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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/909/2023

JTAPI/1287/2023 du 16.11.2023 ( AMENAG ) , REJETE

Descripteurs : ARBRE;AUTORISATION DE DÉFRICHER
Normes : LPMNS.1; LPMNS.35; LPMNS.36; RCVA.3.al1; RCVA.16
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/909/2023 AMENAG

JTAPI/1287/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 16 novembre 2023

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OCAN

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______ est propriétaire de la parcelle n° 1______ de la commune de B______, sise à l’adresse ______, chemin du C______, sur laquelle se trouve une maison où il vit avec son épouse, ses deux filles et sa mère.

2.             Le 27 janvier 2023, il a déposé auprès de l'office cantonal de l'agriculture et de la nature (ci-après : OCAN) rattaché au département du territoire (ci-après : le département), une requête visant l'abattage d'un pin. Sous la rubrique « motif de la requête », était précisé : « Sécurité, arbre dangereux, branche cassée, suspicion de pourriture, dangerosité de chute ».

3.             Par décision du 10 février 2023, l’OCAN a refusé l’abattage requis au motif qu'il s'agissait d'un arbre marquant du paysage et en bon état sanitaire selon le constat visuel. Il recommandait une analyse par une entreprise spécialisée.

4.             Par acte du 7 mars 2023, M. A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant implicitement à son annulation et à l’octroi de l’autorisation requise.

Le refus de l'OCAN qui recommandait une analyse par une entreprise spécialisée sous entendait qu'il existait un doute sur l'état de santé de l'arbre. Il sollicitait une analyse de l'arbre pour se dédouaner des risques d'accidents. Le pin présentait des défauts, soit des écorces inclusives. Il se divisait en deux troncs au niveau de sa base (fourche primaire) à hauteur d'un mètre, puis chaque tronc se divisait à nouveau au milieu de l'arbre. A une hauteur de six mètres, quatre nouveaux troncs imposants reposaient sur un tronc divisé. Ces trois écorces inclusives fragilisaient sa résistance et le rendait plus vulnérable au vent et aux tempêtes. La croissance des troncs, la pluie et le gel accentuaient la fragilité de ses défauts. Les cinq entreprises ayant établi un devis lui avaient toutes fait part du risque important que l'arbre représentait. Toutes lui avaient conseillé son abattage, voire un grand haubanage sans garantie d'éviter un accident.

L'arbre se trouvait à trois mètres de la façade de sa maison, ce qui constituait une source de danger importante s'il venait à casser ou à tomber, ce qui risquait d'endommager le toit, la façade nord et la véranda pour des centaines de milliers de francs de dégâts. Aucune assurance ne couvrait ce genre de dommage et il n'était pas en mesure d'assumer des frais aussi importants. Le risque le plus grave résidait toutefois dans le fait qu'une personne pouvait mourir ou être blessée. Il avait peur, notamment lorsque ses filles jouaient dehors et ce, plus particulièrement depuis qu'une branche de 150 kilos s'était brisée et était tombée dans le jardin.

Par ailleurs, un pin apportait de nombreux inconvénients tels qu'une production incroyable de sève collante qui tombait sur la façade, le toit et la véranda, l'obligeant à un nettoyage tous les deux mois. Les chutes d'épines étaient également une source de problème pour le toit et les chenaux en terme d'écoulement et de rouille. Des chenilles processionnaires, malgré les traitements, revenaient chaque année. Il était très allergique aux poils urticants et volatiles de celles-ci. De novembre à avril, les chenilles faisaient leur nid et descendaient dans le jardin. Pendant la longue période de nidation, elles perdaient des poils au gré du vent, ce qui engendrait de fortes irritations cutanées, oculaires et des problèmes respiratoires pour tous les membres de la famille. Enfin, le pin était un immense perchoir pour les corbeaux, corneilles et pigeons dont les fientes tombaient dans le jardin, les dalles, la véranda et le chemin, ce qui était dégoutant et source de maladie. Il était disposé à remplacer le pin par un arbre plus en adéquation avec son environnement.

Il a produit un chargé de pièces dont des photographies du pin litigieux, un devis du 26 janvier 2023 par D______ pour l'élagage et l'abattage d'un pin d'un montant de CHF 4'631.10, un autre de E______ du 31 janvier 2023 pour une taille de sécurité et la pose de quatre Haubans consistant à maintenir une partie de l'arbre ou son intégralité afin d'éviter les chutes de branches charpentières, pour un montant de CHF 3'877.20 et un autre de F______, non daté, pour la mise en place d'un brochage de consolidation et la mise en place de six haubans dans le but de sécuriser l'écorce incluse en partie basse d'un montant de CHF 4'469.55.

5.             Le 17 mai 2023, l’OCAN a transmis son dossier et ses observations, concluant au rejet du recours et à la confirmation de la décision querellée, sous suite de frais.

Avant la prise de décision litigieuse, la technicienne arbres, rattachées à son service spécialisé, s'était rendue sur place et avait effectué une inspection visuelle de l'arbre qu'elle avait trouvé en bon état sanitaire. Elle avait en outre considéré ce pin, d'une hauteur de 15 à 20 mètres et faisait partie d'un groupe d'une demi-douzaine d'autres pins de même dimension sis le long du chemin du C______, comme un arbre marquant du paysage. Au vu de la présence d'écorce incluse, soit un défaut de bois correspondant à la présence d'une lame d'écorce incluse dans la masse du bois, la technicienne avait préconisé une analyse plus approfondie de l'état sanitaire de l'arbre par une entreprise spécialisée.

L'appréciation du recourant affirmant que le pin était dangereux, allait à l'encontre de l'examen visuel de sa technicienne et ne reposait pas sur un avis de spécialiste. Certes, il présentait un défaut mais aucun des devis présentés ne mentionnait que l'abattage était inévitable en raison de l'état sanitaire du pin. Au contraire, les devis préconisaient des mesures techniques permettant de le maintenir et d'éviter les chutes. Il était prêt à revoir sa décision pour autant qu'une entreprise spécialisée établisse que la conservation du pin n'était pas possible. S'agissant des nuisances alléguées par le recourant, il relevait que les propriétaires étaient libres de planter les essences qu'ils souhaitaient, le corollaire étant qu'ils devaient assumer les contraintes inhérentes aux espèces, soit notamment les ombres provoquées par le gabarit de l'arbre, les chutes de feuilles ou d'aiguilles ainsi que les dégâts provoqués par les racines. Ces inconvénients devaient être relativisés par rapport à l'intérêt de l'arbre. Les coulées de sève et la chute d'épines faisaient partie des inconvénients inhérents à l'ensemble des résineux poussant dans le canton. Il en allait de même s'agissant des fientes des oiseaux.

Le pin litigieux était un arbre de grande taille, dont le volume permettait non seulement de séquestrer du carbone mais de diffuser de l'ombre et de la fraicheur durant les périodes estivales et dès lors, de lutter contre l'effet d'îlot de chaleur. Bien visible depuis la rue, il faisait partie d'un groupe de pins marquant le quartier par leur caractère élancé et leur port se détachait d'une végétation de plus petits feuillus environnants. Quant aux chenilles processionnaires, elles ne constituaient pas un parasite du pin qui pourrait le fragiliser et justifier une autorisation d'abattage. Même un arbre parfaitement sain et entretenu peut être porteur de tels nids. Il appartenait au propriétaire de couper les nids ou d'utiliser un autre moyen permettant d'intercepter les chenilles, tel que la mise en place de gouttières autours du tronc, procédé efficace. En décembre 2015, le règlement sur la conservation de la végétation arborée du 27 octobre 1999 (RCVA - L 4 05.04) avait été révisé afin de préciser les modalités de lutte contre les chenilles processionnaires dans le canton. Ont été définis des périmètres de risques où l'enlèvement et la destruction des nids étaient obligatoires, sans que des abattages ne soient prévus. En dehors de ces périmètres, ce qui était le cas de la propriété du recourant, la lutte contre les chenilles processionnaires n'était pas obligatoire, le risque pour la santé humaine n'étant pas prépondérant. Il existait donc des mesures proportionnées pour lutter contre l'infestation.

Il a produit son dossier dont des vues des pins sis au chemin du C______ et du pin litigieux.

6.             Le recourant a répliqué le 9 juin 2023 et produit une analyse visuelle du 5 juin 2023 de l'entreprise spécialisée G______. En substance, il a repris la motivation contenue dans son recours.

Selon le rapport du 5 juin 2023, le pin noir d'Autriche était sis à proximité de la maison, exposé au vent du nord (bise) et sud. En cas de chute, les cibles potentielles étaient les piétons et les véhicules du chemin du C______ ainsi que les habitants des zones villas. Il n'y avait pas de racines visibles en surface et au-delà de la couronne. Des travaux ayant été réalisés cinq ans auparavant pour la construction d'un muret, lesquels avaient dû entraîner une légère perte de son système racinaire. Il n'y avait aucune infestation. L'évaluation était moyenne à bonne à cause de l'inclusion d'écorce qui descendait jusqu'au sol. Un léger défaut mécanique diminuait partiellement sa stabilité mécanique. L'évaluation des axes du tronc était moyenne par la présence d'inclusions d'écorce avec perte de stabilité mécanique. La couronne était infestée du sphaeropsis sapinae mais sa stabilité était bonne. Etaient préconisés l'enlèvement du bois mort, une taille d'allègement sur des branches présentant des frottements, une taille d'allègement des branches situées au-dessus du toit, la mise en place de quatre haubans dynamiques en triangulation, la mise en place de mulch (couverture du sol par une matière organique) et de copeaux pour améliorer la quantité du sol et diminuer le compactage en surface, avec un degré important vu la situation de l'arbre. Ce dernier avait une haute valeur paysagère. L'expertise avait été requise pour garantir que l'arbre pouvait être maintenu sans risque. Le haubanage diminuait les oscillations pouvant amener des ruptures mécaniques au niveau des incluses d'écorce, le plus souvent par grands vents. Malgré cela, il fallait toujours accepter une part de risque résiduel et tenir compte de l'évolution du pin qui pouvait changer rapidement en fonction des facteurs biotiques et abiotiques.

7.             Dans sa duplique du 12 juillet 2023, l'OCAN a relevé que l'analyse produite par le recourant ne préconisait pas l'abattage du pin noir - dont la haute valeur paysagère avait été soulignée - mais une taille d'allégement ainsi qu'un haubanage. L'avis de l'entreprise spécialisée confirmait ainsi son appréciation. Dès lors, il maintenait sa décision.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 (LPMNS - L 4 05) et du règlement sur la conservation de la végétation arborée du 27 octobre 1999 (RCVA - L 4 05.04) (art. 62 al. 2 LPMNS et 23 RCVA cum art. 6 al. 1 let. j du règlement sur l'organisation de l'administration cantonale du 1er juin 2018 - ROAC - B 4 05.10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             La LPMNS a notamment pour but d’assurer la sauvegarde de la nature, en ménageant l’espace vital nécessaire à la flore et à la faune, et en maintenant les milieux naturels (art. 1 let. c LPMNS).

4.             Sont protégés conformément à la loi, les sites et paysages, espèces végétales et minéraux qui présentent un intérêt biologique, scientifique, historique, esthétique ou éducatif (art. 35 al. 1 LPMNS).

5.             À teneur de l'art. 36 al. 1 LPMNS, le Conseil d’État édicte les dispositions nécessaires à la protection, la conservation et l’aménagement des sites visés à l’art. 35 LPMNS. Il peut n’autoriser que sous condition ou même interdire l'abattage, l’élagage ou la destruction de certaines essences d’arbres, de cordons boisés, de boqueteaux, buissons ou de haies vives (art. 36 al. 2 let. a LPMNS).

6.             En application de l'art. 35 al. 1 LPMNS, le Conseil d’État a adopté le règlement sur la conservation de la végétation arborée du 27 octobre 1999 (RCVA - L 4 05.04), qui a pour but d'assurer la conservation, à savoir la protection, le maintien et le renouvellement, de la végétation formant les éléments majeurs du paysage (art. 1 RCVA). Il est applicable aux arbres situés en dehors de la forêt, telle que définie à l'art. 2 de la loi sur les forêts du 20 mai 1999 (LForêts - M 5 10), ainsi qu'aux haies vives et boqueteaux présentant un intérêt biologique ou paysager (art. 2 al. 1 RCVA).

7.             Selon l’art. 3 al. 1 RCVA, aucun arbre ne peut être abattu ou élagué, ni aucune haie vive ou aucun boqueteau coupé ou défriché, sans autorisation préalable du département, sous réserve de l’al. 2, non pertinent en l'occurrence. L’autorisation d’abattage d’arbres ou de défrichage de haies vives et de boqueteaux est assortie, en principe, de l’obligation de réaliser des mesures compensatoires (art. 15 al.1 RCVA).

8.             Le département édicte des directives en matière de sauvegarde des végétaux maintenus, de leur mise en valeur et de l’exécution correcte des mesures compensatoires (art. 16 RCVA).

9.             En exécution de cette disposition, le Département a édicté en août 2008 la directive concernant la conservation des arbres (ci-après : la directive), dont le but est de préciser les règles décisionnelles en matière de conservation du patrimoine arboré et vise à assurer la protection des arbres en place et simultanément le renouvellement du patrimoine arboré (art. 1 de la directive). La décision de maintenir un arbre est prise lorsque l'intérêt de maintien prime sur les motifs d'abattage (art. 2 de la directive).

10.         En vertu des art. 2.1.1 à 2.1.4 de la directive, parmi les critères de maintien figurent notamment la beauté et l'intérêt du sujet (élément majeur du paysage, arbre remarquable, intérêt écologique), son état sanitaire (vigueur, absence de maladies et de blessures, qualité statique de l'arbre et couronne et charpente équilibrées), son espérance de vie (potentialités de développement futur, espace disponible, conditions environnementales), ainsi que d’autres cas (impossibilité de compenser et de renouveler, maintien d’un espace plantable, situations particulières).

Est qualifié d'« élément majeur du paysage », un arbre ou un ensemble d'arbres exceptionnel par son implantation et son intérêt sur la perception d'un site.

11.         Au nombre des motifs d'abattage, la directive cite les dangers et les incidences de l'arbre sur les biens et les personnes, le type et l'importance de la construction ou de l'aménagement projeté, la mise en valeur d'autres arbres, l’entretien d’un ensemble végétal, la prévention phytosanitaire ou encore le respect des lois, servitudes ou conventions, pour autant qu'un préjudice soit prouvé (art. 2.2.1 à 2.2.5 de la directive ; ATA/552/2013 du 27 août 2013 ; ATA/398/2013 du 25 juin 2013 ; ATA/114/2010 du 16 février 2010).

12.         Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

13.         Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, n. 515 p. 179).

14.         De façon générale, le tribunal observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des instances de préavis spécialisées, pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci. Il se limite à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (cf. not. ATA/636/2018 du 19 juin 2018 consid. 8c ; ATA/1274/2017 du 12 septembre 2017 consid. 5 ; ATA/318/2017 du 21 mars 2017 consid. 8c ; ATA/284/2016 du 5 avril 2016 consid. 7c ; ATA/86/2015 du 20 janvier 2015 ; ATA/694/2012 du 16 octobre 2012 et les références citées).

15.         L'OCAN est composé de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/552/2013 du 27 août 2013 consid. 6b ; ATA/398/2013 du 25 juin 2013 consid. 6).

16.         Le recourant fait valoir que le pin noir d'Autriche constitue une source de danger importante s'il venait à tomber sur sa maison ou sur un être humain, vu sa vulnérabilité. Il relève les nombreux inconvénients de cet arbre soit, de la sève, des chutes d'épines, de la fiente d'oiseaux et des chenilles processionnaires engendrant des irritations et problèmes respiratoires. Ces désagréments justifient selon lui, son abattage.

17.         En l’espèce, il ressort des constations de la technicienne spécialisée de l'OCAN et du rapport du 5 juin 2023 de l'entreprise spécialisée G______ que le pin d'Autriche a une haute valeur paysagère et marque le paysage. Les photographies produites mettent en évidence sa grande taille, sa visibilité depuis plusieurs points de vue du domaine public et le fait qu'il soit localisé au milieu d'un groupe de pins similaires. Par ailleurs, ces derniers se détachent clairement des arbres alentours, de plus petites tailles. Son empreinte sur le paysage est indéniable tout comme sa valeur écosystémique vu son volume. Malgré son défaut lié à l'inclusion d'écorces, il se trouve en bon état sanitaire.

18.         Dans ces conditions, le tribunal retiendra les avis du service et de l'entreprise spécialisés, selon lequel le pin d'Autriche doit être considéré comme un élément majeur du paysage, soit à conserver, sous réserve de motifs valables qui empêcheraient son maintien.

19.         A cet égard, le recourant échoue à démontrer que le pin constitue un risque d'un point de vue sécuritaire pour les personnes et les biens. En effet et malgré une diminution partielle de sa stabilité mécanique, l'enlèvement du bois mort, l'allègement de la taille, la pose de haubans diminuant les oscillations et la mise en place de mulch et de copeaux tels que préconisés dans l'analyse du 25 juin 2023, accompagnés d'un suivi de l'évolution du pin, permettra de limiter les risques afin qu'ils ne soient pas plus élevés qu'avec un autre arbre. S'il a fait état d'une chute d'une branche de 150 kilos dans son jardin, il n’a fourni aucune pièce venant corroborer ses dires ni donné aucune explication quant aux circonstances de cette chute et quant au dommage qui en serait résulté. Le tribunal ne dispose ainsi d'aucun élément permettant de retenir qu’il existerait, en l’espèce, un danger présentant un degré de gravité particulier justifiant l’abattage du pin d'Autriche. Au contraire, il apparaît possible de remédier à sa diminution partielle de stabilité par des moyens autres.

20.         S'agissant des incidences du pin litigieux sur le recourant et sa famille, celles-ci ne sont pas suffisamment graves pour entraîner l'abattage d'un arbre de cette valeur. Certes, la sève, les chutes d'épines, la fiente et les chenilles constituent des désagréments pénibles à supporter. Cela étant, il existe des moyens permettant d'y palier ou à tout le moins de les amoindrir, tel que l'implantation de gouttières autour du tronc. Quant aux oiseaux, ceux-ci se posent sur tous les arbres, de sorte que l'élimination du pin n'entrainerait pas automatiquement celle de leur fiente. C'est le lieu de relever que tout propriétaire d'un jardin comportant des arbres, notamment des résineux, se doit d'entretenir son bien, le nettoyer et éliminer les encombrants. Le fait que le recourant doivent éliminer les chutes d'épines et la sève n'est pas un motif d'abattage au sens de la loi précitée. Enfin, le recourant allègue, sans en apporter la moindre preuve, que les chenilles processionnaires engendraient des irritations et problèmes respiratoires. La pose de gouttière, de nichoirs à mésanges, un échenillage manuel des nids ou un traitement biologique permettraient l'élimination des indésirables.

21.         Au vu de ce qui précède, le tribunal retiendra que le recourant n’est pas parvenu à démontrer qu’il se justifierait d’abattre le pin d'Autriche en raison de dangers et/ou d’atteintes sur les biens et les personnes occasionnés par ce dernier. Le refus de l’autorité intimée est donc parfaitement fondé.

22.         Mal fondé, le recours sera rejeté et la décision querellée confirmée.

23.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986
(RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamnée au paiement d'un émolument s'élevant à CHF 700.-. Cet émolument est couvert par l'avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

24.         Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 10 mars 2023 par Monsieur A______ contre la décision du département du territoire du 10 février 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant, un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Gwénaëlle GATTONI, présidente, Aurèle MULLER et Saskia RICHARDET VOLPI, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

 

Genève, le

 

Le greffier