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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4440/2011

ATA/700/2012 du 16.10.2012 ( EXPLOI ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; RÉPARATION DU VICE DE PROCÉDURE ; EXPLOITANT ; AUTORISATION OU APPROBATION(EN GÉNÉRAL) ; AMENDE ; PROPORTIONNALITÉ
Normes : Cst.29.al2; Cst.36.al3; LRDBH.1.leta; LRDBH.2; LRDBH.4; LRDBH.5.al1.letc; LRDBH.9; LRDBH.16.al1.leth; LRDBH.17.al1.leth; LRDBH.74.al1; RRDBH.11.letd
Résumé : L'exploitation d'une buvette permanente accessoire à une épicerie nécessite une autorisation délivrée par le Service du commerce (Scom). L'exploitation ne peut pas commencer avant la délivrance de cette autorisation. Dès lors que l'exploitant qui a contrevenu à ces règles n'avait pas d'antécédents et qu'il n'a pas causé d'inconvénients au voisinage ou de troubles à l'ordre public, l'amende de CHF 1'500.- infligée par le Scom est disproportionnée. Le principe de l'amende est confirmé mais celle-ci est réduite à CHF 750.-.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4440/2011-EXPLOI ATA/700/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 16 octobre 2012

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur M______

contre

SERVICE DU COMMERCE

_________



EN FAIT

1.1) F______ S.à r.l. (ci-après : l’établissement), dont l’associé gérant est Monsieur M______, a pour but social l’exploitation d’un commerce de vidéo, tabac-journaux et épicerie, commerce situé ______, rue de O______ à Carouge.

2.2) Le 24 septembre 2010, Monsieur C______, inspecteur au service du commerce (ci-après : le Scom), a rédigé un rapport d’infraction à la suite d’un contrôle effectué le même jour dans les locaux de l’établissement.

Un établissement public y était exploité sans autorisation, composé de deux « salles à boire » de 10 m2 et 20 m2 aménagées à côté de l’entrée et au fond à gauche. Cette dernière faisait auparavant office de vidéoclub. Le reste des locaux était exploité en tant qu’épicerie-tabacs-journaux. Il n’y avait pas de cuisine.

M. M______ lui avait affirmé être au bénéfice d’une autorisation d’exploitation, mais avoir « quelques soucis » avec le suivi d’une demande d’autorisation de construire en procédure accélérée (APA) liée aux travaux d’aménagement intérieur qu’il avait entrepris, pour laquelle il attendait une réponse du département des constructions et des technologies de l’information, devenu depuis le département de l’urbanisme (ci-après : le département).

De retour au Scom, M. C______ avait contrôlé le statut de l’établissement et constaté qu’aucune autorisation d’exploitation n’avait été délivrée. Il s’était rendu à nouveau le 24 septembre 2010 dans l’établissement. M. M______ avait admis qu’il ne détenait pas d’autorisation. Il avait certes déposé une requête auprès du Scom mais elle lui avait été refusée. Il proposait depuis plusieurs mois aux clients de son établissement des mets cuisinés tels que tomates-mozzarella, assiettes de charcuterie, saumon fumé, pâtes ou pizzas, sans être titulaire d’un certificat de cafetier.

L’APA évoquée par M. M______ avait été publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève parue le jour du contrôle.

M. M______ avait commis des infractions aux art. 4 al. 1 et 2, 5 al. 1 let. c, 6 al. 1 let. b et al. 2, 13, 67 et 74 de la loi sur la restauration, le débit de boissons et l’hébergement du 17 décembre 1987 (LRDBH - I 2 21) ainsi qu’aux art. 2 let. a, 4 al. 1, 5 al. 1 et 6 al. 1 let. b du règlement d’exécution de la loi sur la restauration, le débit de boisson et l’hébergement du 31 août 1988 (RRDBH - I 2 21.01).

3.3) Le 6 octobre 2010, M. M______ a déposé auprès du Scom une demande d’autorisation d’exploiter une buvette permanente, accessoire à l’épicerie, du lundi au jeudi de 7h à 21h, le vendredi de 7h à 10h30, le samedi de 8h à 18h et le dimanche de 8h à 19h, en application de la LRDBH.

Le formulaire contenant la requête déposée le 6 octobre 2010 avait déjà été déposé antérieurement par l’intéressé le 9 février 2010 ainsi qu’en attestaient deux timbres humides du Scom apposés sur sa première page.

4.4) Par pli recommandé du 8 octobre 2010, le directeur du Scom a répondu à M. M______ qu’il envisageait de prendre une sanction à la suite des infractions constatées par l’inspecteur du service le 24 septembre 2010. Un délai au 22 octobre 2010 lui était imparti pour faire valoir ses moyens de preuve au sujet de cette infraction.

5.5) Le 20 octobre 2010, M. M______ a répondu.

En mars 2010, il avait voulu affecter une partie de la surface de son arcade (environ 25 m2 sur une surface totale de 217 m2 dont environ 130 m2 à titre commercial) pour y développer un espace salon de thé. Un inspecteur du Scom lui avait signalé qu’il fallait remplir une demande d’autorisation pour une buvette permanente. Le lendemain de cette visite, il s’était rendu au Scom pour prendre les papiers nécessaires en expliquant ses projets à la personne qui l’y avait reçu. Après qu’il ait retourné le formulaire rempli, le Scom lui avait encore demandé par écrit de fournir des pièces complémentaires. Entre-temps, il s’était déjà rendu à l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) qui lui avait donné son autorisation. Il s’était également adressé au département, puis s’était à nouveau rendu au Scom pour expliquer qu’il lui fallait du temps pour réunir l’ensemble des pièces requises auprès des services concernés. Il lui avait été répondu qu’il n’y avait pas de problème.

Le lendemain de son passage au Scom, il s’était rendu au département pour effectuer les démarches en vue d’obtenir l’APA. Celle-ci lui avait été délivrée au moment de la visite de M. C______, le 20 septembre 2010. A cette occasion, ce dernier lui avait expliqué qu’il n’avait pas d’autorisation et qu’il fallait en outre une patente de cafetiers pour servir des pâtes et des pizzas minute. Personne ne lui avait jusque-là fourni ces informations, ce qui n’avait pas manqué de le surprendre et de le fâcher, compte tenu de ses démarches et visites aux services compétents.

Son but n’avait jamais été de ne pas se conformer à la législation en vigueur à Genève. Il regrettait d’avoir été très mal renseigné.

6.6) Le 21 octobre 2010, le directeur du Scom a accusé réception vis-à-vis de M. M______ de son courrier précité relatif à la patente de son établissement. Le service concerné avait été chargé d’étudier son dossier et une réponse allait lui être donnée dans les meilleurs délais.

7.7) Le 29 novembre 2010, le Scom a autorisé M. M______ à exploiter la buvette permanente accessoire à l’épicerie, à l’enseigne « F______ », propriété de la société F______ S.à r.l., située rue de O______ ______, Carouge, d’une surface d’exploitation de 14 m2.

L’autorisation était assortie de plusieurs réserves et conditions. En particulier, l’exploitant n’étant pas titulaire d’un certificat de capacité pour cafetier, restaurateur et hôtelier, une dispense lui était accordée mais le service de restauration était strictement interdit, conformément aux art. 9 al. 2 LRDBH et 11 let. d RRDBH.

8.8) Par courrier du 20 janvier 2011, le Scom a écrit à M. M______. Selon un rapport du secteur inspectorat et un constat du poste de police de Carouge, il servait des plats, à savoir des pizzas et des pâtes cuisinées, au sein de son établissement. Ce faisant, il violait l’autorisation délivrée le 29 novembre 2010 qui lui permettait de vendre ces mêmes plats uniquement à l’emporter. Il était sommé de mettre fin à cette activité.

9.9) Par décision du 25 novembre 2011, le Scom a infligé une amende de CHF 1’500.- à M. M______ en application de l’art. 74 LRDBH. Cette décision était susceptible de recours, dans un délai de trente jours, auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

Le courrier du 8 octobre 2010 qu’il avait adressé à M. M______ était resté sans réponse de sa part dans le délai imparti. Dès lors, il persistait à lui reprocher les faits constatés dans le rapport du 24 septembre 2010, à savoir que l’autorisation préalable nécessaire pour la création, le changement de catégorie, l’agrandissement et la transformation de l’établissement, le changement d’exploitant et la modification des conditions de l’autorisation antérieure faisaient défaut, en infraction aux art. 4 LRDBH et 2 et 4 RRDBH.

L’amende était payable dans les trente jours dès sa réception.

10.10) Le 16 décembre 2011, le Scom a reçu un courrier non daté signé par
M. M______.

Suite au courrier du Scom du 25 novembre 2011, et après deux entretiens avec des collaboratrices de ce service, il s’avérait que ce dernier avait totalement dysfonctionné dans le traitement de son dossier. M. M______ exigeait un rendez-vous avant le 24 décembre 2011 pour être entendu.

11.11) Le directeur du Scom a répondu à M. M______ le 22 décembre 2011.

Il l’informait que le courrier daté du 25 novembre 2011 lui donnait la possibilité d’interjeter recours auprès de la chambre administrative s’il jugeait ses motifs suffisants.

12.12) Par acte posté le 22 décembre 2011, M. M______ a recouru auprès de la chambre administrative contre la décision du Scom du 25 novembre 2011, concluant à l’annulation de l’amende.

Le Scom avait « dysfonctionné ». Le 20 octobre 2010, il avait bien répondu au courrier du directeur du Scom du 8 octobre 2010. Pour preuve, ce même directeur lui avait répondu le 21 octobre 2010. Après réception de la décision du Scom datée du 25 novembre 2011, il s’était immédiatement rendu au Scom pour obtenir des explications. A sa grande surprise, la collaboratrice qui l’avait reçu n’avait ni sa lettre du 20 octobre 2010, ni la réponse du Scom du lendemain.

Le courrier du chef du secteur autorisations du 20 janvier 2011 n’avait pas de raison d’être car, dès le 24 septembre 2010, il avait, suite à la visite de l’inspecteur, retiré la mention « sur place ». Son magasin n’était pas un restaurant et il n’avait qu’une machine à pâtes et un four à pizza automatique, qui ne servaient qu’à cuire (réchauffer). Il n’avait pas de plats cuisinés à proprement parler.

Le Scom comme l’OCIRT avaient été informés dès le départ de ce qu’il comptait faire.

Enfin, il avait essayé en vain d’obtenir un rendez-vous avec le nouveau directeur du Scom.

13.13) Le 17 février 2012, le Scom a conclu, principalement, au rejet du recours, à la confirmation de la décision du 25 novembre 2011, « sous suite de charges pour les frais et émoluments ».

La chambre administrative ne pouvait que confirmer la violation par M. M______ de l’art. 4 LRDBH et donc le bien-fondé de l’amende administrative, prononcée en application de l’art. 74 al. 1 LRDBH.

Au vu de la gravité de l’infraction, une amende de CHF 1’500.- respectait le principe de la proportionnalité.

14.14) Le 16 avril 2012, le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle des parties et d’enquêtes.

a. M. M______ a maintenu son recours. Propriétaire depuis 1997 du fond de commerce de l’F______, une épicerie-tabacs-journaux, il avait dû cesser d’y exploiter un vidéoclub. Pour combler le manque à gagner, il avait en 2010 créé un tea-room sans restauration dans les locaux. Il n’y avait pas de cuisine mais des machines à réchauffer des pâtes et des pizzas, ainsi que des paninis qu’il servait déjà. Au début de l’année 2010, il avait installé des tables dans une partie des locaux. A la même époque, après la visite d’un inspecteur, il s’était rendu au Scom pour annoncer son activité et obtenir les autorisations. Il avait en outre effectué des démarches auprès de l’OCIRT et du département. Personne ne lui avait dit qu’il avait besoin d’une patente de cafetier. Au début, il avait utilisé la salle avec les tables pour y servir des boissons non-alcoolisées. Dès l’été 2010, il avait installé des machines pour les pâtes et les pizzas. A l’heure actuelle, il avait une gérante qui détenait la patente en question et qui avait, avec l’accord du Scom, repris l’activité du tea-room avec service à table. Mécontent de la façon dont il avait été traité par le Scom, il confirmait les termes de son recours.

b. Selon la représentante du Scom, la collaboratrice qui avait effectué le suivi du courrier adressé par ce service à M. M______ le 8 octobre 2010 n’avait par été mise en possession, avant le 2 décembre 2011, de la réponse du 20 octobre 2010 de M. M______. La première requête en délivrance d’une autorisation d’exploiter déposée par M. M______ au Scom datait du 9 février 2010. Elle lui avait été restituée pour des raisons qu’elle ignorait. Cette requête avait été redéposée le 22 mars, puis le 6 octobre 2010. L’autorisation avait finalement été délivrée le 29 novembre 2010. M. M______ ne l’avait pas respectée en proposant un service de restauration, si bien que le Scom avait dû lui ordonner de se conformer à la loi le 20 janvier 2011. Sur le fond, le Scom maintenait l’amende puisqu’installer des tables pour permettre une consommation sur place faisait tomber l’activité commerciale sous le coup de l’art. 4 LRDBH.

c. Selon M. C______, entendu en qualité de témoin. Il n’avait pas reçu d’instruction spéciale pour inspecter l’F______. C’était dans le cadre de son activité de surveillant du secteur de Carouge qu’il avait été amené à contrôler cet établissement. Il confirmait les termes de son rapport du 24 septembre 2010.

Le juge délégué a fixé aux parties un délai au 2 mai 2012 pour déposer d’éventuelles observations, suite à quoi la cause serait gardée à juger.

15.15) Par courrier du 30 avril 2012 adressé à la chambre administrative, M. M______ a persisté dans les termes de son recours.

16.16) Le 2 mai 2012, le Scom a formulé des observations supplémentaires.

Il a insisté sur le fait que M. M______ savait qu’il exerçait une activité soumise à autorisation. Par ailleurs, les observations formulées dans le courrier du 20 octobre 2010 n’auraient pas changé la position du Scom s’il en avait eu connaissance. Il aurait tout de même infligé une amende de CHF 1’500.-.

17.17) Sur quoi, la cause a été gardée à juger le 2 mai 2012.

 

EN DROIT

1.1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 131 et 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

9.2) Le droit d’être entendu est une garantie de nature formelle dont la violation entraîne, lorsque sa réparation par l’autorité de recours n’est pas possible, l’annulation de la décision attaquée sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 137 I 195 consid. 2.2 p. 197 ; 133 III 235 consid. 5.3 p. 250 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2D_5/2012 du 19 avril 2012 ; 2C_552/2011 du 15 mars 2012 consid. 3.1 ; 8C_104/2010 du 29 septembre 2010 consid. 3.2 ; ATA/276/2012 du 8 mai 2012 consid. 2). Sa portée est déterminée en premier lieu par le droit cantonal (art. 41 ss LPA) et le droit administratif spécial (ATF 124 I 49 consid. 3a p. 51 et les arrêts cités ; Arrêts du Tribunal fédéral 5A_11/2009 du 31 mars 2009 ; 2P.39/2006 du 3 juillet 2006 consid. 3.2). Si la protection prévue par ces lois est insuffisante, ce sont les règles minimales déduites de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) qui s’appliquent (art. 29 al. 2 Cst. ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A_15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.1 ; T. TANQUEREL, Manuel de droit administratif, Genève-Zurich-Bâle 211, p. 509 n. 1526 ; A. AUER / G. MALINVERNI / M. HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, Berne 2006, Vol. 2, 2ème éd., p. 603 n. 1315 ss).

Tel qu’il est garanti par cette dernière disposition, le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 135 II 286 consid. 5.1 p. 293 ; Arrêts du Tribunal fédéral 8C_866/2010 du 12 mars 2012 consid. 4.1.1 ; 8C_643/2011 du 9 mars 2012 c. 4.3 et les références citées ; 1C_161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 5A_150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3 ; ATA/276/2012 du 8 mai 2012 consid. 2 et les arrêts cités).

La réparation d’un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d’être entendu, n’est possible que lorsque l’autorité dispose du même pouvoir d’examen que l’autorité inférieure (ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 p. 197 ss ; 133 I 201 consid. 2.2 p. 204 ; 132 V 387 consid. 5.1 p. 390 ; 129 I 129 consid. 2.2.3 p. 135 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C_306/2012 du 18 juillet 2012 ; 1C_572/2011 du 3 avril 2012 consid. 2.1 et les références citées ; 1C_161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 8C_104/2010 du 29 septembre 2010 consid. 3.2 ; 5A_150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3 ; 1C_104/2010 du 29 avril 2010 consid. 2 ; ATA/435/2010 du 22 juin 2010 consid. 2 ; ATA/192/2012 du 3 avril 2012 ; ATA/163/2012 du 27 mars 2012 ; ATA/710/2011 du 22 novembre 2011 ; P. MOOR / E. POLTIER, Droit administratif,  vol. 2, 3ème éd., 2011, ch. 2.2.7.4 p. 322 et 2.3.3.1 p. 362 ; T. TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 516s, n. 1553s).

3.3) En l’espèce, M. M______ relève que le Scom a pris sa décision du 25 novembre 2011 sans tenir compte de son courrier du 20 octobre 2010, se plaignant d’une violation de son droit d’être entendu.

La chambre administrative dispose du même pouvoir d’appréciation que le Scom. Elle a procédé aux actes d’instruction nécessaires et pris connaissance de l’ensemble du dossier et de l’argumentation de M. M______. Ce dernier a par ailleurs pu préciser et développer l’ensemble de ses arguments lors de l’audience de comparution personnelle des parties du 16 avril 2012. L’éventuelle violation du droit d’être entendu a ainsi été réparée.

4.4) La LRDBH régit l’exploitation à titre onéreux d’établissements voués à la restauration et au débit de boissons à consommer sur place (art. 1 let. a LRDBH).

Elle a pour but d’assurer qu’aucun établissement qui lui est soumis ne soit susceptible de troubler l’ordre public, en particulier la tranquillité, la santé et la moralité publiques, du fait de son propriétaire ou de son exploitant, ainsi qu’en raison de sa construction, de son aménagement, de son implantation (art. 2 al. 1 LRDBH). Toute autorisation prévue par la LRDBH ne peut être délivrée que si le but énuméré à l’alinéa 1 est susceptible d’être atteint (art. 2 al. 2 LRDBH).

5.5) Selon l’art. 4 al. 1 LRDBH, l’exploitation de tout établissement régi par cette loi est soumise à l’obtention préalable d’une autorisation d’exploiter délivrée par le département compétent. L’al. 2 prévoit que cette autorisation doit être requise lors de chaque création, changement de catégorie, agrandissement et transformation d’établissement, changement d’exploitant ou de propriétaire de l’établissement, ou modification des conditions de l’autorisation antérieure.

6.6) Les buvettes permanentes sont soumises à la LRDBH en vertu de son art. 16 al. 1 let. h. Elles sont des débits de boissons exploités de façon durable ou saisonnière, accessoires soit à des installations destinées aux loisirs, aux activités culturelles, au divertissement, au sport, à l’étude, au commerce, ou à des fins analogues, soit encore à des établissements socioculturels et artistiques ; il peut y être assuré un service de petite restauration (art. 17 al. 1 let. h LRDBH).

7.7) L’autorisation d’exploiter est délivrée à condition que l’exploitant soit titulaire du titre de formation requis attestant de son aptitude à gérer un établissement (art. 5 al. 1 let. c LRDBH). L’obtention du titre de formation est subordonnée à la réussite d’examens organisés par le département, aux fins de vérifier que les candidats possèdent les connaissances nécessaires au regard des buts poursuivis par la loi. Cette exigence peut être supprimée pour certaines catégories d’établissements (art. 9 al. 1 et 2 LRDBH).

8.8) A teneur de l’art 11 let. d RRDBH, l’exploitation d’une buvette permanente, pour autant qu’elle n’assure pas un service de restauration, ne nécessite pas un certificat de capacité au sens de l’art. 9 al. 2 LRDBH.

9) Dans le cas d’espèce, M. M______ a reçu du Scom l’autorisation d’exploiter une buvette permanente accessoire à l’épicerie à l’enseigne F______ le 29 novembre 2010. Avant cette date, il n’avait pas le droit d’exploiter cet établissement, cette exploitation étant soumise à l’obtention préalable d’une autorisation. Pourtant, l’intéressé en a commencé l’exploitation bien avant de recevoir l’autorisation qu’il avait sollicitée, ce qu’il a reconnu à l’inspecteur du service du commerce le 24 septembre 2010. Le fait d’avoir entrepris des démarches auprès du Scom et d’autres services de l’Etat ne peut lui servir de justification, l’autorisation devant être octroyée avant le début de l’activité. Le recourant ne peut pas reprocher aux services de l’Etat auxquels il s’est adressé de ne pas lui avoir dit qu’il avait besoin d’une patente. Cette précision ne pouvait lui être apportée qu’une fois sa requête examinée et instruite. Tel a d’ailleurs été le cas, l’autorisation délivrée par le service intimé contenant bien une réserve explicite sur ce point. S’il avait attendu de recevoir l’autorisation avant de commencer son exploitation, il aurait pu dès le début s’y conformer et éviter d’offrir un service de restauration, service auquel il a renoncé, selon ses indications, après la visite de l’inspecteur le 24 septembre 2010, avant d’engager une gérante titulaire d’une patente.

En tant qu’elle constate le défaut d’une autorisation préalable d’exploiter, la décision du service du commerce doit ainsi être confirmée.

10.10) a. Est passible d’une amende administrative allant de CHF 100.- à CHF 60’000.- tout contrevenant à la LRDBH (art. 74 al. 1).

b. Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C’est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/14/2011 du 11 janvier 2011 ; ATA/788/2010 du 16 novembre 2010 ; ATA/571/2010 du 31 août 2010 ; P. MOOR, Droit administratif : les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, Berne 2002, ch. 1.4.5.5, p. 139 ss).

c. L’amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst. ; ATA/234/2006 du 2 mai 2006).

11.11) Le département jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour en fixer le montant. La juridiction de céans ne le censure qu’en cas d’excès. Sont prises en considération la nature, la gravité et la fréquence des infractions commises dans le respect du principe de proportionnalité (ATA/26/2011 du 18 janvier 2011).

12.12) En l’espèce, le Scom a infligé à M. M______ une amende d’un montant de CHF 1’500.-.

La personne qui exploite un établissement sans autorisation et sans certificat de capacité sous le couvert d’un prête-nom fait, en règle générale, l’objet d’une amende administrative de CHF 1’500.- à CHF 2000.- (ATA/301/2010 du 4 mai 2010). Dans le cas d’espèce, si l’autorisation et la patente faisaient défaut, nous ne sommes pas en présence d’un problème de prête-nom, de sorte que l’amende paraît d’emblée élevée. Le Scom ne donne aucune indication quant à d’éventuels antécédents mais, à la connaissance de la chambre de céans, le recourant n’a pas par le passé contrevenu à la LRDBH pour des motifs identiques et l’infraction commise n’a pas engendré d’inconvénients pour le voisinage ni troublé l’ordre public. Pour tenir compte de l’ensemble de ces éléments, comme de l’ensemble des circonstances, la chambre administrative confirme l’amende dans son principe mais en réduit le montant à CHF 750.-.

13.13) Au vu de ce qui précède le recours sera partiellement admis.

14.14) Vu l’issue du litige, aucun émolument ne sera infligé au Scom en raison de la nouvelle teneur de l’art. 87 al. 1 LPA en vigueur depuis le 27 septembre 2011. Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à M. M______, qui n’y a pas conclu et n’a pas allégué avoir exposé de frais (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 22 décembre 2011 par Monsieur M______ contre la décision du service du commerce du 25 novembre 2011 ;

au fond :

l’admet partiellement ;

réduit à CHF 750.- l’amende administrative infligée à Monsieur M______ ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur  M______, ainsi qu’au service du commerce.

Siégeants : Mme Hurni, présidente, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction a.i. :

 

 

C. Sudre

 

la présidente siégeant :

 

 

E. Hurni

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :