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A/1303/2021

ATA/273/2022 du 15.03.2022 sur JTAPI/1143/2021 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1303/2021-PE ATA/273/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 15 mars 2022

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 15 novembre 2021 (JTAPI/1143/2021)


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1983, est ressortissant du Kosovo.

2) Le 28 février 2019, il a déposé une demande de régularisation de ses conditions de séjour auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), dans le cadre de l'« opération Papyrus ».

Il était arrivé en Suisse en 2016, dans le but de changer de vie et se tenait à disposition pour démontrer sa motivation à régulariser sa situation. Il a joint le formulaire M signé par son employeur, une attestation de l'Hospice général, datée du 5 février 2019, selon laquelle il n'était pas aidé financièrement par cet organisme, un extrait vierge du registre des poursuites du canton de Genève du 5 février 2019 et de son casier judiciaire du 7 février 2019, un contrat de travail avec l'entreprise B______ SA et des fiches de salaire et documents AVS.

3) Entre le 1er juin 2019 et 5 juin 2020, divers échanges et envoi de documents ont eu lieu entre les mandataires successifs du requérant et l'OCPM, visant notamment à consulter le dossier et à obtenir des visas de retour.

4) Le 5 juin 2020, le requérant a notamment transmis à l'OCPM des fiches de salaire émises par C______ SA, dont il ressort un salaire mensuel de CHF 2'746.- et des fiches de salaire de janvier à décembre 2019 émises par D______ SA, mentionnant un salaire mensuel moyen de CHF 4'590.-, diverses pièces déjà jointes à son dossier ainsi qu'un extrait du registre des poursuites actualisé, daté du 31 janvier 2020, un nouvel extrait de son casier judiciaire du 29 janvier 2020 et une attestation de l'hospice du 31 janvier 2020, dont les contenus étaient identiques aux documents fournis en 2019.

5) Le 18 septembre 2020, l'OCPM a communiqué au Ministère public du canton de Genève le dossier du requérant selon l'art. 33 de la loi d’application du code pénal suisse et d’autres lois fédérales en matière pénale du 27 août 2009 (LaCP - E 4 10).

Les certificats et décomptes émis par C______ SA apparaissaient dans de nombreux « dossiers Papyrus » et des charges sociales avaient été prélevées sans figurer sur l'extrait du compte individuel, ce qui avait éveillé ses soupçons.

6) Le 18 novembre 2020, l'OCPM a informé M. A______ par courrier A+ de son intention de refuser de soumettre son dossier avec un préavis positif au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) et de prononcer son renvoi de Suisse.

Il ne remplissait pas les conditions restrictives du cas de rigueur. Un délai lui était imparti pour faire valoir son droit d'être entendu.

7) Le 3 décembre 2020, l'OCPM lui a une nouvelle fois fait part de son intention de refuser sa demande d'autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse, le courrier précédent lui étant revenu, le destinataire étant introuvable à l'adresse indiquée. Un nouveau délai lui était imparti pour faire valoir son droit d'être entendu.

8) Malgré les deux prolongations de délai accordées par l'OCPM, le requérant n'a pas fait usage de son droit d'être entendu.

9) Par décision du 24 février 2021, l'OCPM a refusé de délivrer l'autorisation sollicitée et prononcé le renvoi de l’intéressé, un délai au 24 avril 2021 lui étant imparti à cet égard.

L’administré n'était arrivé en Suisse qu'en 2017. Il ne remplissait pas les critères relatifs à un cas d'extrême gravité, car il n'avait démontré ni sa maîtrise de niveau A2 du français, ni une intégration socioculturelle remarquable ni qu'une réintégration dans son pays aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle. Enfin, son épouse résidait au Kosovo.

10) Dans un courrier non signé du 12 avril 2021, M. A______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), contre cette décision, concluant principalement à son annulation et au renvoi de la cause à l'OCPM.

Il était arrivé en Suisse en 2013 et, comme ses compatriotes, avait bénéficié de contacts pour se loger et travailler, en qualité de remplaçant itinérant. Il était dépendant de ses employeurs et avait appris que ses charges sociales et impôts n'étaient pas reversés et qu'il n'était pas assuré contre les accidents. Il avait tenté de faire valoir ses droits en 2018, en vain.

Il remplissait les critères relatifs à un cas d'extrême gravité, au regard de sa situation financière, de l'absence de poursuite, d'un logement adéquat et son dossier devait être transmis au SEM muni d'un préavis favorable, indépendamment des preuves démontrant la longue durée de son séjour.

S'il avait souhaité régulariser ses conditions, c'était afin que « les années passées loin de ses enfants [ne servent pas] à rien ». Il sollicitait de ne pas comparer sa situation « individualisée mais la situation des Kosovars, au regard de la moyenne des autres étrangers ». Il souhaitait aussi « profiter de la présente tribune pour dénoncer un système mis en place, séparant des milliers d'enfants de leur père ».

11) Le TAPI a fixé à M. A______ un délai pour compléter son recours et transmettre un exemplaire dûment signé de ce dernier.

12) Dans le délai imparti, l’intéressé a transmis un exemplaire signé de son recours, sans le compléter.

13) L'OCPM a conclu au rejet du recours.

Les conditions restrictives du cas de rigueur n'étaient pas réalisées, et la durée du séjour du recourant devait être relativisée au regard des trente ans passés dans son pays d'origine et des liens familiaux étroits qu'il y avait conservé.

14) Le 5 juillet 2021, l'OCPM a délivré au recourant une autorisation de travail révocable en tout temps, et valable uniquement sur le canton de Genève. Il était autorisé à travailler pour D______ SA, jusqu'à droit connu sur sa demande d'autorisation de séjour.

15) Le 6 juillet 2021, M. A______ a indiqué que sa sœur et les membres de sa famille résidaient en Suisse, ses neveux et nièces en ayant d'ailleurs la nationalité.

Il a joint une attestation signée de ces derniers, lesquels déclaraient que leur frère et oncle était un travailleur consciencieux et qu'il avait pris la difficile décision de laisser ses enfants et son épouse au Kosovo, afin d'assurer leur subsistance, en raison de la pénurie d'emplois dans ce pays. Son renvoi aurait des conséquences graves, car il serait sans travail ni logement à son retour.

16) Il ressort du dossier que M. A______ a sollicité la délivrance de visas de retour les 21 juin, 9 juillet, 3 et 20 décembre 2019 et 15 juillet 2021, lesquels ont tous été refusés par l'OCPM.

En revanche, des visas de retour lui ont été accordés le 2 août 2019, pour un séjour d'un mois et le 6 avril 2021, pour un séjour du 6 au 23 avril 2021.

17) Par jugement du 15 novembre 2021, le TAPI a rejeté le recours, au motif que les conditions permettant d’admettre un cas de rigueur n’étaient pas remplies.

18) Par acte expédié le 3 janvier 2022 à la chambre administrative de la Cour de justice, M. A______ a recouru contre ce jugement, dont il a demandé l’annulation. Il a conclu au renvoi de la cause à l’OCPM pour nouvelle décision. Préalablement, il a conclu à pouvoir compléter son recours.

La Suisse s’assurait une main-d’œuvre bon marché et de qualité, renouvelable à l’infini et les ressortissants kosovars pouvaient ainsi échapper à une jeunesse désoeuvrée. Cette « machine bien huilée, dont le renouvellement constant était assuré par les renvois et les interdictions d’entrée, entraînait des laissés-pour-compte, qui étaient stigmatisés par l’échec et séparés en vain de leurs enfants pendant plusieurs années ». C’était dans « l’illusion savamment entretenue » d’assurer un meilleur avenir à ceux-ci que leur père les quittait pour la Suisse.

Il était arrivé en 2013, bercé par la rumeur persistante d’avoir des chances de pouvoir s’établir en Suisse et de faire venir son épouse et ses enfants au bout de quelques années. Il fallait, pour cela, être financièrement indépendant, ne pas commettre d’infraction, disposer d’un logement adéquat. En ce qui concernait la durée du séjour, les autorités faisaient preuve de souplesse lorsque les étrangers travaillaient dans la construction. Il avait tout de suite trouvé un emploi, dont la rémunération était sans commune mesure avec celle versée au Kosovo. La déconvenue s’était ensuite installée, lorsqu’il avait appris, au fur et à mesure, qu’il n’était pas aussi bien payé qu’il le devait, que la plupart de ses compatriotes étaient refoulés, que les impôts et charges sociales retenus sur les salaires n’étaient pas reversés et qu’il payait trop cher son logement. Il avait cherché à faire valoir ses droits de salarié et avait fini par trouver un employeur qui par humanité, était disposé à le « faire sortir de l’ombre » et avait entrepris une demande de régularisation. C’était en respectant ces formes qu’il avait appris que son temps en Suisse était désormais compté. Ne désirant pas baisser les bras, il avait déposé son dossier auprès de l’OCPM.

Il reprochait à celui-ci de l’avoir conforté dans l’idée que son séjour et son travail étaient autorisés s’il se comportait bien et ne contractait pas de dettes. Le TAPI avait omis de traiter son grief de violation du principe de la protection de la bonne foi. Le laxisme des autorités genevoises était « profitable aux deux États ». L’OCAS, les caisses de prévoyance et le fisc ponctionnaient le fruit de son travail et les contrôleurs de chantier n’exigeaient qu’une attestation de résidence. La caisse maladie n’hésitait pas à contracter avec les étrangers en situation irrégulière. Enfin, l’OCPM avait mis deux ans à statuer et lui avait délivré une autorisation de travail provisoire et émis plusieurs visas de retour. Il ne pouvait imaginer que son séjour et son activité professionnelle étaient interdits.

19) L’OCPM a conclu au rejet du recours.

Il n’avait jamais donné d’assurance à l’intéressé que celui-ci obtiendrait un titre de séjour ; le recourant ne l’alléguait d'ailleurs pas. En tant que le recourant invoquait la situation de ses enfants, l’OCPM relevait que la CDE n’imposait pas aux parties contractantes l’obligation d’assurer aux enfants ne vivant pas sur leur territoire les moyens de subsistance nécessaires en imposant aux États l’obligation d’accorder aux parents un titre de séjour.

20) Invité à répliquer, le recourant ne s’est pas manifesté dans le délai imparti.

21) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

 

 

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Le recourant a demandé à pouvoir compléter son recours. Il n’a toutefois aucunement motivé cette demande, d’une part. D’autre part, il ne s’est pas manifesté dans le délai imparti pour répliquer. Dans ces circonstances, il ne lui sera pas imparti de délai complémentaire pour former des observations supplémentaires.

2) Est litigieuse la question de savoir si l’OCPM a, à juste titre, refusé de transmettre le dossier du recourant avec un préavis favorable au SEM et prononcé son renvoi de Suisse.

a. Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l'espèce, après le 1er janvier 2019 sont régies par le nouveau droit.

b. L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

L'art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant sur la base des critères d’intégration de l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021, ch. 5.6).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2).

c. La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

La question est de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (ATA/353/2019 précité consid. 5d ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

d. L'« opération Papyrus » développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir, selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » disponible sous https://www.ge.ch/regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter), avoir un emploi ; être indépendant financièrement ; ne pas avoir de dettes ; avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; faire preuve d'une intégration réussie ; absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

Dans le cadre du projet pilote Papyrus, le SEM a procédé à une concrétisation des critères légaux en vigueur pour l'examen des cas individuels d'extrême gravité dans le strict respect des dispositions légales et de ses directives internes. Il ne s'agit pas d'un nouveau droit de séjour en Suisse ni d'une nouvelle pratique. Une personne sans droit de séjour ne se voit pas délivrer une autorisation de séjour pour cas de rigueur parce qu'elle séjourne et travaille illégalement en Suisse, mais bien parce que sa situation est constitutive d'un cas de rigueur en raison notamment de la durée importante de son séjour en Suisse, de son intégration professionnelle ou encore de l'âge de scolarisation des enfants (ATA/1000/2019 du 11 juin 2019 consid. 5b et les arrêts cités).

Ainsi, l'« opération Papyrus » étant un processus administratif simplifié de normalisation des étrangers en situation irrégulière à Genève, il n'emporte en particulier aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/1195/2021 du 9 novembre 2021 consid. 3d ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 8a ; ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c). L'« opération Papyrus » a pris fin le 31 décembre 2018.

3) C'est à juste titre que le recourant ne se prévaut plus dans son recours de l'« opération Papyrus » à laquelle il n'est pas éligible pour la double raison qu'il a déposé sa demande d'autorisation de séjour près d'une année après l'échéance pour le faire et qu'il ne réalisait, le 28 février 2019, pas la condition d'un séjour en Suisse de dix ans au minimum, étant arrivé en Suisse en 2016.

Son intégration professionnelle ne saurait être qualifiée d’exceptionnelle au sens de la jurisprudence. Ses connaissances professionnelles acquises, notamment dans le domaine de la construction, n'apparaissent pas spécifiques à la Suisse ; le recourant ne fournit en tout cas aucune pièce ou explication, qui permettrait de retenir que tel serait le cas. Il sera donc en mesure d'utiliser ces connaissances au Kosovo.

S’agissant de son intégration sociale, il convient, certes, de relever que le recourant ne fait pas l’objet de poursuites, n’a pas recouru à l’aide sociale, est financièrement indépendant et n’a pas fait l’objet de condamnations. Le recourant n'établit cependant pas qu'il aurait tissé des liens amicaux et affectifs à Genève d'une intensité telle qu'il ne pourrait être exigé de sa part de poursuivre ses contacts par les moyens de télécommunication modernes. Il n'allègue pas non plus qu'il se serait investi dans la vie sociale, associative ou culturelle à Genève. À défaut d'éléments concrets indiquant une forte intégration sociale en Suisse, celle-ci ne peut être retenue.

Arrivé en Suisse à l’âge de 33 ans, il a passé au Kosovo toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d'adulte, soit les périodes déterminantes pour le développement de la personnalité. Il connaît les us et coutumes de son pays et en maîtrise la langue. Les demandes de visa de retour au Kosovo ont été motivées par des raisons familiales, étant relevé que son épouse et ses enfants y vivent. Il conserve ainsi d’importantes attaches affectives au Kosovo. Enfin, il est âgé de presque 39 ans et en bonne santé. Dans ces circonstances, il n'apparaît pas que sa réintégration soit fortement compromise.

Au contraire, son expérience professionnelle acquise en Suisse, son relatif jeune âge et son bon état de santé constituent autant d'éléments qui lui permettront de se réintégrer dans son pays. Après plusieurs années d’absence de la vie professionnelle de son pays, il traversera une nécessaire phase d’adaptation. La présence de membres de sa famille, singulièrement celle de son épouse, constitue toutefois un soutien important dans sa réintégration tant sociale que professionnelle. Le recourant ne fait d’ailleurs pas valoir de circonstances particulières qui permettraient de retenir que sa réintégration serait fortement compromise. En outre, comme déjà évoqué, il a passé la plus grande partie de sa vie au Kosovo.

Au vu de ce qui précède, le recourant ne se trouve pas dans une situation de raison personnelle majeure au sens de la loi. L'OCPM n'a donc pas violé la loi ni consacré un excès ou un abus de son pouvoir d'appréciation en refusant de préaviser favorablement une autorisation de séjour en faveur du recourant auprès du SEM.

4) Le recourant se plaint de violations du principe de la bonne foi par les autorités et prétend en faire découler le droit à une autorisation de séjour.

a. Selon l’art. 5 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), les organes de l’État et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. Selon l’art. 9 Cst., toute personne a le droit d’être traitée par les organes de l’État sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi. Le principe de la bonne foi comprend notamment l’interdiction des comportements contradictoires (ATF 143 IV 117 consid. 3.2 ; 136 I 254 consid. 5.2). L’interdiction des comportements contradictoires ne concerne que la même autorité, agissant à l’égard des mêmes justiciables, dans la même affaire ou à l’occasion d’affaires identiques (ATF 111 V 81 consid. 6).

b. En l'espèce, le recourant ne soutient à juste titre pas avoir reçu à un quelconque moment des autorités de migration suisses, depuis son arrivée en 2016, de quelconque assurance formelle qu'il recevrait une autorisation de séjour (voir à cet égard l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_326/2019 du 3 février 2020 consid. 2.3.1).

Le 18 novembre 2020, l'OCPM lui a fait part de son intention de prononcer son renvoi, courrier qui n'a pu toutefois lui être délivré faute pour le recourant de vivre à l'adresse qu'il lui connaissait. Le 3 décembre 2020, l'OCPM lui a, une nouvelle fois, fait part de son intention de refuser la demande d’autorisation de séjour. Le 24 février 2021, l’OCPM a rendu la décision querellée. L’autorisation temporaire de travail n’a été délivrée par l’OCPM qu’à la suite du recours formé contre la décision précitée et précisait qu’elle était révocable en tout temps et valable jusqu’à droit connu sur sa demande. Le recourant reconnaît lui-même qu’il avait pris conscience de son statut illégal au fur et à mesure de son séjour en Suisse. Depuis le 18 novembre 2020, il savait que l’OCPM n’entendait pas faire droit à se demande. Le fait – qui ne semble selon le recourant lui-même d’ailleurs pas établi – que le fisc et les assurances sociales aient encaissé des versements prélevés par ses employeurs sur son salaire ne permet pas d’en inférer une assurance que le permis convoité serait accordé. En effet, ces organismes ne sont pas habilités à se prononcer sur l’octroi d’une autorisation de son séjour, compétence qui est du ressort de l’OCPM, respectivement du SEM. L’OCPM a d’ailleurs refusé par cinq fois la délivrance de visas de retour et n’en a octroyé que deux. En outre, les attestations de résidence figurant au dossier mentionnent toutes que le recourant était dans l’attente d’une décision sur l’octroi d’une autorisation de séjour ou qu’il faisait l’objet d’une décision de refus. Enfin, les rumeurs au sein de la communauté kosovare sur les possibilités de demeurer en Suisse dont fait état le recourant ne reposent pas sur des assurances qui auraient été données par des autorités compétentes en la matière, ce que le recourant ne fait d’ailleurs pas valoir.

Dans ces circonstances, le recourant ne saurait se prévaloir d'une violation du principe de la bonne foi et ce grief sera écarté.

5) Le recourant invoque l'art. 2 al. 2 CDE pour fonder son droit à un titre de séjour.

a. Selon l'art. 2 al. 1 CDE, les États parties s’engagent à respecter les droits qui sont énoncés dans cette Convention et à les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction aucune, indépendamment de toute considération de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou autre de l’enfant ou de ses parents ou représentants légaux, de leur origine nationale, ethnique ou sociale, de leur situation de fortune, de leur incapacité, de leur naissance ou de toute autre situation.

Les États parties prennent toutes les mesures appropriées pour que l’enfant soit effectivement protégé contre toutes formes de discrimination ou de sanction motivées par la situation juridique, les activités, les opinions déclarées ou les convictions de ses parents, de ses représentants légaux ou des membres de sa famille (art. 2 al. 2 CDE).

Selon l’art. 3 CDE, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs (al. 1). Par ailleurs, les États parties s'engagent à assurer à l'enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées (al. 2).

L'art. 27 al. 1 CDE précise encore que les États parties reconnaissent le droit de tout enfant à un niveau de vie suffisant pour permettre son développement physique, mental, spirituel, moral et social.

b. Les dispositions de la CDE ne posent que des principes dont les autorités législatives, exécutives et judiciaires des États parties doivent s'inspirer. Ces dispositions ne font d'ailleurs pas de l'intérêt de l'enfant un critère exclusif, mais un élément d'appréciation dont l'autorité doit tenir compte lorsqu'il s'agit de mettre en balance les différents intérêts en présence (ATF 139 I 315 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_927/2011 du 9 janvier 2013 consid. 5.2).

c. En l'espèce, les enfants du recourant vivent au Kosovo avec leur mère et n'ont jamais résidé en Suisse. La CDE n'impose nullement que les autorités d'un État cocontractant assurent à des enfants ne vivant pas sur son territoire les moyens de subsistance nécessaires et réguliers en imposant au pays de résidence de leur père et/ou de leur mère la délivrance d'un titre de séjour pour assurer cet entretien à distance, sous une forme financière. Le parent qui prend la décision de s'éloigner de ses enfants durant des années pour leur assurer une vie meilleure, comme le recourant reconnaît l’avoir fait, ne peut pas pour autant se voir assurer un titre de séjour pour que cette situation perdure, pas plus qu'il ne peut se prévaloir de possibles souffrances psychologique d'un enfant dû à cet éloignement d'avec l'un et/ou l'autre de ses parents.

Ce grief est également infondé.

6) a. Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation (ATA/1798/2019 du 10 décembre 2019 consid. 6 et les arrêts cités). Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

b. En l'espèce, dès lors qu'il a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour au recourant, l'intimé devait prononcer son renvoi. Pour le surplus, aucun motif ne permet de retenir que son renvoi ne serait pas possible, licite ou ne pourrait raisonnablement être exigé ; celui-ci ne le fait d'ailleurs pas valoir.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

7) Vu l'issue du recours, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant et aucune indemnité ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 janvier 2022 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 15 novembre 2021 ;

 

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'Etat aux migrations.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.