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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2228/2023

JTAPI/775/2023 du 07.07.2023 ( MC ) , ADMIS

Descripteurs : MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS);DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION;LEVÉE DE LA DÉTENTION DE L'ÉTRANGER
Normes : LEI.77.al1.letc
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2228/2023 MC

JTAPI/775/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 7 juillet 2023

 

dans la cause

 

Madame A______, représentée par Me Léonard MICHELI-JEANNET, avocat

 

contre

 

COMMISSAIRE DE POLICE

 


 

EN FAIT

1.             Madame A______, née le ______ 1967, est originaire de Mongolie.

2.             Par ordonnance pénale du 17 novembre 2017, le Ministère public (ci-après : le MP) a condamné Mme A______ à une peine pécuniaire de 100 jours-amende, à CHF 10.-, avec sursis, délai d'épreuve 3 ans, pour infractions à l'art. 115 al. 1 let. a, b, et c de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20).

3.             Le 10 septembre 2018, Mme A______ est retournée volontairement en Mongolie avec l'assistance de la Croix-Rouge genevoise et de l'Organisation Internationale pour les Migrations.

4.             Par ordonnance pénale du 8 juin 2019, le MP a condamné Mme A______ à une peine pécuniaire de 120 jours-amende, à CHF 10.-, et à une amende de CHF 300.-, pour vol (art. 139 ch. 1 cum 172ter al. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) et infractions à l'art. 115 al. 1 let. a, b, et c LEI.

Il ressort de ladite ordonnance que Mme A______ était sans domicile fixe, travaillait "au noir" pour un revenu de CHF 500.- par mois et qu'elle n'avait aucune attache avec la Suisse.

5.             Par ordonnance pénale du 8 octobre 2019, le MP a condamné Mme A______ à une peine pécuniaire de 150 jours-amende, à CHF 10.-, pour infractions à l'art. 115 al. 1 let. b et c LEI.

Il ressort de ladite ordonnance que Mme A______ était sans domicile fixe, travaillait "au noir" en s'occupant d'enfants pour des particuliers contre une rémunération mensuelle de CHF 700.- et n'avait aucune attache avec la Suisse.

6.             Par décision du 8 octobre 2019, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après: l'OCPM) a prononcé, en application de l'art. 64 LEI, le renvoi de Mme A______ et lui a imparti un délai au 15 octobre 2019 pour quitter le territoire helvétique et l'ensemble de l'espace Schengen.

La carte de sortie devant attester du départ de Mme A______ de Suisse n'est jamais parvenue à l'OCPM.

7.             Par ordonnance pénale du 27 décembre 2019, le MP a condamné Mme A______ à une peine pécuniaire de 50 jours-amende, à CHF 10.-, pour infraction à l'art. 115 al. 1 let. b LEI.

Il ressort de ladite ordonnance que Mme A______ était sans domicile fixe, sans emploi ni revenu et n'avait aucune attache avec la Suisse.

8.             Le 4 mai 2021, Mme A______ a été contrôlée par les services de police à la rue de B______ 77, à Genève alors qu'elle était fortement alcoolisée. Lors de son audition subséquente, Mme A______ a déclaré n'avoir aucune adresse, dormir dans la rue où elle pouvait et ne pas avoir de liens particuliers avec la Suisse. Elle essayait de trouver de l'argent pour rentrer en Mongolie, sans succès. Son passeport se trouvait à un endroit où elle se rendait de temps en temps, mais ne souhaitait pas communiquer la localisation de celui-ci. Elle s'était adressée à la Croix-Rouge en vue d'un retour dans son pays d'origine mais cette dernière n'avait pas donné suite.

9.             Le lendemain, Mme A______ a été incarcérée à la prison de Champ-Dollon en exécution de peine.

10.         Le 6 mai 2021, les services de police ont soumis au Secrétariat d'Etat aux migrations (ci-après: le SEM) une demande de soutien en vue de l'identification et l'obtention d'un document de voyage en faveur de Mme A______.

11.         Le 5 juillet 2021, le SEM a transmis à l'autorité genevoise le document de voyage délivrée par la Mongolie en faveur de Mme A______, valable jusqu'au 30 juin 2022.

12.         Le 4 août 2021, Mme A______ a été remise en liberté. Les vols réguliers pour la Mongolie étant suspendus, il n'était pas possible d'organiser son retour.

13.         Par courrier du 14 juin 2022, l'OCPM a enjoint l'intéressée de se présenter chaque mardi au Vieil Hôtel de police pour attester de sa présence sur le territoire suisse.

14.         Le même jour, le SEM a été sollicité en vue d'une prolongation du laissez-passer de l'intéressée et la réservation d'un vol, sans escorte policière, à destination de la Mongolie dès le 5 juillet 2022.

15.         Le 21 juin 2022, swissREPAT a informé les autorités genevoises que Mme A______ avait eu des problèmes médicaux par le passé et qu'en conséquence, un rapport médical attestant de l'absence de contre-indications aux rapatriements sous la contrainte par voie aérienne devait être obtenu.

16.         Le 23 juin 2022, le SEM a remis à l'autorité genevoise le nouveau document de voyage délivré par la Mongolie en faveur de Mme A______, valable jusqu'au 21 juin 2023.

17.         Le 5 juillet 2022, Mme A______ a signé, en présence d'une traductrice, le formulaire "Autorisation de consulter le dossier médical" levant du secret médical le personnel de santé consulté par l'OCPM pour autant que cela concernait des questions nécessaires à la procédure de renvoi selon l'art. 64 LEI.

18.         Lors d'un entretien avec l'OCPM le 6 septembre 2022, Mme A______ a indiqué qu'elle n'avait pas de domicile fixe ni adresse, avait perdu son passeport et n'avait jamais reçu le formulaire "Rapport médical dans le domaine de retour" à remplir par son médecin traitant. Elle n'avait d'ailleurs pas de médecin traitant à Genève. Elle entendait collaborer en vue de son retour en Mongolie et s'est engagée à transmettre les documents relatifs à son état de santé ainsi que le nom de son médecin traitant, ce qu'elle n'a pas fait in fine.

19.         Par courriel du 13 septembre 2022, l'OCPM a demandé aux HUG de remplir et lui retourner un rapport médical concernant Mme A______. Les HUG lui ont répondu que la dernière consultation de cette dernière remontait à août 2021 et qu'en conséquence, l'évaluation de son état de santé ne pourrait porter que sur la situation jusqu'à cette date. Ils ont rendu leur rapport le 3 novembre 2022.

20.         Le même jour les services de police ont demandé à swissREPAT de réserver un vol, sans escorte policière, à destination d'Oulan-Bator (Mongolie), dès le 23 novembre 2022, en faveur de l'intéressée.

21.         Le 7 novembre 2022, le SEM a informé les services de police que l'OSEARA (entreprise chargé par la Confédération d'évaluer l'aptitude au voyage des étrangers) avait attesté d'une contre-indication absolue et a requis le dépôt des documents médicaux afin qu'une nouvelle demande de réservation de vol soit soumise à swissREPAT.

22.         Le 16 novembre 2022, les services de police ont sollicité l'appui d'OSEARA afin qu'un médecin ausculte l'intéressée à Genève, ce qui n'a pas été possible, OSEARA n'étant pas habilitée pour ce faire.

23.         Le 6 décembre 2022, lors d'un entretien avec l'OCPM, Mme A______ a expliqué n'avoir toujours pas rapporté le rapport médical car son docteur avait changé de cabinet. Elle ignorait comment il s'appelait. Elle prenait note qu'elle s'exposait à des mesures de contrainte impliquant une détention administrative, conformément aux articles 76 et suivants de la LEI en cas d'entrave à l'exécution de son renvoi. Elle était d'accord de rentrer en Mongolie mais seulement à partir du mois d'avril 2023 vu les températures hivernales très basses. Avec son accord, elle a été acheminée par les service de police à Zürich pour y être auscultée, avant de retourner à Genève dans la soirée. A cette occasion, un rapport médical a été rédigé.

24.         Le 20 décembre 2022, l'OCPM a proposé à l'intéressé de se rendre au centre administratif du Bouchet afin que l'Hospice général la loge. Elle ne s'y est pas rendue.

25.         Lors d'un entretien avec l'OCPM le 14 février 2023, elle a déclaré vivre chez une amie dont elle ne connaissait pas l'adresse. Elle n'était en revanche plus d'accord de retourner dans son pays d'origine. Elle avait pris rendez-vous avec un avocat le 28 février 2023 pour le dépôt d'une demande de permis en Suisse.

26.         Lors d'un entretien avec l'OCPM le 7 mars 2023, Mme A______ a expliqué n'avoir pas pu obtenir de rendez-vous avec un avocat. Un ultime délai au 7 avril 2023 lui a été imparti pour le dépôt d'une demande de permis, faute de quoi son dossier serait traité en l'état. A cette occasion, elle a, à nouveau, été rendue attentive qu'elle s'exposait à des mesures de contrainte impliquant une détention administrative, conformément aux articles 76 et suivants de la LEI en cas d'entrave à l'exécution de son renvoi.

27.         Le 3 juillet 2023, une patrouille de police est intervenue à la rue des Minoteries 3 à Genève, pour une bagarre entre deux femmes alcoolisées dont Mme A______. Entendue par la police, elle a admis se trouver en Suisse sans documents d'identité valables. Elle a en outre expliqué qu'elle résidait avec sa fille dans un appartement à Genève, mais n'a pas souhaité donner son adresse. Elle envisageait de faire une demande auprès de l'OCPM pour obtenir une autorisation de séjour.

28.         Par ordonnance pénale du 4 juillet 2023, le MP l'a condamnée à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à CHF 30.- pour séjour illicite (art. 115 al. 1 let. b LEI).

29.         Le 4 juillet 2023, le SEM a requis auprès de l'ambassade de Mongolie la délivrance d'un troisième laissez-passer, lequel serait émis d'ici une à deux semaines selon lui.

30.         Le 4 juillet 2023, à 17h00, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l’encontre de Mme A______ pour une durée de 60 jours sur la base de l’art. 77 LEI. Il ressort de cette décision que le rapport médical dans le domaine du retour du 6 décembre 2022 est échu et qu'en conséquence, la réservation de vol serait effectuée dès l'obtention d'un nouveau rapport et du troisième laissez-passer.

Selon le procès-verbal du commissaire de police, la détention administrative pour des motifs de droit des étrangers a débuté à 16h30. Lors de son audition, Mme A______ a déclaré ne pas être d'accord de retourner en Mongolie car son médecin souhaitait que son diabète soit stabilisé, avant de se raviser et d'indiquer qu'elle était d'accord de s'y rendre si son médecin lui fournissait son traitement pour les trois premiers mois.

Mme A______ a été placée dans un établissement zurichois.

31.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour, par courriel, à 19h59.

32.         A réception de l’ordre de mise en détention, le tribunal a invité le conseil de Mme A______ désigné d’office pour la défense de ses intérêts (cf. art. 12 al. 2 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10), à lui communiquer ses éventuelles observations écrites d’ici au 6 juillet 2023 à midi.

33.         Par courrier adressé par télécopie au tribunal le 6 juillet 2023 à 11h30, le conseil de Mme A______ a présenté ses observations et conclut au rejet de la demande de mise en détention et à la mise en liberté immédiate de sa cliente.

Afin d'ordonner la détention au sens de l'art. 77 LEI, tous les documents de voyage devaient déjà être disponibles, il ne suffisait pas qu'ils soient annoncés pour un proche avenir. Or, Mme A______ n'était aucunement en possession d'un document de voyage, au contraire le laissez-passer devait être émis d'ici une à deux semaines.

34.         Par écriture spontanée adressée par télécopie au tribunal le 6 juillet 2023 à 17h07, le conseil de Mme A______ a relevé que le Tribunal fédéral (arrêt 2C_366/2022) avait très récemment suivi le même raisonnement que dans son écriture précédente dans un cas analogue, et avait ordonné la libération de l'administré.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) est compétent pour examiner d’office la légalité et l’adéquation de la détention administrative (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d LaLEtr).

2.             Selon l’art. 8 al. 3 LaLEtr, les ordres de mise en détention du commissaire de police sont transmis sans délai au tribunal pour contrôle de la légalité et de l’adéquation de la détention.

3.             Lorsque, comme en l'espèce, la détention est fondée sur l'art. 77 LEI, elle est soumise au contrôle de l'autorité judiciaire sous la forme de la procédure écrite en application de l'art. 80 al. 2 2ème phr. LEI, qui institue une exception au principe de l'oralité de la procédure institué par la loi (Gregor CHATTON/Laurent MERZ, in Code annoté de droit des migrations, vol. II, Loi sur les étrangers, 2017, n. 30 ad art. 80 p. 869) n'impliquant pas le consentement de la personne détenue.

4.             Le tribunal statue ce jour dans le délai de nonante-six heures prévu par les art. 80 al. 2 LEI et 9 al. 3 LaLEtr, la détention administrative de Mme A______ ayant concrètement débuté le 4 juillet 2023 à 16h30, comme l’indique le procès-verbal d’audition (cf. à cet égard arrêts du Tribunal fédéral 2C_618/2011 du 1er septembre 2011 consid. 2 ; 2C_206/2009 du 29 avril 2009 consid. 5.1.1 et les références citées).

5.             Le tribunal peut confirmer, réformer ou annuler la décision du commissaire de police ; le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l’étranger (art. 9 al. 3 LaLEtr).

6.             La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (cf. ATF 135 II 105 consid. 2.2.1) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.1 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.1).

7.             En vertu de l'art. 77 al. 1 LEI, l'autorité cantonale compétente peut ordonner la détention d'un étranger afin d'assurer l'exécution de son renvoi ou de son expulsion aux conditions cumulatives (ATA/611/2021 du 8 juin 2021 consid. 3a et la référence citée) suivantes : une décision exécutoire a été prononcée (let. a) ; il n'a pas quitté la Suisse dans le délai imparti (let. b) ; l'autorité a dû se procurer elle-même les documents de voyage (let. c).

8.             L’objectif de cette "kleine Ausschaffungshaft" est d’empêcher la personne concernée de se soustraire au renvoi après que les documents de voyage lui ont été fournis. La détention est subordonnée à l’injonction de renvoi définitive et exécutoire. Le délai de départ doit avoir expiré et le document de voyage doit avoir déjà été obtenu par les autorités (arrêts du Tribunal fédéral 2C_366/2022 consid. 3.2 du 27 mai 2022 et références citées ; 2C_131/2011 du 25 février 2011 consid. 2.1 : 2C_689/2014 du 25 août 2014 consid. 2.1 ; 2C_74/2008 du 30 janvier 2008.)

9.             Cette possibilité supplémentaire de mise en détention est censée empêcher que des personnes disparaissent une fois que les autorités compétentes se sont procuré leurs documents de voyage. L’expérience montre que cette situation est relativement fréquente. Une mise en détention doit ici cependant n’être possible qu’à certaines conditions clairement définies et que pour une durée limitée. Cette détention n’est pas fondée sur une décision de renvoi ou d’expulsion de première instance mais sur une décision entrée en force et exécutoire. En outre il faut que deux critères soient remplis: le délai de départ doit être écoulé et les autorités doivent déjà s’être procuré les documents de voyage. Aucun autre comportement subjectif que le non-respect du délai de départ n’est cependant exigé. Comme, dans ce cas, les documents de voyage sont déjà disponibles au moment de la mise en détention en vue du renvoi ou de l’expulsion, l’autorité compétente n’a plus qu’à organiser le voyage de retour. En règle générale, les Etats d’origine ou de provenance établissent des documents de remplacement, appelés « laissez-passer », pour leurs ressortissants qui ne parviennent pas à prouver suffisamment leur identité. Ces documents ne sont souvent valables que pour une durée limitée (Message du Conseil fédéral concernant la loi sur les étrangers du 8 mars 2022, FF 2002 3523ss, p. 3572).

10.         Selon le libellé de l'art. 77 al. 1 let. c LEI (l'autorité a dû se procurer elle-même les documents de voyage) et le but de la détention - pouvoir garantir l'exécution imminente du renvoi - les documents de voyage doivent déjà être disponibles au moment de l'ordre de détention. Il ne suffit pas que l'on puisse compter sur leur obtention dans un bref délai (arrêt du Tribunal fédéral 2C_366/2022 consid. 3.3.2 du 27 mai 2022).

Dans cet arrêt, si les documents de voyage que les autorités ont finalement pu obtenir, étaient garantis lorsque la détention a été ordonnée en vertu de l'article 77 LEI, ils n'avaient pas encore été délivrés par la représentation diplomatique indienne à Berne. Le Tribunal fédéral a jugé que la détention basée sur l'art. 77 LEI n'était pas admissible. Le fait que la délivrance d'un titre de voyage soit garantie lorsque la détention a été ordonnée n'était pas suffisant.

11.         Si les documents de voyage viennent à échéance avant que le voyage ait pu être réalisé, la détention devra être levée. Il peut en aller différemment si de nouveaux papiers ont été procurés à temps ou si, à tout le moins, leur délivrance est assurée de façon à permettre l'exécution du renvoi avant l'échéance de la durée maximale de détention restante (Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. 2 : LEtr, 2017, p. 825 à 827, ch. 18 et 20).

12.         En l'espèce, les deux premiers laissez-passer sont respectivement échus depuis le 30 juin 2022 et le 21 juin 2023. La Mongolie n'ayant pas encore délivré le 3ème laissez-passer utile à un retour dans ce pays, force est de constater que les autorités suisses ne disposaient pas des documents de voyage permettant l'exécution du renvoi au moment où la détention a été ordonnée le 4 juillet 2023. Conformément à la jurisprudence citée supra, le fait que le laissez-passer en faveur de Mme A______ serait probablement émis d'ici une à deux semaines n'y change rien. Autre aurait été la solution si les documents de voyage étaient venus à échéance durant la détention et si l'autorité était assurée de recevoir les nouveaux papiers lui permettant d'exécuter le renvoi dans le délai de la détention restante.

Partant, la détention administrative fondée sur l'art. 77 LEI n'est pas justifiée.

13.         Il reste à examiner si un autre motif de détention que celui retenu est réalisé, par substitution de motifs (arrêt du Tribunal fédéral 2C_131/2011 du 25 février 2011).

Dans le cas d'espèce, compte tenu des différences procédurales entre la détention selon l'art. 77 LEI et celles de l'art. 76 LEI, il n'est pas possible d'examiner d'office l'admissibilité d'une détention ordinaire et de remplacer éventuellement la détention illicite selon l'art. 77 LEI par une détention selon l'art. 76 LEI, dont les conditions n'apparaissent, a priori et sans examen approfondi, pas réalisées en l'état, l'intéressée entretenant notamment des contacts réguliers avec l'autorité et s'étant rendue à Zürich le 6 décembre 2022 pour se faire ausculter.

Il appartiendra donc au commissaire de police de s'assurer que le laissez-passer en faveur de l'intéressée a été concrètement délivré s'il entend ordonner sa détention sur la base de l'art. 77 LEI.

14.         Partant, il y a lieu d'annuler l'ordre de mise en détention administrative de Mme A______ pour une durée de soixante jours et de prononcer sa mise en liberté immédiate.

15.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à Mme A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             annule l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 4 juillet 2023 à l’encontre de Madame A______ pour une durée de soixante jours ;

2.             lève la détention de Madame A______ et ordonne sa mise en liberté immédiate ;

3.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les dix jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Madame A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le 7 juillet 2023

 

La greffière