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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3070/2023

JTAPI/326/2024 du 11.04.2024 ( OCIRT ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR;ACTIVITÉ LUCRATIVE;PRIORITÉ DES TRAVAILLEURS INDIGÈNES;LIMITATION DU NOMBRE DES ÉTRANGERS
Normes : LEI.18; LEI.21.al1; LEI.11
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3070/2023

JTAPI/326/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 11 avril 2024

 

dans la cause

 

A______ SA, représentée par Me Dimitri IAFAEV, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'INSPECTION ET DES RELATIONS DU TRAVAIL

 


EN FAIT

1.             A______ SA (ci-après : A______, la société ou l’employeur) est une société anonyme inscrite au registre du commerce de Genève depuis le ______ 2021 qui a pour but le négoce international de matières premières (incluant, mais ne se limitant pas, aux produits pétroliers raffinés de tout genre, ainsi que de produits semblables, métaux, métaux rares et ferrailles, grains et autres produits agricoles) et toute opération commerciale, financière et logistique nécessaire à cela ; la société peut faire, soit pour son compte, soit pour le compte de tiers, toutes opérations financières, commerciales, mobilières ou immobilières se rattachant directement ou indirectement à son but ; la société peut également constituer des succursales et des filiales en Suisse ou à l'étranger.

Messieurs B______ et C______ en sont respectivement les administrateur président et administrateur, avec signature individuelle.

2.             Madame D______, née le ______ 1982, est une ressortissante ukrainienne. Elle n'a jamais été au bénéfice d'une autorisation de travail ou de séjour en Suisse.

Selon son curriculum vitae (CV), elle est titulaire d’un Bachelor en finances complété par un Master en finances puis un Doctorat en philosophie dans le domaine des relations économiques internationales délivrés par la Kyiv National Economic University et au bénéfice d’une expérience professionnelle dans le domaine bancaire et financier depuis 2005, en qualité d’économiste auprès de la banque E______, de directrice auprès de la banque F______, de directrice financière auprès de la société G______ et d’administratrice présidente auprès de la société H______. Elle parle l'ukrainien, le russe et l'anglais.

3.             Le 9 janvier 2023, A______ a signé un contrat de travail avec Mme D______ pour un poste de « Risk Finance Manager » à Genève, avec une entrée en fonction début mars 2023. Son salaire de base était de CHF 8'500.-, calculé sur douze mois. Par avenant du 1er juin 2023, ce salaire est passé à CHF 11'000.-, calculé sur douze mois, dès cette date.

4.             Le 20 avril 2023, A______ a annoncé à l'office cantonal de l'emploi (OCE) la vacance d'un poste d'analyste financier.

5.             Le 22 mai 2023, suite à cette annonce, le service du placement a répondu n'avoir aucun candidat répondant aux critères de la société.

6.             Par courrier du 20 juin 2023 auquel étaient joints un formulaire M daté du 14 juin 2023 et diverses pièces, A______ a adressé une demande d'autorisation de séjour à l'année avec activité lucrative (permis B) en faveur de Mme D______ auprès de l'office cantonal de la population et de la migration (ci-après : OCPM), en qualité d'analyste financière, pour un salaire mensuel de CHF 11'000.-.

7.             Par courrier du 12 juillet 2023, l'office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT), à qui l'OCPM avait transmis cette demande, a sollicité des pièces et renseignements complémentaires de la société, à savoir notamment des informations plus précises sur le réseau de Mme D______, les objectifs chiffrés précis assignés à cette dernière et des explications au regard du principe de priorité dans la mesure où il apparaissait que l’intéressée avait signé son contrat avant l’annonce du poste à l’OCE. Un délai au 21 juillet 2023 lui était imparti.

8.             Dans le délai prolongé au 8 août 2023 à la demande de la société, cette dernière a transmis à l’OCIRT le CV de Mme D______, des informations sur la société ainsi qu'un complément de business plan avec des informations plus précises sur son réseau et sur les objectifs chiffrés qui lui avaient été assignés.

Le contrat signé avec Mme D______ en mars 2023 l'avait été à condition qu’elle ne trouve aucun autre candidat suisse ou européen pour le poste à pourvoir et que sa demande de permis soit acceptée. Elle n'avait ainsi, à ce jour, pas débuté son activité mais avait d’ores et déjà entamé des démarches à Genève pour trouver un logement. Elle avait, quant à elle, effectué des recherches pour trouver un candidat suisse ou européen, mais n'avait reçu aucune candidature conforme aux exigences du poste annoncé à l’OCE.

9.             Par courriel du 14 août 2023, faisant suite à un entretien téléphonique avec un collaborateur de l’OCIRT du même jour, A______ a encore transmis à cet office des réponses de son administrateur à ses questions additionnelles, lesquelles ont été transmises au membres de la commission tripartite.

Elle expliquait notamment ses pertes en 2021 et 2022 par le Covid et le conflit Russo/Ukrainien. Elle avait dû revoir sa stratégie et attendait environ USD 2M de profit en 2023. Les attentes étaient également bonnes pour les années suivantes du fait de leur réorientation stratégique.

10.         Par décision du 16 août 2023, l’OCIRT, après examen du dossier par la commission tripartite, a refusé de délivrer l'autorisation sollicitée en faveur de Mme D______.

La demande ne servait pas les intérêts économiques de la Suisse selon l’art. 18 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005
(LEI - RS 142.20) et l'ordre de priorité de l’art. 21 LEI n'avait pas été respecté, la société n'ayant pas démontré qu'aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d'un pays de l'UE et de l'AELE n'avait pu être trouvé.

11.         Par acte du 18 septembre 2023, A______, sous la plume d’un conseil, a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre cette décision, concluant à son annulation et à ce qu’il soit ordonné à l’OCIRT d’approuver la délivrance d’un permis B avec activité lucrative en faveur de Mme D______, soit subsidiairement, au renvoi du dossier à l’OCIRT pour nouvelle décision dans ce sens, le tout sous suite de frais et dépens. Préalablement, elle a requis l’audition de M. C______, lequel pourrait renseigner le tribunal sur les recherches entreprises, à grande échelle, afin de trouver un candidat pour le poste d'analyste financier.

La décision entreprise violait son droit d'être entendu. Le 14 août 2023, soit deux jours avant son prononcé, un collaborateur de l’OCIRT l’avait appelée afin d’obtenir des informations complémentaires concernant notamment la raison des pertes subies en 2021 et 2022 et ses expectatives de bénéfice pour les années à venir. Ces questions étaient particulièrement importantes, car elles étaient en lien avec le critère de l'intérêt économique de la candidature de Mme D______. Or, au vu du court délai imparti, elle avait uniquement pu envoyer un email contenant une brève explication mais n’avait pas pu produire de documents pour confirmer ses bonnes expectatives économiques tels, par exemple ses comptes intermédiaires au 31 juillet 2023. Elle n’avait ainsi pas pu pleinement faire valoir son droit d'être entendu.

L'art. 18 lit. a LEI avait également été violé dès lors que l'engagement de Mme D______ et le développement, grâce à celle-ci, de son activité en Ukraine, pourraient générer un bénéfice de l'ordre de USD 1'602'664,08 en 2023. Son engagement aurait ainsi pour conséquence de servir les intérêts de l'économie de la Suisse et les prestations qu’elle offrait n'étaient par ailleurs pas déjà fournies en surabondance. À cet égard, elle avait décidé d'élargir son activité de trading en développant également des activités sur le marché du gaz en Ukraine, dans un effort de diversification de ses activités et une volonté de se démarquer par rapport aux autres sociétés de trading actives sur la place genevoise. Ce marché allait connaître un fort développement dans les années à venir, dans le cadre de la reconstruction de l'Ukraine, et elle souhaitait participer à cette reconstruction en mettant à profit son expérience et son savoir-faire dans le domaine du gaz. Le parcours académique, les expériences professionnelles, la connaissance des langues et l’important réseau de Mme D______ en faisaient une candidate parfaitement adaptée au poste à repourvoir.

La décision violait enfin l'art. 21 LEI, dès lors qu’elle avait publié une annonce auprès de l'OCE au mois d'avril 2023 et que M. C______ a fait des recherches de candidats lors de différentes conférences auxquelles il avait pris part. C'était d’ailleurs à l’occasion de l’une d’elles qu'il avait trouvé Mme D______. Le dossier contenait également la preuve d'envoi de CV suite à l'annonce du poste.

Elle a joint un chargé de pièces, dont notamment un CV de Monsieur I______, son Business Plan du 7 juin 2023, ses comptes audités 2022, son compte de pertes et profits 2021 et 2022, ses comptes au 31 juillet 2023, le contrat de travail du 9 janvier 2023 de Mme D______ et son avenant du 1er juin 2023 ainsi que divers documents relatifs à la formation et les expériences professionnelles de cette dernière.

12.         Dans ses observations du 20 novembre 2023, l'OCIRT a conclu au rejet du recours, sous suite de frais et dépens.

Aucune violation du droit d'être entendu n’était à déplorer. Les motifs invoqués à l’appui de sa décision définissaient clairement les raisons pour lesquelles l'autorisation sollicitée n'avait pas été accordée ainsi que les bases légales applicables. La recourante avait d’ailleurs pu faire valoir tous les griefs utiles dans son recours.

Conformément à l'art. 90 LEI, la recourante se devait en outre de déposer une demande complète et de fournir sans retard les moyens de preuve nécessaires afin qu’il puisse prendre une décision en toute connaissance de cause. Sa demande n’étant pas complète, il lui avait adressé une demande de renseignements et de pièces le 12 juillet 2023, puis par téléphone du 14 août 2023. Le délai pour y donner suite avait été prolongé, à sa demande, et elle avait ainsi eu jusqu’au 14 août 2023 pour y donner suite. La recourante avait dès lors pleinement eu la possibilité d'ajouter des informations supplémentaires, en sus des renseignements qu’il lui demandait et, partant, la décision querellée avait été prise en ayant une vue d'ensemble complète de sa situation.

Pour le surplus, la société n’avait fait aucune recherche sur le marché suisse ou européen. L'annonce du poste vacant à l'OCE avait été faite trois mois après avoir signé le contrat de travail avec Mme D______ ce qui démontrait que l'employeur n'avait nullement l'intention de prendre en considération les éventuelles candidatures du service de placement et que la demande déposée en sa faveur relevait principalement de la convenance personnelle. Les explications données à ce sujet par la société ne convainquaient pas. Partant, cette dernière n'avait pas apporté la preuve qu'elle avait fait tous les efforts possibles pour trouver un travailleur correspondant au profil requis en Suisse ou au sein de l’UE/AELE et n'avait par conséquent pas respecté le principe de la priorité dans le recrutement posé par l'art. 21 LEI.

Au vu des comptes présentés par la société, qui affichaient des pertes importantes en 2021 (CHF 2'777'458) et 2022 (CHF 2'283’536.-) ainsi qu’une baisse du chiffre d'affaires entre 2022 et 2023, il était enfin difficile d'envisager qu’elle puisse générer une activité durable et servir les intérêts économiques de la Suisse.

13.         Par réplique du 15 décembre 2023, A______ a persisté dans ses griefs et conclusions.

Sous l’angle de l’art. 18 let. a LEI, grâce à l’engagement de Mme D______, elle pourrait générer un bénéfice de l’ordre de USD 1'602'664.08 en 2023 et fortement développer son activité pour les 36 prochains mois.

En lien avec l’art. 21 LEI, elle rappelait enfin que M. C______ et Mme D______ avaient convenu oralement que le contrat signé le 9 janvier 2023 ne pourrait entrer en force qu’à condition que la société ne trouve aucun autre travailleur indigène ou européen. M. C______ avait par ailleurs fait des recherches de candidats lors de conférences et le poste avait été publié auprès de l’OCE au mois d’avril 2023.

14.         Dans sa duplique du 12 janvier 2024, l’OCIRT a également persisté dans ses conclusions. Quand bien même la recourante affirmait désormais, sans toutefois en apporter la preuve, que malgré les lourdes pertes subies en 2021 et 2022, elle devrait générer un bénéfice de l’ordre de USD 1'602'664.08 en 2023, il n’en demeurait pas moins qu’elle n’avait pas respecté le principe de priorité de
l’art. 21 LEI.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de l’inspection et des relations du travail en matière de marché du travail (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin
1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Préalablement, la recourante demande l’audition de M. C______, son administrateur, lequel pourrait renseigner le tribunal sur les recherches entreprises, à grande échelle, afin de trouver un candidat pour le poste d'analyste financier.

4.             Garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation entraîne, lorsque sa réparation par l’autorité de recours n’est pas possible, l’annulation de la décision attaquée sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 137 I 195 consid. 2.2 ; 135 I 279 consid. 2.6.1 ; 135 I 187 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_529/2016 du 26 octobre 2016 consid. 4.2.1 ; 5A_681/2014 du 14 avril 2015 consid. 31 ; ATA/289/ 2018 du 27 mars 2018 consid. 2b). Ce moyen doit dès lors être examiné en premier lieu (ATF 137 I 195 consid. 2.2).

Il comprend notamment le droit, pour l'intéressé, de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ;
142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités).

5.             Ce droit ne s’étend toutefois qu’aux éléments pertinents pour décider de l’issue du litige et le droit de faire administrer des preuves n’empêche pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_159/2020 du 5 octobre 2020 consid. 2.2.1).

6.             En l'espèce, le tribunal estime que le dossier contient les éléments suffisants et nécessaires à l'établissement des faits pertinents pour traiter les griefs soulevés par la recourante et statuer sur le litige.

La recourante n'indique pour le surplus pas en quoi la procédure écrite l'aurait empêché, dans le cadre de son recours, d'exprimer de manière complète et précise l'ensemble des faits pertinents.

De la même manière, elle n'explique pas en quoi l’audition de M. C______ serait pertinente, étant rappelé que la simple affirmation d’avoir entrepris des recherches à grande échelle ne saurait en tout état être considérée comme suffisante au regard de l’art. 21 LEI, point qui sera examiné ci-après. Par conséquent, il ne se justifie pas de procéder à l’audition du précité.

7.             La recourante reproche à l’OCIRT d’avoir violé son droit d’être entendu sous deux aspects. Elle n’aurait pas disposé de suffisamment de temps pour se déterminer avant le prononcé de la décision querellée et cette dernière ne serait pas suffisamment motivée.

8.             La base constitutionnelle et le contenu essentiel du droit d’être entendu ont déjà été mentionnés plus haut. Les modalités de sa mise en œuvre sont déterminés en premier lieu par les dispositions de droit cantonal de procédure (arrêt du Tribunal fédéral 8C_615/2016 du 15 juillet 2017 consid. 3.2.1 et les références citées ; ATA/289/ 2018 du 27 mars 2018 consid. 2b). Il est concrétisé à l’art. 41 LPA, selon lequel les parties ont le droit d’être entendues par l’autorité compétente avant que ne soit prise une décision.

9.             Le droit d’être entendu sert non seulement à établir correctement les faits, mais constitue également un droit indissociable de la personnalité garantissant à un particulier de participer à la prise d’une décision qui touche sa position juridique. Il comprend, en particulier, le droit pour la personne concernée de s’expliquer avant qu’une décision ne soit prise à son détriment, de fournir des preuves pertinentes quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos. En tant que droit de participation, le droit d’être entendu englobe donc tous les droits qui doivent être attribués à une partie pour qu’elle puisse faire valoir efficacement son point de vue dans une procédure (ATF 138 II 252 consid. 2.2 ; 138 I 484 consid. 2.1 ; 138 I 154 consid. 2.3.2 ; 137 I 195 consid. 2.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_472/2014 du 3 septembre 2015 consid. 4.1 ; ATA/80/2016 du 26 janvier 2016 consid. 2). L’étendue du droit de s’exprimer ne peut pas être déterminée de manière générale, mais doit être définie au regard des intérêts concrètement en jeu. L’idée maîtresse est qu’il faut permettre à une partie de pouvoir mettre en évidence son point de vue de manière efficace (ATA/778/2018 du 24 juillet 2018 consid. 3a et les références citées).

10.         Dans une procédure initiée sur requête d'un administré, celui-ci est censé motiver sa requête en apportant tous les éléments pertinents ; il n'a donc pas un droit à être encore entendu avant que l'autorité ne prenne sa décision afin de pouvoir présenter des observations complémentaires (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, n° 1528 ss, p. 509 s ; ATA/523/2016 du 21 juin 2016 consid. 2b).

11.         Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. implique aussi pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision. Selon la jurisprudence, il suffit que l'autorité ou le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. L'autorité n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais elle peut au contraire se limiter à ceux qui lui paraissent pertinents (ATF 138 I 232 consid. 5.1 ; ATF 137 II 266 consid. 3.2 ; ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; ATF 134 I 83 consid. 4.1 ; ATA/967/2016 du 15 novembre 2016 consid. 2b).

12.         La réparation d'un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d'être entendu, n'est possible que lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_240/2017 du 11 décembre 2018 consid. 3.2 ; 1B_556/2017 du 5 juin 2018 consid. 2.1). Elle dépend toutefois de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception. Elle peut cependant se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_556/2017 du 5 juin 2018 consid. 2.1) En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu'elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/802/2020 du 25 août 2020 consid. 4c et les références cités).

13.         En l'espèce, alors même qu’il lui appartenait de motiver sa requête en apportant tous les éléments pertinents, la recourante a été interpelée à plusieurs reprises par l’OCIRT durant la procédure, soit par courrier puis appel téléphonique des 12 juillet et 14 août 2023, pour expliciter sa demande et produire un certain nombre de documents complémentaires avant que cet office ne prononce sa décision, de sorte qu’aucune violation de son droit d’être entendu n’est à déplorer. Par ailleurs, si certes la décision litigieuse est succincte, elle demeure néanmoins parfaitement claire et ne nécessite pas de plus amples développements. Elle mentionne les bases légales applicables, soit les art. 18 et 21 LEI, ainsi que les motifs de refus. Ces éléments ont d’ailleurs permis à la recourante, sous la plume de son conseil, de motiver son recours de manière complète et, en particulier, d’y exposer de manière approfondie les raisons pour lesquelles elle estimait qu’une autorisation devait être délivrée à Mme D______. Dès lors, elle n’a subi aucun préjudice procédural. En tout état, même à supposer qu’une violation du droit d’être entendu de la recourante aurait été imputable à l’autorité intimée, ce grief a pu être réparé devant le tribunal et le renvoi de la cause à l’OCIRT constituerait ainsi une vaine formalité.

Ce grief d’ordre formel sera dès lors écarté.

14.         Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

15.         La recourante conteste le refus de l'OCIRT de délivrer une autorisation de séjour avec activité lucrative (permis B) à Mme D______, qu’elle souhaite engager comme « Risk Finance Manager ».

16.         La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie de Suisse des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), notamment par l’Accord du 21 juin 1999 entre, d’une part, la Confédération suisse, et, d’autre part, la Communauté européenne et ses États membres sur la libre circulation des personnes (ALCP - RS 0.142.112.681).

17.         En l'occurrence, Mme D______ étant ressortissante ukrainienne et non d'un pays membre de la Communauté européenne, la demande de permis déposée en sa faveur ne peut être examinée que sous l'angle de la LEI.

18.         Selon l'art. 11 LEI, tout étranger qui entend exercer en Suisse une activité lucrative doit être titulaire d'une autorisation, quelle que soit la durée de son séjour ; il doit la solliciter auprès de l'autorité compétente du lieu de travail envisagé (al. 1). Est considérée comme activité lucrative toute activité salariée ou indépendante, qui procure normalement un gain, même si elle est exercée gratuitement (al. 2). En cas d'activité salariée, la demande d'autorisation est déposée par l'employeur (al. 3).

19.         À teneur de l'art. 18 LEI, un étranger peut être admis en vue de l'exercice d'une activité lucrative salariée aux conditions suivantes : son admission sert les intérêts économiques du pays (let. a), son employeur a déposé une demande (let. b) et les conditions fixées aux art. 20 à 25 LEI sont remplies (let. c), notamment les exigences relatives à l'ordre de priorité (art. 21 LEI), les conditions de rémunération et de travail (art. 22 LEI), ainsi que les exigences portant sur les qualifications personnelles requises (art. 23 LEI). Ces conditions sont cumulatives (ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b et les arrêts cités).

20.         En raison de sa formulation potestative, l'art. 18 LEI ne confère aucun droit à la délivrance d’une autorisation de séjour pour activité lucrative (arrêts du Tribunal fédéral 2C_798/2018 du 17 septembre 2018 consid. 4.1 ; 2D_4/2015 du 23 janvier 2015 consid. 3 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b) et les autorités compétentes bénéficient d'un large pouvoir d'appréciation dans le cadre de son application (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.1 ; C-5420/2012 du 15 janvier 2014 consid. 6.2 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b).

21.         La notion d’« intérêt économique du pays », formulée de façon ouverte, concerne au premier chef le domaine du marché du travail. Il s'agit, d'une part, des intérêts de l'économie et de ceux des entreprises. D'autre part, la politique d'admission doit favoriser une immigration qui n'entraîne pas de problèmes de politique sociale, qui améliore la structure du marché du travail et qui vise à plus long terme l'équilibre de ce dernier (Message du Conseil fédéral du 8 mars 2002 concernant la loi sur les étrangers, in FF 2002 3469 ss, p. 3485 s. et 3536). En particulier, les intérêts économiques de la Suisse seront servis lorsque, dans un certain domaine d'activité, il existe une demande durable à laquelle la main d'œuvre étrangère en cause est susceptible de répondre sur le long terme (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-4226/207 du 8 octobre 2019 consid. 4.5.1 ;
C-5912/2011 du 26 août 2015 consid. 7.1 ; C-5420/2012 du 15 janvier 2014 consid. 6.1 et les références citées ; C_8717/2010 du 8 juillet 2011 consid. 5 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5d ; ATA/1018/2017 du 27 juin 2017 consid. 4c). L'activité économique est dans l'intérêt économique du pays si l'étranger offre par là une prestation pour laquelle il existe une demande non négligeable et qui n'est pas déjà fournie en surabondance (cf. ATA/896/2018 du 4 septembre 2018 consid. 6b ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. 2 : LEtr, 2017, p. 145 s. et les références citées).

22.         Selon les directives et circulaires du secrétariat d'État aux migrations
(SEM ; Séjour avec activité lucrative [ci-après : directives LEI], état au 1er février 2023, ch. 4.3.1, qui ne lient pas le juge, mais dont celui-ci peut tenir compte pour assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré, pourvu qu'elles respectent le sens et le but de la norme applicable ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 ; ATA/896/2018 du 4 septembre 2018 ; ATA/1280/2015 du 1er décembre 2015), il convient de tenir compte en particulier de la situation sur le marché du travail, de l'évolution économique durable et de la capacité de l'étranger concerné à s'intégrer. Il ne s'agit pas de maintenir une infrastructure avec une main-d’œuvre peu qualifiée disposée à travailler pour de bas salaires, ni de soutenir des intérêts particuliers. Par ailleurs, les étrangers nouvellement entrés dans le pays ne doivent pas faire concurrence aux travailleurs en Suisse en provoquant, par leur disposition à accepter de moins bonnes conditions de rémunération et de travail, un dumping salarial et social (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-4226/207 du 8 octobre 2019 consid. 4.5.1 ; C-857/2013 du 19 mai 2014 consid. 8.3 ; C-3518/2011 du 16 mai 2013 consid. 5.1 ; C-2485/2011 du 11 avril 2013 consid. 6 ; C-6135/2008 du 11 août 2008 consid. 8.2 ; ATA/1280/2015 du 1er décembre 2015 consid. 12 ; ATA/940/2015 du 15 septembre 2015 consid. 7c).

23.         Un étranger ne peut en outre être admis en vue de l'exercice d'une activité lucrative que s'il est démontré qu'aucun travailleur en Suisse ni aucun ressortissant d'un État avec lequel a été conclu un accord sur la libre circulation des personnes correspondant au profil requis n'a pu être trouvé (art. 21 al. 1 LEI).

24.         En d'autres termes, l'admission de ressortissants d'États tiers n'est possible que si, à qualifications égales, aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d'un État membre de l'UE ou de l'AELE ne peut être recruté. Le principe de la priorité des travailleurs résidants doit être appliqué à tous les cas, quelle que soit la situation de l'économie et du marché du travail (arrêt du Tribunal fédéral 2C_434/2014 du 8 août 2014 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.3.1 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c ; ATA/1368/2018 du 18 décembre 2018 consid. 3c).

25.         Les conditions d'admission ont matériellement pour but de gérer de manière « restrictive » l'immigration ne provenant pas de la zone UE/AELE, de servir conséquemment les intérêts économiques à long terme et de tenir compte de manière accrue des objectifs généraux relatifs aux aspects politiques et sociaux du pays et en matière d'intégration (ATAF 2011/1 consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.3.1 ; C-6198/2014 du 18 mai 2015 consid. 6.1 ; C-857/2013 consid. 5).

26.         Les employeurs sont tenus d'annoncer le plus rapidement possible aux offices régionaux de placement les emplois vacants qu'ils présument ne pouvoir repourvoir qu'en faisant appel à du personnel venant de l'étranger. Les offices de placement jouent un rôle clé dans l'exploitation optimale des ressources offertes par le marché du travail sur l'ensemble du territoire suisse. L'employeur doit, de son côté, entreprendre toutes les démarches nécessaires - annonces dans les quotidiens et la presse spécialisée, recours aux médias électroniques et aux agences privées de placement - pour trouver un travailleur disponible. On attend des employeurs qu'ils déploient des efforts en vue d'offrir une formation continue spécifique aux travailleurs disponibles sur le marché suisse du travail (ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c et les arrêts cités ; directives LEI, ch. 4.3.2.1).

27.         Il revient à l'employeur de démontrer avoir entrepris des recherches à une grande échelle afin de repourvoir le poste en question par un travailleur indigène ou ressortissant d'un État membre de l'UE/AELE et qu'il s'est trouvé dans une impossibilité absolue de trouver une personne capable d'exercer cette activité (ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c ; ATA/1368/2018 du 18 décembre 2018 consid. 3c ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-6074/2010 du 19 avril 2011 consid. 5.3). L'employeur doit être en mesure de rendre crédibles les efforts qu'il a déployés, en temps opportun et de manière appropriée, en vue d'attribuer le poste en question à des candidats indigènes ou à des candidats ressortissants de l'UE/AELE. Des ressortissants d'États tiers ne seront contactés que dans le cas où les efforts entrepris n'ont pas abouti. Il convient dès lors de veiller à ce que ces démarches ne soient pas entreprises à la seule fin de s'acquitter d'une exigence. Elles doivent être engagées suffisamment tôt, dans un délai convenable avant l'échéance prévue pour la signature du contrat de travail. En outre, il faut éviter que les personnes ayant la priorité ne soient exclues sur la base de critères professionnels non pertinents tels que des séjours à l'étranger, des aptitudes linguistiques ou techniques qui ne sont pas indispensables pour exercer l'activité en question, etc. (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3286/2017 du 18 décembre 2017 consid. 6.2 ; F-1992/2015 du 10 mars 2017 consid. 5.5 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c).

28.         Même si la recherche d'un employé possédant les aptitudes attendues de la part de l'employeur peut s'avérer ardue et nécessiter de nombreuses démarches auprès des candidats potentiels, de telles difficultés ne sauraient, à elles seules, conformément à une pratique constante des autorités en ce domaine, justifier une exception au principe de la priorité de recrutement énoncée à l'art. 21 LEI (arrêt du Tribunal administratif fédéral C_8717/2010 du 8 juillet 2011
consid. 8.1 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c ; ATA/1368/2018 du 18 décembre 2018 consid. 3c).

29.         Conformément à l'art. 90 LEI, l'étranger et les tiers participant à une procédure prévue par la loi doivent collaborer à la constatation des faits déterminants pour son application. Ils doivent en particulier fournir des indications exactes et complètes sur les éléments déterminants pour la réglementation du séjour (let. a) et fournir sans retard les moyens de preuves nécessaires ou s'efforcer de se les procurer dans un délai raisonnable (let. b).

30.         En l’espèce, au vu des écritures des parties et des pièces versées à la procédure, le tribunal parvient à la conclusion que l’OCIRT n’a pas violé les dispositions légales énoncées plus haut ou mésusé de son pouvoir d’appréciation en refusant l'octroi de l’autorisation de travail sollicitée en faveur de la recourante.

Sous l’angle de l’art. 21 al. 1 LEI, force est d’admettre que la démarche initiée par la recourante en avril 2023 en vue de trouver un analyste financier, n’a effectivement de loin pas atteint le niveau de recherches requis par la loi et la jurisprudence. Elle s’est en effet contentée d’annoncer la vacance du poste à l’OCE le 20 avril 2023. Or, une telle démarche ne suffit pas, en l’état des règles en vigueur, pour considérer qu’elle se serait acquittée de ses obligations légales en matière de priorité du marché suisse ou européen. On observera par ailleurs que Mme D______ a signé son contrat de travail le 9 janvier 2023, soit plus de trois mois avant l'annonce du poste à l'OCE, ce qui tend à démontrer que l'employeur n'avait en réalité nullement l'intention de prendre en considération les éventuelles candidatures du service de placement et que la demande déposée en sa faveur relève principalement de la convenance personnelle. Compte tenu des difficultés rencontrées pour trouver un/e candidat/e remplissant les conditions requises par le poste, il aurait appartenu à la recourante d’entreprendre des recherches bien plus poussées et de plus grande envergure sur les marchés du travail tant suisse que de l’UE/AELE, par exemple en faisant appel à des agences de recrutement et en publiant des annonces sur des sites internet spécialisés, en Suisse et en Europe, et dans la presse spécialisée. De telles démarches sont certes coûteuses, mais elles incombent à l'employeur, d'autant plus lorsqu'il cherche à pourvoir un poste extrêmement spécifique qui apportera une importante plus-value à son entreprise et la marche de ses affaires. Quant aux explications données par la société, à savoir que M. C______ aurait entrepris des recherches à large échelle, notamment lors des différentes conférences auxquelles il avait pris part, elles ne convainquent pas. Ses démarches ne sont au demeurant attestées par aucune pièce et ne correspondent en tout état pas à ce qui est attendu d’un employeur sous l’angle du respect du principe de priorité.

Dans ces conditions, force est de retenir, avec l’autorité intimée, que la société recourante n’est pas parvenue à démontrer avoir été réellement et concrètement dans l’impossibilité de trouver un travailleur correspondant aux exigences du poste sur le marché local ou européen, en particulier parce qu’elle aurait, en vain, entrepris toutes les recherches utiles et nécessaires susceptibles d’être attendues d’elle, qui permettraient de retenir que la condition de l’ordre de priorité de l’art. 21 al. 1 LEI serait remplie.

L’une des conditions légales cumulatives applicables (art. 18 let. c cum 21 al. 1 LEI) n’ayant pas été respectée, il n’est pas nécessaire d’examiner si les autres conditions sont réalisées. Le tribunal relèvera néanmoins encore qu’aucun élément du dossier ne permet de considérer que l’activité que Mme D______, aussi compétente soit-elle, serait amenée à déployer au sein de la société pourrait réellement avoir des retombées économiques positives pour l’économie suisse et, ainsi, représenter un intérêt pour ce pays au sens de l’art. 18 let. a LEI, tel que défini plus haut, que ce soit en termes d’investissements ou de diversification de l’économie régionale, étant rappelé qu’il convient de ne pas confondre l’intérêt économique de la Suisse avec celui de la société recourante à engager une personne particulière.

31.         Au vu de ce qui précède, il faut constater que le refus de l'OCIRT n'apparaît pas critiquable et que la décision querellée ne viole pas le droit fédéral. Celui-ci ne s'est pas fondé sur des considérations dénuées de pertinence et étrangères au but visé par la loi pour forger sa décision. La recourante ne démontre d'ailleurs pas en quoi cette dernière serait constitutive d'un excès ou d'un abus du pouvoir d'appréciation. On doit ainsi parvenir à la conclusion que l'appréciation que l'OCIRT a fait de la situation de la recourante demeure parfaitement défendable et, partant, admissible, étant souligné que lorsque le législateur a voulu conférer à l'autorité de décision un pouvoir d'appréciation dans l'application d'une norme, le juge qui, outrepassant son pouvoir d'examen, corrige l'application pourtant défendable de celle-ci à laquelle ladite autorité a procédé viole le principe de l'interdiction de l'arbitraire (cf. ATF 140 I 201 consid. 6.1 et les références citées).

Le recours, mal fondé, doit donc être rejeté.

32.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986
(RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.-. Il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

33.         Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

34.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 18 septembre 2023 par A______ SA contre la décision de l'office cantonal de l’inspection et des relations du travail du 16 août 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par son avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

Le greffier