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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/299/2023

JTAPI/833/2023 du 02.08.2023 ( OCPM ) , ADMIS PARTIELLEMENT

Descripteurs : DÉCISION DE RENVOI
Normes : LEI.64; LEI.64.al2; LEI.64.letd; LEI.69
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/299/2023

JTAPI/833/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 2 août 2023

 

dans la cause

Monsieur A______, représenté par Me Christopher D’AMBROSIO, avocat, avec élection de domicile

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1997, est ressortissant du Brésil.

2.             Arrivé en France en 2011, il est actuellement domicilié ______[XX].

3.             Le 19 janvier 2023, M. A______ a été interpellé par la police à proximité de Chêne-Bourg alors qu'il se rendait en France. Démuni de papiers d’identité valables indiquant sa nationalité, il a fait l'objet d'une arrestation provisoire, a été placé en détention jusqu'au 20 janvier 2023 puis libéré, après avoir été entendu par le Ministère public.

4.             Par décision du même jour, immédiatement exécutoire, l'office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) a prononcé le renvoi de Suisse de M. A______, lui impartissant un délai au 3 février 2023 pour quitter le territoire, ainsi que le territoire des États-membres de l'Union européenne et des États associés à Schengen (Liechtenstein, Islande, Norvège).

5.             Par acte du 27 janvier 2023, M. A______, agissant sous la plume de son conseil, a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre cette décision, concluant, sous suite de frais et dépens et en demandant à être dispensé des frais judiciaires, principalement, à son annulation, subsidiairement, à ce qu’il soit invité à se rendre en France et à quitter la Suisse en l’espace d’un jour, soit très subsidiairement, à ce qu’il lui soit donné acte qu’il avait quitté la Suisse.

Préalablement, sur mesures superprovisionnelles, subsidiairement provisionnelles, il a conclu à la restitution de l'effet suspensif au recours, à l’annulation soit, subsidiairement, au report du délai imparti pour quitter le territoire suisse, ainsi que le territoire des États-membres de l'Union européenne et des États associés à Schengen (Liechtenstein, Islande, Norvège) et à ce qu’il soit donné acte de ce qu’il avait requis l’assistance juridique.

En substance, il vivait en France depuis 2011 et travaillait actuellement en tant que serveur dans un restaurant à Annemasse. Il n’avait plus aucune attache avec le Brésil. Il était père d’un enfant de nationalité suisse, B______, né le ______ 2017, lequel était domicilié dans le canton de Genève, chez sa mère Madame C______, et avec lequel il entretenait une relation fusionnelle. Fin 2020, il avait initié des démarches en vue d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour en France. Un rendez-vous avait eu lieu le 4 mai 2021 avec le Bureau de l'accueil et du séjour des étrangers du Préfet de Haute-Savoie et, à cette occasion, il avait formellement déposé sa demande. Vu la nature de cette demande, pour laquelle il était tenu de préparer un volumineux dossier justifiant de ses dix années de résidence en France, son séjour dans ce pays était toléré. Il avait par ailleurs dû s'acquitter d'une taxe de régularisation. Il n’avait pas encore reçu de réponse mais, dans la mesure où une carte de séjour était délivrée « de plein droit » aux étrangers résidant depuis au moins 10 ans en France et vu la complétude de son dossier, les chances de succès de sa demande étaient manifestes. Il avait quitté la Suisse pour la France dès sa mise en liberté et il avait déposé, en parallèle au présent recours, une demande d'assistance juridique.

L'effet suspensif devait être restitué au recours au vu de ses intérêts privés prépondérants et dans la mesure où l'intérêt public à son renvoi immédiat était négligeable. Le centre de ses intérêts vitaux se situait en France. Il vivait depuis plus de dix années en France voisine, y travaillait et son séjour y était toléré vu sa demande d'admission exceptionnelle au séjour. Il entretenait par ailleurs une relation fusionnelle avec son fils B______, de nationalité suisse, qui le visitait fréquemment. Finalement, le rejet de la requête d'effet suspensif viderait de sa substance le présent recours. Partant et dans la mesure où la décision de renvoi devrait être exécutée au plus tard le 3 février 2023 déjà, il y avait lieu d'accorder l'effet suspensif à titre superprovisionnel à tout le moins jusqu'à droit jugé sur la restitution de l'effet suspensif.

Au fond, la décision violait son droit au respect de la vie privée et familiale tel que garanti par l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), le principe de proportionnalité et l'art. 64 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), ne tenant compte ni de sa situation en France ni de l’existence de son fils.

Il a joint un chargé de pièces.

6.             Il ressort de la consultation de la base de données CALVIN de l’OCPM que, sous la rubrique filiation concernant B______, seul le nom de Mme C______ est indiqué.

7.             Par décision sur mesures superprovisionnelles (DITAI/51/2023), le tribunal a admis la demande de mesures superprovisionnelles tendant à la restitution de l’effet suspensif au recours.

8.             Dans ses observations du 3 février 2023, l’OCPM s’est opposé à la restitution de l’effet suspensif au recours et a conclu au rejet du recours sur le fond. Faute de lien de filiation attesté, la relation du recourant avec son fils n’était pas déterminante. Aucun motif ne s’opposait pour le surplus à ce qu’il attende la réponse à son recours en France où il était domicilié. Il rappelait enfin que l’intéressé avait fait l’objet d’une mesure d’interdiction d’entrée en Suisse (IES) le 21 novembre 2019, pour une durée de trois ans. L’intéressé avait été appréhendé par l’office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières alors qu’il se trouvait en Suisse démuni de passeport et de titre de séjour valable dans l’Espace Schengen. Son renvoi avait donc été prononcé conformément à l’art. 64 al. 1 LEI. Si les autorités françaises confirmaient que le recourant était admissible en France, il pourrait regagner la France. Dans le cas contraire, son renvoi devrait être exécuté à destination du Brésil, cette question relevant toutefois de l’exécution.

9.             Dans sa réplique sur effet suspensif du 14 février 2023, le recourant, sous la plume de son conseil, a exposé n’avoir pas immédiatement procédé aux démarches en vue de la reconnaissance de son fils vu son statut de séjour et le fait qu’il n’était âgé que de 19 ans à sa naissance. En 2019, il avait initié des démarches qui avaient été interrompues suite à une interdiction d’entrée prononcée à son encontre. Il souhaitait désormais procéder à la reconnaissance de son fils, étant relevé que l’absence de filiation dûment formalisée ne préjudiciait en rien son droit d’entretenir des relations personnelles avec son fils. Il a pour le surplus précisé avoir quitté la Suisse pour la France. Cela étant, dans la mesure où la décision l’obligeait également à quitter l’espace Schengen pour le Brésil, elle était préjudiciable à ses intérêts.

10.         Dans sa réplique au fond du 10 mars 2023, le recourant, sous la plume de son conseil, a exposé avoir interpellé la préfecture de Haute-Savoie les 24 et 27 février 2023 sur le statut de sa demande de permis de séjour. Il lui avait notamment été répondu qu’une réponse devrait lui être adressée dans un délai d’environ deux mois. Il ne faisait aucun doute que sa présence était tolérée sur le territoire français. Partant, il invitait le tribunal, respectivement l’OCPM à suspendre la procédure pour une durée de trois mois, le temps que les autorités françaises statuent sur sa demande d’admission et qu’il démontre son lien de filiation avec son fils. Il a enfin requis son audition ainsi que celle de Mme C______.

11.         Par duplique du 20 mars 2023, l’OCPM s’est opposé à la suspension de la procédure. Les liens du recourant avec son fils n’étaient pas démontrés et, en tout état, ces derniers pouvaient être maintenus en France. Quant à la procédure pendante en France, elle n’était pas dans un lien de connexité avec la décision de renvoi Suisse, étant rappelé que l’OCPM n’avait aucune marge de manœuvre s’agissant de l’obligation de quitter l’espace Schengen également. Cela étant, si le recourant fournissait un document des autorités françaises attestant qu’il était toléré sur ce territoire le temps de la procédure d’instruction de sa demande d’autorisation de séjour, l’exécution de son renvoi pourrait être organisé vers la France.

12.         Lors de l'audience du 29 mars 2023 devant le tribunal, Mme C______, entendue à titre de renseignements, a expliqué être l'ex-compagne de M. A______. Il était le père de son fils, B______. Il avait des relations avec son fils depuis sa naissance. Il était également présent lors de sa grossesse et durant l'accouchement. Ils s’étaient séparés lorsque B______ avait trois ans. M. A______ n'avait plus vu son fils depuis le mois de janvier 2023. Depuis leur séparation, il le voyait en moyenne une fois par mois et des fois moins que cela. Il était également arrivé qu'il le voit plus régulièrement. Il venait notamment chez elle pour s'en occuper, l'amenant à l'école et lui faisant à manger. Lorsqu’ils étaient ensemble, ils étaient tous les deux sans revenu et elle était aidée par l'aide sociale. Depuis leur séparation, M. A______ n'avait jamais contribué financièrement à l'entretien de son fils. Il n’avait pas reconnu son fils. Ils avaient tenté de le faire lorsqu’ils étaient ensemble, sans succès en raison de complications administratives. Depuis qu’ils étaient séparés, ils avaient laissé de côté la reconnaissance, occupés par d'autres choses. En principe, M. A______ voyait son fils en Suisse. Ce dernier était toutefois déjà allé lui rendre visite en France. Il y avait passé la nuit. Elle connaissait la famille de M. A______ en France. Sa maman les invitait encore aujourd'hui chez elle et elle avait gardé des bons contacts avec les autres membres de la famille. Son fils aimait beaucoup son père et ils souhaiteraient que ce dernier le voit plus souvent.

Le conseil de M. A______ a indiqué avoir, suite aux dernières écritures de l'OCPM, immédiatement entrepris des démarches auprès des autorités françaises en vue d'obtenir une attestation indiquant que M. A______ était "toléré" sur le territoire français. Ils pensaient l’obtenir dans un très proche délai et la transmettraient dès réception. Une suspension de la procédure de deux mois apparaitrait dès lors opportune.

M. A______ a indiqué n’avoir pas encore reçu de réponse à sa demande d'admission exceptionnelle, laquelle devrait en principe lui parvenir d'ici à fin avril 2023. Il avait l'intention de reconnaitre officiellement son fils. Il avait besoin de l'accord de sa mère pour ce faire. Or, par le passé, celle-ci n’avait pas toujours été d'accord avec cette reconnaissance, car elle était fâchée contre lui.

La représentante de l’OCPM a expliqué qu’ils étaient conscients des particularités de la situation, vu notamment les démarches en cours. Il serait important que M. A______ leur démontre qu'il était effectivement "toléré" sur le territoire français. Cas échéant, leur décision ne pourrait être exécutée que concernant la Suisse. Elle a requis un délai de 24 heures pour se prononcer sur une suspension de la procédure au sens de l'art. 78 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

13.         Par courrier du 31 mars 2023, l’OCPM a informé le tribunal être favorable à la suspension de la procédure jusqu’au 31 mai 2023 afin que le recourant verse à la procédure un document officiel des autorités françaises attestant que son séjour était « toléré » sur leur territoire.

14.         Par décision du 5 avril 2023 (DITAI/154/2023), le tribunal a prononcé la suspension de l’instruction du recours jusqu’au 31 mai 2023.

15.         Par courrier du 31 mai 2023, M. A______, sous la plume de son conseil, a informé le tribunal avoir été convoqué le 16 mai 2023 à la Commission du titre de séjour de la préfecture de la Haute-Savoie. Il lui avait été confirmé que la finalisation du processus en lien avec sa demande prendrait encore quelques mois.

Dans cette attente, il avait sollicité un document confirmant la régularité de son séjour en France. Il joignait le « récépissé de demande de carte de séjour » qui lui avait ainsi été délivré, lequel, ainsi que cela ressortait de l'art. R431-12 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile français et d'un tirage du site officiel de l'administration française, « autorise [la] présence [de l'étranger] sur le territoire [français] pour la durée qu'il précise ».

Partant, son renvoi au Brésil ne se posait plus dans la mesure où il était valablement autorisé à séjourner en France et il sollicitait la reprise de l'instruction, persistant dans ses conclusions.

16.         Par courrier du 5 juin 2023, le tribunal a informé les parties de la reprise de l’instruction et invité l’OCPM à se déterminer sur le courrier et la pièce précités.

17.         Dans sa détermination du 21 juin 2023, l’OCPM a relevé que le document transmis attestait le dépôt d'une première demande de carte de séjour en France et était uniquement valable accompagné d'un autre document (portant la référence: N. YE019186) lequel n’était pas joint. Ce récépissé indiquait enfin qu'il était valable du 21 avril au 20 juillet 2023. Il ressortait du site Internet du Ministère de l'Intérieur (www.demarches.interieur.gouv.fr/particuliers/qu-est-ce-qu-un-recepissedemande-titre-sejour) que ce document permettait au recourant de séjourner en France pour cette durée. Ce récépissé de première demande (contrairement au récépissé de renouvellement) ne permettait toutefois pas de voyager sur l'espace Schengen (ni de revenir en France sans solliciter un visa pour étrangers qui y étaient soumis www.servicepublic.fr/particuliers/vosdroits/F12189). Cela confirmait dès lors que ce document n'était pas un titre de séjour. Toutefois, en ce que ce document attestait d'une demande d'autorisation de séjour sur le sol français, le recourant avait la possibilité de choisir d'être renvoyé en France.

Il rappelait enfin qu'aucune pièce relative aux démarches en vue de la reconnaissance de l'enfant ne leur avait été transmise à ce jour, seul lien rattachant le recourant à la Suisse.

18.         Par courrier du 29 juin 2023, le recourant, sous la plume de son conseil, a précisé que le document portant la référence N. YE019186 était son passeport, qui figurait au dossier. Il avait pour le surplus déjà quitté la Suisse et habitait en France. Par conséquent, il y avait lieu de lui donner acte de ce que son renvoi en France avait bien été exécuté et la présente procédure ne présentait plus aucun objet si ce n’était que la décision querellée prévoyait qu’il devait quitter « le territoire des États-membres de l’Union européenne et des États associés à Schengen », ce qui incluait la France. Il invitait dès lors l’OCPM a bien vouloir retirer sa décision en application de l’art. 67 al. 2 LPA, une invitation au départ apparaissant suffisante en l’espèce, soit, subsidiairement, à reconsidérer sa décision en ce sens qu’elle prononçait le renvoi à destination de la France et qu’elle constatait que ledit renvoi avait bien été exécuté. À défaut, il persistait dans ses conclusions.

19.         Par courrier du 12 juillet 2023, l’OCPM a informé le tribunal avoir pris acte du départ de l’intéressé vers la France. Les termes de sa décision étaient intégralement maintenus, le recourant ne disposant d’aucun droit de séjour en Suisse ni par ailleurs - à ce jour - en France.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'OCPM relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 LPA.

3.             La LEI et ses ordonnances d'exécution règlent l'entrée, le séjour et la sortie de Suisse des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI).

4.             À teneur de l'art. 5 al. 1 LEI, pour entrer en Suisse, tout étranger doit avoir une pièce de légitimation reconnue pour le passage de la frontière et être muni d'un visa si ce dernier est requis (let. a), disposer des moyens financiers nécessaires à son séjour (let. b), ne représenter aucune menace pour la sécurité et l'ordre publics ni pour les relations internationales de la Suisse (let. c) et ne pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement ou d'une expulsion au sens des art. 66a ou 66abis du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0).

5.             Selon l'art. 64 al. 1 let. a LEI, les autorités rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger qui n'a pas d'autorisation alors qu'il y est tenu.

6.             L'art. 64 al. 2 LEI précise que l'étranger qui séjourne illégalement en Suisse et qui dispose d'un titre de séjour valable délivré par un autre État lié par l'un des accords d'association à Schengen (État Schengen) est invité sans décision formelle à se rendre immédiatement dans cet État. S'il ne donne pas suite à cette invitation, une décision au sens de l'art. 64 al. 1 LEI est rendue. Si des motifs de sécurité et d'ordre publics, de sécurité intérieure ou extérieure justifient un départ immédiat, une décision est rendue sans invite préalable.

7.             L'art. 64d al. 1 LEI prévoit que la décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable de sept à trente jours. Un délai de départ plus long est imparti ou le délai de départ est prolongé lorsque des circonstances particulières telles que la situation familiale, des problèmes de santé ou la durée du séjour le justifient.

Selon l'al. 2, le renvoi peut être immédiatement exécutoire ou un délai de départ de moins de sept jours peut être fixé, notamment lorsque la personne concernée constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics ou pour la sécurité intérieure ou extérieure (let. a) ou des éléments concrets font redouter que la personne concernée entende se soustraire à l'exécution du renvoi (let. b).

Selon l'al. 3, les éléments concrets qui font redouter que la personne concernée entende se soustraire à l’exécution du renvoi sont notamment les suivants: cette personne franchit la frontière malgré une interdiction d’entrer en Suisse (let. c).

8.             L'entrée en Suisse et la sortie de Suisse sont régies par les accords d'association à Schengen (art. 7 al. 1 LEI).

9.             Selon l'art. 3 ch. 3 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 sur le retour, le « retour » est le fait, pour le ressortissant d'un pays tiers, de rentrer - que ce soit par obtempération volontaire à une obligation de retour ou en y étant forcé - dans son pays d'origine, dans un pays de transit conformément à des accords ou autres arrangements de réadmission communautaires ou bilatéraux, ou encore dans un autre pays tiers dans lequel il décide de retourner volontairement et sur le territoire duquel il sera admis (ATA/1578/2017 du 7 décembre 2017 consid. 6 ; ATA/640/2015 du 16 juin 2015 consid. 9).

La « décision de retour » est une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d'un ressortissant d'un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour (art. 3 ch. 4).

10.         Conformément à l'art. 6 par. 1 de la directive 2008/115/CE, les État membres prennent une décision de retour à l'encontre de tout ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire, sans préjudice des exceptions visées
aux par. 2 à 5.

Les ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d'un État membre et titulaires d'un titre de séjour valable ou d'une autre autorisation conférant un droit de séjour délivrés par un autre État membre sont tenus de se rendre immédiatement sur le territoire de cet autre État membre. En cas de non-respect de cette obligation par le ressortissant concerné d'un pays tiers ou lorsque le départ immédiat du ressortissant d'un pays tiers est requis pour des motifs relevant de l'ordre public ou de la sécurité nationale, le paragraphe 1 s'applique (par. 2).

Si un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre fait l’objet d’une procédure en cours portant sur le renouvellement de son titre de séjour ou d’une autre autorisation lui conférant un droit de séjour, cet État membre examine s’il y a lieu de s’abstenir de prendre une décision de retour jusqu’à l’achèvement de la procédure en cours, sans préjudice du paragraphe 6 (par. 5).

11.         À teneur de l'art. 69 al. 1 LEI, l'autorité cantonale compétente exécute le renvoi ou l'expulsion d'un étranger, notamment lorsque le délai imparti pour son départ est écoulé (let. a) ou l'étranger peut être renvoyé ou expulsé immédiatement (let. b).

Si l'étranger a la possibilité de se rendre légalement dans plusieurs États, l'autorité compétente peut le renvoyer ou l'expulser dans le pays de son choix (al. 2).

12.         La possibilité de choisir le pays de destination présuppose toutefois que l'étranger ait la possibilité de se rendre de manière effective et admissible dans chacun des pays concernés par son choix. Cela implique qu'il se trouve en possession des titres de voyage nécessaires et que le transport soit garanti (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_285/2013 du 23 avril 2013 consid. 7 ; 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 6 ; ATA/324/2013 du 24 mai 2013 ; ATA/157/2013 du 7 mars 2013 ; ATA/58/2013 du 31 janvier 2013).

13.         Selon la circulaire relative à l'introduction du nouveau module eGov et eMap éditée par le SEM le 16 février 2023, lorsqu'une personne est dépourvue de documents d'identité valables, mais dispose de preuves, voire d'indices concrets qu'elle séjourne légalement dans un État Schengen (p. ex. attestation de procédure d'asile en cours, séjour provisoire), elle est uniquement renvoyée de Suisse, dans un délai de départ immédiat et il n'y a pas de signalement de l'expulsion dans le SIS (ch. 4.2).

14.         Aux termes de l'art. 60 al. 1 LPA, ont qualité pour recourir les parties à la procédure ayant abouti à la décision attaquée (let. a), ainsi que toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (let. b).

15.         Pour qu’un recours soit – ou demeure - recevable il faut notamment que le destinataire de la décision soit touché directement par celle-ci et qu'il ait un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée et modifiée (art. 60 litt. b LPA). Un tel intérêt suppose un intérêt actuel à obtenir l’annulation de la décision attaquée. Cet intérêt doit exister tant au moment du dépôt du recours qu’au moment où l’arrêt est rendu (ATF 139 I 206 consid. 1.1). Si l’intérêt actuel n’existe plus au moment du dépôt du recours, celui-ci est déclaré irrecevable. Lorsque cet intérêt disparaît durant la procédure, le recours devient sans objet et la cause est radiée du rôle (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1 ; 139 I 206 consid. 1.1 ; 137 I 23 consid. 1.3.1 ; arrêt 1B_26/2021 du 6 avril 2021 consid. 1).

16.         La condition de l'intérêt actuel fait en particulier défaut lorsque la décision attaquée a été exécutée et a sorti ses effets (ATF 125 I 394 consid. 4 ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_164/2015 du 18 juin 2015 consid. 1.2.1 ; 4A_651/2014 du 13 mars 2015 consid. 1.1 ; ATA/630/2017 du 6 juin 2017 consid. 3b et les références citées), étant rappelé que, selon un principe général de procédure, les conclusions en constatation de droit ont un caractère subsidiaire et ne sont recevables que lorsque des conclusions condamnatoires ou formatrices sont exclues (cf. ATF 141 II 113 consid. 1.7 ; 135 I 119 consid. 4 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_529/2015 du 5 avril 2016 consid. 1.3). Il est fait exceptionnellement abstraction de l'exigence d'un intérêt actuel, lorsque la contestation peut se reproduire en tout temps dans des circonstances identiques ou analogues, que sa nature ne permet pas de la trancher avant qu'elle perde son actualité et que, en raison de sa portée de principe, il existe un intérêt public suffisamment important à la solution de la question litigieuse (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1 ; 140 IV 74 consid. 1.3.3 ; 139 I 206 consid. 1.1 ; 137 I 23 consid. 1.3.1 ; 136 II 101 consid. 1.1).

17.         En l'espèce, le recourant a quitté la Suisse pour la France où il réside depuis plusieurs années. Il ne peut ainsi plus se prévaloir d'un intérêt pratique et actuel à l'annulation de la décision querellée en ce qu'elle vise son renvoi de Suisse.

Force est donc de constater que cette décision, aussitôt exécutée, a sorti tous ses effets et que sur cet aspect, son recours est devenu sans objet.

L’on relèvera enfin, à toutes fins utiles, qu’il n’est plus contesté que la présence du recourant est tolérée en France, du fait de la procédure de demande de carte de séjour en cours. Le récépissé de demande de carte de séjour en attestant ne saurait toutefois être assimilé à un titre de séjour. La question de l'exécution d'un éventuel refoulement vers son pays d'origine, le Brésil (les autorités françaises seraient, le cas échéant, compétentes pour le décider et y procéder), n’est ainsi plus d’actualité.

18.         Le recourant s'oppose à son renvoi de l'ensemble du territoire des États Schengen, également prononcé par l'OCPM dans le cadre de la décision attaquée, arguant de son droit de séjourner en France.

Comme vu ci-dessus, l’existence de ce droit n’est plus contestée par l’OCPM. Selon le récépissé de demande de carte de séjour daté du 21 avril 2023 et qui constate l’entrée en France le 17 octobre 2011, le recourant, qui n'est pas ressortissant d'un pays de l'Union européenne, a demandé la délivrance d'un premier titre de séjour portant la mention vie privée et familiale auprès des autorités françaises. Il en ressort que s’il n'est pas en droit de travailler, il est autorisé à séjourner temporairement en France, durant la procédure visant à obtenir la délivrance d'une carte vie privée et familiale. La validité de ce document est fixée au 20 juillet 2023, renouvelable sur simple présentation du récépissé à renouveler, d’une photographie d’identité, de son passeport et d’un justificatif de domicile daté de moins de six mois. Dans ces circonstances, il doit être admis que le recourant séjourne légalement en France.

Partant, et même si l'autorisation n'est que provisoire, l'autorité intimée aurait dû faire application l'art. 64 al. 2 LEI et se limiter à renvoyer le recourant de Suisse sans étendre le renvoi à l'espace Schengen.

19.         Le recourant se prévaut également de son droit au respect de sa vie familiale avec son fils pour s'opposer à son renvoi de Suisse et du territoire Schengen.

20.         Selon la jurisprudence, un étranger peut, en fonction des circonstances, se prévaloir du droit au respect de sa vie familiale garanti par l’art. 8 par. 1 CEDH pour s’opposer à une éventuelle séparation de sa famille, à condition qu’il entretienne une relation étroite et effective avec un membre de celle-ci ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 137 I 284 consid. 1.3 ; 136 II 177 consid. 1.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1083/2016 du 24 avril 2017 consid. 1.1 ; 2C_786/2016 du 5 avril 2017 consid. 3.1 et les références citées). Les relations ici visées concernent en premier lieu la famille dite nucléaire, c’est-à-dire la communauté formée par les parents et leurs enfants mineurs (ATF 140 I 77 consid. 5.2 ; 137 I 113 consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_584/2017 du 29 juin 2017 consid. 3 ; 2C_1083/2016 du 24 avril 2017 consid. 1.1).

21.         En l’espèce, cette disposition n’est d’aucun secours au recourant, ce dernier n’ayant, à ce jour, pas démontré son lien de filiation avec l’enfant B______ ni en tout état la poursuite et/ou l’existence de relations étroites et effectives avec ce dernier d’un point de vue affectif et économique. Domicilié en France voisine, il pourra en tout état entretenir de telles relations avec ce dernier, s’il le souhaite, la mère de l’enfant ayant notamment indiqué, en audience, avoir gardé des liens avec la famille du recourant en France et s’être déjà rendue chez cette dernière.

22.         En conclusion, compte tenu de ce qui précède, il y a lieu d'admettre partiellement le recours, dans la mesure où il garde un objet. La décision de l'OCPM sera ainsi confirmée en ce qu'elle prononce le renvoi de Suisse du recourant et annulée en ce qu'elle prononce son renvoi des États membres de l'Union européenne et des États associés à Schengen. Le présent jugement rend sans objet la demande de mesures provisionnelles tendant à la restitution de l’effet suspensif au recours.

23.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui obtient partiellement gain de cause, est condamné au paiement d’un émolument réduit s'élevant à CHF 350.-. Le recourant étant au bénéfice de l'assistance juridique, cet émolument sera laissé à la charge de l’État de Genève, sous réserve du prononcé d'une décision finale du service de l’assistance juridique sur la base de l’art. 19 al. 1 du règlement sur l'assistance juridique et l’indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale du 28 juillet 2010 (RAJ - E 2 05.04).

24.         Vu l'issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 600.-, à la charge de l’État de Genève, soit pour lui l'autorité intimée, sera allouée au recourant (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).

25.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.      admet partiellement, en tant qu’il garde un objet, le recours interjeté le 27 janvier 2023 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 20 janvier 2023 dans le sens des considérants ;

2.      met à la charge du recourant, un émolument de CHF 350.- ;

3.      le laisse à la charge de l’État de Genève, sous réserve de la décision finale de l'assistance juridique en application de l'art. 19 al. 1 RAJ ;

4.      condamne l’État de Genève, soit pour lui l’office cantonal de la population et des migrations à verser au recourant une indemnité de procédure de CHF 600.- ;

5.      dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

Le greffier