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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3991/2016

ATA/1593/2017 du 12.12.2017 sur JTAPI/1230/2016 ( LCR ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3991/2016-LCR ATA/1593/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 12 décembre 2017

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

SERVICE CANTONAL DES VÉHICULES

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 novembre 2016 (JTAPI/1230/2016)

 


EN FAIT

1) Par jugement du 24 novembre 2016, notifié le 5 décembre 2016 à Monsieur A______, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), sans instruction préalable en application de l’art. 72 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985
(LPA - E 5 10), a déclaré irrecevable, pour tardiveté, le recours que celui-ci avait interjeté le 21 novembre 2016 contre la décision du service cantonal des véhicules (ci-après : SCV) du 17 octobre 2016, qui lui imposait de se soumettre à une expertise médicale auprès de l’unité de médecine et psychologie du trafic du Centre universitaire romand de médecine légale.

La décision contestée avait été correctement acheminée à l’adresse de l’intéressé, par courrier A+ du 17 octobre 2016 et notifiée à son destinataire le 18 octobre 2016, de sorte que le délai pour recourir de trente jours était arrivé à échéance le 17 novembre 2016. Partant, le recours, interjeté le 22 (recte : 21) novembre 2016, l’avait été après le dernier jour utile.

Pour le surplus, M. A______ n’avait pas prouvé, ni allégué avoir été empêché d’agir en temps utile en raison d’un cas de force majeure (art. 16 al. 1 LPA), alors qu’il lui incombait de fournir toutes explications utiles à ce sujet.

Un émolument de CHF 350.- a été mis à sa charge.

2) Par acte expédié le 31 décembre 2016 au greffe de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), M. A______ a formé recours contre ce jugement, concluant, avec suite de « frais et dépens », à l’ouverture d’une enquête afin de constater qu’il avait agi conformément à ses obligations légales, au fond, principalement, à l’annulation de la décision attaquée, subsidiairement, également à cette annulation ainsi qu’au renvoi de la décision à l’autorité inférieure afin qu’elle statue à nouveau.

3) Par courrier du 6 janvier 2017, le TAPI a transmis son dossier à la chambre administrative sans formuler d’observations.

4) Par pli du 1er février 2017, le SCV a transmis son dossier administratif à la chambre administrative et précisé ne pas avoir d’observations particulières à formuler.

5) Par écrit du 7 mars 2017, M. A______ a indiqué ne pas avoir d’observations particulières à ajouter.

6) Par lettre du 10 mars 2017, la chambre administrative a informé les parties que la cause était gardée à juger.

7) Pour le reste, les griefs du recourant et certains faits seront repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit ci-après.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours contre le jugement du TAPI est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2) a. Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d’être prolongés (art. 16 al. 1 1ère phr. LPA), restitués ou suspendus, si ce n’est par le législateur lui-même. Celui qui n’agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (SJ 2000 I 22 consid. 2 p. 24 ; ATA/105/2014 du 18 février 2014 consid. 3a ; ATA/347/2012 du 5 juin 2012 consid. 4a ; ATA/284/2012 du 8 mai 2012 consid. 4 ; ATA/50/2009 du 27 janvier 2009 consid. 2 et les références citées).

b. Les cas de force majeure sont réservés, conformément à l’art. 16 al. 1 2ème phr. LPA.

Tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d’activité de l’intéressé et qui s’imposent à lui de façon irrésistible (SJ 1999 I 119 ; RDAF 1991 p. 45 ; ATA/261/2016 du 22 mars 2016 ; ATA/536/2010 du 5 août 2010).

c. Selon l'art. 16 al. 3 LPA, la restitution pour inobservation d’un délai imparti par l’autorité peut être accordée si le requérant ou son mandataire a été empêché sans sa faute d’agir dans le délai fixé ; la demande motivée doit être présentée dans les dix jours à compter de celui où l’empêchement a cessé.

Comme cela ressort expressément du texte légal, cette disposition ne s'applique toutefois qu'aux délais fixés par l'autorité, et non aux délais légaux comme dans la présente espèce.

3) a. À teneur de l’art. 17 al. 1 LPA, les délais commencent à courir le lendemain de leur communication ou de l’événement qui les déclenche.

Dans le cadre d’une procédure de recours, l’art. 62 al. 3 1ère phr. LPA prescrit que le délai court dès le lendemain de la notification de la décision.

Le fardeau de la preuve de la notification d'un acte et de sa date incombe en principe à l'autorité qui entend en tirer une conséquence juridique (ATF 129 I 8 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_634/2015 du 26 avril 2016 consid. 2.1 ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2ème éd., 2015, p. 529).

Contrairement à ce que soutient le recourant, qui invoque l’art. 138 al. 1 du code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272), la législation genevoise applicable à la procédure administrative, plus précisément l’art. 46 al. 2 LPA, ne prescrit pas une forme particulière de notification des décisions et n’interdit ainsi nullement l’envoi d’une décision par pli simple ou par courrier A+ (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1), l’autorité qui en est l’auteur devant simplement supporter le risque de l’absence de preuve de la date de notification
(ATF 136 V 295 consid. 5.9 ; 129 I 8 consid. 2.2).

b. La prestation « Courrier A Plus » – A+ – offre la possibilité de suivre le processus d’expédition du dépôt jusqu’à la distribution. Elle comporte également l’éventuelle réexpédition à une nouvelle adresse, ainsi que le retour des envois non distribuables. Lors de l’expédition par « Courrier A Plus », l’expéditeur obtient des informations de dépôt, de tri et de distribution par voie électronique via le service en ligne « Suivi des envois ». Les envois « Courrier A Plus » sont directement distribués dans la boîte aux lettres ou dans la case postale du destinataire. En cas d’absence, le destinataire ne reçoit pas d’invitation à retirer un envoi dans sa boîte aux lettres (document de La Poste suisse sur Internet « Courrier A Plus [A+] – La transparence tout au long du processus d’expédition » ; aussi ATF 142 III 599 consid. 2.1).

c. La notification doit permettre au destinataire de prendre connaissance de la décision et, cas échéant, de faire usage des voies de droit ouvertes à son encontre. Une décision est notifiée, non pas au moment où l’administré en prend connaissance, mais le jour où elle est dûment communiquée. S’agissant d’un acte soumis à réception et adressé par pli non recommandé, telle une décision ou une communication de procédure, la notification est réputée parfaite au moment où l’envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire (arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1 et les références citées ; ATA/509/2016 du 14 juin 2016 consid. 5b), à savoir dans sa boîte aux lettres ou sa case postale. Il n’est pas nécessaire que celui-ci en prenne réellement connaissance (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1) ; il suffit qu’il puisse en prendre connaissance (arrêt du Tribunal fédéral 2C_430/2009 du 14 janvier 2010 consid. 2.2).

Ainsi, lorsqu’une décision est notifiée par courrier A+, à savoir un courrier prioritaire dont l’expéditeur peut connaître la date de la remise dans la boîte aux lettres ou la case postale grâce au service en ligne « Suivi des envois », sans que cette remise soit quittancée ou fasse l’objet d’une signature par le destinataire, le délai commence à courir dès ladite remise (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_198/2015 du 30 avril 2015 consid. 3 ; 2C_570/2011, 2C_570/2011 du 24 janvier 2012 consid. 4.2 ; 2C_430/2009 précité consid. 2 ; ATA/222/2017 du 21 février 2017 consid. 4), y compris lorsque c’est un samedi (arrêt du Tribunal fédéral 8C_198/2015 précité consid. 3).

Dans le cas de la pose dans la boîte aux lettres ou dans la case postale d’un courrier A+, comme d’un avis de retrait d’un pli recommandé, une erreur dans la notification par voie postale ne saurait être d'emblée exclue. Pareille erreur ne peut toutefois pas non plus être présumée et ne peut être retenue que si des circonstances particulières la rendent plausible. L'allégation d'un justiciable selon laquelle il est victime d'une erreur de notification par voie postale et par conséquent sa bonne foi ne peuvent être prises en considération que si la présentation qu'il fait des circonstances entourant la notification en cause est concevable et repose sur une certaine vraisemblance (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_382/2015 du 21 mai 2015 consid. 5.2 ; 2C_570/2011 du 24 janvier 2012 consid. 4.3, et les références citées). La simple affirmation du recourant selon laquelle il a toujours pris en considération les avis de retrait et qu'il leur a donné suite en temps utile ne constitue pas une circonstance qui rend plausible une erreur de notification par voie postale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_382/2015 précité consid. 5.2).

4) En l’espèce, à teneur du « Suivi des envois » en ligne, la décision du SCV du 17 octobre 2016, adressée au recourant par courrier A+, a été distribuée,
c’est-à-dire remise dans sa boîte aux lettres « familiale », le lendemain soit le mardi 18 octobre 2016.

L’intéressé ne fait pas valoir une erreur dans la notification de la décision du SCV.

Au vu des principes juridiques énoncés ci-dessus, c’est dès le 19 octobre 2016 que le délai de recours de trente jours de l’art. 62 al. 1 let. a LPA a, conformément à l’art. 17 al. 1 LPA, commencé à courir.

C’est de manière erronée que l’intéressé a indiqué, dans son recours interjeté devant le TAPI, que la décision du SCV lui avait été remise plusieurs jours après le 17 octobre 2016. La prise de connaissance de l’existence du courrier contenant cette décision est sans aucune portée.

5) En vertu de l’art. 62 al. 5 LPA, lorsqu’une personne à qui une décision devait être notifiée ne l’a pas reçue, sans sa faute, le délai de recours court du jour où cette personne a eu connaissance de la décision.

6) a. Le recourant se prévaut de cette dernière disposition légale en alléguant qu’il cohabite avec sa mère et son frère, ne relève pas son courrier lui-même et que ce dernier lui est remis par le biais de sa mère, ce qui pourrait prendre parfois plusieurs jours.

À l’appui de ces allégations, il produit une attestation signée de sa mère, à teneur de laquelle celle-ci est la seule personne à détenir la clef de la boîte aux lettres au chemin B______ à C______ – sur laquelle est seulement inscrit son nom selon photographie présentée par le recourant –, que ce dernier n’a pas une telle clef et que sa mère ne relève pas tous les jours le courrier, qu’il lui arrive de le relever une fois par semaine, voire encore moins souvent si elle est en déplacement, enfin que, même si elle a relevé le courrier, il se peut qu’elle le laisse en entier dans sa chambre et le donne à son fils quelques jours plus tard.

b. Or, celui qui, pendant une procédure, omet de prendre les dispositions nécessaires pour que les envois postaux lui soient transmis ne peut se prévaloir de son absence lors de la tentative de notification d’une communication officielle à son adresse habituelle s’il devait s’attendre, avec une certaine vraisemblance, à recevoir une telle communication (ATF 130 III 396 consid. 1.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_549/2009 du 1er mars 2010 consid. 3.2.1 et les références citées ; ATA/876/2014 du 11 novembre 2014 consid. 5).

c. Dans ces conditions, il appartenait au recourant de prendre les mesures nécessaires pour qu’il puisse recevoir rapidement la décision du SCV, à la réception de laquelle il devait s’attendre puisque l’intimé lui avait donné le 27 septembre 2016 un délai de quinze jours pour se déterminer sur l’éventualité du prononcé d’une mesure administrative à son encontre et qu’il y avait répondu par lettre du 10 octobre 2017.

Il pouvait, cas échéant, par exemple, confier à sa mère la gestion des courriers de nature administrative, en particulier ceux provenant de l’intimé, qu’il recevrait.

Il est enfin relevé que l’intéressé s’est adressé, de manière constante, au SCV, au TAPI et à la chambre de céans en indiquant le domicile auquel la décision de l’intimé du 17 octobre 2016 lui a été notifiée.

L’art. 62 al. 5 LPA n’est donc d’aucun secours au recourant.

7) Ladite décision du SCV ayant été notifiée au recourant de manière en tous points conforme au droit, sa notification ne saurait être considérée comme irrégulière au sens de l’art. 47 LPA.

8) Vu ce qui précède, c’est à juste titre que le TAPI a déclaré irrecevable le recours formé devant lui le 21 novembre 2016 par l’intéressé, de sorte que le recours formé par celui-ci devant la chambre administrative sera rejeté.

9) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 350.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 31 décembre 2016 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 novembre 2016 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 350.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, au Tribunal administratif de première instance, au service cantonal des véhicules, ainsi qu’à l’office fédéral des routes.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Junod, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :