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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/26/2019

ATA/103/2019 du 30.01.2019 ( FORMA ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/26/2019-FORMA ATA/103/2019

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 30 janvier 2019

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Pierre Ochsner, avocat

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE

 



Attendu, en fait, que :

1. Madame A______, née le ______ 1995, a été admise à l'Université de Genève (ci-après : l'université) à l'automne 2015.

2. Elle a été éliminée du cursus de baccalauréat en médecine après quatre semestres.

3. Au semestre d'automne 2017-2018, elle a été admise conditionnellement au cursus de baccalauréat en biologie.

4. À l'issue de la session d'examens d'août-septembre 2018, Mme A______ a été éliminée, par décision déclarée exécutoire nonobstant recours du doyen de la faculté des sciences du 27 septembre 2018, du cursus de baccalauréat en biologie. Elle n'avait pas réussi la condition posée à son admission, à savoir valider tous les examens de première année en deux semestres, sans redoublement possible.

5. Le 10 octobre 2018, Mme A______ a formé opposition contre la décision précitée. Elle invoquait des circonstances personnelles majeures l'ayant empêchée de se consacrer pleinement à ses études, à savoir le décès en mars 2017 de sa grand-mère, dont elle était très proche.

Elle joignait un certificat médical établi le 20 septembre 2018 par le Docteur B______, spécialiste en médecine interne, selon lequel elle avait présenté un état réactionnel sévère suite au décès de sa grand-mère le 5 mars 2017, affection qui avait eu des répercussions sérieuses sur la préparation et le passage de ses examens universitaires pendant plus d'une année.

6. Le 23 octobre 2018, le doyen de la faculté de droit a admis Mme A______ au cursus de baccalauréat universitaire en droit pour le semestre d'automne 2018-2019, cette admission étant conditionnée à la réussite de la première série d'examens au plus tard après deux semestres d'étude, sous peine d'élimination.

7. Par décision sur opposition du 29 novembre 2018, déclarée exécutoire nonobstant recours, le doyen de la faculté des sciences a rejeté l'opposition. Aucune circonstance exceptionnelle au sens de l'art. 58 al. 4 du statut de l'université, du 22 juin 2011 (ci-après : le statut) ne pouvait être retenue.

8. Par acte posté le 3 janvier 2019, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur opposition précitée, concluant préalablement à ce que l'effet suspensif soit accordé au recours, principalement à l'annulation de la décision attaquée et à la possibilité de redoubler son année universitaire et de repasser ses examens pour la première partie en juillet 2019 et pour le solde en août/septembre 2019.

La requête d'effet suspensif n'était pas motivée.

9. Le 21 janvier 2019, l'université a conclu au rejet de la demande d'effet suspensif.

Faire droit à la demande reviendrait à accorder à Mme A______ ses conclusions au fond, ce qui était prohibé par la jurisprudence.

De plus, l'intérêt public de la faculté à n'accueillir que des étudiants remplissant les critères académiques de sélection l'emportait sur l'intérêt privé de Mme A______ à poursuivre un cursus dont elle avait été éliminée de façon exécutoire en septembre 2018.

Il n'y avait aucune circonstance particulière justifiant en l'espèce de déroger à cette règle, laquelle était reprise par la chambre administrative dans sa jurisprudence, ce d'autant que Mme A______ poursuivait un autre cursus au sein de l'université.

10. Le 29 janvier 2019, Mme A______ a écrit à la chambre administrative. Elle souhaitait corriger l'affirmation selon laquelle elle suivait un cursus en droit, car elle s'était exmatriculée au début de l'année 2019. Elle joignait un courrier du doyen de la faculté de droit l'autorisant à entamer son cursus de bachelor en droit au semestre d'automne 2019.

11. Sur ce, la cause a été gardée à juger sur effet suspensif.

 

Considérant, en droit, que :

1. Aux termes de l'art. 21 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) – loi applicable par renvoi des art. 35 et 37 du règlement relatif à la procédure d’opposition au sein de l’université du 16 mars 2009 (RIO-UNIGE) –, l’autorité peut d’office ou sur requête ordonner des mesures provisionnelles en exigeant au besoin des sûretés (al. 1) ; ces mesures sont ordonnées par le président s’il s’agit d’une autorité collégiale ou d’une juridiction administrative (al. 2).

2. En vertu de l'art. 66 LPA, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1) ; toutefois, lorsqu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3).

3. Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles – au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif (Philippe WEISSENBERGER/Astrid HIRZEL, Der Suspensiveffekt und andere vorsorgliche Massnahmen, in Isabelle HÄNER/Bernhard WALDMANN [éd.], Brennpunkte im Verwaltungsprozess, 2013, 61-85, p. 63) – ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/955/2016 du 9 novembre 2016 consid. 4 ; ATA/1244/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2 ; ATA/1110/2015 du 16 octobre 2015 consid. 3). Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités).

Ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, 265).

4. Au regard des principes rappelés plus haut, admettre en l’espèce la restitution de l’effet suspensif aurait pour effet que la recourante serait encore étudiante de la faculté et qu’il serait fait droit, de manière provisoire, aux conclusions de celle-ci sur le fond, ce qui est en principe prohibé (ATA/448/2016 du 31 mai 2016 consid. 4 ; ATA/156/2015 du 9 février 2015 consid. 3). Il n’y a en l’occurrence aucune circonstance particulière qui justifierait une exception à cette règle (ATA/367/2018 du 18 avril 2018 consid. 6).

L’intimée fait pour le reste valoir un intérêt public – légitime – à ce qu’elle n’accueille que des étudiants ayant rempli les critères académiques de sélection (ATA/367/2018 précité consid. 6 ; ATA/263/2018 du 20 mars 2018 consid. 7 ; ATA/74/2015 du 20 janvier 2015 consid. 4). Cet intérêt prime l’intérêt privé de la recourante à continuer de bénéficier du statut d’étudiante pour suivre des cours de la faculté alors qu’elle n’en remplit plus les conditions selon l’université, ce d'autant plus que, d'une part, les chances de succès du recours n'apparaissent, prima facie, pas suffisantes pour contrebalancer cet intérêt et que, d'autre part, la recourante a été admise au cursus de baccalauréat en droit, quand bien même, pour des raisons qu'elle n'explicite pas, elle a reporté le début de ses études dans cette matière d'une année.

5. La restitution de l'effet suspensif sera donc refusée, le sort des frais de la procédure étant réservé jusqu'à droit jugé au fond.

Vu le recours interjeté le 3 janvier 2019 par Madame A______ contre la décision sur opposition de la faculté des sciences de l'Université de Genève du 29 novembre 2018 ;

vu les art. 21 et 66 al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ;

vu l’art. 9 al. 1 du règlement de la chambre administrative du 26 septembre 2017 ;

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

refuse de restituer l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision à Me Pierre Ochsner, avocat de la recourante, ainsi qu'à l'Université de Genève.

 

 

La présidente :

 

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :