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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2948/2014

ATA/114/2015 du 27.01.2015 ( EXPLOI ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : PROSTITUTION ; MAISON DE PROSTITUTION ; SANCTION ADMINISTRATIVE ; AMENDE ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; ADMINISTRATION DES PREUVES ; AUDITION OU INTERROGATOIRE ; EXCÈS ET ABUS DU POUVOIR D'APPRÉCIATION ; INTERDICTION DE L'ARBITRAIRE ; PROPORTIONNALITÉ
Normes : Cst.9 ; Cst.29.al2 ; LProst.1.leta ; LProst.12.letb ; LProst.14.al1.letd ; LProst.14.al2 ; LProst.25.al1 ; LPG.1.leta ; CP.47.al1 ; CP.47.al2
Résumé : Recours de la responsable d'un salon de massage contre une décision du département de la sécurité et de l'économie lui infligeant un avertissement et une amende. Compte tenu des circonstances du cas d'espèce, la chambre administrative a confirmé l'avertissement mais annulé l'amende. La faute commise par la responsable était légère, elle n'était pas défavorablement connue et l'avertissement constituait, en l'espèce, une sanction suffisante et adéquate.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2948/2014-EXPLOI ATA/114/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 janvier 2015

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Dimitri Tzortzis, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE LA SÉCURITÉ ET DE L'ÉCONOMIE



EN FAIT

1) La société B______ est inscrite au registre du commerce depuis le 17 avril 2012. Elle a pour but la prestation de services et de conseils dans le domaine des services personnels, notamment dans les services de bien-être, accomplissement de soi, détente, libération de l’esprit, confort et délassement, ainsi que mise à disposition d’espaces permettant d’atteindre ce but. Elle exploite le salon de massages à l’enseigne C______, sis 1______, rue D______ à Genève (ci-après : le salon).

2) Madame A______ s’est annoncée auprès de la brigade des mineurs (ci-après : BMOE) comme la responsable du salon.

3) Le 17 juin 2014 à 1h00, la BMOE a adressé un rapport au secrétaire général adjoint du département de la sécurité et de l’économie (ci-après : le département).

Le 15 juin 2014, une patrouille de la BMOE s’était rendue au salon où elle avait contrôlé plusieurs prostituées, toutes dûment annoncées auprès des services compétents. Tel n’était toutefois pas le cas de Madame E______, ressortissante française, laquelle n’avait pas été en mesure de présenter un permis de travail valable.

Absente au moment du contrôle de police, Mme A______ avait été contactée par téléphone. Elle avait expliqué que Mme E______ n’était pas censée se trouver sur place, raison pour laquelle son autorisation de travail n’était pas à jour.

4) Le 9 juillet 2014, le département a informé Mme A______ que, suite au contrôle du 15 juin 2014, il envisageait de lui infliger un avertissement ainsi qu’une amende administrative.

Elle ne s’était pas assurée que les personnes exerçant la prostitution dans le salon ne contrevenaient pas à la législation et avait de ce fait violé la loi.

Avant de prendre une décision définitive, elle pouvait exercer son droit d’être entendue.

5) Mme A______ a répondu le 22 août 2014.

Mme E______ avait déjà travaillé au salon en étant au bénéfice de toutes les autorisations nécessaires. Au cours du printemps 2014, elle avait repris contact avec elle, car elle souhaitait y travailler à nouveau. Un rendez-vous avait été fixé pour le 11 juin 2014, mais Mme E______ ne s’était pas présentée. Elle n’avait pas eu d’autres contacts avec elle depuis lors.

Elle avait pensé de bonne foi que Mme E______ ne souhaitait plus venir travailler au salon. Cette dernière était toutefois venue spontanément dans la soirée du 14 juin 2014 pour y reprendre son activité, sans l’en avertir. Dans la mesure où Mme E______ avait déjà travaillé au salon, sa présence n’avait pas surpris les hôtesses présentes, lesquelles n’ont pas songé à la prévenir.

À l’appui de sa réponse, Mme A______ a déposé une attestation du 22 juillet 2014, signée par Mme E______. Cette dernière y confirmait s’être présentée spontanément au salon le 14 juin 2014, en fin de soirée, sans prévenir Mme A______ qui ne se trouvait pas sur place.

6) Le 27 août 2014, le département a infligé un avertissement et une amende de CHF 1'000.- à Mme A______.

La personne responsable d’un salon de massages avait entre autres pour obligation de s’assurer que les personnes y exerçant la prostitution ne contrevenaient pas à la législation, notamment celle relative au séjour et au travail des étrangers. Il lui appartenait de prendre les mesures d’organisation nécessaires pour faire en sorte, qu’en son absence, aucune nouvelle prostituée ne commence son activité sans qu’elle en ait été dûment informée et sans qu’une autorisation de travail n’ait été délivrée.

Mme A______ avait failli à ses obligations et, malgré ses explications du 22 août 2014, l’avertissement et l’amende se justifiaient.

7) Le 29 septembre 2014, Mme A______ a recouru contre cette décision auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Elle a conclu, « sous suite de dépens », préalablement à l’audition de Mme E______ à titre de témoin et, principalement, à l’annulation de la décision du département.

Le département avait violé la loi, abusé de son pouvoir d’appréciation et décidé de manière arbitraire de lui infliger un avertissement et une amende. Au vu de son comportement irréprochable dans cette affaire, cette décision choquait « le sentiment d’équité » puisqu’elle avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour respecter les obligations prévues par la loi Elle avait par ailleurs, par le passé, toujours fait en sorte de respecter la législation.

Mme E______ avait repris contact avec elle dans le but de reprendre une activité au sein du salon. Afin d’entreprendre toutes les démarches utiles dans le but de régulariser la situation de Mme E______, elles avaient convenu de se rencontrer le 11 juin 2014. Elle avait indiqué à Mme E______ que cette dernière devait obligatoirement être en conformité avec la loi avant de commencer son activité. Mme E______ n’était pas venue au rendez-vous. Dès lors qu’il arrivait souvent, dans le milieu de la prostitution, que des personnes renoncent à commencer leur activité, ceci même après une prise de contact, elle avait pensé de bonne foi que Mme E______ avait renoncé. Elle n’avait en conséquence pas imaginé que celle-ci puisse commencer son activité au salon sans l’avertir, d’autant qu’elle était au courant de l’obligation de régulariser sa situation avant toute chose. Les hôtesses présentes le soir du contrôle effectué par la BMOE n’avaient eu aucune raison d’être étonnées de la présence de Mme E______ puisqu’elle avait déjà travaillé avec elles dans le passé.

8) Le 29 octobre 2014, le département a conclu au rejet du recours. L’audition de Mme E______ par la chambre administrative n’était pas nécessaire.

La personne responsable d’un salon de messages était tenue de communiquer immédiatement aux autorités compétentes tout changement de personnes exerçant la prostitution et toute modification des conditions personnelles intervenues depuis l’annonce initiale. Elle devait s’assurer que les personnes exerçant la prostitution dans le salon respectent la législation, en particulier celle relative au séjour et au travail des étrangers.

Le rendez-vous manqué du 11 juin 2014 ne changeait rien au fait qu’il n’était pas admissible, que du fait de l’absence de la responsable, une personne puisse commencer une activité dans un salon de massages sans que les démarches utiles n’aient été effectuées.

En infligeant un avertissement et une amende de CHF 1'000.-, il n’avait outrepassé ni ses compétences ni son pouvoir d’appréciation et sa décision respectait le principe de la proportionnalité.

9) Le 25 novembre 2014, dans le délai imparti par le juge délégué,
Mme A______ a persisté dans ses arguments et conclusions.

Aucun comportement fautif ne pouvait lui être reproché. Mme E______, qui n’était pas censée se trouver au salon, l’avait mise devant le fait accompli. Elle ne l’avait jamais autorisée à venir y exercer son activité et l’avait clairement informée de la nécessité d’obtenir toutes les autorisations nécessaires avant de commencer.

10) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) La recourante sollicite l’audition de Mme E______.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (arrêt du Tribunal fédéral 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3), de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 p. 157 ; 138 V 125 consid. 2.1 p. 127 ; 137 II 266 consid. 3.2 p. 270 ; 137 I 195 consid. 2.3.1 p. 197 ; 136 I 265 consid. 3.2 ; 135 II 286 consid. 5.1 p. 293 ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_ 12/2013 du 8 mars 2013 consid. 4.1 ; 2C_552/2011 du 15 mars 2012 consid. 3.1).

Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 p. 236 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 131 I 153 consid. 3 p. 158 ; arrêts du Tribunal fédéral 4A_108/2012 du 11 juin 2012 consid. 3.2 ; 8C_799/2011 du 20 juin 2012 consid. 6.1 ; 2D_2/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3 ; 4A_15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.2 et les arrêts cités ; ATA/404/2012 du 26 juin 2012 ; ATA/275/2012 du 8 mai 2012). Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 138 I 232 consid. 5.1 p. 237 ; 138 IV 81 consid. 2.2 p. 84 ; 134 I 83 consid. 4.1 p. 88 et les arrêts cités ; 133 II 235 consid. 5.2 p. 248 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2 ; 2C_514/2009 du 25 mars 2010 consid. 3.1).

b. En l’espèce, Mme E______ a signé une attestation datée du 22 juillet 2014 dans laquelle elle a confirmé les dires de la recourante relatifs à sa présence au salon le soir du contrôle effectué par la BMOE. Le contenu de cette attestation est clair et rien ne permet de douter de la véracité des explications qui y figurent. Elles n’ont d’ailleurs pas été remises en cause par l’autorité intimée. L’audition de Mme E______ est en conséquence inutile, le dossier contenant par ailleurs les éléments permettant à la chambre de céans de trancher les questions juridiques à résoudre.

3) Dans un même grief, la recourante reproche au département d’avoir violé l’art. 12 let. b de la loi sur la prostitution du 17 décembre 2009 (LProst - I 2 49), d’avoir abusé de son pouvoir d’appréciation et d’avoir décidé arbitrairement de lui infliger un avertissement et une amende CHF 1'000.-. Elle était de bonne foi et aucun comportement fautif ne pouvait lui être reproché.

4) À teneur de l’art. 12 let. b LProst, la personne responsable d'un salon a pour obligation de s'assurer que les personnes prostituées dans le salon ne contreviennent pas à la législation, notamment celle relative au séjour et au travail des étrangers.

En l’espèce, il n’est pas contesté que la recourante a donné à Mme E______ toutes les explications utiles quant aux conditions qui présidaient à une reprise d’activité. Il n’est pas non plus contesté que Mme E______, laquelle n’était pas censée se trouver au salon lors du contrôle de police, a repris son activité à l’insu de la recourante.

Il n’en demeure pas moins que, comme l’a constaté la BMOE, Mme E______ a bel et bien commencé son activité au sein du salon sans être au bénéfice d’un permis de travail valable. La recourante tente de justifier cette situation par le fait qu’elle était absente du salon le jour du contrôle de police, personne ne s’étant par ailleurs étonné de la présence de Mme E______ puisqu’elle y avait déjà travaillé par le passé. Cette excuse, qui permettrait à tous les responsables de salon de justifier n’importe quel manquement à la législation au sein de leur établissement du simple fait de leur absence, n’est pas recevable. Dans les limites du raisonnable, la recourante doit au contraire s’assurer qu’en tout temps, y compris lors de ses absences, les personnes qui se prostituent dans son salon ne contreviennent pas à la législation. Elle peut, par exemple, se faire remplacer.

C’est ainsi à juste titre que le département a reproché à la recourante de ne pas avoir respecté l’art. 12 let. b LProst.

5) Reste à examiner si le département était fondé à infliger un avertissement et une amende à la recourante.

a. La personne responsable d’un salon qui n’a pas respecté les obligations que lui impose l’art. 12 LProst fait l’objet de mesures et sanctions administratives (art. 14 al. 1 let. d LProst). Aux termes de l’art. 14 al. 2 LProst, l'autorité compétente prononce, selon la gravité ou la réitération de l'infraction, les mesures et sanctions administratives suivantes : un avertissement (let. a) ; la fermeture temporaire du salon ou de l’agence d’escorte, pour une durée de un à six mois, et l’interdiction d’exploiter tout autre salon ou toute autre agence, pour une durée analogue (let. b) ; ou la fermeture définitive du salon ou de l’agence d’escorte et l'interdiction d'exploiter tout autre salon ou toute autre agence pour une durée de dix ans (let. c).

b. Indépendamment du prononcé des mesures et sanctions administratives prévues à l’art. 14 al. 2 LProst, l'autorité compétente peut infliger une amende administrative de CHF 100.- à CHF 60'000.- à toute personne ayant enfreint les prescriptions de la LProst ou de ses dispositions d’exécution (art. 25 al. 1 LProst).

Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C’est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/74/2013 du 6 février 2013 et les arrêts cités ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif : les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, 2011, n. 1.4.5.5 p. 160 ss).

En vertu de l'art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif, ce qui vaut également en droit administratif sous réserve de celles qui concernent exclusivement le juge pénal (comme notamment les art. 34 ss, 42 ss, 56 ss, 74 ss, 106 al. 2 et 3 et 107 CP ; ATA/61/2014 du 4 février 2014 ; ATA/71/2012 du 31 janvier 2012).

Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence (Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/ Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 7ème éd., 2010, n. 1179). Selon la jurisprudence constante, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende (ATA/71/2012 précité ; ATA/14/2011 du 11 janvier 2011 ; ATA/788/2010 du 16 novembre 2010 ; ATA/571/2010 du 31 août 2010). La juridiction de céans ne la censure qu’en cas d’excès ou d'abus (ATA/160/2009 du 31 mars 2009). Enfin, l’amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst. ; ATA/700/2012 du 16 octobre 2012 ; ATA/533/2010 du 4 août 2010 ; ATA/201/2010 du 23 mars 2010).

L’autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d’une sanction doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss CP (principes applicables à la fixation de la peine), soit tenir compte de la culpabilité de l’auteur et prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP ; ATA/71/2012 précité).

c. Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 p. 73 ; 123 V 150 consid. 2 p. 152 et les références citées).

d. Une décision est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. lorsqu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité (ATF 138 I 49 consid. 7.1 p. 51 et arrêts cités).

e. Le principe de la proportionnalité impose que la mesure litigieuse soit apte à produire les résultats attendus et que ceux-ci ne puissent pas être atteints par des mesures moins incisives. Ce principe interdit en outre toute limitation qui irait au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics et privés compromis (ATA/538/2013 du 27 août 2013 consid. 3b ; ATA/847/2010 du 30 novembre 2010 consid. 12 et la jurisprudence citée).

6) Comme cela vient d’être examiné, la recourante n’a pas pris toutes les mesures qui pouvaient raisonnablement être exigées d’elle pour s’assurer que, même en son absence, les personnes qui se prostituent dans son salon ne contreviennent pas à la législation. Ce faisant, elle n’a pas respecté les obligations que lui impose la LProst dont le but est notamment de garantir que, dans le milieu de la prostitution, les conditions d'exercice de cette activité sont conformes à la législation (art. 1 let. a), étant précisé par ailleurs qu’il ressort des travaux préparatoires de la LProst une volonté que les sanctions et amendes soient suffisamment dissuasives (MGC 2009-2010/III A 2093, 2098 et 2009 ; ATA 485/2014 du 24 juin 2014 consid 3b). En infligeant un avertissement, soit la sanction la moins incisive prévue par la loi, le département n’a ainsi pas excédé son pouvoir d’appréciation.

Pour le reste, la recourante a dûment averti Mme E______ qu’elle devait régulariser sa situation et rien ne pouvait lui laisser penser que celle-ci commencerait son activité sans la prévenir. La faute commise par la recourante peut ainsi être qualifiée de légère. Le département n’allègue pas qu’elle serait défavorablement connue, ni qu’elle aurait déjà commis une infraction du même type. En conséquence, la chambre de céans considère que si l’avertissement infligé à la recourante se justifie, il constitue une sanction suffisante et une mesure adéquate pour lui faire prendre conscience qu’elle doit organiser son salon de manière à éviter qu’à l’avenir une personne puisse commencer son activité sans autorisation.

L’avertissement infligé à la recourante par le département le 27 août 2014 sera en conséquence confirmé et l’amende de CHF 1'000.- annulée.

7) Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis.

8) Vu l’issue du litige, un émolument - réduit à CHF 250.- - sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 500.- à la charge de l’État de Genève sera allouée à la recourante qui obtient partiellement gain de cause et qui y a conclu (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 septembre 2014 par Madame A______ contre la décision du département de la sécurité et de l’économie du
27 août 2014 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

annule la décision du département de la sécurité et de l’économie du
27 août 2014 en tant qu’elle inflige une amende de CHF 1'000.- à Madame A______ ;

la confirme pour le surplus ;

met à la charge de Madame A______ un émolument de CHF 250.- ;

alloue à Madame A______ une indemnité de procédure de CHF 500.-, à la charge de l’État de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Dimitri Tzortzis, avocat de la recourante, ainsi qu'au département de la sécurité et de l'économie.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :