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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/1572/2018

ACPR/158/2021 du 10.03.2021 sur OPMP/9533/2019 ( MP ) , ADMIS/PARTIEL

Descripteurs : INDEMNITÉ(EN GÉNÉRAL);TORT MORAL;FRAIS DE LA PROCÉDURE;IMPUTATION
Normes : CPP.429.al1.letc; CPP.429.al1.leta; CP.139; CP.51

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/1572/2018 ACPR/158/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 10 mars 2021

 

Entre

A______, domicilié ______[GE], comparant par Me B______, avocat, rue ______, ______ Genève,

recourant,

 

contre l'ordonnance d'indemnisation rendue le 29 juillet 2020 par le Ministère public,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.

 


EN FAIT :

A. Par acte expédié au greffe de la Chambre de céans le 7 août 2020, A______ recourt contre l'ordonnance du 29 juillet 2020, notifiée le lendemain, par laquelle le Ministère public a arrêté à CHF 6'207.30 l'indemnité due au titre des dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (art. 429 al. 1 let. a CPP) et refusé de lui allouer une indemnité à titre de réparation du tort moral (art. 429 al. 1 let. c CPP).

Il conclut, avec suite de frais et dépens, à ce que l'État de Genève soit condamné à lui verser :

- CHF 24'250.40, "sous déduction des postes selon dire de justice", avec intérêts dès le 5 décembre 2018 pour ses frais d'avocat,

- CHF 723.- pour les frais de copies,

- CHF 2'000.- avec intérêts à 5% dès le 24 janvier 2018 pour sa détention injustifiée,

- CHF 50'000.- avec intérêts à 5% dès le 24 janvier 2018 pour tort moral.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le ______ 2018, une montre de marque D______ d'une valeur de CHF 6'500.-a été déclarée volée sur un stand du F______ (ci-après, F______) à Genève.

b. A______, né en 1988, gendarme entré en fonction en 2013 et affecté en dernier lieu au poste de police C______ [GE], a été interpellé le 24 janvier 2018. Des perquisitions ont été menées, notamment dans son casier au poste de police C______ [GE], où un fusil softair a été retrouvé.

c. Il a été entendu le lendemain par le Ministère public en qualité de prévenu de vol (art. 139 CP), abus d'autorité (art. 312 CP) et infraction à la loi sur les armes (LArm). Il était soupçonné d'avoir, le ______ 2018, présenté sa carte de police au service de sécurité du F______ afin d'entrer sur le site alors qu'il était en congé, et y avoir dérobé la montre D______ déclarée volée. Il lui était également reproché d'avoir entreposé dans son casier de police un fusil softair sans avoir procédé aux démarches exigées par la loi.

d. Par ordonnance du Tribunal des mesures de contrainte du ______ 2018, A______ a été placé en détention provisoire jusqu'au 9 février suivant. Il sera libéré le 2 février 2018.

e. Le Ministère public ayant annoncé, le 6 novembre 2018, son intention de clore l'instruction et classer la prévention de vol, A______ a, par conclusions du 5 décembre 2018, requis une indemnisation selon l'art. 429 CPP, pour les sommes susmentionnées (cf. let. A supra).

La note d'honoraires d'avocat produite s'élève à CHF 24'250.40, pour l'activité du ______ au 5 décembre 2018. Le tarif appliqué est de CHF 450.- pour le chef d'étude, CHF 350.- pour les collaboratrices et CHF 150.- pour les avocates stagiaires. Les postes relatifs aux audiences et à la visite du client en prison comprennent les temps de transport. A______ précisait que les audiences avaient essentiellement, voire exclusivement, été consacrées à la prévention de vol.

Dans sa demande d'indemnité pour tort moral, il a fait valoir que l'arrestation et la détention avaient provoqué une profonde souffrance, d'une part, car il était policier et, d'autre part, car il n'avait pas pu prendre soin de sa mère, qui souffrait de graves problèmes de santé et dont il s'occupait quotidiennement. La longueur de la procédure et le fait qu'elle avait essentiellement, voire exclusivement, porté sur le vol, avaient aggravé ses souffrances. Il était aidé par son médecin-traitant, qu'il voyait une fois par mois. Des antidépresseurs lui avaient été prescrits. De nombreux articles avaient été consacrés à cette affaire, dans la presse et sur les réseaux sociaux. Il citait neuf articles, parus entre le ______ et le ______ 2018, ayant pour titre : "______" (E______ [Média de presse écrite], ______ 2018), "______" (E______ [Média de presse écrite], ______ 2018), "______»" (G______ [Média de presse écrite], ______ 2018), "______" (G______ [Média de presse écrite], ______ 2018), "______" (site internet H______.com, ______ 218), "______" (G______ [Média de presse écrite], 1er février 2018), "______" (E______ [Média de presse écrite], 1er février 2018), "______" (I______ [Média de presse écrite], ______ 2018). Même s'il avait pu, à quelques reprises, exposer sa position, ces articles avaient eu un effet dévastateur, tant sur le plan professionnel que privé, ce qui avait eu un impact sur sa réputation.

f.a. Par ordonnance pénale du 21 octobre 2019, le Ministère public a condamné A______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende, avec sursis - sous déduction de 10 jours-amende correspondant à 10 jours de détention avant jugement -, pour abus d'autorité et infraction à l'article 33 al. 1 let. a LArm, ainsi qu'à une amende à titre de sanction immédiate. Il l'a, en outre, condamné au paiement des deux tiers des frais de la procédure.

f.b. Par suite de l'opposition formée par A______ à l'ordonnance pénale, le Ministère public a renvoyé la cause devant le Tribunal de police, qui a confirmé la condamnation, par jugement JTDP/314/2020 du 3 mars 2020. A______ a formé appel (cf. let. E. infra).

g.a. Par ordonnance séparée, le Ministère public a classé la procédure en tant qu'elle portait sur le vol de la montre. Il a toutefois condamné le prévenu à un tiers des frais de la procédure pénale, pour ce volet (arrêtés à CHF 1'460.-), et refusé de lui allouer une indemnité.

h. Le recours formé par A______ contre l'ordonnance de classement, en tant qu'elle le condamnait à un tiers des frais de la procédure pour vol et refusait de lui allouer toute indemnité, a été admis par arrêt ACPR/346/2020 du 27 mai 2020 de la Chambre de céans. Les frais de la procédure pénale en lien avec la prévention de vol ont été laissés à la charge de l'État, le précité n'ayant pas, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de ce volet de la procédure. La cause a été retournée au Ministère public pour qu'il statue sur la demande d'indemnités sur la base de l'art. 429 CPP.

i. Devant le Ministère public, A______ a confirmé, par lettre de son conseil, le 6 juillet 2020, que ses souffrances psychiques étaient intenses. À cet égard, il a produit deux certificats médicaux, l'un, du 9 juin 2020, établi par le Dr J______, spécialiste en médecine interne, l'autre émanant de la Dresse K______, spécialiste en psychiatrie-psychothérapie, du 30 juin 2020.

Le premier médecin atteste avoir dû recevoir beaucoup plus souvent A______ à la suite de son arrestation et emprisonnement en 2018. "D'emblée", il lui avait prescrit un anxiolytique et un antidépresseur en raison des importants troubles du sommeil, une tristesse intense le conduisant à des idées noires et un profond sentiment d'injustice. "Il tenait" en se disant que sa mère, invalide, n'avait que lui pour l'aider. Sa santé physique s'était altérée par des poussées d'hypertension artérielle difficiles à réguler et de grandes fluctuations de poids, allant jusqu'à une obésité morbide.

Le second médecin certifie suivre A______ depuis le 11 mars 2020 en raison d'un stress chronique, après une détention "reconnue injustifiée" et une suspension de son travail comme policier. Le patient avait développé un syndrome de stress post-traumatique ("PTSD") avec reviviscences envahissantes, cauchemars répétitifs, sentiment de détresse, perte de motivation et d'intérêt, idées noires et difficultés à se concentrer. Il avait développé un comportement d'évitement, en particulier à l'égard de ses collègues, et, pour compenser son mal-être, s'était mis à manger de manière compulsive ce qui avait conduit à une importante prise de poids. Il avait des difficultés à s'endormir et son sommeil était perturbé. Il avait le sentiment d'être inadapté à presque chaque situation de la vie quotidienne, ce qui provoquait angoisse et irritabilité. À la date de l'attestation, il présentait toujours une symptomatologie anxio-dépressive, mais dans le cadre d'un trouble dépressif récurrent nécessitant un traitement médicamenteux psychotrope (antidépresseur et anxiolytique). Il n'arrivait pas à fonctionner comme avant, était triste, démotivé et apathique. Il ne comprenait pas pourquoi il ne pouvait plus continuer à faire son métier. Il présentait ainsi des séquelles, par suite de l'emprisonnement, du "procès judiciaire" et de la suspension de son travail.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public a procédé à seize "ajustements" sur les frais de défense invoqués par A______. Il a, en particulier, soustrait le temps effectif des déplacements des avocats, pour les remplacer par un forfait (soit : trois fois CHF 50.- pour le chef d'étude, quatre fois CHF 35.- pour les collaboratrices et deux fois CHF 20.- par les avocates stagiaires), et supprimé les postes (lettres et communications) concernant la commandante de la police, cette activité n'ayant aucun lien avec la procédure. Ce faisant, il a arrêté à CHF 18'621.90 (frais de copie inclus) les frais de défense de A______ pour l'intégralité de l'instruction.

Le Ministère public a ensuite retenu que, en termes d'auditions, l'instruction avait porté de manière prépondérante sur la prévention d'abus d'autorité. Seules trois auditions avaient porté exclusivement sur les circonstances du vol, les cinq autres ne les évoquant que partiellement. La majorité des actes d'instruction ordonnés avaient porté sur l'abus d'autorité et, dans une moindre mesure, l'infraction à la LArm. Partant, le volet se rapportant à l'infraction de vol avait représenté un tiers de l'instruction de la procédure dans son ensemble. Dès lors, l'indemnité due à A______ au titre de l'art. 429 al. 1 let. a CPP était arrêtée à CHF 6'207.30, soit 1/3 de CHF 18'621.90.

S'agissant du tort moral, le Ministère public a retenu qu'aucun des critères dégagés par la jurisprudence n'était réalisé en l'espèce, A______ n'ayant pas subi une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, les inconvénients décrits étant inhérents à toute poursuite pénale. L'instruction avait été menée sans retard et le prévenu avait été détenu le temps strictement nécessaire à l'administration des premiers éléments de preuve. Ni son arrestation ni les perquisitions n'avaient été effectuées en public. Le Ministère public n'avait fait aucune communication au sujet de cette procédure, seules les charges retenues contre un policier ayant été confirmées. Il ressortait en revanche des coupures de presse produites que le conseil de A______ s'était largement exprimé dans la presse au sujet des faits. La médiatisation de la procédure avait été locale et relative, puisque l'identité du prévenu n'avait pas été dévoilée, que le cercle des personnes ayant pu faire le lien entre les faits exposés et A______ était circonscrit et que le précité n'alléguait pas que ses proches eussent cru à sa culpabilité. En outre, rien n'établissait qu'il aurait présenté une importante souffrance psychique pendant la durée de la procédure, n'ayant consulté le médecin psychiatre que le 11 mars 2020, et aucun élément médical ne confirmait que ses troubles auraient spécifiquement résulté de la prévention de vol.

Enfin, aucune indemnité n'était due pour la détention injustifiée, qui avait été imputée sur la peine infligée par le Tribunal de police.

D. a. Dans son recours, A______ critique le coefficient retenu par le Ministère public pour ses frais de défense. Le dossier montrait que l'instruction contradictoire avait porté de manière prépondérante sur la disparition de la montre, et l'activité de son avocat était centrée sur celle-ci. Il estime par ailleurs non justifiée l'application de forfaits aux déplacements d'un avocat de choix et considère que les écrits et téléphones à la commandante de la police étaient en lien avec la procédure pénale, puisqu'il avait été suspendu de ses fonctions le jour de sa mise en liberté. Il s'en remet à justice s'agissant des autres postes écartés de la note d'honoraires.

L'indemnité pour les dix jours de détention injustifiée avait été écartée à tort. Il avait formé appel contre le jugement du Tribunal de police, qui ne traitait pas du tout du vol.

S'agissant du tort moral, les conséquences professionnelles de la procédure pénale étaient dévastatrices. Toujours suspendu, il devait désormais se défendre à un entretien de service. Il avait fait l'objet d'une exposition médiatique et avait apporté la preuve, par la production de deux certificats médicaux, de la sévérité de ses troubles, ce qui justifiait le versement d'un montant "très supérieur" au montant journalier de l'indemnité pour la détention.

À l'appui de son recours, il produit diverses pièces nouvelles, parmi lesquelles plusieurs félicitations de sa hiérarchie, entre 2014 et 2016, la convocation à un entretien de service, le 17 juin 2020, et un certificat médical établissant son incapacité totale de travail du 1er juillet au 31 août 2020. À teneur de la convocation à l'entretien de service, A______ allait être entendu sur son "inaptitude à remplir les exigences de [son] poste, s'agissant de [son] comportement du ______ 2018" ayant donné lieu à une condamnation pénale pour abus d'autorité. Il devrait en outre s'expliquer sur le fait d'avoir fait un "copier-coller", le 22 juillet 2015, d'informations contenues dans un procès-verbal rédigé par lui, vers une page internet pour utiliser un correcteur orthographique; sur le fait de s'être, le 4 février 2017, rendu à l'étranger en avion alors qu'il était en incapacité de travail; ainsi que sur l'insuffisance de ses prestations au sein de la police sous l'angle des différents entretiens d'évaluation et de développement jusqu'en août 2015, qui démontraient "la persistance de lacunes théoriques et pratiques".

b. Le Ministère public conclut au rejet du recours. Les faits nouvellement allégués, s'agissant de l'entretien de service, n'étaient pas de nature à modifier la décision querellée. L'indemnisation pour la détention subie ne se justifiait toujours pas. Une indemnité pour tort moral n'était pas due, aucun élément ne venant étayer la gravité de la souffrance alléguée par A______ ni le lien entre les troubles présentés et sa prévention pour vol. Les répercussions professionnelles alléguées n'étaient pas non plus établies, la suspension de ses fonctions étant fondée sur des motifs autres que l'infraction de vol, puisqu'il se voyait reprocher une insuffisance dans ses prestations de policier depuis 2013. Au surplus, il était tout à fait conforme à la jurisprudence de corréler l'indemnité des frais de défense à la part des frais auxquels le recourant avait été condamné pour les infraction d'abus d'autorité et à la LArm, la forfaitisation des déplacements était conforme aux règles posées par la Cour de justice et il se justifiait d'écarter les écrits et entretiens téléphoniques avec la commandante de la police, le recourant n'exposant au demeurant pas leur contenu.

c. A______ produit, après l'échéance du délai de recours, à titre de faits nouveaux, l'arrêt rendu par la Chambre pénale d'appel et de révision (ci-après, CPAR) par suite de son appel contre le jugement du Tribunal de police (cf. let. E. infra), ainsi que le recours formé par le Ministère public au Tribunal fédéral. Il a également produit des certificats médicaux constatant le maintien de son incapacité totale de travail, en dernier lieu jusqu'au 30 novembre 2020.

E. a. Par arrêt AARP/323/2020 du 18 septembre 2020, la CPAR a partiellement admis l'appel formé par A______ contre le jugement du Tribunal de police, l'a acquitté du chef d'abus d'autorité, l'a reconnu coupable d'infraction à l'art. 33 al. 1 et 2 LArm par négligence et condamné, à ce titre, à une amende de CHF 500.-, sous déduction de 10 jours-amende, correspondant aux 10 jours de détention avant jugement.

En outre, la CPAR a :

-          alloué CHF 12'952.75 (TVA comprise) à A______ au titre d'indemnité pour l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (art. 429 al. 1 let. a CPP),

-          pris acte de ce qu'il renonçait à une indemnisation pour tort moral (art. 429 al. 1 let. c CPP) et

-          l'a condamné au tiers des frais de la procédure de première instance et au quart des frais d'appel, le solde étant laissé à la charge de l'État.

S'agissant des frais de défense de A______, au sens de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, la CPAR a relevé que "dans son courrier du 5 décembre 2018 adressé au MP, par lequel une indemnisation de CHF 24'250.40 était demandée après l'annonce du classement à venir, l'ancien conseil de l'appelant avait relevé que les audiences avaient été essentiellement, voire exclusivement consacrées à la question du vol. [...] La totalité des six audiences devant le MP où l'appelant a été assisté par un conseil ou un de ses collaborateurs a duré de l'ordre de 14 heures, dont six heures et demi avec la présence du conseil. [...] Selon le relevé d'activités, outre les heures de préparation d'audience et d'étude du dossier, jusqu'au 5 décembre 2018, de multiples contacts sont intervenus avec le client, les conférences ont duré environ neuf heures, ceci sans compter les heures des collaborateurs, essentiellement des emails ou des téléphones, outre la participation à des audiences. Il paraît raisonnable d'admettre qu'un quart de l'activité jusqu'au 5 décembre a porté sur la question de l'abus d'autorité et de l'infraction à la LArm. [...]" (consid. 6.2.). La CPAR a ainsi admis la demande d'indemnisation à concurrence de CHF 8'083.46 pour les frais de défense devant le Ministère public pour le volet de l'abus d'autorité, représentant un tiers de la note d'honoraires du 5 décembre 2018, dès lors qu'il était "en lien avec la répartition des frais mis à charge de l'appelant" (consid. 6.2.).

b. Le Ministère public a formé un recours - actuellement pendant - au Tribunal fédéral contre cet arrêt. Il y conclut à la condamnation de A______ pour abus d'autorité et infraction à l'art. 33 al. 1 let. a LArm. S'agissant des frais de défense accordés au précité, il estime que, dans la mesure où ce dernier aurait dû être reconnu coupable des infractions précitées, aucune indemnité ne lui était due (cf. recours au TF, p. 14).

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant reproche au Ministère public les réductions opérées sur sa demande d'indemnisation pour ses frais de défense, chiffrée à CHF 24'250.40.

2.1. Aux termes de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, le prévenu acquitté totalement ou en partie ou au bénéfice d'un classement a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure. L'indemnité concerne les dépenses du prévenu pour un avocat de choix (ATF 138 IV 205 consid. 1). Elle couvre en particulier les honoraires de ce conseil, à condition que le recours à celui-ci procède d'un exercice raisonnable des droits de procédure. Selon le message du Conseil fédéral, l'État ne prend en charge les frais de défense que si l'assistance d'un avocat était nécessaire compte tenu de la complexité de l'affaire en fait ou en droit et que le volume de travail et donc les honoraires étaient ainsi justifiés (Message du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, FF 2006 1313 ch. 2.10.3.1).

2.2. La Chambre de céans applique un tarif horaire de CHF 450.- (ACPR/112/2014 du 26 février 2014, renvoyant au tarif "usuel" de CHF 400.- ressortant de la SJ 2012 I 175; cf. aussi ACPR/279/2014 du 27 mai 2014, ACPR/21/2014 du 13 janvier 2014, ACPR/442/2012 du 17 octobre 2012) ou de CHF 400.- (ACPR/282/2014 du 30 mai 2014), notamment si l'avocat concerné avait lui-même calculé sa prétention à ce taux-là (ACPR/377/2013 du 13 août 2013), de CHF 350.- pour un collaborateur (ACPR/178/2015 du 23 mars 2015) et de CHF 150.- pour un avocat-stagiaire (AARP/65/2017 du 23.02.2017 consid. 5.1).

2.3. En l'espèce, la Chambre de céans a retenu, dans son précédent arrêt, que l'assistance d'un avocat était nécessaire au recourant.

S'agissant des frais de déplacements, s'il est admis que le temps qui leur est consacré par l'avocat soit rémunéré à un tarif inférieur que l'activité principale (ATF 142 IV 163 consid. 3.1.3 p. 169 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_796/2016 du 15 mai 2017 consid. 2.2.2) et peut donc être indemnisé sur la base d'un forfait, celui adopté ici par le Ministère public (CHF 50.- pour le chef d'étude, CHF 35.- pour le collaborateur et CHF 20.- pour l'avocat stagiaire) est trop bas pour un conseil de choix. Le recourant sera dès lors indemnisé à hauteur de CHF 450.- pour les trois déplacements du chef d'étude (3x CHF 150.-, soit une différence de CHF 300.-), de CHF 300.- pour les quatre déplacements des collaboratrices (4x CHF 75.-, soit une différence de CHF 160.-) et de CHF 100.- pour les deux déplacements des avocates stagiaires (2x CHF 50.-, soit une différence de CHF 60.-). Il convient donc d'ajouter CHF 561.60 (TVA à 8% incluse) au montant des frais de défense admis par le Ministère public.

Au surplus, c'est à bon droit que le Ministère public a retranché de la note d'honoraires du conseil du recourant les postes relatifs aux lettres à la commandante de la police et aux entretiens téléphoniques avec cette dernière, rien ne permettant d'établir que cette activité aurait été en lien avec la procédure pénale.

Le recourant s'étant rapporté à justice s'agissant des autres postes écartés de la note d'honoraires de son conseil, ils ne seront pas examinés, le recours n'étant pas motivé sur ce point (art. 385 al. 1 let. b CPP).

Il s'ensuit que la note d'honoraires de CHF 24'250.40 doit être ramenée à CHF 19'183.50 (CHF 18'621.90 + 561.60) pour l'entier de la procédure devant le Ministère public, frais de copie (CHF 703.-) et TVA inclus.

La prise en compte d'un tiers seulement des frais d'avocat pour la prévention de vol entre en contradiction avec la décision - ultérieure - de la CPAR, laquelle a retenu que l'activité jusqu'au 5 décembre 2018 avait porté pour "un quart" sur la question de l'abus d'autorité et de l'infraction à la LArm et indemnisé ce dernier à raison d'un tiers de ses frais de première instance par suite de son acquittement du chef de l'abus d'autorité (AARP/323/2020 consid. 6.2.). Selon le raisonnement précité, le volet relatif au vol a représenté trois quarts de la procédure devant le Ministère public. Cet arrêt fait certes l'objet d'un recours actuellement pendant devant le Tribunal fédéral. Toutefois, le Ministère public a conclu, devant l'autorité fédérale, à ce que le recourant ne soit mis au bénéfice d'aucune indemnité pour ses frais de défense en lien avec les volets de l'abus d'autorité et de violation de la LArm, s'il était reconnu coupable de ces deux infractions. La répartition des frais de défense entre les trois volets n'est ainsi pas remise en question. Par conséquent, le coefficient précité peut être confirmé dans le cadre du présent recours. Partant, l'indemnisation des frais de défense du recourant pour le volet relatif au vol sera arrêtée à CHF 14'387.60.- (soit 3/4 de CHF 19'183.50), TVA à 8% et frais de copie compris.

3.             Le recourant reproche à l'ordonnance querellée de lui refuser l'indemnisation à hauteur de CHF 2'000.- pour les dix jours de détention injustifiée et à hauteur de CHF 50'000.- pour le tort moral subi en lien avec la procédure.

3.1. Selon l'art. 429 al. 1 let. c CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéfice d'une ordonnance de classement, il a droit à une réparation du tort moral subi en raison d'une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté.

L'art. 429 CPP fonde un droit à des dommages et intérêts et à une réparation du tort moral résultant d'une responsabilité causale de l'État. La responsabilité est encourue même si aucune faute n'est imputable aux autorités. L'État doit réparer la totalité du dommage qui présente un lien de causalité avec la procédure pénale, au sens du droit de la responsabilité civile (ATF 142 IV 237 consid. 1.3.1 p. 239). Le lien de causalité s'apprécie selon les principes de la causalité naturelle et adéquate et selon le degré de la haute vraisemblance (arrêt du Tribunal fédéral 6B_928/2014 du 10 mars 2016 consid. 2, non publié in ATF 142 IV 163 et la référence citée).

3.2. Lorsque, du fait de la procédure, le prévenu a subi une atteinte particulièrement grave à ses intérêts personnels au sens des art. 28 al. 2 CC ou 49 CO, il aura droit à la réparation de son tort moral. L'intensité de l'atteinte à la personnalité doit être analogue à celle requise dans le contexte de l'art. 49 CO (arrêt du Tribunal fédéral 6B_928/2014 du 10 mars 2016 consid. 5.1, non publié in ATF 142 IV 163 et la référence citée).

L'indemnité pour tort moral sera régulièrement allouée si le prévenu s'est trouvé en détention provisoire ou en détention pour des motifs de sûreté. Outre la détention, peut constituer une grave atteinte à la personnalité, par exemple, une arrestation ou une perquisition menée en public ou avec un fort retentissement médiatique, une durée très longue de la procédure ou une importante exposition dans les médias, ainsi que les conséquences familiales, professionnelles ou politiques d'une procédure pénale, de même que les assertions attentatoires aux droits de la personnalité qui pourraient être diffusées par les autorités pénales en cours d'enquête. En revanche, il n'y a pas lieu de prendre en compte les désagréments inhérents à toute poursuite pénale comme la charge psychique que celle-ci est censée entraîner normalement chez une personne mise en cause (ATF 143 IV 339 consid. 3.1. p. 342 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_928/2014 précité consid. 5.1 non publié aux ATF 142 IV 163 et les références citées).

L'ampleur de la réparation morale dépend avant tout de la gravité des souffrances physiques ou psychiques consécutives à l'atteinte subie par l'intéressé et de la possibilité d'adoucir sensiblement, par le versement d'une somme d'argent, la douleur morale qui en résulte. Sa détermination relève du pouvoir d'appréciation du juge. En raison de sa nature, l'indemnité pour tort moral, qui est destinée à réparer un dommage qui ne peut que difficilement être réduit à une simple somme d'argent, échappe à toute fixation selon des critères mathématiques, de sorte que son évaluation en chiffres ne saurait excéder certaines limites. L'indemnité allouée doit toutefois être équitable (ATF 130 III 699 consid. 5.1 p. 704 s.; cf. également ATF 141 III 97 consid. 11.2 p. 98).

3.3. Selon la jurisprudence, un montant de 200 fr. par jour en cas de détention injustifiée de courte durée constitue une indemnité appropriée, dans la mesure où il n'existe pas de circonstances particulières qui pourraient fonder le versement d'un montant inférieur ou supérieur (arrêt du Tribunal fédéral 6B_909/2015 du 22 juin 2016 consid. 2.2.1). Le taux journalier n'est qu'un critère qui permet de déterminer un ordre de grandeur pour le tort moral. Il convient ensuite de corriger ce montant compte tenu des particularités du cas (durée de la détention, retentissement de la procédure sur l'environnement de la personne acquittée, gravité des faits reprochés, etc.) (143 IV 339 consid. 3.1 p. 342).

Aux termes de l'art. 51 CP, le juge impute sur la peine la détention avant jugement subie par l'auteur dans le cadre de l'affaire qui vient d'être jugée ou d'une autre procédure. Un jour de détention correspond à un jour-amende. La méthode de calcul est imposée par le législateur (arrêts du Tribunal fédéral 6B_389/2018 du 6 septembre 2018 consid. 1.1 ; 6B_671/2016 du 17 mai 2017 consid. 1.3). Lorsque l'auteur n'est condamné qu'à une amende (art. 106 CP), certains auteurs préconisent que le juge applique l'art. 51 CP par analogie, le taux de conversion relatif à un jour de détention correspondant à la division du montant de l'amende par le nombre de jours fixés au titre de peine privative de liberté de substitution (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), Code pénal - Petit commentaire, 2ème éd., Bâle 2017, n. 5 ad art. 51 CP).

3.4. En l'espèce, les dix jours de détention avant jugement subis par le recourant ont été, par l'arrêt AARP/323/2020 précité, intégralement imputés sur l'amende pour infraction à l'art. 33 LArm. Le recourant n'ayant pas formé recours contre cet arrêt, cette imputation apparaît définitive, même en cas d'admission du recours formé par le Ministère public au Tribunal fédéral, laquelle n'aurait au demeurant pas de conséquence favorable pour le recourant.

L'imputation de la détention avant jugement sur la peine infligée par l'arrêt de la CPAR fait ainsi barrage au versement d'une indemnité au titre de la détention injustifiée. Partant, le recours est infondé sur ce point.

3.5. En revanche, le Ministère public ne peut être suivi lorsqu'il considère que le recourant n'a pas subi d'atteinte particulièrement grave à ses intérêts personnels en raison de la procédure pénale.

Il ressort au contraire des attestations médicales produites, qu'il a souffert d'une dépression, pour laquelle une médication (antidépresseurs et anxiolytiques) lui a été prescrite "d'emblée" par son médecin traitant, à la suite de son arrestation et emprisonnement, en raison d'importants troubles du sommeil, d'une tristesse intense le conduisant à des idées noires et d'un profond sentiment d'injustice. Que le recourant n'ait consulté un psychiatre que deux ans après les faits, en mars 2020, n'est pas de nature à diminuer l'importance de l'atteinte psychique, la psychiatre ayant constaté qu'il avait développé un syndrome de stress post-traumatique pour avoir été détenu et accusé à tort. Il présentait encore, deux ans plus tard, une symptomatologie anxio-dépressive, désormais dans le cadre d'un trouble dépressif récurrent. La santé physique du recourant a également été atteinte, son médecin traitant ayant mentionné des poussées d'hypertension difficiles à réguler et d'importantes fluctuations de poids, allant jusqu'à l'obésité morbide.

Il y a également lieu de retenir que la suspension du recourant de sa fonction de policier est en lien avec la présente procédure pénale. Si la convocation à un entretien de service mentionne certes d'autres griefs ("copier/coller" vers un site de correction orthographique, le voyage en avion durant un congé maladie, l'insuffisance de ses prestations au sein de la police et la persistance de lacunes théoriques et pratiques), il n'en demeure pas moins que, jusqu'à son arrestation, le 24 janvier 2018, aucun de ces reproches n'avait motivé la suspension de ses fonctions, qui n'a été prononcée qu'à sa sortie de détention provisoire. La procédure pénale a dès lors indéniablement eu une importante répercussion sur sa situation professionnelle.

En revanche, si les articles de presse ont mentionné qu'un policier était prévenu du vol d'une montre, le recourant n'allègue pas que son nom aurait été cité en toutes lettres, de sorte que seul un petit nombre de personnes est parvenu à l'identifier. La quasi-totalité des articles cités ont paru dans la presse locale. Seul un compte rendu a paru sur un site international, mais, dans la mesure où il visait le cercle des professionnels et amateurs de montres, on ne saurait retenir que cette parution aurait gravement sali la réputation du recourant. Ce dernier n'a donc pas subi une exposition médiatique telle à constituer une atteinte particulièrement grave à sa personnalité.

La prévention de vol a été classée huit mois après l'arrestation du recourant et la procédure a duré, jusqu'à l'arrêt de la CPAR, deux ans et demi.

C'est donc en raison de l'importante atteinte à sa santé et de la suspension de ses fonctions de policier, laquelle a entraîné d'importantes souffrances morales, que le recourant peut prétendre à une indemnité en réparation du tort moral subi, dont il y a lieu de déterminer le montant.

4. 4.1. Toute comparaison avec d'autres affaires doit intervenir avec prudence, dès lors que le tort moral touche aux sentiments d'une personne déterminée dans une situation donnée et que chacun réagit différemment face au malheur qui le frappe. Une comparaison avec d'autres cas similaires peut cependant, suivant les circonstances, constituer un élément d'orientation utile (arrêt du Tribunal fédéral 6B_118/2016 du 20 mars 2017 consid. 6.1 et les références citées).

4.2. Dans l'arrêt 6B_118/2016 précité, le Tribunal fédéral a estimé qu'une indemnité de CHF 1'500.- était insuffisante pour un policier acquitté - dans une procédure pénale ayant duré huit ans - de l'accusation de dénonciation calomnieuse, séquestration et faux témoignage, qui, après avoir été placé en détention provisoire, avait été atteint dans sa santé et dont la carrière professionnelle avait été prétéritée (consid. 6.2.3). Après le renvoi à la Cour fédérale des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral, le policier a reçu l'indemnité requise, soit CHF 10'000.- (jugement du Tribunal pénal fédéral SK.2017.18 du 16 octobre 2017).

4.3. En l'espèce, le recourant a renoncé, devant la CPAR, à requérir une indemnité pour tort moral en lien avec la prévention d'abus d'autorité dont il a été acquitté. Seule entre dès lors en ligne de compte une indemnité pour le volet relatif au vol. Au vu de tous les éléments qui ont été retenus ci-dessus et de l'importance du volet de la prévention pour vol, il paraît équitable de lui allouer une indemnité de CHF 5'000.- pour l'atteinte à ses intérêts personnels subis de ce chef, avec intérêt à 5% l'an à compter du 24 janvier 2018 (ATF 131 III 12 consid. 9.1 p. 22).

5. Partiellement fondé, le recours doit être admis. Partant, l'ordonnance querellée sera annulée et le recourant mis au bénéfice des indemnités arrêtées aux considérants précédents.

6.             L'admission du recours ne donne pas lieu à la perception de frais (art. 428 al. 1 CPP).

7.             Le recourant n'ayant ni conclu à une indemnité pour ses frais de recours, ni a fortiori justifié de ses frais de défense, l'indemnité selon l'art. 429 al. 1 let. a CPP sera fixée à CHF 900.- (TVA à 7.7 % incluse), pour un recours de 4 pages et deux lettres de quelques lignes chacune.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Admet partiellement le recours.

Annule l'ordonnance querellée et, statuant à nouveau, alloue à A______, à la charge de l'État :

- une indemnité de CHF 14'387.60.- (TVA à 8% incluse), au titre de dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure devant le Ministère public (art. 429 al. 1 let. a CPP), et

- une indemnité de CHF 5'000.-, avec intérêts à 5% l'an dès le 24 janvier 2018, en réparation du tort moral (art. 429 al. 1 let. c CPP).

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Alloue à A______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 900.-, TVA (7.7% incluse) pour ses frais de recours.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant (soit pour lui son conseil) et au Ministère public.

Le communique, pour information, à la Chambre pénale d'appel et de révision.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Daniela CHIABUDINI, juges; Monsieur Julien CASEYS

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).