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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3040/2015

ATA/222/2017 du 21.02.2017 sur JTAPI/1398/2015 ( LCR ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3040/2015-LCR ATA/222/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 février 2017

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

 

SERVICE CANTONAL DES VÉHICULES

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 novembre 2015 (JTAPI/1398/2015)


EN FAIT

1. Par décision du 22 décembre 2014 adressée par pli A+, le service cantonal des véhicules (ci-après : SCV) a refusé l’échange du permis de conduire étranger de Monsieur B______ – dont le nom est actuellement A______ - contre un permis de conduire suisse et lui a fait interdiction de faire usage de son permis étranger sur territoire helvétique pour une durée indéterminée. Il avait échoué à la course de contrôle du 17 décembre 2014 et celle-ci ne pouvait être répétée. Cette décision n'a pas fait l’objet de recours.

2. Le 27 janvier 2015, M. A______ a demandé au SCV de l’autoriser à effectuer une nouvelle course de contrôle. Le 17 décembre 2014, il avait présenté à l’examinateur un certificat médical attestant d’une incapacité de travail du 16 au 18 décembre 2014 et lui avait demandé de reporter la course de contrôle prévue ce jour-là. L’examinateur avait refusé, de sorte qu’il avait effectué cette course en dépit de son état de santé.

3. Le 27 janvier 2015, M. A______ a présenté au SCV une autre demande tendant à l’échange de son permis de conduire étranger contre un permis suisse sans astreinte à une course de contrôle, en application de la réglementation internationale sur les réfugiés et de la législation suisse en matière de circulation routière.

4. Par pli simple du 4 février 2015, le SCV a répondu à la demande de M. A______ de pouvoir effectuer une nouvelle course de contrôle. La participation de l’intéressé à la course de contrôle du 17 décembre 2014 rendait sans objet le certificat médical produit. Il était rappelé à l’intéressé qu’il lui était loisible de recourir contre « ladite décision ». Aucun délai ni aucune voie de recours n’étaient mentionnés.

5. Selon une note interne du SCV, le 13 mai 2015, M. A______ s’est présenté au guichet du SCV. Il a sollicité une décision formelle avec indication des voies de recours statuant sur la base des pièces fournies le 27 janvier 2015 en lieu et place du courrier du 4 février 2015.

6. Par décision du 22 mai 2015, adressée à M. A______ par pli A+, distribuée le 23 mai 2015, le SCV a refusé de reconsidérer sa décision du 22 décembre 2014. L’intéressé ne faisait valoir aucun fait ou moyen de preuve nouveau et important qu’il ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente.

7. Le 2 juillet 2015, M. A______ a demandé au SCV de statuer sur ses deux requêtes du 27 janvier 2015, demeurées sans réponse.

8. Le 8 juillet 2015, le SCV a répondu qu’une décision, dont copie était jointe, avait été prononcée le 22 mai 2015.

9. Le 9 juillet 2015, M. A______ a indiqué n’avoir pas reçu la décision précitée. Il demandait la preuve de sa notification ainsi qu’une copie de la réponse à sa seconde requête du 27 janvier 2015.

10. Le 13 juillet 2015 le SCV lui a communiqué le justificatif de distribution de la décision du 22 mai 2015, avec copie du courrier du 4 février 2015.

11. Par acte du 8 septembre 2015, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre « la décision du SCV du 4 février 2015 », qu’il n’avait jamais reçue avant le 15 juillet 2015. Il a conclu principalement à l’échange de son permis de conduire étranger contre un permis de conduire suisse, et, subsidiairement, à pouvoir repasser sa course de contrôle.

En sa qualité de réfugié, il demandait à se voir appliquer le même régime que celui qui serait accordé à un ressortissant des pays de l’union européenne et à être dispensé de la course de contrôle. En tout état, il devait être autorisé à la repasser car la veille de l’examen, il avait subi une intervention chirurgicale afin d’enlever une tumeur du sourcil, ce dont il n’avait pas été tenu compte.

12. Le 1er octobre 2015, le SCV a conclu au rejet du recours, le courrier du 4 février 2015 n’étant pas une décision mais une communication lui rappelant qu’il pouvait recourir contre la décision du 22 décembre 2014, ce qu’il n’avait pas fait, pas plus qu’il n’avait recouru contre celle du 22 mai 2015.

13. Dans un second échange d’écritures, M. A______ et le SCV ont persisté dans leurs conclusions.

14. Par jugement du 30 novembre 2015, le TAPI a déclaré irrecevable le recours de M. A______.

Le courrier du 4 février 2015 devait être considéré comme une décision de refus de reconsidération de la décision du 22 décembre 2014. Toutefois, il y avait eu une seconde décision sur le même objet, celle du 22 mai 2015, devenue définitive. Cette dernière décision avait succédé à celle du 4 février 2015, qui avait cessé de déployer ses effets dès son remplacement. Le recours n’avait donc pas d’intérêt actuel. Il ressortait en outre du dossier que M. A______ avait eu connaissance de la décision du 4 février 2015 au plus tard lorsqu’il avait demandé au SCV de le remplacer par une décision formelle, de sorte que le recours était à cet égard tardif.

 

15. Par acte du 18 janvier 2016, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement susmentionné, concluant en substance à son annulation et à l’échange de son permis de conduire étranger contre un permis de conduire suisse. Il demandait en outre la condamnation du TAPI et du SCV pour retard injustifié.

La décision du 22 décembre 2014 ne lui avait pas été notifiée. Il n’en avait pris connaissance que devant la procédure devant le TAPI. Ce dernier ne pouvait donc fonder l’irrecevabilité du recours sur une décision qui ne lui avait pas été notifiée. En outre, il ne pouvait pas demander la reconsidération d’une décision dont il ignorait l’existence. Lors de la course de contrôle, l’expert lui avait dit que le résultat était insuffisant et qu’il pourrait repasser l’examen. C’est pour cela qu’il avait adressé au SCV deux courriers le 27 janvier 2015, l’un pour un traitement aussi favorable que possible soit un échange de permis sans course de contrôle, l’autre pour une course de contrôle en vue de l’échange de permis.

Les trois décisions du SCV des 22 décembre 2014, 4 février et 22 mai 2015 avaient en réalité le même objet et il n’en avait eu connaissance que le 15 juillet 2015. Elles n’avaient pas cessé de déployer leurs effets. Lorsqu’il s’était rendu au guichet du SCV au mois de mai 2015, il n’avait pas demandé de décision formelle ni de reconsidération. Il voulait seulement s’entretenir avec le chef du service et il avait été traité de manière impolie par les fonctionnaires du SCV.

Il se prévalait de violations du principe de la bonne foi, de l’interdiction de l’arbitraire, du droit d’être entendu, de la garantie de l’accès au juge, de la loi sur l’asile, de la convention de Genève relative au statut des réfugiés, de déni de justice et demandait la révision de la décision du 4 février 2015 de manière à ce que le certificat médical du 16 décembre 2014 soit pris en compte ou que son permis étranger soit échangé sans course de contrôle.

16. Le 25 janvier 2016, le TAPI a transmis son dossier, sans observations.

17. Le 15 février 2016, le SCV a persisté dans sa décision du 22 mai 2015 en se référant à ses observations devant le TAPI.

18. Le 21 mars 2016, M. A______ a exercé son droit à la réplique, persistant dans son recours.

19. Le 22 mai 2016, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

20. Il ressort des registres de l’office cantonal de la population et des migrations que M. A______ a obtenu la nationalité suisse le 29 août 2016 et a changé de nom le 2 septembre 2016.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. M. A______ ayant acquis la nationalité suisse le 29 août 2016, l’argumentation et les conclusions en relation avec le droit conventionnel en matière de réfugiés n’ont plus d’objet.

Par ailleurs, les conclusions en condamnation pour retard injustifié ne sont pas recevables, la juridiction de céans n’ayant pas compétence pour statuer à leur sujet.

3. L’objet du litige est la recevabilité du recours de M. A______ devant le TAPI.

4. Le recourant reproche au TAPI d’avoir méconnu le fait qu’il n’avait eu connaissance de la décision du SCV du 22 décembre 2014, du courrier du SCV du 4 février 2015 et de la décision du SCV du 22 mai 2015, qu’à partir du 15 juillet 2015, de sorte que son recours devant cette juridiction a été déclaré à tort irrecevable.

Si le dossier ne contient pas d’élément établissant la notification de la décision du 22 décembre 2014 communiquée par courrier A+, les courriers adressés par le recourant au SCV le 27 janvier 2015 permettent de retenir que ce dernier savait qu’il avait échoué dès le 17 décembre 2014, ce qui ressort d’ailleurs du rapport de l’expert dont il n’est pas contesté qu’une copie lui a été remise le jour même de l’examen.

Le courrier du SCV du 4 février 2015 - sur la nature juridique duquel il n’est pas nécessaire de se pencher vu ce qui suit -, expédié par pli simple, rappelait au recourant qu’un recours était possible au TAPI contre le refus d’échange de permis, sans que le libellé permette toutefois de comprendre immédiatement qu’il était fait référence à la décision du 22 décembre 2014 qui n’était pas mentionnée.

Il ressort de la note du dossier établie par le SCV le 13 mai 2015 que le recourant a eu connaissance du courrier précité au plus tard à cette dernière date, lorsqu’il s’est présenté au guichet de ce service et a sollicité une décision formelle statuant sur sa démarche du 27 janvier 2015, avec indication des voies de recours, en lieu et place du courrier du 4 février 2015. Aucun élément du dossier ne permet de retenir que le recourant qui a une formation juridique n’aurait pas formulé une telle demande, les allégations de ce recourant intervenant tardivement sur ce point, sans aucune explication, ni justification.

Le 22 mai 2015, le SCV a fait droit à cette demande et a communiqué au recourant, en courrier A+, une décision formelle, considérant la requête du 27 janvier 2015 comme une demande de reconsidération de la décision du 22 décembre 2014 et rejetant celle-ci. La décision sur reconsidération a été reçue le 23 mai 2015 à l’adresse du recourant. Ce dernier conteste à tort la validité de ce mode de notification. À cet égard, le Tribunal fédéral a eu l’occasion de préciser qu’en cas de notification par courrier A+, le délai que celle-ci fait partir commence à courir à partir du dépôt dans la boîte aux lettres du destinataire, soit, in casu, dès le 24 mai 2015 (arrêts du Tribunal fédéral 2C_570/2011 du 24 janvier 2012 ; 2C_430/2009 du 14 janvier 2010 ; ATA/1047/2016 du 13 décembre 2016 ; ATA/202/2016 du 3 mars 2016).

Le recourant ne se prévaut d’aucun cas de force majeure qui l’aurait empêché de recourir en temps utile contre la décision du 22 mai 2015 et justifierait une restitution de délai (art. 16 al. 1 LPA).

5. Au vu de ce qui précède, le TAPI pouvait retenir à bon droit que le recourant disposait au plus tard le 23 mai 2015 de tous les éléments lui permettant de recourir utilement contre le refus d’échange de permis. Dès lors il ne pouvait que considérer comme tardif, donc irrecevable, son recours du 8 septembre 2015. Dans ces circonstances, le présent recours sera rejeté.

6. Aucun émolument ne sera mis à la charge du recourant, ni aucune indemnité de procédure allouée (art. 87 al. 1 et 2 LPA).


* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette dans la mesure où il est recevable le recours interjeté le 18 janvier 2016 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 novembre 2015 ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, au service cantonal des véhicules, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'à l’office fédéral des routes.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

K. De Lucia

 

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :