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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3248/2020

ATA/1109/2020 du 04.11.2020 sur JTAPI/890/2020 ( MC ) , REJETE

Recours TF déposé le 30.11.2020, rendu le 07.01.2021, REJETE, 2C_984/2020
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3248/2020-MC ATA/1109/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 4 novembre 2020

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Magali Buser, avocate

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 octobre 2020 (JTAPI/890/2020)


EN FAIT

1) Le 12 juin 2015, Monsieur A______, né le ______1977, originaire d'Éthiopie (alias B______, né le ______1986, alias B______, né le ______1977), a déposé une demande d'asile en Suisse.

2) Par décision du 3 février 2017, le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) a rejeté cette demande et prononcé le renvoi de Suisse de M. A______, qui devait quitter le pays au plus tard le 31 mars 2017, sous peine de s'exposer à des mesures de contrainte. Le canton de Genève était chargé de l'exécution du renvoi.

Cette décision est entrée en force le 31 mai 2017, à la suite du rejet du recours formé contre la décision précitée.

3) Par décision du 22 juin 2017, le SEM a rejeté la demande de reconsidération de la décision du 3 février 2017.

4) Entendu par l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) le 27 juin 2017, M. A______ a indiqué qu'il ne voulait pas retourner en Éthiopie. Il a noté qu'il s'exposait à des mesures de contrainte dans l'hypothèse où il ne collaborerait pas à l'organisation de son renvoi.

5) Le même jour, l'OCPM a demandé le soutien du SEM en vue de l'obtention de documents de voyage en faveur de M. A______.

6) Par courrier du 28 juin 2017, le SEM a indiqué à l'OCPM que seul un retour volontaire en Éthiopie était possible, au vu de l'attitude négative des autorités de ce pays de mener des entretiens permettant l'identification de personnes.

7) Par courrier du 7 juin 2018, l'OCPM a avisé le SEM de la disparition, depuis le 4 juin 2018, de l'intéressé du foyer de l'Hospice général (ci-après : l'hospice) où il était hébergé.

8) Il ressort de l'extrait du registre Symic du 7 septembre 2020 produit au dossier qu'en date du 30 avril 2019, la Suisse a accepté, en application de la procédure Dublin, la reprise en charge de M. A______ sollicitée par les autorités françaises et que le 25 juillet 2019, ce dernier a été transféré de France en Suisse.

Le même jour, il a été repris en charge par l'hospice, et l'OCPM l'a invité à se présenter auprès de la Croix-Rouge en vue d'organiser son retour volontaire au plus tard le 29 juillet 2019, délai qu'il n'a toutefois pas respecté.

9) Par courriers des 8 août et 6 septembre 2019, le SEM a fait savoir à l'OCPM qu'afin d'entreprendre les recherches relatives à la nationalité de M. A______ en Éthiopie, les autorités de ce pays avaient besoin du nom et prénom complet du grand-père paternel. Ces renseignements ont été transmis au SEM par courriel du 19 septembre 2020 de l'OCPM.

10) Le 21 octobre 2019, le SEM a informé l'OCPM que M. A______ avait été reconnu par les autorités éthiopiennes à la suite des auditions centralisées du 15 octobre 2019 organisées à Berne. Cette identification était toutefois provisoire et devait être vérifiée par le service d'immigration à Addis-Abeba par voie diplomatique.

11) Par courriel du 10 janvier 2020, le SEM a indiqué à l'OCPM que les autorités éthiopiennes avaient reconnu M. A______ en tant que citoyen éthiopien, et qu'il allait prochainement solliciter un laissez-passer auprès de l'ambassade d'Éthiopie à Genève.

12) Le 20 janvier 2020, l'OCPM s'est entretenu avec M. A______. Ce dernier, après avoir pris note qu'il avait été reconnu par les autorités d'Éthiopie comme ressortissant de ce pays et qu'un document de voyage permettant d'effectuer son retour dans son pays d'origine allait être établi, a indiqué qu'il ne voulait pas y retourner.

M. A______ a également pris note que s'il ne se présentait pas au service d'aide au retour de la Croix-Rouge d'ici au 23 janvier 2020 pour organiser son départ volontaire, l'OCPM transmettrait son dossier à la police pour qu'elle se charge d'effectuer son renvoi, ce qui pouvait impliquer le prononcé de mesures de contrainte.

13) Par courriel du 18 février 2020, la Croix-Rouge a indiqué à l'OCPM que M. A______, qui avait rendez-vous chez elle le 31 janvier 2020, n'avait pas entrepris les démarches pour savoir s'il pouvait participer au « projet pilote Éthiopie du SEM », consistant en une aide pécuniaire au retour. Il lui avait indiqué qu'il voulait entreprendre des démarches pour savoir si un recours contre la décision de renvoi du SEM était possible.

14) Le 24 février 2020, l'OCPM a fait savoir à M. A______ que, dans la mesure où il ne souhaitait pas organiser son retour via la Croix-Rouge genevoise, son départ serait organisé par les services de police. M. A______ a répondu qu'il ne quitterait pas la Suisse et tenterait de mettre fin à ses jours s'il y était contraint par les services de police.

15) Le 28 juillet 2020, l'OCPM a requis des services de police d'exécuter le renvoi de l'intéressé à destination de l'Éthiopie.

16) Le 7 septembre 2020, les services de police ont interpellé M. A______ en faveur duquel, le 24 août 2020, les autorités éthiopiennes avaient délivré un laissez-passer valable jusqu'au 17 septembre 2020.

17) Un vol sans escorte policière (DEPU) à destination de l'Éthiopie a été réservé pour le 16 septembre 2020, à 22h45 au départ de Genève.

18) Le 7 septembre 2020, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de soixante jours sur la base de l'art. 77 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20).

19) Par jugement du 9 septembre 2020, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a confirmé l'ordre de mise en détention pour une durée de soixante jours, soit jusqu'au 7 novembre 2020.

Les conditions posées par l'art. 77 al. 1 LEI étaient réunies. On ne voyait pas quelle autre mesure moins coercitive était à même d'assurer la mise en oeuvre de la décision de renvoi en cause, M. A______ avant toujours indiqué s'opposer à son renvoi en Éthiopie. La durée de la détention respectait la loi et n'apparaissait pas disproportionnée, notamment car l'autorité devait disposer du temps nécessaire pour obtenir la réservation sur un nouveau vol, voire d'un degré supérieur (DEPA) et obtenir un nouveau laissez-passer des autorités éthiopiennes. Rien ne permettait de penser qu'un nouveau laissez-passer ne serait pas délivré.

Aucun élément n'établissait par ailleurs que le renvoi de l'intéressé serait impossible pour des motifs d'ordre juridique ou technique. Le fait que les autorités éthiopiennes n'accepteraient que les retours volontaires n'était pas pertinent puisque c'était par un vol DEPU que le renvoi du 16 septembre 2020 était envisagé. L'impossibilité supposait notamment que l'étranger ne puisse pas, sur une base volontaire, quitter la Suisse et rejoindre son État d'origine, de provenance ou un État tiers ; tant que l'impossibilité du renvoi dépendait de la volonté de l'étranger de collaborer avec les autorités, celui-ci ne pouvait s'en prévaloir. Si l'intéressé s'opposait à l'exécution du renvoi, les autorités pourraient au demeurant toujours envisager une détention pour insoumission.

20) Le 16 septembre 2020, M. A______ a refusé d'embarquer sur le vol devant le rapatrier.

21) Le 23 septembre 2020, les services de police ont obtenu la confirmation qu'une place à bord d'un avion de ligne avec escorte policière à destination de l'Éthiopie avait été réservée pour le 14 octobre 2020 en faveur de M. A______.

22) Par arrêt du 28 septembre 2020, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) a rejeté le recours formé par M. A______ contre le jugement précité.

Les conditions nécessaires et cumulatives de l'art. 77 al. 1 LEI étaient remplies. Il ne pouvait être considéré que M. A______ avait quitté le pays dans le délai qui lui avait été imparti, puisque c'était en France qu'il s'était rendu illégalement en 2019, soit un État partie aux accords de Dublin dans lequel il n'avait pas le droit d'entrer. Enfin, les autorités suisses avaient dû se procurer elles-mêmes les documents de voyage pour l'intéressé qui n'avait entrepris aucune démarche en vue de son départ et avait indiqué à plusieurs reprises qu'il n'entendait pas retourner en Éthiopie, le répétant encore dans son acte de recours.

Le principe de célérité avait ainsi été respecté. Dès lors que la détention était due à l'absence de coopération de l'intéressé avec les autorités chargées de l'exécution de son renvoi et son refus le 16 septembre 2020 de prendre le vol à destination de son pays d'origine, la décision de mise en détention administrative pour soixante jours respectait le cadre légal. Dans la mesure où le plafond posé par l'art. 77 LEI était beaucoup plus bas que celui qui prévalait en lien avec les autres motifs de mise en détention administrative, il apparaissait normal qu'il soit fréquemment atteint, étant précisé que si le recourant prenait le vol du 16 octobre 2020, cette durée maximale ne serait pas atteinte.

23) Le 28 septembre 2020, les autorités éthiopiennes ont délivré un
laissez-passer en faveur de M. A______ valable jusqu'au 27 mars 2021.

24) Le 14 octobre 2020, M. A______ a de nouveau refusé d'embarquer sur le vol devant le rapatrier. Il a été arrêté par les services de police à l'aéroport international de Genève et prévenu d'infraction à l'art. 115 al. 1 LEI (séjour illégal) et d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0), puis il a été mis à disposition du Ministère public.

Après s'être fait entraver les jambes afin d'être conduit dans l'avion, l'intéressé était devenu virulent et s'était vivement débattu. L'usage de la force avait été nécessaire pour le conduire à la porte de l'avion et au cours de cet épisode, une gendarme avait été légèrement blessée au genou droit. Arrivés à la porte de l'avion, l'hôtesse de l'air avait refusé d'embarquer M. A______.

25) Par ordonnance pénale du 15 octobre 2020, le Ministère public a condamné M. A______ pour les faits ayant mené à son arrestation.

26) Le 15 octobre 2020, à 16h48, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de deux mois, sur la base de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI. Les démarches en vue de l'inscription de M. A______ sur un vol spécial, organisé par FRONTEX à destination de l'Éthiopie, étaient en cours.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi. Il n'était pas en bonne santé et suivait un traitement médical contre la dépression, le stress et le manque de sommeil. Sa vie serait en danger s'il retournait en Éthiopie du fait qu'il faisait partie du groupe ethnique oromo.

27) Entendu le 19 octobre 2020 par le TAPI, M. A______ a déclaré qu'il était opposé à son renvoi en Éthiopie. Son père et sa mère avaient été tués dans ce pays, et il craignait pour sa vie s'il devait retourner en Éthiopie en raison de la situation politique. Ses frères et ses soeurs étaient contraints de se déplacer constamment, et il ne savait pas où ils demeuraient. À Genève, il logeait au foyer d'C______.

La représentante du commissaire de police a confirmé qu'une demande de réservation sur un vol spécial avait été effectuée. Le renvoi devait pouvoir être exécuté dans le délai de deux mois prévu par l'ordre de mise en détention. Il n'y avait pas de restriction liée à la situation sanitaire pour l'exécution d'un vol spécial à destination de l'Éthiopie.

M. A______ a conclu à sa mise en liberté immédiate. Dès lors qu'il n'existait pas de base légale permettant le renvoi non volontaire de personnes originaires d'Éthiopie, l'exécution du renvoi était impossible.

La représentante du commissaire de police a répliqué que s'il n'existait pas d'accord de réadmission entre la Suisse et l'Éthiopie, les négociations entre les deux pays permettaient le renvoi par vol spécial à destination de l'Éthiopie.

M. A______ a persisté dans son argumentation.

28) Par jugement du 19 octobre 2020, le TAPI a confirmé l'ordre de mise en détention administrative pour deux mois, soit jusqu'au 15 décembre 2020

Les conditions de détention administrative au sens de l'art. 76 al. 1 let. b
ch. 3 et 4 LEI étaient remplies. M. A______ avait fait l'objet d'une décision de renvoi entrée en force, refusé toute collaboration en vue de l'organisation de son départ et refusé d'embarquer sur un vol les 16 septembre et 14 octobre 2020. Il existait un risque réel et concret que, s'il était libéré, il n'obtempérerait pas aux instructions de l'autorité lorsque celle-ci lui ordonnerait de monter à bord de l'avion à destination de son pays et pourrait à nouveau disparaître dans la clandestinité.

Les autorités suisses avaient initié les démarches nécessaires en vue de l'exécution du renvoi par vol spécial. Il n'y avait pas lieu de douter qu'elles les poursuivraient avec toute la diligence requise. La durée de la détention respectait la loi et apparaissait utile, nécessaire et adéquate en vue de l'exécution du renvoi.

Rien n'indiquait que l'exécution du renvoi serait impossible, illicite ou non raisonnablement exigible. L'absence d'un accord de réadmission entre la Suisse et l'Éthiopie ne rendait pas en soi le refoulement impossible. Les autorités éthiopiennes avaient délivré un laissez-passer. En présence d'un projet concret de renvoi ou d'expulsion organisé par les autorités et mis en place à la suite de diverses démarches, le TAPI ne pouvait libérer l'intéressé avant le vol au motif que l'exécution de la mesure était impossible.

29) Par acte expédié le 29 octobre 2020, M. A______ a recouru à la chambre administrative contre ce jugement, dont il a demandé l'annulation. Il a conclu à sa mise en liberté immédiate.

Le Docteur D______ avait constaté qu'il souffrait de douleurs aux deux bras, aux cuisses et au thorax à la suite de son arrestation du 14 octobre 2020. La Doctoresse E______ avait attesté qu'il avait été suivi entre les 26 mars et 7 septembre 2020 et que la poursuite de ce suivi en soins psychiatriques était nécessaire pour éviter un effondrement thymique et un risque de passage à l'acte auto-agressif. L'« Exchange of notes regarding the admission procedures for the return of Ethiopians without legal status to reside in Switzerland » n'était pas publié. Le Conseil d'État vaudois avait indiqué en 2017 que les vols spéciaux vers l'Éthiopie n'étaient pas possibles ; cela n'avait pas changé depuis lors.

Son renvoi était impossible pour des motifs juridiques, compte tenu de l'absence d'accord de réadmission entre la Suisse et l'Éthiopie.

30) Le commissaire de police a conclu au rejet du recours.

Les certificats médicaux produits ne faisaient pas état d'éléments justifiant la levée de la détention administrative. L'accord de réadmission n'était pas conditionné à une forme particulière. C'était en raison de l'existence de cet accord que des vols pouvaient être organisés ; à défaut d'un tel accord, l'avion en provenance de Suisse ne pourrait pénétrer dans l'espace aérien éthiopien.

31) Dans sa réplique, le recourant a soutenu qu'il convenait d'observer une forme de publicité à l'accord existant entre les deux pays. En outre, il devait y avoir des dispositions d'exécution. Les refus de monter à bord des vols des
16 septembre et 14 octobre 2020 étaient donc légitimes.

32) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Selon l'art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10), la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 30 octobre 2020 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

En outre, à teneur dudit art. 10 LaLEtr, elle est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle en cette matière (al. 2 2ème phr.) ; elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; le cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l'étranger (al. 3 1ère phr.).

3) a. La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 CEDH (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1) et de l'art. 31 Cst., ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 précité
consid. 4.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).

b. Lorsqu'une décision de première instance de renvoi ou d'expulsion a été notifiée, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée si des éléments concrets font craindre que ladite personne entende se soustraire à son refoulement, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEI).

Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention en vue du renvoi ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l'autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l'obtention des documents nécessaires au départ auprès d'un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).

c. Le recourant ne conteste pas que les critères de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et ch. 4 LEI sont remplis. Il peut, à cet égard, être renvoyé aux considérants y relatifs du jugement entrepris, exposés ci-dessus, que la chambre de céans fait pleinement siens.

Le recourant soutient, en revanche, qu'en l'absence d'accord de réadmission entre l'Éthiopie et la Suisse, son renvoi serait impossible pour des motifs juridiques. Il convient donc d'examiner si tel est le cas.

4) a. Selon l'art. 80 al. 4 LEI, l'autorité judiciaire qui examine la décision de détention administrative, doit la lever lorsque, selon l'art. 80 al. 6 let. a LEI, l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles.

Selon l'art. 83 LEI, l'exécution n'est pas possible lorsque l'étranger ne peut pas quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans un de ces États (al. 2). L'exécution n'est pas licite lorsque le renvoi de l'étranger dans son État d'origine, dans son État de provenance ou dans un État tiers est contraire aux engagements de la Suisse relevant du droit international (al. 3). L'exécution de la décision peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (al. 4).

L'impossibilité suppose en tout état de cause notamment que l'étranger ne puisse pas, sur une base volontaire, quitter la Suisse et rejoindre son État d'origine, de provenance ou un État tiers (ATA/1143/2019 du 19 juillet 2019 consid. 10 ; ATA/776/2019 du 16 avril 2019 consid. 7 et les références citées), étant rappelé que tant que l'impossibilité du renvoi dépend de la volonté de l'étranger de collaborer avec les autorités, celui-ci ne peut s'en prévaloir (arrêt du Tribunal fédéral 2C_639/2011 du 16 septembre 2011 ; ATA/221/2018 du 9 mars 2018 ; ATA/381/2012 du 13 juin 2012 ; ATA/283/2012 du 8 mai 2012).

b. Il ressort des informations publiées sur le site du Département fédéral de justice et police (ci-après : DFJP) que la Suisse s'est jointe en novembre 2018 à un accord de collaboration et de réadmission conclu entre l'Union Européenne et l'Éthiopie (https://www.sem.admin.ch/sem/fr/home/aktuell/news/2019/2019-01-16.html). Le contenu de cet accord n'est, comme le relève le recourant, pas accessible.

Répondant le 4 juin 2018 à une question écrite d'un parlementaire, le Conseil fédéral a expliqué que l'accord avec l'Éthiopie ne concernait que des personnes dont la demande d'asile avait été définitivement rejetée. Les autorités éthiopiennes avaient donné oralement leur accord aux autorités suisses à ce que ces dernières puissent se fonder sur l'accord existant entre l'Union Européenne et l'Éthiopie au sujet des conditions de réadmission en Éthiopie de ressortissants de ce pays. Selon cet accord, les documents nécessaires à l'examen de la nationalité éthiopienne devaient être transmis au ministère des affaires étrangères d'Éthiopie. L'autorité centrale de sécurité d'Éthiopie, en charge de l'identification de ses nationaux, était le « National Intelligence and Security Services (Niss) ». Il n'y avait aucune communication directe entre la Suisse et le Niss, et aucune information personnelle - hormis les documents légaux admissibles - n'était communiquée à l'Éthiopie (https://www.parlament.ch/de/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20185312).

L'accord entre la Suisse et l'Éthiopie a ensuite été formalisé, le 4 janvier 2019, par un « Exchange of notes regarding the admission procedures for the return of Ethiopians without legal status to reside in Switzerland » (https://wwww.eda.admin.ch/eda/fr/dfae/politique-exterieure; FF 2020 5103).

c. Il découle de ce qui précède qu'il n'existe pas d'impossibilité légale d'exécuter le renvoi du recourant. En effet, les autorités éthiopiennes ont d'abord donné leur accord oral à ce que la Suisse applique les conditions de réadmission de ses nationaux convenues avec l'Union Européenne. Cet accord a été formalisé par écrit le 4 janvier 2019. Il existe donc un accord permettant la réadmission de nationaux éthiopiens en Éthiopie.

Par ailleurs et concrètement, les autorités éthiopiennes ont reconnu le recourant comme étant l'un de leurs ressortissants et lui ont délivré un laissez-passer valable jusqu'en mars 2021.

Enfin et comme l'a relevé le TAPI, dès lors que l'impossibilité du renvoi dépend de la seule volonté du recourant, celui-ci ne peut s'en prévaloir. En effet, l'impossibilité du renvoi au sens de l'art. l'art. 80 al. 6 let. a LEI ne vise pas celle résultant de l'attitude de l'intéressé.

Finalement, les certificats médicaux produits n'établissent ni même ne rendent vraisemblable que l'état de santé du recourant justifierait la levée de la détention administrative ou empêcherait son renvoi ; le recourant ne s'en prévaut d'ailleurs pas. Celui-ci fera, au demeurant, l'objet d'un examen médical avant son renvoi par vol spécial et sera assisté et accompagné d'un médecin tout au long du processus de refoulement, à savoir de sa conduite à l'aéroport jusqu'à son arrivée en Éthiopie (art. 15f à 15i de l'ordonnance du Conseil fédéral du 11 août 1999 sur l'exécution du renvoi et de l'expulsion d'étrangers, OERE - RS 142. 281).

Mal fondé, le recours sera donc rejeté.

5) Il ne sera pas perçu d'émolument, vu la gratuité de la procédure, et aucune indemnité de procédure ne sera allouée, compte tenu de l'issue du litige (art. 87 al. 1 et 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 octobre 2020 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 octobre 2020 ;

 

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Magali Buser, avocate du recourant, au Tribunal administratif de première instance, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au secrétariat d'État aux migrations, ainsi qu'au centre Frambois LMC, pour information.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

B. Specker

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :