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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/542/2023

JTAPI/209/2023 du 22.02.2023 ( MC ) , ADMIS

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION;MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS)
Normes : LEI.79; LEI.80.al6; LEI.76.al1.letb.ch1; LEI.75.al1.leth; LEI.81.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/542/2023 MC

JTAPI/209/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 22 février 2023

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Pierluca DEGNI, avocat

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


 

EN FAIT

1.             M. A______ (aussi connu sous d'autres identités, dont celle de B______, né le ______ 2000), né le ______ 1993 et originaire d'Algérie, mais dépourvu de document de voyage, a déposé le 6 décembre 2019 une demande d'asile en Suisse, laquelle a été radiée ensuite de la disparition de l'intéressé. Le transfert de M. A______, d'Allemagne en Suisse, dans le cadre des Accords Dublin, a été effectué le 11 août 2020.

2.             Entre le 12 juin 2020 et le 28 mai 2021, l'intéressé a été condamné six fois, pour entrée illégale, faux dans les certificats, opposition aux actes de l'autorité, contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121), vol (au sens de l'art. 139 ch. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0), recel (au sens de l'art. 160 ch. 1 al. 1 CP), utilisation frauduleuse d'un ordinateur et non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (en raison de la violation de l'interdiction de pénétrer dans le canton de Genève prononcée par le commissaire de police le 25 septembre 2020 pour une durée de douze mois).

3.             Parmi ces condamnations figure celle prononcée par le Tribunal de police du canton de Genève le 24 février 2021, assortie d'une mesure d'expulsion du territoire suisse pendant une durée de cinq ans.

4.             Par jugement du 29 novembre 2021, le Tribunal d'application des peines et des mesures a ordonné la libération conditionnelle de M. A______ avec effet au jour de son renvoi effectif de Suisse, mais au plus tôt le 10 décembre 2021, et lui a imposé, au titre de règle de conduite, de ne pas s'opposer, respectivement de collaborer avec les autorités compétentes pour quitter le territoire helvétique et de ne plus y revenir.

5.             Par courrier du 2 décembre 2021, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : l'OCPM) a informé M. A______ du fait que son refoulement, faute de titre de séjour en France, devrait être effectué à destination de son pays d'origine et que, dès lors, il était dans son intérêt de procéder rapidement à toutes les démarches utiles afin d'être en possession d'un passeport ou d'un laissez-passer. Le contenu de ce courrier lui a été encore rappelé le 24 février 2022, en réponse à une correspondance de l'intéressé, à teneur de laquelle il réaffirmait sa volonté de se rendre en France.

6.             M. A______ n'a fourni aucun document de voyage aux autorités chargées de l'exécution de la mesure d'expulsion prononcée à son encontre.

7.             La demande de soutien à l'exécution du renvoi initiée auprès du secrétariat d'État aux migrations (ci-après : le SEM) en mars 2021 a abouti à l'identification de l'intéressé par les autorités algériennes en mai 2022. Selon les informations transmises par le SEM, M. A______ devait encore être présenté aux autorités algériennes dans le cadre d'un entretien consulaire, préalablement à la délivrance d'un laissez-passer. L'intéressé s'étant acquitté de ses amendes, le service d'application des peines et mesures a ordonné sa levée d'écrou le 30 juin 2022.

8.             M. A______ a alors été remis entre les mains des services de police en vue de son refoulement.

9.             Entendu le même jour par l'OCPM, l'intéressé s'est vu notifier une décision de non-report d'expulsion judiciaire, après s'être exprimé à cet égard.

10.         Le 30 juin 2022 toujours, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de quatre mois, retenant comme base de la détention le fait qu'il avait été condamné à plusieurs reprises pour des infractions constitutives de crime et que son dossier permettait de retenir un risque de soustraction à son renvoi.

Cette décision mentionnait par ailleurs qu'en raison de la longue liste d'attente sur laquelle figuraient les personnes à rapatrier en Algérie ainsi que du fait qu'il n'y aurait pas d'entretien consulaire au mois de juillet 2022, l'intéressé ne pourrait être convoqué à un « Counselling » avant le mois d'août 2022. Ensuite de cet entretien consulaire, une place sur un vol à destination d'Alger pourrait être réservée moyennant un délai de quatre semaines.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi en Algérie.

11.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour.

12.         Entendu le 1er juillet 2022 par le tribunal, M. A______ a déclaré qu’il avait quitté l’Algérie seize ans auparavant et qu’il avait depuis lors vécu en Europe. Il avait quitté son pays parce qu’il avait des problèmes avec sa mère et parce qu’il ne connaissait pas son père. C’était pour cette raison qu’il ne voulait pas retourner en Algérie. La récente période de détention qu’il avait effectuée était la première et il souhaitait que le tribunal lui offre une chance. Il souhaitait se rendre en France mais il était vrai qu’il n’avait pas de titre de séjour de ce pays. Il avait travaillé en France en tant que coiffeur et avait travaillé durant sa détention aussi bien en cuisine qu’en buanderie.

La représentante du commissaire de police a indiqué que le « Counselling » était une procédure propre aux renvois à destination de l’Algérie : malgré la reconnaissance de la personne concernée en tant que ressortissante algérienne, il était encore nécessaire par la suite de procéder à cet entretien avec la représentation algérienne en Suisse. Dans la majorité des cas, cet entretien ne faisait pas obstacle à la délivrance ultérieure d’un laissez-passer. Elle a remis au tribunal copie du procès-verbal de l’entretien qui s’était déroulé le 28 juin 2022 à la BMR à la police, dont il ressortait que M. A______ avait annoncé qu’il refuserait de prendre son vol.

13.         Par jugement du 1er juillet 2022 (JTAPI/1______/2022), le tribunal a confirmé l’ordre de mise en détention administrative pour une durée de quatre mois, soit jusqu'au 29 octobre 2022 sur la base des art. 76 al. 1 let. b ch.1 LEI, renvoyant à l'art. 75 al. 1 let. h LEI.

M. A______ avait été condamné pénalement notamment pour recel et vol, infractions constitutives de crime et faisait par ailleurs l’objet d’une expulsion judiciaire prononcée par le Tribunal de police le 24 février 2021. Ainsi, les conditions de sa détention au sens des dispositions susmentionnées étaient réunies quant au principe.

La position défendue par l'intéressé qui estimait que sa détention devait être levée ne pouvait être suivie, dès lors que même si l’on admettait qu’il existait actuellement au sein des autorités algériennes une politique consistant à refuser le retour des ressortissants de ce pays qui ne disposaient pas de documents d’identité, ce n’était pas cet aspect qui était déterminant dans le cas d’espèce, mais la possibilité que les autorités algériennes délivrent un laissez-passer après l’entretien qui devaient avoir lieu, en août 2022, entre elles et M. A______. Or, à ce sujet, ce dernier se contentait d’alléguer, sans le rendre vraisemblable, que la probabilité que cet entretien aboutisse au refus d’un laissez-passer serait élevée. Le dossier ne donnait aucune indication dans ce sens, étant relevé que le commissaire de police soutenait exactement le contraire. Par conséquent, il n’y avait pas lieu à ce stade de considérer que l’exécution de l’expulsion de M. A______ serait impossible au sens de l’art. 80 al. 6 let. a LEI.

S’agissant de la nature de la mesure décidée par le commissaire de police, on ne pouvait considérer qu’une mesure moins incisive que la détention administrative permettrait de s’assurer de la présence de M. A______ aux moments-clés de la procédure d’expulsion, soit notamment lors du « Counselling » prévu au mois d’août 2022. À cet égard, le risque que M. A______ ne soit pas atteignable à ce moment-là devait absolument être exclu, compte tenu des difficultés propre à cette procédure et de la rigueur avec laquelle les autorités algériennes l’imposaient aux autorités suisses.

M. A______ soutenait par ailleurs que les autorités suisses n’auraient pas fait preuve de suffisamment de diligence pour faire avancer la procédure en vue de l’exécution de l’expulsion, mais il découlait des informations fournies par le SEM que c’était en réalité les autorités algériennes qui posaient des exigences telles que cette procédure s’en trouvait significativement ralentie.

Enfin, concernant la durée de détention de quatre mois décidée par le commissaire de police elle n’apparaissait pas en soi disproportionnée eu égard à l’intérêt public à pouvoir exécuter l’expulsion de M. A______. Elle paraissait en outre adaptée aux circonstances de la cause, puisque cette expulsion impliquait plusieurs étapes, à savoir tout d’abord le counselling du mois d’août 2022 (délai d’environ deux mois), puis la délivrance d’un laissez-passer (délai de quatre semaines) et encore la réservation d’un vol (délai d’une à deux ou trois semaines).

14.         Par requête motivée du 18 octobre 2022, l’OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de quatre mois.

M. A______ avait initié une procédure d'asile le 4 août 2022, de sorte que l'audition consulaire prévue le 14 septembre 2022 avec l'Algérie avait été annulée. Une audition entre le SEM et M. A______ serait programmée dans un délai de quatre semaines.

15.         Bien que dûment convoqué, M. A______ ne s'est pas présenté à l'audience du 25 octobre 2022 devant le tribunal.

Son avocate a expliqué que son client lui avait indiqué avoir refusé de monter à bord du fourgon devant le conduire de Zurich à Genève en vue de l'audience dès lors qu'il ne pouvait pas supporter le trajet en fourgon en raison de ses douleurs au genou. M. A______ s'opposait à la prolongation de sa détention administrative, et se plaignait des conditions de sa détention à Zurich, où il ne recevait pas les soins nécessaires contre ses douleurs au genou. Il lui avait confirmé avoir déposé une demande d'asile auprès du SEM, sans lui donner de plus amples informations à ce sujet.

La représentante de l'OCPM a confirmé que M. A______ avait déposé une demande d'asile le 4 juillet 2022. À ce sujet, le SEM avait informé l'OCPM le 11 octobre 2022 qu'il procèderait à l'audition de l'intéressé d'ici environ quatre semaines. À sa connaissance, M. A______ n'avait pas sollicité de mesures provisionnelles. Cela étant, le SEM avait demandé à l'OCPM de surseoir à l'exécution du renvoi de M. A______ dans l'attente de sa décision. Selon les arguments et les éléments qu'avaient produits M. A______, l'instruction de sa demande d'asile prendrait plus ou moins de temps. Dans l'hypothèse où sa demande serait peu ou mal motivée, la décision du SEM pourrait intervenir dans le mois suivant son audition. L'entretien avec les autorités consulaires algériennes avait dû être annulé compte tenu de la procédure d'asile en cours. Dans l'hypothèse où la décision du SEM serait négative, les autorités genevoises devraient à nouveau organiser avec le SEM un rendez-vous entre l'intéressé et les autorités de son pays afin d'obtenir leur aval quant à son rapatriement puis, une fois le vol réservé, le laissez-passer : il était extrêmement rare que les autorités algériennes refusent un laissez-passer à leurs ressortissants dépourvus de documents d'identité. Cela était peut-être arrivé à une occasion.

Pour le surplus, la représentante de l'OCPM a conclu à l'admission de la demande de prolongation telle que formulée le 18 octobre 2022.

Le conseil de M. A______ a conclu au rejet de la demande de prolongation de sa détention et en a sollicité la levée immédiate. Premièrement, les conditions de sa détention ne respectaient pas la législation en vigueur en tant qu'il ne recevait pas les soins dont il avait besoin au sein de l'établissement de détention. De plus, il apparaissait que l'exécution de son renvoi était impossible. En effet, il existait un risque certain que les autorités consulaires algériennes refusent de délivrer le laissez-passer nécessaire. Par ailleurs, le maintien de son client en détention était disproportionné compte tenu notamment de la procédure d'asile en cours. En effet, il ne pouvait être exclu à ce stade que sa demande d'asile serait admise. Or si tel ne devait pas être le cas, il conviendrait alors de reprendre les démarches auprès des autorités algériennes, dont l'issue était d'autant plus incertaine compte tenu de la demande d'asile de M. A______.

16.         Par jugement JTAPI/2______/2022 du 26 octobre 2022, le tribunal a prolongé la détention administrative de l'intéressé pour une durée de quatre mois, soit jusqu'au 28 février 2023.

Il a notamment retenu que rien n'indiquait que le renvoi de M. A______ serait impossible pour des motifs d'ordre juridique ou matériel (art. 80 al. 6 LEI). D'une part, la décision prononçant l'expulsion était entrée en force. D'autre part, l'argument de M. A______ selon lequel la possibilité qu’un laissez-passer lui soit refusé serait significative au motif qu’actuellement l’Algérie refuserait de laisser rentrer sur son territoire ses ressortissants qui ne disposaient pas de documents d’identité avait déjà été examiné et écarté par le tribunal dans son jugement du 1er juillet 2022. Sans nouvelles indications déterminantes de la part de l'intéressé à cet égard, il n'y serait pas revenu.

17.         Le 23 novembre 2022, la demande d'asile déposée par l'intéressé a été rejetée par le SEM et son renvoi de Suisse a été ordonné.

Cette décision est entrée en force le 7 décembre 2022.

18.         Par requête motivée du 16 février 2023, l'OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de quatre mois.

L'audition consulaire avec les autorités algériennes du 14 septembre 2022 ayant été annulée en raison de la procédure d'asile de M. A______, l'intéressé sera présenté aux prochaines auditions consulaires de l'Algérie.

19.         Devant le tribunal, lors de l'audience de ce jour, M. A______ a déclaré ne pas être d’accord d’être renvoyé en Algérie car il n’y avait personne, sa mère étant décédée un mois auparavant. Il savait ne pas être autorisé à résider en Suisse et souhaitait se rendre en France, même s’il reconnaissait ne pas non plus être autorisé à séjourner dans ce pays. Il avait interpelé l’OCPM et le consulat afin de pouvoir repartir début janvier pour se rendre auprès de sa mère qui était dans le coma ; son frère avait été dans l’incapacité de récupérer son passeport qui se trouvait en Turquie.

La représentante de l’OCPM a produit diverses pièces, notamment un échange de courriels avec le SEM afin de pouvoir présenter M. A______ aux autorités algériennes le 21 décembre 2022, ce qui n'avait pas pu être fait, et un courriel de l’OCPM indiquant que M. A______ souhaitait repartir en Algérie en janvier 2022. Selon les informations obtenues du SEM, il y avait actuellement cent nontante-trois candidats devant être auditionnés par les autorités algériennes, qui n'en recevaient que dix à la fois et ce une fois par mois, étant précisé que l'audition du mois de février 2023 avait été annulée. Si M. A______ indiquait aux autorités algériennes être d'accord de repartir en Algérie, cela pourrait accélérer le processus en vue de la délivrance d'un laissez-passer. Elle a conclu à l’admission de la demande de prolongation.

Le conseil de M. A______ a confirmé que plus aucune procédure n’était en cours. Elle a demandé la mise en liberté immédiate de son client, subsidiairement à ce qu'il soit transféré dans un des deux établissements genevois étant donné que dans son lieu de détention zurichois il ne pouvait recevoir aucun soin alors qu'il présentait une problématique au genoux.

La représentante de l’OPCM a alors encore précisé, sur question du tribunal qu’il y avait un service médical au centre de détention zurichois et que, selon un rapport médical qui lui avait été transmis, M. A______ ne présentait pas de pathologie faisant obstacle à son renvoi.

20.         Il ressort des différentes pièces du dossier que M. A______ n'a aucun lieu de résidence fixe en Suisse, ni aucun lien particulier avec ce pays, ni non plus aucune source légale de revenu.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour prolonger la détention administrative en vue de renvoi ou d'expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. e de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             S'il entend demander la prolongation de la détention en vue du renvoi, l'OCPM doit saisir le tribunal d'une requête écrite et motivée dans ce sens au plus tard huit jours ouvrables avant l’expiration de la détention (art. 7 al. 1 let. d et 8 al. 4 LaLEtr).

3.             En l'occurrence, le 16 février 2023, le tribunal a été valablement saisi, dans le délai légal précité, d'une requête de l'OCPM tendant à la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de quatre mois.

4.             Statuant ce jour, le tribunal respecte le délai fixé par l'art. 9 al. 4 LaLEtr, qui stipule qu'il lui incombe de statuer dans les huit jours ouvrables qui suivent sa saisine, étant précisé que, le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l’étranger.

5.             La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (cf. ATF 135 II 105 consid. 2.2.1) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.1 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.1).

6.             Selon l'art. 79 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), la détention ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l'autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l'obtention des documents nécessaires au départ auprès d'un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI). Concrètement, dans ces deux circonstances, la détention administrative peut donc atteindre dix-huit mois (cf. not. ATA/848/2014 du 31 octobre 2014 ; ATA/3/2013 du 3 janvier 2013 ; ATA/40/2012 du 19 janvier 2012 ; ATA/518/2011 du 23 août 2011).

7.             Comme toute mesure étatique, la détention administrative en matière de droit des étrangers doit respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst. et art. 80 et 96 LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Elle doit non seulement apparaître proportionnée dans sa durée, envisagée dans son ensemble (ATF 145 II 313 consid. 3.5 ; 140 II 409 consid. 2.1 ; 135 II 105 consid. 2.2.1), mais il convient également d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si elle constitue une mesure appropriée et nécessaire en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi ou d'une expulsion (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 143 I 147 consid. 3.1 ; 142 I 135 consid. 4.1 ; 134 I 92 consid. 2.3 , 133 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_672/2019 du 22 août 2019 consid. 5.4 ; 2C_263/2019 du 27 juin 2019 consid. 4.1 ; 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi ou de l'expulsion de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées ; cf. aussi ATF 130 II 425 consid. 5.2).

8.             Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEI ; « principe de célérité ou de diligence »). Il s'agit d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/88/2010 du 9 février 2010 ; ATA/644/2009 du 8 décembre 2009 et les références citées).

9.             Il incombe à l'autorité compétente, en l'occurrence à l'OCPM, s'agissant de demander la prolongation d'une détention administrative en vue de renvoi (art. 7 al. 1 let. d LaLEtr) d'établir par la production de toutes pièces utiles, que les conditions d'une mise en détention ou d'une prolongation de celle-ci sont réalisées au regard de toutes les conditions légales à prendre en considération (ATA/616/2016 du 18 juillet 2016).

10.         Selon la jurisprudence, le simple fait que les autorités chargées du refoulement des étrangers se heurtent à des difficultés et risquent de ne pouvoir le faire en temps utile n'est pas suffisant pour lever la détention. Sous l'angle du principe de la proportionnalité, la détention n'est inadmissible que si des raisons sérieuses laissent penser que la mesure d'éloignement ne pourra certainement pas intervenir avant la fin du délai légal de détention (ATF 122 II 148 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.584/2003, 2A.606/2003 du 8 janvier 2004 consid. 6 ; 2A.549/2003 du 3 décembre 2003 consid. 2.2 ; Grégor CHATTON/Laurent MERZ in Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE [éd.], Code annoté de droit des migrations, vol. II : LEtr, 2017, n. 5 p. 780).

11.         En l'espèce, il n'y a pas lieu d'examiner à nouveau le motif sur lequel repose la détention administrative de M. A______, la légalité de cette dernière ayant déjà été examinée et admise par le tribunal dans son jugement du 1er juillet 2022, sans qu'un changement quelconque des circonstances pertinentes ne soit intervenu tant depuis cette date que depuis le jugement du tribunal du 26 octobre 2022 confirmant la détention dans le cadre de la première demande de prolongation de celle-ci. Par conséquent, sur ce point, il sera renvoyé aux motifs du jugement du 1er juillet 2022.

L'assurance de l'exécution du renvoi de l’intéressé répond par ailleurs toujours à un intérêt public certain et aucune autre mesure moins incisive ne peut être envisagée pour garantir sa présence jusqu'à l'exécution de son refoulement, au vu notamment de son refus réitéré à de nombreuses reprises d’être renvoyé en Algérie, ce jour encore devant le tribunal. Il n’a par ailleurs ni lieu de résidence ni attaches en Suisse ; par conséquent, il est manifeste que s'il devait être remis en liberté, il chercherait à rester en Suisse, nonobstant son obligation de quitter le territoire ou à se rendre en France, pays dans lequel il n’est pas non plus autorisé à résider et souhaite toutefois se rendre.

12.         Comme retenu par le tribunal dans son jugement du 26 octobre 2022, lors de l'examen de l'ordre de mise en détention le 1er juillet 2022, le tribunal a confirmé que le principe de célérité avait été respecté dès lors que le ralentissement de la procédure résultait des exigences imposées par les autorités algériennes. Une date pour un entretien consulaire avait pu être fixée au 14 septembre 2022, laquelle avait toutefois dû être annulée en raison de la procédure d'asile initiée par l'intéressé.

Ensuite, suite au dépôt de sa demande d’asile en août 2022, le renvoi a dû être suspendu. Depuis lors, le SEM a rendu une décision de non-entrée en matière sur la demande d’asile le 23 novembre 2023, décision entrée en force le 7 décembre 2023. Suite à cela, les autorités ont tenté de faire présenter l’intéressé aux autorités algériennes pour un « Counselling » en décembre 2022, ce qui n’a finalement pas pu être mis en place. Elles sont maintenant dans l’attente d’une date pour une présentation. Aucune autre démarche ne peut être actuellement entreprise. Elles ont donc agi avec la diligence et la célérité qui pouvaient être attendue d’elles.

13.         Enfin, la durée de la prolongation de la détention sollicitée par l'OCPM (quatre mois) respecte le cadre légal fixé par l'art. 79 LEI, étant précisé que la détention administrative de l’intéressé, même après cette prolongation, n’aura de loin pas atteint la durée maximale possible au sens de cette disposition. Elle permettra aux autorités de présenter M. A______ à un « Counselling » puis de réserver une place sur un vol une fois le laissez-passer obtenu. Si, comme il le laisse entendre, M. A______ s’opposait à son renvoi, les autorités auraient encore le temps d’organiser un vol de niveau supérieur ou solliciter la prolongation de la détention. Au surplus, si l’intéressé collaborait à son départ, son renvoi aurait déjà pu être effectué.

14.         M. A______ fait valoir que son renvoi serait impossible car il y aurait de fortes chances que les autorités algériennes ne lui délivrent pas de laissez-passer.

15.         Selon l'art. 80 al. 6 LEI, la détention est levée lorsque le motif de la détention n'existe plus ou que l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles (let. a), lorsque la demande de levée de détention est admise (let. b) ou lorsque la personne détenue doit subir une mesure ou une peine privative de liberté (let. c).

16.         En l’espèce, cet argument a déjà été analysé par le tribunal dans son jugement du 26 octobre 2022. Il avait retenu qu’à ce jour rien n'indiquait que le renvoi de
M. A______ serait impossible pour des motifs d'ordre juridique ou matériel (art. 80 al. 6 LEI). D'une part, la décision prononçant l'expulsion était entrée en force. D'autre part, l'argument de M. A______ selon lequel la possibilité qu’un laissez-passer lui soit refusé serait significative - au motif qu’actuellement l’Algérie refuserait de laisser rentrer sur son territoire ses ressortissants qui ne disposaient pas de documents d’identité - avait déjà été examiné et écarté par le tribunal dans son jugement du 1er juillet 2022.

A ce jour, force est de constater que M. A______ n’a apporté aucun élément nouveau à l’appui de son argument démontrant cette impossibilité à obtenir un laissez-passer. Dès lors, le tribunal confirmera que le renvoi n’apparait pas impossible.

17.         M. A______ critique enfin ses conditions de détention au sein de l'établissement de détention administrative de l'aéroport de Zürich et demande à pouvoir être transféré à Genève.

18.         Selon l'art. 81 al. 2 LEI, la détention a lieu dans un établissement servant à l'exécution de la détention en phase préparatoire, de la détention en vue du renvoi ou de l’expulsion ou de la détention pour insoumission. Si ce n’est exceptionnellement pas possible, notamment pour des raisons de capacités, les étrangers doivent être détenus séparément des personnes en détention préventive ou purgeant une peine.

19.         En l'occurrence, M. A______ allègue ne pas recevoir les soins requis pour soulager ses douleurs au genou car il n’aurait accès à aucun soin dans le centre de détention de Zürich.

Or, comme la déjà relevée le tribunal dans son dernier jugement, M. A______ n'apporte aucun élément qui démontrerait que l'établissement zurichois de détention administrative contreviendrait aux dispositions du concordat sur l’exécution de la détention administrative à l’égard des étrangers du 4 juillet 1996 (CEDA - F 2 12) justifiant sa mise en liberté ou son tranfert. Par ailleurs, la représentante du commissaire de police a indiqué ce jour en audience qu’un centre médical existait et avoir été en possession d’un rapport médical émanant dudit centre concernant l’intéressé.

20.         Au vu de ce qui précède, la demande de prolongation de la détention administrative de M. A______ sera admise pour une durée de quatre mois, soit jusqu'au 27 juin 2023 inclus.

21.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et à l’OCPM. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


 

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable la demande de prolongation de la détention administrative de Monsieur A______ formée le 16 février 2023 par l’office cantonal de la population et des migrations ;

2.             prolonge la détention administrative de Monsieur A______ pour une durée de quatre mois, soit jusqu'au 27 juin 2023 inclus ;

3.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les dix jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, à l’office cantonal de la population et des migrations et au secrétariat d'État aux migrations.

 

Genève, le

 

La greffière