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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3996/2016

ATA/978/2019 du 04.06.2019 sur JTAPI/399/2018 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 11.07.2019, rendu le 20.08.2019, REJETE, 2C_654/2019
Descripteurs : MAXIME INQUISITOIRE ; LIBRE APPRÉCIATION DES PREUVES ; AUTORISATION DE SÉJOUR ; REGROUPEMENT FAMILIAL ; UNION CONJUGALE ; VIOLENCE DOMESTIQUE
Normes : LPA.19; LPA.20.al1.par2ème phr; LEI.42.al1; LEI.50; OASA.77.al6; OASA.77.al6bis
Résumé : Le dossier ne fait pas apparaître que la violence conjugale invoquée par la recourante revête une intensité telle qu'elle empêche la poursuite de la vie commune.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3996/2016-PE ATA/978/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 4 juin 2019

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Arnaud Moutinot, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 avril 2018 (JTAPI/399/2018)


EN FAIT

1) Madame A______, née le ______ 1974, est ressortissante de Russie.

2) Le 12 novembre 2012, l'office cantonal de la population, devenu depuis lors l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), a délivré à Mme A______ une autorisation d'entrée en Suisse afin de se marier avec Monsieur A______, ressortissant suisse, domicilié à Genève.

3) Ils se sont mariés le ______ 2013 à C______ et le 21 février 2013, Mme A______ a été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour à titre de regroupement familial, renouvelée en dernier lieu jusqu'au 10 février 2018.

4) Par requête du 23 novembre 2015, M. A______ a sollicité des mesures protectrices de l'union conjugale auprès du Tribunal civil de première instance (ci-après : TPI).

5) Par courrier et courriel du 9 décembre 2015, M. A______ a informé l'OCPM de cette démarche. Son épouse entretenait une relation extraconjugale depuis septembre 2014, ce qu'elle niait toutefois.

6) Entendue par le TPI le 11 février 2016, Mme A______ a indiqué ne pas s'opposer au principe de la vie séparée. Elle avait son propre logement depuis le 1er février 2016.

7) Par jugement du 25 février 2016 (JTPI/2609/2015), le TPI a autorisé les époux A______ à vivre séparés.

8) Par courrier du 18 août 2016, l'OCPM a informé Mme A______ de son intention de révoquer son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse. Son époux avait engagé une procédure en séparation en novembre 2015 et ils ne vivaient plus ensemble. Elle ne pouvait pas se prévaloir de trois années de vie commune et la poursuite de son séjour ne s'imposait pas pour des raisons personnelles majeures. Un délai de trente jours lui était imparti pour faire valoir son droit d'être entendue.

9) Le 15 septembre 2016, Mme A______ a fait usage de ce droit.

a. Dès le mois de juin 2014, elle avait été victime de violences verbales, physiques et psychologiques de la part de son époux. Afin de se protéger, elle avait été contrainte de chercher un nouveau logement dans l'urgence. Leur séparation n'était toutefois devenue « effective » que le 7 mars 2016, soit à l'échéance du délai de dix jours suivant la notification du jugement du TPI. Ils avaient ainsi fait ménage commun durant plus de trois ans. De plus, elle était financièrement indépendante et parfaitement intégrée à Genève.

b. Elle a également remis à l'OCPM plusieurs pièces, soit notamment :

- un rapport d'intervention de l'unité mobile d'urgences sociales (ci-après : UMUS) daté du 3 janvier 2015, à teneur duquel elle avait déclaré faire l'objet de pressions psychologiques ;

- une attestation établie par Solidarité Femmes le 25 janvier 2015. Elle avait relaté subir des comportements de violence psychologique de la part de son époux et parfois de violence physique. Elle avait également indiqué que, craignant pour sa sécurité, elle avait passé une nuit chez une amie et emménagerait prochainement dans un studio ;

- un constat médical établi le 6 décembre 2015 par le Docteur D______. Elle avait sollicité un certificat de coups et blessures dans un contexte de conflit conjugal. Son époux l'accusait d'entretenir une relation extraconjugale. Sur le plan physique, elle présentait trois hématomes d'allure récente : un au niveau de la face interne du genou gauche, un en regard du muscle moyen fessier droit et au coude gauche. Sur le plan psychique, elle déclarait ne pas se sentir en sécurité au sein du foyer conjugal ;

- une attestation de dépôt de plainte à l'encontre de son époux pour lésions corporelles simples, injures et menaces datée du 8 décembre 2015 ;

- une attestation établie par F-Information (centre d'écoute, d'information et d'orientation pour les femmes) le 10 décembre 2015. Elle avait consulté le centre pour la deuxième fois à cette date, après une première consultation au printemps 2014. Elle décrivait une situation de violences verbales et psychologiques qu'elle subissait quotidiennement de la part de son époux depuis longtemps. Il se faisait également menaçant physiquement en lui arrachant, par exemple, le téléphone des mains ;

- un certificat médical établi le 16 décembre 2015 par le Docteur E______. Elle avait bénéficié de plusieurs séances de psychothérapie en 2014 (dès le 3 novembre) et en 2015 (jusqu'au 28 juillet), plus une le jour même dans le cadre de difficultés rencontrées dans son couple. Elle se plaignait de pressions et de dénigrements de la part de son époux ;

- un constat médical établi le 23 décembre 2015 par la Doctoresse G______ qui a constaté, sur le plan physique, un hématome au pouce droit, avec douleur à la palpation, ainsi qu'une flexion et extension limitée par les douleurs et, sur le plan psychique, la peur que son époux l'agresse à nouveau.

10) Par décision du 20 octobre 2016, l'OCPM a révoqué l'autorisation de séjour de Mme A______ et lui a imparti un délai au 20 décembre 2016 pour quitter la Suisse.

La communauté conjugale avait duré moins de trois ans et, sans minimiser les violences alléguées, elles n'atteignaient pas un degré de gravité qui justifierait la poursuite de son séjour en Suisse.

11) Le 21 novembre 2016, Mme A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à son annulation.

a. L'union conjugale avait duré plus de trois ans ou presque, si bien qu'il convenait de relativiser la position stricte adoptée par l'autorité. Son contrat de bail avait pris effet en début de mois, comme il était d'usage en matière de baux et loyers, mais elle n'avait annoncé son changement d'adresse que le 15 février 2016.

Elle avait démontré avoir subi des violences psychologiques, insultes et critiques, de même que des violences physiques de la part de son époux. Ces violences avaient abouti à l'intervention d'UMUS et au dépôt d'une plainte. Elle s'était également adressée à divers centres et associations d'aide aux victimes de violences conjugales.

b. Elle a versé plusieurs pièces à la procédure, soit notamment :

- une attestation médicale établie le 11 novembre 2016 par le Docteur E______. Elle était suivie depuis mai 2015 pour un état d'anxiété et de nervosité accrue, une thymie triste, des pleurs fréquents et des céphalées provoquées principalement par une situation conjugale lourde : insultes, dénigrement de ses capacités intellectuelles de la part de son époux, casse d'objets, empêchement à s'endormir, refus de la laisser entrer au domicile ou d'accéder à la chambre à coucher. La violence verbale et psychologique pouvait parfois aller jusqu'aux lésions corporelles simples (luxation du pouce). Un programme de gestion du stress et des séances de relaxation avaient été mis en place. Les atteintes à son intégrité psychique l'avaient beaucoup fragilisée et il y avait un véritable besoin de soins ;

- une attestation établie par une voisine, Madame F______. Mme A______ avait demandé son aide le 7 décembre 2015. Elle lui avait expliqué que sa situation familiale était compliquée, qu'elle était effrayée et désespérée. Son époux avait fermé la porte de la chambre à clef et elle avait besoin de ses effets personnels. Profitant de son absence, elles avaient essayé d'ouvrir la porte de la chambre avec diverses clefs. Il les avait toutefois surprises et lui avait demandé de quitter son appartement en hurlant. Son comportement agressif lui avait fait peur. Le lendemain, Mme A______ avait à nouveau sonné à sa porte car elle avait peur de rentrer à son domicile. Elle lui avait alors conseillé de s'adresser à la police, ce d'autant qu'il l'avait agressée le week-end précédent.

12) Le 24 février 2017, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

13) Le 27 avril 2017, le TAPI a tenu une audience de comparution personnelle et d'enquêtes.

a. M. A______ a indiqué avoir rencontré son épouse à Londres en 2010. Ils avaient ensuite vécu ensemble à partir de janvier 2013, mais dès 2014, ils avaient rencontré des problèmes. Son épouse avait entamé une relation extraconjugale en 2014, ce qu'il avait appris en novembre 2015. Elle avait profité de lui pour obtenir une autorisation de séjour. Lorsqu'il avait découvert cette relation extraconjugale, il avait décidé de se séparer. Ils avaient toutefois poursuivi la cohabitation le temps qu'elle trouve un logement. En novembre 2015, il avait consulté en urgence l'Hôpital pour canaliser ses émotions, suite aux conflits avec son épouse et du fait qu'il avait eu connaissance de cette relation extraconjugale. Il n'était pas une personne violente. Il avait suivi la thérapie qui lui avait été conseillée aux Charmilles et il avait pris des médicaments pour dormir. Il contestait les violences physiques ou psychiques alléguées par son épouse. Il contestait avoir donné des coups à son épouse, se référant au constat médical du 6 décembre 2015 qui lui avait été soumis. Elle avait pu s'automutiler. Il n'était pas agressif, mais fâché. Il avait lui-même été agressé par son épouse. Il avait fermé la porte de la chambre à clef car dans la mesure où elle avait un amant, ils ne pouvaient pas dormir ensemble. Il admettait avoir saisi le bras de son épouse le 23 décembre 2015, car il voulait la confronter s'agissant des messages envoyés à son amant. Comme elle refusait de répondre, il avait jeté les messages qu'il avait imprimés et avait, dans ce geste, effectivement touché ses lunettes qui étaient tombées. L'Hôpital lui ayant dit de canaliser ses émotions, il était parti. Il ne contestait pas lui avoir tordu le pouce.

b. Mme A______ a été entendue. Elle avait travaillé pendant six mois auprès de H______, à Genève, dès le 1er janvier 2014. Son contrat n'ayant pas été prolongé, elle avait dépendu financièrement de son époux qui travaillait à cette époque. Dès le moment où elle avait retrouvé une indépendance financière, en 2014 et 2015, son époux l'avait menacée de lui faire perdre son permis de séjour car il n'avait pas d'autres moyens de la toucher en cas de conflit. Il lui disait que s'ils divorçaient, elle perdrait son permis. Ces pressions et ces dénigrements quotidiens lui avaient fait beaucoup de mal, et elle avait pris des médicaments et suivi une thérapie. Il était exact qu'elle avait consulté des centres en 2014 en lien avec les violences psychologiques qu'elle subissait. Elle ne voulait pas se séparer, à ce moment-là, car elle était amoureuse et ils essayaient d'avoir un enfant. Son mari pouvait changer et lui faire vivre des périodes très calmes. Elle pensait qu'en étant patiente, la situation s'améliorerait. Elle n'avait pas voulu aller au bout du processus pour avoir un enfant car lorsqu'ils avaient appris qu'ils ne pouvaient pas en avoir, son mari lui avait exprimé son souhait de divorcer. Il était déjà difficile pour elle d'apprendre qu'elle ne pouvait pas avoir d'enfants et son époux la dénigrait en disant qu'elle s'habillait « comme une vieille ». Elle contestait avoir eu un amant.

C'était son mari qui avait décidé de la séparation, mais elle ne voulait pas partir et il était devenu violent physiquement pour la pousser à partir. Le 3 décembre 2015, la porte de la chambre était fermée à clef. Son époux lui avait dit qu'elle dormirait dorénavant sur le canapé. Comme il était agressif, elle avait d'abord appelé l'UMUS qui lui avait répondu qu'elle devait appeler la police, s'il devenait violent. Par la suite, elle avait pu récupérer la clef de la chambre, car c'était la même que celle de la salle de bains et elle s'était sentie en sécurité. Le 5 décembre 2015, son époux était devenu agressif. Il l'avait poussée et lui avait pris ses affaires et la clef. Elle avait besoin d'accéder à la chambre où se trouvaient ses effets personnels, et pour s'isoler lorsqu'il devenait agressif. Le 5 décembre 2015, elle avait appelé la police, qui lui avait répondu qu'il ne s'agissait pas de violences mais d'un conflit de couple qu'ils devaient gérer eux-mêmes.

Le 7 décembre 2015, son époux était absent mais il avait fermé à clef la porte de la chambre. Elle l'avait contacté pour récupérer ses affaires et il lui avait répondu qu'elle pourrait accéder à la chambre le lendemain. Elle avait alors demandé à la voisine si elle avait la clef, et son époux était ensuite arrivé et s'était énervé. Elle s'était ensuite rendue à la police, qui l'avait accompagnée à la maison et qui avait demandé à son époux de rendre la clef. Le lendemain, elle avait porté plainte.

Après l'intervention de la police en décembre 2015, son époux avait cessé de fermer la porte à clef, mais il avait enlevé le matelas du lit, la contraignant à dormir sur le cadre avec des couvertures. Elle avait peur de dormir sur le canapé et préférait s'isoler dans la chambre et fermer la porte à clef. Son époux dormait dans la chambre de son fils lorsque ce dernier n'était pas là. Le 23 décembre 2015, il avait frappé son bras et cassé ses lunettes. Il lui avait pris les mains de manière ferme et tordu le pouce qui avait gonflé. Son époux était vraiment devenu agressif ce jour-là et elle avait eu peur. Elle avait consulté un médecin.

Lors de cette audience, Mme A______ a versé diverses lettres de recommandation et de soutien à la procédure.

14) Par courrier du 2 mai 2017, M. A______ a sollicité du TAPI qu'il corrige le procès-verbal d'audience, dans la mesure où il contestait avoir tordu le pouce de son épouse ou lui avoir donné un coup. Il avait été mal compris.

15) Le 9 mai 2017, Mme A______ s'y est opposée.

16) Le 18 mai 2017, M. A______ a transmis des pièces au TAPI, soit notamment :

- une attestation médicale établie le 9 décembre 2015, par le Docteur I______, à teneur de laquelle M. A______ l'avait consulté dans le contexte d'un conflit conjugal qui durait depuis deux mois. Il s'était disputé avec son épouse le 5 décembre 2015. Selon les explications du patient, il lui avait pris son sac et au moment de le lui rendre, elle l'avait poussé et lui avait griffé l'avant-bras droit Elle l'avait frappé au niveau du coude gauche et du dos car elle voulait récupérer la clef de la chambre et son téléphone portable. M. A______ était angoissé et triste. Il présentait un hématome au niveau du coude gauche et une douleur à la mobilisation de l'épaule droite. Les constatations faites plusieurs jours après la dispute pouvaient correspondre à ses allégations ;

- un certificat médical daté du 21 janvier 2016 attestant d'une incapacité de travail totale dès le 1er janvier 2016, un certificat médical daté du 12 mai 2016 attestant d'une incapacité totale de travail pour maladie, dès le 1er janvier 2016, d'une incapacité de travail de 50 % dès le 29 février 2016 et d'une capacité totale dès le 1er juin 2016 ;

- une attestation médicale établie le 8 mai 2017, par la Doctoresse J______ des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), à teneur de laquelle M. A______ avait été suivi par le centre ambulatoire de psychiatrie et psychothérapie intégrées K______ (ci-après : CAPPI) du 14 décembre 2015 au 1er février 2016.

17) Le 29 juin 2017, l'OCPM a persisté dans ses conclusions.

18) Dans ses observations du 7 juillet 2017, Mme A______ a également persisté dans les termes de son recours.

Elle n'avait pas cherché refuge auprès d'une maison d'accueil par peur de représailles. En outre, elle était sous l'emprise d'un mari abusif et ne disposait pas de l'autonomie décisionnelle nécessaire. Ces maisons d'accueil n'acceptaient pas non plus les animaux de compagnie. Or, elle était propriétaire d'un chien depuis dix ans. S'agissant des certificats médicaux produits par son époux, ils n'étaient d'aucune pertinence. Les lésions constatées n'étaient pas compatibles avec les déclarations de l'intéressé et son incapacité de travail était due à la maladie, étant précisé qu'il souffrait depuis plusieurs années de maladies infectieuses au ventre. De plus, ils concernaient l'année 2016, soit la période à laquelle ils s'étaient séparés. S'agissant du suivi dont M. A______ avait bénéficié auprès du CAPPI pour gérer ses problèmes de violence, il démontrait l'existence de violences physiques de sa part sur son épouse. Malgré leur séparation, il continuait à la harceler par messagerie écrite, tel qu'il ressortait des copies d'écran qu'elle produisait. Ses messages oscillaient entre l'amour et les menaces et indiquaient qu'il surveillait son activité sur les réseaux sociaux. Ils ont été versés à la procédure.

19) Le même jour, Mme A______ a demandé à l'OCPM de reconsidérer la décision attaquée.

20) Par décision du 14 juillet 2017, suite à l'accord des parties, le TAPI a prononcé la suspension de l'instruction du recours.

21) Le 30 novembre 2017, l'OCPM a transmis sa décision du 23 novembre 2017, par laquelle il a rejeté la demande de reconsidération du 7 juillet 2017, considérant que les éléments invoqués à l'appui de cette demande ne démontraient « toujours pas » le degré d'intensité et l'aspect systématique des violences subies qui lui permettraient de se prévaloir d'une autorisation de séjour. Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours.

22) Le 5 décembre 2017, les parties ont été informées de la reprise de l'instruction.

23) Par courrier du 12 janvier 2018, Mme A______ a persisté dans les conclusions de son recours et déploré le rejet de sa demande de reconsidération. Elle a versé des nouvelles pièces au dossier.

24) Par jugement du 27 avril 2018, le TAPI a rejeté le recours.

a. L'union conjugale avait duré moins de trois ans. Mme A______ avait quitté le domicile conjugal le 1er février 2016, comme elle l'avait indiqué lors de l'audience de comparution personnelle devant le TPI le 11 février 2016. C'était l'hypothèse qui lui était la plus favorable.

Cette première condition n'étant pas remplie, il n'y avait pas lieu d'examiner la question de la réussite de l'intégration.

b. Mme A______ ne pouvait pas se prévaloir de raisons personnelles majeures, malgré les violences conjugales alléguées.

Hormis une consultation au printemps 2014 auprès de F-Information, la recourante ne s'était adressée aux structures d'aide aux victimes de violences conjugales qu'après la requête de mesures protectrices de l'union conjugale sollicitée par son époux.

Les pièces versées au dossier, soit des documents établis en 2015 sur la base des déclaration de Mme A______, faisaient essentiellement état de comportement de violences verbales, psychologiques et de dénigrements qu'elle subissait de la part de son époux. Les atteintes à son intégrité psychique l'avaient beaucoup fragilisée et il y avait un véritable besoin de soins. Les certificats médicaux qui faisaient état de lésions corporelles, attestaient d'hématomes.

Lors de l'audience du 27 avril 2017, Mme A______ avait essentiellement relaté des conflits et des disputes qui s'étaient déroulés à la fin de l'année 2015. Quant à son époux, il avait contesté les violences psychiques et physiques alléguées.

Pour ces motifs et sans minimiser la situation conjugale à laquelle Mme A______ avait dû faire face, il était constaté que les violences démontrées par les pièces produites au dossier n'atteignaient pas le degré de gravité exigé par la jurisprudence.

Son état de santé s'était probablement amélioré depuis le certificat médical du 11 novembre 2016, compte tenu de la séparation des époux. Au besoin, elle pouvait trouver en Russie le soutien médical nécessaire.

c. Mme A______ disposait de diplômes et d'une expérience professionnelle acquise en Suisse qu'elle pourrait faire valoir en Russie, si bien que sa réintégration dans son pays d'origine, où elle avait vécu jusqu'à l'âge de 39 ans, n'était pas fortement compromise, pour justifier la poursuite de son séjour en Suisse.

d. Dès lors qu'elle demeurait en Suisse sans y être autorisée, son renvoi était justifié. Il n'était ni impossible, ni illicite et pouvait être raisonnablement exigé.

25) Par acte du 30 mai 2018, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à son annulation, à ce qu'il soit dit qu'elle remplissait les conditions de renouvellement du permis de séjour et que ce dernier lui soit octroyé.

a. Elle n'avait pas quitté le domicile conjugal avant le 15 février 2016, si bien qu'elle avait effectivement fait ménage commun avec son époux durant plus de trois ans, puisqu'ils s'étaient mariés le 11 février 2013. La date du 1er février 2016 était uniquement la date de disponibilité de l'appartement selon le bail. Son mari avait confirmé qu'elle était partie le 15 février 2016. S'il avait déposé des mesures protectrices de l'union conjugale en novembre 2015, il avait admis par la suite que cette démarche était impulsive.

b. Le TAPI n'avait pas examiné la question de son intégration, alors que celle-ci était parfaitement réussie depuis son arrivée en Suisse. L'OCPM était sur le point de lui octroyer un permis d'établissement. La procédure était suspendue en raison de celle en cours.

c. Durant ces années, elle avait été victime de violences psychologiques puis, dès le 5 décembre 2015, de violences physiques. Elle avait produit des certificats médicaux et des attestations qui indiquaient systématiquement que le récit des circonstances et des effets de la violence subie présentait une cohérence significative avec les symptômes psychologiques et que les lésions physiques qu'elle présentait étaient entièrement compatibles avec l'anamnèse présentée. Lorsqu'elle avait contacté l'UMUS le 3 décembre 2015, elle n'avait pas encore été victime de violences physiques. Durant ces années, elle avait subi des violences psychologiques récurrentes graves, ainsi que des violences physiques de la part de M. A______, qui avaient affecté sa santé, l'obligeant à prendre des médicaments, à suivre une thérapie et à consulter l'Association Solidarité Femmes. Elle était suivie par cette structure depuis le 17 novembre 2015. Elle était alors déjà suivie par son psychiatre depuis le 3 novembre 2014. Elle avait demandé de l'aide auprès des associations depuis 2014, sans toutefois se séparer, car elle était alors amoureuse et les époux essayaient d'avoir un enfant. Son mari pouvait être très calme durant de longues périodes et elle avait alors encore l'espoir que son comportement s'améliore avec le temps. Actuellement, son état de santé était extrêmement fragile en raison des séquelles des abus qu'elle avait subis. Elle ne pouvait être pénalisée pour la seule raison qu'elle avait eu le courage de mettre un terme à la vie commune avec un époux violent.

Son mari utilisait également sa situation administrative pour exercer des pressions à son égard, en la menaçant de la faire renvoyer de Suisse. Le 9 décembre 2015, il s'était rendu à l'OCPM pour dénoncer une prétendue relation extraconjugale qu'elle entretenait pour finalement revenir sur ses déclarations.

d. Parmi les pièces produites figure une attestation de M. A______ du 29 mai 2019, selon laquelle Mme A______ avait quitté le domicile conjugal le 15 février 2016. Il avait précédemment allégué que son épouse avait une relation extraconjugale et qu'elle avait quitté l'appartement le 1er février 2016, car il était énervé. Ils avaient mené une vie commune jusqu'au 15 février 2016.

26) Le 11 juin 2018, le TAPI a transmis son dossier sans formuler d'observations.

27) Le 9 juillet 2018, l'OCPM a conclu au rejet du recours. Le recours et les pièces versées au dossier n'apportaient pas d'éléments nouveaux.

28) Le 16 juillet 2018, Mme A______ a fait parvenir à la chambre administrative une copie du courrier adressé par M. A______ au TPI le 5 mai 2018 ainsi que du jugement du TPI du 11 mai 2018, par lequel ce dernier constatait qu'en raison du retrait de la demande en divorce, la cause était rayée du rôle.

29) Le 9 avril 2019, donnant suite à une demande de renseignements de la chambre administrative, l'OCPM a précisé que les époux étaient toujours domiciliés à des adresses différentes.

30) Le 12 avril 2019, Mme A______ a informé la chambre de céans s'être réconciliée avec son mari. Elle le fréquentait à nouveau depuis le printemps 2018. Elle versait à la procédure une confirmation de la part de ce dernier. Ils avaient toutefois conservé leurs appartements respectifs.

31) Le contenu des pièces produites sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit ci-après.

32) Le 24 avril 2019, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le 1er janvier 2019, est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), devenue la loi sur les étrangers et l'intégration (LEI - RS 142.20). En l'absence de dispositions transitoires, la règle générale selon laquelle s'appliquent aux faits dont les conséquences juridiques sont en cause, les normes en vigueur au moment où lesdits faits se sont produits (ATA/847/2018 du 21 août 2018 consid. 3c et les références citées ; ATA/1052/2017 du 4 juillet 2017 consid. 4), prévaut.

Les faits de la présente cause s'étant intégralement déroulés avant le 1er janvier 2019, ils sont soumis aux dispositions de la LEI dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2018.

3) Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, la chambre administrative n'a pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée (art. 61 al. 2 LPA), sauf s'il s'agit d'une mesure de contrainte prévue par le droit des étrangers (art. 10 al. 2 de la loi d'application de la LEI du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10), hypothèse non réalisée en l'espèce. Il n'en résulte toutefois pas que l'autorité est libre d'agir comme bon lui semble, puisqu'elle ne peut pas faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l'égalité de traitement, la proportionnalité et l'interdiction de l'arbitraire (ATA/792/2019 du 16 avril 2019 ; ATA/10/2017 du 10 janvier 2017).

4) a. La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle le juge établit les faits d'office (art. 19 LPA). Ce principe n'est toutefois pas absolu, sa portée étant restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA ; ATF 128 II 139 consid. 2b). Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (arrêts du Tribunal fédéral 8C_1034/2009 du 28 juillet 2010 consid. 4.2 ; 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 3.3.2 ; ATA/792/2019 précité ; ATA/991/2016 du 22 novembre 2016 et les arrêts cités). À cet égard, en police des étrangers, l'art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l'étranger ou des tiers participants (arrêt du Tribunal fédéral 2C_777/2015 du 26 mai 2016 consid. 3.3, non publié in ATF 142 I 152).

Lorsque les preuves font défaut ou s'il ne peut être raisonnablement exigé de l'autorité qu'elle les recueille, pour les faits constitutifs d'un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit. Il appartient ainsi à l'administré d'établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l'administration de démontrer l'existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/792/2019 précité ; ATA/1155/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b et les références citées).

b. En procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3 ; ATA/792/2019 précité ; ATA/991/2016 précité). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n'est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/792/2019 précité ; ATA/1155/2018 précité consid. 3b).

5) a. Le conjoint d'un ressortissant suisse a droit à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité à condition de vivre en ménage commun avec lui (art. 42 al. 1 LEI). Cette disposition requiert non seulement le mariage des époux, mais aussi leur ménage commun (ATF 136 II 113 consid. 3.2).

b. Après dissolution de la famille, le droit du conjoint d'un ressortissant suisse à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu de l'art. 42 LEI subsiste si l'union conjugale a duré au moins trois ans et l'intégration est réussie (let. a) ou la poursuite du séjour en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures (let. b ; art. 50 al. 1 LEI).

L'art. 50 LEI, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2018, ne trouve application qu'en cas d'échec définitif de la communauté conjugale (ATF 140 II 345 consid. 4 ; 140 II 129 consid. 3.5).

c. La limite légale de trois ans présente un caractère absolu, quand bien même la fin de la vie conjugale serait intervenue quelques jours ou semaines seulement avant l'expiration du délai (ATF 137 II 345 consid. 3.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1111/2015 du 9 mai 2016 consid. 4.1 ; ATA/792/2019 précité ; ATA/1211/2017 du 22 août 2017 consid. 7b). Elle se calcule en fonction de la durée pendant laquelle les époux ont fait ménage commun en Suisse (ATF 136 II 113 consid. 3.3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1111/2015 précité consid. 4.1), soit depuis la date du mariage, à condition que la cohabitation ait lieu en Suisse, jusqu'à ce que les époux cessent d'habiter sous le même toit ; la cohabitation des intéressés avant leur mariage ne peut être prise en compte dans la durée de l'union conjugale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_594/2010 du 24 novembre 2010 consid. 3.1 et 2C_195/2010 du 23 juin 2010 consid. 5.1 ; ATA/1211/2017 précité consid. 7b).

La notion d'union conjugale de l'art. 50 al. 1 let. a LEI, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2018, ne se confond pas avec celle du mariage. Alors que celui-ci peut n'être plus que formel, l'union conjugale implique une vie conjugale effective, sous réserve des exceptions mentionnées à l'art. 49 LEI (ATF 137 II 345 consid. 3.1.2 ; 136 II 113 consid. 3.2). C'est donc la date de la fin de la communauté conjugale qui est déterminante pour calculer si la relation a duré trois ans, et non le moment où le divorce est prononcé (Cesla AMARELLE/ Nathalie CHRISTEN in Code annoté du droit de la migration, 2017, Vol II : LEI, ad. art. 50 p. 466 n. 10).

Sous réserve d'un éventuel abus de droit, la jurisprudence admet que plusieurs périodes de vie commune en Suisse, même de courte durée et/ou qui sont interrompues par des temps de séparation prolongée, puissent être additionnées en vue de satisfaire à la condition de la durée minimum de l'union conjugale (art. 50 al. 1 let. a LEI), à condition que les époux soient véritablement et sérieusement déterminés à poursuivre leur communauté conjugale (ATF 140 II 345 consid. 4.5.2 et les arrêts cités).

Il n'est pas nécessaire d'examiner la condition de la réussite de l'intégration lorsque l'union conjugale a duré moins de trois ans, les deux conditions étant cumulatives (arrêt du Tribunal fédéral 2C_352/2014 du 18 mars 2015 consid. 4 ; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 4a).

d. En l'espèce, les époux se sont mariés le ______ 2013. Entendue par le TPI le 11 février 2016, la recourante a indiqué avoir son propre logement depuis le 1er février 2016 et ne pas s'opposer au principe de la vie séparée. Dès lors que son mari a sollicité des mesures protectrices de l'union conjugale le 23 novembre 2015 et qu'elle a signé un contrat de bail pour le 1er février 2016, c'est conformément au droit que l'autorité intimée a constaté que l'union conjugale était dissoute avant le ______ 2016, les époux n'ayant plus l'intention de continuer leur vie commune. Si la recourante s'est opposée au principe de la vie séparée, son mari a quant à lui souhaité sans équivoque mettre un terme à leur union.

La chambre administrative partage l'avis de l'autorité intimée et du TAPI, à savoir que les attestations produites en appel, par lesquelles M. A______ certifie que la recourante a quitté le domicile conjugal le 15 février 2016 doivent être appréciées avec retenue. En effet, elles ont été rédigées alors que les époux semblent s'être réconciliés. De plus, ces déclarations sont infirmées par les pièces précitées et notamment par les propos de la recourante devant le TPI.

Les dernières pièces versées ne permettent pas d'établir que les époux ont repris une vie commune. En effet, celle-ci exige un domicile conjugal commun, sauf exception non réalisée en l'espèce. Or, d'après le dernier courrier reçu par la chambre administrative le 15 avril 2019, les époux ont conservé leur appartement respectif, ce qui est du reste confirmé par la recourante dans sa dernière écriture.

Par conséquent, il n'est pas établi que les époux soient véritablement et sérieusement déterminés à poursuivre leur communauté conjugale.

Pour ces motifs, la chambre administrative constate que la volonté des époux de continuer à faire ménage commun avait disparu le ______ 2016, et qu'il n'a pas été démontré qu'ils ont repris la vie commune au sens de la loi depuis lors.

Par conséquent, la première condition de l'art 50 al. 1 let. a LEI, soit l'existence d'une vie commune d'au moins trois ans, n'est pas réalisée. Il n'est pas nécessaire d'examiner la question de la réussite de l'intégration, les deux conditions étant cumulatives.

6) a. Outre les hypothèses retenues à l'art. 50 al. 1 let. a LEI, le droit au renouvellement de l'autorisation de séjour délivrée en vertu des art. 42 et 43 LEI subsiste si la poursuite du séjour en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures (art. 50 al. 1 let. b LEI).

b. Des raisons personnelles majeures sont notamment données lorsque le conjoint est victime de violences conjugales (art. 50 al. 2 LEI). Celle-ci peut être de nature tant physique que psychique. Les violences conjugales doivent revêtir une certaine intensité (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 136 II 1 consid. 5.3). Il faut qu'il soit établi que l'on ne peut exiger plus longtemps de la personne admise dans le cadre du regroupement familial qu'elle poursuive l'union conjugale à cause de cette violence. Tel est le cas lorsque la personnalité de l'étranger venu en Suisse au titre du regroupement familial est sérieusement menacée du fait de la vie commune et que la poursuite de l'union conjugale ne peut être raisonnablement exigée d'elle (arrêt du Tribunal fédéral 2C_554/2009 du 10 mars 2010 consid. 2.1 ; SEM, Directives et commentaires domaine des étrangers - Directives LEtr - octobre 2013, actualisées le 1er janvier 2019 SEM, ch. 6.15.3.3).

La violence conjugale au sens de la LEI suppose des mauvais traitements systématiques à la victime pour affirmer sa supériorité et exercer un contrôle sur elle (ATF 138 II 229 consid. 3.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_295/2012 du 5 septembre 2012 consid. 3.2 ; SEM, Circulaire sur la violence conjugale, 12 avril 2013, n. 1.2). Une gifle ou le fait pour un époux étranger d'avoir été enfermé une fois dehors par son épouse ne suffisent pas (ATF 138 II 229 consid. 3.2.1 ; 136 II 1 consid. 5.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_783/2014 du 27 janvier 2015 consid. 3.2). Par ailleurs, un acte de violence isolé, mais particulièrement grave, peut à lui seul conduire à admettre l'existence de raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI (arrêts du Tribunal fédéral 2C_982/2010 du 3 mai 2011 consid. 3.3 et 2C_590/2010 du 29 novembre 2010 consid. 2.5.2). On ne saurait cependant considérer qu'une agression unique amenant la victime à consulter un médecin en raison de plusieurs griffures au visage et d'un état de détresse psychologique revête l'intensité requise par la loi lorsque s'opère par la suite un rapprochement du couple (arrêt du Tribunal fédéral 2C_783/2014 précité consid. 3.2). 

Le Tribunal fédéral a rappelé que les formes de violence domestique et de contrôle subies dans le cadre des relations intimes ne sont pas faciles à classer dans des catégories déterminées, raison pour laquelle les investigations doivent prendre en compte les actes commis, l'expérience de violence vécue par la victime, ainsi que la mise en danger de sa personnalité et les répercussions sur celle-ci (santé, restrictions dans sa vie quotidienne). La jurisprudence a considéré que c'est en ce sens qu'il faut comprendre la notion de violence conjugale d'une certaine intensité au sens de l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI (arrêt du Tribunal fédéral 2C_777/2015 précité consid. 3.2 non publié in ATF 142 I 152 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1085/2017 du 22 mai 2018 consid. 3.3 et 2C_649/2015 du 1er avril 2016 consid. 4.2).

c. Sont notamment considérés comme indices de violences conjugales les certificats médicaux (let. a), les rapports de police (let. b), les plaintes pénales (let. c), les mesures au sens de l'art. 28b du code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210 ; let. d) et les jugements pénaux prononcés à ce sujet (let. e ; art. 77 al. 6 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 [OASA - RS 142.201]). Lors de l'examen des raisons personnelles majeures, les autorités compétentes tiennent compte des indications et des renseignements fournis par des services spécialisés (art. 77 al. 6bis OASA).

Lorsque des contraintes psychiques sont invoquées, il incombe à la personne d'illustrer de façon concrète et objective, ainsi que d'établir par preuves le caractère systématique de la maltraitance, sa durée, ainsi que les pressions subjectives qui en résultent. Des affirmations d'ordre général ou des indices faisant état de tensions ponctuelles sont insuffisants (arrêt 2C_777/2015 précité consid. 3.3 non publié aux ATF 142 I 152 ; ATF 138 II 229 consid. 3.2.3).

7) En l'espèce, la recourante allègue avoir été victime de violences conjugales, en particulier de pressions psychologiques. Elle a versé à la procédure la plainte déposée contre son mari le 8 décembre 2015 auprès du poste de gendarmerie de Lancy-Onex, pour lésions corporelles simples, injures et menaces et pour le vol de son téléphone portable. Toutefois, elle n'indique pas quelle suite y a été donnée. Le dossier ne contient pas de rapport de police, de jugement pénal ni d'ordonnance ou de jugement rendus en application de l'art. 28b du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210).

L'examen des indices de violence conjugale doit en conséquence se faire sur les seuls certificats médicaux produits, attestations des associations consultées et des témoignages écrits.

Les attestations versées au dossier résument en substance le récit de la recourante. Elles ne renseignent toutefois pas sur la fréquence et l'intensité des violences. Elles ne permettent pas de savoir en quoi elles ont consisté. Sur le plan physique, les lésions constatées sont principalement des hématomes et sont considérées compatibles avec la description des événements faite par la recourante. Sans les minimiser, l'intensité des violences apparaît toutefois difficile à établir. Or, et comme l'a rappelé le Tribunal fédéral, le devoir de collaboration des étrangers est important sur cette problématique. Ils doivent rendre l'existence d'une violence conjugale crédible, démontrer la répétition et l'intensité des atteintes en s'appuyant sur des preuves adéquates (ATF 138 II 299 consid. 3.2.3). Les pièces versées à la procédure ne permettent pas de démontrer l'intensité requise par la jurisprudence du Tribunal fédéral.

La recourante ne démontre pas plus l'existence de violences psychiques. Un seul témoin, Mme F______, une voisine de couple, a attesté avoir pu constater le 7 décembre que le mari de la recourante était très énervé de la trouver dans leur appartement et qu'elle en était rapidement partie car elle avait eu peur. Elle ne relate toutefois pas avoir été témoin de violence envers la recourante. Enfin, si les messages versés à la procédure démontrent que le mari avait des doutes quant à l'existence d'une relation extraconjugale entretenue par la recourante, qu'il en était jaloux et a pu la menacer de ne pas pouvoir poursuivre son séjour en Suisse, ils ne permettent pas d'établir une situation de violence ou de pression psychologique intense et répétée, qui serait de nature à menacer sérieusement sa personnalité.

D'ailleurs, entendue le 11 février 2016 par le TPI, la recourante a indiqué qu'elle s'opposait à la séparation. Ce faisant, elle a admis qu'une reprise de la vie commune était envisageable. Devant la chambre administrative, elle invoque d'une part son droit à l'obtention d'un droit de séjour en Suisse pour cas de rigueur, soit au motif d'avoir été victime de violences conjugales. D'autre part, et quand bien même elle est financièrement indépendante et a conclu un bail en son propre nom, elle admet avoir repris au printemps 2018 une vie de couple avec son conjoint, qu'elle n'a eu de cesse auparavant de décrire comme étant violent.

Pour ces motifs, le dossier ne fait pas apparaître que la violence conjugale invoquée par la recourante revête une intensité telle qu'elle empêche la poursuite de la vie commune (arrêt 2C_859/2017 du 20 décembre 2017 consid. 5.2).

Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'OCPM puis le TAPI ont retenu que la situation de la recourante ne relevait pas d'un cas de violence conjugale répondant aux critères jurisprudentiels de gravité exigés par l'art. 50 al. 2 LEI, et que l'intéressée ne pouvait donc pas invoquer des raisons personnelles majeures (art. 50 al. 1 let. b LEI) pour en déduire un droit de séjour en Suisse en lien avec la violence conjugale dont elle affirmait avoir été victime.

8) La recourante n'a pas démontré que l'OCPM était sur le point de lui délivrer un permis d'établissement.

9) Pour le surplus, il n'est pas allégué - et il ne ressort par ailleurs pas du dossier - que l'exécution de son renvoi serait impossible, illicite ou ne serait pas raisonnablement exigible.

10) Pour ces motifs, le recours doit être rejeté. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 30 mai 2018 par Madame A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 avril 2018 ;

 

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Madame A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Arnaud Moutinot, avocat de la recourante, au Tribunal administratif de première instance, à l'office cantonal de la population et des migrations, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Verniory, Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

...

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

...

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l'entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l'admission provisoire,

4. l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d'admission,

6. la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d'asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

...

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

...

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.