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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/14663/2020

AARP/207/2023 du 21.06.2023 sur JTDP/1422/2022 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : PORNOGRAPHIE DURE;INTERDICTION D'EXERCER UNE PROFESSION
Normes : CP.197.al4; CP.197.al5; CP.67
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/14663/2020 AARP/207/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 12 juin 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, comparant par Me B______, avocate, ______, Genève,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/1422/2022 rendu le 21 novembre 2022 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 21 novembre 2022, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de pornographie ayant pour contenu des actes d'ordre sexuel effectifs avec des mineurs (art. 197 al. 5 1ère et 2ème phr. du Code pénal suisse [CP]), l'a condamné à une peine privative de liberté de huit mois, avec sursis et règle de conduite pendant quatre ans, et lui a interdit à vie l'exercice de toute activité professionnelle et non professionnelle organisée impliquant des contacts réguliers avec des mineurs. Le TP l'a en outre condamné aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 21'654.-, y compris un émolument de jugement de CHF 900.-, et a confisqué deux objets séquestrés suite à une perquisition chez le précité.

b. A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant à son acquittement, à la restitution de l'ensemble de son matériel informatique séquestré, excepté un disque dur C______ (chiffre 5 de l'inventaire n° 1______), et à la mise à charge de l'État de l'ensemble des frais de procédure. Il requiert l'administration de diverses preuves (cf. infra consid. C.a.a).

Le Ministère public (MP) conclut au rejet de l'appel.

c. Selon l'acte d'accusation du 22 juin 2022, il est reproché ce qui suit à A______ :

Au cours des années 2014 à 2019, il a visionné des images à caractère pédopornographique et stocké informatiquement de tels fichiers à des fins de consommation personnelle. Entre le 4 janvier et le 6 avril 2020, ainsi qu'entre le 31 juillet et le 1er août 2020, il a en outre téléchargé via internet et un logiciel de partage pair-à-pair (peer-to-peer) plusieurs centaines de fichiers à caractère pédopornographique depuis des adresses IP liées à la société D______ Sàrl.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a.a. A______, né le ______ 1965, est de nationalité suisse. Il réside dans une maison individuelle au no. ______, chemin 2______ à E______ [GE]. D______ Sàrl, dont il est l'unique associé-gérant depuis sa fondation le ______ 2006 et qui est spécialisée dans la vente d'articles de jouets et de ______, en particulier par le truchement d'internet, est sise à la même adresse.

a.b. Le précité est le père de F______, né le ______ 2001, qui souffre d'une forme particulièrement sévère d'autisme et ne peut pas s'exprimer verbalement, ni lire ou écrire. Il perçoit à ce titre une rente d'invalidité extraordinaire (degré d'invalidité de 100%), une allocation pour impotent (degré grave) et une contribution d'assistance de l'assurance-invalidité. Il vit en permanence avec son père et passe une grande partie de ses journées sur son ordinateur ou sa tablette informatique, où il joue à des jeux-vidéos pour enfants et visionne des vidéos sur YouTube. Depuis le mois de septembre 2019, G______ assiste A______ dans la prise en charge de son fils quatre jours par semaine.

a.c. A______ est également le père de deux enfants, nés les ______ 1998 et ______ 2003, qui résident principalement avec leur mère. Au cours des années 2014 à 2019, ceux-ci venaient fréquemment passer du temps avec leur père durant les weekends et leurs vacances. En revanche, ils ne sont pas venus rendre visite à ce dernier pendant le printemps 2020, afin de protéger F______ d'un risque de contamination par le SARS-CoV-2.

b.a. En 2011, A______ a acquis d'occasion un ordinateur intégrant un disque dur de type C______. Celui-ci a principalement été utilisé au cours des années 2014 à 2016 et est resté en activité jusqu'en 2019, lorsque son second fils, H______, a démonté ledit ordinateur pour en récupérer certaines pièces.

b.b. Des artefacts datant de 2016 de dix fichiers à caractère pédopornographique ont été retrouvés sur ce disque dur, notamment dans le cache du navigateur "I______". Il s'agit notamment des fichiers suivants :

-        C:\Documents and Settings\______,

-        F:\Very Good!! ______,

-        C:/Documents and Settings/______,

-        F:/______.

c. Du 15 avril 2019 au 2 juin 2020, A______ a sous-loué à J______ un appartement situé au rez-inférieur de la maison où il habite et séparé de son domicile, situé au-dessus. Celle-ci y résidait avec sa compagne, K______, et le fils de cette dernière, âgé d'une dizaine d'années. Tous trois partageaient la même connexion internet que A______ et F______, celle-ci étant distribuée par le biais d'un réseau sans-fil protégé par un mot de passe. Après le départ des prénommées, l'appartement qu'elles occupaient n'a pas été à nouveau sous-loué.

d.a. Au cours de la période du 4 janvier au 6 avril 2020, la connexion internet fournie par L______, rattachée à D______ Sàrl et dont A______ a la gestion, a été utilisée pour télécharger de multiples fichiers au contenu pédopornographique par le biais du système de partage de fichier pair-à-pair M______. L'essentiel de ces fichiers a fait l'objet d'un téléchargement partiel ou total au cours des nuits du vendredi au samedi, du samedi au dimanche ou du dimanche au lundi, soit les 4, 5, 11, 12, 18 et 19 janvier 2020, les 1er, 2, 3, 21, 22 et 23 février 2020, les 14, 15, 16, 21 et 22 mars 2020 et les 4, 5 et 6 avril 2020. Leur taille oscille pour l'essentiel entre plusieurs dizaines et plusieurs centaines de mégabytes.

d.b. Les fichiers qui ont fait l'objet d'un téléchargement ou d'une tentative de téléchargement au cours de la période donnée sont au nombre de 514. Une nette majorité des fichiers est décrite comme comportant un caractère pédopornographique, avec notamment l'emploi régulier du sigle "pthc", signifiant "pre-teen harcore", ou la mention de la présence d'enfants associée à divers termes ayant une connotation pornographique. Certaines désignations ne font toutefois état que d'un caractère pornographique et celles de quelques rares fichiers n'ont pas de connotation sexuelle.

Ainsi, les fichiers "[film français] 3______.avi" et "[film français] 4______.avi." ont tous deux été partiellement téléchargés le 22 février 2020 à 6h28 du matin heure suisse (4h28 UTC), moins d'une heure avant le téléchargement, à 7h35, par la même connexion internet, du fichier "______.mp4".

Le 23 février 2020, à 8h28 du matin, cette même connexion internet a téléchargé le fichier "______ – VERY GOOD !! ______avi.", puis, à 10h05, les fichiers "[film français] 5______.avi" et, à nouveau, "[film français] 4______.avi.", puis, à 10h47, les fichiers "______.mp4" et "______.avi".

Le 14 mars 2020, le fichier "[film français] 6______.avi" a commencé à être téléchargé à 11h42, cinq minutes après le téléchargement du fichier "! pthc open list file if you want exclsuive video (______.avi" et moins de six minutes avant "______.avi".

Le fichier "[chanson] 7______.avi" a en outre été téléchargé à cinq reprises des jours différents.

d.c. Les 31 juillet et 1er août 2020, la connexion internet rattachée à D______ Sàrl a à nouveau été utilisée pour télécharger plusieurs dizaines de fichiers à caractère pédopornographique, dont certains portent une désignation identique à certains fichiers déjà téléchargés entre le 4 janvier et le 6 avril 2020. Le fichier "[chanson] 7______.avi" a à nouveau été téléchargé le 31 juillet, puis le 1er août 2020.

e.a. Le 30 juin 2020, la Police judiciaire fédérale de l'Office fédéral de la police (FEDPOL) a transmis à la Police cantonale genevoise des informations selon lesquelles des fichiers à caractère pédopornographiques avaient été téléchargés par la connexion internet précitée au cours de la période du 4 janvier au 6 avril 2020.

e.b. Le 24 août 2020, la police a perquisitionné le domicile de A______. Elle a saisi trois ordinateurs, six disques durs non-intégrés à un ordinateur et deux tablettes informatiques. Une carte SD a été laissée sur place. Deux des disques durs étaient défaillants et n'ont pu être analysés. Excepté le disque dur C______ susmentionné, aucun autre appareil informatique ne contenait de fichiers à caractère pédopornographique. L'ordinateurs situé dans le salon, de marque N______, contenait toutefois des traces de consultation de pages internet dont l'adresse comportait le terme "______", à savoir "______", "______" et "______".

f. Interrogé par la police, le MP et le TP, A______ a affirmé consulter du contenu pornographique par le biais d'internet plusieurs fois par semaine, mais contesté toute consultation et/ou téléchargement de fichiers pédopornographiques. Il a suggéré que ceux-ci avaient pu être réalisés par des personnes inconnues qui auraient piraté son réseau sans-fil ou, plus probablement, par ses sous-locataires. S'agissant des téléchargements réalisés les 31 juillet et 1er août 2020, soit après leur déménagement, il a avancé avoir entendu du bruit dans l'appartement inférieur, présumé inoccupé, et qu'il soupçonnait ses anciennes sous-locataires d'être revenues en utilisant un double des clés, étant entendu que l'appartement en question était partiellement meublé. Il n'avait cependant pas vérifié si ses suppositions étaient correctes. Il doutait que son fils F______ ou ses deux autres enfants eussent consulté de tels fichiers. Il a enfin précisé qu'il ne possédait que des connaissances limitées en informatique, malgré le fait qu'il gérait plusieurs sites internet en lien avec l'exploitation de son commerce.

C. a.a. Par courrier du 4 janvier 2023, A______ a requis l'administration de preuves complémentaires. L'audition de J______ et de K______, la production d'extraits de leurs casiers judiciaires, la production d'un rapport d'analyse complet du disque dur C______ et la réalisation d'une expertise psychiatrique ont été rejetées par ordonnance présidentielle de la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) du 23 février 2023. À l'inverse, l'audition de G______ a été admise. Celle-ci a postérieurement été remplacée par un rapport écrit daté du 9 mai 2023. Celui-ci fait état, d'une part, du quotidien difficile de A______ en lien avec sa situation de proche-aidant et, d'autre part, de la perception positive que G______ a du précité à l'aune des relations quasi-quotidiennes qu'ils entretiennent.

a.b. Entendu par la Chambre de céans le 16 mai 2023, A______ a à nouveau requis l'administration des quatre preuves susmentionnées, laquelle a derechef été rejetée. Il a à nouveau affirmé qu'il n'avait ni consulté ni téléchargé de fichiers à caractère pédopornographique et qu'il soupçonnait ses anciennes sous-locataires. Il a affirmé aimer tous les films drôles tels que "______" ou "______". En 2020, ses horaires étaient plus réguliers qu'à l'heure actuelle et il dormait pendant la nuit, au moment du téléchargement de la plupart des fichiers pédopornographiques reprochés. Il n'avait pas évoqué les faits objets de la procédure avec ses enfants car il avait craint de les accuser à tort s'agissant des fichiers retrouvés sur le disque dur C______. Eu égard enfin à la consultation de pages internet contenant le terme "______" sur l'ordinateur N______, elle n'était pas non plus de son fait.

b. Par la voix de son conseil, A______ a plaidé que, s'agissant des téléchargements en 2020, rien n'indiquait qu'il en soit l'auteur en lieu et place de ses anciennes sous-locataires ou d'autres personnes. Quant aux fichiers retrouvés sur le disque dur C______, il avait acquis celui-ci d'occasion et, en l'absence d'un rapport d'analyse détaillé permettant de déterminer quand lesdits fichiers avaient été téléchargés et/ou consultés, il n'était pas possible de lui imputer ces téléchargements et/ou consultations. En conséquence, un acquittement au bénéfice du doute s'imposait. Le seul fait qu'il ait proposé plusieurs explications alternatives aux téléchargements du contenu pédopornographique ne pouvait en tout cas lui être reproché.

D. A______ est divorcé. Il s'occupe en permanence de son fils F______ s'agissant de sa vie courante, le Service de protection de l'adulte réglant les aspects financiers.

Il perçoit de D______ Sàrl un salaire mensuel de CHF 1'990.-, le chiffre d'affaires de la société se situant annuellement entre CHF 120'000.- et CHF 150'000.. Au 2 septembre 2020, 49 actes de défaut de biens pour un total de CHF 207'606.56 étaient enregistrés à son encontre.

Son casier judiciaire suisse au 11 mai 2023 comporte une condamnation datée du 10 juin 2014 à un travail d'intérêt général de 120 heures ferme pour violation d'une obligation d'entretien au sens de l'art. 217 al. 1 CP.

A______ souffre par ailleurs d'une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO ou emphysème pulmonaire), qui réduit notablement ses capacités respiratoires.

E. MB______, défenseure d'office de A______, a déposé un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, six heures et 50 minutes (410 minutes) d'activité de cheffe d'étude hors débats d'appel, lesquels ont duré deux heures et 25 minutes (145 minutes).

Elle a été indemnisée pour 11 heures et 40 minutes eu égard à son travail relatif à la procédure préliminaire et de première instance.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves (ATF 148 IV 409 consid. 2.2 ; 145 IV 154 consid. 1.1 ; 127 I 38 consid. 2a).

Le principe de la libre-appréciation des preuves implique qu'il revient au juge de décider ce qui doit être retenu comme résultat de l'administration des preuves en se fondant sur l'aptitude des éléments de preuve à prouver un fait au vu de principes scientifiques, du rapprochement des divers éléments de preuve ou indices disponibles à la procédure, et sa propre expérience (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1295/2021 du 16 juin 2022 consid. 1.2) ; lorsque les éléments de preuve sont contradictoires, le tribunal ne se fonde pas automatiquement sur celui qui est le plus favorable au prévenu (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1295/2021 du 16 juin 2022 consid. 1.2 ; 6B_477/2021 du 14 février 2022 consid. 3.1 ; 6B_1363/2019 du 19 novembre 2020 consid. 1.2.3). Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe de la présomption d'innocence interdit cependant au juge de se déclarer convaincu d'un fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve recueillis laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence d'un tel fait ; des doutes abstraits ou théoriques, qui sont toujours possibles, ne suffisent en revanche pas à exclure une condamnation (ATF 148 IV 409 consid. 2.2 ; 145 IV 154 consid. 1.1 ; 144 IV 345 consid. 2.2.3.2 et 2.2.3.3 ; 138 V 74 consid. 7 ; 127 I 38 consid. 2a). Lorsque dans le cadre du complexe de faits établi suite à l'appréciation des preuves faite par le juge, il existe plusieurs hypothèses également probables, le juge pénal doit choisir la plus favorable au prévenu (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_477/2021 du 14 février 2022 consid. 3.2).

3. 3.1. Selon l'art. 197 al. 5 CP est punissable quiconque consomme ou obtient par voie électronique ou possède des objets ou représentations d'actes d'ordre sexuel effectifs avec des mineurs pour sa propre consommation.

La possession d'un contenu pornographique incluant des actes d'ordre sexuel avec des mineurs est constituée par la libre disposition sur ce contenu, soit notamment la possibilité de l'effacer (ATF 137 IV 208 consid. 4.1 ; B. ISENRING/M.A. KESSLER, Basler Kommentar StGB, 4ème éd. 2019, n. 52 ad art. 197). S'agissant de la réalisation d'une copie d'un fichier sur un disque dur, elle doit être qualifiée de fabrication (ATF 131 IV 16 consid. 1.4 ; S. TRECHSEL/C. BERTOSSA, Praxiskommentar StGB, 4ème éd. 2021, n. 15 ad art. 197 ; B. ISENRING/M.A. KESSLER, op. cit., n. 51 ad art. 197). Depuis le 1er juillet 2014, la consommation d'un contenu pédopornographique est également punissable en tant que telle (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1260/2017 du 23 mai 2018 consid. 2.1 ; AARP/237/2022 du 3 août 2022 consid. 2.2.1 ; AARP/6/2018 du 8 janvier 2018 consid. 2.5).

Pour qu'un contenu doive être considéré comme pornographique, il faut qu'il soit objectivement de nature à conduire à l'excitation sexuelle et que les personnes représentées agissent comme des objets sexuels et non comme des personnes douées de sensibilité (ATF 144 II 233 consid. 8.2.3 ; 133 IV 31 consid. 6.1.1 ; 131 IV 64 consid. 10.1.1). La notion d'actes d'ordre sexuel effectifs avec des mineurs fait quant à elle référence à la représentation de mineurs réels dans un contenu pornographique (arrêts du Tribunal fédéral 6B_304/2021 du 2 juin 2022 consid. 1.3.1 ; 6B_997/2018 du 25 février 2019 consid. 2.1.1 ; 1B_189/2018 du 2 mai 2018 consid. 3.2). Comme cela ressort du texte de l'art. 197 al. 5 CP, tout acte sexuel impliquant une personne âgée de moins de 18 ans est visé par cette norme (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1260/2017 du 23 mai 2018 consid. 2.1 ; AARP/241/2022 du 10 août 2022 consid. 2.2 ; AARP/6/2018 du 8 janvier 2018 consid. 2.5).

Sur le plan subjectif, l'art. 197 al. 5 CP consacre une infraction de nature intentionnelle ; le dol éventuel suffit (arrêts du Tribunal fédéral 6B_249/2021 du 13 septembre 2021 consid. 4.1 ; 6B_1260/2017 du 23 mai 2018 consid. 2.1 ; AARP/237/2022 du 3 août 2022 consid. 2.2.2 ; A. CAMBI FAVRE-BULLE, Commentaire romand CP II, 2017, n. 22 ad art. 197). S'agissant de la consommation via internet, le nombre d'images et de pages consultées, ainsi que la provenance des fichiers sont des indices importants pour juger de l'existence d'un comportement volontaire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1260/2017 du 23 mai 2018 consid. 2.1).

3.2.1. En l'espèce, la fabrication ou la possession (via le cache du navigateur internet I______) en 2016 de dix fichiers pornographiques représentant des mineurs réels sur le disque dur C______ est établie. Il est de plus démontré que cette fabrication ou possession était intentionnelle vu le nombre de fichiers en cause, leur contenu explicite et l'emplacement de quatre des fichiers reproduits dans les documents personnels d'un utilisateur de ce disque dur intégré ("Documents and Settings > ______ > ______ > ______").

Le téléchargement, complet ou partiel, au moyen de la connexion internet rattachée au no. ______, chemin 2______ à E______ [GE] et par le truchement d'un logiciel pair-à-pair de plusieurs centaines de fichiers contenant des représentations pédopornographiques sous la forme d'actes d'ordre sexuel effectifs avec des mineurs sur la période du 4 janvier au 1er août 2020 ne fait également pas de doute. Il est de surcroît indubitable que ces téléchargements étaient intentionnels vu leur nombre, leur fréquence régulière et les noms explicites des fichiers concernés, certains faisant mention d'actes sexuels sur des enfants aussi jeunes que trois, quatre ou cinq ans.

3.2.2. S'agissant de l'identité de l'auteur des comportements susmentionnés, il convient d'examiner successivement les différentes hypothèses entrant en jeu et de les confronter aux éléments de preuve.

3.2.2.1. Selon une première hypothèse, initialement mise en avant par l'appelant, une personne extérieure à sa famille et ne résidant pas au no. ______, chemin 2______ pourrait être l'auteur des infractions, en particulier par le biais d'un piratage de son réseau sans-fil.

La probabilité qu'une personne possédant les compétences techniques requises pour s'introduire à distance sur un réseau sans-fil protégé par un mot de passe (à l'aide d'un protocole de sécurité moderne) consacre les efforts nécessaires pour ce faire dans le but de télécharger des fichiers pédopornographiques et quelques comédies françaises par le truchement d'un système de partage de fichiers pair-à-pair, prenant ainsi le risque de rester pendant des heures à portée dudit réseau sans-fil, apparaît d'emblée faible. Surtout, cette hypothèse ne permet pas d'expliquer la présence de fichiers à caractère pédopornographique sur le disque dur C______, qui s'est trouvé en possession de l'appelant et de sa famille entre 2011 et 2020. En effet, la trace de ces fichiers date de 2016 et certaines de leurs désignations font référence à des dates postérieures à l'année 2011. On peut donc exclure que les fichiers en cause proviennent d'un utilisateur antérieur à l'acquisition de ce disque dur par l'appelant.

Enfin, la possibilité que les comportements punissables ayant eu cours en 2016 et en 2020 soient le fait de personnes différentes et que le rattachement au domicile de l'appelant soit une coïncidence est invraisemblable. Cela vaut d'autant plus que l'ordinateur [de la marque] N______, situé dans le salon de l'appelant, contenait des traces de la consultation de pages internet avec des images dont l'adresse html comportait le terme "______".

En conséquence, l'hypothèse selon laquelle une ou plusieurs personne(s) extérieure(s) à la famille de l'appelant et ne résidant pas au no. ______, chemin 2______ serai(en)t l'/les auteur(s) des comportements mentionnés au considérant 3.2.1 n'est pas compatible avec les éléments de preuve au dossier et doit être écartée.

3.2.2.2. Selon une seconde hypothèse, les enfants de l'appelant qui ne résident pas avec lui et/ou les amis de ceux-ci pourraient être à l'origine des comportements litigieux.

Cette possibilité ne résiste pas non plus à l'examen. En effet, les enfants en question ne sont pas venus rendre visite à leur père durant la première vague de la pandémie de covid-19. Or, le 16 mars 2020, le Conseil fédéral a proclamé l'état de situation extraordinaire et ordonné le semi-confinement de l'ensemble de la population, celui-ci n'ayant été levé que le 19 juin suivant. Les précités ne peuvent donc pas à l'être à l'origine des nombreux téléchargements réalisés pendant cette période, lesquels correspondent en partie aux fichiers téléchargés avant le 16 mars 2020 ainsi que les 31 juillet et 1er août de la même année, ce qui permet de conclure que la ou les même(s) personne(s) sont selon toute vraisemblance à l'origine de l'ensemble de ceux-ci.

3.2.2.3. Selon une troisième hypothèse, particulièrement mise en avant par l'appelant, ses anciens sous-locataires seraient à l'origine des actes qui lui sont reprochés.

Il est établi que J______ et K______ ont résidé au no. ______, chemin 2______ à E______ [GE] du 15 avril 2019 au 2 juin 2020. Or, des téléchargements de fichiers pédopornographiques ont encore eu lieu le 31 juillet et le 1er août 2020. La possibilité, évoquée par l'appelant, selon laquelle les prénommées seraient rentrées durant la nuit dans leur ancien appartement afin de consommer pendant plusieurs heures de la pédopornographie deux jours de suite n'apparaît pas crédible. Cela vaut d'autant plus que le précité prétend avoir entendu du bruit à l'étage inférieur mais ne s'est pas donné la peine d'aller voir si des personnes non-identifiées s'étaient introduites chez lui ou d'appeler la police. Cette hypothèse n'explique en outre pas l'existence de fichiers pédopornographiques en 2016 sur le disque dur C______, lequel n'était d'ailleurs plus en fonction ni connecté au réseau sans-fil au moment où les prénommées vivaient à E______ [GE].

Au vu de ce qui précède, l'hypothèse que les sous-locataires de l'appelant aient été à l'origine des comportements mentionnés au considérant 3.2.1 doit être écartée. Les réquisitions de preuve déposées par l'appelant, à savoir l'audition des prénommées et la production d'un extrait judiciaire, n'étant pas de nature à modifier cette conclusion, celles-ci doivent être rejetées.

3.2.2.4. Selon une quatrième hypothèse, F______ serait l'auteur des téléchargements de fichiers pédopornographiques.

Celui-ci souffre toutefois d'un grave trouble autistique qui le prive d'accès à la lecture et à l'écriture. Le fait qu'il ait eu recours à une application de partage en pair-à-pair pour rechercher spécifiquement et à intervalles réguliers des fichiers pédopornographiques apparaît ainsi d'emblée peu plausible. En outre, le détail des fichiers téléchargés révèle que ceux-ci comportent à de multiples reprises le titre "[chanson] 7______" du groupe ______. Or celui-ci est librement accessible sur YouTube (cf. https://www.youtube.com/______), service dont F______ faisait un usage intensif. La probabilité que celui-ci ait eu recours à un service de partage pair-à-pair, requérant certaines connaissances en lecture et en écriture, pour écouter un titre auquel il avait librement accès par le biais de sa plateforme de prédilection est donc quasiment nulle. Il en va de même de la possibilité que celui-ci ait intentionnellement effacé les fichiers à caractère pédopornographiques retrouvés en tant qu'artefacts sur le disque dur C______. Enfin, si F______ avait été l'auteur des téléchargements de fichiers en 2016 ou en 2020, son père, qui exerce sur lui une surveillance quasi-permanente pour des raisons médicales, en aurait eu connaissance et serait certainement intervenu, ce dernier ayant affirmé lors de l'audience d'appel : "Si j'avais vu moi-même quelqu'un en visionner je lui aurais fait une sacrée morale.".

Il doit partant être considéré comme établi que F______ n'est pas l'auteur des comportements mentionnés au considérant 3.2.1.

3.2.2.5. Au vu de ce qui précède, aucune des hypothèses alternatives à celle selon laquelle l'appelant serait à l'origine des comportements litigieux n'apparaît plausible.

Cette dernière hypothèse est par ailleurs compatible tant avec la présence de traces de fichiers à caractère pédopornographique sur le disque dur C______ datant de 2016 qu'avec les multiples téléchargements par le biais du service de partage pair-à-pair M______ en 2020. L'appelant a certes affirmé qu'il n'aurait dans tous les cas pas eu le temps de télécharger et visionner de la pédopornographie au vu de l'intensité avec laquelle il se consacre à la prise en charge de son fils handicapé et à la vente d'articles de ______ par internet. Cette affirmation entre cependant en contradiction avec ses déclarations antérieures selon lesquelles il fréquentait des sites pornographiques "ordinaires" plusieurs fois par semaine. En outre, il est possible que les périodes où les fichiers pédopornographiques ont été téléchargés ne correspondent pas, ou uniquement partiellement, avec celles de leur visionnage. En effet, le domicile de l'appelant ne bénéficie pas de la fibre optique de L______ (cf.  https://www.L______.ch/fr/internet-tv/abonnement-internet?tabOption=internet-tv&), ce qui signifie que le téléchargement de fichiers de plusieurs centaines de mégabytes prend un temps certain et que les téléchargements pourraient avoir été lancés intentionnellement au cours des nuits du weekend afin de ne pas empiéter à l'excès sur la connexion internet du no. ______, chemin 2______.

L'historique des fichiers téléchargés en 2020 révèle par ailleurs la présence de plusieurs téléchargements de comédies françaises sorties il y a un certain nombre d'années que l'appelant appréciait particulièrement. En outre, le fait qu'il n'ait pas abordé le sujet des fichiers pédopornographiques retrouvés sur le disque dur C______ avec ses enfants majeurs après avoir, selon lui, été informé par la police de leur existence paraît incongru dès lors qu'il a insisté lors de ses auditions sur le caractère "dégueulasse" ou "horrible" des contenus en cause. On peut ainsi raisonnablement penser que s'il n'en a rien fait, c'est parce qu'il en assumait la responsabilité.

En conclusion, la seule hypothèse crédible est celle selon laquelle l'appelant est l'auteur des comportements mentionnés au considérant 3.2.1, cette conclusion étant renforcée par les indices discutés ci-avant. La Chambre de céans a ainsi acquis l'intime conviction que l'appelant a fabriqué, respectivement possédé dix fichiers pornographiques représentant des mineurs réels sur le disque dur C______ en 2016 et téléchargé des centaines de fichiers au contenu pédopornographique par le truchement d'un logiciel pair-à-pair sur la période du 4 janvier au 1er août 2020. Dans les deux cas, ces actes ont été réalisés intentionnellement.

Comme rien n'indique que ces actes n'aient pas eu pour finalité une consommation exclusivement personnelle, ce sont bien les éléments constitutifs objectifs et subjectifs de l'infraction de l'art. 197 al. 5 CP qui sont remplis.

En conclusion, la condamnation de l'appelant pour pédopornographie au sens de l'art. 197 al. 5 1ère et 2ème phr. CP doit être confirmée et l'appel rejeté sur ce point.

3.2.3. Il ne se justifie dès lors pas d'ordonner la production par la Brigade de criminalité informatique de l'ensemble des résultats de son examen du disque dur C______. En effet, l'existence sur celui-ci à l'époque de dix fichiers à caractère pédopornographique est établie, la production d'un rapport plus détaillé n'apparaissant pas nécessaire au prononcé du jugement. Quant à la possibilité qu'un tel rapport mène à la condamnation de l'appelant pour la fabrication ou possession d'autres contenus pédopornographiques, le MP n'a pas estimé que cet acte d'instruction était nécessaire, outre que l'accusation a été figée par l'acte d'accusation soumis au TP (cf. ATF 149 IV 42 consid. 3.4.4).

S'agissant du classement de l'accusation de pédopornographie pour la période antérieure au 22 novembre 2015, il est acquis à l'appelant (interdiction de la reformatio in pejus, cf. art. 391 al. 2 CPP).

4. 4.1.1. L'infraction de pédopornographie à des fins de consommation personnelle (art. 197 al. 5 CP) et mettant en scène des actes d'ordre sexuel effectifs avec des mineurs, est réprimée par une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

4.1.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Celle-ci doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1 ; 136 IV 55 consid. 5.5, 5.6 et 5.7), ainsi que l'effet de la peine sur son avenir. L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2 ; 135 IV 130 consid. 5.3.1 ; 134 IV 35 consid. 2.1). L'absence d'antécédent a un effet neutre sur la fixation de la peine (ATF 141 IV 61 consid. 6.3.2 ; 136 IV 1 consid. 2.6.4).

4.1.3. Lorsque l'auteur est condamné au titre de plusieurs chefs d'accusation (concours) et que les peines envisagées pour chaque infraction prise concrètement sont de même genre (ATF 147 IV 225 consid. 1.3 ; 144 IV 313 consid. 1.1.1), l'art. 49 al. 1 CP impose au juge, dans un premier temps, de fixer la peine pour l'infraction abstraitement – d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner – la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents et, dans un second temps, d'augmenter cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2 ; 144 IV 217 consid. 3.5.1).

L'art. 49 al. 1 CP s'applique notamment en cas de concours réel (ATF 148 IV 96 consid. 4.3.4). Lorsque plusieurs comportements constituant la même infraction sont étroitement liés sur les plans matériel et temporel mais qu'il n'existe pas d'unité juridique ou matérielle d'action, il est toutefois possible de fixer une peine d'ensemble, dans le respect du cadre de la peine posé par l'art. 49 al. 1 CP, sans devoir calculer une peine hypothétique séparée pour chacune des occurrences de l'infraction en cause (AARP/139/2023 du 25 avril 2023 consid. 4.3.3 ; voir également : ATF 142 IV 265 consid. 2.4.3).

4.2. En l'occurrence, la culpabilité de l'appelant est importante. Celui-ci a en effet procédé au téléchargement, et donc à la réplique, de très nombreux fichiers contenant des abus commis sur des mineurs. Comme l'a souligné à juste titre l'autorité précédente, il a ainsi contribué à l'exploitation sexuelle et, par voie de conséquence, à la souffrance de nombreux enfants sans défense et parfois très jeunes. Son mobile était égoïste puisqu'il a agi pour assouvir ses pulsions sexuelles sans égard pour la santé physique et psychique des victimes.

La situation personnelle et familiale de l'appelant apparaît particulièrement difficile. Celle-ci n'a toutefois pas de lien avec la nature des infractions commises, de sorte qu'elle ne saurait mener à une réduction de sa peine.

Sa prise de conscience est inexistante. Sa collaboration n'est pas bonne, l'appelant n'ayant d'ailleurs pas hésité à jeter le soupçon sur ses sous-locataires et leur enfant mineur pour tenter de se disculper.

Son casier judiciaire contient une condamnation pour une infraction, mais celle-ci est sans lien avec celles objets de la présente procédure.

S'agissant des téléchargements périodiques en 2020, il existe un concours réel, lequel appelle une aggravation de la peine.

Compte tenu de ce qui précède, une sanction de 300 unités pénales pour les téléchargements réalisés en 2020 et de 60 unités pénales pour les dix fichiers retrouvés sur le disque dur C______ (peine hypothétique de 90 unités pénales) apparaîtrait appropriée.

4.3.1. Lorsque différents types de peines peuvent être prononcés par le juge pénal, le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de la culpabilité de l'auteur, de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (ATF 147 IV 241 consid. 3.2). Lorsque tant une peine pécuniaire qu'une peine privative de liberté entrent en considération et que toutes deux apparaissent sanctionner de manière équivalente la faute commise, il y a en règle générale lieu, conformément au principe de la proportionnalité, d'accorder la priorité à la première (ATF 144 IV 217 consid. 3.3.3 ; 135 IV 188 consid. 3.4.3). Ces principes étaient déjà applicables avant l'entrée en vigueur de l'art. 41 CP actuel au 1er janvier 2018, lequel précise que le juge peut prononcer une peine privative de liberté à la place d'une peine pécuniaire si une telle peine paraît justifiée pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits ou s'il y a lieu de craindre qu'une peine pécuniaire ne puisse pas être exécutée.

4.3.2. Vu la gravité des faits et l'absence de prise de conscience de l'appelant, une peine pécuniaire n'est pas suffisante pour le dissuader avec suffisamment de certitude de récidiver. En outre, il y a lieu de craindre qu'une telle peine ne puisse pas être exécutée vu sa situation financière obérée. Partant, il convient de prononcer une peine privative de liberté. Il s'ensuit que la question de savoir quel droit des sanctions entre celui en vigueur avant le 1er janvier 2018 et après cette date serait, pris globalement, le plus clément dans le cas d'espèce (cf. art. 2 al. 2 CP ; ATF 148 IV 374 consid. 2.1 ; 147 IV 471 consid. 4 ; 147 IV 241 consid. 4.2.2), peut rester ouverte, le prononcé d'une peine privative de liberté s'imposant dans les deux cas.

En l'absence d'appel joint, la durée de huit mois retenue par le TP est acquise à l'appelant, tout comme le fait que cette peine soit prononcée avec sursis (cf. art. 391 al. 2 CPP et ATF 142 IV 89 consid. 2.1). La durée du délai d'épreuve, fixée à quatre ans, apparaît en outre appropriée.

S'agissant des règles de conduites et de l'assistance de probation ordonnées par le premier juge, celles-ci doivent être de nature à améliorer le risque de récidive (cf. ATF 137 IV 72 consid. 2.4 ; 130 IV 1 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_691/2020 du 26 juin 2020 consid. 1.1). Bien que l'appelant ait été constant dans son rejet de la nécessité d'un traitement en lien avec les accusations portées à son encontre, il ne peut être exclu qu'un suivi thérapeutique par un professionnel spécialisé lui permette de disposer de meilleurs capacités pour éviter de récidiver, indépendamment de savoir s'il souffre d'un trouble pédophile au sens médical du terme. Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le suivi thérapeutique en sexologie et l'assistance de probation ordonnés par le TP pendant le délai d'épreuve, l'appelant n'ayant par ailleurs pas contesté spécifiquement leur bien-fondé en appel.

En conclusion, l'appelant sera condamné à une peine privative de liberté de huit mois, avec sursis pendant quatre ans, délai d'épreuve pendant lequel il devra se soumettre à un suivi thérapeutique en sexologie à titre de règle de conduite et fera l'objet d'une assistance de probation.

5. En ce qui concerne l'expertise psychiatrique sollicitée par l'appelant, elle n'apparaît pas appropriée dès lors que celui-ci a toujours défendu au long de la procédure ne pas souffrir d'un trouble pédophile, de sorte que le prononcé d'une mesure visant à traiter un tel trouble apparaît d'emblée sujette à caution. En outre, aucun élément au dossier amène à douter de la responsabilité de l'appelant (cf. art. 20 CP). Enfin, il est exclu que la Chambre de céans entre en matière (cf. art. 404 al. 1 CPP), qui plus est envisagerait d'ordonner en appel une mesure au vu de l'interdiction de la reformatio in pejus (cf. art. 391 al. 2 CPP ; ATF 148 IV 89 consid. 4.4). Partant, la nécessité d'une expertise doit être niée.

6. 6.1. Selon l'art. 67 al. 3 let. d ch. 2 CP, s'il a été prononcé contre un condamné une peine pour une infraction de pornographie au sens de l'art. 197 al. 5 CP en lien avec des objets ou représentations ayant comme contenu des actes d'ordre sexuel avec des mineurs, l'exercice de toute activité professionnelle et non professionnelle organisée impliquant des contacts réguliers avec des mineurs lui est interdit à vie. L'art. 67 al. 4bis CP permet au juge de renoncer à une telle sanction dans les cas de très peu de gravité (1), si une telle mesure ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres infractions passibles de cette même mesure (2), s'il n'a pas commis l'une des infractions listées à l'art. 67 al. 4bis let. a CP (3) et qu'il ne souffre pas d'un trouble pédophile (4). Lorsque ces quatre conditions sont remplies, le juge pénal doit renoncer à l'interdiction à vie (arrêts du Tribunal fédéral 6B_852/2022 du 26 avril 2023 consid. 2.3 ; 6B_156/2023 [destiné à la publication aux ATF] du 3 avril 2023 consid. 2.5.7).

Pour déterminer s'il existe un cas de très peu de gravité, il faut tenir compte, d'une part, de la gravité inhérente de l'infraction fondant la potentielle interdiction d'activité à vie et, d'autre part, de la culpabilité et des circonstances personnelles de l'auteur eu égard à l'infraction commise (arrêts du Tribunal fédéral 6B_852/2022 du 26 avril 2023 consid. 2.2.1 ; 6B_156/2023 [destiné à la publication aux ATF] du 3 avril 2023 consid. 2.5.4).

6.2. En l'occurrence, la gravité intrinsèque de l'infraction de pédopornographie au sens de l'art. 197 al. 5 1ère et 2ème phr. CP ne peut être qualifiée de faible vu qu'elle est passible de trois ans de peine privative de liberté. Il en va de même de la culpabilité de l'appelant qui est importante (cf. consid. 4.2). Partant, la condition d'un cas de très faible gravité de l'art. 67 al. 4bis CP n'est pas remplie.

En conclusion, il n'est pas possible de renoncer au prononcé de l'interdiction à vie de l'exercice de toute activité professionnelle et de toute activité non professionnelle organisée impliquant des contacts réguliers avec des mineurs. Le jugement contesté sera donc confirmé sur ce point également.

7. 7.1. Selon l'art. 267 al. 1 CPP, si le motif du séquestre disparaît, le tribunal lève la mesure et restitue les objets à l'ayant droit. Selon l'art. 197 al. 6 CP, en cas d'infraction au sens de l'art. 197 al. 5 CP, les objets sont confisqués. Selon l'art. 69 al. 2 CP, le juge peut ordonner que les objets confisqués soient détruits.

7.2. Le disque dur C______ contenant au moins dix fichiers à caractère pédopornographique, sera confisqué et détruit.

En revanche, l'ordinateur [de la marque] N______ ne contient aucun fichier fondant directement la condamnation de l'appelant. Le séquestre probatoire dont il fait l'objet sera donc levé et il sera fait droit à la conclusion du précité visant à la restitution de cet ordinateur. Sur ce point, l'appel apparaît fondé.

8. 8.1. Selon l'art. 428 al. 3 CPP, si l'autorité de recours rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce également sur les frais fixés par l'autorité inférieure.

Selon l'art. 426 al. 1 CPP, le prévenu supporte les frais de procédure s'il est condamné. Selon l'art. 426 al. 3 let. a CPP, le prévenu ne supporte pas les frais que le canton a occasionné par des actes de procédure inutiles ou erronés. Seuls les actes d'emblée objectivement inutiles sont visés par cette disposition (arrêt du Tribunal fédéral 6B_832/2020 du 22 février 2021 consid. 4.1).

L'appelant ayant été reconnu coupable de pédopornographie au sens de l'art. 197 al. 5 1ère et 2ème phr. CP et aucun acte de la procédure ne pouvant être qualifié d'objectivement inutile d'emblée, celui-ci doit être condamné à l'ensemble des frais de la procédure préliminaire et de première instance, lesquels s'élèvent à CHF 21'654.-.

8.2. Selon l'art. 428 al. 1, première phrase, CPP, les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé ; pour déterminer si une partie succombe ou obtient gain de cause, il faut examiner dans quelle mesure ses conclusions sont admises en deuxième instance (arrêts du Tribunal fédéral 6B_143/2022 du 29 novembre 2022 consid. 3.1 ; 6B_1397/2021 du 5 octobre 2022 consid. 11.2). Seul le résultat de la procédure d'appel elle-même est déterminant (ATF 142 IV 163 consid. 3.2.1).

En l'espèce, l'appelant succombe sur l'essentiel, à savoir sa culpabilité, la quotité de la peine et la mesure d'interdiction à vie de toute activité impliquant des contacts réguliers avec des mineurs. Son appel mène cependant à la modification du jugement de première instance s'agissant de la confiscation et destruction de l'ordinateur N______.

Dans ces circonstances, 7/8èmes des frais de la procédure d'appel seront mis à sa charge, lesquels s'élèvent à CHF 2'015.-, y compris un émolument de jugement de CHF 1'750.-, le solde restant à l'État.

9. 9.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise aux juridictions genevoises, le règlement sur l'assistance juridique et l'indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale (RAJ) s'applique. L'art. 16 al. 1 RAJ prescrit que le tarif horaire est de CHF 200.- pour un avocat chef d'étude. Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues ; elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1362/2021 du 26 janvier 2023 [destiné à la publication aux ATF] consid. 3.1.1).

L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à trente heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de trente heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; AARP/51/2023 du 20 février 2023 consid. 8.1.2). Le temps de déplacement de l'avocat est considéré comme nécessaire pour la défense d'office au sens de l'art. 135 CPP (AARP/318/2022 du 17 octobre 2022 consid. 10.3). La rémunération forfaitaire de la vacation aller/retour au et du Palais de justice est arrêtée à CHF 100.- pour les chef d'étude (AARP/319/2022 du 13 octobre 2022 consid. 7.2).

9.2. En l'occurrence, MB______, défenseure d'office de A______, a requis l'indemnisation de 410 minutes d'activité de cheffe d'étude composée de 150 minutes d'entretien avec son mandant et de 260 minutes de travail de fond du dossier en appel. Dans l'ensemble, cette durée apparaît appropriée. Il convient uniquement d'en retirer 30 minutes en lien avec la rédaction des réquisitions de preuve, acte indemnisé au titre du forfait. À l'inverse, il convient d'y rajouter la durée de l'audience d'appel, à savoir 145 minutes, pour un total de 525 minutes.

En conclusion, la rémunération de la défenseuse d'office de l'appelant sera arrêtée à CHF 2'369.40, correspondant à 8.75 heures d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 1'750.-), plus la majoration forfaitaire de 20% (CHF 350.-), la vacation au Palais de justice pour l'audience d'appel (CHF 100.-) et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% (CHF 169.40).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1422/2022 rendu le 21 novembre 2022 par le Tribunal de police dans la procédure P/14663/2020.

L'admet très partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable de pornographie (art. 197 al. 5 1ère et 2ème phr. CP).

Classe la procédure s'agissant des faits de pornographie pour des actes d'ordre sexuel non effectifs avec des mineurs pour la période antérieure au 22 novembre 2015.

Condamne A______ à une peine privative de liberté de huit mois.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à quatre ans.

Ordonne à A______, à titre de règle de conduite, de se soumettre à un suivi thérapeutique en sexologie pendant la durée du délai d'épreuve.

Ordonne une assistance de probation pendant la durée du délai d'épreuve.

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions, ne pas respecter les règles de conduite ou se soustraire à l'assistance de probation pendant la durée du délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine.

Interdit à vie à A______ l'exercice de toute activité professionnelle et non professionnelle organisée impliquant des contacts réguliers avec des mineurs.

Ordonne la confiscation et la destruction de l'objet figurant sous chiffre 5 de l'inventaire n° 1______.

Ordonne la restitution à A______ des objets figurant sous chiffres 1, 2, 3, 4, 7, 8, 9, 10 et 11 de l'inventaire n° 1______.

Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance, lesquels s'élèvent à CHF 21'654.-.

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 2'015.-, y compris un émolument de jugement de CHF 1'750.-, met 7/8èmes de ceux-ci à la charge de A______ et en laisse le solde à l'État.

Prends acte de ce que l'indemnité due à MB______, défenseure d'office de A______, a été arrêtée à CHF 3'231.-, TVA comprise, pour la procédure préliminaire et de première instance.

Fixe à CHF 2'369.40, TVA comprise, l'indemnité due à MB______ pour ses frais et honoraires en procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, à l'Office fédéral de la police et au Service de probation et d'insertion.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

Le président :

Vincent FOURNIER

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

21'654.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

100.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

90.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'750.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

2'015.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

23'669.00