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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/712/2023

JTAPI/893/2023 du 22.08.2023 ( LCR ) , ADMIS

Descripteurs : PERMIS DE CONDUIRE;EXPERTISE;CANNABIS
Normes : LCR.14; LCR.15d.al1; LCR.16d.al1.letb
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/712/2023 LCR

JTAPI/893/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 22 août 2023

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES

 


EN FAIT

1.             Par décision du 17 février 2023, l'office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) a ordonné à Monsieur A______ de se soumettre à une expertise visant à évaluer son aptitude à la conduite par un médecin de niveau 4, conformément à l'art. 15d al. 1 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01). S'il ne donnait pas suite aux requêtes et convocations des experts, son permis de conduire lui serait retiré pour une durée indéterminée. Un émolument de CHF 95.- était mis à sa charge, conformément à l'art. 22 du règlement sur les émoluments de l’office cantonal des véhicules du 15 décembre 1982 (REmOCV - H 1 05.08).

Il était titulaire d'un permis de conduire valable pour les catégories A1, B, B1, F, G, M et d'un permis d'élève conducteur pour la catégorie A. Alors qu'il circulait au volant d'une voiture le 23 octobre 2022 à 21 heures, il avait été contrôlé par la police, en possession de 10.7 grammes de haschich. Lors de son audition subséquente, il avait reconnu consommer du haschich depuis 2016, à raison de deux fois par semaine. Il n'avait pas d'antécédent.

2.             Par acte du 28 février 2023, M. A______ a interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant à son annulation et au paiement par l'autorité intimée des frais de la procédure.

La décision omettait d'indiquer que lors du contrôle précité, il avait subi deux tests salivaires qui s'étaient révélés négatifs. Impressionné par l'intervention policière, notamment en raison de son jeune âge, il avait concédé oralement, consommer quelque fois le week-end. Or, il était indiqué dans la décision querellée qu'il reconnaissait consommer du haschich depuis 2016, à raison de deux fois par semaines, ce qui était erroné. Il n'avait jamais commis d'infraction à la circulation routière et rien ne pouvait faire douter de sa capacité à conduire. Se soumettre à une expertise alors qu'il avait subi deux tests salivaires négatifs n'était pas proportionné. Par ailleurs, cela lui coûterait du temps et de l'argent alors qu'il n'avait qu'un petit salaire en tant qu'apprenti. La simple détention de haschich ne pouvait justifier une enquête si invasive et l'atteignant de manière significative dans sa vie privée.

3.             Dans ses écritures du 28 avril 2023, l'OCV a souligné qu'il ressortait du rapport de renseignement du 23 décembre 2022 et de celui de contravention du 18 janvier 2023 que l'intéressé avait transporté plus de 10 grammes de haschich et avait admis consommer occasionnellement. Dans ses observations à son attention du 23 janvier 2023, il avait nié toute consommation de stupéfiants. Par ordonnance pénale du 31 mars 2023, entrée en force et exécutoire, il avait été condamné pour avoir détenu du cannabis, pour sa propre condamnation. Selon le guide "Aptitude à la conduite" du 27 novembre 2020, en cas de consommation supérieure à deux fois par semaine, une expertise de niveau 4 était préconisée. Le recourant était un jeune conducteur ayant été arrêté avec plus de 10 grammes de haschich sur lui. Il avait admis consommer, sans préciser ses habitudes et n'avait pas fait opposition à l'ordonnance pénale le condamnant, de sorte que ces éléments étaient suffisants pour faire naître des doutes sur son aptitude à la conduite.

4.             Dans le délai imparti par le tribunal, le recourant n'a pas répliqué.

5.             Il ressort du rapport de contravention du 18 janvier 2023 que le recourant a été interpellé le 23 décembre 2022, à 21 heures, au boulevard Emile-Jacques-Dalcroze 2 à Genève, alors qu'il quittait son véhicule. 10.7 grammes avaient été saisis sur lui. Le "drugwipe" effectué sur sa personne s'était révélé négatif quand bien-même, il avait déclaré oralement, fumer occasionnellement des produits cannabiques.

6.             Dans son rapport de renseignement du 23 décembre 2023, la police de proximité a indiqué avoir entendu l'intéressé, lequel avait déclaré consommer du haschich depuis 2016, à raison de deux fois par semaine. Aucun procès-verbal de cette déposition n'était annexée audit rapport.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile, c’est-à-dire dans le délai de dix jours, s’agissant d’une décision incidente (art. 4 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10), car prise pendant le cours de la procédure et ne représentant qu’une étape vers la décision finale (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1 ; cf. aussi ATA/765/2021 du 15 juillet 2021 consid. 1 et l'arrêt cité ; Cédric MIZEL, La preuve de l'aptitude à la conduite et les motifs autorisant une expertise, Circulation routière 3/2019, p. 35 ; cf. encore, par analogie, ATF 122 II 359 consid. 1b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_212/2021 du 16 juin 2021 consid. 1.1 ; 1C_154/2018 du 4 juillet 2018 consid. 1.1 et 1C_514/2016 du 16 janvier 2017 consid. 1.1, portant sur le retrait à titre préventif du permis de conduire), et devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue (art. 115 et 116 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05 ; art. 17 al. 1, 3 et 4, 57 let. c, 62 al. 1 let. b, 62 al. 3 1ère phr. et 63 al. 1 let. c LPA).

2.             A teneur de l'art. 57 let. c LPA, les décisions incidentes sont susceptibles de recours si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.

3.             Lorsqu’il n’est pas évident que le recourant soit exposé à un préjudice irréparable, il lui incombe d’expliquer dans son recours en quoi il serait exposé à un tel préjudice et de démontrer ainsi que les conditions de recevabilité de son recours sont réunies (ATF 136 IV 92 consid. 4 ; 133 II 353 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1 ; ATA/765/2021 du 15 juillet 2021 consid. 2).

4.             Selon la jurisprudence, une décision est susceptible de causer un préjudice irréparable si le recourant encourt un retrait provisoire du permis de conduire et doit avancer les frais de l'examen médical auquel il doit se soumettre et qui ne lui seront peut-être pas restitués (arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 1 ; 1C_248/2011 du 30 janvier 2012 consid. 1 et les références ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1 ; cf. également arrêt 1C_328/2011 du 8 mars 2012 consid. 1).

5.             La décision querellée stipule que si le recourant ne donne pas suite aux requêtes et convocations des experts, son permis lui serait retiré pour une durée indéterminée. Dès lors, la condition de l'art. 57 let. c LPA apparaît réalisée, si bien qu'il convient d'entrer en matière (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 1 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1).

6.             Les arguments formulés par les parties à l'appui de leurs conclusions respectives seront repris et discutés ci-après dans la mesure nécessaire (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_72/2017 du 14 septembre 2017 consid. 4.1 ; 1D_2/2017 du 22 mars 2017 consid. 5.1 ; 1C_304/2016 du 5 décembre 2016 consid. 3.1 ; 1C_592/2015 du 27 juillet 2016 consid. 4.1 ; 1C_229/2016 du 25 juillet 2016 consid. 3.1 et les arrêts cités), étant rappelé que, saisi d'un recours, le tribunal applique le droit d'office et que s'il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n'est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. not. ATA/1024/2020 du 13 octobre 2020 consid. 1 et les références citées ; ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; cf. aussi ATF 140 III 86 consid. 2 ; 138 II 331 consid. 1.3 ; 137 II 313 consid. 1.4).

7.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

8.             Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).

9.             Selon l'art. 14 al. 1 LCR, tout conducteur de véhicule automobile doit posséder l’aptitude et les qualifications nécessaires à la conduite. Est apte à la conduite, aux termes de l'art. 14 al. 2 LCR, celui qui a atteint l’âge minimal requis (let. a), a les aptitudes physiques et psychiques requises pour conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. b), ne souffre d’aucune dépendance qui l’empêche de conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. c) et dont les antécédents attestent qu’il respecte les règles en vigueur ainsi que les autres usagers de la route (let. d).

10.         Si l'aptitude à la conduite soulève des doutes, la personne concernée fait l'objet d'une enquête dans les cas énumérés de manière non exhaustive à l'art. 15d al. 1 let. a à e LCR (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.1), notamment en cas d'infractions aux règles de la circulation dénotant un manque d'égards envers les autres usagers de la route (art. 15d al. 1 let. c LCR).

11.         Les faits objet des hypothèses de l’art. 15d al. 1 LCR fondent un soupçon préalable que l'aptitude à la conduite pourrait être réduite (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.1 ; ATA/1138/2017 du 2 août 2017 consid. 5d et la référence). Si des indices concrets soulèvent des doutes quant à l'aptitude à la conduite de la personne concernée, un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un médecin et/ou un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un psychologue du trafic doivent être ordonnés (art. 28a al. 1 OAC ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_41/2019 du 4 avril 2019 consid. 2.1 ; 1C_76/2017 du 19 mai 2017 consid. 5 ; cf. aussi ATF 139 II 95 consid. 3.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.4.2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1).

12.         Aux termes de l'art. 16d al. 1 let. b LCR, le permis d'élève conducteur ou le permis de conduire est retiré pour une durée indéterminée à la personne qui souffre d'une forme de dépendance la rendant inapte à la conduite. La consommation de stupéfiants est considérée comme une dépendance aux drogues au sens de cette disposition lorsque sa fréquence et sa quantité diminuent l'aptitude à conduire et qu'il existe un risque majeur que l'intéressé se mette au volant d'un véhicule dans un état qui, partiellement ou de manière durable, compromet la sûreté de la conduite. En d'autres termes, ces conditions sont remplies lorsque le consommateur n'est plus en mesure de s'abstenir lorsqu'il doit conduire (ATF 129 II 82 consid. 4.1 p. 86; 127 II 122 consid. 3c p. 126; 124 II 559 consid. 3d p. 564; arrêt 1C_328/2013 du 18 septembre 2013 consid. 3.1). 

13.         Ces mesures constituent un retrait de sécurité (cf. ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; 122 II 359 consid. 1a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1 ; 1C_384/2011 du 7 février 2012 consid. 2.3.1), en ce sens qu'elles ne tendent pas à réprimer et ne supposent pas la commission d'une infraction fautive à une règle de la circulation, mais sont destinées à protéger la sécurité du trafic contre les conducteurs inaptes (cf. not. ATF 133 II 331 consid. 9.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_819/2013 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3a ; 6A.114/2000 du 20 février 2001 consid. 2).

14.         La décision de retrait de sécurité du permis de conduire, notamment pour alcoolisme ou d'autres causes de toxicomanie, constitue une atteinte grave à la sphère privée de l'intéressé ; elle doit donc reposer sur une instruction précise des circonstances déterminantes (ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; 133 II 284 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_557/2014du 9 décembre 2014 consid. 3 ; 1C_819 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1 ; 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3a ; cf. en ce qui concerne le retrait justifié par des raisons médicales ou l'existence d'une dépendance : ATF 129 II 82 consid. 2.2 ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 1C_819 du 25 novembre 2013 consid. 2), le pronostic devant être posé sur la base des antécédents du conducteur et de sa situation personnelle (ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; 125 II 492 consid. 2a).

15.         Avant d'ordonner un retrait de sécurité, l'autorité doit éclaircir d'office la situation de la personne concernée. En particulier, elle doit examiner l'incidence de la toxicomanie sur son comportement comme conducteur ainsi que le degré de la dépendance. En cas de doute, il y a lieu d'ordonner un examen médical (ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1), l'intérêt public lié à la sécurité routière commandant en effet que l'on procède à un examen approfondi à chaque fois qu'il existe suffisamment d'éléments pour faire naître un doute au sujet de l'aptitude à la conduite (arrêts du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.3 ; 1C_282/2007 du 13 février 2008 consid. 2.4).

16.         Un tel doute peut reposer sur de simples indices, en particulier lorsqu'il en va d'une dépendance en matière de produits stupéfiants (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1).

17.         La jurisprudence considère que les mesures appropriées à cet effet, notamment l'opportunité d'une expertise médicale, varient en fonction des circonstances et relèvent du pouvoir d'appréciation de l'autorité cantonale appelée à se prononcer sur le retrait (ATF 129 II 82 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1 ; 1C_248/2011 du 30 janvier 2012 consid. 3.1 ; 1C_282/2007 du 13 février 2008 consid. 2.2 ; 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3a). Cela étant, en cas de soupçon de dépendance à une drogue, l'autorité de retrait doit soumettre l'intéressé à une expertise médicale ; elle ne peut y renoncer qu'à titre exceptionnel, par exemple en cas de toxicomanie grave et manifeste (arrêts du Tribunal fédéral 1C_819/2013 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 1C_282/2007 du 13 février 2008 consid. 2.3, in JdT 2008 I 464).

18.         Ainsi, un défaut d'aptitude à conduire peut être admis lorsque la personne considérée n'est plus capable de séparer de façon suffisante sa consommation de cannabis et la conduite d'un véhicule automobile, ou s'il y a un risque important qu'elle conduise un véhicule automobile sous l'effet aigu de cette drogue (ATF 129 II 82 consid. 4.1 ; 127 II 22 consid. 3c ; 124 II 559 consid. 3d ; arrêt du Tribunal fédéral 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3b).

19.         En l'espèce, la question à trancher est celle de savoir s'il existe des doutes suffisants quant à l'aptitude à la conduite du recourant, susceptibles de justifier la mise en œuvre d'une expertise.

20.         Pour fonder sa décision, l’OCV s'appuie en substance, sur le fait que le recourant transportait 10 grammes de haschich lorsqu'il a été interpellé et qu'il aurait admis consommer de cette drogue, à raison de deux fois par semaine, depuis 2016. Ces faits sont contestés par le recourant qui admet une consommation moindre et occasionnelle. En l'absence de procès-verbal d'audition et au vu du contenu distinct entre les deux rapports de police (consommation occasionnelle de produits cannabique dans le rapport de contravention et à raison de deux fois par semaine, depuis 2016, dans le rapport de renseignement) il n'est pas permis de déterminer, à satisfaction de droit, quelle est la réelle consommation du recourant. Cette question sera toutefois laissée ouverte au vu des considérations mentionnées infra.

21.         En effet, et dans l'hypothèse qui est la plus défavorable au recourant, soit une consommation à raison de deux fois par semaine, depuis 2016, il n'existe pas, en l'espèce, de suffisamment d'indices concrets permettant de douter de son aptitude à la conduite, au sens de la jurisprudence précitée.

M. A______ a été interpellé avec une quantité minime de drogue douce sur lui, étant précisé que l'acquisition et la possession d'une quantité minime de cannabis (jusqu'à 10 grammes) destinées à la consommation personnelle sont légales (arrêt du Tribunal fédéral 6B_911/2021 du 19 juin 2023, destiné à publication). Il n'a pas pris le volant sous substance, ce qui démontre une certaine maîtrise de sa consommation. Celle-ci n'est en outre pas suffisamment fréquente pour considérer qu'il existe un risque majeur qu'il ne distingue plus sa consommation de cannabis et la conduite d'un véhicule automobile et compromette ainsi la sécurité. Le fait qu'il n'ait pas fait opposition à l'ordonne pénale rendue à son encontre n'est pas pertinent dans l'examen des conditions de l'art. 15d al. 1 LCR. En tout état, l'OCV allègue que selon le guide "Aptitude à la conduite" du 27 novembre 2020, en cas de consommation supérieure à deux fois par semaine, une expertise de niveau 4 est préconisée, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. En définitive, aucun indice ne permet de retenir que l'intéressé, sans antécédent, serait dépendant au cannabis. Le simple fait de consommer légalement du cannabis, à raison de deux fois par semaine, et de détenir une quantité minime de cette drogue, ne peut entraîner la mise en œuvre d'une expertise médicale de niveau 4, sans violer le principe de proportionnalité, faute de doutes suffisants quant à l'aptitude à la conduite de la personne concernée.

22.         Partant, les incertitudes de l’OCV sont mal fondées.

23.         Au vu de ce qui précède, le recours sera admis et la décision annulée.

24.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA – E 5 10.03), le recourante, qui obtient gain de cause, est exonéré de tout émolument. Son avance de frais de CHF 500.- lui sera restituée.

25.         Non assisté d'un mandataire professionnel, aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 28 février 2023 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal des véhicules du 17 février 2023 ;

2.             l'admet;

3.             ordonne la restitution au recourant de l’avance de frais de CHF 500.- ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

Le greffier