fonciers, comme aux autorités chargées de mettre en œuvre la planification, de compter sur la pérennité des plans d'affectation
(ATF 120 Ia 227 consid. 2b p. 232). De manière générale, on considère que plus un plan est récent, plus on doit pouvoir compter sur sa stabilité, ce qui implique que les motifs justifiant une révision doivent être d'autant plus importants (H. Aemisegger/A. Kuttler/P. Moor/A. Ruch, Commentaire de la Loi fédérale sur l'aménagement du territoire, Zurich 1999, ad art. 21 p. 14). Les plans doivent être révisés lorsque les circonstances déterminantes se sont modifiées depuis leur adoption. Les circonstances à prendre en considération peuvent être de fait ou de droit (ATF 127 I 103 consid. 6b p. 105). De façon générale, il y a lieu de reconnaître que les circonstances se sont sensiblement modifiées lorsque l'on pouvait raisonnablement estimer que la collectivité aurait pris des décisions différentes si elle avait été confrontée à ces circonstances au moment où elle s'est déterminée (H. Aemisegger/A. Kuttler/P. Moor/A. Ruch, op. cit., ad art. 21, p. 14).

Dans la pesée globale des intérêts qui doit être faite par l'autorité, le Tribunal fédéral et la doctrine retiennent également comme critère l'étendue spatiale de la modification du plan. Les rectifications mineures de la zone à bâtir peuvent être autorisées indépendamment de la durée de validité du plan pour autant qu'un réexamen d'ensemble de la planification ne soit pas nécessaire (; ATF 124 II 396 consid. 4b, JdT 1999 I 603 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1A.193/2001 du 6 mai 2002 consid. 3.3 ; ZBl 1997 p. 333 consid. 4d/aa et bb ; B. WALDMANN, B. HÄNNI, Raumplanungsgesetz, Berne 2006, p. 513 ; P. ZEN-RUFFINEN, C. GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, construction, expropriation, Berne 2001, p. 185).

8. En l'espèce, plusieurs intérêts doivent être pris en compte dans l'examen de la modification litigieuse, dont celui lié à la protection des rives de l'Arve et au maintien du réseau d'espaces verts.

a. Aux termes de l'art. 17 al. 1 LAT, les zones à protéger comprennent les cours d'eau, les lacs et leurs rives. Ces objets forment des secteurs particulièrement sensibles. A cet égard, le Tribunal fédéral a rappelé que "la définition des objets protégés à l'art. 17 al. 1 LAT laisse à l'autorité compétente une latitude d'appréciation considérable" (Arrêt du Tribunal fédéral 1A.211/2003 du 29 mars 2004). Pour définir le but et l'étendue de la protection et fixer les mesures d'aménagement adéquates, il faut tenir compte de la situation concrète au moment déterminant.

La LPRArve fixe un périmètre de protection qui dans certaines zones, dont celle du plateau de Vessy, excède les zones déjà protégées par d'autres lois, tels les zones de bois et forêts qui bordent la rivière et les rives inconstructibles en vertu de la loi sur les eaux du 5 juillet 1961 (RS L 2 05 - LEaux-GE).

b. Le schéma directeur, fiche 3.05, indique que les espaces verts sont des éléments essentiels pour la qualité de l'espace urbain. Ils sont constitués de grandes pénétrantes de verdure et d'un maillage vert plus fin s'insérant dans le tissu urbanisé. Les premières, accompagnant les cours d'eau ou/et constitués de chapelets de parcs et d'espaces agricoles, grands espaces multifonctionnels s'insérant dans l'espace urbain à partir de la campagne. Le PDC prévoit de les maintenir et de les mettre en valeur, en coordination avec les actions de renaturation de rivières, en pérennisant et en renforçant les fonctions agricoles et naturelles des pénétrantes dont c'est la vocation principale. Le plan annexé à la fiche 3.12, intitulé mesures de compensation, prévoit la mise en valeur et l'aménagement des pénétrantes de verdure dont notamment le plateau de Vessy en dehors du périmètre fixé pour l'extension urbaine.

Au vu de ce qui précède, il apparaît que l'atteinte portée à la pénétrante de verdure n'est pas négligeable. Comme l'a relevé le préavis du DNP, la diminution du périmètre de protection constitue un affaiblissement de la protection des rives. Au vu de sa surface, la modification litigieuse ne peut être qualifiée de peu d'importance et aucun changement de circonstance, lié à la zone de protection elle-même, n'a été constaté. De ce fait, contrairement à l'espèce jugée par le tribunal de céans concernant une autre portion du périmètre de protection de l'Arve, il n'est pas possible de considérer in casu que les circonstances ayant mené à la création de la zone protégée se sont sensiblement modifiées (ATA/580/2007 du 27 novembre 2007).

9. Parmi les intérêts publics invoqués dans l'appréciation globale faite par l'autorité quant à la nécessité de modifier les contours de la zone de protection, figure le besoin en logements pour les résidents en EMS.

En décembre 2000, le moratoire suspendant la construction de nouveaux EMS a été levé par le Conseil d'Etat et un programme de construction et de mise en exploitation de 1130 nouveaux lits a été adopté en avril 2001. En juillet 2001, des directives pour la rénovation des EMS et la suppression progressive des chambres à lits multiples ainsi que la mise aux normes d'EMS existants ont été approuvées par le Conseil d'Etat (Exposé des motifs PL 9610). En octobre 2001, un plan directeur EMS 2010 a été élaboré par l'administration.

En conséquence, un intérêt public à l'augmentation du nombre de lits en EMS et à la mise aux normes des anciennes structures existe.

Néanmoins, en l'espèce, les circonstances avancées par l'autorité intimée et l'EMS sont surtout liées au projet concret de construction sur la parcelle. Du fait de la construction d'immeubles au sud de celle-ci et de la volonté d'aménager un quartier comportant une place centrale permettant de relier les habitations à l'EMS, la place nécessaire à l'extension de l'EMS et sa mise aux normes actuelles nécessitent, selon l'étude préliminaire "Quartier de Vessy - étude de vérification", de déplacer de 30 mètres la zone constructible au nord. Les détails techniques de ces motifs, liés à des contraintes architecturales, ne sont pas exposés dans l'étude. Celle-ci fait figurer ce déplacement sur les plans des recommandations et, dans ses conclusions, indique que la limite de protection des rives de l'Arve doit être négociée en fonction de l'emprise requise pour la rénovation et l'agrandissement de l'EMS.

Il apparaît dès lors que la diminution de la zone de protection de près de 4'800 m2 est justifiée par des motifs de convenances, liés à un projet de construction précis, plutôt que par l'agrandissement de l'EMS lui-même. L'intérêt public à l'augmentation de l'offre de lits ne fonde pas directement la modification litigieuse. Rien, dans les faits établis, ne démontre que l'agrandissement de la structure nécessite impérativement des surfaces supplémentaires à celles déclassées par ailleurs par la loi. Sans tenir compte de la surface litigieuse (env. 4'800 m2), ni de celle utilisée pour la réalisation du PLQ (env. 22'000 m2), une surface de 28'200 m2, sur laquelle est construit l'EMS, subsiste. Cette surface devrait permettre d'atteindre le but d'intérêt public lié à l'agrandissement et à la mise aux normes, sans qu'il ne soit porté atteinte à la zone de protection des rives de l'Arve.

A cela s'ajoute également que la procédure suivie, s'agissant de l'extension de la surface de la zone à bâtir, relève du fait accompli. Elle est contraire aux principes d'une planification directrice qui implique un ordre séquentiel de décisions allant du plan directeur, qui lie les autorités, à une deuxième concrétisation représentée par les plans d'affectations, suivis par les autorisations de construire (P. MOOR, Commentaire LAT, art. 14 p. 24-25).

10. Au vu de ce qui précède, force est de constater que le Grand Conseil a mésusé in casu de son pouvoir d'appréciation en effectuant la pesée des intérêts en présence s'agissant de modifier les limites de la zone de protection. Le recours sera admis et la loi modifiant les limites de zones sera annulée en tant qu'elle modifie les limites de protection des rives de l'Arve et fixe la limite de la zone de développement 3 au-delà de la limite actuelle de protection.

11. Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la Maison de Vessy et un émolument de CHF 1'000.- à la charge du Grand Conseil, qui succombent. Une indemnité de CHF 1'500.- sera allouée à Pro Natura, à la charge des intimés, conjointement et solidairement (art. 87 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 juillet 2008 par Pro Natura Genève contre la loi n° 10174 adoptée par le Grand Conseil le 25 avril 2008 ;

au fond :

l'admet ;

annule la loi n° 10174 adoptée par le Grand Conseil le 25 avril 2008 en tant qu'elle modifie les limites de protection des rives de l'Arve et fixe la zone de développement 3 au delà de la limite de protection actuelle ;

met à la charge du Grand Conseil un émolument de CHF 1'000.- ;

met à la charge de la Maison de Vessy un émolument de CHF 1'000.- ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à Pro Natura Genève, à charge de la Maison de Vessy et du Grand Conseil, pris conjointement et solidairement ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.

communique le présent arrêt à Me Alain Maunoir, avocat de Pro Natura Genève, au Grand Conseil ainsi qu’à Me François Bellanger, avocat de la Maison de Vessy, appelée en cause.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy et Hurni, M. Dumartheray, juges, M. Bonard, juge suppléant.

 

 

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. a. i. :

 

 

F. Rossi

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :