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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/824/2024

JTAPI/1011/2024 du 11.10.2024 ( OCIRT ) , REJETE

Descripteurs : ACTIVITÉ LUCRATIVE INDÉPENDANTE;INTÉRÊT ÉCONOMIQUE
Normes : LEI.19
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/824/2024

JTAPI/1011/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 11 octobre 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par DILYTICS - Société fiduciaire, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'INSPECTION ET DES RELATIONS DU TRAVAIL

 


EN FAIT

1.             B______ Sàrl (ci-après : B______ Sàrl), inscrite au registre du commerce genevois depuis le ______ 2023, a notamment pour but la vente et la production de tous types de boissons et l’exploitation d’établissements publics (restaurants et cafés) ; elle peut exercer toute autre activité ayant un lien direct ou indirect avec les buts précités, notamment, en Suisse ou à l’étranger, créer des succursales, participer à d’autres entreprises, acquérir ou fusionner avec des entreprises ayant un but analogue et effectuer toute opération propre à développer son but ou s’y rapportant directement ou indirectement.

2.             Monsieur A______, né le ______ 1994, est ressortissant de Géorgie.

3.             M. A______ est associé gérant de B______ Sàrl. Il a − tout comme trois autres personnes qui occupent respectivement les postes d’associé gérant président, associé et gérant – un pouvoir de signature individuelle.

4.             Monsieur C______, père de M. A______, est associé gérant président de B______ Sàrl.

5.             M. A______ a bénéficié d’un permis de séjour pour études du 27 janvier 2015 au 29 février 2016.

6.             Par ordonnance pénale du 9 septembre 2015, il a été condamné par le Ministère public genevois à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 40.- avec sursis à l'exécution de la peine et délai d'épreuve de deux ans pour faux dans les certificats et conduite sans permis de conduire.

7.             Par formulaire en ligne du 16 janvier 2024, M. A______ a sollicité auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) la délivrance d’une autorisation de séjour avec activité lucrative en vue d’œuvrer, pour une durée indéterminée, à compter du 1er février 2024, à temps plein en qualité de directeur de B______ Sàrl moyennant un salaire mensuel brut de CHF 10'000.-.

Étaient notamment joints :

-       le contrat de travail y relatif, signé le 11 janvier 2024, mentionnant une adresse de domicile en France voisine ;

-       une lettre de motivation établie par l’intéressé le 4 janvier 2024, à teneur de laquelle Genève était le lieu idéal pour développer son activité :

Tous les partenaires principaux étaient basés en Suisse ; le responsable de production et de développement du produit se trouvait à Berne, l’administration et la comptabilité à Genève et le partenaire marketing à Genève et Zurich, ce qui permettaient un développement et une collaboration idéales. De plus, l’un des plus gros clients potentiels, soit D______ SA, jouait un rôle crucial dans le choix géographique, tout comme la logistique avec le reste du monde.

La situation géographique stratégique de Genève constituait un autre atout majeur. En plein cœur de l’Europe, cette ville était facilement accessible, ce qui faciliterait les échanges avec ses partenaires commerciaux, tant en Europe qu’à l’international. De plus, le réseau de transports en commun efficace et le statut de Genève en tant que plaque tournante pour les entreprises multinationales constituaient des avantages indéniables. Ainsi, Genève s’était imposée comme un choix évident pour le développement de son activité, en raison de sa stabilité économique, de sa qualité de vie exceptionnelle, de sa position géographique stratégique et de son environnement multiculturel. Il était convaincu que cette ville offrirait à son entreprise les meilleures conditions pour prospérer ;

-       son curriculum vitae, à teneur duquel il était titulaire d’un Undergraduate A levels in Business Management studies délivré en 2013 par le Queen Ethelburgas College au Royaume-Uni et d’un Bachelor of Business Administration and Finance obtenu en 2018 auprès de l’European University Geneva à Genève ; il avait œuvré à Genève de 2015 à 2017 comme Private Bank Officer assistant trainee et Sales Manager puis de 2018 à 2022 en Lituanie et en Pologne, en tant que Senior Sales Manager et Head of Sales Operations, International Sales Manager, CEO and Head of Sales et Marketing Manager ;

-       un plan marketing à teneur duquel les réseaux sociaux (Instagram, Facebook, X, LinkedIn et Youtube) serviraient de canaux de référencement afin de promouvoir les activités de B______ Sàrl ;

-       un Business plan mis à jour le 15 novembre 2023 précisant notamment que B______ Sàrl avait pour but la commercialisation d’un soda au café, qui se distinguerait, entre autres, par son goût unique et la prise en compte des préoccupations des consommateurs sur la santé et la responsabilité environnementale.

Étaient à prévoir des pertes de CHF 1'009'607.- la 1ère année, de CHF 573'462.- la 2ème année et CHF 303'850.- la 3ème année. La trésorerie d’investissement se composait de CHF 400'000.- de fonds propres et de CHF 4’5000'000.- provenant d’un prêt étranger. Aucun intérêt sur prêt n’était indiqué. Il en allait de même des projection d’impôts, prévue à 0% pour les cinq ans à venir, tant dans la rubrique « EBIDTA % » que dans celle du « compte de trésorerie ». L’amortissement des investissements était prévu sur cinq ans.

La rubrique « Hypothèses charges de structure » faisait état, au titre de personnel, d’un CEO (salaire mensuel brut de CHF 6'500.- porté à CHF 9'500.- la 5ème année), d’un directeur général (salaire mensuel brut de CHF 6'000.- porté à CHF 9'000.- la 5ème année), d’un employé de commerce (CHF 5'150 porté à CHF 5'550.- la 5ème année), d’un responsable commercial (CHF 5'700.- porté à CHF 6'100.- la 5ème année), d’un responsable production (CHF 6'100.- porté à CHF 6'500.- la 5ème année), d’un responsable marketing (CHF 5'500.- porté à CHF 5'900.- la 5ème année) et d’un employé production (CHF 5'100.- porté à CHF 5'500.- la 5ème année). Les charges du personnel s’élevaient à CHF 552'690 la 1ère année tandis qu’elles ne se monteraient plus qu’à CHF 331'890 la 5ème année. Les impôts sur résultat étaient de 16 % pour les cinq années.

Figuraient dans la trésorerie d’exploitation : le site internet, le marketing et développement des marchés mondiaux, les machines de production ainsi que le stock.

8.             Par courrier du 18 janvier 2024, l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT), auquel la requête avait été transmise par l’OCPM pour raison de compétence, a imparti un délai de dix jours à B______ Sàrl pour lui transmettre : l’adresse de M. A______ dès lors que différentes adresses apparaissaient sur les documents fournis ; le type de permis souhaité (selon le contrat de travail produit, il s’agirait d’un permis G) ; des preuves de l’annonce du poste auprès de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) et des recherches effectuées sur le marché de l’emploi suisse et européen ainsi que l’effectif du personnel à la date de la requête.

9.             Par réponse du 23 janvier 2024, B______ Sàrl, sous la plume de MM. A______, a précisé que l’adresse actuelle de M. A______ se trouvait en Géorgie. L’adresse de correspondance de l’entreprise était à Genève « c/o DILYTICS Sàrl ». Un permis de type L ou B était souhaité, afin que M. A______ puisse s’établir à Genève. En tant que fonctions dirigeantes de l’entreprise, les précités étaient indispensables au démarrage du projet. Par conséquent, aucune procédure de recherche d’employés n’avait débuté et elle n’en avait actuellement aucun. Toutefois, elle avait pris connaissance des lois en vigueur et les recrutements seraient conduits en relation avec l’OCE. Les postes vacants seraient annoncés, des entretiens seraient effectués et le résultat du recrutement serait communiqué.

10.         Par décision du 7 février 2024, l’OCIRT a refusé de délivrer un permis de séjour à l’année de type B avec activité lucrative indépendante en faveur de M. A______ et a retourné son dossier à l’OCPM.

La demande ne présentait pas un intérêt économique suffisant au sens de l’art. 19 let. a de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). En effet, il n’avait notamment pas été démontré que B______ Sàrl contribuerait à la diversification de l’économie régionale dans la branche concernée, obtiendrait ou créerait des places de travail pour la main d’œuvre locale, procéderait à des investissements substantiels ou générerait de nouveaux mandats pour l’économie helvétique. Partant, il n’avait pas été prouvé que le marché suisse du travail tirerait durablement profit de l’implantation de B______ Sàrl à Genève.

En outre, les critères financiers et les exigences relatives à l’exploitation de l’entreprise indépendante (art. 19 let. b LEI) n’étaient pas remplis. Enfin, M. A______ n’avait pas démontré disposer d’une source de revenus suffisante et autonome (art. 19 let. c LEI).

11.         Par acte du 6 mars 2024, M. A______ a interjeté recours, sous la plume de DILYTICS Sàrl – E______, auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) à l’encontre de cette décision.

Son activité professionnelle revêtait un intérêt économique significatif pour la Suisse. B______ Sàrl était sur le point de débuter un partenariat stratégique avec D______ SA, qui promettait d’ouvrir de nouvelles perspectives commerciales et de renforcer sa présence sur le marché suisse. D______ SA avait lancé la distribution d’échantillons de produits dans certaines de ses enseignes depuis le 30 janvier 2024, ce qui avait suscité un vif intérêt chez les consommateurs. Forts de cette dynamique positive, ils s’apprêtaient à entamer une collaboration dès mai 2024. À cet effet, une commande substantielle d’environ 500'000 canettes avait été passée, témoignant de la confiance et de l’engagement mutuel entre D______ SA et B______ Sàrl. Cette coopération promettait d’accroître les ventes et la visibilité de cette dernière et contribuerait également à dynamiser l’économie locale en favorisant la croissance et la création d’emplois.

Le produit était spécialement conçu pour répondre aux besoins et aux préférences du marché suisse, raison pour laquelle il avait choisi de le fabriquer à Berne, en collaboration avec F______ GmBH. Cette localisation stratégique lui permettrait de bénéficier de l’expertise locale et de garantir la qualité suisse des produits. Par ailleurs, afin de mieux répondre à la demande croissante des consommateurs helvétiques et de réduire l’étendue de la chaîne de production, l’embouteillage serait effectué en Autriche. Cette proximité géographique permettait de réagir de manière plus réactive aux fluctuations de la demande et d’assurer une disponibilité constante sur le marché suisse. L’usine autrichienne qui procédait à l’embouteillage était un partenaire de longue date de l’entreprise bernoise, ce qui garantissait une collaboration harmonieuse et une meilleure transparence durant le processus de production. Cette approche permettait d’offrir aux consommateurs suisses des produits de haute qualité, fabriqués localement, avec une traçabilité et une transparence optimales.

Sa décision de protéger la marque, tant en Suisse qu’à l’international, témoignait de son engagement sérieux envers le développement à long terme de l’activité, de sa volonté de préserver l’identité et la réputation de la marque sur le marché suisse ainsi que de sa vision stratégique d’expansion à l’échelle mondiale ; elle témoignait également de son engagement inébranlable envers la croissance et le succès de l’activité, tout en renforçant la confiance des partenaires et des investisseurs dans la vision stratégique.

L’activité était sur la voie de la rentabilité dans les années à venir, avec des signes tangibles de croissance déjà perceptibles. En effet, dès la 2ème année d’exploitation, une augmentation d’environ 10 % des revenus était prévue. Cette tendance positive témoignait de la viabilité du modèle commercial, de l’investissement dans le marketing et de la capacité à saisir les opportunités de croissance sur le marché.

Compte tenu du fait que sa fonction dirigeante était indispensable pour le démarrage du projet, il n’avait pas entamé de procédure de recherches d’employés. Toutefois, il prévoyait de recruter quatre personnes à l’avenir. Ces postes vacants et le résultat du processus de recrutement seraient annoncés à l’OCE.

Le Business plan avait été révisé en prenant en compte les recommandations des parties prenantes internes et externes afin de garantir la viabilité du plan d’affaires.

Étaient notamment joints :

-       une nouvelle version du Business plan mise à jour le 5 mars 2024, à teneur de laquelle étaient désormais prévues des pertes à hauteur de CHF 407'607.- la 1ère année tandis que des gains étaient attendus les quatre années suivantes. L’amortissement des investissements était quant à lui prévu sur dix ans au lieu de cinq. Figuraient dans la trésorerie d’exploitation uniquement le site internet et le marketing et développement des marchés mondiaux, à l’exclusion des machines de production et du stock. Quant à la trésorerie d’investissement, si le montant des fonds propres était toujours de CHF 400'000.-, celui du prêt étranger avait baissé à CHF 2'500'000.-. Aucun intérêt sur prêt n’était indiqué. Il en allait de même des projections d’impôts, prévue à 0% les trois premières années puis à hauteur de CHF 49'772.- la 4ème année et CHF 79'805.- la 5ème année dans les rubriques « EBIDTA % » et « Compte de trésorerie ». À teneur de la rubrique « Hypothèses charges de structure », les impôts sur résultat se montaient à 16 % pour les cinq années ;

-       un document daté du 29 septembre 2023 portant l’en-tête de l’Institut fédéral de la propriété intellectuelle intitulé « Résumé des données transmises » concernant le dépôt de la marque « B______ » par B______ Sàrl ;

-       une lettre de recommandation établie le 8 janvier 2024 par la société G______ indiquant avoir employé l’intéressé en 2020-2021 en tant que Senior Sales Manager à satisfaction.

12.         Dans ses observations du 10 mai 2024, l’OCIRT a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée, sous suite de frais.

Le recourant était l’associé gérant d’une entreprise de boisson pétillante à base de caféine, dont il était actuellement l’un des deux salariés. Selon le Business plan du 15 novembre 2023, le financement du projet devait être partagé entre CHF 400'000.- de fonds propres et CHF 4'500'000.- de prêt étranger, dont la source n’était pas clairement spécifiée. Selon le recourant, tous les partenaires principaux étaient situés en Suisse. Toutefois, lors du dépôt de la demande, aucune explication n’avait été fournie concernant la production, son fonctionnement, soit notamment le coût et l’effectif nécessaire, si ce n’était qu’un employé serait embauché pour la production. Ce n’était que dans le recours et dans le nouveau Business plan que le recourant expliquait que le produit serait fabriqué à Berne et embouteillé en Autriche. Aucun document relatif au partenariat annoncé avec D______ SA n’avait été produit.

Malgré la projection d’un chiffre d’affaires important sur les cinq premières années, selon le premier Business plan, des pertes étaient à comptabiliser les trois premières années. Alors que les salariés devaient être au nombre de sept durant les cinq premières années et que leurs salaires devaient augmenter, les charges du personnel diminuaient au contraire au fil des années, ce qui était incohérent. De même, sur le compte de résultats, la projection des impôts était de 0% sans aucune explication, ce qui paraissait plutôt invraisemblable, tandis que sur le compte de trésorerie, les impôts étaient évalués à 16%, ce qui démontrait une autre incohérence.

Selon le nouveau Business plan, le résultat net des trois premières années était différent du 1er Business plan puisqu’une perte était indiquée uniquement pour la 1ère année tandis que des gains étaient prévus pour les quatre années suivantes. Ceci était dû au fait que la durée de l’amortissement avait été mise à jour, passant de cinq à dix ans. Cet amortissement semblait comprendre le site internet et le marketing & développement des marchés mondiaux. Les marchandises de production et stock ne figuraient plus dans la trésorerie d’investissement. La notion de marketing & développement des marchés mondiaux était évasive, le recourant n’ayant pas concrètement spécifié en quoi celle-ci consisterait, si ce n’était que les réseaux sociaux seraient le canal de référencement pour la société. Les charges du personnel avaient été augmentées pour être proportionnelles au revenu. Le prêt étranger avait baissé à CHF 2'500'000.- ; aucun intérêt sur prêt ni l’origine de ce dernier n’avaient été indiqués. Par conséquent, la demande du recourant ne présentait pas un intérêt économique suffisant pour la Suisse.

En outre, l’exiguïté du contingent cantonal impliquait de ne retenir que les demandes qui se démarquaient concrètement par un fort intérêt économique.

13.         Le recourant n’a pas fait usage de la possibilité de répliquer qui lui a été offerte par le tribunal.

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'OCIRT en matière de marché du travail (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ  - E 2 05  ; art. 3 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits ; il incombe à celles-ci d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_1156/2018 du 12 juillet 2019 consid. 3.3 et les arrêts cités). En matière de droit des étrangers, l'art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l'étranger ou des tiers participants (ATF 142 II 265 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_323/2018 du 21 septembre 2018 consid. 8.3.3).

Lorsque les preuves font défaut ou s'il ne peut être raisonnablement exigé de l'autorité qu'elle les recueille pour les faits constitutifs d'un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (cf. ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_27/2018 du 10 septembre 2018 consid. 2.2 ; 1C_170/2011 du 18 août 2011 consid. 3.2 et les références citées ; ATA/99/2020 du 28 janvier 2020 consid. 5b). Il appartient ainsi à l'administré d'établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l'administration de démontrer l'existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4a ; ATA/1155/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b et les références citées).

6.             Selon l’art. 11 LEI, tout étranger qui entend exercer en Suisse une activité lucrative doit être titulaire d’une autorisation, quelle que soit la durée de son séjour ; il doit la solliciter auprès de l’autorité compétente du lieu de travail envisagé (al. 1). Est considérée comme activité lucrative toute activité salariée ou indépendante, qui procure normalement un gain, même si elle est exercée gratuitement (al. 2).

7.             Lorsqu’un étranger ne possède pas de droit à l’exercice d’une activité lucrative, une décision cantonale préalable concernant le marché du travail est nécessaire pour l’admettre en vue de l’exercice d’une activité lucrative (art. 40 al. 2 LEI).

8.             Aux termes de l’art. 83 al. 1 let. a de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), avant d'octroyer une première autorisation de séjour ou de courte durée en vue de l'exercice d'une activité lucrative, l'autorité cantonale du marché du travail décide si les conditions sont remplies pour exercer une activité lucrative salariée ou indépendante au sens des art. 18 à 25 LEI.

9.             La procédure d’obtention d’autorisation est réglée à Genève aux art. 6 al. 1 à 7 du règlement d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 9 mars 2009 (RaLEtr - F 2 10.01).

10.         Selon l'art. 2 al. 1 OASA, qui concrétise l'art. 19 LEI (admission en vue d'une activité lucrative indépendante), est considérée comme activité lucrative indépendante toute activité exercée par une personne dans le cadre de sa propre organisation, librement choisie, dans un but lucratif, soumise à ses propres instructions matérielles et à ses propres risques et périls. Cette organisation librement choisie peut être gérée par exemple sous la forme d'un commerce, d'une fabrique, d'un prestataire de service, d'une industrie ou d'une autre affaire (cf. ATF 140 II 460 consid. 4.1.3).

11.         La jurisprudence a retenu qu'une personne, seule et unique associée d'une société à responsabilité limitée exerce une activité lucrative indépendante (cf. ATAF C-7286/2008 du 9 mai 2011 consid. 6.1). Le tribunal de céans a fait sienne cette appréciation (cf. JTAPI/1109/2013 du 9 octobre 2013). Il a également jugé qu'un associé d'une société à responsabilité limitée détenant dix-huit des vingt parts sociales apparaissait comme le principal acteur de la société, de sorte que son activité équivalait à celle d'un indépendant (JTAPI/1082/2013 du 8 octobre 2013). Il a par ailleurs considéré comme étant de nature indépendante l'activité d'une personne qui était le seul membre présent en Suisse du conseil d'une fondation et qui disposait de la signature individuelle, alors que les deux autres membres étaient domiciliés à l'étranger et qu'ils ne disposaient que d'une signature collective à deux avec elle (JTAPI/1334/ 2013 du 10 décembre 2013).

12.         En l'espèce, quand bien même le recourant a signé un contrat de travail avec B______ Sàrl en qualité de directeur, ce qui fait formellement de lui un salarié de cette société et donc, à première vue, une personne exerçant une activité lucrative dépendante, il convient de retenir qu'il exerce en réalité une activité lucrative indépendante. En effet, dès lors qu'il est l’un des associés de cette société, son activité est déployée dans le cadre exclusif de sa propre organisation. De plus, selon ses propres explications, il occupe une fonction dirigeante de l’entreprise.

Partant, sa demande doit effectivement être analysée sous l’angle de l’exercice d’une activité lucrative indépendante (art. 19 LEI), ce qui n’est au demeurant pas contesté.

13.         Selon l’art. 19 LEI, un étranger peut être admis en vue de l'exercice d'une activité lucrative indépendante aux conditions suivantes : son admission sert les intérêts économiques du pays (let. a) ; les conditions financières et les exigences relatives à l'exploitation de l'entreprise sont remplies (let. b) ; il dispose d'une source de revenus suffisante et autonome (let. c) ; les conditions fixées aux art. 20 et 23 à 25 LEI sont remplies (let. d).

Ces conditions doivent être remplies de manière cumulative (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral F-4755/2018 du 27 janvier 2021 consid. 4.3 in fine).

En raison de sa formulation potestative, cette disposition ne confère aucun droit à la délivrance d'une telle autorisation de séjour (arrêts du Tribunal fédéral 2C_56/2016 du 20 janvier 2016 consid. 3 ; 2D_4/2015 du 23 janvier 2015 consid. 3 ; 2C_541/2012 du 11 juin 2012 consid. 4.2) et les autorités compétentes bénéficient d'un large pouvoir d'appréciation dans le cadre de son application (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.1 ; C-5420/2012 du 15 janvier 2014 consid. 6.2 ; ATA/1660/2019 du 12 novembre 2019 consid. 4b).

14.         L'octroi d'une autorisation de travail en vue de l'exercice d'une activité lucrative indépendante ne peut être admis que s'il est prouvé qu'il en résultera des retombées durables positives pour le marché suisse du travail (intérêts économiques du pays). On considère notamment que le marché suisse du travail tire durablement profit de l'implantation d'une entreprise, lorsque celle-ci contribue à la diversification de l'économie régionale dans la branche concernée, obtient ou crée des places de travail pour la main d'œuvre locale, procède à des investissements substantiels et génère de nouveaux mandats pour l'économie suisse (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-968/2019 du 16 août 2021 consid. 5.3.1). Dans une première phase (création et édification de l'entreprise), les autorisations idoines sont délivrées pour deux ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-4160/2013 du 29 septembre 2014 ; Minh Son NGUYEN/ Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. 2 : LEtr, Berne, 2017, p. 146 et les références citées ; SEM, Directives et commentaires, Domaine des étrangers, Séjour avec activité lucrative [Chapitre 4], 2013, état au 1er juin 2024 [ci-après : directives du SEM], ch. 4.3.1, 4.7.2.1 et 4.7.2.2).

15.         Dans un arrêt du 22 février 2022, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) a retenu que les prévisions d’emploi de six personnes à l’horizon 2023 ne pouvaient être considérées comme remplissant la condition de création de places pour la main-d'œuvre locale (ATA/184/2022, consid. 8.g).

16.         La notion d'« intérêt économique du pays », formulée de façon ouverte, concerne au premier chef le domaine du marché du travail. Il s’agit, d’une part, des intérêts de l’économie et de ceux des entreprises. D’autre part, la politique d’admission doit favoriser une immigration qui n’entraîne pas de problèmes de politique sociale, qui améliore la structure du marché du travail et qui vise à plus long terme l’équilibre de ce dernier (Message du Conseil fédéral du 8 mars 2002 concernant la loi sur les étrangers, in FF 2002 3469 ss, p. 3485 s. et 3536). En particulier, les intérêts économiques de la Suisse seront servis lorsque, dans un certain domaine d’activité, il existe une demande durable à laquelle la main d’œuvre étrangère en cause est susceptible de répondre sur le long terme (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-4226/207 du 8 octobre 2019 consid. 4.5.1 ; C-5912/2011 du 26 août 2015 consid. 7.1 ; et les références citées ; ATA/1363/2020 du 22 décembre 2020 consid. 8e ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5d). L'art. 3 al. 1 LEI concrétise le terme en ce sens que les chances d'une intégration durable sur le marché du travail suisse et dans l'environnement social sont déterminantes. L'activité économique est dans l'intérêt économique du pays si l'étranger offre par là une prestation pour laquelle il existe une demande non négligeable et qui n'est pas déjà fournie en surabondance (ATA/184/2022 du 22 février 2022 consid. 8e et les références citées ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. 2 : LEtr, 2017, p. 145 s. et les références citées).

17.         Selon les directives établies par le SEM, qui ne lient pas le juge mais dont celui-ci peut tenir compte pour assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré pour autant qu'elles respectent le sens et le but de la norme applicable (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-968/2019 du 16 août 2021 consid. 5.4.2 ; ATA/1198/2021 du 9 novembre 2021 consid. 7b), lors de l’appréciation du cas, il convient de tenir compte en particulier de la situation sur le marché du travail, de l’évolution économique durable et de la capacité de l’étranger concerné à s’intégrer. Il ne s’agit pas de maintenir une infrastructure avec une main-d’œuvre peu qualifiée disposée à travailler pour de bas salaires, ni de soutenir des intérêts particuliers. Par ailleurs, les étrangers nouvellement entrés dans le pays ne doivent pas faire concurrence aux travailleurs en Suisse en provoquant, par leur disposition à accepter de moins bonnes conditions de rémunération et de travail, un dumping salarial et social (directives du SEM, séjour avec activité lucrative (Chapitre 4) du 25 octobre 2013, état au 1er juin 2024 (ci-après : directives SEM), ch. 4.3.1; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4226/ 2017 du 8 octobre 2019 consid. 4.5.1 ; ATA/1198/2021 du 9 novembre 2021 consid. 7b).

18.         Afin de permettre à l'autorité d'examiner les conditions financières et les exigences liées à l'exploitation de l'entreprise, les demandes doivent être motivées et accompagnées des documents conformément à la liste de vérification des annexes à fournir (cf. directives du SEM, ch. 4.8.11) et d’un plan d’exploitation. Celui-ci devra notamment fournir des indications sur les activités prévues, l'analyse de marché (business plan), le développement de l’effectif du personnel (plans quantitatif et qualitatif) et les possibilités de recrutement, ainsi que les investissements prévus, le chiffre d’affaires et le bénéfice escomptés. Les liens organisationnels avec d’autres entreprises sont également à indiquer. L’acte constitutif de l’entreprise et/ou extrait du registre du commerce sont à joindre (directives du SEM, ch. 4.7.2.3).

19.         L’autorisation doit également s’inscrire dans les limites du contingent fixé par le Conseil fédéral (art. 20 LEI), selon un nombre maximum fixé dans l’annexe 2 OASA, à savoir 91 permis B pour l’année 2024.

20.         En l’espèce, l'analyse à laquelle a procédé l'OCIRT, qui dispose en la matière d'un large pouvoir d'appréciation, n'apparaît pas fondée sur des éléments dépourvus de pertinence, négligeant des facteurs décisifs ou guidée par une appréciation insoutenable des circonstances, que ce soit dans son approche ou dans son résultat.

En particulier, sous l'angle de l'art 19 LEI, l'autorité intimée a retenu à juste titre que les arguments développés par le recourant étaient insuffisants pour permettre de considérer que l’admission de sa demande servirait les intérêts économiques helvétiques au sens de la loi et de la jurisprudence précitées.

En effet, le recourant n'a pas démontré que son activité, telle qu’annoncée dans sa demande et dans les deux Business plans produits - soit la commercialisation d’un soda au café, qui se distinguerait notamment par son goût unique et la prise en compte des préoccupations des consommateurs sur la santé et la responsabilité environnementale - revêtirait une originalité particulière dans le paysage économique genevois et contribuerait ainsi à sa diversification. De même et en l’état du dossier, il n’a pas été démontré par le recourant, qui supporte le fardeau de la preuve, que son projet serait à même de s’inscrire dans un secteur d’activités innovant.

S’agissant du partenariat stratégique annoncé avec D______ SA, il sera retenu qu’il ne repose sur aucun élément au dossier. Il en va de même de la prétendue commande d’environ 500'000 canettes par D______ SA annoncée par le recourant, dont l’existence n’a pas été démontrée. Il sera en outre relevé que, dans le cadre de son recours, le recourant a annoncé le début de cette collaboration pour mai 2024. Dès lors que, cinq mois plus tard, le recourant, qui n’a d’ailleurs pas fait usage de la possibilité de répliquer, n’a toujours pas prouvé la véracité d’une telle allégation, celle-ci ne saurait être prise en compte. Par conséquent, faute pour le recourant d’avoir démontré l’existence d’une réelle demande en lien avec le produit qu’il entend proposer, respectivement développer, le tribunal retiendra que celui-ci n’est pas à même de contribuer à la diversification du tissu économique genevois.

Dans le même sens, la condition de la création de places de travail ne paraît pas davantage réalisée. Le recourant a indiqué, dans son recours, qu’il souhaitait engager quatre personnes à l’avenir. D’une part, force est de constater qu’il s’agit d’une simple allégation relativement vague, dès lors que l’on ignore les postes concernés, le montant des salaires ou encore le délai dans lequel ces engagements sont prévus. D’autre part et en tout état, comme cela ressort de la jurisprudence précitée, de telles prévisions sont modestes et insuffisantes pour permettre l'octroi d’une autorisation avec activité lucrative indépendante dans le canton de Genève, notamment en raison de l'exiguïté du contingent cantonal. L’on ne saurait donc considérer que l'activité de la société et celle du recourant permettraient la création d'un nombre d'emplois significatif qui aurait des retombées positives et durables sur le marché suisse du travail.

Par ailleurs, le recourant n’est pas parvenu à démontrer que les activités déployées permettraient de générer de nouveaux mandats pour l'économie suisse. En effet, aucun contrat, ni même offre ou devis auprès de potentiels clients, n’a été versé au dossier. Pour ce même motif, comme exposé plus haut, les allégations de partenariat avec D______ SA ne sauraient être prises en compte.

Il en va de même s’agissant d’éventuels investissements substantiels en Suisse de la part du recourant, dont l’existence n’a pas été démontrée, ni même alléguée.

Quant à l’allégué du recourant selon lequel son activité était sur la voie de la rentabilité dans les années à venir avec des signes tangibles de croissance déjà perceptibles, il n'est appuyé par aucune pièce justificative.

Il convient encore de relever que les deux Business Plans, produits respectivement en annexe de la requête d’autorisation de travail puis du recours, comportent plusieurs incohérences. Il ressort notamment des constats de l’OCIRT, que le tribunal fait siens, qu’alors que les salariés devaient être au nombre de sept durant les cinq premières années et que leurs salaires devraient augmenter, que les charges du personnel diminueront au contraire au fil des années. A cela s'ajoute que sur le compte de résultats, la projection des impôts est de 0% sans aucune explication, ce qui parait quelque peu surprenant alors que sur le compte de trésorerie de la société, les impôts sont évalués à 16%, ce qui apparaît contradictoire.

De plus, selon le nouveau Business plan du 5 mars 2024, les marchandises de production et stock ne figurent plus dans la trésorerie d’investissement. La notion de « marketing & développement des marchés mondiaux » est évasive, le recourant n’ayant pas concrètement spécifié en quoi celle-ci consisterait, si ce n’était en expliquant que les réseaux sociaux seraient le canal de référencement pour la société. Les charges du personnel ont été augmentées pour être proportionnelles au revenu. Le prêt étranger a baissé à CHF 2'500'000.- ; aucun intérêt sur prêt n’est indiqué et l’origine de ce financement n'est pas spécifiée.

Dans ces conditions, les Business plans produits par le recourant en annexe de sa requête puis en cours de procédure de recours n’apparaissent pas suffisamment probants pour déterminer, et a fortiori démontrer, l’intérêt économique de sa demande.

Au vu de ce qui précède, force est de constater qu'il n'apparaît pas, qu'il résulterait de l'admission de la demande du recourant, des retombées durables positives pour le marché suisse du travail pi que celui-ci en tirerait durablement profit, mais, au contraire, que la délivrance du permis requis servirait en réalité les seuls intérêts privés du recourant et ceux de B______ Sàrl dont il est l'un des associés gérants.

En conclusion, il sera retenu que l'admission de la demande du recourant ne sert pas les intérêts économiques de la Suisse contrairement à ce qu'exige l'art. 19 let. a LEI.

21.         La première condition - cumulative - de l'art. 19 LEI n'étant pas réalisée, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres conditions de cette disposition, ni d'ailleurs les autres arguments développés par le recourant, étant rappelé que, compte tenu de l'exiguïté des contingents du canton de Genève, qui se montent, pour rappel, à 91 unités pour l’année 2024, la commission tripartite est en outre contrainte de ne retenir que les demandes qui se démarquent pas un fort intérêt économique, ce qui n'est pas le cas en l'occurrence.

22.         Au vu de ce qui précède, l'analyse à laquelle a procédé l’OCIRT, qui dispose en la matière d’un large pouvoir d'appréciation, n'apparaît pas inappropriée ni fondée sur des éléments dépourvus de pertinence, négligeant des facteurs décisifs ou guidée par une appréciation insoutenable des circonstances, que ce soit dans son approche ou dans son résultat.

L’on ne peut ainsi retenir que cet office aurait fait un usage excessif ou abusif dudit pouvoir d'appréciation, étant rappelé que lorsque le législateur a voulu conférer à l'autorité de décision un pouvoir d'appréciation dans l'application d'une norme, le juge qui, outrepassant son pouvoir d'examen, corrige l'application pourtant défendable de cette norme à laquelle ladite autorité a procédé viole lui-même le principe de l'interdiction de l'arbitraire (cf. ATF 140 I 201 consid. 6.1 et les références citées).

23.         En conclusion, mal fondé, le recours sera rejeté et la décision contestée confirmée.

24.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

25.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 6 mars 2024 par Monsieur A______ contre la décision de de l'office cantonal de l’inspection et des relations du travail du 7 février 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.


Au nom du Tribunal :

La présidente

Laetitia MEIER DROZ

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière