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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3286/2024

JTAPI/1029/2024 du 21.10.2024 ( MC ) , REJETE

REJETE par ATA/1341/2024

Descripteurs : INTERDICTION DE PÉNÉTRER DANS UNE ZONE;MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS)
Normes : LEI.74
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3286/2024 MC

JTAPI/1029/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 21 octobre 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Samir DJAZIRI, avocat avec élection de domicile

 

contre

 

COMMISSAIRE DE POLICE

 


EN FAIT

1.            Le 3 octobre 2024, Monsieur A______, né le ______ 1996, ressortissant du Nigéria, a été arrêté par la police en raison du vol d'un vélo commis alors qu'il prenait la fuite pour ne pas être interpellé par cette dernière. Ledit vélo était signalé volé depuis le 21 septembre 2024 et une plainte pénale avait été déposée par le propriétaire du vélo le 23 septembre 2024.

Selon le rapport d’arrestation, l’intéressé était en possession de CHF 49.60, EUR 0.05, d'un téléphone portable non signalé volé et porteur de son passeport nigérian valable jusqu'au 1er juillet 2029 ainsi que de son titre de séjour italien valable jusqu'au 1er janvier 2025.

2.            M. A______ ayant fait valoir son droit de refuser de répondre, son audition par la police n’a pu avoir lieu.

3.            Le 4 octobre 2024, M. A______ a été condamné par ordonnance pénale du Ministère public pour vol au sens de l’art. 139 ch. 1 du code pénal Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) et empêchement d’accomplir un acte officiel (art. 286 al. 1 CP) à une peine pécuniaire de 50 jours-amende.

4.            Le même jour, à 16h45, en application de l'art. 74 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), le commissaire de police a prononcé à l'encontre de M. A______ une mesure d'interdiction de pénétrer dans le canton de Genève pour une durée de douze mois.

5.            Par courrier du 7 octobre 2024 adressé au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), M. A______ a formé opposition contre cette décision.

6.            M. A______ a été dûment convoqué pour l'audience du 18 octobre 2024 devant le tribunal.

7.             Lors de cette audience, M. A______ a indiqué qu'il était arrivé à Genève le 1er octobre 2024 « pour visiter » car il était en vacances pour tout le mois d’octobre. Il était venu pour trois jours. Il était reparti en Italie le 12 octobre 2024 et avait quitté Genève le 8 octobre 2024 ; il ne se souvenait pas l'heure mais c'était la nuit. Il avait toujours dormi à B______ (France). Il travaillait en Italie comme fermier. C'était la première fois qu'il venait à Genève. Il n'avait aucun besoin spécial de venir sur le canton de Genève. Un ami, dont il ne voulait pas donner le nom de peur qu'il le frappe, lui avait prêté le vélo avec lequel il avait été arrêté par la police : il l’avait utilisé depuis l'arrêt de bus Palladium jusqu'à la Jonction juste pour aller acheter un kebab à la Jonction et il devait ramener le vélo à l'arrêt de bus. Lorsque qu'il avait été arrêté, il était sur le vélo et la police l'en avait fait descendre et lui avait indiqué que le vélo était volé. C'était la police qui avait dit qu'elle allait appeler un avocat, soit Me C______, pour qu'il l'assiste lors de son audition, mais celui-ci n'était pas disponible. Aucune traduction n'avait été faite lors de son audition par la police. Lors du prononcé de la mesure, il y avait effectivement un interprète de langue anglaise. On lui a bien notifié la décision du 4 octobre 2024, mais il n'avait pas compris qu'il n'avait pas le droit de revenir à Genève. Il comprenait un petit peu le français car il travaillait avec certains collègues francophones. Il ne savait pas lire le français. Il confirmait qu'il ignorait que le vélo que son ami lui avait prêté était volé. Il était arrivé d'Italie le 18 octobre 2024 au matin. Il allait être entendu par le Ministère public cet après-midi à 14h30 et avait ensuite le projet de se rendre à B______ (France) pour prendre ses affaires et repartir en Italie. Il confirmait avoir été arrêté par la police le 8 octobre 2024, avoir passé la nuit à la police et être reparti à B______ (France) le 9 octobre 2024. Il n'avait jamais donné comme adresse le ______[GE]. Il précisait qu'il ne connaissait pas son adresse à B______ (France). Depuis le prononcé de la mesure, il n'était revenu qu'une seule fois à Genève, c'était le 8 octobre 2024 au matin. Il avait compris que s'il ne volait plus de vélo, il pouvait repartir libre, mais il contestait avoir volé un vélo. Il reconnaissait être venu à Genève le 8 octobre 2024, alors qu'il savait qu'il n'avait pas le droit de pénétrer sur le canton.

La représentante du commissaire a indiqué qu'elle ignorait qui était le policier, dont le matricule était indiqué sur le procès-verbal d'audition, et qui aurait fonctionné comme interprète de langue anglaise, mais qu'elle pouvait se renseigner. Elle déposait une extraction du fichier des arrestations indiquant que M. A______ avait été arrêté le 8 octobre 2024 à 19h30. Elle déduisait de ce qu'il venait d'être dit que M. A______ était revenu sur le territoire genevois à deux reprises, soit les 7 et 8 octobre 2024. Elle a conclu au rejet de l'opposition et à la confirmation de la mesure d’interdiction de pénétrer dans le canton de Genève prononcée le 4 octobre 2024 à l’encontre de M. A______ pour une durée de douze mois.

L’intéressé, par l’intermédiaire de son conseil, a conclu à l’annulation de la mesure d’interdiction de pénétrer dans le canton de Genève prononcée à son encontre le 4 octobre 2024 pour une durée de douze mois et au fait que la pièce produite par la police en audience soit écartée de la procédure.

EN DROIT

1.             Le tribunal est compétent pour examiner sur opposition la légalité et l’adéquation de l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée prononcée par le commissaire de police à l'encontre d'un ressortissant étranger (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. a de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             L'opposition ayant été formée dans le délai de dix jours courant dès la notification de la mesure querellée, elle est recevable sous l'angle de l'art. 8 al. 1 LaLEtr.

3.             Statuant ce jour, le tribunal respecte en outre le délai de 20 jours que lui impose l'art. 9 al. 1 let. b LaLEtr.

4.             Le contraint demande préalablement que la pièce produite lors de l’audience par la représentante du commissaire de police soit écartée de la procédure.

5.             Tel que garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Toutefois, le juge peut renoncer à l’administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l’authenticité n’est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsqu’il parvient à la conclusion qu’elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu’elles ne pourraient l’amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2021 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; 2C_946/2020 du 18 février 2021 consid. 3.1 ; 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1).

6.             En l’espèce, la représentante du commissaire de police a produit une pièce complémentaire concernant le contraint en audience et dont une copie lui a été remise. Dans le cadre de l’audience, il a pu se déterminer sur cette pièce. Le tribunal ne voit dès lors pour quel motif cette pièce devrait être écartée de la procédure. Autre est la question de savoir si son contenu est pertinent, ce qui sera analysé dans le présent jugement.

7.             Selon l'art. 74 al. 1 LEI, qui a repris l'art. 13e de l'ancienne loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers du 26 mars 1931 (aLSEE- RS 142.20 ; cf. message du Conseil fédéral concernant la loi fédérale sur les étrangers du 8 mars 2002 in FF 2002 3469, p. 3570), l'autorité cantonale compétente peut enjoindre à un étranger de ne pas quitter le territoire qui lui est assigné ou de ne pas pénétrer dans une région déterminée dans les cas suivants :

a. l'étranger n'est pas titulaire d'une autorisation de courte durée, d'une autorisation de séjour ou d'une autorisation d'établissement et trouble ou menace la sécurité et l'ordre publics ; cette mesure vise notamment à lutter contre le trafic illégal de stupéfiants ;

b. l'étranger est frappé d'une décision de renvoi ou d'expulsion entrée en force et des éléments concrets font redouter qu'il ne quittera pas la Suisse dans le délai prescrit ou il n'a pas respecté le délai qui lui était imparti pour quitter le territoire ;

c. l'exécution du renvoi ou de l'expulsion a été reportée (art. 69 al. 3 LEI).

8.             Conformément à l'art. 74 al. 2 LEI, la compétence d'ordonner ces mesures incombe au canton qui exécute le renvoi ou l'expulsion ; s'agissant de personnes séjournant dans un centre d'enregistrement ou dans un centre spécifique au sens de l'art. 26 al. 1bis de la loi sur l'asile du 26 juin 1998 (LAsi - RS 142.31), cette compétence ressortit au canton sur le territoire duquel se trouve le centre ; l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée peut aussi être prononcée par le canton dans lequel est située cette région.

9.             De son côté, l'art. 6 al. 3 LaLEtr précise que l'étranger peut être contraint à ne pas quitter le territoire qui lui est assigné ou à ne pas pénétrer dans une région déterminée, aux conditions prévues à l'art. 74 LEI, notamment suite à une condamnation pour vol, brigandage, lésions corporelles intentionnelles, dommage à la propriété ou pour une infraction à la LStup.

10.         Les mesures d'assignation d'un lieu de séjour et d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée répondent à deux préoccupations. Elles permettent d'intervenir pour protéger la sécurité et l'ordre publics - plus particulièrement dans les domaines qui ne peuvent guère être couverts par le droit pénal - à l'encontre de ressortissants étrangers dont le départ ne peut pas être exigé en raison d'une demande d'asile pendante ou de l'absence de titre de voyage. En outre, elles peuvent être ordonnées à l'égard d'étrangers dont le renvoi est durablement entravé et pour lesquels il est nécessaire de les tenir éloignés d'un endroit déterminé ou de pouvoir les surveiller (arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2001 rendu sous l'égide de l'art. 13 aLSEE, remplacé par l'art. 74 al. 1 LEI - cf. supra).

11.         L'étranger est passible d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire s'il n'observe pas les mesures qui lui sont imposées dans ce cadre (cf. art. 119 LEI).

12.         Les mesures prévues par l'art. 74 al. 1 LEI visent à prévenir les atteintes à la sécurité et à l'ordre publics plutôt qu'à sanctionner un comportement déterminé de ressortissants étrangers dont le départ ne peut pas être exigé en raison d'une demande d'asile pendante ou de l'absence de titre de voyage (arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 2a).

13.         A l'instar de l'art. 13e aLSEE, l'art. 74 al. 1 LEI constitue par ailleurs une clause générale permettant de prendre des mesures également à l'encontre d'étrangers qui ont gravement violé les prescriptions de police des étrangers qui tendent à garantir l'ordre public en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 3a et la référence citée cum FF 2002 3469, 3570).

14.         Les mesures d'assignation à un lieu de séjour et l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée doivent respecter le principe de la proportionnalité énoncé à l'art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst.- RS 101) (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4), lequel se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/3019/2012 du 1er novembre 2012 consid. 7).

Pour être conforme au principe de la proportionnalité, une restriction d'un droit fondamental, en l'occurrence la liberté de mouvement, doit être apte à atteindre le but visé, ce qui ne peut être obtenu par une mesure moins incisive. Il faut en outre qu'il existe un rapport raisonnable entre les effets de la mesure sur la situation de la personne visée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 137 I 167 consid. 3.6 ; 136 I 197 consid. 4.4.4 : arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.1).

Les mesures d'assignation à un lieu de séjour et l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée doivent ainsi être nécessaires et suffisantes pour empêcher que la sécurité et l'ordre publics ne soient troublés ou menacés ; les moyens doivent être proportionnés au but poursuivi, au regard notamment de la délimitation géographique et de la durée de la mesure (arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2002 consid. 2c).

15.         Le périmètre d'interdiction doit être déterminé de manière à ce que les contacts sociaux et l'accomplissement d'affaires urgentes puissent rester possibles ; elles ne peuvent en outre pas être ordonnées pour une durée indéterminée (arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.1 ; 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.3 ; 2A.514/2006 du 23 janvier 2007 consid. 3.3.1 ; 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 3c). Cela étant, le périmètre d'interdiction peut inclure l'ensemble du territoire d'une ville (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.2 ; 2A.647/2006 du 12 février 2007 consid. 3.3 pour les villes d'Olten et de Soleure ; 2A.347/2003 du 24 novembre 2003 consid. 4.2 pour la ville de Berne).

16.         Les étrangers dépourvus d'autorisation de séjour n'ont pas le droit à une liberté totale de mouvement. S'agissant d'une atteinte relativement légère à la liberté personnelle, le seuil pour ordonner les mesures d'assignation d'un lieu de séjour et d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée n'a pas été placé très haut. Pour définir le trouble ou la menace de la sécurité et de l'ordre publics, il suffit de se fonder sur la notion très générale de la protection des biens par la police. Des indices concrets de délits commis dans le milieu de la drogue suffisent, de même que la violation grossière des règles classiques de la cohabitation sociale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 3 et la référence citée ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 2b et les références citées ; ATA/45/2014 du 27 janvier 2014 ; ATA/778/2012 du 14 novembre 2012).

17.         L'art. 74 LEI ne précise pas la durée de la mesure. Celle-ci doit répondre au principe de proportionnalité, à savoir être adéquate au but visé et rester dans un rapport raisonnable avec celui-ci (ATF 142 II 1 consid. 2.3). Elle ne peut pas être ordonnée pour une durée indéterminée (arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.1 ; 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.3).

Des durées inférieures à six mois ne sont guère efficaces (cf. not. arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.2 ; ATA/1371/2020 du 30 décembre 2020 consid. 5); vers le haut, des mesures d'une durée d'une année (arrêt du Tribunal fédéral 2C_330/2015 du 26 novembre 2015 consid. 3.2 ; ATA/1347/2018 du 13 décembre 2018 consid. 6), voire de deux ans (arrêt du Tribunal fédéral 2C_828/2017 du 14 juin 2018 consid. 4.5) ont été admises.

18.         A titre d'exemple, dans sa jurisprudence récente, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a confirmé un jugement du tribunal réduisant de vingt-quatre à douze mois la durée d'interdiction de pénétrer sur l'ensemble du territoire cantonale prononcée à l'encontre d'une personne condamnée à sept reprises en Suisse entre avril 2020 et octobre 2022, notamment pour vol et recel, puis condamné une huitième fois en décembre 2022 notamment pour consommation de stupéfiant, et enfin une neuvième fois en janvier 2023 notamment pour vol, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, ainsi que lésions corporelles simples (ATA/105/2023 du 31 janvier 2023).

Elle a également confirmé une mesure prise pour douze mois en raison du vol de deux parfums, pour un montant total de CHF 330.80, au préjudice d’une grande enseigne, ce comportement étant constitutif d’un crime (art. 10 al. 2 CP), relevant qu'en poursuivant un séjour illégal en Suisse et en s’en prenant au patrimoine d’autrui, le recourant était une menace pour la sécurité et l’ordre publics et rappelant qu'une durée inférieure à six mois n'était guère efficace (ATA/1319/2023 du 8 décembre 2023).

Elle a confirmé une première mesure d’interdiction de pénétrer visant tout le canton pour une durée de douze mois prononcée contre un ressortissant portugais, condamné notamment pour vols et violation de domicile (non-respect d’une interdiction d'entrer dans un magasin MIGROS), relevant que l’intéressé n’avait aucun emploi, ni titre de séjour en Suisse, ni de lien avéré avec ce pays ou même avec le canton de Genève, ne disposait pas de moyens de subsistance et n’avait pas allégué une nécessité de se rendre à Genève. Il n’avait également pas respecté la mesure d’interdiction qui faisait l’objet de la procédure (ATA/385/2024 du 19 mars 2024 du 19 mars 2024).

19.         La jurisprudence considère qu'une condamnation pénale n'a pas besoin d'être définitive pour fonder au moins l'existence de soupçons d'une infraction, lesquels sont suffisants dans le cadre de l'application de l'art. 74 LEI (arrêt du Tribunal fédéral 2c-197/2013 du 31 juillet 2013, consid. 3.1).

20.         En l'espèce, M. A______, ressortissant nigérian, ne bénéficie d'aucune autorisation de courte durée (art. 32 LEI), de séjour (art. 33 LEI) ou d'établissement en Suisse (art. 34 LEI), ce qu'il ne conteste au demeurant pas. Il est simplement titulaire d’un permis de séjour lui permettant de résider en Italie.

Il a été interpelé par la police alors qu’il tentait de se soustraire à un contrôle de police en s’éloignant sur un vélo volé et a ainsi été condamné pour vol et empêchement d’accomplir un acte officiel. Même si cette condamnation n’est pas en force, puisqu’elle a été frappée d’opposition, il ressort des faits établis par la police que M. A______ se trouvait au guidon du vélo volé et qu’il n’a pas voulu donner d’informations concernant l’ami qui le lui aurait soi-disant prêté. Il n’a pas non plus été capable de rendre vraisemblable qu’il ne serait arrivé à Genève que le 1er octobre 2024, soit après le vol du vélo à son propriétaire. Il sied de relever à cet égard que M. A______ a indiqué être venu pour trois jours alors qu’il a été arrêté le 4 octobre, n’a donné aucune indication sur son lieu de résidence en France et qu’il ne semble pas enclin à respecter les décisions prises à son encontre puisqu’il est revenu à Genève à deux reprises au moins après le prononcé de la mesure d’interdiction territoriale, alors qu’il savait qu’il ne devait pas revenir dans le canton, soit les 7 et 8 octobre 2024.

Dès lors, M. A______ peut effectivement être perçu comme une menace pour l'ordre et la sécurité publics et il apparaît clairement, notamment au vu de sa situation économique précaire qu'il pourrait commettre d’autres vols s'il était autorisé à continuer à pouvoir se rendre à Genève. Les conditions d'une mesure d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée sont donc remplies.

L'étendue géographique arrêtée par le commissaire de police prend en considération le fait que l'intéressé est susceptible de reproduire ses agissements coupables dans tout le canton où il n'a aucune raison de se trouver. Il n’a pas pu donner d’indication sur son lieu de résidence en France ni sur ses fréquentations sur Genève, reconnaissant toutefois ne pas ne pas avoir de besoins spéciaux de venir à Genève et vouloir repartir en Italie où il avait un travail. Il n'a ainsi aucune attache sérieuse en Suisse, en particulier à Genève. Le périmètre sera par conséquent confirmé.

Enfin, la durée de la mesure, de douze mois, est conforme à la jurisprudence et adaptée aux circonstances du cas d'espèce.

21.         Partant, le tribunal rejettera l’opposition et confirmera l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée prise à l'encontre de M. A______ le 4 octobre 2024.

22.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

23.         Un éventuel recours déposé contre le présent jugement n'aura pas d'effet suspensif (art. 10 al. 1 LaLEtr).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable l'opposition formée le 7 octobre 2024 par Monsieur A______ contre la décision d’interdiction de pénétrer dans une région déterminée prise par le commissaire de police le 4 octobre 2024 pour une durée de douze mois ;

2.             la rejette ;

3.             confirme la décision d’interdiction de pénétrer dans une région déterminée prise par le commissaire de police le 4 octobre 2024 à l'encontre de Monsieur A______ pour une durée de douze mois ;

4.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant ;

5.             dit qu’un éventuel recours contre le présent jugement n'aura pas d'effet suspensif.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

 

 

 

Genève, le

 

La greffière